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(ex-Tout le Pouvoir aux Travailleurs & ex-Unité Rouge)

Vive la glorieuse dictature du prolétariat en URSS sous la direction du Parti Communiste (bolchévik) ayant à sa tête le camarade Staline

L’EXPÉRIENCE SOCIALISTE SOVIÉTIQUE ET LA « QUESTION DE STALINE » SONT DES QUESTIONS D’IMPORTANCE MONDIALE

La période des trente années de la construction du socialisme en URSS représente une étape décisive dans l’histoire du mouvement communiste. Pendant cette période, qui a vu la première expérience prolongée de la dictature du prolétariat, l’Histoire est passée du socialisme dans un seul pays au socialisme, système mondial. La ligne léniniste-staliniste est un maillon de la chaîne de l’histoire du communisme. Il est impossible de comprendre et d’appliquer correctement les enseignements de Mao Tsé-toung sans avoir fait le bilan des aspects positifs et des aspects négatifs de la dictature du prolétariat en URSS, de 1923 à 1953.

La « question de Staline » est un enjeu fondamental de la lutte entre marxisme-léninisme et révisionnisme. Staline représente un point de démarcation entre les deux lignes. La ligne rouge Marx, Engels, Lénine, Staline, Mao Tsé-toung, Enver Hoxha s’oppose à la ligne noire Proudhon, Bernstein, Kautsky, Trotski, Boukharine, Tito, Khrouchtchev, Liou Chao-chi, Brejnev. C’est la lutte du communisme contre le capitalisme et le social-fascisme. La politique de Staline a été, et son enseignement demeure, un rempart formidable opposé à la contre-révolution mondiale.

A l’intérieur même du mouvement marxiste-léniniste, certains camarades hésitent encore à prendre franchement position. Cette instabilité dénote la faiblesse idéologique du mouvement. Il s’agit d’intellectuels petits-bourgeois chez qui la fermeté bolchévique de Staline met à l’épreuve une conception du monde flottante, une attitude hésitante devant la dictature du prolétariat. En même temps, les « exigences » révolutionnaristes de « pureté » absolue, le refus idéaliste de reconnaître les limites objectives de toute époque historique, constituent un terrain réceptif à la démagogie trotskiste, « de gauche » en apparence, de droite en réalité.

Nos propres progrès politiques, la construction d’une ligne communiste et la lutte contre l’opportunisme, nous feront progressivement mieux comprendre l’importance et la grandeur de l’expérience soviétique réalisée sous la direction de Staline. Les bolchéviks révolutionnaires soviétiques ont dit : « Staline est un exemple pour les révolutionnaires, un avertissement pour les hésitants et une terreur pour les ennemis ».

La question du bilan de la direction staliniste

Un bilan communiste s’appuie sur l’idéologie marxiste-léniniste et sur la méthode matérialiste-dialectique.

« La question de Staline » est une question de principe pour tous les communistes. Le camarade Staline, pendant toute l’époque où il a dirigé la dictature du prolétariat en URSS et le mouvement communiste international, a été la cible principale des attaques de la bourgeoisie. Trotskistes, zinoviévistes, boukhariniens, khrouchtchéviens, impérialistes, fascistes de l’intérieur et de l’extérieur, n’ont pas cessé et ne cessent pas de lancer des attaques haineuses contre la grande figure de Staline. Il est naturel que la lutte contre le plus ferme artisan de la cause du communisme mondial ait été pendant trente ans le point de regroupement de tous les contre-révolutionnaires. Aujourd’hui encore, les chacals trotskistes et leurs successeurs et complices khrouchtchéviens essaient de salir le nom immortel du camarade Staline.

Le devoir impératif de tous les communistes est de défendre avec fermeté l’expérience de la dictature du prolétariat en URSS, dont Staline fut le dirigeant principal. Attaquer l’œuvre féconde de Staline ou se détourner d’elle est le fait de contre-révolutionnaires. « Qui ne la défend pas, dit le camarade Enver Hoxha, est un opportuniste et un lâche ». Nous devons suivre et appliquer les justes enseignements de Staline, et défendre ce que l’ennemi attaque. Le respect et l’attachement que nous lui portons nous commandent de porter haut l’honneur de celui qui guida courageusement le grand peuple soviétique dans l’édification du socialisme, qui dirigea le mouvement communiste international, menant à la victoire la lutte des peuples contre le fascisme, le successeur et le continuateur de LENINE, le camarade STALINE.

Le bilan de l’expérience se fonde sur le matérialisme historique et le matérialisme dialectique.

Pour suivre une juste méthode, nous devons :

1. Délimiter les étapes de la construction du socialisme en URSS et, pour chaque étape, définir la contradiction principale qui la caractérisait ;

2. Analyser les deux lignes qui se sont opposées sur chacune de ces contradictions principales, les tâches qu’en conséquence se fixaient les deux lignes et la manière dont ces furent lignes suivies, ainsi que les résultats objectifs de leur application ;

3. Défendre la ligne marxiste-léniniste, critiquer la ligne de droite et la ligne ultra-« gauche ».

Plusieurs facteurs, les uns objectifs, les autres subjectifs, limitent notre travail.

La connaissance que nous pouvons avoir de la dictature du prolétariat en URSS de 1923 à 1953 suffit à fonder une position politique et idéologique. Elle ne suffit pas aux besoins d’une analyse scientifique complète ni à apporter des réponses à un grand nombre de questions secondaires. L’approfondissement du marxisme-léninisme qu’a réalisé la dictature du prolétariat en Chine et en Albanie confirme les aspects positifs du socialisme en URSS, comme il en éclaire certains aspects négatifs. Mais la réponse définitive à toutes les questions encore en suspens sera apportée par la seconde révolution socialiste que la classe ouvrière de l’Union soviétique mènera contre le capitalisme khrouchtchévien. La pratique révolutionnaire de ces communistes renouera avec le stalinisme et en donnera une nouvelle application vivante, à la lumière de la pensée-maotsétoung. C’est à ces camarades que revient le dernier mot.

D’autre part, nous nous bornons actuellement à l’aspect principal de la direction staliniste : l’édification du socialisme en URSS. La place importante que Staline a tenue dans le mouvement communiste international pourra être estimée correctement aussitôt que les nouveaux Partis communistes marxistes-léninistes feront le bilan de l’histoire du communisme dans leur pays. L’activité de la IIIe Internationale Communiste, dans ce qu’elle a eu de positif et de négatif, relève avant tout de la responsabilité de chacun des Partis qui la composaient. C’est là l’aspect principal de la question. La construction de ces Partis, leur activité théorique et pratique, leurs luttes révolutionnaires contre le fascisme et pour le socialisme, feront en premier lieu l’objet de bilans nationaux. Établir ce bilan d’une façon scientifique et approfondie est une des tâches de la construction du Parti marxiste-léniniste authentique. Il constituera une ligne de démarcation importante avec le révisionnisme moderne et le néo-révisionnisme.

La méthode matérialiste-dialectique du bilan communiste est la seule méthode scientifique possible. Elle seule permet d’analyser l’existence et la lutte des deux lignes et de prendre parti pour la ligne communiste contre le révisionnisme. Elle seule permet aussi d’avoir une position juste sur l’aspect positif comme sur l’aspect négatif de l’expérience historique. Le bilan communiste relève les erreurs commises, afin que le Parti puisse à l’avenir les éviter. Mais les erreurs commises par la ligne marxiste-léniniste ne peuvent être connues et critiquées que sur la base d’un tel bilan. Critiquer des erreurs de la ligne staliniste ou de son application, c’est résoudre des contradictions au sein du peuple, des contradictions entre communistes. Toute autre critique est sans principe et renforce le camp du capitalisme. L’exercice correct de la critique suppose donc une idéologie révolutionnaire basée sur le marxisme, le léninisme, la pensée-maotsétoung. Ceux qui s’écartent d’un travail bolchévik, scientifique, nécessairement tombent dans le révisionnisme, inévitablement dégénèrent dans la trahison trotskiste. Il n’y a que deux conceptions du monde, la conception révolutionnaire marxiste-léniniste et la conception bourgeoise impérialiste (voir Annexe 1).

I. L’ÉDIFICATION DU SOCIALISME, LA CONSTRUCTION DE L’INFRASTRUCTURE SOCIALISTE, QUESTION PRINCIPALE (1923-1934)

A. INTRODUCTION

« Entre la société capitaliste et la société communiste, (dit) Marx, se place la période de transformation révolutionnaire de celle-là en celle-ci. A quoi correspond une période de transition politique où l’Etat ne saurait être autre chose que la dictature révolutionnaire du prolétariat » (Lénine, L’Etat et la Révolution, p. 106). A la suite de cet enseignement de Marx, Lénine ajoute : « Celui-là seul est un marxiste qui étend la reconnaissance de la lutte de classes jusqu’à la reconnaissance de la dictature du prolétariat » (idem, p. 41).

Quelle est la fonction principale de la dictature du prolétariat ? « … la dictature du prolétariat, c’est-à-dire l’organisation de l’avant-garde des opprimés en classe dominante pour mater les oppresseurs, ne peut se borner à un simple élargissement de la démocratie. En même temps qu’un élargissement considérable de la démocratie, devenue pour la première fois démocratie pour les pauvres, démocratie pour le peuple et non pour les riches, la dictature du prolétariat apporte une série de restrictions à la liberté pour les oppresseurs, les exploiteurs, les capitalistes. Ceux-là, nous devons les mater afin de libérer l’humanité de l’esclavage salarié ; il faut briser la résistance par la force ; et il est évident que, là où il y a répression, il y a violence, il n’y a pas de liberté, il n’y a pas de démocratie ». (Idem p. 110).

Staline et le PC(b)US ont poursuivi dans cette voie jusqu’à la prise de pouvoir des révisionnistes. En 1924, Staline définissait les tâches principales de la dictature du prolétariat, en jurant de poursuivre l’œuvre de Lénine :

a) Briser la résistance des grands propriétaires fonciers et des capitalistes renversés et expropriés par la révolution, liquider toutes leurs tentatives de restaurer le pouvoir du Capital ;

b) Organiser l’œuvre de construction en rassemblant tous les travailleurs autour du prolétariat, et orienter ce travail de façon à préparer la liquidation, la suppression des classes ;

c) Armer la révolution, organiser l’armée de la révolution pour la lutte contre les ennemis extérieurs, pour la lutte contre l’impérialisme » (Des principes du léninisme, p. 42).

L’histoire de Staline est celle de l’édification du socialisme en URSS, du prestige énorme acquis par l’URSS dans tous les peuples du monde.

Dès la prise de pouvoir, Lénine avait indiqué les tâches du moment, qui étaient énormes. Il fallait d’abord écraser les capitalistes russes et les agresseurs impérialistes.

« Dans toute révolution socialiste, lorsque le prolétariat a réglé le problème de la prise de pouvoir, et à mesure que s’accomplit, dans ses grandes lignes, la tâche qui consiste à exproprier les expropriateurs et à écraser leur résistance, une tâche essentielle passe inéluctablement au premier plan : réaliser une structure sociale supérieure à celle du capitalisme, c’est-à-dire augmenter la productivité du travail, et, en rapport avec cela (pour cela), organiser le travail sur un mode supérieur…

Et là, il apparaît aussitôt que si quelques jours suffisent pour s’emparer du pouvoir central de l’Etat, si l’on peut, en quelques semaines, réprimer la résistance militaire (et le sabotage) des exploiteurs, même sur les divers points d’un vaste pays, il faut en tout cas (surtout après une guerre aussi pénible et désastreuse) plusieurs années pour donner une solution durable au problème de l’augmentation de la productivité du travail. Il est incontestable que le long effort à fournir est fonction de conditions absolument objectives. L’accroissement de la productivité du travail exige avant tout que soit assurée la base matérielle de la grande industrie, que soit développée la production du combustible, du fer, des machines, des produits chimiques ». (Lénine, t. 27, p. 266).

C’est pourquoi, l’édification du socialisme impliquait en premier lieu l’effort gigantesque de la création de la base économique, le développement des forces productives. Sans économique suffisamment développée, il était impossible de développer des rapports de production socialistes. Cette voie tracée par Lénine allait être poursuive par Staline et le PC(b)US, de façon telle que l’URSS allait en peu de temps devenir un pays fortement industrialisé d’un haut niveau technique et scientifique.

Pendant la guerre civile et la guerre antiimpérialiste, le régime soviétique avait été forcé d’instaurer le communisme de guerre, en vertu de quoi l’État prélevait les excédents agricoles et les redistribuait aux travailleurs. L’alliance des ouvriers et des paysans était fondée sur les nécessités inéluctables créées par la défense militaire.

Après ces trois années de lutte héroïque, les ravages de l’ennemi de classe nationale et internationale avaient plongé la population de l’URSS dans une profonde misère. Le délabrement de l’industrie et la famine étaient à la base d’un grand mécontentement ouvrier et paysan. Sous le mot d’ordre « Les Soviets sans les communistes », les contre-révolutionnaires exploitaient, notamment à Cronstadt, le mécontentement des masses petites-bourgeoises. La tâche primordiale à remplir était de reconstruire l’économie et de créer la base matérielle du socialisme. Le terrain principal de la lutte de classes à cette époque était le terrain de l’économie.

« La productivité du travail, avait dit Lénine, c’est, en dernière analyse, ce qu’il y a de plus important, d’essentiel pour la victoire du nouvel ordre social. Le capitalisme a créé une productivité de travail inconnue sous le servage. Le capitalisme peut être définitivement vaincu et le sera définitivement, parce que le socialisme crée une productivité du travail nouvelle, beaucoup plus élevée ». (La grande initiative, 1919, t. 29, p. 431).

Cette gigantesque tâche dans le domaine économique ne pouvait se réaliser que par un effort de mobilisation idéologique permanente des masses :

« Nous devons nous pénétrer de cet enthousiasme au travail, de cette volonté de travail, de cette opiniâtreté dont dépend désormais le salut le plus prompt des ouvriers et des paysans, le salut de l’économie nationale » (Discours à la séance du Soviet de Moscou, 1920, t. 31, p.

Sous la direction de Staline, le parti avait établi la Nouvelle Économie Politique (NEP), qui créait une base nouvelle à l’alliance des ouvriers et des paysans. La NEP fixait l’impôt en nature et rétablissait la liberté du commerce intérieur. Le but recherché était d’améliorer les conditions de vie des masses, de la paysannerie en particulier, en assurant l’essor de l’agriculture et en encourageant la circulation des marchandises entre la campagne et la ville. Elle permettait une certaine reprise du capitalisme, un recul temporaire qui assurait au pouvoir soviétique l’appui des masses paysannes. Ce recul momentané vers un arrière sûr permettait de mieux sauter par la suite et de poursuivre la construction du socialisme sur une base politique et économique solide.

Quant à la question nationale, le pouvoir soviétique supprima l’oppression d’un peuple par un autre et il aida les peuples autrefois opprimés à rattraper la Russie centrale, aux points de vue économique, politique et culturel. Le Parti et l’Etat combattaient à la fois les nationalismes locaux et surtout le chauvinisme impérialiste grand-russe. La Constitution de 1924 prévoyait l’égalité des nations et la libre adhésion des peuples de l’URSS.

B. LA LUTTE DES BOLCHEVIKS CONTRE L’OPPOSITION TROTSKISTE : LA CONSTRUCTION DU SOCIALISME EN URSS CONTRE LA PRÉTENDUE « RÉVOLUTION PERMANENTE »

La lutte des marxistes-léninistes contre le trotskisme dans les conditions de la dictature du prolétariat prend un tour décisif en 1923. Le trotskisme n’était encore à cette époque qu’une déviation petite-bourgeoise du marxisme. Sa nature idéologique se manifestait clairement dans le refus de tout plan pour la construction de l’économie socialiste et dans la volonté acharnée de rétablir les fractions dans le Parti, afin de saper la direction bolchévique et les fondements politiques de la dictature du prolétariat.

Dans « Cours nouveau » (1923), Trotski annonçait ses thèses défaitistes en mettant l’accent sur le retard économique de l’URSS et l’absence de révolution en Europe. A cette époque il n’en tirait pas encore de positions concrètes, sinon que le bureaucratisme était le « danger principal » : c’est ce prétexte qu’il employait pour défendre le fractionnisme fidèle à une ligne qu’il avait opposée à Lénine depuis l’époque de Que Faire ?

Aujourd’hui, il cherchait appui d’une façon opportuniste auprès des étudiants et de la jeunesse, « baromètre du Parti » (p. 17), contre la direction staliniste et les cadres bolchéviks. Il faisait aussi savoir qu’il suivait toujours sa ligne dite de la « révolution permanente », refusant de critiquer ce qu’il écrivit à ce sujet « en 1904, 1905, 1906 et plus tard » (p. 43) et soutenant effrontément que la « révolution permanente conduisait directement au léninisme et en particulier aux thèses d’avril 1917 » (Ibid). Ensuite, il osait soutenir que les alliances de classes telles qu’elles furent fixées par Lénine, « ont une grande importance pratique, mais n’ont pas un caractère de principe … par suite du manque d’expérience nécessaire et de sa généralisation » (p.48). Comme toute thèse opportuniste, ces propositions praticistes s’accompagnaient de la démagogie la plus plate : « Ce que le paysan nous demande, ce n’est pas de répéter une formule historique juste des rapports de classe (« soudure » de la ville à la campagne, etc), mais de lui fournir des clous, de la toile et des allumettes à bon marché (Ibid). Les bolchéviks étaient d’accord pour les allumettes à bon marché, mais ils refusaient surtout de servir aux paysans la formule historique fausse de Trotski.

Staline comprit que la lutte contre le trotskisme était une lutte de principe d’une importance primordiale : « Sans avoir battu le trotskisme, il est impossible de vaincre dans les conditions de la NEP, il est impossible de transformer la Russie d’aujourd’hui en Russie socialiste ». (Histoire du PC(b) de l’URSS, p. 253).

Immédiatement il baissa la herse entre marxisme et opportunisme. Ce furent Des principes du léninisme (1924). Des principes du léninisme sont un ouvrage important de Staline. Ils synthétisent les enseignements principaux de Lénine et représentent sur certains points (notamment le Parti et plus particulièrement les rapports entre le Parti et les masses) un progrès dans la systématisation du marxisme-léninisme. Au point de vue idéologique, ils constituent une affirmation de principe lancée à la face du trotskisme, point de ralliement des opposants vaincus de tout genre qui avaient commencé à poser leurs sapes. Toute lutte idéologique importante commence, du côté des marxistes-léninistes, par un rappel général des principes. Ces principes, au départ systématisation abstraite de la pratique passée, guident la pratique de la lutte à venir et sont à terme le couperet où les opportunistes, par leur pratique, viendront se trancher la gorge. Mais la lutte contre le trotskisme était aussi engagée directement : contre la théorie de la « révolution permanente » (p. 35-38) et pour la théorie du socialisme dans un seul pays (p. 38-40).

La théorie de la « révolution permanente » inspira une trahison en deux étapes.

Pendant la période précédant la Révolution d’Octobre, depuis 1905, Trotski s’était ingénié à défendre le mot d’ordre de révolution socialiste et avait refusé d‘admettre l’alliance avec la paysannerie pour réaliser la première étape de la révolution, la dictature démocratique du prolétariat et de la paysannerie. Il sous-estimait les forces de la révolution : la puissance de l’énergie révolutionnaire des paysans, ainsi que l’aptitude du prolétariat à entraîner la paysannerie à sa suite. La théorie de la « révolution permanente », s’opposait à la théorie léniniste de la dictature du prolétariat, fondée sur l’alliance des classes révolutionnaires. Lénine en démontra la nature semi-menchévique :

« La théorie « originale » de Trotski emprunte aux bolchéviks l’appel au prolétariat pour une lutte révolutionnaire résolue et la conquête du pouvoir politique, et, aux menchéviks, la « négation » du rôle de la paysannerie. La paysannerie se serait différenciée : son rôle révolutionnaire éventuel n’aurait fait que régresser ; une révolution « nationale » serait impossible en Russie ; « nous vivons à l’époque de l’impérialisme », et « l’impérialisme oppose non une nation bourgeoise à l’ancien régime, mais le prolétariat à la nation bourgeoise ».

Voilà un plaisant exemple de la façon dont on peut « jouer sur le mot : impérialisme ! Si, en Russie, le prolétariat s’oppose déjà à la « nation bourgeoise », c’est dire que la Russie est juste à la veille de la révolution socialiste !! Dans ce cas, le mot d’ordre de la « confiscation des terres des grands propriétaires fonciers » (repris par Trotski en 1915 après la conférence de janvier 1912) est faux, et on doit parler, non pas d’un gouvernement « ouvrier révolutionnaire », mais d’un gouvernement « socialiste ouvrier » !! Trotski s’embrouille au point de déclarer que le prolétariat, par sa fermeté, entraînera aussi « des masses populaires non prolétariennes (!) ». Il n’a pas songé que si le prolétariat entraîne les masses non prolétariennes des campagnes à confisquer les terres des grands propriétaires fonciers et s’il renverse la monarchie, ce sera précisément l’achèvement de la « révolution bourgeoise nationale » en Russie, ce sera justement la dictature démocratique révolutionnaire du prolétariat et de la paysannerie «!». (A propos des deux lignes de la révolution, 1915, t. 21, p. 435-436).

La seconde trahison de la révolution à laquelle conduit la théorie de la « révolution permanente », et qui découle du même pessimisme réactionnaire, consiste à soutenir qu’en Russie, pays arriéré, le prolétariat est sans doute capable de prendre le pouvoir, mais qu’il ne saura pas le conserver, si en même temps, la révolution n’éclate pas dans des pays capitalistes avancés. Cette conclusion fut explicitée par Trotski très tôt, et il ne cessa de la confirmer dans la suite.

« Sans l’aide des États européens où le prolétariat exerce le pouvoir, la classe ouvrière russe ne saurait conserver le pouvoir et transformer sa domination passagère en une dictature socialiste durable. On ne saurait en douter un seul moment » (Notre révolution, 1906).

« La seule objection historique tant soit peu concrète au mot d’ordre des États-Unis d’Europe a été formulée dans le Social-Démocrate suisse (organise central des bolchéviks à cette époque) en ces termes : « L’inégalité du développement économique et politique est une loi absolue du capitalisme ». D’où le Social-Démocrate tirait cette conclusion que la victoire du socialisme dans un seul pays est possible et que, par conséquent, il est inutile de conditionner la dictature du prolétariat dans chaque État pris à part, par la formation des États-Unis d’Europe. Que le développement capitaliste des différents pays soit inégal, c’est là une chose absolument indiscutable.

Mais cette inégalité est elle-même très inégale. Le niveau capitaliste de l’Angleterre, de l’Autriche, de l’Allemagne ou de la France n’est pas le même. Mais, comparés à l’Afrique ou à l’Asie, tous ces pays représentent l’« Europe capitaliste, mûre pour la révolution sociale. Qu’aucun pays ne doive « attendre » les autres dans la lutte, voilà une idée élémentaire qu’il est utile et indispensable de répéter pour qu’à l’idée de l’inaction internationale parallèle ne soit pas substituée l’idée de l’inaction internationale expectante. Sans attendre les autres nous commençons et continuons la lutte sur le terrain national, avec l’entière certitude que notre initiative donnera une impulsion à la lutte dans les autres pays ; or, si cela ne devait pas se produire, il n’y a aucun espoir de croire , – l’expérience historique et les considérations théoriques en font foi -, que la Russie révolutionnaire, par exemple, puisse tenir face à l’Europe conservatrice, ou que l’Allemagne socialiste puisse demeurer isolée dans le monde capitaliste ». (Programme de Paix, 1915, rééd. 1924).

La révolution socialiste isolée dans une Russie arriérée serait intenable, parce que les contradictions entre ouvriers et paysans deviendraient antagonistes :

« C’est … dans l’intervalle qui sépare le 9 janvier de la grève d’octobre 1905 que l’auteur arriva à concevoir le développement révolutionnaire de la Russie sous l’aspect qui fut ensuite fixé par la théorie dite de la « révolution permanente ». Cette désignation quelque peu abstruse voulait exprimer que la révolution russe, qui devait d’abord envisager, dans son avenir le plus immédiat, certaines fins bourgeoises, ne pourrait toutefois s’arrêter là.

La révolution ne résoudrait les problèmes bourgeois qui se présenteraient à elle en premier lieu qu’en portant au pouvoir le prolétariat. Et lorsque celui-ci se serait emparé du pouvoir, il ne pourrait s’en tenir aux limites d’une révolution bourgeoise. Tout au contraire et précisément pour assurer sa victoire définitive, l’avant-garde prolétarienne devrait, dès les premiers jours de sa domination, pénétrer profondément dans les domaines interdits de la propriété aussi bien bourgeoise que féodale. Dans ces conditions, elle devrait se heurter à des démonstrations hostiles de la part des groupes bourgeois qui l’auraient soutenue au début de la lutte révolutionnaire, et de la part aussi des masses paysannes dont le concours l’aurait poussée vers le pouvoir. Les intérêts contradictoires qui dominaient la situation d’un gouvernement ouvrier, dans un pays retardataire où l’immense majorité de la population se composait de paysans, ne pourraient aboutir à une solution que sur le plan international, dans l’arène d’une révolution prolétarienne mondiale » (Préface à « 1905 », écrite en 1922).

Ainsi est fondée l’unité de la théorie de la « révolution permanente » : si les paysans ne pouvaient être une classe révolutionnaire pour la prise du pouvoir, ils deviendraient aussi des ennemis du prolétariat après la révolution. Dès lors, il n’y avait pas d’espoir de maintenir le pouvoir prolétarien en Russie, en l’absence de révolution dans les pays capitalistes avancés.

Face à ces théories défaitistes, quelle est la théorie de Lénine et de Staline sur la révolution et la construction du socialisme dans un seul pays ?

La théorie de la construction du socialisme dans un seul pays (fût-il arriéré), se fonde sur la théorie léniniste de l’impérialisme. Sous l’impérialisme, le développement économique et politique des pays capitalistes est inégal et se fait par bonds. Dans ce stade suprême du mode de production capitaliste, les contradictions s’aiguisent dans une lutte acharnée pour les matières premières, les marchés, les sphères d’influence. Le monde est partagé entre les capitalistes, et ce partage est toujours remis en question par les concurrents « ascendants » ; le repartage ne peut se réaliser que par la violence : les guerres sont inévitables. Cette situation affaiblit l’impérialisme : tandis que monte le mouvement révolutionnaire, le front capitaliste peut être rompu par l’un ou l’autre pays, et la victoire du socialisme dans ce(s) pays est possible. La révolution socialiste peut commencer dans un petit nombre de pays, même dans un seul.

