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UNE DÉFAITE DU SCISSIONNISME NÉO-RÉVISIONNISTE

INTRODUCTION

Nous rapportons ici la lutte qui s’est livrée dans l’UC(ML)B sur le terrain du centralisme démocratique et de l’esprit de parti prolétarien.

En septembre 1972, au moment où fut lancée dans l’organisation une campagne de bolchevisation visant à doter l’UC(ML)B de statuts, les cadres chargés de mener la campagne, au lieu de lutter pour le renforcement du centralisme démocratique, constituèrent une faction et lancèrent une attaque contre la direction et la ligne politique.

Cette fraction fut immédiatement dissoute par la direction, et la critique amena la plupart des fractionnels ainsi que ceux qui les avaient un moment soutenus, à reconnaître qu’ils avaient cédé à l’anarchisme petit-bourgeois.

Cependant un cadre fractionnel, qui s’était soustrait à la lutte et à la critique, repartit à l’attaque, formant une nouvelle fraction avec d’autres membres de l’organisation. Cette seconde attaque fut condamnée par toute l’UC(ML)B. Persistant dans leur refus de reconnaître et d’appliquer les principes du centralisme démocratique, les fractionnels se mirent en contradiction radicale avec l’organisation et avec le mouvement marxiste-léniniste : l’un d’eux fut exclu en janvier 1973, les deux autres se retirèrent d’eux-mêmes. Leurs positions et leur pratique scissionnistes les ont placés dans le camp du néo-révisionnisme.

La lutte pour le centralisme démocratique contre le fractionnisme et le scissionnisme est une lutte d’une importance primordiale pour la construction du Parti. Dans un mouvement jeune et encore divisé, cette question mobilise l’avant-garde qui met en œuvre toutes ses forces pour s’unir aux communistes et à la classe ouvrière. Au contraire, attenter à l’unité, rejeter le centralisme démocratique est le fait de l’opportunisme soumis à l’idéologie petite-bourgeoise ; persister dans cette voie, c’est renforcer par une aide directe l’action de nos ennemis, c’est se faire l’allié objectif du néo-révisionnisme et du révisionnisme moderne.

Les communistes mènent une lutte idéologique conséquente afin d’unir tout ce qui peut être uni ; ils condamnent tout esprit fractionnel et scissionniste et ils prennent toutes les mesures pour le réduire à néant.

I. SITUATION POLITIQUE, IDÉOLOGIQUE ET ORGANISATIONNELLE DE l’UC(ML)B EN AOÛT-SEPTEMBRE 1972

§ 1. BASE POLITIQUE ET IDÉOLOGIQUE DE TOUT LE POUVOIR AUX TRAVAILLEURS (TPT) – UNION DES COMMUNISTES (MARXISTES-LÉNINISTES) DE BELGIQUE (l’UC(ML)B)

Le bulletin marxiste-léniniste 1 (janvier 1972) met pour la première fois en évidence dans le mouvement que la tâche principale des marxistes-léninistes est de faire leur unité, et il dénonce le néo-révisionnisme comme l’ennemi principal à l’intérieur du mouvement. Dès que notre unité sera réalisée, notre tâche principale sera de construire le programme communiste, tout en participant aux luttes de la classe ouvrière.

En défendant ces positions, TPT se plaçait résolument dans le camp marxiste-léniniste et sortait de l’opportunisme ; en même temps, sa définition correcte des tâches principales actuelles le portait à l’avant du mouvement et de la lutte pour l’unité.

A l’intérieur de l’organisation

La direction nouvellement élue – le Noyau dirigeant national (NDN) – devait à ce moment mener la lutte contre l’opportunisme pour faire triompher les positions fondamentales du bulletin marxiste-léniniste 1. La minorité tendait vers une unité sans démarcation préalable avec Alle Macht aan de Arbeiders (AMADA), sous-estimant gravement l’importance et l’ampleur de nos tâches théoriques. Elle inclinait également à la conciliation avec le néo-révisionnisme, en particulier avec l’Exploité. L’idéologie de ce courant était l’esprit de capitulation devant le « risque d’isolement » du TPT, et menait au néo-révisionnisme.

La lutte idéologique livrée avec l’opportunisme éleva le niveau de conscience de l’organisation sur ses tâches principales et l’esprit de dévouement dans l’accomplissement du travail révolutionnaire. Le centralisme démocratique, principe d’organisation communiste, qui avait été étudié et défendu pendant la campagne intérieure sur le Parti (novembre-décembre 1971), fut reconnu explicitement dans le bulletin marxiste-léniniste 1, et il fut aussitôt mis en application (voir § 2).

Le bulletin marxiste-léniniste 1 était cependant trop abstrait et trop général pour éclairer de façon suffisante les contours politiques de toutes les questions discutées (le néo-révisionnisme, les tâches théoriques, le centralisme démocratique), pour guider toute l’activité pratique (les tâches de travail de masse) et pour déterminer entièrement les contradictions existant dans le mouvement. C’est ainsi, par exemple, que le courant opportuniste de TPT pouvait entretenir l’illusion qu’il était capable de diriger correctement l’accomplissement des tâches pratiques, comme si celles-ci n’étaient en rien liées à la contradiction principale. De même, l’éducation et l’emploi des cadres étaient limités, parce que les perspectives de construction du programme étaient encore imprécises, comme aussi les besoins de propagande, qui doit lier les tâches principales du mouvement aux problèmes actuels des larges masses prolétariennes ; pourtant les cadres constituent le chaînon vital entre le NDN et la base, le lien entre la construction de la ligne et son application. C’est pourquoi TPT approfondit l’analyse de l’ennemi principal (bulletin marxiste-léniniste 2, mai 1972), mena une lutte systématique pour l’unité, tout en définissant la ligne de démarcation dans le mouvement et critiquant AMADA et le Groupe de Libération de la Classe Ouvrière (GLCO), en établissant une plate-forme cohérente explicitant l’ensemble de nos tâches actuelles, leur ordre d’importance et leurs rapports mutuels (bulletin marxiste-léniniste 3, juin 1972). Il fallait aussi consolider l’idéologie marxiste-léniniste et l’attachement aux principes (bulletin marxiste-léniniste 4, juillet 1972).

A l’échelle du mouvement

Le bulletin marxiste-léniniste 3 propose la plate-forme de la construction du Parti en sa première étape. C’est une grande victoire de la ligne marxiste-léniniste qui redresse la tête après des années de domination totale du révisionnisme moderne et du néo-révisionnisme. La plate-forme définit les deux lignes dans le mouvement et place la lutte pour l’unité contre le néo-révisionnisme sur des bases politiques solides. Aujourd’hui, on ne discute plus si l’unité des organisations marxistes-léninistes est nécessaire, mais sur les moyens de la réaliser (pour le courant marxiste-léniniste) ou de la freiner (pour le courant sectaire opportuniste). Le néo-révisionnisme se débat comme une bête blessée à mort.

TPT prend le nom d’UC(ML)B pour signifier que sa tâche principale et immédiate est d’unir les marxistes-léninistes et de construire le l’UC(ML)B, et pour marquer son opposition irréductible au « PCMLB » néo-révisionniste et au « PCBML » néo-révisionniste.

§ 2. BASE ORGANISATIONNELLE DE TPT-UC(ML)B. RÉSOLUTION SUR L’UNITÉ DES MARXISTES-LÉNINISTES

Dès janvier 1971, le principe du centralisme démocratique, et la nécessité de son application dans TPT, étaient pleinement reconnus :

« Au point de vue de l’organisation, le noyau dirigeant établit un fonctionnement du centralisme démocratique correspondant à notre degré de développement. Le centralisme démocratique ne sera appliqué dans toute son ampleur que lorsque nous serons un Parti. Mais nous pouvons et devons actuellement pratiquer ses principes en conformité avec notre situation, définir le point de vue centraliste et l’apport du noyau dirigeant, le point de vue démocratique et l’apport de la base, ainsi que la position de la contradiction qui unit ces deux pôles ». (Bulletin marxiste-léniniste 1, p. 13-14).

Le principe du centralisme démocratique fut aussitôt mis en application. La centralisation de l’autorité et la division des tâches se concrétisèrent par l’élection du NDN et des cadres et par la désignation des responsables. Ce NDN était issu de l’ancienne direction qui, après la scission avec les spontanéités, avait entrepris la lutte pour le centralisme démocratique contre les tenants de la « théorie » selon laquelle « chacun doit tout faire, chacun doit tout savoir ». Cette première direction s’était ensuite divisée en élaborant les positions sur le centre et contre le néo-révisionnisme : une avant-garde se dégagea (qui devint le NDN), ainsi qu’un courant opportuniste et un centre.

Le centralisme démocratique commença donc à fonctionner, mais il se fondait essentiellement sur la confiance politique et idéologique, et il n’était pas encore consolidé par des mesures organisationnelles strictes. C’était le règne de l’autorité des idées, pas encore celui de l’autorité du pouvoir.

Dans le mouvement, le centralisme démocratique commença à être expliqué consciemment.

L’unification du TPT et d’Unité Rouge (UR) (avril 1972) montrait la voie correcte pour la construction du Parti.

La période novembre 1971-juin 1972, fut une période d’éclaircissement des idées. Dans l’organisation, l’opportunisme était affaibli par la lutte idéologique et par la grande unité du courant de gauche. Parce qu’il avait perdu la partie dans les questions politiques et idéologiques, l’opportunisme tenta un coup d’essai dans le domaine de l’organisation interne de TPT.

En avril, tous les cadres d’alors (B, C, E, G) composèrent à l’insu du NDN un texte acerbe de critique contre lui. Ce texte accusait le NDN de s’être complètement coupé des cadres, de négliger totalement les tâches secondaires, d’agir comme « théoricien bourgeois », de prendre les décisions (unification TPT-UR, préparation du bulletin marxiste-léniniste 4, discussion avec AMADA) bureaucratiquement, de négliger délibérément l’éducation des cadres et de refuser toute critique. Les cadres exprimaient une forte tendance « antiautoritaire » et une grande méfiance à l’égard du NDN, qui, à les en croire, rejetait toutes les carences de l’organisation sur leur dos.

Le NDN répliqua en dénonçant le fractionnisme des cadres qui avaient élaboré leurs attaques en l’absence concertée des membres du NDN. Sur le fond de la critique, le NDN expliqua quelle était à ce moment sa tâche de direction principale, en se fondant sur le principe selon lequel il faut « savoir employer les cadres » :

« Le devoir d’un dirigeant se ramène essentiellement à trouver les idées et à employer les cadres. Elaborer un plan, prendre une décision, lancer un ordre, donner une directive, etc. c’est « trouver les idées ». Pour faire passer les idées dans la pratique, il faut unir les cadres et les inviter à l’action : cela s’appelle « employer les cadres » (Mao Tsétoung, Le rôle du Parti communiste chinois dans la guerre nationale, t. 2, p. 218-219).

A ce moment, la tâche principale était de « trouver les idées » et non d’« employer les cadres », parce que sans plate-forme, l’emploi des cadres reste nécessairement restreint. Le NDN ajouta qu’il avait d’ailleurs conscience de cette lacune grave dans le fonctionnement de l’organisation et qu’il la corrigerait dès l’achèvement du bulletin marxiste-léniniste 3.

Les exigences des cadres étaient fondées, et ils mirent le doigt sur une déviation bureaucratique du NDN. Mais ils eurent le tort d’exacerber la contradiction en menant une attaque fractionnelle au lieu de critiquer dans un esprit positif, et ils se trompaient en faisant de leurs exigences la question principale du moment, négligeant l’obligation primordiale du NDN qui étaient encore à ce moment de « trouver les idées ».

Les cadres firent rapidement leur autocritique et reconnurent d’autant plus facilement leurs erreurs que l’unification avec UR et les progrès de l’élaboration de la ligne prouvaient la justesse des positions du NDN.

Cependant, subjectivement, le NDN sous-estima la gravité de l’attaque des cadres contre le centralisme démocratique. Il retint surtout l’aspect positif, quoique secondaire, du texte des cadres : le désir des camarades de participer plus activement à l’élaboration de la ligne politique. Le NDN ne comprenait pas encore que la phase suivante de l’édification de TPT serait la consolidation et le développement du centralisme démocratique. Pour cette raison, il ne vit pas clairement le danger que faisait courir de tels agissements fractionnels quant à l’amélioration du fonctionnement de l’organisation et quant aux problèmes idéologiques que la nécessité de ce progrès soulèverait.

A cette époque, le centralisme démocratique, appliqué depuis décembre 1971, fut cependant consolidé par des mesures organisationnelles, principalement par le renforcement de l’autorité du NDN (le NDN, à l’exclusion des cadres, a seul pouvoir de décision).

La question des statuts fut explicitement posée à partir d’avril-mai et, en attendant d’élaborer les siens, l’organisation se référa à ceux du IXe Congrès du parti communiste chinois. Un texte de cellule défendant le centralisme démocratique fut reconnu par le NDN, sans que celui-ci prêtât encore réellement attention au mauvais fonctionnement de l’organisation. Cependant l’opportunisme en matière d’organisation recula rapidement et laissa au NDN un délai avant de porter le coup suivant.

A partir de juin-juillet, dès l’achèvement des bulletins marxistes-léninistes 3 et 4, les bases politiques et idéologiques de l’UC(ML)B étaient posées. L’UC(ML)B possédait dès lors une plate-forme ordonnant l’ensemble de nos tâches : l’unification des marxistes-léninistes, la construction du programme, les tâches de la pratique de masse, l’établissement d’un centralisme démocratique interne correct. L’unité de l’UC(ML)B était devenue beaucoup plus grande. Il devenait dès lors primordial de faire progresser l’édification organisationnelle, d’élaborer des statuts, afin de doter l’UC(ML)B de structures solides et de lui assurer un fonctionnement correct. Avant tout, il fallait mieux implanter la morale communiste : le dévouement des militants doit se développer en vue des luttes du prolétariat contre le Capital et de la construction du Parti communiste. Pour assurer l’exécution correcte des tâches envers les masses, il est nécessaire de combattre systématiquement le révisionnisme ; il fallait aussi corriger le caractère dogmatique de notre propagande antirévisionniste. Il fallait surtout organiser l’intégration des ouvriers dans l’organisation et faire progresser la construction des cellules.

Objectivement, le maillon à saisir était la question du centralisme démocratique. L’application de la ligne et son approfondissement nécessitent l’appui et la participation active des cadres, des responsables et des militants de la base. Sa construction requiert la collaboration des cadres et de l’ensemble des membres (plan de critique du révisionnisme moderne, formation philosophique, politique et économique). Il était également indispensable d’élever le niveau de conscience de toute l’UC(ML)B pour qu’elle accomplisse résolument ses tâches révolutionnaires et pour que les déviations organisationnelles puissent être corrigées.

L’établissement d’un centralisme démocratique correct et l’éducation sur le centralisme démocratique pour faire pièce aux déviations petites-bourgeoises étaient – et sont – donc bien les tâches principales internes à l’heure actuelle. Il s’agit de mener la lutte idéologique et un travail d’éducation pour que les principes du centralisme démocratique soient effectivement assimilés par toute l’organisation, afin que les nouvelles structures que nous adopterons permettent de mieux accomplir l’ensemble de nos tâches.

Subjectivement, le NDN se trompa de maillon. A l’époque du texte fractionnel des cadres (avril), l’erreur que le NDN avait commise en sous-estimant la gravité de l’infraction était une erreur secondaire, parce que la tâche principale était encore de construire la ligne. Mais dès juin-juillet, dès la fin de la discussion de la ligne par les cadres, ce qui était été secondaire devint principal, et l’erreur du NDN, si elle n’était pas rapidement corrigée, risquait donc d’avoir des effets graves. Déjà la lutte idéologique avait pour l’essentiel pris fin dans l’organisation, et la « grande unité » semblait régner partout. L’ensemble des tâches se réalisait de façon chaotique, sans que le NDN, les cadres et les responsables ne réagissent vigoureusement.