C’est ce que l’histoire confirma, et c’est ce que la théorie léniniste du maillon le plus faible synthétisa. La révolution éclata en Russie grâce à la conjonction de plusieurs facteurs qui faisaient de ce pays le défaut de la cuirasse de l’impérialisme mondial : la croissance interne d’un fort mouvement révolutionnaire guidé par le Parti bolchévik, le poids intolérable de l’impérialisme militaire-féodal tsariste, l’exploitation des monopoles internationaux, la force révolutionnaire de la paysannerie alliée au prolétariat, l’épreuve terrible de la guerre mondiale, la montée du mouvement révolutionnaire en Europe.

Après la prise du pouvoir, la construction du socialisme dans un seul pays fût-il arriéré, est possible, la construction intégrale du socialisme. Lénine et Staline établirent sur cette thèse fondamentale toute leur politique.

« Dès à présent, le socialisme n’est plus la question d’un avenir éloigné, je ne sais quelle image abstraite, ou je ne sais quelle icône. A propos d’icônes, nous gardons notre ancienne opinion, fort mauvaise. Nous avons réussi à implanter le socialisme dans la vie quotidienne, et, c’est là que nous devons nous y retrouver. Voilà la tâche de l’heure, voilà la tâche de notre époque. Permettez-moi de terminer en exprimant l’assurance que, si difficile que soit cette tâche, si nouvelle qu’elle soit par rapport à l’ancienne, et si nombreuses que soient les difficultés qu’elle nous occasionne, tous ensemble, en l’espace de quelques années, et non demain, tous ensemble nous l’accomplirons coûte que coûte, et de la Russie de la NEP sortira la Russie socialiste » (Lénine, Discours au soviet de Moscou, 1922, t. 33, p. 456).

« … le pouvoir d’Etat sur les principaux moyens de production, le pouvoir d’Etat aux mains du prolétariat, l’alliance de ce prolétariat avec les millions de petits et tout petits paysans, la direction de la paysannerie assurée à ce prolétariat, etc., – n’est-ce pas tout ce qu’il faut pour construire à partir de la coopération, de la coopération à elle seule, que nous traitions auparavant de mercantile, et qu’à certains égards nous avons le droit de traiter aujourd’hui, sous la NEP, de la même façon, n’est-ce pas tout ce qui est nécessaire pour édifier une société socialiste intégrale ? Ce n’est pas encore la construction de la société socialiste, mais c’est tout ce qui est nécessaire et suffisant à cet effet » (Lénine, De la coopération, 1923, t. 33, p. 481).

C’est le clou que Staline enfonça dans Des principes du léninisme :

« Autrefois, l’on tenait pour impossible la victoire de la révolution dans un seul pays, car, croyait-on, pour vaincre la bourgeoisie il faut l’action commune des prolétaires de la totalité des pays avancés ou, tout au moins de la majorité de ces pays. Maintenant, ce point de vue ne correspond plus à la réalité. Maintenant, il faut partir de la possibilité de cette victoire, puisque le développement inégal et par bonds des divers pays capitalistes dans les conditions de l’impérialisme ; le développement des contradictions catastrophiques au sein de l’impérialisme, qui conduisent à des guerres inévitables ; la croissance du mouvement révolutionnaire dans tous les pays du monde, tout cela conduit non seulement à la possibilité, mais aussi à la nécessité de la victoire du prolétariat dans des pays pris à part. L’histoire de la révolution en Russie en est une preuve directe ». (p. 38-39)

Seul l’établissement définitif du socialisme était reconnu comme impossible par les bolchéviks :

«… renverser le pouvoir de la bourgeoisie et instaurer le pouvoir du prolétariat dans un seul pays, ce n’est pas encore assurer la pleine victoire du socialisme. Ayant consolidé son pouvoir et entraîné la paysannerie à sa suite, le prolétariat du pays victorieux peut et doit édifier la société socialiste. Mais cela signifie-t-il qu’il arrivera par là même à la pleine victoire définitive du socialisme ? Autrement dit, cela signifie-t-il qu’il peut, par les seules forces de son pays, asseoir définitivement le socialisme et garantir pleinement le pays contre l’intervention et, partant, contre la restauration ? Évidemment non. Pour cela il est nécessaire que la révolution triomphe au moins dans quelques pays. Aussi la révolution des pays victorieux ne doit-elle pas se considérer comme une grandeur se suffisant à elle-même, mais comme un auxiliaire, comme un moyen pour hâter la victoire du prolétariat dans les autres pays ». (p. 40)

Trotski ne reconnaissait pas la nature socialiste de la révolution russe. Il ne voulait y voir que le signal, le coup d’envoi, le point de départ de la révolution en Occident. Comme la révolution européenne ne se produisit pas, il fallait nécessairement, selon sa logique, que la révolution russe s’écroule.

Les bolchéviks rejetèrent la théorie de la « révolution permanente » avec mépris. « Si l’on suivait l’analyse erronée de Trotski, disait Staline, il ne nous resterait qu’à végéter au milieu de nos contradictions et pourrir sur pied dans l’attente de la révolution mondiale ». (Questions du léninisme, p. 127)

Pour les révolutionnaires conséquents, le rapport entre la construction du socialisme en Russie et la prise de pouvoir dans les pays capitalistes avancés, était à l’inverse des calculs de Trotski : « … le développement de la révolution mondiale sera d’autant plus rapide et profond que l’aide apportée par le premier pays socialiste aux ouvriers et aux masses laborieuses de tous les autres pays, sera plus efficace ». (Staline, Questions du léninisme, p. 154). Le désaccord sur le caractère et les perspectives fondamentales de la révolution soviétique opposait la ligne trotskiste à la ligne léniniste-staliniste et la rapprochait, sous une phraséologie « de gauche », des sociaux-démocrates à la Otto Bauer 1.

D’une telle passivité fataliste Lénine avait déjà fait justice, lorsqu’il s’adressa aux « paladins de la IIe Internationale » : « Si pour créer le socialisme il faut avoir un niveau de culture déterminé (encore que personne ne puisse dire exactement quel est ce « niveau de culture » déterminé, car il diffère dans chacun des États occidentaux), pourquoi ne commencerions-nous pas d’abord par conquérir révolutionnairement les conditions préalables de ce niveau déterminé pour, ensuite, forts d’un pouvoir ouvrier et paysan et du régime soviétique, nous mettre en mouvement et rejoindre les autres peuples ? » (Sur notre révolution, 1923, t. 33, p. 492)

Les prémisses économiques objectives ne sont pas présentes pour le socialisme ? Créons-les ! Telle est la réponse bolchévique aux petits-bourgeois découragés avant d’avoir mis la main à la pâte. Telle est la ligne mise en pratique par le Parti, sous la direction ferme et éclairée de Lénine et de Staline.

Les trotskistes expédièrent leurs thèses aux rayons et cellules du Parti. Le Parti accepta la discussion générale. Elle fut acharnée, dans le Parti et dans tout le pays, par la voie de la presse. Mais la défaite des trotskistes fut complète dans toute l’Union soviétique. Seules, indique l’Histoire du PC(b) de l’URSS (p. 252), quelques cellules d’écoles supérieures et d’administration votèrent en leur faveur.

Le XIIIe Congrès du Parti (mai 1924) condamna la plate-forme de l’opposition trotskiste. Il donna la directive de développer l’industrie, en premier lieu l’industrie légère ; il affirma en même temps la nécessité de hâter le développement de la métallurgie.

C. LA LUTTE DES BOLCHEVIKS CONTRE LA « NOUVELLE OPPOSITION »

D’abord fidèle à la ligne du Parti, Zinoviev avait commencé à écrire « Le léninisme » où il attaquait les positions trotskistes, dans la première partie du livre. Puis il se laissa atteindre par le défaitisme et, dans la seconde partie (septembre 1925), il prit ses distances par le biais d’attaques contre Boukharine qui, à l’intérieur de la ligne du Parti, défendait certaines positions droitières (« le socialisme à pas de tortue », « enrichissez-vous »…), d’ailleurs désavouées par Staline. Nous construisons le socialisme, disait en substance Zinoviev à Boukharine, mais nous ne pourrons le construire jusqu’au bout. Son « programme » restait entre ciel et terre. Il combattait les déviations de Boukharine au profit d’un internationalisme ultra-« gauche ». Il disait : « tout en apportant au relèvement de l’économie, à l’édification du socialisme en URSS, l’enthousiasme, l’énergie, l’envergure dont nous sommes capables, nous devons en même temps défendre énergiquement (défendre contre qui et à quelle fin ?) la thèse essentielle du léninisme concernant l’impossibilité du triomphe définitif du socialisme dans un seul pays ». (Cité dans Staline contre Trotsky, Maspero, p. 229). Zinoviev forma avec ses partisans de Léningrad et avec Kamenev la « nouvelle opposition ». D’après leur plan bourgeois, l’URSS devait rester un pays agraire, produisant principalement des matières premières et des produits agricoles, les exportant à l’étranger et important en échange des machines qu’elle ne fabriquait pas ni ne fabriquerait. (D’après Histoire du PC(b) de l’URSS, p. 261). C’était un plan d’asservissement économique de l’URSS aux pays capitalistes industriels évolués.

La position idéologique de la « nouvelle opposition », à mesure qu’elle dégénérait, se rapprochait du trotskisme. C’est une capitulation devant les éléments capitalistes de l’économie soviétique : « Il ne fallait pas prendre le pouvoir en octobre 17, voilà à quelle conclusion aboutit la logique interne de l’argumentation de Zinoviev », disait justement Staline (Questions du léninisme, p. 209). Découragés par les difficultés internationales, Zinoviev et Kamenev retombaient dans le marais où ils avaient déjà sombré avant la prise du pouvoir. Estimer en 1925 que la révolution socialiste n’était pas réalisable, c’était renouer d’un fil noir leur attitude actuelle avec l’opposition aux thèses d‘avril.

L’internationalisme auquel était prétendument subordonnée la possibilité de construire le socialisme dans un pays arriéré, n’était qu’une façade. En réalité, c’était un sabotage du véritable internationalisme. L’URSS était la base de la révolution mondiale. Pouvait-elle être une véritable base, si l’on décidait à l’avance la construction de la société socialiste intégrale impossible ? La source de l’erreur politique fondamentale de Zinoviev, comme de Trotski, était un manque de confiance dans les possibilités infinies des masses et dans la ligne juste du Parti. Le XIVe congrès (1925) définit les vues de la « nouvelle opposition » comme une « absence de foi dans l’œuvre de construction du socialisme » et comme une « déformation du léninisme ». Staline mit en lumière la faiblesse opportuniste foncière de Zinoviev et consorts (Questions du léninisme, p. 226). Groupés autour de lui, les bolchéviks confirmèrent que « la lutte pour la victoire de la construction socialiste en URSS est la tâche essentielle de notre Parti ».

Quels étaient les principes directeurs de la construction économique ? Il faut que l’industrie et l’agriculture marchent de pair, et que leur développement soit coordonné. L’industrie doit être l’élément dirigeant, l’agriculture la base. Dans la période de reconstruction de l’économie, la NEP avait permis de ranimer tout d’abord l’agriculture, en permettant un certain développement du marché. Sur la base de ces premiers progrès de l’agriculture (accroissement de la production de matières premières et de produits alimentaires), il avait fallu remettre en mouvement l’industrie, principalement l’industrie légère, qui devait satisfaire les besoins les plus urgents des masses. Cette tâche était remplie. A présent, le développement de l’agriculture et celui de l’industrie légère étaient limités par la faiblesse de l’industrie lourde.

Le rythme rapide de l’industrie lourde était la clé de l’édification d’une économie agricole socialiste. En retour, le développement de celle-ci serait la base d’un nouvel essor industriel. Il fallait rééquiper les paysans, grouper graduellement les exploitations agricoles individuelles en kolkhoz et sovkhoz, appliquer en masse la méthode des contrats de stockage, étendre le réseau des SMT. Dans l’industrie, principale source alimentant la production agricole, il fallait développer la métallurgie, l’industrie chimique, les constructions mécaniques, des usines de machines agricoles, etc. Le rythme rapide de développement de l’industrie était la clé de la reconstruction de l’agriculture sur la base du collectivisme. La nature socialiste de la politique économique se manifeste dans le fait qu’à mesure que l’infrastructure de la société se développe, les rapports sociaux de production deviennent socialistes et les conditions matérielles des masses s’améliorent. La construction de la base économique du socialisme est à l’opposé de l’accumulation primitive capitaliste, réalisée au prix d’une misère effroyable pour le peuple. Dans les conditions de la construction du socialisme, ouvriers et paysans doivent avoir et ont un intérêt immédiat à l’industrialisation. Les prix industriels doivent baisser progressivement, et l’agriculture doit se mécaniser. Sur cette base, les contradictions entre prolétariat et paysannerie doivent être progressivement résolues.

L’opposition séparait les intérêts de la classe ouvrière et de la paysannerie, et y voyait une contradiction absolue. D’après la politique inventée par Préorbrajenski, l’agriculture aurait dû devenir la « colonie » que l’État aurait le droit d’« exploiter » (La nouvelle économie, 1926). C’était là la reproduction du système de l’accumulation capitaliste.

Le Parti s’en tenait à la ligne léniniste. Il définissait la contradiction entre ouvriers et paysans comme une contradiction au sein du peuple, et il s’employait à la résoudre selon des méthodes correctes. C’est ce que l’opposition ne pouvait pas même concevoir. Trotski alla jusqu’à écrire, à propos de la disproportion entre prix industriels et prix agricoles, que « Dans ces conditions, une bonne récolte, c’est-à-dire un accroissement potentiel des excédents des produits agricoles marchands, peut devenir un facteur qui, loin de favoriser le rythme du développement économique dans le sens du socialisme, mais au contraire qui désorganise l’économie, compromet les relations entre la ville et la campagne et, au sein de la ville, entre les consommateurs et l’État. Pratiquement, à cause du manque de produits industriels, une bonne récolte peut signifier que les céréales servent dans une mesure croissante à la fabrication d’eau-de-vie et qu’en ville les queues s’allongent devant les magasins. Politiquement, cela signifie la lutte des paysans contre le monopole du commerce extérieur, c’est-à-dire contre l’industrie socialiste ». (Procès-verbal des séances du plenum d’avril du CC, Amendement de Trotski au projet de résolution de Rykov, p. 164. Cité par Staline, Sur la déviation social-démocrate dans notre Parti, O.C. (Dietz), t. 8, p. 259).

En réalité, dans les conditions de l’alliance du prolétariat et de la paysannerie, une bonne récolte était le salut de l’Etat.

En 1926, la première période de la NEP, caractérisée par la construction de la base agricole, était terminée. L’agriculture fournissait maintenant une quantité suffisante de matières premières, la subsistance des travailleurs était assurée, le marché extérieur était créé. Le centre de gravité de l’économie passait à l’industrie. Il fallait assurer l’indépendance de l’URSS, mettre l’accent sur la production des moyens de production et mécaniser progressivement l’agriculture (Staline, Sur la situation économique de l’URSS et la politique du Parti, O.C. (Dietz), t. 8, p. 103-131). Une série d’industries fut créée de toutes pièces : usines de construction mécanique, des produits chimiques, métallurgie, industrie de la défense, usines de tracteurs et de machines agricoles.

La même année 1926, pendant que le socialisme se construisait effectivement en URSS, le camarade Staline, à la tête du parti, poursuivait la lutte idéologique contre des opposants qui essayaient désespérément de tirer le pays en arrière.

La défaite que la « nouvelle opposition » avait essuyée au XIVe Congrès incita les opportunistes de tout poil à se rassembler en un seul bloc, le bloc trotskiste-zinoviéviste (juillet 1926). L’opposition devint le réceptacle de tous les anciens opposants vaincus, droitiers et gauchistes, confondus dans une même absence de principes.

La plate-forme pratique reflétait cette situation idéologique. Refusant de reconnaître la stabilisation temporaire de la révolution socialiste en Europe occidentale, le bloc lançait des phrases ultra-« gauche » contre la tactique de front uni et voulait remplacer les syndicats par des organisations « révolutionnaires » du prolétariat. A l’intérieur, le bloc exprimait son hostilité à la paysannerie, en laquelle il voyait une force ennemie de la révolution. Il voulait faire porter une plus grande charge de l’industrialisation aux paysans, par la hausse des prix industriels. Mais son drapeau, c’était la lutte contre le bureaucratisme. Le bloc opposait systématiquement l’appareil du Parti à la base du Parti et voulait réduire le rôle de l’appareil à celui d’une chambre d’enregistrement et de propagandistes. Il visait à décapiter le Parti, à le désarmer. De même, il opposait absolument la démocratie et la discipline, afin de justifier sa théorie pourrie des fractions et à saper l’unité du Parti bolchévik. (Staline, Sur le bloc de l’opposition dans le PC(b) de l’URSS, 1926, O.C. (Dietz), t. 8, 192-208 et Sur la déviation social-démocrate dans notre Parti, 1926, O.C. (Dietz), t. 8, p. 209-265).

En 1927, Trotski sort sa dernière arme légale : la « Plate-forme de l’opposition de gauche ». Cette plate-forme se donne pour un cri d’alarme contre l’élément capitaliste, la trinité koulak-nepman-bureaucrate, qui « trouve avant tout son expression dans la différenciation dans la campagne et dans la croissance de la propriété privée ».

« L’accumulation du capitalisme privé, du commerçant, du spéculateur grandit extraordinairement. Il est clair que la part de la classe ouvrière dans le revenu général du pays diminue en même temps que la part des autres classes grandit. C’est là le fait le plus important pour l’appréciation de la situation ». Selon Trotski, le remède à ces maux se trouve dans le renforcement de toutes les positions sociales du prolétariat, dans le relèvement aussi rapide que possible des positions de commandement du socialisme, en liaison la plus étroite avec la préparation et le développement de la révolution prolétarienne mondiale. Concrètement, il faut alors à la fois « augmenter les salaires » et « baisser les prix industriels », « intensifier l’industrialisation » et « s’appuyer sur les paysans pauvres contre les koulaks ». Suivent les récriminations habituelles sur l’absence de démocratie dans le Parti », du fait que l’écrasante majorité du Parti s’opposait énergiquement aux desseins d’une politique défaitiste et démagogique.

La panique de l’opposition devant la différenciation au sein de la paysannerie était une rengaine depuis des années. C’était un aspect de son scepticisme devant la possibilité de la construction du socialisme en URSS.

En réalité, loin d’être liquidé au profit des extrêmes, le paysan moyen (dont Trotski ne parle pas) se renforçait. La différenciation en général était limitée par des facteurs tels que la nationalisation de la terre et la politique des prix. De plus, le progrès des formes socialistes de l’économie dans l’industrie faisaient contre-poids à la petite propriété privée (Staline, Sur la déviation social-démocrate dans notre Parti, O.C. (Dietz), t. 8, p. 259-260). Enfin, et surtout, la situation objective n’était pas mûre pour passer à une politique de collectivisation massive aussi tôt que Trotski disait le vouloir : « En 1926-1927, l’opposition zinoviéviste-trotskiste s’efforçait d’imposer au Parti une politique d’offensive immédiate contre le koulak. Le Parti ne s’est pas jeté dans cette dangereuse aventure, sachant que les gens sérieux ne peuvent se permettre de jouer à l’offensive. L’offensive contre le koulak est chose sérieuse. Il ne faudrait pas la confondre avec les déclarations contre le koulak. Il ne faudrait pas non plus la confondre avec la politique de coups d’ongle contre le koulak, que l’opposition zinoviéviste-trotskiste s’efforçait d’imposer au parti. Mener l’offensive contre le koulak, c’est le briser et le liquider comme classe. En dehors de ces buts, l’offensive n’est que déclamation, coups d’ongle, vain bavardage, tout ce qu’on voudra, sauf une véritable offensive bolchévique. Mener l’offensive contre le koulak, c’est se préparer à l’action et frapper le koulak, mais frapper de façon qu’il ne puisse plus se remettre sur ses pieds.

C’est ce que nous appelons, nous bolchéviks, une véritable offensive. Pouvions-nous, il y a quelque cinq ou trois ans, entreprendre une telle offensive et escompter le succès ? Non, nous ne le pouvions pas. En effet, le koulak produisait en 1927 plus de 600 millions de pouds de blé, et, sur ce total, il en venait environ 130 millions au marché, en dehors de ce qui était vendu à la campagne même. Force assez sérieuse, dont il était impossible de ne pas tenir compte. Et combien produisaient alors nos kolkhoz et sovkhoz ? Environ 80 millions de pouds, dont près de 35 millions étaient jetés sur le marché (blé marchand). Jugez vous-mêmes si nous pouvions alors remplacer la production et le blé marchand des kolkhoz et sovkhoz ? Il est clair que nous ne le pouvions pas.

Que signifie dans ces conditions entreprendre une offensive résolue contre le koulak ? C’est s’enferrer à coup sûr, renforcer les positions des koulaks et rester sans blé. Voilà pourquoi nous ne pouvions ni ne devions entreprendre à ce moment une offensive résolue contre le koulak, en dépit des déclarations d’aventure de l’opposition zinoniéviste-trotskiste ». (Staline, Questions de politique agraire en URSS, 1929, Questions du léninisme, p. 448-44).

Dans les années qui suivirent immédiatement, d’importants changements dans la situation économique et politique mirent la collectivisation de l’agriculture à l’ordre du jour. En 1928, des difficultés sérieuses se firent sentir dans les livraisons de blé. Les koulaks s’étaient mis à refuser de vendre leurs excédents à l’Etat.

Enhardis par l’opposition ils entrèrent en révolte, exerçant la terreur contre des kolkhoziens et des militants du Parti. A cette époque la base matérielle était devenue suffisante pour frapper les koulaks et se passer d’eux (en 1929, la production du blé dans les kolkhoz et sovkhoz était déjà de 400 millions de pouds). C’est ce développement économique même qui permettait aux paysans riches de manœuvrer sur le marché. De son côté, l’Etat acquérait la capacité de financer sérieusement l’agriculture collectivisée. En même temps, entraînés par l’exemple des kolkhoz, les paysans pauvres et moyens révoltés par l’exploitation des koulaks, commençaient à être favorables à la collectivisation. Cette situation nouvelle permettait un nouveau pas important vers le socialisme et imposait de nouvelles tâches au parti et à l’Etat. (Staline, Sur le front du blé, 1928, Questions du léninisme, p. 266-280 et Questions de politique agraire, 1929, Questions du léninisme, p.450). Les années 1928-1929 préparèrent la première planification de l’économie et la collectivisation de l’agriculture.

Au moment où tout le Parti retroussait les manches et entreprenait ces tâches gigantesques, réclamées pendant des années avec tant de démagogie par l’opposition « de gauche », Trotski, contrairement à l’immense majorité de ses partisans, refusa de rallier la politique du parti. Il se mit par la suite à demander la dissolution des sovkhoz et des kolkhoz, selon lui « inviables faute de machines modernes ». Il n’était plus possible de se tromper sur la vraie nature de cet homme. Le « destin historique » de ce bourgeois vaniteux lui commandait d’incarner l’Opposition. Dès 1926, le bloc trotskiste-zinoviéviste avait entrepris la construction d’une fraction organisée avec sa plate-forme, sa discipline, ses imprimeries illégales, ses cotisations, en un mot un Parti clandestin 2. Le trotskisme à cette époque cessa d’être un courant politique défendant ses idées devant les masses, pour devenir une clique sans principe, une agence de l’impérialisme. Battus à plate couture dans la lutte idéologique (le vote dans le Parti donna 724.000 voix au Comité central et 4.000 voix au bloc trotskiste-zinoviéviste), exclus du Parti en 1927, définitivement démasqués devant les masses soviétiques, Trotski et les siens s’engagèrent alors dans un cours criminel qui les conduisit à la trahison délibérée de la patrie soviétique.

D. LA LUTTE DES BOLCHEVIKS CONTRE LE GROUPE BOUKHARINE ET CONTRE LA RESTAURATION DU CAPITALISME

Les koulaks étaient devenus menaçants : le danger de la restauration du capitalisme devait être combattu d’urgence : « Nous n’avons pas encore arraché les racines du capitalisme (qui) résident dans la production marchande, de la petite production de la ville et surtout de la campagne … Tant que nous vivons dans un pays de petits paysans, il existe en Russie, pour le capitalisme, une base économique plus solide que pour le communisme ». (Staline, Du danger de droite dans le PC(b) de l’URSS, 1928, Questions du léninisme, p. 299-301). Staline rappelait l’avertissement de Lénine selon lequel, sur cette base, les éléments bourgeois « entourent de tous côtés le prolétariat d’une ambiance petite-bourgeoise, ils l’en pénètrent, ils l’en corrompent, ils suscitent constamment au sein du prolétariat des récidives de défauts propres à la petite-bourgeoisie : manque de caractère, dispersion, individualisme, passage de l’enthousiasme à l’abattement ». « Telles sont, précise Staline, la racine et la base de tous les flottements et déviations à l’égard de la ligne léniniste dans les rangs du Parti » (Ibid., p. 303), qu’il s’agisse de la déviation « de gauche » qui rejette l’alliance avec les paysans moyens et qui propose par désespoir un plan fantastique de super-industrialisation, ou qu’il s’agisse de la déviation de droite qui consiste à sous-estimer le danger koulak et à privilégier abusivement les intérêts de la paysannerie.

Un trait caractéristique de toute ligne de droite est de rester attaché à une étape dépassée du développement politique et, par conséquent, de refuser les nouvelles tâches de l’étape actuelle. Les tendances droitières que Boukharine manifestait depuis plusieurs années au sein de la ligne du Parti devenaient une erreur grave au moment où la situation objective changeait. La lutte des classes était de plus en plus aiguë, mais la droite n’en soufflait mot.

Boukharine se trompait fondamentalement sur la nature de l’opposition de classe entre les koulaks et la dictature du prolétariat. « (Il) croit que sous la dictature du prolétariat la lutte de classes doit s’éteindre et être liquidée afin qu’en résulte la suppression des classes. Or, Lénine nous enseigne, au contraire, que les classes ne peuvent être supprimées que par une lutte de classes opiniâtre qui, dans les conditions de la dictature du prolétariat, devient encore plus acharnée qu’avant la dictature du prolétariat ». (Ibid., p. 341).

Boukharine voulait établir l’harmonie des intérêts de classes antagonistes, intégrer les koulaks dans le socialisme. Cette première erreur l’empêchait de comprendre l’aggravation de la lutte de classes, qui pourtant se produisait sous ses yeux. A mesure que le secteur socialiste croît, les éléments capitalistes, relativement, reculent. Ils sentent venir le combat décisif et, pour ne pas quitter la scène de l’histoire, ils rassemblent toutes leurs forces pour frapper le plus fort possible. Boukharine ne voyait dans les phénomènes de l’aggravation de la lutte que des causes d’ordre administratif : « Dans les campagnes, la lutte de classes éclate ici et là, sous sa forme ancienne, et cette aggravation est provoquée d’ordinaire par les éléments koulaks. Lorsque, par exemple, les koulaks ou des individus qui s’enrichissent aux dépens d’autrui et se sont insinués dans les organismes du pouvoir des Soviets, commencent à tirer des coups de feu sur les correspondants ruraux, c’est là une manifestation de la lutte de classes dans sa forme la plus aiguë. Cependant, les cas de ce genre se produisent ordinairement là où l’appareil soviétique local est encore faible. A mesure que cet appareil s’améliore, à mesure que se renforcent toutes les cellules de base du pouvoir des Soviets, à mesure que s’améliorent et se fortifient les organisations locales du Parti et des Jeunesses communistes à la campagne, les phénomènes de ce genre deviendront, comme cela est absolument évident, de plus en plus rares et finalement disparaîtront dans laisser de traces ». (Le chemin du socialisme. Cité dans Questions du léninisme, p. 344).

Une troisième erreur importante de Boukharine lui faisait voir la paysannerie russe comme un tout indifférencié. Boukharine refusait de distinguer les classes à la campagne. Il s’interdisait, par conséquent, d’appliquer la stratégie léniniste-staliniste : s’appuyer sur la paysannerie pauvre, s’allier au paysan moyen et combattre l’ennemi de classe koulak.

« Dans tout son travail à la campagne, le P.C.R. s’appuie, comme toujours, sur ses couches prolétariennes et semi-prolétariennes… A l’égard des koulaks, de la bourgeoisie rurale, la politique du P.C.R. consiste à lutter résolument contre leurs tendances à l’exploitation, à réprimer leur résistance à la politique soviétique, communiste.

A l’égard de la paysannerie moyenne, la politique du P.C.R. consiste à la faire participer progressivement et de façon méthodique à l’édification socialiste. La tâche du parti est de la séparer des koulaks, de la rallier à la classe ouvrière en se montrant attentif à ses besoins, en combattant son retard par une action idéologique, jamais par des mesures de répression, en s’efforçant chaque fois que ses intérêts vitaux sont en jeu, d’arriver à des accords pratiques, en lui faisant des concessions dans le choix des moyens pour réaliser les transformations socialistes ». (Lénine, Projet de programme du P.C.R., 1919, t. 29, p. 136).

Dans la question de l’alliance de classes avec la paysannerie, le trotskisme s’était affirmé contre une alliance solide avec le paysan moyen, tandis que le groupe Boukharine était pour n’importe quelle alliance avec la paysannerie en général. Le paysan moyen est hésitant, sa nature est double. Pour en faire un allié de la révolution, il faut avec lui combattre le capitalisme, sous la direction du prolétariat.

Les mesures concrètes que Boukharine défendait étaient de développer l’économie paysanne individuelle, de conserver des relations pacifiques avec les koulaks et de s’abstenir de toute nouvelle mesure contre eux, d’importer du blé s’il venait à en manquer, et de ralentir le développement de l’industrie.

Le plan bolchévik prévoyait l’intensification de l’industrialisation et le développement de l’équipement agricole, l’élargissement de la construction des kolkhoz et des sovkhoz, le stockage obligatoire du blé.

Staline synthétisait les deux lignes de la façon suivante : la ligne du groupe Boukharine tenait que le développement de l’économie paysanne individuelle est la clé de la reconstruction de l’agriculture ; la ligne léniniste-staliniste montrait que le rythme rapide du développement industriel est la clé de la reconstruction de l’agriculture. (De la déviation de droite dans le PC(b) de l’URSS, 1929, Questions du léninisme, p. 368-369). Ainsi que Staline le définit plus tard, au XVIIe congrès du Parti : « Le mot d’ordre ‘Enrichissez-vous’ était au fond un appel à la restauration du capitalisme, alors que le mot d’ordre ‘Donner de l’aisance à tous les kolkhoziens’ est un appel pour porter le coup de grâce aux derniers vestiges du capitalisme … » (Questions du léninisme, p. 703).

En 1929, les dirigeants de la droite conclurent une alliance sans principe avec l’ultra-« gauche » Trotski-Zinoviev, pour mener la lutte contre le Parti. Avertis par le Comité Central qu’ils subiraient le même sort que ces derniers, ils pratiquèrent une politique de sabotage (démission de Boukharine, Rykov et Tomski du CC). Lorsqu’enfin Boukharine fut menacé d’être exclu du BP, les capitulards rentrèrent immédiatement dans le rang et se soumirent à la ligne du Parti.

E. LA COLLECTIVISATION DE L’AGRICULTURE

1929 fut l’année du « grand tournant » (Questions du léninisme, p. 410-425). Le bilan de l’industrialisation établissait que le problème de l’accumulation pour les grands travaux de l’industrie lourde obtenait une solution favorable. Un rythme accéléré était adopté pour le développement de la production des moyens de production. Ce résultat était dû à l’élan et l’enthousiasme au travail des masses innombrables. Le Parti suivait la politique de « compter sur ses propres forces » (Ibid., p. 413).

La collectivisation agricole intensive fut entreprise pendant l’été 1929. Le Parti s’était donné pour tâche d’assurer le développement socialiste dans les campagnes. Il fallait organiser les paysans en kolkhoz et sovkhoz, doubler ou tripler la productivité du travail et améliorer le niveau de vie des masses paysannes. Jusqu’à cette période l’exploitation par les koulaks des paysans pauvres et des paysans moyens n’avait fait l’objet que de limitations et de restrictions. (Les koulaks étaient obligés de vendre du blé à l’État en quantités fixées à des prix imposés par la loi sur le stockage ; la possession foncière était limitée et l’affermage réglementé, ainsi que l’embauche de la main-d’œuvre salariée ; les impôts étaient élevés).

A présent, la tâche politique consistait à liquider les koulaks en tant que classe et à confisquer leurs moyens de production au profit des kolkhoz (machines, bétail) et des paysans pauvres (terre). La collectivisation de l’agriculture est une lutte de classes. Renforçant l’alliance ouvriers-paysans, s’appuyant sur les paysans pauvres, consolidant l’alliance avec les paysans moyens, le Parti et les soviets engageaient la lutte décisive contre les koulaks. Toutes les forces socialistes s’opposaient aux koulaks, le rempart principal du rétablissement du capitalisme, de façon antagoniste ; à l’intérieur des kolkhoz elles menaient la lutte idéologique contre les survivances de la mentalité individualiste, voire koulak. (Staline, Questions de politique agraire en URSS, 1929, Questions du léninisme, p. 445-446). Socialement, la collectivisation de l’agriculture visait à effacer progressivement les différences entre la ville et la campagne. Idéologiquement, il était nécessaire de changer la mentalité du paysan, de lui faire abandonner l’idéologie petite-bourgeoise et de le gagner à la conception du monde socialiste.

La collectivisation dans les campagnes fut une décision du Parti, prise en conformité avec les intérêts et les besoins des masses travailleuses de la paysannerie. Le Parti réalisa la politique léniniste d’éducation des masses, et entraîna celles-ci dans la lutte contre les oppresseurs koulaks. Il reçut un appui massif. La politique de collectivisation devint « un véritable mouvement de masse des paysans eux-mêmes ». (L’année du grand tournant, Questions du léninisme, p. 418). Des brigades ouvrières dissémines par centaines firent un travail actif de propagande parmi les masses. L’aide matérielle du parti (machines et tracteurs), l’exemple de la coopération (la mise en commun du travail et du matériel agricole paysan accroît considérablement la productivité du travail), encouragèrent grandement le mouvement kolkhozien. « Ce qu’il y a de nouveau et de décisif dans le mouvement actuel des kolkhozes, écrivait Staline, c’est que les paysans y entrent non par groupes isolés, comme cela se faisait auparavant, mais par villages, par cantons, par districts, voire par arrondissements entiers … Le paysan moyen a pris le chemin du kolkhoz » (Ibid. p. 423).

A cause des succès rapides et massifs eux-mêmes, de graves erreurs furent cependant commises. Surestimant les forces socialistes et sous-estimant celles de l’ennemi, des responsables du Parti, en plusieurs régions, firent la confusion entre contradiction antagoniste et contradiction non-antagoniste, traitant des paysans moyens comme des koulaks, usant de la force alors qu’il fallait chercher l’entente. Par ces excès bureaucratiques, trois principes que le Parti avait mis en avant furent violés : collectivisation par la libre adhésion, tenir compte des conditions objectives (le Parti prévoyait trois rythmes de collectivisation, échelonnés de 1930 à 1933), rejet gauchiste de l’artel 3, forme dominante de la collectivisation, au profit de la commune. La direction du PC(b) de l’URSS réagit rapidement et critiqua sévèrement ces graves erreurs. (Staline, Le vertige du succès, 1930, Questions du léninisme, p. 460-467 et Réponse aux camarades kolkhoziens, 1930, Questions du léninisme, p. 468-481). Les koulaks profitèrent des abus pour regrouper autour d’eux les paysans moyens et donnèrent impulsion à une politique d’abattage des chevaux et du gros bétail. Dans l’ensemble, le mouvement fut un succès décisif de la construction du socialisme. La classe la plus nombreuse du pays passait de l’économie individuelle, base naturelle du capitalisme, à l’économie collective. Des millions de petits propriétaires paysans entraient dans les kolkhoz. La base socialiste des Soviets de trouvait renforcée dans le domaine économique et social le plus arriéré.

F. LE PREMIER PLAN QUINQUENNAL (1928-1933)

Adopté par la XVIe Conférence du Parti (1929), le premier plan quinquennal prévoyait des investissements massifs pour l’industrie et l’agriculture. Il appelait le peuple soviétique à l’émulation socialiste. Remplir correctement les tâches de l’économie était et restait pour l’URSS d’une importance vitale. « Nous retardons de cinquante à cent ans sur les pays avancés. Nous devons parcourir cette distance en dix ans. Ou nous le ferons, ou nous serons broyés », disait Staline aux dirigeants de l’industrie, en 1931. (Question du léninisme, p. 502). Dix ans plus tard, en 1941, les hordes nazies envahissaient l’URSS. La juste prévision de Staline et la politique d’industrialisation intensive permirent au peuple soviétique de sauver la patrie socialiste et d’écraser le fascisme.

En faisant le bilan du plan en 1933, Staline résuma ainsi les objectifs essentiels qui avaient été fixés, et atteints :

« La tâche essentielle du plan quinquennal était de faire passer notre pays, de sa technique arriérée, parfois médiévale, à une technique nouvelle, moderne.

La tâche essentielle du plan quinquennal était de transformer l’URSS, de pays agraire et débile, qui dépendait des caprices des pays capitalistes, en un pays industriel et puissant parfaitement libre de ses actions et indépendant des caprices du capitalisme mondial.

La tâche essentielle du plan quinquennal était, tout en transformant l’URSS en un pays industriel, d’éliminer complètement les éléments capitalistes, d’élargir le front des formes socialistes de l’économie et de créer une base économique pour la suppression des classes en URSS, pour la construction d’une société socialiste.

La tâche essentielle du plan quinquennal était de créer dans notre pays une industrie capable de réoutiller et de réorganiser, sur la base du socialisme, non seulement l’industrie dans son ensemble, mais aussi les transports, mais aussi l’agriculture.

La tâche essentielle du plan quinquennal était de faire passer la petite économie rurale morcelée sur la voie de la grande économie collectivisée, d’assurer par cela même la base économique du socialisme à la campagne, et de rendre impossible la restauration du capitalisme en URSS.

Enfin, la tâche du plan quinquennal était de créer dans le pays toutes les conditions techniques et économiques nécessaires pour en relever au maximum la capacité de défense, pour lui permettre d’organiser une riposte vigoureuse à toutes les tentatives d’intervention armée, à toutes les tentatives d’agression armée de l’extérieur, d’où qu’elles viennent.

Qu’est-ce qui dictait cette tâche essentielle du plan quinquennal ? Qu’est-ce qui la justifiait ?

La nécessité de faire cesser le retard économique et technique de l’URSS, qui la condamnait à une existence peu enviable ; la nécessité de créer dans le pays des conditions lui permettant non seulement de rejoindre, mais de dépasser avec le temps, au point de vue économique et technique, les pays capitalistes avancés ». (Le bilan du premier plan quinquennal, 1933, Questions du léninisme, p. 558-559).

Dans l’industrie, c’était l’industrie lourde qui était le maillon principal du plan. Pour atteindre ses buts, comme l’URSS ne recourait pas à l’emprunt et comme le pillage capitaliste lui était naturellement étranger, le pays progressait grâce à l’enthousiasme au travail des masses. Les rythmes étaient accélérés au maximum. Le pays était menacé d’un danger mortel, il fallait le rééquiper rapidement.

L’agriculture, en l’espace de trois ans, avait été collectivisée. Le Parti put organiser plus de 200.000 exploitations collectives et près de 5.000 kolkhoz pour la culture des céréales et l’élevage.

Les kolkhoz groupaient en 1933 plus de 60 % des exploitations paysannes, qui englobaient plus de 70 % de toutes les terres du pays.

La base technique moderne de l’industrie, des transports et de l’agriculture était réalisée ; la collectivisation était achevée pour l’essentiel.

Le chômage était supprimé depuis 1931 ; l’exploitation et la misère à la campagne avaient disparu ; la situation matérielle des ouvriers et des paysans recevait une amélioration sensible.

En période de reconstruction et dans l’établissement de la base matérielle du socialisme, le problème de la technique était le problème décisif : il s’agissait d’arracher à la bourgeoisie le monopole de la technique dans l’industrie et l’agriculture et de donner à des spécialistes rouges la capacité de diriger la production.

« On dit qu’il est difficile de se rendre maître de la technique. C’est faux ! Il n’est point de forteresse que les bolchéviks ne puissent prendre. Nous avons résolu une série de problèmes très difficiles. Nous avons renversé le capitalisme. Nous avons pris le pouvoir. Nous avons construit une immense industrie socialiste. Nous avons orienté le paysan moyen dans la voie du socialisme. Le plus important, d’un point de vue de l’œuvre constructive, nous l’avons déjà fait. Il ne nous reste que peu de chose à faire : étudier la technique, nous rendre maîtres de la science. Et lorsque nous aurons fait cela, nous déclencherons des rythmes dont nous n’osons même pas rêver aujourd’hui ». (Staline, Les tâches des dirigeants de l’industrie, 1931, Questions du léninisme, p. 504).

Les procès intentés à cette époque contre les saboteurs de l’industrie et de l’administration montrèrent la nécessité primordiale de la formation de techniciens soviétiques dévoués au socialisme. L’impérialisme anglais et français de concert avec les contre-révolutionnaires tsaristes, ont monté contre le régime de l’URSS plusieurs complots. Ils avaient mis sur pied le « Parti industriel » clandestin, composé d’environ deux mille membres de l’intelligentsia et de techniciens de l’ancienne Russie. Ce Parti était dirigé et financé par le Torgprom, cartel international des anciens millionnaires tsaristes.

En 1930, un procès mit hors d’état de nuire des dirigeants et des membres du Parti Industriel. Ces saboteurs et espions avaient eu pour but immédiat de freiner l’industrialisation de l’URSS et pour objectif principal de renverser le gouvernement. L’année suivante, des anciens menchéviks, hauts fonctionnaires des services administratifs et techniques, qui avaient intrigué pour occuper des postes dans le gouvernement et le gosplan afin de saboter et de désorganiser la planification, furent à leur tour démasqués et condamnés. En 1933, un troisième procès réprima les agissements dont des techniciens russes et des ingénieurs anglais liés au trust d’installations électriques Vickers et travaillant pour le compte de l’Intelligence Service, s’étaient rendus coupables dans différents secteurs industriels, notamment dans les mines de Chakti. Toutes ces entreprises de sabotage industriel se menaient parallèlement à un plan d’offensive monté en vue de l’invasion de l’URSS en 1929-1930 par les armées de plusieurs Etats capitalistes. Les préparatifs de cette guerre furent interrompus par la crise mondiale du capitalisme 4.

Le 1er plan avait mis l’accent sur les rythmes (22 % d’accroissement annuel de la production industrielle) ; le 2ème plan, tout en accélérant encore les rythmes (environ 13 %), mit l’accent sur les techniques nouvelles de l’industrie et sur une meilleure organisation de la production agricole (Questions du Léninisme, p. 548-597).

Staline, enfin, critiquait le style bureaucratique dans l’industrie : « Avons-nous une juste direction économique des fabriques, des usines, des mines ? Tout va-t-il ici pour le mieux ? Malheureusement non. Et nous devons, nous bolchéviks, le proclamer haut et clair.

Que signifie diriger la production ? Chez nous on n’envisage pas toujours à la manière bolchévique le problème de la direction des entreprises. On pense souvent que diriger, c’est signer des papiers, des ordres. C’est triste, mais c’est un fait … Quant à pénétrer au fond des choses, à s’assimiler la technique, à devenir les maîtres de la besogne, eh bien ! non, ils n’y songent même pas.

Comment at-t-il pu se faire que nous, bolchéviks, qui avons fait trois révolutions, qui sommes sortis victorieux d’une guerre civile atroce, qui avons résolu la tâche immense de créer une industrie moderne, qui avons orienté la paysannerie dans la voie du socialisme, – comment a-t-il pu se faire que, lorsqu’il s’agit de diriger la production, c’est la paperasse qui l’emporte ?

La raison, c’est que signer un papier est plus facile que diriger la production. Et c’est ainsi que beaucoup de dirigeants de l’industrie se sont engagés dans cette voie du moindre effort. Il y a là aussi de notre faute, de la faute du centre. Une dizaine d’années plus tôt un mot d’ordre fut lancé : ‘Etant donné que les communistes ne connaissent pas encore comme il se doit la technique de la production, et qu’il leur faut encore apprendre à gérer l’économie, les vieux techniciens et ingénieurs, les spécialistes conduiront la production ; quant à vous, communistes, ne vous mêlez pas de la technique du travail ; mais, sans vous en mêler, étudiez la technique, étudiez d’arrache-pied la science de la direction de la production pour devenir ensuite, avec les spécialistes qui nous sont dévoués, de véritables dirigeants de la production, de véritables maîtres de la besogne’. Tel est le mot d’ordre. Et qu’est-il advenu en fait ? On a rejeté la deuxième partie de cette formule, car il est plus difficile d’apprendre que de signer des papiers ; quant à la première partie, on l’a avilie, en interprétant la non-immixtion comme une renonciation à l’étude de la technique de la production. Il en est résulté une chose absurde, une chose nuisible et dangereuse. Plus tôt nous nous en débarrasserons, et mieux cela vaudra ». (Les tâches des dirigeants de l’industrie, 1931, Questions du léninisme, p. 498-499).

Dans la construction de l’infrastructure du socialisme, l’URSS, à cette étape de son développement, triomphait sur tous les secteurs de l’économie. L’agriculture et l’industrie avaient été restaurées. L’établissement de kolkhoz et de sovkhoz, et les progrès de l’industrie lourde assuraient une base politique et économique solide à l’édification du socialisme.

Cette juste ligne politique a triomphé grâce à une lutte incessante menée contre différents groupes opportunistes anti-parti, qui cédaient devant la pression de l’impérialisme et de l’ennemi intérieur.

II. LA LUTTE CONTRE LE FASCISME : LA PRÉPARATION, LA GRANDE GUERRE PATRIOTIQUE, LA VICTOIRE (1934-1945)

A. LA SITUATION GÉNÉRALE ET LA PRÉPARATION DE L’URSS A LA GUERRE DÉFENSIVE

Depuis le premier jour de la révolution, l’URSS, selon l’expression de Lénine, était une forteresse assiégée.

A cet égard, la situation dans le courant des années trente, devint de plus en plus menaçante. A partir de cette époque, l’URSS devait craindre l’agression des puissances capitalistes coalisées. Dans son rapport au XVIe congrès du Parti, Staline prévoyait que la bourgeoisie chercherait une issue à la crise économique, d’une part en matant la classe ouvrière par l’établissement de la dictature fasciste ; d’autre part, en déclenchant la guerre pour la redistribution des colonies et des zones d’influence au détriment des pays mal défendus.

C’est bien ce qui se produisit.

En 1932, la menace de guerre s’accentua du côté du Japon. Les impérialistes japonais s’emparèrent de la Mandchourie et s’apprêtaient à envahir la Chine du Nord, tout en menaçant l’extrême-orient soviétique.

Un deuxième foyer de guerre se formait en Allemagne. Le joug de l’impérialisme anglo-français, la crise économique, le chômage massif, la montée du mouvement révolutionnaire, amenèrent la bourgeoisie allemande s’appuyant sur la petite-bourgeoisie nationaliste à instaurer une dictature terroriste sur la classe ouvrière. L’axe Berlin-Rome-Tokyo se constituait, en s’opposant à l’URSS et d’autre part, aux impérialismes français, anglais et américain.

La montée du fascisme détermina en URSS l’apparition d’une nouvelle contradiction principale. La base de l’économie socialiste était construite pour l’essentiel. L’URSS suivait avec une vigilance accrue le cours des événements internationaux. La situation internationale – crise du capitalisme, montée du fascisme, danger de guerre – fut le premier point traité par Staline dans son rapport au XVIIe congrès du Parti (1934). Depuis l’accession au pouvoir de Hitler, la lutte contre le fascisme, à l’extérieur et à l’intérieur, passa à l’avant-plan. L’aspect militaire du développement industriel prit une importance toujours plus grande. La préparation à la guerre défensive mobilisait l’énergie de tout le pays. A l’extérieur, l’URSS menait une politique de paix, en allant au-devant des pays partisans de la paix et en dénonçant ceux qui préparaient, qui provoquaient la guerre.

« Sur quoi comptait l’URSS dans cette lutte difficile et complexe pour la paix ?

a) Sur sa puissance économique et politique croissante ;

b) Sur le soutien moral des masses immenses de la classe ouvrière de tous les pays, laquelle a un intérêt vital à sauvegarder la paix ;

c) Sur le bon sens des pays qui n’ont pas intérêt pour tel ou tel autre motif, à voir la paix violée et qui désirent développer les relations commerciales avec un contractant aussi ponctuel que l’URSS ;

d) Enfin, sur notre glorieuse armée prêt à défendre le pays contre les attaques du dehors ». (Staline, Rapport au XVIIe congrès du PC(b) de l’URSS, 1934, Questions du léninisme, p. 649-650).

Sur cette base, l’URSS signa des pactes de coexistence pacifique avec la plupart de ses voisins de l’Ouest et du Sud, mais aussi avec des pays tels que la France, l’Italie, la Turquie. Autre fait important, l’État soviétique reprenait aussi des relations normales avec les États-Unis.

L’URSS se servit des contradictions interimpérialistes pour rompre l’encerclement et le front « antibolchévik », en signant un traité avec l’Allemagne (après l’échec des négociations avec la France et l’Angleterre), puis en luttant avec les puissances alliées contre le nazisme pendant la guerre mondiale.

La préparation de l’URSS à la guerre défensive contre le fascisme avait un double aspect : nécessité du développement industriel intensif et fabrication d’armements sur une grande échelle, ainsi que lutte diplomatique d’une part ; d’autre part – et en ordre secondaire – lutte politique contre les ennemis qui, à l’intérieur, prenaient le relais du fascisme et de l’impérialisme. Cette lutte politique connut un cours très complexe et se livra sur plusieurs fronts à la fois.

B. LA LUTTE DES BOLCHEVIKS CONTRE LES ENNEMIS DE L’INTÉRIEUR

1. L’analyse de classes et les contradictions de classes en URSS, de 1934 à 1939

Staline a correctement estimé que l’ennemi de l’extérieur, le fascisme allemand et japonais, préparait une guerre d’agression contre l’URSS et qu’il était l’ennemi principal.

Quant à la lutte de l’intérieur, il a eu tendance, tout au moins dans ses déclarations théoriques, à estimer qu’après la liquidation des koulaks en tant que classe, les contradictions entre les classes allaient en s’estompant et qu’il n’y avait plus, au sein du peuple soviétique – les ouvriers, les paysans kolkhoziens, les intellectuels – de contradiction de classe antagoniste. Seuls les débris des classes exploiteuses vaincues continueraient à lutter et intensifieraient même cette lutte avant de disparaître de la scène de l’Histoire.

La collectivisation de l’agriculture et la défaite des koulaks avaient donc, selon Staline, « supprimé à l’intérieur du pays, les dernières sources de la restauration du capitalisme » (Histoire du PC(b) de l’URSS, p. 288) ; la collectivisation fut le « dernier combat décisif » (Questions du léninisme, p. 345). Dès le moment où l’infrastructure était complètement retirée des mains des anciennes classes exploiteuses, dès le moment où l’industrie appartenait à l’État ouvrier et où l’agriculture fut organisée en kolkhoz et en sovkhoz, le Parti considéra que le socialisme en URSS était établi et qu’il ne courait plus aucun risque intérieur d’être renversé. Dans une résolution du VIIe Congrès de l’Internationale communiste (1935), le camarde Manuilski proclama « la victoire définitive et irrévocable du socialisme en URSS ». Au XVIIe congrès du Parti (1934), Staline déclara que :

« Les faits attestent que nous avons déjà construit les fondations de la société socialiste en URSS, et qu’il ne nous reste qu’à les couronner de superstructures, tâche incontestablement plus aisée que de construire les fondations de la société socialiste ». (Questions du léninisme, p. 672).

Pour la première fois, la ligne du Parti ne rencontrait plus d’opposition :

« Si, au XVe Congrès, il fallait encore démontrer la justesse de la ligne du Parti et combattre certains groupements antiléninistes ; si, au XVIe congrès, il fallait donner le coup de grâce aux derniers adeptes de ces groupements, il n’y a plus rien à démontrer à ce congrès, ni, je crois, personne à battre. Tout le monde se rend compte que la ligne du Parti a triomphé ». (Ibidem, p. 693).

Cependant, Staline rappelait en même temps avec force que « l’une des tâches essentielles (du second plan quinquennal) était de vaincre les survivances du capitalisme dans l’économie et dans la conscience des hommes… La conscience des hommes est en retard sur leur situation économique, (et) l’encerclement capitaliste … s’efforce de ranimer et d’entretenir les survivances du capitalisme dans l’économie et la conscience des hommes en URSS… » (Ibidem, p. 694).