A ce moment, que fit le NDN ?

a) Il entreprit l’éducation des cadres sur le révisionnisme moderne. La critique du révisionnisme moderne est indispensable à un double point de vue : elle déterminera la justesse du travail théorique et elle permettra de gagner au communisme les ouvriers d’avant-garde, qui sont le plus influencés par le courant révisionniste (le NDN commença une autocritique sur la façon dogmatique dont cette tâche a été assurée jusqu’à présent, dans le journal). La dénonciation du révisionnisme et l’éducation sur cette question permettraient aussi d’associer de plus près les cadres à l’activité politique du NDN. Le NDN prouvait ainsi son désir d’améliorer le travail de masse et d’assurer une meilleure collaboration des cadres.

b) Il fit l’autocritique sur le scissionnisme envers le Parti du Travail l’Albanie. En soutenant l’idée d’une conférence des Partis et Organisations communistes (marxistes-léninistes) d’Europe tenue en dehors du PTA, l’organisation avait commis une erreur « ultra-gauche ». Cette grave sous-estimation du rôle d’avant-garde qui revient au PCC et au PTA dans le mouvement communiste (marxiste-léniniste) international – et la présomption que cela suppose de notre part – amenèrent le NDN à faire son autocritique et à mettre la question sur le tapis devant les organisations belges et étrangères qui avaient participé à la réunion d’octobre 1971.

c) Il décida d’établir des statuts. La question n’était pas encore abordée de front. Toute l’organisation avait conscience des carences structurelles. La proposition faite par un cadre de mettre sur pied un comité exécutif fut immédiatement acceptée par le NDN. Deux cadres furent chargés en juillet de préparer un projet de statuts.

Le NDN s’occupait donc de plusieurs fronts à la fois, sans avoir une connaissance rationnelle du maillon principal. Cependant les autocritiques sur la question du révisionnisme moderne et sur la « conférence internationale », ainsi que le début d’éducation des cadres, montraient sa volonté de corriger toutes les déviations. Au mois d’août, deux faits graves indiquèrent que la situation se dégradait.

En organisant les vacances, le NDN permit par son libéralisme la liquidation complète de toute l’activité pendant près de deux mois. Les cadres ne réagirent pas, indiquant ainsi combien la faiblesse idéologique de l’organisation était encore grande. Renoncer à la cause du prolétariat, ne fût-ce qu’une heure, est un pas vers la trahison révisionniste. L’organisation en entier déserta pendant plusieurs semaines pour satisfaire l’égoïsme et l’individualisme de ses membres. Le NDN, les cadres et les responsables avaient le devoir impératif de faire une autocritique intransigeante pour abandon de la lutte des classes.

Juste avant les vacances, le GU (Groupe des responsables des cellules d’usine) avait remis au NDN un rapport sur l’établissement en usine qui développait une conception révisionniste de nos tâches envers les masses et qui s’opposait à l’orientation générale de l’organisation, définie pendant l’éducation sur le Parti et dans les bulletins marxistes-léninistes 1, 2 et 3. Ce texte liou chaochiste de « perfectionnement individuel », au lieu de partir des besoins de la classe ouvrière et de nos tâches envers les masses, mettait l’accent sur les avantages idéologiques que les membres de l’organisation retireraient de leur établissement. Dans l’estimation de la conscience politique ouvrière, il manifestait un mépris certain pour les « masses arriérées ». Enfin, en systématisant la définition de nos tâches dans la formule « le plus possible de militants à l’usine, tous les cadres en dehors de l’usine », il dénotait une conception mécaniste du rapport entre tâches internes et tâches de la pratique de masse. La tendance de gauche dans la discussion avait été largement et facilement étouffée par l’opportunisme. Le NDN comprit immédiatement le danger de ce texte. Si la critique n’était pas acceptée par le GU, cela signifiait que la majorité des cadres choisissaient la voie révisionniste. Mais les cadres concernés reconnurent rapidement leurs erreurs et firent leur autocritique. Le texte du GU avait, à son tour, mis en évidence la faiblesse idéologique de l’organisation et, dans ce cas-ci, de certains cadres qui avaient été submergés pendant un temps par le révisionnisme. Il apparaissait aussi clairement que l’absence d’un contrôle par le haut de l’activité du GU, avait permis que les idées révisionnistes se développent chez certains cadres.

Des défaillances individuelles à différentes échelons manifestèrent à leur tour les insuffisances idéologiques de l’UC(ML)B. En même temps, des autocritiques communistes de militants montraient que les membres comptaient sur l’organisation, le NDN, les cadres et les responsables pour attaquer l’opportunisme dans ses retranchements.

Conclusion.

Dans le mouvement, la lutte pour l’unité se poursuit, et l’opportunisme se manifeste dans la direction de certaines organisations marxistes-léninistes. A l’aile gauche se situe l’UC(ML)B, à l’aile droite Lutte communiste (LC) et AMADA. AMADA sous-estime encore gravement l’importance de l’unité et se montre relativement sectaire ; sa ligne empiriste atteste qu’il subit encore l’influence du néo-révisionnisme. LC manifeste un sectarisme exacerbé et une forte tendance à l’intellectualisme révisionniste.

Cependant le désir de l’unité doit primer tout (bulletin marxiste-léniniste 1) et les divergences existantes (bulletin marxiste-léniniste 3) ne peuvent en aucun cas empêcher l’unité de se faire. Au contraire, la lutte idéologique dans le mouvement a pour but de se démarquer pour une meilleure unité.

La solution des contradictions pourra se faire au sein d’une organisation unifiée fonctionnant selon le principe du centralisme démocratique. C’est ce que réaffirme la Résolution sur l’Unité des Organisations marxistes-léninistes (Unité rouge, 18).

Au sein de l’UC(ML)B, le NDN prit deux mois pour déterminer exactement la tâche centrale interne. Pendant ce temps, l’opportunisme apparut dans différents faits graves dont se rendirent responsables principalement le NDN et les cadres. Cependant seul un opportuniste notoire et des éléments faibles persistèrent dans leurs erreurs ou préférèrent quitter l’organisation.

Au mois d’août, le NDN décida une campagne de bolchévisation qui atteindra tous les membres de l’organisation dans les survivances qu’ils conservent de l’idéologie petite-bourgeoise, et qui conduira à l’adoption des statuts de l’UC(ML)B.

II. LA CAMPAGNE DE BOLCHEVISATION : BUTS ET MÉTHODES

§1. LA CONTRADICTION PRINCIPALE DANS l’UC(ML)B

Dans le texte « Base de la campagne de bolchévisation », soumis par le NDN aux réunions des cadres du 16 au 18 août, la juste appréciation de la situation dans l’UC(ML)B est rétablie. La carence principale – les défauts de structure et de fonctionnement de l’organisation – et son remède- l’établissement de statuts permettant la réalisation d’un centralisme démocratique correct – sont indiqués :

« La rectification entreprise en février 1971 a permis de déterminer notre orientation politique et idéologique. Nous avons défini clairement la tâche centrale de la construction du Parti et du programme, les caractéristiques de l’étape à laquelle nous nous trouvons et les tâches politiques essentielles qui en découlent. Nous avons commencé à remplir cette tâche centrale en mettant correctement l’accent sur la nécessité primordiale de l’unité des marxistes-léninistes de Belgique ; la lutte idéologique sur cette question a été entamée avec les autres organisations. Aucun communiste ne peut ignorer encore la question de l’unité, et nous continuerons à défendre les positions marxistes-léninistes, à les développer et à les approfondir jusqu’à ce que le mouvement en son entier apporte une juste solution aux questions fondamentales de notre activité actuelle.

La critique systématique du révisionnisme en Belgique a été entreprise. C’est, en premier lieu, au néo-révisionnisme qu’il a fallu s’attaquer : il est l’ennemi principal dont la présence frauduleuse dans le mouvement marxiste-léniniste, aussi longtemps qu’elle n’était pas correctement dénoncée, empêchait la clarification idéologique et politique de se faire pour tous les communistes authentiques.

Les principes de l’agitation et de la propagande communistes et de l’organisation des ouvriers avancés sur la base des cellules, ont été affirmés dans la victoire remportée sur l’économisme.

Sur ce fondement, l’unité politique de l’UC(ML)B, résultat de l’unification de TPT et d’UR, est devenue une réalité. Elle devra se renforcer dans la pratique de la lutte des classes et par l’étude du matérialisme dialectique.

Le bilan de la rectification, en son état actuel, est positif.

Cependant, en insistant à juste titre sur les positions politiques afin de doter l’UC(ML)B d’un embryon de ligne (bulletins marxistes-léninistes 1, 2 et 3), d’autres aspects très importants de la construction idéologique et organisationnelle du Parti ont jusqu’à présent été gravement négligés. Notre conception du monde, telle qu’elle apparaît dans les structures et le fonctionnement de notre organisation et dans notre style de travail, est encore pour une large part marquée par les idées et les pratiques petites-bourgeoises.

C’est sur ces questions que la rectification doit à présent se poursuivre activement.
(…)

En posant devant l’UC(ML)B les principes communistes dans les questions d’organisation et de style de travail, et en les mettant en application, nous nous armerons efficacement pour remplir tous nos devoirs.

Ce n’est pas tout, en effet, d’avoir des positions corrections ; il importe surtout de les mettre en pratique. A cet égard, la situation présente montre que nos moyens sont encore insuffisants.

La question de l’organisation apparaît actuellement au premier plan dans la vie de l’UC(ML)B.

Nous devons créer des structures et un fonctionnement qui permettent d’appliquer correctement la ligne, de l’approfondir et de la vérifier.
(…)

La question de l’organisation occupe le centre de la campagne que le NDN lance aujourd’hui dans l’UC(ML)B. Le NDN, conscient de son retard dans l‘accomplissement de ses tâches internes d’organisation et constatant, avec un grand nombre de militants, les résultats négatifs de ce retard, a pour objectif de bolchéviser l’UC(ML)B, c’est-à-dire de renforcer de façon décisive l’idéologie prolétarienne de tous les membres et d’instaurer des structures et un fonctionnement véritablement communistes. Le NDN doit faire le bilan des structures et du fonctionnement actuels de l’organisation, et critiquer l’idéologie petite-bourgeoise dont ils procèdent et qu’ils entretiennent ; éduquer l’UC(ML)B dans les questions du centralisme démocratique ; après lutte idéologique et consultation de la base, doter l’organisation de statuts communistes et veiller à leur application fidèle par tous les membres ».

Le texte « Base de la campagne de bolchevisation » qualifiait ensuite les principales déviations organisationnelles de l’UC(ML)B :

« La situation actuelle de l’organisation est caractérisée par l’ultra-démocratisme dans les structures et le fonctionnement et l’ultra-centralisme dans la construction de la ligne. Ces déviations produisent des effets négatifs dans tous les domaines de notre activité »

Le NDN indiquait les principaux de ces effets. L’ultra-démocratisme des structures et du fonctionnement a eu pour conséquences :

a) un mauvais emploi des cadres, dû à l’insuffisance de leur éducation politique et aux carences graves du NDN dans la direction pratique de l’organisation (faiblesse de la centralisation, manque de directives) ;

b) les déviations qui ont affecté notre activité dans le masses, tant dans le travail d’organisation des cellules que dans le travail de propagande ; cette faiblesse se manifeste le plus dans la question de l’intégration des ouvriers d’avant-garde dans l’UC(ML)B ;

c) la faiblesse de la lutte idéologique, due au fait que le sens des responsabilités et l’esprit d’initiative ne peuvent pas s’exercer librement selon des directives précises, à l’absence de rapports scientifiques, au mauvais contrôle de l’exécution des tâches : dans de telles conditions les deux lignes ne peuvent pas se dégager ou ne se dégagent que confusément ;

d) le maintien de l’idéologie ultra-démocratique et libérale : à cet égard, le texte insiste sur la nécessité du centralisme et de la discipline, qui n’est pas encore suffisamment reconnue dans l’organisation ;

e) la faiblesse de la morale communiste face à la mentalité petite-bourgeoise (défaillances individuelles, question de vacances) ;

f) mépris des règles de sécurité.

L’ultra-centrisme dans la construction de la ligne s’est manifesté dans le fait que les cadres n’ont pas assez participé à l’activité politique du NDN, notamment à cause de l’insuffisance de leur éducation théorique et politique.

§ 2. OBJECTIFS ET PLAN DE LA CAMPAGNE DE BOLCHÉVISATION

Le texte « Base de la campagne de bolchevisation » définit le but de la campagne, qui est l’adoption consciente des statuts par l’organisation, et il en indique le plan :

a) éducation sur la question du centralisme démocratique et de la morale communiste ;

b) rapports des unités de base et bilans des organes dirigeants, dans le but de mieux connaître les conditions concrètes de notre activité pour y adapter les règles des statuts ;

c) éducation sur les statuts ;

d) diffusion dans l’ensemble de l’organisation du projet de statuts élaboré par le NDN en vue de la discussion et de la critique ;

e) conférence de l’UC(ML)B qui entendra les rapports d’activité, adoptera la plate-forme et les statuts et élira les organes dirigeants centraux ;

f) vérification des cartes, élection des responsables et des directions locales ;

g) publication des documents de la conférence dans un bulletin marxiste-léniniste à l’adresse du mouvement.

Aux réunions NDN-cadres des 16 et 18 août furent successivement discutés : la question des vacances liquidatrices, le texte du GU « Rapport d’établissement » et le projet « Base de la campagne de bolchévisation ».

Sur la question de l’organisation, le NDN chercha l’appui des cadres en montrant idéologiquement et politiquement la nécessité de corriger le fonctionnement du centralisme démocratique et le style de travail, pour élever le niveau de l’organisation. Le NDN fit d’abord une autocritique de l’erreur dont il est responsable et critiqua ensuite les cadres. Il gagna leur accord sur l’orientation de la campagne. A seul y objecta. Ce cadre avait participé à la préparation de la campagne avec le NDN et, pour la première fois, fit des critiques contre elle. Il réclama un bilan avant de commencer la campagne, s’opposa à la préparation idéologique qui devait la précéder, ainsi qu’à l’éducation sur le centralisme démocratique. Il rejeta même le terme de « bolchevisation » pour des raisons « historiques ». Au moment de cette intervention, le NDN ignorait encore si les cadres auteurs du rapport révisionniste du GU rectifieraient leur erreur. Le danger principal était encore la position du GU sur les tâches envers les masses. Pour cette raison, le NDN considéra l’intervention (d’ailleurs fort confuse) de A comme une diversion.

Un comité de trois cadres, A, B et C, placé sous la responsabilité de A, fut désigné par le NDN et chargé de la direction pratique de la campagne. Ce comité devait appliquer les directives politiques du NDN, en prenant en main le travail d’éducation sur le centralisme démocratique et en veillant à la bonne marche des rapports et des bilans. Il recevait la compétence de réunir les cadres et les responsables, et il pouvait intervenir directement dans les cellules lorsque le responsable n’était pas à la hauteur de sa tâche ou s’il réclamait son assistance. Le premier devoir du comité était de préparer les responsables pour commencer la campagne.

Le 21 août, un membre du NDN réunit le comité des trois (CDT) pour confirmer et détailler ces directives. Il leur remit en même temps un texte de formation sur le principe du centralisme démocratique et des instructions écrites pour l’établissement des rapports et des bilans. Il réaffirma devant A la nécessité de commencer la rectification par une campagne idéologique. Enfin, sur une question du CDT, il précisa que l’opportunisme dont le NDN s’était rendu coupable en ce qui concerne l’intégration des ouvriers, rejoignait la théorie spontanéiste de l’« organisation-processus ». Dans les faits, le NDN ne s’était pas inquiété d’élaborer complètement le centralisme démocratique sous prétexte que l’intégration des ouvriers dans l’organisation n’était pas encore avancée ; alors qu’en vertu de « l’organisation-plan » léniniste, c’est précisément en organisant correctement le centralisme démocratique que cette intégration pourra progresser au mieux.

III. LA SUBVERSION BOURGEOISE DANS l’UC(ML)B

§ 1. COMPTE RENDU DU TRAVAIL FRACTIONNEL DE L’EX-CDT

Du 22 août au 2 septembre, le CDT va refuser d’appliquer les directives et s’abstenir complètement d’engager la campagne, ainsi qu’il était de son devoir de le faire. Il « justifie » cette indiscipline en alléguant qu’il ne « voit pas clair » dans la question de l’erreur organisationnelle commise par l’UC(ML)B. Il revient, en effet, à plusieurs reprises, sur ce point auprès d’un membre du NDN, dont il reçoit chaque fois la même explication.

Rejetant le plan de la campagne fixé par le NDN, le CDT lance alors sa propre « campagne », en établissant un « questionnaire » et en préparant un plan d’intervention systématique dans toutes les cellules, qu’il commence à mettre effectivement en pratique.

Le « plan » du CDT s’opposait en tous points à la campagne de bolchévisation qu’il avait pour tâche de mener. Il rejetait la nécessité de la préparation idéologique et politique sur les raisons et sur les buts de la campagne. Le CDT lança bureaucratiquement une « enquête » dans les unités de base, en passant par-dessus la tête des responsables. C’est le »plan » qu’avait déjà annoncé l’intervention confusionniste de A le 16, et dont le véritable objectif politique sera critiqué plus loin.