« On comprend que ces survivances ne peuvent pas ne pas offrir un terrain favorable pour ranimer dans l’esprit de certains membres de notre Parti, l’idéologie des groupes antiléninistes battus. Ajoutez à cela le niveau théorique pas très élevé de la majorité de nos adhérents, le faible travail idéologique de nos organismes de Parti, le fait que nos militants du Parti sont surchargés de travail purement pratique, qui ne leur permet pas de compléter leur bagage théorique, – et vous comprendrez d’où vient chez certains membres du parti cette confusion dans telles ou telles questions du léninisme. Confusion qui s’introduit souvent dans notre presse, et contribue à faire revivre les vestiges de l’idéologie des groupes antiléninistes battus » (Ibidem, p. 694-695).

« … les vestiges de l’idéologie des groupes antiléninistes battus peuvent très bien se ranimer : ils sont encore loin d’avoir perdu leur vitalité. Il est évident que si cette confusion d’idées et ces tendances non bolchéviques s’emparaient de la majorité de notre Parti, ce dernier se trouverait démobilisé et désarmé ». (Ibidem, p. 696)

Au terme de son rapport, Staline rappelait trois grands enseignements du marxisme-léninisme pour maintenir élevé le niveau idéologique du parti : « Ne pas se laisser griser par les succès remportés et ne pas tomber dans la présomption. Être fidèles jusqu’au bout au grand drapeau de Marx, Engels, Lénine. Être fidèles jusqu’au bout à la cause de l’internationalisme prolétarien, à la cause de l’union fraternelle des prolétaires de tous les pays ».

La lutte idéologique dans le Parti devait continuer :

« Nos tâches quant au travail politique et idéologique sont :

1. Élever le niveau théorique du Parti à la hauteur voulue ;

2. Accentuer le travail idéologique à tous les échelons du Parti ;

3. Faire une propagande inlassable du léninisme dans les rangs du parti ;

4. Éduquer les organisations du Parti et les militants actifs sans-parti qui les entourent, dans l’esprit de l’internationalisme léniniste ;

5. Ne pas dissimuler, mais critiquer les écarts de certains camarades envers le marxisme-léninisme ;

6. Démasquer systématiquement l’idéologie et les vestiges de l’idéologie des courants hostiles au léninisme ». (Ibidem, p. 707)

C’est dans son Rapport sur le Projet de Constitution de l’URSS (1936) que Staline s’est le plus longuement étendu sur l’analyse de classes que le Parti faisait de l’URSS.

Le Rapport sur le projet de Constitution est un texte mémorable dans l’histoire du socialisme. Il marque les immenses progrès économiques, politiques et idéologiques réalisés par l’Union soviétique en l’espace de vingt ans. Il s’ouvre sur le bilan de la prodigieuse activité économique réalisée par le peuple soviétique. La dictature du prolétariat a supprimé le système d’exploitation. Un essor industriel sans pareil dans l’histoire du monde, une agriculture collectivisée, un système commercial dominé par l’État, les coopératives et les sovkhoz, assurent à la population un bien-être croissant. Les crises, le chômage, la misère sont vaincus. L’URSS s’arme efficacement contre les dangers de l’agression.

Les classes exploiteuses ont été abattues par la révolution, la guerre civile, l’expropriation industrielle et foncière, la collectivisation. Il n’y a plus en présence, conclut Staline, que la classe des ouvriers, la classe des paysans et la couche des intellectuels. La nature sociale de ces catégories a été profondément modifiée dans la construction du socialisme. Les ouvriers se sont affranchis de l’exploitation et sont devenus les maîtres de leurs instruments de production. Les paysans kolkhoziens, libérés de l’exploitation féodale et capitaliste, travaillent en coopération sur une nouvelle base technique. Les intellectuels, en majorité d’origine ouvrière et paysanne, sont au service du peuple. Les démarcations entre les trois catégories sociales s’effacent, les contradictions économiques et politiques existant entre elles s’estompent. Il n’existe plus de classes antagonistes en URSS.

Au cours des années suivantes, Staline accentua la tendance qu’il avait à minimiser les contradictions sociales et politiques en URSS : d’après lui, le mode de production matériel socialiste lui-même, tel qu’il était réalisé en URSS à cette époque, ne présentait pas de contradiction : il y avait un « accord parfait entre les rapports de production et le caractère des forces productives » (Le matérialisme dialectique et le matérialisme historique, 1938, Questions du léninisme, p. 810). L’URSS évoluait donc vers le « communisme », et si l’État devait encore y être maintenu, c’était uniquement à cause de l’encerclement capitaliste : l’État servirait de rempart politique et militaire du communisme contre les ennemis de l’extérieur (Rapport du XVIIIe congrès, 1939, Questions du léninisme, p. 874-882).

2. Les ennemis de l’intérieur : la lutte contre les débris des anciennes classes vaincues

Depuis la fin de la collectivisation, Staline mit en garde le peuple soviétique contre les sabotages de toutes sortes auxquels se livraient les débris koulaks rebelles au pouvoir des Soviets. Plus leur perte serait prochaine, plus la lutte serait acharnée.

« … Plus nous avancerons, plus nous remporterons de succès et plus la fureur des débris des classes exploiteuses en déroute sera grande, plus ils recourront vite aux formes de la lutte plus aiguës, plus ils nuiront à l’État soviétique, plus ils se raccrocheront aux procédés de lutte les plus désespérés, comme au dernier recours d’hommes voués à leur perte.

Il ne faut pas perdre de vue que les débris des classes défaites en URSS ne sont pas solitaires. Ils bénéficient de l’appui direct de nos ennemis, au-delà des frontières de l’URSS. Ce serait une erreur de croire que la sphère de la lutte de classe est limitée aux frontières de l’URSS, son autre aile s’étend jusque dans les limites des États bourgeois qui nous entourent. Les débris des classes défaites ne peuvent l’ignorer. Et, justement parce qu’ils le savent, ils continueront à l’avenir encore leurs attaques désespérées ». (Staline, Pour une formation bolchévique, 1937, p. 27).

La lutte contre les traîtres, agents du fascisme et de l’impérialisme

Des traîtres irréductibles ont été poursuivis devant la justice militaire de l’URSS, condamnés à mort et fusillés. Les procès de 1936, 1937, 1938 ont mis à jour, démantelé et frappé tour à tour le centre terroriste trotskiste-zinoviéviste, dirigé par Zinoviev et responsable de l’organisation et de la direction des actes de terrorisme ; le centre antisoviétique trotskiste, parallèle au premier, dirigé par Piatakov et responsable du sabotage ; le bloc des droitiers et des trotskistes antisoviétiques, dirigé par Boukharine et Krestinski et qui comprenait la plupart des dirigeants et des membres haut placés des forces unies de l’opposition. Trotski dirigeait l’ensemble. Selon Sayers et Kahn, environ mille membres et vingt à trente dirigeants qui avaient des postes de commandement dans l’armée, les Affaires étrangères, le service secret, l’industrie, les syndicats, le Parti et l’administration gouvernementale furent mis hors d’état de nuire, sans compter les agents secrets à l’étranger.

Les accusés avouèrent leurs crimes de sabotage, de terrorisme, de complot contre la sûreté de l’Etat. Le but final de leurs agissements était la prise du pouvoir et le rétablissement du capitalisme, à la faveur de la guerre et grâce à l’appui des nazis (voir annexe 2, 1).

Les procès découvrirent la lie de la société soviétique. Sur le banc des accusés se trouvaient des anciens opposants de toute sorte qui avaient été vaincus politiquement mais qui n’avaient pas désarmé, trotskistes, boukhariniens, socialiste-révolutionnaires, menchéviks (voir annexe 2, 2), privés de base de masse (voir annexe 2, 3) (sauf les tentatives de Boukharine de soulever des éléments koulaks rebelles), des arrivistes infiltrés dans le Parti (voir annexe 2, 4), des intellectuels traîtres à la patrie (voir annexe 2, 5). Le Parti fit une large propagande dans les masses sur les résultats de l’enquête et le déroulement des procès. Les procès des traîtres furent un élément de l’éducation politique du peuple soviétique. Dans son réquisitoire de 1937, Vychinski déclara :

« Notre procès aide les millions et millions de jeunes ouvriers et paysans, les travailleurs de tous les pays, à se représenter d’une manière claire et précise à qui nous avons affaire. Certes, le méprisable bloc trotskiste n’avait pas réussi à détruire le Parti bolchévik, mais les trotskistes ne cessèrent pas, même après l’effondrement du bloc, d’attaquer le Parti bolchévik, autant qu’ils le pouvaient. Toute la période allant de 1903 à la veille même de la révolution est remplie, dans l’histoire de notre mouvement ouvrier, par la lutte de Trotski et des trotskistes contre l’esprit révolutionnaire de plus en plus fort et toujours accru des masses en Russie, par la lutte contre Lénine et contre son Parti » (Procès du centre antisoviétique trotskiste, p. 488).

Le peuple était invité à assister aux audiences, qui se déroulaient dans la Maison des Syndicats de Moscou. Il était mobilisé dans des réunions, assemblées, meetings de rue, d’usines, de chantiers, dont les résolutions, messages, pétitions, requêtes, adresses, exigences et malédictions étaient retransmises par la presse. A Moscou, le 30 janvier, « un immense cortège de travailleurs a défilé sur la place Rouge, réclamant à grands cris la mort des chiens enragés fascistes, du judas Trotski, de Boukharine et de Rykov. Malgré une température de – 20°, deux cent mille personnes participaient à la manifestation ». (Le Temps, 1er février 1937).

La lutte contre le bureaucratisme et l’éducation des cadres

La lutte idéologique engagée par Staline contre les aspects négatifs de la société soviétique avait pour cible principale le bureaucratisme dans le Parti, l’État et les administrations d’entreprises. La mentalité et la pratique bureaucratiques constituent une déviation depuis les origines de l’URSS. Lénine définissait l’État soviétique comme un « État ouvrier avec une déformation bureaucratique » (1921, t. 32, p. 41). Les bureaucrates sont des responsables coupés des masses et tirant privilège de leur situation sociale. La société tsariste légua aux révolutionnaires un poids idéologique considérable ; en outre, une partie de l’administration et des cadres bourgeois avaient dû être employés par le nouvel État soviétique. Lénine, en pleine conscience de ce fait, mena contre le bureaucratisme une lutte sans relâche, notamment contre Trotski 5. Staline, à sa suite, ne faillit pas à cette tâche. A toutes les époques, il critiqua des mauvaises méthodes de direction et une dégénérescence idéologique d’un certain nombre de cadres et de responsables. Il s’efforça d’y remédier par une lutte idéologique inlassable.

Son rapport aux XVIIe congrès (1934) s’étend longuement sur ce point :

« Le bureaucratisme et la paperasserie de l’appareil d’administration : les bavardages sur » la direction en général » au lieu d’une direction vivante et concrète ; la structure fonctionnelle des organisations… et l’absence de responsabilité personnelle ; le défaut de responsabilité dans le travail et le nivellement du système des salaires ; l’absence d’un contrôle systématique de l’exécution des décisions prises, la peur de l’autocritique : voilà les sources de nos difficultés, voilà où ces difficultés résident aujourd’hui. Il serait naïf de croire que ces difficultés puissent être vaincues au moyen de résolutions et de décisions.

Il y a longtemps que les bureaucrates et les paperasseries excellent à proclamer en paroles leur fidélité aux décisions du Parti et du gouvernement, et à les enfouir, en fait, dans les tiroirs. Pour vaincre ces difficultés, il fallait liquider le retard de notre travail d’organisation par rapport aux exigences de la ligne politique du Parti ; il fallait élever le niveau de la direction, en matière d’organisation, dans toutes les sphères de l’économie nationale, au niveau de la direction politique ; il fallait faire en sorte que notre travail d’organisation assurât la mise en pratique des mots d’ordre politiques et les décisions du Parti. Pour vaincre ces difficultés et remporter des succès, il fallait organiser la lutte, y entraîner les masses ouvrières et paysannes ; il fallait mobiliser le Parti lui-même ; il fallait éliminer du Parti et des organisations économiques les éléments douteux, instables, dégénérés ». (Questions du léninisme, p. 710).

La nécessité d’intensifier l’éducation bolchévique des cadres fut à plusieurs reprises mise en avant par la direction du PC(b) de l’URSS. Le mot d’ordre central « la technique décide de tout » fut complété en 1935 par le mot d’ordre « les cadres décident de tout ». A la lutte primordiale pour la formation technique succédait l’éducation politique et idéologique des cadres. Les cadres doivent s’appuyer sur l’idéologie communiste et être capables d’entraîner les masses dans la construction du socialisme.

« Le mot d’ordre : ‘Les cadres décident de tout’ exige de nos dirigeants qu’ils prennent la plus grande sollicitude pour nos travailleurs « petits » et « grands », quel que soit le domaine où ils travaillent ; qu’ils les élèvent avec soin ; qu’ils les aident lorsqu’ils ont besoin d’un appui ; qu’ils les encouragent lorsqu’ils remportent leurs premiers succès ; qu’ils les fassent avancer, etc. Or, en fait, nous enregistrons nombre d’exemples de bureaucratisme sans cœur et une attitude franchement scandaleuse à l’égard des collaborateurs.

C’est ce qui explique proprement qu’au lieu d’apprendre à connaître les hommes pour, après seulement, leur confier des postes, bien souvent on les déplace comme de simples pions. Nous avons appris à bien apprécier les machines et à faire des rapports sur la technique de nos usines et de nos fabriques. Mais ne je connais pas un seul exemple où l’on ait rapporté avec le même empressement sur le nombre d’hommes que nous avons formés, au cours de telle période, et comment nous les avons aidés à se développer, à se retremper au travail. A quoi cela tient-il ? C’est que, chez nous, on n’a pas encore appris à apprécier les hommes, les travailleurs, les cadres ».

« Il faut … comprendre que de tous les capitaux précieux existant dans le monde, le plus précieux et le plus décisif ce sont les hommes, les cadres. Il faut comprendre que dans nos conditions actuelles, ‘les cadres décident de tout’. Si nous avons de bons et nombreux cadres dans l’industrie, dans l’agriculture, dans les transports, dans l’armée, notre pays sera invincible. Si nous n’avons pas ces cadres nous boiterons des deux pieds ». (Staline, Discours aux élèves de l’Académie de l’Armée Rouge, 1935, in L’homme, le capital, le plus précieux, p. 6 et 7).

Le rapport que fit Staline le 3 mars 1937 au Comité Central, Pour une formation bolchévique, est un diagnostic sévère sur la situation idéologique des cadres. Staline appelait à une rectification dans le Parti. Les traits idéologiques du bureaucratisme sont stigmatisés : suffisance, contentement de soi, cécité politique vis-à-vis de l’ennemi de classe, libéralisme et favoritisme vis-à-vis des amis, des parents, des hommes personnellement dévoués, et sectarisme à l’égard des camarades de la base. Staline indiquait pour lutter contre le bureaucratisme des directives essentielles. Il synthétisa les aspects du style de travail communiste.

Pour une formation bolchévique est une œuvre que chaque militant doit étudier. Placer au premier plan l’instruction politique et y voir le moyen de renforcer la combativité et l’autorité du Parti. Critiquer les erreurs des camarades et fuir tout libéralisme. Instruire les masses, mais aussi s’instruire auprès d’elles : la liaison avec les masses rend les bolchéviks invincibles. Staline concluait la discussion par ces mots : « Il faut croire que, maintenant, tous ont compris, ont conscience que l’engouement excessif pour les campagnes économiques et les succès économiques, alors que les questions politiques du Parti sont sous-estimées et oubliées, aboutit à une impasse. Il est donc nécessaire d’orienter l’attention des militants vers les questions du Parti, de sorte que les succès économiques s’allient et marchent de pair avec les succès du travail politique du Parti. » (p. 34)

Il faut combattre le bureaucratisme, l’autosatisfaction, le manque de vigilance révolutionnaire.

« Il faut compléter l’ancien mot d’ordre sur l’assimilation de la technique … par un nouveau mot d’ordre sur l’éducation politique des cadres, sur l’assimilation du bolchévisme et la liquidation de notre crédulité politique ». (p. 25)

« Je pense que si nous pouvions, que si nous savions préparer idéologiquement et aguerrir politiquement nos cadres du Parti, depuis le bas jusqu’en haut, afin qu’ils puissent s’orienter aisément dans la situation intérieure et internationale, si nous savions en faire des léninistes, des marxistes d’une maturité totale, capables de résoudre sans fautes graves les problèmes de la direction du pays, nous résoudrions les neuf dixièmes de toutes nos tâches ». (p. 31)

3. L’éducation socialiste du peuple soviétique

Les dirigeants bolchéviks avaient une conscience aiguë que le système socialiste devait créer « l’homme soviétique de type nouveau », dévoué corps et esprit à la cause de la collectivité, enthousiaste dans l’accomplissement de toutes ses tâches. Staline, en exaltant « le sentiment nouveau, qualité précieuse pour tout militant bolchévik » (Questions du léninisme, p. 868), montrait la voie à suivre. La littérature et l’art révolutionnaire exaltaient les trois grandes luttes du peuple soviétique : la lutte de classes, la lutte pour la production et la lutte pour l’expérimentation scientifique.

Dans le travail idéologique du Parti, un rôle éminent fut joué par le camarade Jdanov. En 1934, le Parti lui confia la direction de la propagande et du travail idéologique et culturel. Dès ce moment, Jdanov engagea une lutte sans répit contre l’idéologie bourgeoise sur le front de la littérature, de la philosophie, de l’art et de la science. Au 1er congrès des écrivains soviétiques (1934), Jdanov et Gorki défendirent le réalisme socialiste, l’art au service du peuple et prenant ses racines dans le peuple. (Voir annexe 3).

Sur le front de l’industrie, le stakhanovisme remplit un rôle d’édification idéologique important. Il y avait, dans le stakhanovisme, deux aspects différents et en partie contradictoires. Les buts du mouvement étaient de dépasser les normes prévues de la productivité du travail et d’exécuter avant terme le second plan quinquennal, de promouvoir la qualité technique du travail et de réduire l’écart entre travail manuel et travail intellectuel.

Le mouvement s’appuyait à la fois sur le stimulant matériel, le salaire étant payé aux pièces, et sur le stimulant idéologique d’accéder à l’héroïsme du travail socialiste.

Dans le cadre de l’émulation socialiste, le système des brigades de choc à la production avait été créé à l’initiative du Parti. Mais le stakhanovisme partit d’une initiative de la base. La réponse décisive au problème des cadres posé par Staline a été donnée par les masses elles-mêmes : « … ce mouvement a commencé, pour ainsi dire, de soi-même, presque spontanément par en bas, sans qu’aucune pression ait été menée par l’administration de nos entreprises. Bien plus. Ce mouvement est né et s’est développé, dans une certaine mesure, contre la volonté de l’administration de nos entreprises, voir dans une lutte contre elles … » (Staline, Discours prononcé à la première conférence des stakhanovistes de l’URSS, 1935, Questions du léninisme, p. 736-737). L’exemple du mineur Alexeï Stakhanov et d’autres travailleurs d’avant-garde, popularisé par Staline, fut repris d’enthousiasme par les masses. Les résultats économiques et idéologiques du mouvement furent très importants. Le Parti fut en mesure de fixer les nouvelles normes à mi-chemin entre les anciennes et celles que spontanément suivaient les héros du travail. Une étape nouvelle de l’émulation socialiste était franchie, une étape supérieure liée à la maîtrise de la technique moderne.

« … Observez de plus près les camarades stakhanovistes. Que sont ces gens ? Ce sont surtout des ouvriers et des ouvrières, jeunes ou d’âge moyen, des gens développées, ferrés sur la technique, qui donnent l’exemple de la précision et de l’attention au travail, qui savent apprécier le facteur temps dans le travail et qui ont appris à compter non seulement par minutes, mais par secondes. La plupart d’entre eux ont passé ce qu’on appelle le minimum technique, et continuent de compléter leur instruction technique. Ils sont exempts du conservatisme et de la routine de certains ingénieurs, techniciens et dirigeants d’entreprise ; ils vont hardiment de l’avant, renversent les normes techniques vieillies et en créent de nouvelles, plus élevées ; ils apportent des rectifications aux capacités de rendement prévues et aux plans économiques établis par les dirigeants de notre industrie ; ils complètent et corrigent constamment les ingénieurs et techniciens ; souvent, ils leur en remontrent et les poussent en avant, car ce sont des hommes qui se sont rendus pleinement maîtres de la technique de leur métier et qui savent tirer de la technique le maximum de ce qu’on peut en tirer. Les stakhanovistes sont encore peu nombreux, mais qui peut douter que demain leur nombre ne soit décuplé ? N’est-il pas clair que les stakhanovistes sont des novateurs dans notre industrie ; que le mouvement stakhanoviste représente l’avenir de notre industrie ; qu’il contient en germe le futur essor technique et culturel de la classe ouvrière ; qu’il ouvre devant nous la voie qui seule nous permettra d’obtenir les indices plus élevés de la productivité du travail, indices nécessaires pour passer du socialisme au communisme et supprimer l’opposition entre le travail intellectuel et le travail manuel ? ». (Ibidem, p. 734)

4. Les résultats de la lutte contre les ennemis de l’intérieur

Dans l’analyse de classes de la société soviétique, Staline, en 1936 et dans les années suivantes, s’est éloigné du matérialisme historique. Il a commis une erreur en estimant qu’après la liquidation des koulaks en tant que classe, il n’y avait plus en URSS de contradiction antagoniste de classes. Il s’est attaqué aux bureaucrates dans le Parti et dans l’État et aux agents du fascisme et de l’impérialisme, mais il n’a pas discerné que ces éléments formaient l’embryon d’une nouvelle bourgeoisie qui était, à l’intérieur de l’URSS, l’ennemi principal du socialisme.

Staline fit une analyse de classe en partie erronée de l’URSS, mais en même temps, son idéologie bolchévique l’avertit constamment des diverses formes que prenait la lutte des ennemis du Parti et des Soviets. Il ne manqua ni de vigilance idéologique ni d’esprit de lutte ni de détermination. Il avait jugé que la lutte de classes était pour l’essentiel terminée en URSS, mais en fait il continuait à la mener vigoureusement. Les erreurs principales qu’il a commises sont des erreurs de théorie (Peu avant sa mort, en 1952, il commença à les redresser, voir plus loin). Staline était le pionnier de la dictature du prolétariat dans l’histoire, et ce fait explique en partie les lacunes de ses analyses.

Il n’est pas conforme au matérialisme historique de sous-estimer, dans la définition des classes sociales, l’importance du niveau idéologique. Lorsque l’ancienne bourgeoisie a perdu le pouvoir et a été expropriée de ses moyens de production, une nouvelle bourgeoisie peut naître sur un autre terrain, le terrain de l’idéologie, dont elle s’empare progressivement jusqu’au moment où elle est en mesure d’usurper le pouvoir politique. Ce processus peut s’opérer de façon plus ou moins pacifique.

« Le processus historique de l’« évolution pacifique » de la dictature nous apprend ceci : la dictature de la bourgeoisie sur le plan culturel aboutit inévitablement à la restauration complète du capitalisme sur les plans politique et économique. Par conséquent, après la prise du pouvoir, le prolétariat, même quand il a achevé la transformation socialiste de la propriété des moyens de production, s’il ne fait pas une révolution culturelle, perdra en fin de compte, non seulement le pouvoir dans le domaine culturel mais aussi, pour l’ensemble du prolétariat et des peuples travailleurs, le droit à l’existence ! » (A propos du « système » Stanilavski, Pékin, 1970, p. 34-35).

En jugeant que le socialisme était établi définitivement en URSS et que le capitalisme ne pouvait plus être restauré par aucune force politique de l’intérieur, Staline se privait du moyen de voir qu’en URSS l’ennemi principal était non pas les agents au service de l’impérialisme en tant que tels (cause externe), mais bien les révisionnistes, les bureaucrates (cause interne). Il ne pouvait pas non plus bien connaître la nature de classe des ennemis qui continuaient à exister en URSS et qu’il combattait d’ailleurs, ayant de leurs agissements une connaissance sensible.

Les débris des koulaks, les agents trotskistes et les espions, et les bureaucrates étaient autant de cibles justes, que Staline a distinguées et attaquées. Mais faute de voir la nature de classe du bureaucratisme 6, faute de comprendre que les idées révisionnistes (qu’il combattit jusqu’à la fin, voir p. 66), sont des idées de la nouvelle bourgeoisie luttant sur le plan idéologique et culturel pour reprendre progressivement le pouvoir, Staline n’avait pas le moyen théorique de systématiser le bilan de ses luttes partielles. L’observation restait au degré sensible, elle n’a jamais sur ce point atteint le degré rationnel. Staline ne sut pas conceptualiser la nature de classe et la nouvelle stratégie que prenaient les ennemis du peuple soviétique. Le processus de connaissance qui part du concret pour aller à l’abstrait et qui de l’abstrait retourne au concret, ne suivait pas son cours dialectique. A une observation sensible répondaient immédiatement des mesures empiriques.

Cette insuffisance de l’élaboration théorique explique la contradiction existant entre l’analyse de classes de Staline et la pratique de lutte effective qui fut la sienne. Elle explique aussi le caractère désordonné, non systématique des différentes luttes. Elle a eu pour conséquence que l’enjeu lui-même du combat était obscurci. Faute d’être frappée au centre, l’hydre renaissait à chaque coup, et prospérait. Les cibles restaient éparses, car le Parti ne connaissait pas le lien politique et idéologique qui unissait ses ennemis entre eux. Cela affaiblissait la portée et l’efficacité de ses coups, et cela pouvait même dans une certaine mesure affecter la justesse de leur orientation. De bons communistes furent frappés injustement 7, tandis que les principaux ennemis restaient hors d’atteinte. Il était malaisé aussi de distinguer, dans ces conditions, les contradictions antagonistes des contradictions au sein du peuple.

Si les critères de classe ne sont pas clairement définis afin de reconnaître l’ami de l’ennemi, l’ennemi irréductible et l’adversaire qu’il est possible de rallier, il faut nécessairement recourir à des moyens politiquement moins sûrs tels que la dénonciation et l’aveu ou à des raisonnements spécieux tel celui-ci : « Il faut démolir et rejeter loin de nous une … théorie pourrie, selon laquelle ne pourrait être saboteur celui qui ne se livre pas constamment au sabotage et qui, ne serait-ce que de temps à autre, montre des succès de son travail. Cette étrange théorie dénonce la naïveté de ses auteurs. Il n’est pas de saboteur qui ne s’avise de saboter continuellement, s’il ne veut pas être démasqué à bref délai. Au contraire, un vrai saboteur doit, de temps en temps, montrer des succès dans son travail, cela étant pour lui l’unique moyen de se préserver comme saboteur, de gagner la confiance et de poursuivre son travail de sabotage ». (Pour une formation bolchévique, p.27). Les dénonciations n’avaient jamais de conséquences aussi négatives que lorsque les traîtres ou les bureaucrates eux-mêmes dirigeaient l’instruction, témoins les crimes de Iagoda et de Iejov, que Staline lui-même dut réprimer.