Le 31 août, le CDT, par l’intermédiaire de C, informe un membre du NDN qu’ « à présent il y a « évidemment » des contradictions entre le NDN et le CDT sur la conception de la campagne ». Pressé d’expliquer la nature de ces contradictions, le membre du CDT refuse de répondre, prétendant que la question doit être discutée avec l’ensemble du Comité.

Le NDN convoque pour le 3 septembre une réunion afin que le CDT lui rende compte de son comportement. Ce jour-là, le CDT remet au NDN un texte qui est une attaque ouverte contre la direction et la ligne de l’UC(ML)B (Annexe 1). Le NDN en prend immédiatement connaissance, puis se voit sommé par A, le responsable du Comité, d’exprimer à l’instant sa position sur le texte. L’attitude de A est désavouée par C, qui critique son « terrorisme ». Le NDN refuse évidemment de reconnaître ce « tribunal » improvisé et remet la discussion au lendemain.

Les positions politiques exprimées par le CDT après quinze jours de discussion interne sont en fait une plate-forme d’opposition au NDN et la ligne de l’organisation. D’après ce texte, la ligne de droite de l’organisation serait représentée par le NDN. Le NDN n’aurait pas fait l’analyse correcte de ses erreurs, refuserait de faire son autocritique et imputerait tous les torts à la base :

« Le fond du problème… c’est que le NDN n’ pas pris conscience de ses erreurs et qu’il ne les a pas caractérisées correctement et complètement ».

« Dans l’analyse des erreurs, le NDN a pris la voie bourgeoise et a construit une « théorie » qui fait porter tout le poids des erreurs sur la base. Cela a conduit le NDN à des positions défaitistes et extrêmement méprisantes, qui ne correspondent pas à la réalité ».

Le NDN aurait pour méthode de direction le « centralisme bureaucratique » et pour style de travail le « théoricisme » :

Le NDN aurait « rejeté la structure communiste » et se serait « ôté la possibilité de diriger correctement la pratique de l’organisation ». Le NDN n’aurait pas appliqué le centralisme démocratique, mais « son contraire, le centralisme bureaucratique ».

Ceci signifie que le NDN s’opposerait délibérément, dans une lutte contre une imaginaire « ligne » rouge, à l’application du centralisme démocratique et que le mauvais fonctionnement de l’organisation manifesterait le fait que le NDN suivrait sciemment dans ses méthodes de direction la ligne du centralisme bureaucratique, qui est caractéristique du révisionnisme. De la même façon, dans la question du style de travail le NDN serait complètement coupé des masses, de la base et de la pratique, et ferait du « théoricisme » :

« … le NDN affirme très justement que ce « n’est pas tout d’avoir des positions correctes, il importe surtout de les mettre en pratique », mais nous montrons qu’il ne comprend pas cette affirmation et qu’il ne sait pas l’appliquer ».

Il est clair qu’une telle attaque portée contre la direction vise également la ligne politique. Le centralisme bureaucratique ne peut élaborer qu’une ligne révisionniste. C’est d’ailleurs ce que le texte du CDT laisse entendre : « La ligne politique de l’UC(ML)B n’est pas liée au travail pratique dans la classe et vers les masses… ». Ayant lancé ses boulets contre le NDN et la ligne, le CDT se met ensuite en avant et se désigne comme le véritable tenant du « centralisme démocratique » dans l’UC(ML)B.

« Ce qui nous garantit la justesse de la critique, c’est qu’elle est un produit des aspirations et des revendications de l’ensemble des militants de l’organisation, confrontés à la pratique de masse, et donc une aspiration (non consciente) de la classe ouvrière et des masses.

Pour construire cette critique, nous avons appliqué le centralisme démocratique …»

Le texte du CDT se donne donc pour une mise en accusation du NDN ; il en ressort que « le problème principal (est) la responsabilité de la direction dans les erreurs ». Contre tous les « maux » qu’il dénonce, le CDT demande une « prise de conscience » du NDN et son autocritique. Le texte va plus loin encore dans l’attaque en déclarant que le NDN « est tout à fait dépourvu de moyens pour centraliser la riposte aux erreurs », sans cependant tirer explicitement aucune conclusion politique de ce « fait ».

§ 2. DISSOLUTION DE LA FRACTION ET PREMIER AFFRONTEMENT DES DEUX LIGNES

Le NDN, en raison du danger politique que les positions et les agissements fractionnels du CDT faisaient courir à l’UC(ML)B, décida immédiatement sa dissolution, dès le 3 septembre, pour entreprendre aussitôt ensuite la lutte idéologique avec les trois cadres, afin de les faire rentrer dans la légalité de l’organisation et de la rallier aux positions marxistes-léninistes de l’UC(ML)B.

Dans cette lutte idéologique, le premier devoir était de rétablir la vérité. Le NDN, sur la foi de ses textes et de sa pratique, pouvait aisément démontrer l’inanité des « critiques » lancées contre lui par le CDT au sujet de son « inconscience », de son prétendu « refus de l’autocritique » et de son « mépris de la base ».

L’erreur principale qui a entravé l’activité de l’UC(ML)B a été une erreur dans le domaine de l’organisation, et le NDN est le principal responsable de cette erreur : cela était clairement affirmé dans le trois textes remis par la direction aux cadres quinze jours auparavant :

« Le NDN, conscient de son retard dans l’accomplissement de ses tâches d’organisation et constatant, avec un grand nombre de militants, les résultats négatifs de ce retard, a pour objectif de bolcheviser l’UC(ML)B, c’est-à-dire de renforcer de façon décisive l’idéologie prolétarienne de tous les membres et d’instaurer des structures et un fonctionnement véritablement communistes ». (Base de la campagne de bolchevisation).

« Le NDN est le principal responsable de cette situation scandaleuse … il a permis, encouragé la liquidation par son libéralisme, son opportunisme. Il n’a pas systématisé les critiques qu’il avait déjà à faire l’année passée et il a manqué de vigilance cette année-ci. Il est indispensable de signaler aussi l’absence d’une structure (Comité exécutif) normalement chargée de pareilles questions. Voilà un résultat probant de l’absence de fonctionnement bolcheviste » (Autocritique-critique sur les vacances liquidatrices).

« Ce travail (de critique) occupera une place importante dans la campagne de bolchevisation qui redressera l’opportunisme en matière d’organisation dont s’est rendu coupable le NDN et qui élèvera le niveau idéologique, politique et théorique des cadres et des responsables ». (Base de la critique du rapport d’établissement du GU)

Il est tout aussi clair que la persistance de l’idéologie ultra-démocratique et libérale critiquée dans le texte « Base de la campagne de bolchévisation » est un des effets, une des conséquences négatives (d’ailleurs citées en fin de liste) attribuées par le NDN aux déficiences organisationnelles : « les structures et le fonctionnement encourageant (son) maintien ».

Toutes les prétendues « critiques » du CDT devaient en fait étayer l’attaque sans principe contre la direction et la ligne. Le « rejet » par le NDN du centralisme démocratique, l’application délibérée du « centralisme bureaucratique », le « refus de l’autocritique » et une autocritique qui n’est qu’un « sophisme », le rejet de « toutes » les responsabilités sur les cadres et la base, enfin, le « théoricisme » de la direction responsable d’une « ligne coupée de la pratique » composent un bilan négatif du NDN, tant de son idéologie que de sa pratique.

Contre de pareilles menées il était nécessaire de réaffirmer les aspects positifs (principaux) et les aspects négatifs (secondaires) de notre bilan. En niant cette position fondamentale, le CDT s’était engagé dans un processus visant à saper l’autorité du NDN en tentant de faire croire qu’il suivait une « voie bourgeoise ». Lui-même, tout en affirmant bien haut que le centralisme doit être actuellement l’aspect principal du centralisme démocratique, s’était livré à des pratiques anarchistes, en refusant la discipline communiste qui l’obligeait à accomplir les tâches confiées par la direction, en se lançant dans un travail fractionnel, en élaborant un texte d’opposition sans faire entre temps la moindre critique au NDN et en se gardant de faire un rapport sur les problèmes qu’il posait. Tous ces faits prouvent que les agissements du CDT visaient à instaurer l’anarchie, la désorganisation complète, qui se prépare toujours par un travail de sape contre les dirigeants qualifiés pour la cause de « bureaucrates ». En même temps, le comité avait commencé sa propre « campagne », à l’encontre des instructions du NDN, de façon bureaucratique en ne s’appuyant pas sur les responsables mais en allant « poser des questions » dans les unités, sans explication et sans préparation idéologique et politique, alors qu’il avait reçu des directives précises à propos de l’éducation à donner sur le centralisme démocratique et à propos de l’établissement à tous les niveaux des rapports et des bilans.

Après avoir affirmé que le NDN « suit une voie bourgeoise », le CDT poussait à son terme l’inversion du vrai et du faux en se félicitant de son « centralisme démocratique ». Cette affirmation prétentieuse était, de plus, complètement absurde. Sans travail de centralisation, sans même une enquête systématique, le CDT se prenait pour un quartier général prolétarien capable de centraliser les « revendications des militants et l’aspiration non consciente des masses » !

§ 3. PRISES DE POSITION DES CADRES DE L’EX-CDT ET DES AUTRES CADRES

La discussion entre le NDN et les fractionnels s’engagea dès le 4 septembre. Le DCT accepta la décision de sa dissolution par discipline, mais il ne rendit les armes sur aucune de ses positions opportunistes ni sur la qualification que NDN donnait de ses agissements. Au contraire, il poussa plus loin encore ses accusations, en particulier par la bouche de A, qui s’en prit tant à la ligne qu’à la direction. Il lança : « La ligne est-elle inattaquable ? », et, comme le NDN lui demandait des explications là-dessus et qu’il mette ses problèmes sur le tapis, il refusa de répondre, en se retranchant derrière la « nécessité » d’achever « le processus de sa connaissance » et arguant qu’« il faut d’abord détruire pour construire ». Il poussa plus loin encore la provocation contre le NDN en lui demandant si c’était une « directive » qu’il développe ses positions. A tritura les bulletins marxistes-léninistes pour leur faire dire le contraire de ce qu’ils disent et pour insinuer que le NDN veut empêcher la base de participer à la construction de la ligne sous prétexte que le travail de masse est actuellement second par rapport aux tâches internes. A précisa son attaque contre le NDN en l’accusant de se comporter « comme Grippa » qui affirmait toujours qu’en l’attaquant on attaquait la ligne du Parti. Il est pourtant évident qu’en s’en prenant à la direction on s’en prend nécessairement en même temps à la ligne politique de l’organisation, et tout le sophisme de A consistait à passer sous silence la nature politique de la ligne de la « Voix du Peuple » néo-révisionniste et celle de la ligne marxiste de l’UC(ML)B. L’attaque de A n’avait de sens qu’à condition de mettre l’une et l’autre ligne dans le même sac, et c’était bien ce qu’il était occupé à faire. Dans cette entreprise de destruction, les rapports que le CDT avait, sous la direction de A, sollicités de la base étaient employés comme munition contre le NDN : il s’agissait de « prouver » par ce moyen le bien-fondé des attaques fractionnelles. La raison qu’avait eue le CDT de rejeter les méthodes préconisées par la direction et de lancer son « enquête » apparaît ainsi clairement.

Lors de la même discussion, l’ex-CDT trahit sa nature de façon directe, en couvrant le révisionnisme par l’imputation de l’entière responsabilité du NDN de toutes les erreurs commises dans l’UC(ML)B depuis le début de son existence. Dans son texte fractionnel, l’ex-CDT avait affirmé :

« … le GU est condamné à marcher à l’aveuglette et il n’a devant lui que deux possibilités : soit il avance et alors nécessairement il s’écrase sur des obstacles que l’absence de directives justes ne lui permet pas d’éviter et que ses faiblesses propres ne lui signalent pas (« idéologie révisionniste »), soit il reste sur place et piétine (« attentisme » et « passivité »).

Contrairement à cette brillante « analyse », le révisionnisme prend sa source dans l’idéologie bourgeoise (il est la forme que prend l’idéologie bourgeoise dans le mouvement communiste), et non dans les erreurs des marxistes-léninistes. Celles-ci peuvent en permettre le développement dans le Parti, à cause du manque de vigilance. C’est pourquoi, prétendre que le révisionnisme qui empreint le texte du GU était « nécessairement » imputable au NDN seul, revenait une fois de plus à mettre en cause la nature marxiste-léniniste de la direction. On se demande comment la critique-autocritique de ce texte dirigée par le NDN, a pu alors avoir lieu. C’est précisément pour sortir de cette contradiction que A affirmait maintenant qu’à tout prendre le texte du GU « n’était pas révisionniste », mais « petit-bourgeois » et qu’« il lui fallait encore réfléchir pour en définir l’idéologie de plus près » !

La dissolution du CDT fut annoncée par une circulaire aux cadres, exposant la contradiction survenue entre le NDN et les fractionnistes et expliquant les raisons politiques de la décision.

Tous les cadres – ceux de l’ex-CDT et les autres, – prirent chacun position sur la lutte, par écrit, en prévision de la réunion NDN-cadres convoquée pour le 8 septembre.

Voici la substance de ces prises de position :

A : Dans son texte intitulé « Construire le Parti, c’est résoudre les contradictions. Scissionnisme ou lutte idéologique ? », il confirmait l’attaque de l’ex-CDT et tentait de justifier la pratique de la fraction. Sur la question des positions politiques prises par la fraction, A se montrait plus confus : à la fois il prêtait de solennels serments d’allégeance au NDN, et il continuait à lui attribuer une méthode de direction révisionniste :

« Je réaffirme mon entière confiance aux dirigeants communistes de l’UC(ML)B… Je réaffirme mon entière confiance dans la ligne politique de l’UC(ML)B… »

« Le Comité des trois, en ayant qualifié de centralisme bureaucratique le type d’organisation actuel, en ayant montré que le NDN tenait la base pour principale responsable de la carence organisationnelle, a-t-il commis une erreur ? De forme ou de fond ? Devons-nous parler de l’existence d’un certain centralisme fort qui aurait tendance à l’hypercentralisme, tout en restant malgré tout démocratique, parce que nous sommes une organisation marxiste-léniniste ? J’estime cette vue absolutiste, donc idéaliste. »

C’est donc sur le point même où il prenait une position métaphysique de « tout ou rien » que A accusait la direction de l’erreur qu’il commettait lui-même. En même temps, il essayait d’atténuer la force du coup, mais il ne réussissait qu’à révéler l’absence complète de principe de sa pensée :

« Je réaffirme que l’UC(ML)B, ayant avancé sans se donner les moyens organisationnels du centralisme fort en pratique, s’est ôté la possibilité de faire progresser la pratique dans la classe ouvrière. »

Il faut donc comprendre que le NDN appliquait ,le marxisme-léninisme dans les tâches internes et le révisionnisme dans les tâches envers la classe ouvrière.

A, qui niait le caractère fractionnel de l’ex-CDT, fournissait en même temps de nouveaux éléments qui contribuent à l’établir :

« Le comité des trois (avait) engagé une lutte idéologique interne (nous soulignons) pour déterminer la nature des tâches qui lui (avaient été confiées).

Les instructions du NDN étaient précises et s’il subsistait malgré tout des doutes, pourquoi n’en avoir pas référé immédiatement au NDN lui-même ? Plus loin, A déclare :

« En essayant d’expliquer (les prétendues erreurs d’analyse du NDN), j’ai (lors de la réunion NDN-ex-CDT) dépassé le cadre de discussion que le comité des trois avait décidé de limiter (nous soulignons) à des points concrets déterminés, afin que le NDN prenne conscience par lui-même de l’aspect erroné de la ligne, et que la campagne soit le plus rapidement engagée dans la voie juste. Par cet écart de ma part (nous soulignons) – fausse explication –, le NDN dans sa logique erronée sur ce sujet y a vu l’indice de conviction que c’est un plan de liquidation de la ligne. »

Le texte de A continue donc à défendre la ligne fractionnelle, dût-il puiser les arguments dans la tactique mise au point par le CDT pour attaquer le NDN sous couvert de considérations « pédagogiques » que des cadres devraient entretenir à l’égard de leur direction ; en même temps – et c’est sa principale raison d’être – il essaie d’estomper la gravité de la contradiction, tout en essayant de faire croire au sectarisme du NDN. L’essentiel est d’accréditer la thèse que le NDN a, par ses méthodes erronées, rendu antagonique une contradiction au sein du peuple :

« Je n’expliquerai pas ici le fond de la question. La lutte idéologique sur la partie de la ligne relative à la pratique dans la classe ouvrière, ne peut être entamée – cela m’est interdit par le NDN – (!!!). Le comité des trois a été qualifié de scissionniste par le NDN, déchargé de ses fonctions et interdit de la continuité dans les enquêtes. Le NDN a placé la contradiction sur un terrain antagonique. Il est dès lors impossible de mener une lutte politique-idéologique A FOND sur les points que nous avons soulevés, sans qu’elle soit réduite en rafales de balles vers la direction … (Le NDN) nous identifie à l’ennemi. Et l’ennemi peut-il mener une lutte idéologique pour faire progresser l’unité révolutionnaire ? Non ! L’ennemi de classe doit être écrasé…

La réunion (du 8) devra viser à déterminer si le prestige des idées et du pouvoir, quant aux positions du comité des trois, sont en concordance avec les décisions prises à l’égard de ce comité de trois. Y a-t-il fractionnisme ou non ? Voilà le terrain qu’il est obligatoire de déblayer ! Voilà l’hypothèse qu’il faut lever ! »

Dans les discussions individuelles que A croira bon d’avoir, avant la réunion, avec les autres cadres, il expliquera qu’il faut poser « comme question préalable » la réalité du fractionnisme, et en ces termes : « Les trois sont-ils ou non des contre-révolutionnaires ? Si oui, la lutte idéologique avec eux est sans objet ; sinon, la dissolution pour fractionnisme est erronée » !

Le texte B est le manifeste de la petite-bourgeoisie rejetant avec horreur le centralisme et la discipline.

La discipline « tue » la conscience communiste des militants et « tue » la lutte idéologique : suivre une orientation avec laquelle on se trouve en désaccord, c’est du « servilisme ».

« Devions-nous courir au NDN dès qu’une difficulté surgissait pour lui demander de penser à notre place, par crainte de nous foutre dedans en réfléchissant tout seuls ? »

« (Ayant vu une contradiction dans les positions du NDN), pour suivre la légalité, nous aurions dû être le souffleur du NDN… nous aurions été l’étouffoir de la lutte idéologique ».

La position est résumée dans le point de vue selon lequel

« la discipline n’est exigée que lorsque la lutte idéologique a été menée et a abouti à un accord conscient … Malheur à la lutte idéologique qui s’éveille quand est passée l’heure.. car on se retrouve scissionniste ».

En conclusion, B persifle le NDN en se déclarant « d’accord pour un jour d’indiscipline » et estime que la dissolution du CDT est un « matraquage ».

Le texte C commence par une défense du fractionnisme sous la couleur de sauvegarder les droits de la « lutte idéologique ».

Le NDN de serait pas parti des faits (la recherche honnête de la vérité par le CDT), mais du concept du fractionnisme : il ne se préoccupe pas de chercher « le vrai du faux » dans les « critiques » de l’ex-comité, mais seulement de « détruire ce quartier-général bourgeois ». Pour C, à ce moment-là, le problème de fond est la question de la responsabilité principale de la situation organisationnelle de l’UC(ML)B : la faiblesse des structures est-elle imputable à une carence du NDN ou à l’idéologie petite-bourgeoise des militants : selon lui, le NDN éluderait cette question. La façon dont il a traité le CDT serait un exemple de plus de son attitude erronée.

C termine en constatant que

« la position du comité est évidemment indéfendable et absurde : d’une part, la ligne de l’UC(ML)B est marxiste-léniniste ; d’autre part, la méthode d’élaboration de la ligne est le centralisme bureaucratique. La contradiction est évidente ».

Cependant il nie que cette position mette l’ex-CDT en contradiction avec la ligne : au contraire, si le NDN estime que tel est bien le cas, c’est parce qu’il parle « à la légère » et qu’il confond le camp de la bourgeoisie et le camp du peuple, ainsi que les deux sortes de contradictions. Il n’en est pas moins vrai, selon C, que l’ex-CDT a fait preuve d’indiscipline, et que « le NDN a raison de caractériser cette attitude comme de l’anarchisme ». Dans le dernier paragraphe de son texte, C révèle qu’il avait soulevé « des positions justes sur le scissionnisme » au sein de l’ex-CDT, mais que « ces positions n’avaient pu se frayer un chemin faute de structures adéquates qui auraient permis un soutien effectif au NDN ».

Les trois cadres extérieurs à l’ex-CDT avaient également mis par écrit leur position avant la réunion NDN-Cadres. D se résume ainsi :

« (Mon) texte ne répond pas à la contradiction et aux divergences apparues entre le NDN et le CDT, mais aux méthodes employées pour les résoudre. Il prend position sur les questions du fractionnisme … et de la dissolution du CDT ».

La position est que le NDN a eu tort de déclarer la guerre à des cadres qui ont le mérite d’avoir « osé penser » et de « mettre les problèmes sur le tapis ».

De même E, reprenant à son compte le titre de A « Construire le Parti, c’est résoudre les contradictions », se range résolument sous son drapeau :

« A mon avis, en me basant tant sur les textes que A a été autorisé à faire connaître que sur les déclarations orales des camarades du CDT et sur l’esprit de leur texte, les accusations graves du NDN ne sont pas fondées. Le CDT ne s’est pas mis en dehors de la légalité communiste, il n’a fait que « mettre les problèmes sur le tapis » , comme c’est le devoir de tout militant communiste ».

Tout le texte s’emploie à défendre la thèse que la contradiction entre le NDN et le CDT est une contradiction au sein du peuple et que le NDN s’est trompé en voulant la résoudre comme une contradiction antagonique, en qualifiant le fractionnaire et en décidant de dissoudre le Comité. Le NDN pousse même la barbarie aussi loin que de dénier au CDT le « droit » de faire des « enquêtes » dans les unités de base.

« Je voudrais relever une incohérence très grave dans l’attitude du NDN. D’une part, développant une attitude antagonique, il nous dépeint le CDT comme un élément ennemi dans l’organisation » : « Plate-forme d’opposition », « pratiques anarchistes » etc. … Puis, brusquement, le texte s’adoucit, et les membres du CDT deviennent des « camarades » que la lutte idéologique sur le centralisme démocratique devra « convaincre » de leurs erreurs…

Le NDN, par son texte à double caractère, s’est ménagé l’occasion de ne pas se prononcer ouvertement sur le caractère antagonique ou non-antagonique de la contradiction. Mais, à l’exception des deux dernières lignes, tout le texte est empreint d’une attitude antagoniste, et la dissolution pour fractionnisme le confirme ».

D’autre part, le fait pour E, de ne pas se prononcer sur « la contradiction principale actuelle dans l’UC(ML)B et la méthode pour la résoudre », ne l’empêche pas, un peu plus loin, de soutenir les avis de A sur la façon de mener la campagne (avant de faire l’éducation sur le centralisme démocratique, il faudrait faire une enquête sur les unités).

Le texte de F prend le contrepied de toutes ces positions et soutient la décision du NDN :

« … le CDT a développé une politique fractionniste ; la contradiction entre NDN et CDT est celle entre marxisme-léninisme et révisionnisme, elle est antagoniste. C’était le devoir du NDN de dissoudre le CDT ».

F motive son soutien en qualifiant les positions et les actes du CDT sur la base des principes.

IV. LE DÉMANTÈLEMENT DE L’IDÉOLOGIE FRACTIONNISTE

§ 1. LES DEUX LIGNES : CENTRALISME DÉMOCRATIQUE MARXISTE-LÉNINISTE OU FRACTIONNISME BOURGEOIS

Lors de la première réunion NDN-cadres du 8 septembre, tous les cadres, à l’exception d’un seul, avaient donc rejoint le camp de l’opportunisme et se dressaient contre les positions marxistes-léninistes du NDN et contre le NDN lui-même.

L’ex-CDT maintenait ses positions pour l’essentiel. Il continuait à défendre son fractionnisme en plaidant pour sa conception du « droit de critique et de lutte idéologique » et le bien-fondé de ses positions, avec, chez C, des contradictions qui rendaient son texte, plus encore que ceux des autres, objectivement insoutenable. B, par sa déclaration de foi anarchiste, et A, sous une forme plus « politique », manifestaient clairement la volonté de poursuivre leur attaque et de rallier les cadres à leurs vues. D et E étaient complètement tombés dans le piège de la « question préalable » posée par le texte de A : le CDT n’est pas le groupe fractionnel que le NDN veut voir en lui ; au contraire, il faut le louer d’avoir « osé penser ». A droite se trouvaient donc à ce moment A et B, avec le ferme soutien de E ; le centre était occupé par C et D ; à gauche, le NDN et F.

Le NDN a dirigé la lutte entre les deux lignes en commençant par déloger l’opportunisme d’une série de retranchements ; lorsqu’il eut rallié B, C, D et E aux positions marxistes et gagné leur appui, la lutte continua, dans une seconde phase, avec A.

Les « arguments » dont l’opportunisme se servit comme d’autant de retranchements qu’il a fallu détruire l’un après l’autre, se résument en ces quatre points : a) la confusion de la contradiction entre les positions et de la contradiction entre les personnes, érigée en « question préalable » ; b) la dénégation de l’existence du fractionnisme ; c) la nature antagoniste de la contradiction entre les positions du CDT et la ligne de l’UC(ML)B ; d) la question dite du « partage des responsabilités ».

§ 2. LA « QUESTION PREALABLE »

La « question préalable » est une invention de A, soutenue par D et E. Elle se présente comme une alternative :

« Ou bien le CDT a servi les intérêt de l’UC(ML)B : en ce cas le NDN doit vider son désaccord avec lui par la lutte idéologique (et il n’est pas fondé à le sanctionner ni à traiter son activité de travail de sape, d’agissements fractionnels, etc.) ; ou bien c’est un ennemi de l’organisation, et le NDN aurait déjà dû l’’exclure de l’UC(ML)B, car en ce cas la lutte idéologique est déplacée et sans objet ».

Cette façon de poser la question est contraire aux méthodes que les communistes suivent pour résoudre les contradictions.

Pour traiter correctement les contradictions, et pour les résoudre dans l’intérêt du peuple, il faut 1) connaître leur nature : s’agit-il de contradictions antagonistes ou de contradictions non antagonistes ; 2) lorsqu’il s’agit d’une contradiction antagoniste, il faut distinguer entre la ligne et les personnes.

D et E ne concevaient pas que le fait seul du fractionnisme crée déjà l’antagonisme avec l’organisation communiste.

Lénine définit le fractionnisme par l’existence de

« groupes présentant un programme particulier, tendant à se replier jusqu’à un certain point sur eux-mêmes et à créer leur propre discipline de groupe ». (Avant-projet de résolution du Xe congrès du Parti communiste de Russie sur l’unité du parti, t. 32, p. 252).

La fraction, c’est la désorganisation du Parti. Lui laisser libre cours, accepter qu’elle définisse les contradictions et qu’elle organise la discussion au sein du Parti, c’est permettre que le Parti se désagrège, c’est liquider le Parti.

Ceci avait amené le NDN à décider la dissolution immédiate de la fraction.

Que, de plus, la contradiction entre la ligne défendue par le CDT et la ligne de l’UC(ML)B était, elle aussi, antagoniste, est une question qui sera discutée plus loin (car elle fera l’objet d’une autre diversion opportuniste, cfr. § 4). Ce que A, D et E ont soutenu en premier lieu, c’est que, « abstraction faite » de la nature de cette contradiction, le NDN a cherché la guerre là où la simple discussion suffisait à éclairer les idées.

La première des règles citées ci-dessus fut donc délibérément écartée ; la seconde rejetée en conséquence.

Chaque militant communiste connaît pourtant bien le principe qu’il faut « guérir la maladie pour sauver l’homme » et doit voir que ce concept est, par définition, une unité de contraires appelant dans la pratique des solutions également contradictoires : à l’antagonisme des actes et des positions répond, dans le cas présent, la mesure disciplinaire de dissolution du CDT nécessaire pour mettre un terme à des menées subversives : quand le centre découvre une fraction, il est évident que son premier devoir est de la dissoudre ; à la contradiction opposant entre eux des communistes correspond la lutte idéologique visant à éclaircir les idées et à rallier les camarades qui se trompent aux positions marxistes, par un travail de persuasion mené selon le processus critique-autocritique-unité. A tout moment, depuis le début de la lutte, A, B et C furent traités en camarades ; la qualification de leur erreur par le NDN fut en fait très modérée (« idéologie petite-bourgeoise ») et leur statut de cadres ne fut même pas mis en question.

Chaque militant communiste « connaît » le principe « guérir la maladie pour sauver l’homme », mais il est bien évident que l’opportunisme en lutte a un intérêt particulier à obscurcir cette connaissance.

De la part de A, qui mit en avant la « question préalable », il s’agissait d’une manœuvre « de gauche » destinée à entraîner le centre à la révolte et à provoquer la direction par le chantage : « Ou bien nous sommes d’honnêtes communistes, et le NDN mène contre nous une lutte à outrance ; ou bien nous sommes des anticommunistes et qu’attend le NDN pour nous expulser comme des traîtres à la classe ouvrière ? »

D et E purent tomber dans un piège aussi grossier, parce qu’ils s’y étaient eux-mêmes fortement poussés par leur individualisme petit-bourgeois.

A la lecture de la circulaire portant dissolution du CDT fractionnel, et dans les discussions entre cadres qui suivirent immédiatement sa réception, l’attention de D et de E fut absorbée par la mesure disciplinaire au point qu’ils y virent une barrière mise par le NDN à toute discussion. Ces camardes se posèrent dès lors comme les défenseurs de la « lutte idéologique ».

Ce qui sous-tend cette position, c’est, outre le rejet du centralisme démocratique, le refus qu’un organe dirigeant prenne une mesure contraignante, sans « lutte idéologique » préalable.

Le texte « Base de la campagne de bolchevisation » avait pourtant, comme par avance, répondu à cette objection petite-bourgeoise qui tend à confondre la sphère de la discipline et la sphère de la lutte idéologique :

« … (certains) camarades ont tendance à penser que tout sujet peut à tout moment et entre n’importe quels niveaux hiérarchiques, être question à débattre dans la lutte idéologique. Ce n’est pas le cas. La lutte idéologique a) se mène activement, librement et dans toute son ampleur à l‘intérieur de l’organisation sur toute question politique et d’organisation que l’organisme dirigeant compétent n’a pas encore tranchée par une décision ; b) accompagne les directives et mesures adoptées par la direction. Mais ces directives et mesures lient immédiatement l’organisation et chaque membre, quelle que soit l’appréciation que tel ou tel camarade puisse poser sur elles. Dire que la discipline communiste est librement consentie par tous les membres de l’organisation, signifie que le principe du centralisme démocratique et les impératifs de la morale communiste sont acceptés par tout, sur la base de la compréhension des tâches de la révolution, et qu’en conséquence chaque décision des organismes dirigeants oblige les membres, sans qu’elle doive pour autant faire au préalable l’objet d’une « lutte idéologique » pour être applicable ».

Les termes employés par le NDN dans sa circulaire pour qualifier la fraction et que D-E citaient pour les rejeter :

D : « attaque systématique et sans principe contre le NDN », « plate-forme d’opposition », « menées », « couvrir le révisionnisme », « revient à mettre la nature marxiste-léniniste de la direction en cause », « attaquer la ligne », « saper la liaison du NDN à la base », « inversion du vrai et du faux » ; E : « plate-forme d’opposition », « attaques systématiques contre le NDN et la ligne de l’UC(ML)B », « menées », « couverture (consciente) du révisionnisme », « isoler le NDN de la base », « déclarations démagogiques », « pratiques anarchistes », « travail de sape », « amener la désorganisation complète dans l’UC(ML)B », etc. – tous ces termes qualifiant correctement une manœuvre fractionnelle, leur apparurent comme autant de terribles coups de matraque. Que ces termes du NDN ainsi que la dissolution du CDT qu’ils motivent, aient frappé une erreur très grave et de nature à mettre en danger l’unité et la ligne de l’organisation, a passé littéralement inaperçu, tant était grand l’effroi petit-bourgeois devant le « bureaucratisme » qui empêche « le libre processus de la lutte idéologique ». Que le NDN avait pour premier devoir de défendre l’unité et la ligne, est une considération qui disparaît complètement devant les sacro-saints « droits » des individus, comme si la démocratie était une fin en soi et comme si les communistes devaient (pouvaient) permettre à des fractionnistes de mener leurs attaques toujours plus loin et impunément contre la ligne marxiste-léniniste. Plutôt une lutte sans principe, avec toutes ces conséquences possibles, qu’une mesure de contrainte qui n’a pas d’abord été discutée par tous les cadres : telle est la devise de ceux qui veulent mettre le « moi » de chaque individu avant la défense du communisme.