Quant au bureaucratisme, Staline en vit certains effets, et il les combattit. Mais il ne mit pas ce phénomène en rapport avec l’ensemble de la structure sociale, et il n’en tira donc pas les conséquences politiques nécessaires. Les contradictions qui continuent à exister pendant la période de construction du socialisme – que Staline eut, l’époque, le grand tort de trop vite croire achevée – entre fonctions de direction et fonctions d’exécution, travail intellectuel et travail manuel, industrie et agriculture, ville et campagne, sont le fondement objectif de l’idéologie révisionniste sur lequel une nouvelle classe exploiteuse peut se former, si les révolutionnaires prolétariens ne mènent pas une lutte intransigeante et conséquente contre ce danger. Les bureaucrates sont les agents principaux de cette nouvelle bourgeoisie en train de se former. N’étant pas frappés à la tête, ils purent continuer à poser leurs sapes, sans être démasqués.

Quant à ses opposants affirmés, le PC(b) de l’URSS mena contre eux une lutte exemplaire du début à la fin. A l’époque où les contradictions avec eux n’étaient pas antagonistes, une longue lutte idéologique a patiemment réfuté un à un tous leurs « arguments ». Lorsqu’ils étaient devenus des ennemis du peuple, les procès démontrèrent la logique interne allant de positions politiques erronées et jamais corrigées jusqu’aux agissements criminels d’opposants qui refusèrent toujours de désarmer. La justice a fait expliquer concrètement à Radek (voir annexe 2 (6)) et Boukharine (voir annexe 2 (7)) comment une politique gauchiste ou de droite, quand elle persiste et s’aggrave, mène en définitive à la trahison contre-révolutionnaire, au fascisme.

La cible centrale des procès était Trotski.

Trotski, épargné par la justice soviétique en 1929, mit à profit son exil pour continuer ses attaques haineuses contre le Parti bolchévik et son dirigeant respecté, le camarade Staline. Ces attaques prirent deux formes différentes : sous le couvert de « critiques politiques », Trotski tramait un complot pour le renversement du pouvoir soviétique.

Voyons d’abord les « critiques politiques ».

En 1936, dans son factum « La Révolution trahie », Trotski « argumente » autour de deux thèses, à savoir :

1. Que les « formes soviétiques de la propriété fondées sur les acquisitions les plus récentes de la technique américaine et étendue à toutes les branches de l’économie donneraient déjà le premier stade du socialisme » ;

2. Qu’il existe en URSS une contradiction entre les normes sociales de la production et les normes » bourgeoises de la distribution ; cette contradiction (définie en termes juridiques) est fondée sur la pauvreté de la société et a pour conséquence inévitable l’existence au pouvoir d’une « bureaucratie ».

Ces deux thèses sont des thèses économistes Elles assujettissent complètement le niveau politique et le niveau idéologique à l’infrastructure. La lutte de classes politique et idéologique est dans les deux cas niée au moyen d’une définition technocratique du développement. La dictature du prolétariat reçoit une « définition » exclusivement économique. « Une économie socialisée, écrivait Trotski, en train de dépasser, au sens technique, le capitalisme, serait réellement assurée d’un développement socialiste en quelque sorte automatique, ce que l’on ne peut malheureusement dire en aucune façon de l’économie soviétique » (p. 43). Et pareilles déclarations révisionnistes ne sont qu’une mouture de la « thèse » sur l’impossibilité de construire le socialisme en URSS. Aussi rendaient-elles tout programme constructif impossible.

Tout ce que Trotski, emprisonné dans sa logique réactionnaire, pouvait proposer officiellement à ses partisans, c’était de remplacer une « bureaucratie » par une autre, la sienne. La « révolution politique » qu’il était censé vouloir avait pour but de changer les méthodes de direction en URSS : il faut, disait Trotski avec ses amis bourgeois et petits-bourgeois hostiles à la dictature du prolétariat, libéraliser le régime. D’où, dans la bouche du plus grand des bureaucrates, un catalogue de critiques acerbes contre tous les points négatifs, réels ou inventés, de la construction du socialisme en URSS. Les trotskistes d’aujourd’hui, dignes successeurs de leur « prophète », font de ces « thèses » leur marche-pied pour attaquer la construction du socialisme en République populaire de Chine.

Mais, en réalité, « La Révolution trahie » et autres pamphlets superficiels et platoniques, toutes les œuvres littéraires de Trotski depuis 1929, n’ont été qu’une façade destinée à masquer des agissements autrement agressifs. Déjà le « Bulletin de l’Opposition », diffusé clandestinement en URSS depuis 1930 à l’adresse des diplomates, fonctionnaires de l’État, militaires et intellectuels qui avaient autrefois suivi Trotski ou qui semblaient pouvoir être influencés par lui, exposait plus franchement le « programme » concret que Trotski poursuivait réellement. En octobre 1934, par exemple, on y lisait qu’ « Il serait enfantin de penser que la bureaucratie stalinienne peut être chassée au moyen d’un congrès de Parti ou des Soviets. Ces moyens normaux, constitutionnels ne sont pas valables désormais pour chasser la clique au pouvoir. Elle ne peut être forcée de passer le pouvoir à l’avant-garde prolétarienne que par la violence (souligné par Trotski).

La vraie conclusion, dictée par la logique de la « Révolution trahie », c’est la nécessité de la prise du pouvoir par la force par la clique trotskiste. Que voulait Trotski ? Le socialisme en URSS était impossible, selon lui. Lui-même était privé de toute audience auprès des masses soviétiques, et il savait très bien pourquoi 8. L’unique voie donc qui lui restait ouverte était la perpétration d’un coup d’Etat contre-révolutionnaire jouissant de l’appui du seul allié possible, l’ennemi de l’extérieur de l’URSS, le fascisme. C’est ce plan criminel qu’établirent les aveux de Piatakov et Radek (voir annexe 2, 1). Trotski lui-même a signé des aveux qui valent ceux des procès : « Dans le Parti, Staline s’est mis au-dessus de toute critique et au-dessus de l’État. Il est impossible de le destituer, sauf par l’assassinat. Tout oppositionniste devient ipso facto un terroriste » (Interview par W.R. Hearst, New York Evening Journal, 26/01/1937).

Au terme de sa carrière d’aventurier il laissa tomber le masque et prit des positions ouvertement contre-révolutionnaires. Alors que la deuxième guerre mondiale était déjà commencée et que les troupes nazies s’apprêtaient à envahir l’Union soviétique, Trotski, tout en continuant à assurer l’Etat ouvrier de son « soutien » hypocrite, appela le peuple soviétique à se retourner contre ses dirigeants : « Contre l’ennemi impérialiste nous défendrons l’URSS de toute notre force. Mais les conquêtes de la Révolution d’Octobre ne serviront le peuple que si celui-ci se montre capable de traiter la bureaucratie stalinienne comme autrefois il traita la bureaucratie tsariste et la bourgeoisie » (Fourth International, octobre 1940).

Les procès et les condamnations des éléments antisoviétiques furent une œuvre de salubrité socialiste. De 1936 à 1938, la dictature du prolétariat a éliminé des ennemis irréductibles de l’URSS. Il n’y eut pas, grâce à cela, de cinquième colonne en URSS, pendant la guerre. L’enquête mit en évidence l’évolution politico-criminelle des accusés. Mais l’analyse ne découvrit pas que la trahison de Trotski-Boukharine était l’aboutissement d’une lutte avant tout interne et que ce fut la conjoncture internationale, dominée par le fascisme, qui inclina ces anciens opposants à prendre ce cours-là de la voie bourgeoise. La nature de classe des trotskistes et celle des bureaucrates dans le Parti et dans l’Etat était la même nature révisionniste et bourgeoise. Trotski, exilé, sans appui dans les masses et d’ailleurs dénué de toute confiance en elles, ne pouvait plus compter que sur les fascistes ; d’autre part, les révisionnistes de l’intérieur, cachés dans le Parti, poursuivaient par des moyens différents le même but que lui : par la trahison ou par le travail de sape idéologique il ne s’agissait jamais que de renverser le pouvoir soviétique et de restaurer le capitalisme.

C. LA GUERRE MONDIALE

Dès 1937, les impérialistes allemands et japonais étaient les plus grands ennemis des peuples du monde. A la différence de 1914, quand tous les impérialistes se préparaient à une guerre mondiale, tandis que les autres impérialistes (surtout anglais et français) essayaient de dresser l’axe contre l’URSS et qu’ils cédaient du terrain (Munich), en espérant conserver la paix et sauvegarder l’exploitation de leurs peuples et de leurs colonies. A la différence de 1914, les peuples avaient en l’URSS un puissant rempart pour la lutte d’indépendance nationale et pour le socialisme.

Donc, deux camps étaient l’un en face de l’autre. D’un côté, les puissances agressives, et de l’autre, l’URSS et les peuples du monde. Mais les futurs alliés cherchaient à signer un pacte avec l’Allemagne, pour qu’elle écrase l’URSS (cf. Bureau d’information soviétique et Entretiens De Gaulle-Staline).

Quelle fut la riposte de l’URSS ?

Politique extérieure : le front de l’impérialisme allemand et japonais

Toute la politique extérieure soviétique visa à affaiblir les impérialistes allemands et japonais, principaux ennemis des peuples du monde. Tout d’abord, l’URSS tenta de signer un pacte militaire et politique avec les puissances alliées (qui refuseront le passage des troupes soviétiques en Pologne pour atteindre l’Allemagne, alors que l’URSS n’a pas de frontières communes avec ce pays) ; puis, devant l’échec des négociations, l’URSS signa un traité de non-agression avec l’Allemagne. D’un côté, l’Allemagne s’intéressait plus aux colonies et aux pays capitalistes industrialisés ; de l’autre côté, l’URSS voyait poindre, après les dures années 20, une nouvelle agression des impérialistes coalisés.

Le Pacte Germano-soviétique laissa à l’URSS un délai de près de deux ans pour se préparer à la guerre et lui permit de renforcer ses positions stratégiques par l’occupation d’une partie de la Pologne et de la Finlande. Mais surtout, ce Pacte consacra la politique de coexistence pacifique de l’URSS et par conséquent, la division du camp impérialiste (cf. Mao Tsé-toung, t. 2, p. 281-287 ; Staline, Ordre du jour du 03/07/1941 (voir annexe 4).

Dès le début de la guerre, des mouvements d’indépendance nationale se levèrent dans le monde entier, souvent sous la direction des Partis communistes. Les alliés impérialistes refusèrent longtemps d’ouvrir un deuxième front, malgré les demandes pressantes de l’URSS, et jouèrent un faible rôle au début de la guerre. Cependant, la force des peuples croissait et détruisit inexorablement l’impérialisme allemand et japonais.

L’URSS accorda son soutien à la guerre des peuples d’Europe contre l’impérialisme agresseur, y compris le peuple allemand (Cf. par exemple, les ordres du jour du 03/07/1941 et du 23/02/1942). Staline, comptant sur les peuples, dénonçait la fragilité de l’« Ordre nouveau » en Europe (Ordre du jour du 06/11/1941). De nombreux soldats russes luttèrent avec la Résistance européenne.

Envers les alliés, l’URSS exigeait un deuxième front avant toute négociation au sommet.

Quelle fut la position politique de l’URSS ? Briser l’Allemagne nazie et défendre le droit à l’autodétermination des peuples opprimés (Ordre du jour du 06/11/1943).

Les négociations de Téhéran entre l’URSS et les Alliés commencèrent lorsque le principe du deuxième front fut acquis pratiquement. Les accords prévoyaient le démembrement de l’Allemagne, la ligne Curzon en Pologne, l’appartenance des Etats baltes au camp de l’URSS. Dans toutes les négociations avec les Alliés, l’URSS s’en tint à sa position antifasciste et internationaliste. En outre, elle prévoyait déjà la fin de la guerre et le changement d’ennemi principal (les États-Unis et l’Angleterre devenant les impérialistes les plus dangereux) et essaya donc d’obtenir un maximum de garanties pour elle-même et pour les peuples d’Europe, contre les visées impérialistes des Alliés.

A Yalta, en 1944, l’après-guerre devint une préoccupation constante, car la victoire contre l’Allemagne nazie était alors assurée. L’URSS voulait des gouvernements démocratiques (composés d’anti-fascistes et pratiquant une politique de paix) et défendit, par exemple, les gouvernements démocratiques yougoslaves et polonais contre les Alliés. Cependant, les pays occupés par l’Angleterre (la Grèce notamment) et par les USA (l’Europe occidentale) tombèrent sous la coupe des impérialistes avec des gouvernements tout à leur service, alors que les pays libérés par l’URSS seraient dirigés par des gouvernements démocratiques (le plus souvent sous la forme d’une alliance entre socialistes et communistes). Les réactionnaires et autres révisionnistes appellent cela « le partage du monde » (ex. Fejtö). En fait, il s’agit d’un nouveau rapport de forces au niveau mondial dans lequel l’URSS et les pays démocratiques, les Partis communistes et les peuples du monde s’opposent à de nouveaux ennemis impérialistes.

L’URSS, pratiquant l’internationalisme prolétarien, a toujours suivi le principe que la libération d’un peuple doit être l’œuvre principale de ce peuple lui-même, comme nous l’enseigne tous les jours le peuple vietnamien. Dans les pays d’Europe de l’Est, où le rapport des forces était favorable à l’URSS, des gouvernements démocratiques se sont installés dans des conditions évidemment plus aisées.

Potsdam, en 1945, règlera le démantèlement de l’Allemagne, la reconnaissance diplomatique des gouvernements d’Europe orientale, ainsi que la reconnaissance de la frontière Oder-Neisse pour la Pologne. L’ONU fut mise en place, à la demande des Alliés (Pour les accords, voir « Staline, négociateur » de Hentsch).

En ce qui concerne les rapports avec les Partis communistes, toutes les négociations avec les Alliés ont prouvé que l’URSS pratiquait l’internationalisme prolétarien et défendait les intérêts des peuples du monde. L’après-guerre confirmera encore cette position inébranlable de l’URSS.

En 1943, intervenait la décision de dissoudre le Komintern (voir annexe 5). Cette décision fut prise au moment où les Partis communistes de la IIIe Internationale connaissaient un grand développement, s’appuyant sur un front et menant la lutte armée contre l’impérialisme allemand et japonais. Les conditions internationales et nationales étant différentes de la période d’avant-guerre, les relations entre Partis communistes devaient nécessairement tenir compte du développement des Partis et Fronts comprenant toutes les couches de la population opposées à l’occupation impérialiste.

Le 28 mai 1943, Staline déclarait à un correspondant de l’agence Reuter :

« La dissolution de l’Internationale communiste est justifiée et opportune, car elle facilite l’organisation d’une poussée générale de toutes les nations éprises de liberté contre leur ennemi commun, l’hitlérisme.

La dissolution de l’Internationale est justifiée, car :

a) Elle dénonce le mensonge des hitlériens qui prétendent que « Moscou » aurait l’intention de s’ingérer dans la vie des autres États et de les « bolcheviser ». Un terme est désormais mis à ce mensonge.

b) Elle dénonce la calomnie des adversaires du communisme dans le mouvement ouvrier, qui prétendent que les partis communistes des différents pays oeuvrent soi-disant non pas dans l’intérêt de leur peuple, mais sur un ordre venu du dehors. Désormais un terme est également mis à cette calomnie.

c) Elle facilite l’action des patriotes des pays attachés à la liberté pour unir les forces progressives de leur pays, sans distinction de parti ni de religion, en un seul camp de libération nationale, pour développer la lutte contre le fascisme.

d) Elle facilite l’action des patriotes de tous les pays pour unir tous les peuples attachés à la liberté en un seul camp international, pour lutter contre la menace de la domination de l’hitlérisme sur le monde, en déblayant ainsi le chemin en vue d’organiser dans l’avenir la confraternité des peuples sur la base de l’égalité des droits.

Je pense que toutes ces circonstances prises ensemble aboutiront encore à affermir le front unique des Alliés et des autres nations unies dans la lutte qu’ils mènent pour triompher de la tyrannie hitlérienne.

J’estime que la dissolution de l’Internationale communiste est parfaitement opportune, car aujourd’hui précisément que le fauve fasciste tend ses dernières forces, il importe d’organiser la poussée générale des pays épris de liberté pour achever cette bête fauve et délivrer les peuples du joug fasciste ».

En 1947, le dirigeant hongrois Farkas, confirmait la justesse de cette décision en ces termes : « La dissolution du Komintern était indispensable et elle était utile. On ne s’apercevait pas des différences des situations nationales, on travaillait sur des bases uniformes ». (Intervention à la conférence de formation du Kominform)

Politique intérieure : unir le peuple contre l’impérialisme nazi

La politique intérieure était déterminée par la contradiction principale, c’est-à-dire que la préparation de la guerre fut menée à tous les niveaux. Certains contre-révolutionnaires (comme Grigorenko) remettent en question, en soulevant des aspects prétendument techniques, le travail immense accompli par les peuples d’URSS. Ils nient deux faits déterminants :

1) L’URSS était encore faiblement industrialisée (par rapport aux puissances impérialistes) et, par conséquent, ne pouvait disposer d’une infrastructure pareille à celle des nazis au début de la guerre.

2) La victoire de l’URSS sera éclatante et sera acquise, presque sans aide, devant l’impérialisme le plus agressif.

La puissance socialiste réside donc à la fois dans le développement extrêmement rapide de l’industrialisation et surtout dans l’appui inconditionnel du peuple soviétique à son régime.

En été 1941, l’Allemagne envahit l’URSS et dès l’hiver, l’impérialisme allemand est en perte de vitesse. Après six mois de guerre, c’est le début de la fin pour les nazis !

La victoire de l’URSS est celle du peuple soviétique, de son armée et de son Parti. Cette victoire restera resplendissante à jamais.

A l’intérieur de l’URSS, une guerre de libération nationale fut menée pour sauvegarder les conquêtes du socialisme. Le Parti communiste, dans ses ordres du jour, fit appel au patriotisme socialiste pour chasser les agresseurs allemands, sur la base de l’union de tous les peuples d’URSS. L’Armée rouge et les partisans constituaient la force principale, appuyés par le front intérieur qui continuait à construire le socialisme (voir par exemple Ordre du jour du 28/09/1943). L’Armée rouge était préparée militairement dans le but de protéger le socialisme, la paix et l’amitié entre les peuples (Ordre du jour du 23/02/1942).

La guerre fut très acharnée. Sur les 256 divisions nazies existantes, les Soviétiques durent se battre contre 179 divisions. Ils supportèrent le poids principal de toute la guerre pendant de nombreux mois. Dès novembre 1941, la victoire était au bout du chemin. L’héroïsme du peuple soviétique et la direction juste du Parti furent les deux facteurs qui permirent à un pays encore faiblement industrialisé, non expérimenté à la guerre depuis les années 20, de vaincre l’impérialisme le plus féroce de l’époque. A la fin de la guerre, Staline déclara que l’épreuve avait permis de juger le régime et le gouvernement soviétique et que le résultat était largement positif (voir « Pour une paix durable »).

L’unité existant entre le peuple, son gouvernement et son Parti est la meilleure preuve que les communistes doivent opposer à tous les traîtres « redresseurs de torts » qui, après la mort de Staline, essaieront vainement de ternir son rôle. Jamais les arbres ne cacheront la forêt. Si les erreurs sont inévitables, les communistes sont capables de les corriger et de conduire le peuple à la victoire. C’est ce que fit le PC(b) de l’URSS sous la direction de Staline. Les quelques vingt millions de Soviétiques qui tombèrent à la guerre moururent pour la cause du socialisme : tel est le jugement du peuple soviétique uni derrière le Parti communiste et Staline.

« En ce qui concerne notre pays, cette guerre a été pour lui la plus cruelle et la plus pénible des guerres que notre patrie ait jamais connues au cours de son histoire. Mais la guerre ne fut pas seulement une malédiction. Elle fut en même temps une grande école, où toutes les forces du peuple ont été mises à l’épreuve et vérifiées. La guerre a mis à nu tous les faits et événements à l’arrière et sur le front, elle a arraché sans pitié tous les voiles et camouflages qui dissimulaient le visage véritable des Etats, des gouvernements et des partis et les a fait entrer en scène sans masques, sans fards, avec tous leurs défauts et aussi toutes leurs qualités. La guerre a constitué une sorte d’examen pour notre régime soviétique, notre État, notre gouvernement, notre Parti communiste, et elle a établi le bilan de leur travail, comme si elle avait voulu nous dire : « Les voilà, vos hommes et vos organisations, avec leurs actes et leur vie de tous les jours ; examinez-les attentivement et jugez-les suivant leurs mérites ».

Tel est l’un des aspects positifs de cette guerre. Pour nous autres, électeurs, cette circonstance a une grande importance, car elle nous aide à apprécier objectivement et rapidement l’activité du Parti et de ses hommes et à aboutir à des conclusions justes. En d’autres temps, il aurait fallu étudier les interventions et les rapports des représentants du Parti, les analyser, confronter leurs actes avec leurs paroles, établir des bilans, etc… Cela exige un travail difficile et compliqué qui ne garantit d’ailleurs pas qu’il n’y aura pas d’erreurs commises. C’est tout autre chose à présent que la guerre est terminée, que la guerre elle-même a vérifié le travail de nos organisations et de nos dirigeants et en a établi le bilan. A présent, il nous est bien plus facile de faire le point et d’aboutir à des conclusions justes ». (Staline, Pour une paix durable, 09/02/1946)

Auparavant, Staline avait déjà abordé les rapports entre le peuple et le Parti :

« Notre gouvernement a fait pas mal de fautes. Nous avons connu des moments où la situation était désespérée, en 1941 et 1942, quand notre armée battait en retraite, quand elle abandonnait nos villes et nos villages d’Ukraine et de Biélorussie, de Moldavie, de la région de Léningrad, des républiques de la Baltique, de Carélie-Finlande, quand elle les abandonnait parce qu’il n’y avait rien d’autre à faire. Un autre peuple aurait dit à son gouvernement : « Vous n’avez pas justifié notre attente, allez-vous en, nous prendrons un autre gouvernement qui fera la paix avec l’Allemagne et qui assurera la tranquillité ». Le peuple russe ne l’a pas fait, parce qu’il avait foi en la justesse de la politique de son gouvernement. Il a accepté le sacrifice pour que l’Allemagne fût écrasée. Et cette confiance du peuple russe dans son gouvernement des Soviets a été la force décisive qui a assuré la victoire historique sur l’ennemi de l’humanité, sur le fascisme ».

« Notre victoire signifie avant tout que c’est notre régime social soviétique qui a vaincu, que le régime social soviétique a supporté avec succès l’épreuve du feu de la guerre et qu’il a démontré son entière viabilité. Comme l’on sait, dans la presse étrangère ont été exprimées plus d’une fois des affirmations suivant lesquelles le régime social soviétique était une « expérience risquée », vouée à l’effondrement, que le régime soviétique représentait un « château de cartes » sans racine dans la vie et imposé au peuple par les organes de la Tchéka, qu’il suffirait d’une légère poussée de l’extérieur pour que ce « château de cartes » tombe en mille morceaux.

A présent nous pouvons dire que la guerre a renversé toutes ces allégations de la presse étrangère, comme non fondées. La guerre a montré que le régime social soviétique était un régime véritablement populaire, issu des entrailles du peuple et jouissant de son puissant soutien, que le régime social soviétique était une forme particulièrement viable et stable d’organisation de la société ».

Pendant la guerre, l’URSS prouva la supériorité du système socialiste en sortant principal vainqueur des nazis. L’URSS affaiblit ainsi le camp impérialiste et favorisa grandement la lutte des peuples du monde contre l’impérialisme. Dans beaucoup de pays, les Partis communistes dirigeaient ces luttes qui aidaient l’URSS en affaiblissant l’impérialisme. Parfois même, les Partis communistes sortant de la Résistance avec leurs peuples, ont dirigé la lutte pour le pouvoir et ont agrandi le camp socialiste en cette période de crise de l’impérialisme mondial : pays de l’Est-européen, Chine, Vietnam.

Après la guerre, le rapport de forces au niveau mondial change donc en faveur du socialisme et prépare une nouvelle crise de l’impérialisme. Cette époque, c’est celle de la montée du socialisme, du développement des luttes de libération nationale et par conséquent, celle de la fin de l’impérialisme, est intimement liée à Staline. Staline est le principal dirigeant et le meilleur symbole de toute cette époque.

Mais si l’impérialisme perd du terrain au niveau mondial, il possède encore une énorme influence dans les idées, les mœurs, les habitudes des gens. L’idéologie bourgeoise est le facteur déterminant qui provoque l’apparition du révisionnisme, en particulier dans le camp socialiste. Le contraire du socialisme, le capitalisme, existe toujours, même après la prise du pouvoir, et si l’on n’y prend pas garde, il se développe sous le socialisme, puis rétablit l’ancien système d’exploitation. La Yougoslavie sera le premier pays à changer de camp et à rejoindre l’impérialisme en devenant le précurseur du révisionnisme moderne.

En URSS même, le révisionnisme grandit et sera une préoccupation des marxistes-léninistes qui cependant, pour des raisons objectives (inexpérience) et pour des raisons subjectives (éloignement du matérialisme dialectique) ne réussiront pas à l’extirper du pays ; il en va de même pour certains pays de l’Est.

Sur la base de l’expérience soviétique et du développement interne, le Parti communiste chinois, sous la direction du camarade Mao Tsé-toung, résoudra ce problème théoriquement et pratiquement par Grande Révolution Culturelle Prolétarienne. Le Parti du Travail d’Albanie dirigé par le camarade Enver Hoxha, apportera une contribution inestimable à cette question. L’époque de Staline est donc aussi celle des premières tentatives marxistes-léninistes pour analyser et combatte l’herbe vénéneuse du révisionnisme moderne.

III. LA LUTTE CONTRE LE RÉVISIONNISME ET CONTRE L’IMPÉRIALISME AMÉRICAIN (1945-1956)

A. POLITIQUE INTERNATIONALE

L’Allemagne et le Japon vaincus, l’ennemi principal des peuples du monde devient l’impérialisme américain qui essaie de conquérir le monde. Mais le camp socialiste est puissant, aidé par les Partis communistes devenus influents et par les guerres de libération nationale (Vietnam, Corée par exemple) contre l’impérialisme. En 1947, à l’initiative de Staline et du parti bolchévik de l’URSS se tint la Conférence de formation du Kominform (Bureau d’information des principaux Partis communistes et ouvriers d’Europe). La reconstruction d’une organisation internationale des communistes était devenue une nécessité urgente, car les peuples du monde devaient s’unir contre le principal ennemi commun, l’impérialisme américain ; en outre, le courant révisionniste se renforçait dans le mouvement communiste international, en particulier en Italie et en France.