§ 3. DÉNÉGATION DU FRACTIONNISME

Une deuxième chicane de l’opportunisme soutenue en particulier par A et B, devait être que le CDT n’a pu être fractionnel étant donné que les actes dont le NDN l’accuse – en particulier, le fait qu’il écrivit un texte et qu’il entreprit une enquête dans les cellules – étaient connu du NDN et que celui-ci ne les avait pas désapprouvés. Cette « position » était agrémentée par A d’un commentaire selon lequel, de toute façon, l’enquête à la base « n’avait pas été le véhicule de la ligne du CDT » et par B d’une attaque contre la direction, à savoir que si l’enquête avait été erronée, c’était au NDN le premier à s’en rendre compte et que le NDN était donc mal venu de reprocher aujourd’hui au CDT de « ne pas lui avoir donné la bouillie ».

L’opposition se réfugiait cette fois dans le formalisme.

Il est exact qu’un membre du NDN avait laissé la latitude au CDT de former par écrit les difficultés qu’il éprouvait à cerner les erreurs organisationnelles commises par l’UC(ML)B, et il est également exact que ce membre du NDN avait connaissance de l’enquête menée par le CDT pour avoir reçu de celui-ci communication de son questionnaire. Mais le CDT jouait sur les mots en voulant se baser sur ces faits pour « prouver » l’inexistence du fractionnisme.

Avant la discussion NDN-Cadres du 8 septembre, A remit à tous les cadres (excepté F) un papier intitulé « Chronologie des faits et gestes du comité des trois du 18 au 31 août ». Ce papier reprend, en effet, certains « faits et gestes, du CDT et il comporte une note d’avertissement où il est dit que les circonstances mentionnées laveront le CDT de l’accusation de fractionnisme, « au niveau des faits, indépendamment de la nature politique de (son) texte ».

Une telle façon de monter les faits et gestes en épingle n’a, bien entendu, rien à voir avec une analyse marxiste de la réalité.

La faculté laissée au CDT de rédiger « un » texte (sur un sujet bien précis) et la confection d’une plate-forme d’opposition contre l’organisation n’ont évidemment que ceci en commun qu’il s’agit dans les deux cas de mettre des mots par écrit. De même, se prévaloir de la connaissance qu’avait le NDN du fait de l’enquête, en faisant abstraction des positions sous-tendant cette enquête et des rapports fractionnels qu’entretenaient à cette époque les enquêteurs, n’est pas précisément un exemple d’honnêteté. Selon que cette enquête se menait de bonne foi ou dans le cadre d’une attaque en règle, on a affaire à une erreur bureaucratique, qui peut être secondaire, ou à un acte offensif. La partie reçoit son sens véritable de la totalité. Un morceau du puzzle revêt une signification différente selon qu’il est isolé ou replacé dans l’ensemble. L’orientation politique des faits et leur portée sont pour une grande part fonction de la ligne dans laquelle elles s’inscrivent. C’est à l’intérieur de cette ligne, dont elles n’auraient jamais pu être abstraites, que nous les envisagerons désormais.

Prétendre, en outre, que l’enquête était « neutre », c’était ériger en principe le formalisme qui imprègne toutes ces conceptions. Aucun rapport social n’est « neutre », et moins que tout autre les rapports politiques. Il est clair que le travail entrepris par des fractionnistes envers la base n’est et ne peut être que le prolongement et le complément des rapports qu’ils instaurent envers la direction. Tout acte posé par un fractionniste obéit nécessairement à ses visées politiques particulières. Cela va de soi. Et dire, comme le faisait B, que le NDN n’avait qu’à comprendre les erreurs qui étaient en train de se commettre (« si vous n’avez rien remarqué, tant pis pour vous !) » dénote, outre la mauvaise foi de cette provocation, une conception bourgeoise de la répartition des tâches et des responsabilités, comme si le NDN et les cadres avaient des droits, des intérêts spécifiques, voire antagonistes, et définis de façon administrative préservant la sphère d’autonomie de chacun.

Enfin, certains faits étaient simplement passés sous silence, parce qu’ils desservaient directement la thèse de la « bonne foi » des fractionnistes. Ainsi, A se garda de dire que lors de la réunion du CDT avec un membre du NDN, tenue le 21, le CDT reçut des instructions précises et des textes préparant l’éducation sur le centralisme démocratique et les rapports des cellules ; il omit aussi de dire que lui-même fut à ce moment mis en garde contre l’individualisme, à propos de la diversion qu’il avait faite lors de la réunion des cadres du 16 août. Il est clair que le mensonge par omission relève du système formaliste lui-même adopté pour abstraire certains « faits et gestes ».

Les communistes rejettent complètement une telle façon d’« argumenter », qui consiste à détacher les faits de leur signification politique. Nous allons donc les reprendre et les analyser à la lumière du comportement général et des positions du CDT.

En réalité, le fractionnisme alla très loin, en un bref espace de temps. Regroupons l’ensemble des faits.

Le CDT refusa les directives ; au lieu de mener la campagne de bolchevisation, comme il était de son devoir de le faire, il tint pendant quinze jours des réunions de discussion interne sur des sujets qu’il n’était pas de sa compétence de traiter, décidant enfin d’élaborer des positions à lui, et qu’il savait contraires à la direction et à la ligne. Au lieu de renforcer le centralisme démocratique dans l’UC(ML)B, il refusa et combattit le centralisme démocratique.

Ce travail était assuré organisationnellement par une discipline de groupe, contraire à la discipline de l’UC(ML)B. Cela ressort du texte même de A lorsqu’il parle de la « lutte idéologique interne (au CDT) pour déterminer la nature des tâches qui lui (avaient) été confiées » et quand il révèle le « cadre de discussion que le CDT avait décidé (!) de limiter à des points concrets déterminés, afin que le NDN prenne conscience par lui-même de l’aspect erroné de la ligne… ».

La discipline de groupe se manifesta également lorsque C, interrogé par un membre du NDN sur les contradictions soulevées par le CDT (c’était avant la remise du texte), refusa de répondre, sous prétexte que « cela devait se discuter avec tous les membres du CDT assemblés ».

Le CDT, lançant son offensive contre le NDN, prétendait que lui-même pratiquait le centralisme démocratique, en dehors du NDN et contre lui. Une telle chose n’est « possible » qu’à condition de fonctionner comme un Etat dans l’Etat. Et cette contradiction elle-même ne peut être « résolue » que par une lutte victorieuse pour la direction dans l’organisation. Il est clair que si le NDN a des méthodes de direction révisionnistes et que si le CDT applique le centralisme démocratique, celui-ci doit lutter pour le pouvoir, renverser le NDN et se substituer à lui.

C’est bien ce qu’il avait commencé à faire, en s’érigeant en organe dirigeant de fait à l’égard de la base et en allant demander à celle-ci (soi-disant au nom du NDN !) quelles critiques elle avait à adresser à la direction.

C’est la question de l’enquête. Enquête prétendument « neutre ».

Voyons cela de plus près. Qui attaque la direction, doit s’assurer le soutien de la base. Il s’agissait, pour le CDT, de se faire connaître comme le « défenseur » des militants « opprimés » par un NDN bureaucratique. Les questions 2, 3 et 7 en témoignent clairement.

2 :

« Est-ce que la ligne politique a été comprise et traduite en directives concrètes par la pratique de la cellule ? »

3 :

« Y a-t-il eu lutte idéologique pour appliquer le centralisme démocratique dans le fonctionnement de la cellule ? Y a-t-il deux lignes sur cette question ? Quels sont leurs aspects principaux ? »

7 :

« Quelles sont les critiques portées aux organes dirigeants par la cellule ? Par le responsable ? »

Il y a eu de la part des dirigeants et des cadres des carences graves dans les méthodes de direction. La pratique en a souffert. Les militants ont donc nécessairement des critiques à faire aux organes dirigeants. Ces critiques ont un rôle important à jouer au cours de la campagne, pour le redressement de l’organisation. Tel avait été et tel restait le point de vue du NDN.

Mais le CDT, ayant ses buts particuliers, s’y prit tout autrement. En commençant son « enquête » sans aucune explication sur l’objet de la campagne, sans aucune éducation sur les règles du centralisme démocratique, le CDT, eu égard à ses positions politiques de départ, entreprenait un travail de sape envers la base et une provocation envers la direction. Son but était de transformer les critiques justes de la base en révolte contre la direction. S’il choisit cette procédure spontanéiste, c’est parce qu’il en attendait un débordement aveugle en retour. Les critiques doivent être portées à la lumière des principes et dans un cadre politique qui permet de distinguer le principal du secondaire et le vrai du faux.

Le commentaire du CDT selon lequel il aurait « traduit et transformé les revendications et critiques des militants », explicite bien les intentions réelles de l’enquête « neutre ». Considérer que les militants ont des « revendications » à faire valoir contre la direction revient à dire qu’il y a contradiction d’intérêts entre la base et le sommet. C’est une thèse anarchiste. Il n’y a rien de tel dans un Parti communiste. Dans un parti communiste, il y a, de haut en bas, vigilance de classe, lutte idéologique à tous les niveaux et unité révolutionnaire de tous les militants. Parler de « revendications » de la base, c’est vouloir délibérément soulever les militants contre la direction. Cette démagogie est la porte ouverte au scissionnisme.

L’usage fait dans la discussion par le CDT des premiers matériaux qu’il recueillit dans son « enquête », montre bien que tel était son projet. Des réponses partielles et tronquées il essaya de faire autant de projectiles contre la direction, en les lançant selon les besoins de son attaque générale : il tenait la « preuve » que le NDN était « inconscient de ses responsabilités, que la base était « justement révoltée », etc. Le CDT, en utilisant ainsi les fonctions importantes dont il avait été chargé par la direction, les détourna à ses fins propres et tenta d’empoisonner l’idéologique de la base. Le CDT projetait d’étendre son attaque aux camarades ouvriers : ceux-ci « seront associés pleinement à cette campagne et à ce questionnaire d’enquête », annonçait-il. Mais le NDN l’avait mis hors d’état de nuire avant qu’il ait pu mettre ce plan de sabotage à exécution.

Vis-à-vis des autres cadres, l’ex-CDT mena une offensive ouverte à compter du jour de sa dissolution jusqu’au jour de la première réunion NDN-Cadres : du 3 au 8 septembre, l’ex-CDT (et en particulier A qui se prévalut faussement de l’« autorisation donnée par le NDN de défendre son point de vue ») chambra les cadres et put les rallier, à l’exception d’un seul, sur la base de sentiments antiautoritaires. Un seul cadre, D, jugea utile de chercher la discussion avec le NDN. B reconnut par la suite que la rapide victoire obtenue par l’ex-CDT auprès de D et E, lui fit renoncer au début d’autocritique qu’il comptait faire à la réunion et l’encouragea à poursuivre l’attaque. F. qui ne cessa de se tenir sur des positions justes, fut considéré par certains comme « un opportuniste servile irrécupérable », avec lequel il n’était pas intéressant de discuter.

§ 4. LA NATURE ANTAGONISTE DE LA CONTRADICTION ENTRE LES POSITIONS DU CDT ET LA LIGNE DE L’UC(ML)B

Le texte du CDT est une attaque de front contre la direction et contre la ligne. En le résumant (III, § 1), nous avons déjà indiqué le contenu de cette attaque ; nous devons à présent en mesurer exactement la portée.

Le « fer de lance » par lequel le CDT a essayé d’abattre le NDN est la déclaration selon laquelle le NDN aurait appliqué le « centralisme bureaucratique ».

Le principe d’organisation du Parti communiste est le centralisme démocratique. TPT- UC(ML)B y adhéra consciemment et commença à l’appliquer dès le début 1972, lors de l’élection du NDN. TPT-UC(ML)B appliqua ce principe, tout en commettant de graves erreurs dont les principales furent de laisser la base sans directives quant aux méthodes de travail et sans contrôle de sa pratique par le NDN. Ces erreurs constituent une déviation ultra-démocratique et prouvent que la direction (et les cadres) restaient, en matière d’organisation, sous l’emprise d’idées spontanéistes.

Il y a une différence fondamentale entre la reconnaissance et l’application du centralisme démocratique, celle-ci fut-elle déviée de son juste cours, et l’application de la ligne du « centralisme bureaucratique ». C’est la différence opposant la prolétariat à la bourgeoisie, le marxisme-léninisme au révisionnisme.

Que le CDT l’ait bien entendu de cette façon est clairement exprimé dans son texte : le NDN n’a pas appliqué le centralisme démocratique, mais il a « mis en pratique son contraire (nous soulignons), le centralisme bureaucratique ; « il est exclu que le centralisme démocratique ait pu fonctionner « ; il n’y a eu dans le GU aucun centralisme (nous soulignons), il ne peut y avoir de démocratie ». Si le NDN a appliqué le centralisme démocratique (fût-ce avec une déviation) les idées qu’il a centralisées sont des idées justes, et la pratique qu’il a dirigée est une pratique révolutionnaire (même s’il doit être fait de sévères critiques à sa méthode de direction). Au contraire, s’il a appliqué le « centralisme bureaucratique », il n’a pu centraliser que des idées bourgeoises, et la pratique de l’UC(ML)B est contre-révolutionnaire.

Dans le premier cas, les bulletins marxistes-léninistes et le journal Unité rouge sont fondamentalement sur des positions justes ; dans le second, notre orientation toute entière est erronée. Dans le premier cas, la ligne générale de notre pratique dans la classe ouvrière est correcte ; dans le second, elle est bourgeoise. Dans le premier cas, le NDN est un organe dirigeant marxiste-léniniste, dans le second, il est la tête de pont de la bourgeoisie dans l’UC(ML)B.

Le CDT a très bien saisi cette logique : il pose effectivement ces trois questions, et il y répond chaque fois dans le même sens. Il ouvre son attaque en déclarant que « la ligne politique de l’UC(ML)B n’est pas liée au travail pratique dans la classe et vers les masses » (souligné par CDT).

Une « ligne politique non liée au travail pratique » est une ligne révisionniste, et cette pratique ne peut servir que la bourgeoisie. Le fait que cette attaque du CDT tourne court faute qu’il ait essayé de l’argumenter le moins du monde, n’enlève rien à sa virulence. Au contraire, il éclaire d’autant plus crûment l’absence complète de principes du CDT. La cible principale de l’attaque a été le NDN lui-même. A en croire le CDT, toutes les erreurs commises par tous les membres de l’UC(ML)B reposeraient sur le NDN, mais celui-ci refuserait de le reconnaître et il rejetterait systématiquement toutes les responsabilités sur les cadres et la base : le NDN

« s’attribue tous les mérites des progrès de l’UC(ML)B et rejette tout le négatif sur la base et les cadres » ; « l’idéologie dominante de la base est une idéologie pourrie ; déclare le NDN » ; « dans l’analyse des erreurs, le NDN a pris la voie bourgeoise et a construit une « théorie » qui fait porter tout le poids des erreurs sur la base ».

Le NDN n’aurait donc pas pris conscience de ses erreurs : c’est là le « fond du problème » et le seul point au programme du CDT, c’est que le NDN fasse avec une « honnêteté révolutionnaire » l’auto-critique de son « centralisme bureaucratique ».

Le contraire spécifique du NDN serait le CDT : lui applique déjà le centralisme démocratique, lui continue la prétendue ligne route qui aurait lutté avec le NDN sur les questions d’organisation. Cette « ligne rouge » se serait manifestée par « la critique scissionniste des cadres » (en avril), le texte « centralisme démocratique » d’une unité, et les questions et critiques d’un cadre sur la nature et les structures de l’organisation et sur le travail pratique.

Voir dans la critique scissionniste des cadres (le CDT reconnaît ce terme et le reprend à son compte !) un élément d’une ligne « rouge » qui se serait opposée au NDN en matière de centralisme démocratique, est vraiment le comble de l’impudence. Le fait qu’il y ait eu, dans cette critique scissionniste, des remarques justes sur des points secondaires (remarques que le texte du NDN « Base sur la campagne de bolchévisation » a d’ailleurs recueillies), n’ôte évidemment rien à ce qui le caractérise principalement, l’esprit fractionnel, l’indiscipline et l’impatience petites-bourgeoises. Les deux autres éléments qui constitueraient également cette prétendue ligne, le texte « centralisme démocratique » d’une unité et les remarques et critiques des cadres, loin de s’y opposer, le NDN les a immédiatement approuvés et soutenus. En fait, le texte en question reprend littéralement les positions sur le centralisme démocratique mises en avant par le bulletin marxiste-léniniste 1, et les « critiques et questions » du cadre n’ont jamais été le monopole de celui-ci : le NDN se les adressait au moins autant, et il avait d’ailleurs chargé ce cadre de préparer un premier projet de statuts. Le point est que ce cadre se trouva aussi à la tête du CDT et qu’il était surtout préoccupé de se mettre en avant en nouant d’un fil « rouge » d’anciennes préoccupations positives à ses attaques actuelles, dût-il pour cela endosser un texte scissionniste.

§ 5. LA QUESTION DITE DU « PARTAGE DES RESPONSABILITÉS »

La lutte idéologique amena les cadres, à l’exception de A, à se convaincre de la justesse des arguments marxistes-léninistes. L’une après l’autre, les trois objections soulevées – « le NDN a mal résolu la contradiction avec le CDT », « il n’y a pas eu fractionnisme », « les contradictions entre les positions du CDT et la ligne de l’UC(ML)B ne sont pas antagonistes » – furent réfutées, et ceux des cadres qui avaient défendu ces vues commencèrent à reconnaître leurs erreurs. Mais certains tenaient en réserve un « argument » destiné à faire plier le NDN sous le poids des responsabilités mises abusivement à sa charge, pour compenser ainsi la gravité de leurs propres erreurs et échapper à l’autocritique. A la limite, des cadres – en particulier A et B – allèrent jusqu’à imputer directement au NDN tous les aspects négatifs existant dans la vie de l’organisation : la défaillance idéologique de tel cadre, la démission de tel militant, etc. A alla jusqu’à soutenir un moment que la direction est toujours la principale responsable de tout le négatif : ainsi, dit-il, c’est Unité Rouge (dont A avait été dirigeant) qui porte la responsabilité principale du départ de certains de ses membres et de leur ralliement au révisionnisme !

En même temps, A continuait à maintenir sa nouvelle position selon laquelle le texte du GU (Rapport d’établissement) n’est pas révisionniste. Une telle thèse, tout à fait inattendue dans la bouche de A, qui avait été un des plus ardents à combattre ce texte liou chao-chiste, s’explique de la même façon que l’argument relatif aux « responsabilités ». Dans les deux cas, il s’agit de décharger des cadres de leurs responsabilités : dans le premier en chargeant abusivement le NDN, dans l’autre en dénaturant la critique marxiste et en couvrant ouvertement la droite dans l’organisation. Dans le cas du GU, il y a eu révisionnisme, et ce révisionnisme est évidemment en premier lieu imputable aux auteurs du texte. (« Seigneur Dieu ! quelles vérités élémentaires on est obligé de rabâcher, en ce temps où toutes les notions sont confondues », s’exclamait Lénine en défendant le centralisme démocratique contre les menchéviks !).

Reprenons donc ce point de façon systématique.

Le NDN a estimé que l’idéologie petite-bourgeoise a été la cause principale des erreurs récentes et actuelles.

Ce qui s’oppose à l’application stricte du centralisme démocratique, c’est avant tout l’idéologie individualiste. L’individualisme petit-bourgeois incite à l’anarchisme, à l’indiscipline d’une part, au bureaucratisme et au servilisme d’autre part.

Les manquements à la morale communiste et au style de travail communiste se marquent par le relâchement idéologique, le manque de dévouement, le refus des responsabilités.

Responsabilité des erreurs.

Pour les erreurs concernant l’ensemble de l’organisation, sa structure, son style de travail, son dévouement à la révolution, le NDN est le principal responsable, puis les cadres, qui ont tous partagé ces erreurs. Le NDN a déjà affirmé à plusieurs reprises qu’il avait retardé l’application correcte du centralisme démocratique, sous l’influence de l’idéologie petite-bourgeoise. Cette question, secondaire jusqu’en juin 1972, est devenue principale ensuite. Le NDN a fait preuve de libéralisme, d’opportunisme en n’appliquant pas les principes complètement. Une autocritique approfondie sera faite à la lumière des rapports et des bilans. Toute l’organisation a partagé ces erreurs. Donc chacun sera amené à les reconnaître au cours de la campagne de bolchévisation, le NDN d’abord, ensuite les cadres, puis les responsables. Ceux qui s’y refuseront après de multiples explications sombreront nécessairement dans l’opportunisme.

Conséquences de l’erreur.

Conséquences directes : des faits graves se sont produits.

– Vacances : le NDN est le principal responsable, mais toute l’organisation doit faire l’autocritique, puisque tous les membres, à des degrés divers, ont suivi l’erreur liquidatrice du NDN.

– Texte GU : les cadres du GU sont les principaux responsables, à différents degrés. Ce texte est radicalement opposé à la ligne de l’UC(ML)B, dont le NDN et d’autres se sont servis pour rectifier le cours erroné du GU. Jamais le NDN n’acceptera d’être tenu comme responsable d’un texte opposé à ses idées, à ses actes et qu’il a réfuté aussitôt qu’il en eut connaissance.

– Fraction CDT : trois cadres ont commis des actes fractionnels et se sont opposés de façon antagonique au NDN et à la ligne de l’organisation. Ils ont été poussés par de l’anarchisme petit-bourgeois exacerbé et se sont opposés ouvertement à l’UC(ML)B. De ce fait, ils avaient répudié la légalité de l’organisation et ils ont dû reconnaître la dissolution du comité. Ils sont évidemment les principaux responsables de leurs positions et actes irrémédiablement opposés à la ligne et au centralisme démocratique. Faire état de la faiblesse des structures pour y chercher une « justification », c’est ramener l’organisation au niveau où l’on se trouve soi-même afin d’accuser le NDN et de se laver les mains de ses propres erreurs. Il y a entre l’organisation et l’idéologie interaction, rapport dialectique, dans lequel l’idéologie domine (la question fondamentale est : « quelle classe servons-nous ? » ; « quelle ligne politique avons-nous ? »).

Les faits dont nous venons de parler sont le produit des déviations petites-bourgeoises de ceux qui les ont commis. La faiblesse des structures a permis, facilité, favorisé même ces faits. Mais les structures ne produisent pas des erreurs politiques et idéologiques, parce qu’elles-mêmes se fondent sur l’idéologie et la politique. Une meilleure structure aurait peut-être permis de déceler plus rapidement l’erreur des membres du GU, mais les idées fausses dans l’esprit des cadres auraient quand même existé et auraient quand même dû être combattues.

Un fonctionnement plus solide de l’organisation aurait peut-être entravé les agissements fractionnels du CDT, mais l’idéologie du fractionnisme n’en aurait pas moins existé chez les trois cadres et devait en tout cas être extirpée par la critique et l’autocritique.

L’erreur théorique de ceux qui voulurent établir le « partage des responsabilités », en fonction de la structure d’une organisation et non de la conscience de classe de chaque militant, a été de croire à la prééminence de la cause externe sur la cause interne. Une erreur politique provient d’une déviation idéologique, non d’un mauvais fonctionnement organisationnel.

La cause idéologique de cette interprétation erronée, c’est le refus des responsabilités, la peur de la critique. Plutôt que de faire l’autocritique, on préfère accabler le NDN de reproches et défendre des positions démagogiques envers la base.

Dans toute cette question, il apparaît d’ailleurs bien comme la conception même de la responsabilité est étriquée, individualiste chez ces camarades.

Pour un communiste, être responsable, c’est avant tout avoir à cœur de corriger tout ce qui n’est pas satisfaisant, c’est ensuite examiner si l’on n’est pas soi-même la cause de la carence ou de l’erreur, c’est enfin chercher les moyens de remédier aux manques. Pour l’opportuniste, être responsable se limite à être « coupable ». La seule question est « qui est en faute ? », et il compte par-dessus tout que ce ne sera pas lui …

B, à cet égard, fut tout à fait clair en disant :

« Il fallait toujours se critiquer pour un tas d’erreurs, toujours battre sa coulpe, mais maintenant que j’ai compris que c’est le NDN qui est en faute, c’est bien fini ! »

Les conséquences politiques d’une pareille attitude peuvent être extrêmement lourdes. En cas d‘erreurs graves de la direction communiste, et surtout en période de revers politiques, elle mène directement à la désertion des militants. Les opportunistes « trouveront » toutes les « raisons » de ne plus suivre cette direction et « justifieront » la liquidation.

§ 6. L’AUTOCRITIQUE DE B ET C, ET DE D ET E

B et C, comme D et E, après une dure lutte idéologique, convinrent de bonne foi de leurs erreurs et firent une autocritique idéologique et politique sincère (voir annexes 2 et 3).

Les trois membres du CDT ont partagé la même erreur politique fondamentale d’inversion de la gauche et de la droite dans l’UC(ML)B. Mais leurs responsabilités à tous trois ne sont pas égales. Nous nous en tiendrons d’abord à la participation personnelle prise par B et C dans le travail fractionnel. B a mis en évidence que toute critique, fondée ou non, qu’il fait à la direction, se transforme très vite en attaque. De cet antagonisme qu’il provoque ainsi, il ne s’inquiète guère. Il ne se soucie pas fort non plus de savoir si sa critique est juste ou non : le NDN fera la part des choses. Enfin, ses critiques elles-mêmes portent le plus souvent sur les difficultés que B lui-même éprouve dans son travail, à son niveau, et ses problèmes deviennent à ses yeux la question principale de l’organisation. L’anarchisme s’empare de la première occasion venue (souvent, une erreur de la direction) pour se révolter contre l’autorité ; l’unité, la cohésion de l’organisation ont pour lui peu de poids à côté de ses « revendications » et de ses difficultés particulières.

C s’est cantonné dans une position centriste. Il participe pleinement à la fraction, mais à un certain moment, il objecta à l’insurrection, tout en se laissant facilement convaincre de son « bien-fondé ». Au point de vue théorique, le processus de la connaissance est obscurci chez C par une déviation intellectualiste, qui l’amène à contempler les contradictions, plus qu’à les résoudre. Les marxistes n’ont pas pour tâche de connaître le monde, mais de le transformer.

D et E reconnurent que la défense qu’ils avaient faite de la « liberté de lutte idéologique et de critique » contre le centralisme démocratique, avait été une erreur anarchiste et un soutien direct à la fraction contre la direction et l’organisation.

V. L’ATTAQUE DE A CONTRE L’UC(ML)B

§ 1. LE REFUS DE LA LUTTE IDÉOLOGIQUE ET DE LA CRITIQUE

Dès le début de la lutte idéologique avec le CDT il fut clair que A poussait le plus loin et de la façon la plus « conséquente » la tactique dilatoire des opportunistes. Pour empêcher que la vérité ne se fasse jour, A s’ingénia systématiquement à disjoindre les actes fractionnels, les positions du CDT et les motivations de A, B et C, essayant de poser entre ces trois domaines des cloisons étanches.

Après avoir été battu sur la position « il n’y a pas eu de fraction : voyez les faits (détachés de la politique) ; le NDN traite mal la contradiction », A soutint que l’opposition CDT- UC(ML)B n’était pas de nature antagoniste. Mais il dut revenir aussi sur ce point, à la suite des autres cadres. Il le fit sous forme d’« autocritique » en parlant de son subjectivisme, ce qui entraînait le fait de l’antagonisme, mais pas encore du fractionnisme :

« Il y a eu subjectivisme du CDT dans la qualification de l’erreur principale attribuée au NDN : centralisme bureaucratique. Cette qualification pose l’antagonisme entre le CDT et le NDN. Le NDN en conclut au fractionnisme. La position vraie du CDT sur le « centralisme bureaucratique » qualifiait la direction de la pratique. Il s’agissait d’erreurs de type bureaucratique. Il n’y a pas assez d’éléments pour faire une autre autocritique ». (10 septembre).

Cette déclaration fut rejetée comme une « autocritique » opportuniste par le NDN et plusieurs cadres. La suite des discussions et l’attitude correcte des autres cadres ne permirent plus longtemps à A de nier le fractionnisme. Il fit donc une seconde « autocritique ». Mais rien n’était dit sur les buts du travail fractionnel :

« J’ai mis à profit l’absence des structures organisées et la présence d’erreurs politiques et idéologiques (normales) dans l’organisation. Mis à profit : au lieu de corriger par l’application des principes à la situation objective, j’ai développé dans le CDT (première structure où j’avais une responsabilité) une ligne d’attaque basée sur une certaine estimation des erreurs et qui visait, par la force des choses, par le développement objectif, la ligne, attaque de caractère fractionniste Je me suis exclu des principes dans cette pratique critique ; j’ai donc suivi les principes bourgeois.

La base idéologique de l’erreur est l’individualisme, caractérisé par sa forme la plus dangereuse dans une organisation naissante : l’anarchisme, l’exaltation du jugement et du raisonnement particuliers conte le jugement et le raisonnement collectifs.
Tout le processus de critique a eu pour cause une appréciation individuelle du degré de conscience du NDN, que j’ai sous-estimé en le traitant de subjectiviste.

J’ai mis cette appréciation en ligne, en matière, sans passer par la lutte idéologique. Je suis passé de l’idée à la pratique, sans la transformer par la lutte idéologique et des directives, en dehors du cadre de la discipline. Comment la lumière est-elle apparue ? Par les textes du NDN qui font un bilan général et grâce aux méthodes correctes de lutte idéologique employées par le NDN. Les dirigeants ont agi en communistes. Je suis le principal responsable du fractionnisme ; j’ai orienté les camarades dans cette voie ; j’ai jeté la confusion dans l’esprit des autres cadres, sur la ligne politique de l’organisation et la nature du NDN » (16 septembre).

Puis vint une troisième « autocritique » (23 septembre), écrite (annexe 4), plus explicite sur les points déjà évoqués, parlant de « travail de sape envers le NDN », de la tentative objective de « liquider le marxisme-léninisme de la direction » et d’« individualisme qui se transforma en antagonisme » mais se taisant toujours encore sur l’essence du fractionnisme : la lutte sans principe pour le pouvoir.

§ 2. LE FRACTIONNISME DE A FUT UNE LUTTE DÉLIBÉRÉE ET SANS PRINCIPE POUR LE POUVOIR

Tout en convenant du rôle principal qu’il avait joué dans la fraction, A refusa constamment de quitter le terrain des vérités générales applicables au CDT dans son ensemble. La lutte idéologique s’était d’abord limitée à réfuter les positions et les activités fractionnelles du CDT, ainsi que l’idéologie – l’individualisme, l’anarchisme – qui les avait sous-tendues, et elle avait donc visé la part commune prise par les trois cadres du CDT. Elle avait suffi à circonscrire complètement les erreurs de B et de C. Mais la question de A était plus grave. Elle devait être approfondie dans ses aspects politiques et idéologiques. Il était nécessaire de définir les visées politiques de la fraction que A a commandée et la déviation idéologique qui est à la source de ces visées.

Dans sa troisième « autocritique », A parlait donc de son « travail de sape contre le NDN » et de « liquidation du marxisme-léninisme de la direction ». Ces termes, tout en levant un coin du voile, cachaient cependant l’essentiel. Il n’était pas conforme à la vérité de parler de « travail de sape à l’égard du NDN » ; il fallait dire : lutte sans principe pour le pouvoir ». Le texte faisait aussi état « d’individualisme qui s’est transformé en action antagoniste vis-à-vis du NDN et de la ligne » et « d’appréciation du degré de conscience du NDN » (lors de la seconde autocritique, A avait reconnu une « sous-estimation du NDN » de sa part). Là aussi, A faisait semblant d’aller à la rencontre des positions marxistes, mais en réalité, il ne «découvrait » une vérité superficielle que pour mieux cacher le fond de la réalité. Il ne suffit pas de noter un « individualisme qui se transforme en action antagonique « ; il importe surtout d’éclairer la cause d’une pareille « transformation », qui ne va pas du tout de soi. A la « sous-estimation du NDN » correspondait nécessairement chez A la « surestimation de lui-même » dont il ne parlait jamais et qui était pourtant l’aspect principal de la contradiction, la source idéologique de toutes ses erreurs. L’« individualisme » de A, c’est l’orgueil, la volonté bourgeoise de mettre sa personne au-dessus du Parti et de la classe ouvrière, le désir de prendre le pouvoir parce que c’est en soi qu’on a le plus confiance, même si cette confiance n’est pas objectivement fondée.

Ce que A appelait « autocritique » se bornait à reprendre une partie des éléments que le NDN lui-même avait mis en avant dans sa critique (une partie seulement, car A restait très discret, surtout dans ses « conclusions » sur les positions politiques prises par la fraction) et qui s’appliquait à l’ensemble du CDT. Cette « autocritique » cachait la contradiction principale qui opposait A à l’UC(ML)B, à savoir qu’il avait lutté pour le pouvoir dans une organisation communiste (et reconnue comme telle par lui) sur des positions bourgeoises.

§ 3. LA FUITE EN AVANT VERS LE RÉVISIONNISME ET LE SCISSIONNISME

Le NDN ni les cadres ne jugeant que les « autocritiques » successives de A étaient véritables et sincères, et A refusant d’en dire plus long sur son idéologie, il lui fallut renoncer à ses camouflages et s’engager dans son opportunisme plus ouvertement encore. Il mit au point une version révisionniste inédite de l’autocritique : la « théorie de l’autocritique différée ». Pour faire une autocritique plus complète, dit A, je dois d’abord faire des critiques, et pour faire des critiques, il me faut un point de vue central. Pour cette raison, je ne parlerai qu’après la campagne de bolchévisation » !