Le contenu de la Conférence prouve la fermeté sur les principes révolutionnaires de Staline et du Parti bolchévik, qui leur donne à cette époque le rôle de guide du mouvement communiste international, et l’opposition qui existait entre la ligne de Staline et celle de Thorez et de Togliatti (voir Staline contre le révisionnisme, documents publiés par Ligne rouge).

Jdanov, secrétaire du PC(b) de l’URSS fit à la conférence de 1947 un rapport remarquable sur la situation internationale. Il analysa l’impérialisme américain et prouva que celui-ci était devenu l’ennemi numéro un des peuples du monde, tandis que l’Angleterre était affaiblie. Il assura que l’URSS resterait le bastion de la lutte antiimpérialiste et le fidèle allié des pays socialistes. Et surtout, il souligna le danger principal du mouvement communiste qui est une sur-estimation de l’ennemi et une sous-estimation de soi-même.

« Le but que se pose le nouveau cours expansionniste des Etats-Unis est l’établissement de la domination mondiale de l’impérialisme américain. Ce nouveau cours vise à la consolidation de la situation de monopole des Etats-Unis sur les marchés, monopole qui s’est établi par suite de la disparition de leurs deux concurrents les plus grands – l’Allemagne et le Japon – et par l’affaiblissement des partenaires capitalistes des États-Unis : l’Angleterre et la France.

… Mais sur le chemin de leurs aspirations à la domination mondiale, les Etats-Unis se heurtent à l’URSS avec son influence internationale croissante, comme au bastion de la politique antiimpérialiste et antifasciste, aux pays de la nouvelle démocratie qui ont échappé au contrôle de l’impérialisme anglo-américain, aux ouvriers de tous les pays y compris les ouvriers de l’Amérique même qui ne veulent pas de nouvelle guerre de domination au profit de leurs propres oppresseurs.

… Le but principal du camp impérialiste consiste à renforcer l’impérialisme, à préparer une nouvelle guerre impérialiste, à lutter contre le socialisme et la démocratie et à soutenir partout les régimes et mouvements profascistes réactionnaires et antidémocratiques. »

Jdanov dénonçait ensuite le plan Marshall visant à inféoder les pays qui étaient prêts à l’accepter. Aux pays détruits par l’impérialisme japonais et allemand, il proposait une autre solution :

« La condition fondamentale et décisive de la reconstruction économique doit consister dans l’utilisation des ressources intérieures de chaque pays et dans la création de sa propre industrie. … L’union soviétique défend inlassablement la thèse que les rapports politiques et économiques réciproques entre les différents Etats doivent s’édifier exclusivement sur les principes d’égalité des droits de chaque Etat et le respect réciproque de leur souveraineté. La politique extérieure soviétique et en particulier les rapports économiques soviétiques avec les Etats étrangers sont basés sur le principe d’égalité des droits assurant dans les accords conclus des avantages bilatéraux. Les traités avec l’URSS constituent des accords réciproquement avantageux pour les parties contractantes. Ils ne contiennent jamais rien qui pourrait porter atteinte à l’indépendance de l’État, à la souveraineté nationale des parties contractantes. Cette distinction fondamentale des accords de l’URSS avec les autres États saute nettement aux yeux, surtout maintenant à la lumière des accords injustes, basés sur l’inégalité des droits, que les États-Unis concluent et préparent.

… Actuellement, le danger principal pour la classe ouvrière consiste en la sous-estimation de ses propres forces, et en la surestimation des forces de l’adversaire. De même que dans le passé, la politique munichoise a encouragé l’agression hitlérienne, de même aujourd’hui, les concessions à la nouvelle orientation des États-Unis d’Amérique et du camp impérialiste, peuvent inciter ses inspirateurs à devenir plus insolents et plus agressifs. C’est pourquoi, les Partis communistes doivent se mettre à la tête de la résistance dans tous les domaines – gouvernementale, économique et idéologique – aux plans impérialistes d’agression et d’expansion. Ils doivent serrer leurs rangs, unir leurs efforts sur la base d’une plate-forme antiimpérialiste et démocratique commune, et rallier autour d’eux toutes les forces démocratiques et patriotiques du peuple.

Une tâche particulière incombe aux partis communistes frères de France, d’Italie, d’Angleterre et des autres pays. Ils doivent prendre en mains le drapeau de la défense de l’indépendance nationale et de la souveraineté de leurs propres pays. Si les Partis communistes frères restent fermes sur leurs positions, s’ils ne se laissent pas influencer par l’intimidation et le chantage, s’ils se comportent résolument en sentinelles de la paix durable et de la démocratie populaire, de la souveraineté nationale, de la liberté et de l’indépendance de leur pays, s’ils savent, dans leur lutte contre les tentatives d’asservissement économique et politique de leur pays, se mettre à la tête de toutes les forces disposées à défendre la cause de l’honneur et de l’indépendance nationale, aucun des plans d’asservissement de l’Europe ne pourra être réalisé ». (Jdanov, Situation internationale, 1947)

Ce discours est une violente attaque contre l’impérialisme américain et contre tous ceux qui capitulent devant lui. La capitulation devant l’impérialisme est l’essence idéologique du révisionnisme, et la mise en garde du PC(b) de l’URSS suivant laquelle « le danger principal pour la classe ouvrière consiste en la sous-estimation de ses propres forces et en la surestimation des forces de l’adversaire » s’adresse aux partis communistes d’Europe occidentale, occupés à collaborer avec l’impérialisme américain en soutenant les gouvernements bourgeois. A cette conférence, des critiques sévères furent adressées au Parti communiste italien et au Parti communiste français qui développaient un cours révisionniste (légalisme, parlementarisme, refus de la mobilisation révolutionnaire des masses). Le Parti communiste italien et le Parti communiste français durent d’ailleurs faire une autocritique qui, aujourd’hui, nous le savons, était totalement hypocrite (voir annexe 6).

La lutte contre le révisionnisme, après la guerre, a été menée de façon inébranlable par le PC(b) de l’URSS.

1) Envers les pays socialistes, l’URSS pratiqua l’internationalisme prolétarien et fournit une aide économique, politique et militaire. Par exemple, en défendant vigoureusement la Roumanie et la Yougoslavie devant la pression anglaise. La Chine et l’Albanie sont reconnaissantes de l’aide économique reçue de l’URSS pour impulser l’édification socialiste (voir Mao Tsé-toung, t. 2, p. 357-8 : Staline, l’ami du peuple chinois et La grande amitié, texte écrit par Mao Tsé-toung à la mort de Staline (voir annexe 13)).

Hoxha, dans son discours à la conférence des quatre-vingt-un partis de 1960 déclara : « Les dirigeants soviétiques ont accusé le camarade Staline d’être soi-disant intervenu auprès des autres partis pour leur imposer les points de vue du Parti bolchévik ; nous pouvons témoigner que jamais le camarade Staline n’a agi de la sorte envers nous, qu’il s’est comporté en toute occasion à l’égard du peuple albanais et du Parti du Travail d’Albanie comme un grand marxiste, comme un internationaliste éminent, comme un camarade, un frère et un ami sincère du peuple albanais. En 1945, lorsque notre peuple était menacé de famine, le camarade Staline dérouta les navires chargés de céréales destinés au peuple soviétique, qui souffrait pourtant lui-même à l’époque d’une pénurie de vivres, pour les envoyer aussitôt au peuple albanais. Tout au contraire, la direction soviétique actuelle s’est permis des actions indignes ».

Cependant, Tito choisit le révisionnisme et se vendit à l’impérialisme américain qui lui prodigua de 1949 à 1963 environ 3500 millions de dollars (« La Yougoslavie est-elle un pays socialiste ?, par le Parti communiste chinois). Tito voulut annexer l’Albanie, refusa d’aider la Grèce insurgée et s’allia avec l’Occident capitaliste. A l’intérieur, il s’appuya sur les koulaks, l’appareil policier et agit en nationaliste bourgeois. La Résolution du Bureau d’Information de 1949, est un document important dans l’histoire de la lutte contre le révisionnisme moderne.

« Alors que tous les amis véritables de la paix, de la démocratie et du socialisme voient dans l’URSS une puissante forteresse du socialisme, un défenseur fidèle et inflexible de la liberté et de l’indépendance des peuples, le principal soutien de la paix, la clique Tito-Rankovic qui, déguisée en amie de l’URSS s’est faufilée au pouvoir, a engagé, sur l’ordre des impérialistes anglo-américains, une campagne de calomnies et de provocations contre l’Union soviétique, en utilisant les inventions les plus infâmes empruntées à l’arsenal des hitlériens.

La transformation de la clique Tito-Rankovic en agents directs de l’impérialisme et en complices des fauteurs de guerre, a eu pour résultat final l’adhésion ouvertement déclarée du gouvernement yougoslave au bloc impérialiste dans le sein de l‘Organisation des Nations Unies, où les Kardelj, les Djilas et les Bebler réalisent avec les réactionnaires américains le front unique dans les principales questions de la politique internationale.

En matière de politique intérieure, l’activité de la clique traîtresse de Tito-Rankovic a eu pour résultat essentiel la liquidation de fait du régime de démocratie populaire en Yougoslavie.

Par suite de la politique contre-révolutionnaire de la clique Tito-Rankovic qui a usurpé le pouvoir dans le Parti et dans l’Etat, un régime policier et anticommuniste, de type fasciste, s’est instauré en Yougoslavie. Les koulaks à la campagne et les éléments capitalistes à la ville constituent la base sociale du régime. Ce sont les éléments antipopulaires, réactionnaires, qui détiennent pratiquement le pouvoir en Yougoslavie. Des membres actifs des anciens partis bourgeois, des koulaks et autres éléments hostiles à la démocratie populaire œuvrent dans les organismes du centre et de la base. La clique fasciste gouvernante s’appuie sur un appareil policier et militaire démesurément gonflé, à l’aide duquel elle opprime les peuples de Yougoslavie et a transformé le pays en un camp de guerre, aboli les droits démocratiques des travailleurs et foulé aux pieds toute expression libre de la pensée.

… Le secteur d’Etat, dans le système économique de la Yougoslavie a cessé d’être le bien du peuple, le pouvoir d’Etat étant détenu par les ennemis du peuple. La clique Tito-Rankovic a ouvert devant le capital étranger de larges possibilités pour pénétrer dans l’économie du pays, qu’elle a soumise au contrôle des monopoles capitalistes. En investissant leurs capitaux dans l’économie yougoslave, les milieux industriels et financiers anglo-américains transforment la Yougoslavie en une dépendance fournissant des produits agricoles et des matières premières au capital étranger. La vassalisation de plus en plus grande de la Yougoslavie vis-à-vis de l’impérialisme, aboutit à renforcer l’exploitation de la classe ouvrière et à aggraver nettement sa situation matérielle.

La politique des gouvernants yougoslaves à a campagne revêt un caractère koulak et capitaliste. Les pseudo-coopératives imposées à la campagne par voie de contrainte et détenues par les koulaks et leurs agents, servent à exploiter les grandes masses de paysans travailleurs.

Après s’être emparés de la direction du Parti communiste yougoslave, les mercenaires yougoslaves de l’impérialisme ont déclenché une campagne terroriste contre les vrais communistes qui, fidèles aux principes du marxisme-léninisme, combattent pour l’indépendance de la Yougoslavie à l’égard des impérialistes. Des milliers de patriotes yougoslaves dévoués au communisme, ont été exclus du Parti, jetés en prison ou en camp de concentration, et nombre d’entre eux ont été torturés à mort et tués en prison ou traîtreusement assassinés, tel le communiste yougoslave bien connu Arso Jovanovic. La cruauté avec laquelle on procède en Yougoslavie à l’extermination des fermes combattants du communisme, n’a d’égale que les atrocités des fascistes hitlériens ou des bourreaux de Tsaldaris en Grèce et de Franco en Espagne.

… La terreur fasciste exercée par la bande de Tito contre les forces saines du parti communiste Yougoslave a eu pour résultat que la direction du Parti communiste yougoslave est toute entière entre les mains des espions et assassins, à la solde de l’impérialisme. Le Parti communiste de Yougoslavie est au pouvoir des forces contre-révolutionnaires qui agissent arbitrairement en son nom. On sait que la bourgeoisie a de tout temps recruté des espions et des provocateurs dans les partis de la classe ouvrière. C’est par ce moyen que les impérialistes essaient de décomposer du dedans ces partis et de se les subordonner. En Yougoslavie, ils ont réussi à atteindre ce but.

… Les partis communistes et ouvriers ont pour devoir d’aider par tous les moyens la classe ouvrière et la paysannerie laborieuse de Yougoslavie, qui luttent pour le retour de la Yougoslavie dans le camp de la démocratie et du socialisme.

Le retour de la Yougoslavie dans le camp socialiste a pour condition indispensable la lutte active des éléments révolutionnaires tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Parti communiste yougoslave, pour la renaissance d’un parti révolutionnaire yougoslave, véritablement communiste, fidèle au marxisme-léninisme, aux principes de l’internationalisme prolétarien, et luttant pour l’indépendance de la Yougoslavie à l’égard de l’impérialisme.

… Le Bureau d’Information estime que l’une des tâches principales des partis communistes et ouvriers consiste à renforcer par tous les moyens la vigilance révolutionnaire dans leurs rangs, à dénoncer et à extirper les éléments nationalistes bourgeois et les agents de l’impérialisme, quel que soit le pavillon dont ils se couvrent. Le Bureau d’Information affirme la nécessité d’intensifier le travail idéologique dans les partis communistes et ouvriers, pour former les communistes dans l’esprit de fidélité à l’internationalisme prolétarien, d’intransigeance à l’égard de toute déviation des principes du marxisme-léninisme, dans l’esprit de fidélité à la démocratie populaire et au socialisme ».

Ce texte est clair. La question du pouvoir dans le Parti et dans l’État constitue la question principale : la capitulation devant l’impérialisme est la cause de la dégénérescence du parti. La conséquence en est le rétablissement du capitalisme dans tous les domaines et l’inféodation à l’impérialisme international. Aujourd’hui la Yougoslavie est en pleine crise, comme n’importe quel pays capitaliste. Des milliers d’ouvriers doivent émigrer, le chômage est énorme, les nationalistes bourgeois se manifestent ouvertement ; personne n’ose encore défendre la Yougoslavie comme « pays socialiste ».

Cependant, le processus de dégénérescence n’était pas analysé ; c’est pourquoi de nombreux révisionnistes pouvaient encore se camoufler dans le PC(b) de l’URSS et dans les démocraties populaires. Ainsi, le « théoricien » du révisionnisme, Souslov, participait à ce Bureau d’Information. Quelques années plus tard, il allait défendre « théoriquement » dans son « fameux » rapport de 1964, que la Yougoslavie était encore socialiste. En tout cas, pour la première fois, le problème est posé, et les révisionnistes sont au banc des accusés, sans compromis. La dénonciation de Tito est entièrement correcte : l’histoire a jugé. Il faut remarquer en plus que Staline et le PC(b) de l’URSS qui s’immisçaient prétendument dans les « affaires intérieures » des autres Partis n’ont nullement agi comme les Brejnev en Tchécoslovaquie et les Nixon au Vietnam. Le PC(b) de l’URSS jouait son rôle de bastion du socialisme et de la lutte antiimpérialiste en dénonçant les révisionnistes yougoslaves qui rétablissaient le capitalisme et se vendaient à l’impérialisme. Son mérite est grand.

2) L’aide de l’URSS aux luttes de libération nationale fut conforme à ses positions de principe, telles que Jdanov les avait défendues en 1947. Elle soutenait toutes les luttes antiimpérialistes, ainsi que l’égalité et l’indépendance des petites et grandes nations.

« Nombre de gens ne croient pas qu’il peut y avoir des relations d’égalité des droits entre une grande et une petite nation. Mais nous autres, hommes soviétiques, considérons que de telles relations peuvent et doivent être. Les hommes soviétiques considèrent que chaque nation, qu’elle soit grande ou petite, possède ses particularités qualitatives, son caractère spécifique qui n’appartient qu’à elle et que ne possèdent pas les autres nations. Ces particularités sont l’apport que chaque nation fait au trésor commun de la culture mondiale et qui la complète, l’enrichit. Dans ce sens, toutes les nations – petites ou grandes – se trouvent dans une situation identique, et chaque nation est l’égale de toutes autres nations … Il ne se trouvera pas beaucoup d’hommes politiques des grandes puissances pour considérer les petites nations comme égales en droits aux grandes nations. La majorité d’entre eux considèrent les petites nations de haut, avec condescendance. Parfois, ils n’ont rien contre l’octroi d’une garantie unilatérale aux petites nations. Mais, en général, ces hommes politiques ne vont pas jusqu’à conclure des traités égaux avec les petites nations, car ils ne considèrent pas les petites nations comme étant leurs partenaires ». (Staline, Adresse de la délégation gouvernementale finlandaise, 07/04/1948)

Quand la Corée luttait au premier front de la lutte antiimpérialiste, l’URSS et la République populaire de Chine lui fournirent une aide militaire considérable. Quand la Grèce s’insurgea, les Tito et autres révisionnistes yougoslaves fermèrent leurs frontières, ce qui les fit dénoncer par le Kominform.

3) Jamais, l’URSS n’a cédé devant l’impérialisme américain, devant le chantage nucléaire. Pourtant, à l’époque de la guerre de Corée, l’URSS ne possédait pas encore la bombe atomique, devant laquelle tous les révisionnistes plient le genou pour implorer la paix aux impérialistes. Voir par exemple la polémique menée par Khrouchtchev et Souslov contre le Parti communiste chinois au sujet de la guerre nucléaire.

« Je ne considère pas la bombe atomique comme une force aussi sérieuse que certains hommes politiques inclinent à le croire. Les bombes atomique sont destinées à intimider ceux qui ont les nerfs faibles, mais elles ne peuvent décider de l’issue d’une guerre, parce qu’elles sont absolument insuffisantes à atteindre ce but ». (Staline, Entrevue avec M.A. Werth, 17/09/1946)

Envers l’impérialisme, le PC(b) de l’URSS adoptait une attitude de lutte intransigeante, tout en recherchant la coexistence pacifique pour assurer la paix entre le camp socialiste et impérialiste et afin de permettre ainsi un développement des pays socialistes et des luttes révolutionnaires dans le monde.

Dès la fin de la guerre, l’URSS proposa l’interdiction de la bombe atomique et un traité de paix avec les puissances impérialistes ; en 1948, Staline estimait que toutes les bases militaires et troupes situées à l’étranger devaient être évacuées, et demanda que la souveraineté des pays et la non-immixtion dans leurs affaires intérieures soient assurées. Bref, le désir de paix de l’URSS était évident ; il reposait sur la défense de l’URSS et de l’internationalisme prolétarien.

B. POLITIQUE INTÉRIEURE

La guerre a détruit une immense partie de l’infrastructure soviétique. Il fallut un effort énorme pour relever le pays, supprimer le rationnement, développer l’industrie, l’agriculture. Les tâches économiques occupèrent, dans l’immédiat après-guerre, la place principale. Cependant, dès 1946, la lutte contre le révisionnisme intérieur commençait. En URSS, la contradiction principale était la lutte entre le marxisme-léninisme et le révisionnisme, entre la bourgeoisie et le prolétariat à l’intérieur du pays.

Nous savons qu’en 1936, Staline et le PC(b) de l’URSS s’éloignèrent du matérialisme historique en affirmant qu’il n’existait plus de classes antagonistes en URSS. Cette position fut maintenue au XVIIIe congrès du Parti qui défendit l’idée du « communisme dans un seul pays » et la nécessité de l’État sous le communisme pour lutter contre les impérialistes et les agents de l’impérialisme.

Après la guerre, Staline (« Pour une paix durable ») et Jdanov (« Situation internationale ») confirmèrent cette position. Plus tard, au XIXe congrès, le Parti affirma que le socialisme était presque édifié et qu’il fallait passer à la construction du communisme. Ce point de vue est en contradiction avec le marxisme-léninisme et avec la réalité. Le communisme signifie l’abolition des classes et par conséquent de l’État, instrument de domination d’une classe sur une autre. S’il faut conserver l’État et le renforcer, c’est qu’il existe encore des classes antagonistes et que le socialisme n’est pas encore construit. D’ailleurs, tant que l’impérialisme subsistera, il sera impossible de construire le communisme et l’État ne pourra dépérir. Le PC(b) de l’URSS séparait la contradiction extérieure avec l’impérialisme de la contradiction intérieure, qui était insuffisamment cernée. Mais il n’adopta jamais la position révisionniste de Khrouchtchev, décrétant que la dictature du prolétariat n’est plus nécessaire et que l’État est devenu l’État du peuple tout entier (comme pourront en témoigner les Tchécoslovaques !). Alors que Staline et le PC(b) de l’URSS adoptaient une position théorique erronée, Khrouchtchev et les révisionnistes, eux, allaient suivre une ligne unie et réactionnaire. La pratique de Staline et du PC(b) de l’URSS était en contradiction avec celles de leurs conceptions théoriques qui étaient erronées, puisqu’ils luttèrent effectivement contre le révisionnisme et le réprimèrent au moyen de l’État. Approfondissons.

Dès 1946, la lutte idéologique commençait sur décision de Staline et sous la direction de Jdanov. Deux revues littéraires importantes, l’Étoile et Léningrad, furent sévèrement critiquées. Jdanov expliquait que le cinéma, le théâtre, la littérature et la musique étaient encombrés de mauvaises œuvres, qu’il fallait servir le peuple et attaquer la culture bourgeoise décadente. Le rôle des artistes est d’éduquer le peuple, de l’armer idéologiquement : fidélité au régime soviétique et abnégation devant les intérêts du peuple. Il indiquait le que le front idéologique était en première ligne. A la suite de cette intervention, le Comité central signa une résolution dans le même sens (voir annexe 7).

En 1947, Jdanov et le PC(b) de l’URSS montèrent à l’assaut de la philosophie révisionniste en prenant pour cible Alexandrov (il avait été chargé d’écrire un manuel de philosophie qui se révéla étranger au marxisme-léninisme). Jdanov reprochait essentiellement à Alexandrov de ne pas analyser les philosophes sur une base de classe et, par exemple, de présenter Marx simplement comme le continuateur de Hegel, alors qu’il y avait tout un changement qualitatif (Marx est le représentant du prolétariat, Hegel de la bourgeoisie), même s’il y a unité entre les deux (Hegel défendait, à une certaine époque, la bourgeoisie quand elle était révolutionnaire). Jdanov précisait que le danger était grave et il insistait sur la pratique de la critique et de l’autocritique pour éliminer les survivances de l’idéologie bourgeoise. Mais il affirmait également qu’il n’y avait plus d’antagonisme de classes Les interventions de Jdanov étaient suivies d’une discussion dans tout le pays. Tous ces débats se menaient au sein du peuple, selon la méthode unité-critique-unité (voir annexe 8).

Donc, la lutte de classes se poursuivait objectivement, et le PC(b) de l’URSS prenait parti pour l’idéologie prolétarienne contre l’idéologie bourgeoise, de façon intransigeante, léniniste, sans pourtant en tirer un point de vue théorique suffisant. En retour, ce point de vue théorique incorrect a sans doute entraîné :

– des erreurs dans la détermination des contradictions au sein du peuple et antagonistes (des arrivistes comme Khrouchtchev se camouflaient),

– l’absence d’une systématisation correcte au niveau de la compréhension de la lutte de classes, qui permettait aux éléments bourgeois de prendre le pouvoir dans certains secteurs (exemple de la pédagogie avec Kairov, voir Pékin Information n° 10, 1970),

– la sous-estimation du révisionnisme : malgré qu’il fût combattu il prenait place dans tous les organismes de direction, gangrenait l’Etat et le Parti. Les révisionnistes entreprenaient l’élimination des idées marxistes-léninistes et des communistes eux-mêmes. (Par exemple, Khrouchtchev dirigeait toute la région de Moscou et avait la possibilité d’éliminer de bons communistes sans qu’il soit contrôlé, cf. « Rapport secret »).

C. LE XIXe CONGRES DU PC(b) DE L’URSS

Le XIXe congrès qui se tint en 1952, fut un jalon fondamental dans la lutte contre le révisionnisme moderne. Les deux lignes s’affrontèrent presque ouvertement. La ligne marxiste-léniniste-staliniste était défendue par le secrétaire du Parti, Malenkov, principal collaborateur de Staline.

La dernière œuvre de Staline, « Les problèmes économiques du socialisme en URSS » (1952), écrite peu avant le XIXe congrès, et le rapport prononcé par Malenkov au congrès sur l’activité du comité central du parti communiste (bolchévik) de l’URSS, sont des textes de la plus haute importance. Rectifiant l’analyse erronée de 1938 où il avait déclaré qu’il existait une concordance parfaite, dans le socialisme soviétique, entre forces productives et rapports sociaux de production, Staline écrivait :

« On ne peut pas prendre dans leur acception absolue les mots « entière correspondance ». On ne peut pas les interpréter en ce sens que, sous le socialisme, les rapports de production ne marqueraient aucun retard sur l’accroissement des forces productives. Les forces productives sont les forces les plus mobiles et les plus révolutionnaires de la production. Elles devancent, sans conteste, les rapports de production, en régime socialiste également. Ce n’est qu’au bout d’un certain temps que les rapports de production s’adaptent au caractère des forces productives.

Dès lors, comment faut-il comprendre les mots « entière correspondance » ? Il faut les comprendre en ce sens que d’une façon générale, sous le socialisme, les choses n’aboutissent pas à un conflit entre les rapports de production et les forces productives, que la société a la possibilité d’assurer en temps utile la correspondance entre les rapports de production retardataires et le caractère des forces productives. La société socialiste a la possibilité de le faire parce qu’elle n’a pas, dans son sein, de classes déclinantes pouvant organiser la résistance. Certes, sous le socialisme également, il y aura des forces d’inertie retardataires, ne comprenant pas la nécessité de modifier les rapports de production, mais il sera évidemment, facile d’en venir à bout, sans pousser les choses jusqu’à un conflit ».