Cette nouvelle position, en mettant l’accent sur les « critiques » par rapport à l’autocritique, en privilégiant les « positions politiques » de A et en mettant dans l’ombre toute la question de la fraction (exactement comme si elle n’avait jamais eu lieu), faisait sous-entendre que ces fameuses « positions » tenues secrètes (parce « qu’incomplètes » !) pouvaient bien être les positions « marxistes-léninistes », en d’autres termes que la fraction aurait été une insurrection « légitime » des éléments « communistes » contre les éléments « révisionnistes ». L’inversion du vrai et du faux, du prolétariat et de la bourgeoisie, inaugurée par le CDT, recevait là un nouvel accoutrement. La déclaration selon laquelle il fallait attendre la fin de la campagne avant que A ne consente à faire connaître ses « critiques » au NDN et aux cadres, constituait une provocation cynique contre l’UC(ML)B toute entière. A osa déclarer ouvertement qu’il ne désarmait pas et qu’il comptait attaquer au moment qu’il jugerait le plus favorable à ses menées. Pour faire passer sa camelote révisionniste, il se prévalait de la faculté qu’a tout membre du Parti de « réserver son opinion » !

A, subitement, « oubliait » tous les principes et ne voyait apparemment plus la différence entre les droits reconnus à la minorité après lutte idéologique sur ses positions et le « droit » qu’il s’arrogeait de lancer de grossières attaques contre notre organisation. S’engageant plus encore dans ce chemin dangereux, A manœuvra avec de plus en plus d’insistance pour faire accepter une « discussion » sur les « contradictions » existant entre lui et l’organisation, afin de faire oublier ses agissements et d’ôter sa raison d’être à l’autocritique qu’il devait faire. Mais l’autocritique de A sur ses menées fractionnelles devait précéder toutes les critiques qu’il pouvait avoir à faire à l’organisation. La façon dont cette question serait tranchée nous ferait voir si nous avions affaire avec un communiste ou avec un bourgeois. A alléguait maintenant des contradictions secondaires soulevées lors de l’unification TPT-UR, mais il s’appuyait surtout sur des « contradictions » qu’il inventait de toutes pièces pour les besoins de la cause et qu’il invoquait maintenant pour la première fois ! C’est ainsi que A souleva des « contradictions à propos du type de travail à mener dans la classe ouvrière », « contradictions » qui selon lui auraient existé depuis l’unification (avril) et dont il parlait en réalité pour la première fois ce 30 septembre ! Le 5 octobre, A se mit à prétendre que l’UC(ML)B a, dans son journal, lancé aux marxistes-léninistes un appel à l’unité sans principe. Le 7 octobre, ne reculant devant aucune absurdité, il prétendit qu’à l’UC(ML)B « il n’existe pas de volonté consciente de recruter des ouvriers » !

Celui qui lâche le maillon court droit à la dégénérescence idéologique. Sur cette pente, il n’y a plus d’« arguments » que dans les manœuvres dilatoires et le dénigrement.

Poursuivant son travail de sape, A trouva ensuite l’occasion de s’immiscer dans une réunion de cellule pour y défendre ses « vues » sur l’unité du mouvement, ou plutôt sur sa désunion. Mais les arguments des camarades de la base le réfutèrent, et le NDN le rappela une nouvelle fois à l’ordre.

A refusait de se critiquer devant l’organisation, parce qu’il décidait qu’il fallait faire confiance à sa personne plutôt qu’à la ligne de l’UC(ML)B élaborée par le NDN avec l’appui des cadres et le soutien de l’organisation entière. Pour « justifier » ce refus, il devait attaquer notre ligne, notre pratique, notre organisation. S’il persistait dans son attitude, il devrait bientôt chercher à les liquider complètement. Telle est la logique objective de l’opportunisme : c’est ce que le NDN exposa devant lui en réunion de cadres, l’avertissant qu’il mettait en danger son existence même de militant communiste. A fuyait en avant vers le révisionnisme et le scissionnisme.

Le NDN et les cadres n’obtenant pas de A qu’il mène une lutte idéologique correcte et qu’il manifeste une volonté d’unité, le Noyau dirigeant local (NDL) vota le 15 octobre à l’unanimité contre la voix de A, la suspension de ses fonctions de cadre, jusqu’à la vérification des cartes.

VI. A MONTE AVEC D UNE SECONDE FRACTION, LEUR DEGENERESCENCE ET L’ÉPURATION DE l’UC(ML)B

§ 1. CRITIQUE DE A

A, dirigeant et moteur de la fraction, n’avait fait qu’une autocritique partielle et refusait de reconnaître l’origine idéologique de ses erreurs, ainsi que le but politique qu’il avait poursuivi : évincer le NDN et s’emparer de la direction.

A était complètement isolé dans l’organisation. Ses « positions politiques – le « bilan de l’UC(ML)B établi par l’ex-CDT fractionnel – avaient été réfutées par le NDN et les autres cadres. Mais il continuait à faire état d’un « processus de connaissance inachevé », de « positions à venir après la fin de la campagne » et tirait prétexte de ces menaces pour refuser de faire une autocritique complète. A se trouvait à ce moment au carrefour de deux voies. Il avait le choix de définir la nature de sa déviation et de reconnaître ses erreurs, de renforcer l’organisation, d’élever son niveau de conscience, puis de défendre, en respectant le centralisme démocratique, les positions qui lui semblaient justes – ou bien de persister dans son refus de l’autocritique et, par le fait même, de s’engager dans la lutte pour la destruction de l’organisation, de lancer contre l’UC(ML)B toutes les accusations dont il aurait besoin pour pouvoir, en contrepartie, se « blanchir ».

Pendant les deux mois suivants, A adopta une double tactique. D’une part, il refusa de désarmer – ce fut son attitude fondamentale – ; d’autre part, il travaillait occasionnellement à une autocritique. B a révélé que tout de suite après la dissolution de la fraction par le NDN, les trois cadres de l’ex-CDT discutèrent de l’attitude à prendre ; que B et C furent, sans hésiter, d’avis de se soumettre, tandis que A désirait poursuivre l’activité de l’opposition ; qu’il dut cependant céder devant la refus de B et de C de le soutenir dans cette entreprise et qu’il s’exclama que « dès lors, pour lui ce serait l’exclusion ».

Il y eut dans la « soumission » à la discipline de A une part de simulation. Il avait prévu, dès le début de la lutte, dès le 4 septembre, qu’il ne renoncerait pas à son attitude insurrectionnelle. En même temps, il avait, au cours de la lutte, amorcé à trois reprises une autocritique. En octobre et novembre, il poursuivit cet effort. Une réunion tenue en novembre par un membre du NDN, le responsable du nouveau CDT, A et D, fut consacrée à l’examen de l’activité militante de A. L’importance de la critique et de l’autocritique dans une organisation communiste fut longuement débattue. Il apparut que A n’a jamais fait d’autocritique spontanément et qu’il ne « cède » que lorsqu’il est « acculé ». La réunion se conclut par le brusque revirement de A et par sa promesse formelle de faire l’autocritique complète de son fractionnisme. De fait, peu après, il présenta au cadre du CDT chargé de mener la campagne de bolchevisation dans sa cellule, un nouveau projet d’autocritique sous la forme d’un bilan de sa vie de militant, dans lequel il reconnaissait notamment qu’il avait « détourné les idées justes des masses à son profit personnel » et qu’il s’était engagé « dans une voie qui mène au fascisme ». Il estimait nécessaire de faire à fond l’analyse de son idéologie.

Ce retour au marxisme-léninisme fut de courte durée. Malgré les encouragements que reçut A pour continuer à clarifier ses idées, il refusa de poursuivre ce travail et adopta généralement une attitude hostile à l’organisation.

1. L’opportunisme de la fraction dirigée par A avait essuyé une défaite cuisante. Mais A se mit à chercher de nouvelles forces pour repartir à l’assaut de la ligne et de la direction de l’UC(ML)B. Il se tourna en premier lieu vers D, en qui il trouverait un allié complaisant. L’instabilité idéologique de D, ses flottements à l’égard de la fraction, son insuffisance d’esprit de parti prolétarien et de dévouement à la révolution, le désignaient comme une proie privilégiée de l’opportuniste. A entraîna D dans la poursuite du fractionnisme. Ils se réunirent régulièrement en dehors des organismes réguliers et à l’insu des responsables, afin d’examiner des questions politiques débattues dans l’UC(ML)B (telles que la question du front antiiimpérialiste, la critique d’un tract central, la lutte idéologique dans la cellule de A et le rôle qu’y jouait le cadre du CDT). Ensemble ils prenaient position et élaboraient des critiques. (Ces faits ont été spontanément rapportés par D au NDN, à l’occasion d’un de ses nombreux revirements). Peu de temps après, lorsque D eut définitivement rallié la cause pourrie de A, ils firent des efforts pour dévoyer des camarades de la base. Afin de saper la confiance de ces militants, A les appela à la «vigilance à l’égard du NDN » et déclara que « l’unité d’UR et de TPT avait été faite à l’encontre des principes ». (Nous rendons compte de ces manœuvres en rapportant les agissements fractionnels de D).

2. A s’employa, avec une égale absence de principes, à chercher des alliés dans sa cellule. Dans ce but, il engagea des offensives démagogiques visant à opposer les ouvriers communistes et les communistes d’origine petite-bourgeoise, à dresser les militants contre le cadre du CDT, à diviser les camarades issus de l’ex-UR et les camarades issus de l’ex-TPT. Mais il ne parvint à trouver du crédit qu’auprès de X, un élément faible de la cellule, dont il avait d’ailleurs toujours combattu l’opportunisme jusque-là et qui prit prétexte de la lutte interne, « trop dure » à son gré, pour quitter l’UC(ML)B.

3. A refusa de coopérer au travail de la cellule et tenta à plusieurs reprises de saboter son activité.

Par exemple, il boycotta l’établissement du bilan de X, rendu nécessaire par la lutte idéologique menée avec celui-ci. Lorsque X quitta l’organisation, A s’opposa à ce que la cellule en tire les conclusions : « Une défection, dit-il, n’est pas un objet de discussion ». A avait critiqué avec constance les carences de X ; mais en septembre, lorsqu’il fut devenu la cible de la campagne de bolchevisation, il changea d’attitude à son égard et désormais le soutint chaque fois qu’il prenait une position opportuniste ; il le couvrait contre les critiques des autres camarades. Aujourd’hui, il n’avait pas intérêt à ce que ce revirement apparaisse trop clairement : l’opportunisme de ses propres positions n’en aurait été que plus flagrant. Il refusa aussi de participer à la discussion sur le recrutement des ouvriers d’avant-garde par la cellule : « Ce sujet ne peut faire l’objet d’une discussion : le recrutement fait partie de la discipline » ! ! Il finit cependant par déclarer que l’UC(ML)B « n’ayant pas de ligne de lutte contre le révisionnisme moderne et la social-démocratie, il lui est impossible de recruter des ouvriers ».

A s’abstint pendant ces semaines de toute pratique de masse. Il se servit de la moindre erreur, faiblesse ou hésitation de l’UC(ML)B, pour mener ses attaques et justifier ses machinations.

Les manœuvres fractionnelles de A, menées tant à l’intérieur de la cellule qu’envers des membres d’autres cellules, l’hostilité violente qu’il affichait contre l’organisation, son sabotage de l’activité de la cellule, son mépris des camarades, le conduisirent à un isolement complet. C’est à l’unanimité contre sa propre voix, que sur proposition de la réunion de responsables de Bruxelles, la cellule vota sa suspension (26 décembre).

Lorsque la lutte contre le fractionnisme eut atteint son issue, lorsque l’exclusion de A et D fut demandée de toutes parts avec de plus en plus d’insistance, la possibilité fut laissée à A de développer dans toute leur ampleur les fameuses « positions » dont il ne cessait de menacer l’organisation. A refusa de répondre, malgré les exhortations du cadre du CDT.

Devant son refus persistant de désarmer et l’aggravation constante de ses provocations, la cellule exclut A en sa réunion du 9 janvier, sur une proposition du NDL soutenue par la réunion des responsables de Bruxelles.

Les causes idéologiques des positions et des attitudes de A avaient été indiquées par le NDN et le NDL. Lui-même les mit complètement à nu par sa pratique. En refusant ouvertement et de façon obstinée d’appliquer le centralisme démocratique, en rejetant les critiques et en se soustrayant à la lutte idéologique, en lançant des attaques haineuses contre l’organisation et les camarades, A laissa sombrer sa conscience communiste et donna libre cours à son orgueil, sa présomption, son sectarisme. L’UC(ML)B a démasqué son complot et le désigne comme un aventurier bourgeois.

§ 2. CRITIQUE DE D

L’instabilité idéologique de D

D avait, non sans détours, soutenu le NDN contre la fraction de l’ex-CDT. Lorsqu’il fallut se prononcer sur la suspension de A de son statut de cadre, D vota la décision, après une courte hésitation.

Il apparaît maintenant que ces détours et cette hésitation reflétaient une grave insuffisance d’esprit de parti prolétarien et de dévouement à la révolution.

L’insuffisance d’esprit de parti prolétarien : le fractionnisme sous la direction de A, la lutte à outrance contre les camarades, le mépris des principes communistes d’organisation.

D avait voté la suspension de A de ses fonctions de cadre, mais à la première occasion il constitua à son usage un « double système » de discipline, trempant dans la fraction de A et faisant des retours au NDN. Il ne savait trop quelle direction reconnaître. D devint, selon ses propres termes, le « porte-parole » de A dans l’organisation, et en particulier à l’égard du NDN. Il colporta, en effet, les « positions » fractionnelles dans toute l’UC(ML)B.

Cela se fit sous la forme d’une lutte à outrance contre les cadres. Ainsi à propos de la question du front antiimpérialiste, il accusa un cadre de « liquider l’internationalisme prolétarien ». Tel tract central, tirant vers l’économisme, fut taxé de « néo-révisionnisme ». ces accusations furent portées en présence des responsables de Bruxelles, sans que les questions aient été discutées au préalable par le NDL. De même, la campagne antiraciste, dont les aspects positifs l’emportaient largement, tant dans le renforcement du centralisme démocratique que dans l’accomplissement des tâches envers les masses, fut jugée « complètement négative » par D (il revint d’ailleurs par la suite sur cette façon de voir).

La confusion constante entre l’ami et l’ennemi, entre la lutte idéologique pour l’unité et la dénonciation politique, prouve à quel point l’unité de l’organisation et du peuple avait peu de signification pour D. D « traitait » de tout problème en défiant les principes d’organisation, en n’hésitant pas à lancer chaque fois une lutte à outrance pour faire triompher son opinion. En réalité, il n’avait plus, à la fin, confiance qu’en lui-même, lui seul (avec A) défendant toujours la « ligne juste ».

Le fractionnisme, la lutte à outrance contre les cadres et l’organisation deviendraient en fin de compte des qualités en regard des « erreurs monstrueuses » commises par l’organisation !

Le manque de dévouement à la révolution : le mépris des tâches et de la morale communiste

A cause de son individualisme et de la facilité qu’il avait à se décourager devant les difficultés, D n’accomplit jamais correctement ses tâches, ne faisant que ce que bon lui semblait, ce qui l’intéressait. En dernier ressort, le NDN lui avait demandé de se concentrer sur sa tâche de responsable de cellule. Mais la cellule ne fonctionna jamais convenablement. « Nous avons, en fait, oublié (!) notre objectif : la création d’une cellule ouvrière ». (Rapport de décembre).

Malgré le fait que D, dans ses « critiques » à l’UC(ML)B, mettait l’accent sur l’accomplissement de la pratique de masse, il négligeait lui-même complètement ses devoirs envers la classe ouvrière. Des manquements graves à la morale communiste étaient également reprochés à D (beuveries, attitude de grand seigneur devant l’argent). D manifestait une instabilité telle qu’il fuyait devant les difficultés. Un avertissement lui fut donné par le NDL, selon lequel il ne resterait pas cadre s’il ne se transformait pas rapidement. A deux reprises, il désira quitter l’organisation, pour avoir le temps d’étudier seul. Il fut critiqué pour ses conceptions relevant de la théorie du « perfectionnement individuel », et il admit cette critique. Une autre fois encore, découragé, il déclara à sa cellule (réunion du 29 novembre) qu’il abandonnait l’UC(ML)B. Revenant sur cette décision, il soutint (cellule, 3 décembre) que « son abandon de la lutte organisée n’était pas un abandon de la lutte de classes. Ces deux choses sont sans rapport » !