Plus loin, Staline précise sa pensée :

« Le camarade Iarochenko se trompe quand il soutient que sous le socialisme il n’existe aucune contradiction entre les rapports de production et les forces productives de la société. Certes, nos rapports de production connaissent actuellement une période où ils correspondent pleinement à la croissance des forces productives et les font progresser à pas de géant. Mais ce serait une erreur de se tranquilliser et de croire qu’il n’existe aucune contradiction entre nos forces productives et les rapports de production. Des contradictions, il y en a et il y en aura certainement, puisque le développement des rapports de production retarde et retardera sur le développement des forces productives. Si les organismes dirigeants appliquent une politique juste, ces contradictions ne peuvent dégénérer en antagonisme, et elles n’aboutiront pas à un conflit entre les rapports de production et les forces productives de la société. Il en ira autrement si nous faisons une politique erronée comme celle que recommande le camarade Iarochenko. Un conflit sera alors inévitable, et nos rapports de production peuvent devenir une très sérieuse entrave au développement des forces productives.

Aussi les organismes dirigeants ont-ils pour tâche de noter en temps utile les contradictions qui mûrissent et de prendre à temps des mesures pour les surmonter en adaptant les rapports de production à la croissance des forces productives ».

Staline rejeta les propositions des économistes Sanina et Venger de vendre les S.M.T. aux Kolkhoz, et les accusa « d’essayer de faire tourner à rebours la roue de l’histoire ». Il était nécessaire, au contraire, de promouvoir la collectivisation : « Pour élever la propriété kolkhozienne au niveau de la propriété nationale, écrivit Staline, il faut que les excédents de la production kolkhozienne soient éliminés de la circulation des marchandises et intégrés au système d’échange de produits entre l’industrie d’Etat et les kolkhoz. Là est l’essentiel ».

Ainsi Staline, à la fin de sa vie, amorçait un nouveau développement de la théorie marxiste-léniniste. Il constatait l’existence de contradictions dans la société socialiste, en décelait le fondement (contradictions entre les forces productives et rapports sociaux de production), prévoyait que ces contradictions, non antagoniques au départ, pouvaient devenir antagoniques si le Parti suivait une voie erronée, et il préconisait une première mesure pratique pour résoudre la contradiction (collectiviser les excédents de la production kolkhozienne).

En 1952, Staline menait en toute conscience la lutte contre les révisionnistes. Après sa mort, ils firent effectivement « tourner à rebours la roue de l’histoire » et réalisèrent les mesures explicitement rejetées par Staline.

La ligne staliniste a été poursuivie et développée par Mao Tsé-toung. S’appuyant sur les points de vue exposés dans Les problèmes économiques du socialisme en URSS, Mao Tsé-toung fit l’analyse du socialisme chinois et systématisa, notamment dans De la juste solution des contradictions au sein du peuple (1957) l’analyse et les positions de Staline. Les premières bases étaient jetées pour la compréhension théorique de la continuation de la lutte de classes sous le socialisme.

Le rapport de Malenkov (voir annexe 9) mit également l’accent sur le retard des rapports sociaux de production sur les forces productives, mais il aborda surtout les problèmes politiques et, en particulier, ceux du parti et de l’Etat. Il fit un bilan de l’essor des forces productives mais constata cependant du gaspillage, de la négligence, la mauvaise qualité des produits qui causaient une perte d’environ 25 milliards de roubles. Quels étaient les responsables ? Des dirigeants, de l’économie et du Parti.

Dans le domaine de l’art, Malenkov critiqua de nombreuses œuvres « mornes et plates » ; il faut montrer les simples gens et lutter contre l’ancien.

Quant au Parti, il suivait une politique juste et il était lié aux masses. Mais Malenkov se rendait compte que le travail idéologique et organisationnel était négligé et que le Parti risquait de se bureaucratiser et donc de se couper des masses. Il préconisait d’encourager la critique venant de la base comme principale méthode pour corriger les erreurs ; de resserrer la discipline envers les directeurs et les cadres qui ne s’intéressent qu’à leur intérêt personnel ; de mieux choisir les cadres : il existe un esprit de famille, d’amicalisme, de coterie, les critiques sont réprimées ; de prendre attention au travail idéologique, car il est sous-estimé sinon abandonné.

Quelles étaient les causes ? Malenkov indiquait les survivances de l’idéologie bourgeoise. Il faut épurer la conscience des hommes et résoudre la contradiction entre les forces productives et les rapports sociaux de production. Si l’on suit une bonne politique, les contradictions seront résolues correctement. Les traits dominants du révisionnisme furent dénoncés pratiquement dans les organes du pouvoir, le Parti et l’État, et les conceptions théoriques corrigées partiellement. Mais le danger du révisionnisme était encore sous-estimé, puisqu’il n’était pas caractérisé comme une ligne bourgeoise s’appuyant principalement sur des éléments bourgeois installés dans le Parti et l’État et menaçant le pouvoir socialiste. Le révisionnisme était défini en tant que survivance de l’idéologie bourgeoise et non comme une ligne politique bourgeoise ; il se basait censément sur des individus et non sur une nouvelle classe en voie de formation. Cependant le fait de parvenir à ces points de vue théorique et pratique est un jalon fondamental de l’expérience de la dictature du prolétariat.

La théorie marxiste-léniniste ne parvint pas encore à la conception de la lutte des classes sous le socialisme et à la nécessité d’une nouvelle révolution, mais le PC(b) était très conscient des problèmes qui se posaient, et il les abordait de face. Les révisionnistes, poursuivant Staline et ses compagnons d’une haine féroce, témoigneront eux-mêmes de la crainte qu’ils éprouvaient d’être démasqués.

Le rapport Khrouchtchev au XIXe Congrès, sur la réforme des statuts du Parti fut une déformation consciente et pernicieuse du rapport de Malenkov. Khrouchtchev prétendit que la lutte de classes était terminée et qu’il fallait édifier la société communiste ; dans ce but il importait de sauvegarder l’unité du Parti par tous les moyens. Il exploitait ainsi les faiblesses des marxistes-léninistes, pour endormir leur vigilance. Dans le chapitre des statuts consacré aux militants, Khrouchtchev plaça quelques critiques contre les cadres, et dans le chapitre consacré aux cadres, il mit l’accent sur la nécessité d’être discipliné envers eux. A l’égard des bureaucrates il fit de l’opportunisme « de gauche », en disant qu’il fallait les « exclure », les « déférer en justice », mener une « lutte à outrance » contre eux. Ces affirmations excessives prouvaient cependant que le Parti était décidé à lutter contre les bureaucrates qui, selon une tactique habituelle, se faisaient passer pour « plus révolutionnaires » que les révolutionnaires, afin de jeter la confusion. Malenkov, quant à lui, mettait l’accent sur la lutte idéologique, pour éviter d’envenimer inutilement les conflits. A la suite de Malenkov Khrouchtchev feignit d’insister sur la démocratie intérieure, pour aussitôt la limiter au nom des « secrets du Parti et de l’Etat » (Voir annexe 10).

Le rapport « secret » de Khrouchtchev de 1956 indiquera que Staline n’avait plus confiance dans le Bureau Politique et qu’il était intransigeant à l’égard des révisionnistes yougoslaves, alors que Khrouchtchev lui-même estimait que le « différend » aurait pu se régler par un débat.

En politique internationale, Staline combattit également les positions révisionnistes qui se faisaient jour dans le Parti :

« Certains camarades affirment qu’étant donné les nouvelles conditions internationales, après la deuxième guerre mondiale, les guerres entre pays capitalistes ne sont plus inévitables. Ils estiment que les contradictions entre le camp du socialisme et celui du capitalisme sont plus fortes que les contradictions entre pays capitalistes ; que les États-Unis d’Amérique se sont suffisamment soumis les autres pays capitalistes pour les empêcher de se faire la guerre et de s’affaiblir mutuellement ; que les hommes avancés du capitalisme sont assez instruits par l’expérience des deux guerres mondiales, qui ont porté un sérieux préjudice à l’ensemble du monde capitaliste, pour se permettre d’entraîner à nouveau les pays capitalistes dans une guerre entre eux ; que, de ce fait, les guerres entre pays capitalistes ne sont plus inévitables…

En apparence, la « sérénité » règne partout : les États-Unis d’Amérique ont réduit à la portion congrue l’Europe occidentale, le Japon et les autres pays capitalistes ; l’Allemagne (de l’Ouest), la Grande-Bretagne, la France, l’Italie, le Japon, tombés dans les griffes des USA, exécutent docilement leurs injonctions. Mais on aurait tort de croire que cette « sérénité » puisse se maintenir « pour l’éternité » et que ces pays supporteront sans fin la domination et le joug des États-Unis d’Amérique ; qu’ils n’essaieront pas de s’arracher au joug américain pour s’engager sur le chemin de l’indépendance.

Considérons d’abord l’Angleterre et la France. Il est certain que ce sont des pays impérialistes. Il est certain que les matières premières à bon marché et les débouchés assurés ont pour eux une importance de premier plan. Peut-on imaginer qu’ils supportent sans fin la situation actuelle ? …

N’est-il pas plus exact de dire que l’Angleterre capitaliste et, à sa suite, la France capitaliste seront finalement obligées de s’arracher à l’étreinte des USA pour entrer en conflit avec eux pour s’assurer une situation indépendante et, bien entendu, des profits exorbitants ?

Passons aux principaux pays vaincus, à l’Allemagne (occidentale), au Japon. Ces pays mènent aujourd’hui une existence lamentable sous la botte de l’impérialisme américain. Leur industrie et leur agriculture, leur commerce, leur politique extérieure et intérieure, toute leur existence sont enchaînés par le « régime » d’occupation américain… Penser que ces pays n’essaieront pas de se relever, de briser « le régime » des USA et de s’engager sur le chemin de l’indépendance, c’est croire au miracle …

Il s’ensuit donc que l’inévitabilité des guerres entre pays capitalistes reste entière…
Le mouvement actuel pour la paix se propose d’entraîner les masses populaires dans la lutte pour le maintien de la paix, pour conjurer une nouvelle guerre mondiale. Par conséquent, il ne vise pas à renverser le capitalisme et à instaurer le socialisme – il se borne à des buts démocratiques de lutte pour le maintien de la paix. A cet égard, le mouvement actuel pour le maintien de la paix se distingue de celui qui existait lors de la première guerre mondiale et qui, visant à transformer la guerre impérialiste en guerre civile, allait plus loin et poursuivait des buts socialistes.

Il se peut que, les circonstances aidant, la lutte pour la paix évolue çà et là vers la lutte pour le socialisme, mais ce ne sera plus le mouvement actuel en faveur de la paix, mais un mouvement pour renverser le capitalisme.

Le plus probable, c’est que le mouvement actuel en faveur de la paix, en tant que mouvement pour le maintien de la paix, contribuera, en cas de succès, à conjurer une guerre donnée, à l’ajourner temporairement, à maintenir temporairement une paix donnée, à faire démissionner le gouvernement belliciste et à y substituer un autre gouvernement, disposé à maintenir provisoirement la paix. Cela est bien, naturellement. C’est même très bien. Mais cela ne suffit pas cependant pour supprimer l’inévitabilité des guerres, en général, entre pays capitalistes. Cela ne suffit pas, car malgré tous ces succès du mouvement de la paix, l’impérialisme demeure debout, reste en vigueur. Par suite l’inévitabilité des guerres reste également entière.

Pour supprimer l’inévitabilité des guerres, il faut détruire l’impérialisme. » (Les problèmes économiques du socialisme en URSS).

Au XIXe Congrès, Staline, dans une courte intervention, mit l’accent sur l’internationalisme prolétarien et encourageait la lutte pour l’indépendance nationale :

« Auparavant, la bourgeoisie était considérée comme le chef de la nation, elle défendait les droits et l’indépendance de la nation, les plaçant « au-dessus de tout ». Maintenant il ne reste même plus trace du « principe national ». Maintenant la bourgeoisie vend les droits et l’indépendance de la nation pour des dollars. Le drapeau de l’indépendance nationale et de la souveraineté nationale est jeté par-dessus bord. Il ne fait pas de doute que ce drapeau, c’est vous, représentants des partis communistes et démocratiques, qui devez le relever et le porter en avant si vous voulez être des patriotes, si vous voulez devenir la force dirigeante de la nation. Nul autre que vous ne peut le relever ».

Malenkov, dans son discours, réaffirmait les positions fondamentales du mouvement communiste : l’impérialisme américain est l’ennemi principal, le gendarme universel ; les luttes anti-impérialistes reçoivent le soutien de l’URSS (la guerre de Corée, qui vient de se terminer, en est le témoignage). L’URSS, déclarait-il, veut la paix, mais se prépare à la guerre défensive, et elle est convaincue qu’une troisième guerre mondiale serait la fin de l’impérialisme.

Ces positions révolutionnaires s’opposent à l’impérialisme en l’isolant et en dénonçant ses alliés révisionnistes yougoslaves, ceux qui dans le camp socialiste capitulent devant l’impérialisme, au nom d’une « situation nouvelle », ainsi que les partis communistes étrangers qui avaient commis de graves erreurs. A leur sujet, Staline, en demandant qu’un manuel marxiste d’économie politique soit composé, indiquait : « Du reste, étant donné le niveau insuffisant de la formation marxiste de la plupart des Partis communistes étrangers, ce manuel pourrait être d’une grande utilité aussi pour les cadres communistes plus âgés de ces pays ».

Un rapide bilan de la période d’après-guerre, établi à partir de faits indéniables, montre que la ligne générale du Parti et de l’État assura une aide totale au camp socialiste, la dénonciation de la Yougoslavie révisionniste et le début de la lutte contre le révisionnisme intérieur dans les domaines théorique, politique, économique, culturel, philosophique. Cette ligne soutint les luttes révolutionnaires, s’opposa irréductiblement à l’impérialisme américain, lutta pour la coexistence pacifique et pour la paix, développa l’économie, les sciences et les techniques.

Lorsque Khrouchtchev prendra le pouvoir, il suivra une ligne entièrement opposée, même s’il gardera une certaine façade pendant quelques années.

Mao Tsé-toung et Enver Hoxha se sont basés sur l’expérience soviétique, en particulier sur les textes marxistes-léninistes du XIXe Congrès pour achever génialement le processus de connaissance du révisionnisme moderne, processus commencé par Staline.

« Dans le passé, nous avons mené une lutte dans les campagnes, les usines et les milieux culturels, entrepris le mouvement d’éducation socialiste, sans parvenir pour autant à résoudre le problème parce que nous n’avions pas trouvé une forme, une méthode permettant de mobiliser les larges masses ouvertement, dans tous les domaines, à partir de la base, pour qu’elles dénoncent notre côté sombre » (Mao Tsé-toung, Document GRCP).

La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne approfondit la ligne de la Commune et d’Octobre. Pour arriver à la conception de la dictature du prolétariat, il a fallu l’expérience historique de la Commune ; pour arriver à la conception de la révolution sous la dictature du prolétariat, pour conserver le pouvoir, il a fallu l’expérience de l’URSS de 1917 à 1956.

Staline et le PC(b) de l’URSS se trouvaient dans des conditions difficiles, objectivement et subjectivement. Objectivement, parce que l’URSS était le premier pays socialiste et que le Parti n’avait aucun précédent sur lequel s’appuyer. Ce facteur est extrêmement important, puisque nous savons maintenant que les révisionnistes infiltrés dans le Parti prennent divers masques pour se camoufler et qu’il est nécessaire d’avoir une direction révolutionnaire pour la vie, en s’appuyant sur un vaste mouvement révolutionnaire pour remporter une première victoire. En URSS, de nombreux éléments bourgeois ont été démasqués (Trotski, Boukharine…), mais ils s’étaient opposés ouvertement au PC(b) de l’URSS, alors que Khrouchtchev et sa clique pratiquaient le culte de la personnalité envers Staline et passaient de l’opportunisme de droite à l’opportunisme « de gauche » pour cacher leurs véritables buts.

Vers 1934, Jdanov sur le front de la littérature et de l’art, Staline dans son rapport « Pour une formation bolchévique » en 1937, ont commencé la lutte contre le révisionnisme, mais la préparation de la guerre, puis la guerre elle-même, ont contraint le Parti à mener le combat principal contre l’impérialisme allemand. Après la guerre, il fallait nourrir la population et reconstruire la base économique du socialisme. De plus, toute la population paraissait unie derrière le grand prestige du Parti et de son dirigeant Staline. C’est-à-dire que les révisionnistes ne se manifestaient pas ouvertement et, par conséquent, la réalité soviétique semblait justifier les positions théoriques du Parti. Malgré ces conditions défavorables, la direction du Parti entama la lutte idéologique contre des aspects du révisionnisme. Vers 1952, de nombreux dirigeants révisionnistes se démasquaient (témoin le rapport Malinkov) et le Parti répliquait aussitôt, mais quelques mois après le XIXe Congrès, Staline mourait et avec lui, le Parti perdait son plus grand dirigeant marxiste-léniniste. Subjectivement, Staline et le PC(b) de l’URSS ont commis l’erreur d’affirmer que la lutte de classes entre bourgeoisie et prolétariat se terminait lorsque les capitalistes industriels et les koulaks furent éliminés en tant que classe, dans les années 1930.

Staline et le PC(b) de l’URSS ont éliminé un grand nombre de révisionnistes introduits dans le Parti, mais les conditions objectives et subjectives expliquent pourquoi les révisionnistes ont pu rétablir le capitalisme.

D. LA PRISE DE POUVOIR PAR LES RÉVISIONNISTES

Après le XIXe Congrès et surtout après la mort de Staline en mars 1953, la ligne politique du PCUS se modifia sensiblement, ce qui prouve une nouvelle fois que deux lignes s’affrontaient avant que le révisionnisme ne l’emporte en 1956.

Dès 1953, la politique extérieure fut axée sur la « coexistence pacifique » et sur la négociation pour obtenir la paix : la capitulation devant l’impérialisme devient la ligne générale (le Conseil mondial de la Paix s’opposait depuis quelques années déjà aux positions marxistes-léninistes). La Yougoslavie ne sera plus dénoncée et dès 1955, des contacts officiels furent entrepris avec elle. De plus en plus, l’internationalisme prolétarien fut relégué aux oubliettes.

A l’intérieur, les cris d’alarme de Malenkov et de Staline restèrent sans écho. Le « communisme » se construira « sans heurts » (Vorochilov prétendra qu’il faut s’occuper essentiellement d’économie et qu’il n’y a pas de discorde nationale). Certaines critiques se poursuivirent dans le seul domaine économique (cf. Etudes soviétiques). Toutes les critiques des cadres de l’Etat et du Parti furent « oubliées ». On « encouragea » la critique des masses, mais les cibles n’étaient plus indiquées. Seuls les succès économiques étaient publiés.

La lutte à outrance fut menée non contre les bureaucrates, mais contre les révolutionnaires. Dès septembre 1953, Pospélov commençait la préparation idéologique de l’élimination non seulement des idées de Staline (entreprise depuis plus longtemps) mais de Staline lui-même. En effet, il faisait une critique du culte de la personnalité, sans nommer personne : au contraire, il « louait » Staline. En mars 1954, il reprenait sa critique du « culte de la personnalité » sans dire un mot sur Staline.

Cette préparation idéologique allait connaître un point culminant au XXe Congrès de 1956. Ce congrès est le premier congrès révisionniste. Avant cette date, les deux lignes se manifestaient encore dans la presse, par exemple, en politique internationale où les positions correctes voisinaient avec les positions révisionnistes.

En politique extérieure, le congrès déclara que la Yougoslavie édifie le socialisme, que la paix est la tâche le plus importante (et non l’internationalisme prolétarien, le soutien aux luttes révolutionnaires) et qu’il est possible, dans les pays capitalistes, de prendre le pouvoir pacifiquement pour construire le socialisme. En politique intérieure, la place la plus large fut accordée au développement de l’économie et à l’« élimination » de la bureaucratie en diminuant les frais d’administration ! On trouve aussi des attaques camouflées contre Staline sous couvert de la « lutte contre le culte de la personnalité » et le « dogmatisme » (c’est-à-dire, le marxisme-léninisme quand les révisionnistes en parlent).

Nous savons aussi que Krouchtchev tint une réunion secrète pour calomnier Staline de la façon la plus lâche et la plus crapuleuse : des critiques personnelles sans preuves, sans arguments. Lui-même se « disculpait » et se mettait en évidence. Son discours est une preuve de la crainte éprouvée par les révisionnistes devant Staline, leur ignominie et leur arrivisme. Le caractère secret de la réunion indique aussi l’amour du peuple et du Parti envers Staline.

Que contient la résolution de ce congrès ?

« … Le congrès constate que dans le domaine des relations internationales, la période écoulée a été marquée par une certaine détente et par l’apparition dans l’arène internationale de perspectives réelles de renforcement de la paix …

La Yougoslavie enregistre également d’importants progrès dans l’édification socialiste…

Les forces de paix se sont multipliées grâce à l’apparition dans l’arène mondiale d’un groupe d’États pacifiques en Europe et en Asie, qui ont proclamé que le principe de leur politique extérieure est la non-participation à des blocs militaires. Ainsi s’est créée une vaste « zone de paix » (!) qui comprend les États pacifiques, socialistes aussi bien que non-socialistes (!) d’Europe et d’Asie et qui englobe plus de la moitié de la population du monde entier.

… Le congrès constate qu’à l’heure présente les grandes questions du développement international actuel, telles que la coexistence pacifique des deux systèmes, la possibilité de prévenir les guerres à l’époque actuelle et les formes de passage de divers pays au socialisme revêtent une importance particulière.

Le principe léniniste de coexistence pacifique des États aux régimes sociaux différentes a été et demeure la ligne générale de la politique extérieure soviétique (!).

… Dans ces conditions, certainement, reste valable cette thèse de Lénine suivant laquelle, aussi longtemps qu’existe l’impérialisme, une base économique pour le déclenchement de nouvelles guerres subsiste également. Aussi devons-nous observer une extrême vigilance… Mais les guerres ne sont point fatales (!). Il y a à présent de puissantes forces sociales et politiques qui disposent de moyens sérieux pour empêcher les impérialistes de déclencher la guerre et pour infliger, si ces derniers tentent de la commencer, une riposte foudroyante aux agresseurs et déjouer leurs plans d’aventures. Il faut pour cela que toutes les forces hostiles à la guerre soient vigilantes et en alerte, qu’elles s’unissent en un front et ne relâchent pas leurs efforts dans la lutte pour le maintien et le renforcement de la paix. (Note : Comparer à Staline dans « Problèmes économiques du socialisme en URSS » et voir aussi Cuba et les fusées russes, le Vietnam…).

… Il est absolument normal que les formes du passage des pays au socialisme soient de plus en plus variées. Il n’est pas toujours indispensable que le passage au socialisme entraîne la guerre civile, en toutes circonstances. Le léninisme enseigne que les classes dominantes ne cèdent pas le pouvoir volontairement. Mais l’âpreté plus ou moins grande de la lutte de classe pour passer au socialisme, l’emploi ou non de la violence de ce passage, dépendent moins du prolétariat que du degré de résistance que les exploiteurs opposent à la volonté de la majorité des travailleurs, de l’emploi de la violence de la classe exploiteuse elle-même. Il est hors de doute que pour plusieurs pays capitalistes où le capitalisme est encore fort, où il contrôle un immense appareil militaire et policier, une brusque aggravation de la lutte de classe est inéluctable.

… Dans certains pays capitalistes, la classe ouvrière conduite par son avant-garde, dispose, dans les conditions actuelles, de la possibilité réelle de grouper sous sa direction l’immense majorité du peuple et d’assurer le passage des principaux moyens de production aux mains du peuple. Les faillites des partis bourgeois de droite et des gouvernements qu’ils forment sont de plus en plus fréquentes. Dès lors, la classe ouvrière qui groupe autour d’elle la paysannerie laborieuse, les larges milieux d’intellectuels, toutes les forces patriotiques et inflige une riposte sévère aux éléments opportunistes, incapables de renoncer à la politique d’entente avec les capitalistes et les propriétaires fonciers, a la possibilité de battre les forces réactionnaires, antipopulaires, de conquérir une majorité durable au Parlement et, d’organe de la démocratie bourgeoise, de faire de ce dernier un instrument de la véritable volonté populaire. »

Passons maintenant à la politique intérieure. Ici l’accent est mis sur le développement des seules forces productives.

« … Le Congrès estime nécessaire de poursuivre énergiquement la lutte pour accomplir, par la voie de la compétition pacifique et dans les délais historiques les plus brefs, la tâche économique fondamentale de l’Union Soviétique qui consiste, en s’appuyant sur les avantages du système d’économie socialiste, à rattraper et à devancer les pays capitalistes les plus évolués quant à la production par habitant.

… L’amélioration de la direction de l’agriculture est une condition essentielle pour l’essor rapide et constant de la production agricole. Dans ce domaine, il est nécessaire d’en finir avec les méthodes stéréotypées et bureaucratiques, avec l’anonymat et l’irresponsabilité. Les organisations du Parti, les Soviets et les organismes agricoles sont tenus d’assurer une direction concrète de chaque district, kolkhoz, sovkhoz et S.M.T., d’appuyer par tous les moyens l’initiative de masses, d’intéresser davantage matériellement les travailleurs ( !), y compris les cadres dirigeants (!) à l’essor de la production agricole.

… Approuvant les mesures appliquées par le C.C. du PCUS des dernières années en vue de la compression et de la diminution des frais de l’appareil administratif et de son perfectionnement à tous les échelons, le Congrès estime nécessaire de poursuivre ces efforts, de continuer une lutte intransigeante contre le bureaucratisme, contre l’attitude négligente envers les besoins de la population ».

Voilà ce que sont devenus la lutte contre la bureaucratie et le dévouement au socialisme. Maintenant viennent les attaques contre Staline et le marxisme-léninisme sous le titre « culte de la personnalité et dogmatisme ».

« Si les communistes et tous les travailleurs ont redoublé d’activité, c’est en grande partie parce qu’un large travail d’éclaircissement a été accompli au sujet de la conception marxiste-léniniste du rôle de la personnalité dans l’histoire. Le Congrès estime que le Comité central a eu parfaitement raison de s’élever contre le culte de la personnalité dont l’extension amoindrissait le rôle du Parti et des masses populaires, rabaissait le rôle de la direction collective et entraînait de graves défauts dans le travail, et il charge le Comité Central de poursuivre sans faiblir la lutte contre les survivances du culte de la personnalité, de s’inspirer dans toute son activité que les masses populaires dirigées par le Parti communiste sont les véritables créateurs de vie nouvelle.

Grâce au rétablissement des normes léninistes de la vie du Parti, au développement de la démocratie à l’intérieur du Parti, à l’observation du principe de la direction collective et à la lutte contre le culte de la personnalité, le Comité central a permis de mieux juger le développement de l’industrie et de l’agriculture ; il a mis à jour les violations de la légalité socialiste et pris les mesures nécessaires pour y mettre fin ; il a appris à combattre la suffisance et la quiétude, il a mobilisé l’ensemble du Parti, tous nos travailleurs communistes et sans-parti pour accélérer les rythmes de développement de la société soviétique, assurer toujours plus de bien-être au peuple soviétique.

… Dans le domaine du travail idéologique, le Congrès estime qu’une des tâches essentielles consiste à faire en sorte que la propagande ne soit plus détachée de l’édification communiste pratique. Il importe de relier plus étroitement notre propagande et notre agitation aux tâches que posent la création de la base matérielle et technique du communisme, la nécessité d’assurer l’abondance de biens matériels et culturels ainsi que les progrès de la conscience communiste des citoyens ; il faut en finir avec le dogmatisme et la scolastique qui sont étrangers à l’esprit créateur du marxisme-léninisme. La propagande a pour tâche non seulement d’expliquer la théorie marxiste-léniniste, mais encore de contribuer à son application pratique.

Le Congrès constate que le Comité central s’est élevé en temps utile contre les tentatives de s’écarter de la ligne générale du Parti sur le développement prioritaire de l’industrie lourde, et aussi contre la confusion ( !) qui régnait dans la question de l’édification du socialisme dans notre pays et certaines autres questions théoriques ». (Études soviétiques, 1956).

Tout ce congrès fut une offensive contre le marxisme-léninisme et contre le grand dirigeant Staline. Chaque position « nouvelle » n’est que le contraire des positions de Staline, des positions marxistes-léninistes. Les actes de la nouvelle direction sont bien connus : ils ont été maintes fois critiqués brillamment par le Parti communiste chinois et le Parti du Travail d’Albanie. Faut-il encore des faits pour montrer comment la lutte, après la mort de Staline, continua et continue aujourd’hui ?

« Voyons, par exemple, le Comité Central du PCUS. Les chiffres montrent qu’à l’issue des XXe et XXIIe Congrès du PCUS réunis respectivement en 1956 et 1961, près de 70 % de ses membres élus par le XIXe congrès du PCUS en 1952 ont été éliminés. Et près de 50 % de ses membres élus par le XXe Congrès ont été épurés au XXIIe Congrès ». (Le pseudo-communisme de Khrouchtchev et les leçons historiques qu’il donne au monde, par le PCC).

Quelles étaient les positions politiques des opposants ?

La Décision de la session plénière du CC du PCUS (1957) sur le « groupe antiparti » de G. Malenkov, L. Kaganovitch, et V. Molotov est éloquente (voir annexe 11).

En politique intérieure, ils s’opposaient au système d’« autogestion » et défendaient la planification : ils refusaient de croire aux fables de Krouchtchev sur l’abondance proche, sur le défrichage des terres vierges, et l’histoire leur a donné pleinement raison.

En politique extérieure, ils s’opposaient à la reprise des relations avec la Yougoslavie, aux « contacts personnels » avec les impérialistes, au passage pacifique au socialisme, à la possibilité de conjurer les guerres.

Sur la question de la guerre et de la paix, à ceux qui parlaient d’« anéantissement de la civilisation », le camarade Molotov répondait : « Ce n’est pas la civilisation mondiale qui périra, aussi grand que puisse être le préjudice causé par une nouvelle agression, mais c’est le système social déjà pourri, avec sa base impérialiste imprégnée de sang, système qui a fait son temps, qui est condamné en raison de son agressivité et qui est repoussé, parce qu’il exploite les travailleurs et les peuples opprimés » (Cité par l’Humanité, 3 mars 1955).

Envers Staline, deux positions seulement sont possibles. Ou la « position » bourgeoise défendue par tous les réactionnaires et révisionnistes, ou la position marxiste-léniniste défendue par le PTA (voir annexe 12) et le PCC (voir annexe 13) et tous les révolutionnaires du monde entier.

Quelle était la position révisionniste quelques mois avant le XXe Congrès ?

« Le culte de la personnalité a contribué à la diffusion d’une méthode vicieuse dans la direction du travail du parti et du travail économique : l’administration pure ; il a favorisé le mépris pour l’initiative venant d’en bas. C’est ainsi que des erreurs sérieuses furent commises dans la direction de l’agriculture, qui ont eu pour résultat que plusieurs branches importantes étaient laissées à l’abandon. On sait que le Comité central a mis à nu ces erreurs et a pris des mesures en vue d’un essor rapide de l’agriculture, ce qui donne déjà d’heureux résultats.

Par suite du culte de la personnalité se sont également développés des phénomènes monstrueux comme le camouflage des défauts, le maquillage de la réalité, le bluff. Il y a encore chez nous bon nombre de flagorneurs, de chanteurs d’alleluias, de gens habitués à parler un langage appris par cœur, éduqués dans l’obséquiosité et à la vénération des titres. Extirper et surmonter ces survivances néfastes du culte de la personnalité est notre tâche urgente. Le culte de la personnalité a porté un grand préjudice dans le domaine idéologique. Si l’on prend des ouvrages de philosophie, d’économie politique, d’histoire et d’autres sciences sociales écrits sous l’influence du culte de la personnalité, nombre d’entre eux constituent un recueil de citations des oeuvres de J. Staline et de louanges de Staline.

Une des manifestations éclatantes du culte de la personnalité est la « Biographie » de Staline rédigée avec sa participation directe. « Le précis d’histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’URSS » est également sur beaucoup de points pénétré du culte de la personnalité. Le dogmatisme et le respect de la lettre sont le résultat direct de l’épanouissement du culte de la personnalité, dans lequel on estimait qu’un seul homme, Staline, pouvait développer et promouvoir la théorie, exprimer quelque chose d’original et de nouveau, et que tous les autres devaient populariser ce qu’il avait dit, transposer les formulations données par lui. Tout cela freinait le développement de la théorie marxiste-léniniste. Dans cette situation, on méconnaissait le rôle de la pensée collective du Parti qui fait progresser la théorie, on repoussait à l’arrière-plan sans les étudier profondément les décisions du Parti, de sa sagesse.

Le culte de la personnalité a laissé également une certaine empreinte sur une série d’œuvres d’art, et de littérature. Un grand nombre de nos films, œuvres littéraires et peintures historiques particulièrement sur la guerre, sont consacrés avant tout à la louange et à l’exaltation de la personnalité de Staline. Dans les films et œuvres artistiques et littéraires sur la guerre, on n’a pas encore éclairé correctement, par exemple, le rôle de la grande Guerre nationale du Parti communiste et du gouvernement soviétique, de notre armée et du peuple à qui appartient le mérite historique mondial de la défense de notre patrie et du salut de toute l’humanité face à la menace de l’asservissement fasciste qui pesait sur elle ». (Pravda, 28/03/1956)

Il est impossible de combattre le révisionnisme moderne à fond sans soutenir Staline, Mao Tsé-toung et Enver Hoxha. Ils forment le bataillon antirévisionniste de notre époque, après Marx, Engels et Lénine ; entre eux existe l’unité du marxisme-léninisme, qui à chaque période historique, dans chaque pays, a connu sous leur direction et par leurs idées, un développement nouveau.

Dès 1960, Hoxha, fidèle au marxisme-léninisme, mettait clairement et résolument les choses au point devant Khrouchtchev, non encore démasqué :

« Le camarade Staline, par son rôle personnel et en tant que dirigeant du parti communiste bolchévik, fut également le guide le plus éminent du communisme international après la mort de Lénine ; il influa de façon très positive et avec la plus grande autorité sur la consolidation et le développement des conquêtes du communisme dans le monde entier. Toutes les œuvres théoriques du camarade Staline sont un ardent témoignage de sa fidélité à son maître génial, au grand Lénine et au léninisme.

Staline lutta pour les droits de la classe ouvrière et des travailleurs dans le monde entier, il lutta avec un grand esprit de suite jusqu’au bout pour la liberté des peuples de nos pays de démocratie populaire.

Ne fût-ce que sous ces aspects, Staline appartient au monde communiste tout entier et pas seulement aux communistes soviétiques, il appartient à tous les travailleurs du monde et pas seulement aux travailleurs soviétiques.

… Mais ils (Khrouchtchev et sa clique) considèrent la question de Staline superficiellement, uniquement du point de vue intérieur de l’Union soviétique. Mais de l’avis du Parti du Travail d’Albanie, ils ont, même sur ce point de vue, considéré la question de façon unilatérale, n’ont vu que ses erreurs, ont presque totalement ignoré son immense activité, sa grande contribution au renforcement de l’Union soviétique, à la trempe du Parti communiste de l’Union soviétique, à la mise sur pied de l’économie, de l’industrie soviétique, de l’agriculture kolkhozienne, à la conduite du peuple soviétique dans la grande lutte victorieuse contre le fascisme allemand.

Staline a-t-il commis des erreurs ? Assurément oui. Il est inévitable qu’une si longue période, remplie d’actes héroïques, de combats, de victoires, comportât aussi des erreurs, non seulement personnelles de Joseph Staline, mais aussi de la direction en tant qu’organe collectif. Est-il un parti ou un dirigeant qui se considère exempt de toute erreur dans son travail ? Lorsque des critiques sont soulevées à l’égard de la direction soviétique, les camarades soviétiques nous conseillent de regarder en avant, de ne pas revenir sur le passé et de mettre un terme à la polémique, mais lorsqu’il s’agit de Staline, non seulement ils ne regardent pas en avant, mais ils reviennent en arrière, très en arrière, pour ne fouiller que dans les faiblesses de l’œuvre de Staline » (Discours prononcé à la réunion des quatre-vingt-un partis communistes et ouvriers à Moscou, le 16 novembre 1960).

A ce bilan, il faut encore ajouter que Staline et la direction du Parti commencèrent la lutte contre le révisionnisme. C’est pourquoi, le camarade Hoxha conclut :

« Le Parti du Travail d’Albanie estime qu’il n’est ni juste, ni naturel, ni marxiste que, de toute cette époque, soient effacés le nom et la grande œuvre de Staline, comme ils le sont à présent. L’œuvre féconde et immortelle de Staline, il nous incombe à tous de la défendre : qui ne la défend pas est un opportuniste et un lâche ».

Et les révolutionnaires soviétiques nous tracent la seule voie à suivre :

« Il est clair que sous le couvert des phrases opportunistes sur la démocratie, se dissimulent l’individualisme bourgeois et l’effort en vue de s’assurer, en temps voulu, la possibilité de déserter. Celui qui veut combattre ne peut pas se passer de commandant. Et si aujourd’hui, Staline n’est pas vivant, nous allons nous battre dans les bataillons de Mao Tsé-toung et d’Enver Hoxha ». (Proclamation-programme des communistes bolchéviks révolutionnaires soviétiques)

Ainsi nous ferons.

CONCLUSION

L’Union soviétique, de 1917 à 1956, a réalisé la première expérience prolongée de la dictature du prolétariat.

Sous la direction du Parti de Lénine et de Staline, avant-garde organisée de la classe ouvrière, l’Union soviétique a victorieusement mené la lutte sur le front économique, maillon principal de la construction du socialisme après la prise de pouvoir dans un pays arriéré, encerclé par le capitalisme et l’impérialisme. Les plans quinquennaux ont, dans une courte période historique, fait passer l’URSS à un État industriel développé. L’industrialisation socialiste, maillon principal de l’infrastructure, a permis de gigantesques progrès sur le plan économique et culturel, et elle a accru considérablement le potentiel défensif de l’URSS. La collectivisation de l’agriculture, le socialisme à la campagne, a mis fin à l’exploitation de millions de paysans par les koulaks. Les kolkhoz et les sovkhoz ont renforcé la base économique de l’État et ont contribué à l’amélioration des conditions de vie du peuple.

Les contradictions entre les différentes nationalités ont été résolues démocratiquement par la constitution de l’Union des Soviets. La culture, les sciences et les techniques, l’art ont été mis au service du peuple, développés et enrichis. Ces domaines de l’activité sociale ont été le terrain d’une lutte continue entre la ligne bolchévique et la ligne bourgeoise.

Contre l’agression fasciste, le Parti et l’État de l’URSS ont soulevé et dirigé les ouvriers et les paysans vers la Grande Guerre Patriotique. L’Armée soviétique, sous la direction de Staline, a libéré l’URSS et a aidé les autres peuples à remporter la victoire. L’URSS a été la force principale qui triompha de l’impérialisme allemand ; grâce à la juste direction de son Parti et à l’héroïsme de son peuple, elle a été le plus puissant rempart de la lutte mondiale contre le fascisme et pour une paix durable. Les peuples du monde ne l’oublieront jamais.

Le glorieux Parti Communiste bolchévik de l’URSS a été l’arme principale de la dictature du prolétariat. Seule la direction d’un parti de type nouveau peut assurer la construction du socialisme et la victoire contre les ennemis de l’intérieur et de l’extérieur. La direction de Staline a poursuivi l’œuvre de Lénine, en renforçant et en développant les bases idéologiques, organisationnelles, théoriques et tactiques du Parti bolchévik.

Le Parti Communiste de l’URSS a assimilé les enseignements de Marx, Engels, Lénine ; il les a systématisés et développés. Il a enrichi la théorie de Lénine du développement inégal du capitalisme et la théorie de la possibilité de la victoire du socialisme en URSS. Il a organisé l’industrialisation socialiste, la collectivisation de l’agriculture, la solution de la question nationale, la victoire de l’URSS et des peuples sur l’impérialisme. Il a également entrepris l’analyse des contradictions dans le système socialiste entre les forces productrices et les rapports sociaux de production. La théorie communiste progresse dans la lutte contre l’opportunisme et le révisionnisme. Le PC(b) de l’URSS a mené une lutte intransigeante et sans relâche contre les agents de la bourgeoisie et de la petite-bourgeoisie infiltrés dans le Parti. La victoire sur les trotskistes, les boukhariniens, les zinoviévistes, les nationalistes bourgeois et les autres ennemis de la dictature du prolétariat a permis au parti de sauvegarder son unité, sa cohésion intérieure et sa discipline. Cette lutte est vitale pour que le Parti puisse assurer et consolider la direction révolutionnaire qu’il exerce dans la construction du socialisme. Staline a indiqué : « C’est de l’intérieur que les forteresses s’enlèvent le plus facilement. Pour obtenir la victoire, il faut avant toute chose épurer le Parti de la classe ouvrière, – son État-major dirigeant, sa citadelle avancée – des capitulards, des déserteurs, des félons et des traîtres ».

La lutte idéologique, la pratique de la critique et de l’autocritique renforcent la capacité combative du Parti.

Le Parti communiste, lié aux masses, est invincible. Le Parti de l’URSS, se basant sur la ligne bolchévique, a soulevé l’enthousiasme révolutionnaire des masses dans la construction du socialisme. Il exécuta la volonté de la classe ouvrière et du peuple et prit toujours leurs besoins pour fondement de sa politique. L’attachement du peuple soviétique et de tous les peuples du monde au Parti de Lénine et de Staline, témoigne de la justesse de sa politique. La nécessité pour le Parti d’assurer son rôle de dirigeant dans le feu d’une lutte de classes nationale et internationale acharnée, l’amenait, dans l’application de la ligne de masse et du centralisme démocratique, à mettre l’accent sur le centralisme. En même temps, la direction bolchévique restait vigilante devant le danger du bureaucratisme et menait la lutte contre lui dans le Parti et dans l’État. L’histoire du parti communiste de l’URSS nous apprend, dit Staline, que « faute d’avoir d’amples liaisons avec les masses, faute de raffermir constamment ces liaisons, faute de savoir écouter la voix des masses et comprendre leurs besoins poignants, faute d’avoir la volonté non seulement d’instruire les masses, mais aussi de s’instruire auprès d’elles, le Parti de la classe ouvrière ne peut pas être un véritable Parti de masse, capable d’entraîner, avec leurs millions d’hommes, la classe ouvrière et l’ensemble des travailleurs ».

Depuis les débuts de la social-démocratie russe, la vie et l’œuvre du camarade Staline ont été liées à la pratique révolutionnaire. Il a pris une part active dans la construction du Parti bolchévik. Fidèle à la ligne léniniste, il a mené en Russie un important travail de masse d’organisateur et de propagandiste. Membre du groupe dirigeant pendant la Révolution d’Octobre et cadre responsable de la défense de l’URSS pendant la guerre civile et antiimpérialiste, Staline a mis ses grandes capacités politiques et militaires au service du peuple. Ensuite le Parti lui confia les tâches de Secrétaire général du Comité central.

Staline, le principal dirigeant du Parti, a présidé à la première expérience de l’édification du socialisme. Son nom restera à jamais dans le cœur des peuples. Dans une situation extrêmement difficile, caractérisée par l’achèvement de l’offensive révolutionnaire en Europe, l’encerclement capitaliste et l’absence de base économique développée en URSS, le Parti et l’État ont, sous la direction de Staline, mené à bien les tâches politiques et économiques de la construction du socialisme.

Le camarade Staline a été pendant trente ans l’éducateur des communistes du monde entier. Dirigeant de la IIIe Internationale, il a développé la conception et la pratique de l’internationalisme prolétarien, la collaboration et l’assistance mutuelle des peuples en lutte pour leur indépendance et pour le socialisme. Il a dirigé la lutte des peuples du monde contre l’impérialisme et le colonialisme, et il a engagé la lutte contre le révisionnisme moderne en indiquant la cible principale par sa critique du titisme. Dans la théorie de l’analyse des classes sous le socialisme, Staline a commis des erreurs. Il n’a pas complètement élucidé le danger de restauration du capitalisme ni les formes politiques de la lutte de classes dans les conditions de la dictature du prolétariat. A la fin de sa vie, à l’époque où le révisionnisme et la constitution d’une nouvelle bourgeoisie en URSS étaient devenus le danger principal, Staline avait commencé à rectifier ces erreurs théoriques.

Mais en tout temps, Staline a maintenu et dans la théorie et dans la pratique la nécessité de la dictature du prolétariat et il a, dans les faits, mené sans relâche une lutte de classes intransigeante à l’intérieur et à l’extérieur de l’URSS.

Lorsque Staline nous a quittés, Mao Tsé-toung a déclaré : « Le camarade Staline est le représentant de toute une époque nouvelle. Son œuvre a permis au peuple soviétique et aux travailleurs de tous les pays de modifier toute la situation internationale. Cela signifie que la cause de la justice, de la démocratie populaire et du socialisme a remporté la victoire sur un secteur immense du monde, un secteur comprenant le tiers de la population du globe, soit plus de 800 millions d’habitants ».

La ligne bourgeoise, dirigée par Khrouchtchev, a pris Staline et la ligne staliniste pour la première cible de ses attaques haineuses. Sous prétexte de « critiquer » le « culte de la personnalité » dont lui et ses pareils sont seuls à pouvoir être tenus pour responsables, ils ont voulu « déstaliniser » le Parti bolchévik et le mouvement communiste international. A la dictature du prolétariat ils ont substitué le soi-disant « Parti du peuple tout entier » et le soi-disant « État du peuple tout entier ». Au lieu de pratiquer l’internationalisme prolétarien, Khrouchtchev-Brejnev et leurs complices ont inventé la prétendue « théorie de la souveraineté limitée » pour opprimer et exploiter les peuples. Ils ont trahi la cause de la révolution socialiste en prônant la compétition pacifique entre l’URSS et l’impérialisme américain et en répudiant la lutte violente du prolétariat pour le pouvoir dans les pays capitalistes. A chaque élément de la ligne de Lénine et Staline ils ont substitué un élément de la ligne bourgeoise impérialiste. Les agissements contre-révolutionnaires de ces renégats ont été complètement démasqués par la critique marxiste-léniniste du Parti du Travail d’Albanie et du Parti Communiste chinois.

Mais s’ils sont parvenus à usurper temporairement le pouvoir en Union soviétique et à opprimer les peuples qu’ils tiennent encore sous leur domination, ils n’ont pas réussi à arrêter les progrès foudroyants du socialisme et des luttes de libération dans le monde.

Faisant le bilan des aspects positifs et des aspects négatifs de l’expérience soviétique, le camarade Mao Tsé-toung a tiré les principaux enseignements et pris les mesures nécessaires pour prévenir la restauration du capitalisme en République populaire de Chine et à y poursuivre victorieusement l’édification du socialisme. Mao Tsé-toung a continué et développé l’œuvre pratique et théorique de Staline. La ligne rouge du Parti communiste chinois a apporté la justification entière de la ligne staliniste qui mit toujours au poste de commandement la lutte des classes nationale et internationale.

Mao Tsé-toung a formulé les lois de la continuation de la révolution sous la dictature du prolétariat. A l’époque où la transformation économique pour ce qui est de la propriété des moyens de production, était accomplie en Chine, il a indiqué que « la question de savoir qui l’emportera, du socialisme ou du capitalisme, n’est pas encore véritablement résolue ». « La lutte de classes entre le prolétariat et la bourgeoisie, entre les différentes forces politiques et entre les idéologies prolétarienne et bourgeoise sera encore longue et sujette à des vicissitudes, et par moments elle pourra même devenir très aiguë ».

En 1962, à la dixième session plénière du Comité central issu du VIIIe Congrès du Parti, le camarade Mao Tsé-toung a formulé intégralement la ligne fondamentale du PCC pour toute la période historique du socialisme : « La société socialiste s’étend sur une assez longue période historique, au cours de laquelle continuent d’exister les classes, les contradictions de classes et la lutte des classes, de même que le danger d’une restauration du capitalisme. Il faut comprendre que cette lutte sera longue et complexe, redoubler de vigilance et poursuivre l’éducation socialiste. Il faut saisir et résoudre correctement les problèmes concernant les contradictions de classes, distinguer, d’une part, les contradictions entre l’ennemi et nous, d’autre part, les contradictions au sein du peuple, puis leur donner une juste solution. Sinon, un pays socialiste comme le nôtre se transformera en son contraire : il changera de nature et verra la restauration du capitalisme ».

La théorie de la juste solution des contradictions au sein du peuple, le Grand Bond en Avant, la lutte contre le révisionnisme moderne ayant à sa tête la clique Khrouchtchev-Brejnev, la campagne d’éducation socialiste, ont été les jalons principaux, de cette lutte révolutionnaire.

Le mouvement a culminé dans la Grande Révolution culturelle prolétarienne, révolution politique que le prolétariat mène contre la bourgeoisie et toutes les autres classes exploiteuses. Cette révolution se déroule dans le domaine de la superstructure. Elle vise principalement les responsables du Parti qui se sont engagés dans la voie capitaliste.

Les progrès de la construction du socialisme en Chine et en Albanie, la Grande Révolution culturelle prolétarienne dirigée par le PCC et le camarade Mao Tsé-toung, la révolutionnarisation de l’idéologie entreprise par le PTA sous la direction du camarade Enver Hoxha, sont pour les révolutionnaires du monde entier un exemple et un encouragement inestimables.

  1. O. Bauer prétendait qu’« en Russie, où le prolétariat ne représente qu’une petite minorité de la nation, le prolétariat ne peut conserver sa domination provisoire », qu’« il doit la perdre dès que la masse paysanne de la nation sera suffisamment mûre au point de vue culturel pour la reprendre », que « la domination provisoire du socialisme industriel dans la Russie agraire n’est qu’une flamme appelant le prolétariat de l’Occident industrialisé à la lutte, que « seule la conquête du pouvoir politique par le prolétariat de l’Occident industrialisé pourra fonder une domination durable du socialisme industriel » en Russie (Bolchevisme ou social-démocratie).
  2. Trotski lui-même ne se gêna pas, plus tard, d’en convenir ouvertement : « En 1923, Léon se jeta la tête la première dans le travail de l’opposition … Ainsi, à 17 ans, il commença la vie d’un révolutionnaire pleinement conscient. Rapidement, il acquit l’art du travail conspiratif, des meetings illégaux, de l’édition clandestine et de la distribution des documents de l’opposition. Le komsomol rapidement forma ses propres cadres de militants de l’opposition (Léon Sedov, un fils, un ami et un combattant, Paris, 1938).
  3. L’artel est fondée sur la collectivisation du sol, du travail, des machines et des bêtes de trait. Le paysan conserve la possession de terres individuelles, et la propriété de l’habitation, d’une partie du bétail laitier, du petit bétail de la volaille…
  4. Michel Sayers and Albert E. Kahn, The great conspiracy. The secret war against Soviet Russia, Trad. fr. et néerl., 1947, chap. XII et XIII.
  5. Voir Lénine, A nouveau les syndicats, 1921, t. 32, p. 67-109.
  6. A certains moments, Staline fut près d’établir la vérité. Ainsi en 1929, lors de la lutte contre le groupe Boukharine. « Il serait ridicule d’imaginer que l’on puisse fortifier nos organisations administratives, économiques, syndicales et coopératives, qu’on puisse les purifier de la souillure du bureaucratisme, sans affiner le Parti lui-même. Si le Parti est la force dirigeante de toutes ces organisations, il est clair que l’épuration du Parti est la condition indispensable sans laquelle il serait impossible d’animer et d’améliorer à fond toutes les autres organisations de la classe ouvrière. De là, le mot d’ordre d’épuration du Parti. Ces mots d’ordre sont-ils accidentels ? Certes non. Vous voyez vous-mêmes qu’ils ne sont pas accidentels. Ils forment les anneaux indispensables d’une seule chaîne ininterrompue, appelée offensive du socialisme contre les éléments du capitalisme » (souligné par Staline) (De la déviation de droite dans le PC(b) de l’URSS, Questions du léninisme, p. 321-323).
  7. C’est ce que Staline lui-même affirma, après l’épuration du Parti effectuée de 1933 à 1936. L’épuration fit régner l’ordre bolchévik dans la maison du Parti et renforça la capacité combative du Parti mais « on ne peut dire qu’elle ait été effectuée sans fautes graves. Malheureusement, elles furent plus nombreuses qu’on n’aurait pu le supposer. Il n’est pas douteux que nous n’aurons plus à employer la méthode de l’épuration massive. Mais l’épuration de 1933-1936 était inévitable ; dans l’ensemble, elle a donné des résultats positifs ». (Rapport au XVIIIe Congrès du PC(b) de l’URSS, Questions du léninisme, p. 964-865).
  8. « Si, à l’opposé des paysans ( ?), les ouvriers n’engagent presque pas la lutte (contre la bureaucratie ») …, ce n’est pas seulement à cause de la répression : les ouvriers craignent de frayer la route à une restauration capitaliste. Les relations réciproques entre l’État et la classe ouvrière sont beaucoup plus complexes que ne l’imaginent les « démocrates » vulgaires. Sans économie planifiée, l’URSS serait rejeté à des dizaines d’années en arrière … Les ouvriers sont réalistes (p. 238) ». En effet ! Ils savaient depuis longtemps à quoi s’en tenir sur le « programme » de Trotski ! Lui savait combien les masses soviétiques tenaient à Staline.

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