D fait passer ses problèmes personnels avant ceux de la révolution. Il le reconnut lui-même, pendant un certain temps, avant de repartir à l’attaque pour éviter d’approfondir son autocritique et de se corriger réellement.

Faire son autocritique demandait à D du courage et une confiance réelle dans l’organisation. Il s’attela à cette tâche à plusieurs reprises, tout en mêlant à sa propre autocritique des critiques sans principe contre l’UC(ML)B.

Le 3 décembre, le NDN donna le texte « Pour l’unité des cadres ». D, à partir d’une déviation de droite dans l’orientation de la campagne antiraciste (l’accent mis sur la défense des droits démocratiques par rapport à la lutte pour le socialisme), avait lancé une lutte à outrance contre la direction pratique de la campagne, assurée par deux cadres. Le NDN s’interposa :

« Les rapports des cellules, systématisées dans le projet de bilan de ces deux camarades, font apparaître clairement que cette campagne a

1. renforcé les liens ente le NDN et les cadres qui dirigent cette activité, grâce aux rapports et au bilan ;

2. amélioré sensiblement la centralisation de la pratique, en mettant à l’épreuve une direction provisoire,

3. élevé le sens des responsabilités et de la discipline des responsables de cellule,

4. fait progresser l’intégration des ouvriers avancés et rapproché de nous des sympathisants,

5. augmenté nos liens avec les masses,

6. encouragé le dévouement et l’enthousiasme des militants.

Or, ce sont, dans cet ordre, les points décisifs que la campagne de bolchevisation doit rectifier. Ceci prouve qu’elle commence à être assimilée et qu’elle se transformera en une force matérielle ».

Le NDN critiquait ensuite la lutte à outrance menée par D :

« (Ce cadre) prend prétexte d’erreurs secondaires (d’ailleurs reconnues) pour taxer des camarades de « révisionnisme » et de « néo-révisionnisme ».

« On aurait tort de taxer à la légère les gens d’opportunisme ou de « partir en guerre » contre eux inconsidérément » (Mao Tsétoung, Le rôle du Parti communiste dans la guerre nationale, t. 2, p. 219).

« Les dogmatiques « de gauche » avaient employé dans la lutte à l’intérieur du Parti la méthode « lutter à outrance, frapper sans merci » ! C’était une méthode erronée. En critiquant le dogmatisme « de gauche », nous n’avons pas employé cette vieille méthode ; nous en avons adopté une nouvelle : partir du désir d’unité et arriver, en distinguant le vrai du faux par la critique ou la lutte, à une nouvelle unité reposant sur une base nouvelle. C’est la méthode qui fut employée en 1942 au cours du mouvement de rectification. (…) L’essentiel est ici de partir du désir d’unité. Car s’il n’y a pas subjectivement ce désir d’unité, la lutte une fois déclenchée, les choses finissent toujours par se gâter irrémédiablement. N’est-ce pas là en revenir au fameux « lutter à outrance, frapper sans merci » ? Et que reste-t-il alors de l’unité du Parti ? C’est justement cette expérience qui nous a conduits à la formule : « Unité-critique-unité » (Mao Tsétoung, De la juste solution des contradictions au sein du peuple, p. 10).

Ce cadre a pour but non de corriger les erreurs et d’élever la capacité combative de l’organisation, mais de

– diviser les organes dirigeants, au lieu de les renforcer ;

– nier les progrès, dus justement à la mise ne place de ces organes au cours de la campagne de bolchévisation… »

Le lendemain, D répondit par un texte au NDN sur la lutte à outrance menée contre les cadres, en affirmant que

« c’est dans un esprit d’unité que je réponds à la critique du NDN. (…) Si j’insiste sur ce fait, qui est une position élémentaire pour tout communiste, c’est parce que les erreurs que j’ai commises doivent, et cela est normal, soulever le doute des camarades quant au but que je donne aux critiques portées à l’organisation. (…) Pour cette raison, l’autocritique des erreurs commises sera remise au NDN. (…) Cela sera le premier pas en avant dans la concrétisation politique de cette volonté d’unité. »

Il concluait ce paragraphe par cette phrase :

« Il n’existe pas pour moi (…) le moindre doute sur la nature marxiste-léniniste du NDN, ainsi que sur la juste ligne de l’UC(ML) »

Après ce préambule positif, qui méritait d’être suivi d’une autocritique des « erreurs commises » mais non encore qualifiées, D prit une toute autre voie : après les avoir admises en principe, D rejetait en fait les critiques, parce qu’il estimait erroné, « subjectiviste » de la part du NDN de condamner la lutte à outrance sans tenir compte des positions politiques que D avait défendues.

Pour se venger des critiques, D passait ensuite à l’attaque contre ceux qui, selon lui, voulaient « la paix au sein du Parti » et qui, pour cette raison, auraient rejeté toute critique sous prétexte qu’elle n’était pas faite dans un esprit d’unité. « La révolution n’est pas un dîner de gala », disait-il, confondant une fois de plus de façon flagrante la lutte à mort contre l’ennemi de classe et la discussion avec l’ami.

Il se lançait ensuite dans une manœuvre de division des organes dirigeants :

« La critique principale du NDN doit s’adresser à l’ensemble des cadres (…), particulièrement au CDT, pour ne pas avoir impulsé la lutte idéologique. La critique secondaire, à ceux qui la mènent mal ».

Il refusait la critique portant sur sa lutte à outrance et sans merci.

Enfin, D rejetait les critiques du NDN par un « argument » qui éclairait bien sa position réelle dans toute cette question :

« Je dis que le texte du NDN est subjectiviste. Le NDN ne peut pas connaître mes positions sur la campagne antiraciste ni les contradictions que j’ai soulevées, parce que je ne les ai pas systématisées !! ».

Le raisonnement de D est des plus étranges ; il ne faudrait pas relever l’esprit dans lequel il critique, car ce serait là instaurer le « paix dans le Parti » et ce serait une diversion destinée à ne pas discuter des positions. Mais ces positions elles-mêmes sont inconnaissables : elles ne sont, à vrai dire, pas encore réellement connues par D lui-même ! La seule conclusion que l’on peut tirer de ce galimatias, c’est qu’aucune critique ne devait être adressée à D : elle ne pouvait être que dilatoire ou subjective !

Dans ses textes du 11 et du 12 décembre, D rédigea une « autocritique en deux temps ».

Il commença, dans le texte du 11 (annexe 5), par rejeter la critique contre son fractionnisme avec A, qu’il estimait fondée : selon lui, il n’y avait pas fractionnisme, « seulement l’indiscipline », pour les raisons suivantes :

1) Il n’y a pas eu « programme »1, mais discussion et prise de position sur un point particulier, parce que, sur ce point, A, vu son « expérience en ce domaine » était plus qualifié que le NDN. (D’après ce qu’avait dit D lui-même quelques jours auparavant, il y eut réunions régulières entre A et D et discussions sur plusieurs questions).

2) Les positions prises ne furent pas mises à exécution. Or, « seule nous intéresse la réalité des faits, et dans les faits il y a eu discipline ».

3) D a mis lui-même le NDN au courant des faits incriminés.

Le point 2 n’est pas de nature à établir qu’il n’y eut pas fractionnisme ; il prouve seulement que les opposants n’allèrent pas jusqu’à défendre leur ligne vers l’extérieur.

Quant au point 3, il montre que D, à certains moments, renonça à la fraction, pour rentrer dans la légalité de l’organisation.

Le point 1 seul touche à la définition de la fraction ; or, il est clair que D jouait sur les mots de façon avocassière en prenant à la lettre le terme de « programme » utilisé par Lénine. On peut difficilement soutenir, comme le faisait D, qu’il n’y avait pas de « programme », et que de toute manière les « positions » prises étaient justes ! Il faut, écrivait D faire l’analyse concrète de la situation concrète. Mais c’est justement ce qu’il évitait de faire. La situation concrète montrait :

– que D rencontrait régulièrement A, qui ne fit jamais d’autocritique sérieuse sur la lutte fractionnelle pour le pouvoir et qui ne désarmait pas ;

– qu’il discutait avec lui de questions politiques et qu’ensemble ils construisirent une ligne d’opposition (certaines de ces questions n’étaient à ce moment encore connues que des dirigeants et des cadres !) ;

– qu’il retournait ensuite défendre les points de vue de la fraction devant l’organisation.

Il s’agit donc bien de repli sur soi-même (réunions secrètes pendant un certain temps), de discipline (D « porte-parole de A), de l’établissement d’une plate-forme d’opposition (la thèse de D selon laquelle il ne traita avec A que de « questions particulières » ne tient pas : D « oubliait » que A était à l’affût pour repartir à l’attaque, afin d’utiliser toute erreur de l’organisation, afin de discréditer les organes dirigeants. A possédait déjà sa plate-forme et sa tactique : abattre la direction de l’organisation, s’opposer à tous les points de la ligne, multiplier les attaques sans principe contre l’organisation. D hésitait entre deux directions, allant de l’une à l’autre. Il promettait d’abandonner la fraction, et le lendemain il y retombait. Il y avait d’une part le NDN, d’autre part un ancien cadre remis à la base pour fractionnisme et refus de la critique, qui poursuivait ses menées subversives et qui cherchait à y entraîner D).

Le deuxième volet de l’« autocritique », le texte du 12 décembre, s’ouvre sur cet avertissement :

« Ceci n’est pas qu’un projet d’autocritique. C’est la lutte idéologique avec le NDN et les cadres qui doit amener une autocritique complète. Certaines choses ne sont pas encore claires pour moi. Une position est acquise : rien ne peut justifier de quitter l’organisation ».

Il critique ensuite une série d’erreurs :

« L’erreur la plus importante que j’ai commise est celle qui a consisté à baisser les bras devant les contradictions, tant au sein de l’organisation qu’en ce qui concerne ma vie privée. C’est quand les contradictions s’aiguisent, que la lutte devient plus dure, qu’il faut justement être le plus ferme. On ne peut jamais abandonner la lutte de classe. On peut comprendre que beaucoup de camarades ne militent plus à l’heure actuelle, suite aux multiples trahisons qu’ils ont connues. Que d’autres camarades abandonnent plus ou moins et momentanément, la lutte, devant la désunion des marxistes-léninistes. On ne peut accepter qu’un cadre de l’organisation qui s’est donné comme tâche de reconstruire le Parti, abandonne la lutte. Les cadres, après les dirigeants nationaux, doivent être les plus fermes défenseurs de la ligne prolétarienne. C’est manquer à sa mission et à son rôle que d’abandonner la lutte, ne fût-ce que momentanément, ou même de seulement penser à abandonner la lutte. La deuxième erreur importante est d’avoir considéré, dans les faits, la direction de la cellule comme une petite chose. De ne pas avoir suivi la directive du NDN comme quoi « la direction et la bonne marche de la cellule sont ma tâche principale ».

Les autres erreurs, telle que la critique outrancière portée à l’organisation, critiques non constructives, les beuveries, ainsi que mon attitude réactionnaire au sein de mon ménage sont secondaires, mais découlent toutes, c’est en tout cas ce que je pense, de la même carence idéologique.

Les causes idéologiques de mes erreurs politiques

Manque de confiance dans le Parti. Manque de confiance en moi-même. Individualisme et esprit d’indépendance.

Je ne peux pas ici expliquer les causes de ce manque de confiance, non pas les causes objectives, mais les causes idéologiques. Je me bornerai donc à expliquer individualisme et esprit d’indépendance. Du temps d’UR, notre groupe (à A et à D) était uni autour de ce concept fondamental : il faut un Parti. Mais chacun en fin de compte, organisait « sa » vie comme il l’entendait, et le manque de pratique (et même si dans mon cas il y avait pratique) n’astreignait pas les militants à une discipline de fer. L’unité entre TPT et UR, la nouvelle organisation créée, les conditions changent. J’ai toujours mené le travail politique comme JE l’entendais. Maintenant je dois le mener comme l’organisation l’entend. J’ai toujours considéré, de fait, ma cellule comme un « secteur privé » à organiser selon ma conception. D’autre part, c’est l’individualisme qui me pousse à accomplir des tâches qui me plaisent et à très mal ou pas remplir du tout celles qui ne me conviennent pas (par exemple, congrès CSC). Dans l’étude, même chose. J’étudie en fonction de mes besoins et pas en fonction des besoins de l’organisation. Mes carences théoriques, je ne conçois même pas que c’est là un phénomène général, à résoudre pour toute l’organisation (par exemple une école de cadres). Je ramène ce problème à ma personne ; je dois étudier. Dans la critique, même position. Je fais des critiques, et peu importe si elles servent ou non l’organisation. C’est cette position individualiste, fausse à l’extrême, qui m’a conduit à vouloir quitter l’organisation. Il n’était pas question pour moi d’abandonner la lutte, mais de la continuer en « indépendant » de la révolution. De fait, c’était un pas en arrière, accentuer la division des marxistes-léninistes, et je crois en fin de compte, que cela ne peut mener qu’à abandonner la lutte à plus ou moins long terme.

D’autre part, il y a eu beaucoup de libéralisme de ma part face aux critiques. J’ai objectivement joué de cette position de force : je suis un cadre ouvrier et il n’en existe pas des dizaines.

Les critiques qui m’ont été adressées (par le NDN et les cadres), je n’en ai pas fait l’autocritique. D’ailleurs je n’aime pas les critiques et je résous toujours cette question en me disant que le positif l’emporte sur le négatif. Je comprends la nécessité de la discipline, mais jusqu’ici je l’ai surtout comprise pour les autres. N’étais-je pas un peu au-dessus de la légalité, vu ma position de cadre ouvrier ?
Voilà, je pense, les causes idéologiques de mon attitude. Cette autocritique n’est pas complète, mais je pensais nécessaire de déjà présenter ceci à cette réunion. Pour le reste, il faudrait en discuter avec le CDT, ou avec un camarade chargé de cette question, afin d’éclaircir mes idées là-dessus ».

Un désir sincère de se corriger apparaît incontestablement dans ce texte. Pourtant la volonté de faire une autocritique complète ne prit pas le dessus.

L’autocritique comporte une faille importante. Le manque de confiance dans le Parti était imputé à la fois à des « causes objectives » (c’est-à-dire à des contradictions politiques avec l’organisation) et à des causes subjectives (l’individualisme2, l’esprit d’indépendance de D, les secondes l’emportent sur les premières, à ce que D assurait encore à ce moment. Cette position centriste allait verser instantanément dans l’opportunisme, dès le moment où le NDL se mit à approfondir l’autocritique et à lui donner des conséquences pratiques en parlant de destituer D. D « tenait à sa place ». Aussitôt il détourna la discussion de son autocritique pour consacrer toute sa force à nier le fractionnisme. Il revint même sur les critiques qu’il s’était faites à lui-même et se mit à transformer le blanc en noir.

Ainsi D avait écrit :

« J’ai toujours considéré, de fait, ma cellule comme un « secteur privé » à organiser selon ma conception ». Maintenant il disait que « la cellule lui devait tout ». Il exprima sans retenue son immense présomption et son mépris des camarades : « C’est moi qui suis allé les chercher. J’ai dû faire quelque chose de rien du tout ».

Les causes du manque de confiance que D avait déclaré ne pas savoir expliquer, étaient en réalité très claires. D était déchiré entre le marxisme-léninisme et le révisionnisme, entre l’autocritique sincère de son individualisme forcené et le libre cours donné à sa prétention, son fractionnisme, ses attaques contre l’organisation. En protestant que « rien ne peut justifier de quitter l’organisation », il montrait bien où le bât blessait, et il indiquait lui-même nettement les deux voies qui s’ouvraient devant lui : lutter pour l’édification du Parti ou déserter les rangs du mouvement communiste (marxiste-léniniste).

L’attitude provocatrice adoptée au cours de cette réunion du NDL ce 13 décembre, la dérision opposée aux critiques justes des cadres, convainquirent ceux-ci de la nécessité de destituer D sans plus attendre. Ainsi se terminèrent pour D la période d’instabilité, la série d’autocritiques avortées, de rectifications sans lendemain. Depuis cette date, toute velléité d’autocritique disparut complètement. Dorénavant le manque de confiance dans le Parti ne devait plus s’expliquer que par les « erreurs » de plus en plus « monumentales » de l’UC(ML)B. D ne reconnut plus de direction que celle de A.

La chute politique de D

Les flottements idéologiques de D avaient été d’abord justement imputés par lui à ses propres carences ; il les expliqua ensuite par les « erreurs » de l’organisation et par son individualisme, celui-ci étant encore à ses yeux la cause principale ; enfin, à partir du moment où il fut question de destitution, le manque de confiance ne devait plus s’expliquer que par l’« orientation erronée » de l’UC(ML)B : c’est là un processus de scission contre lequel D fut sérieusement mis en garde par le NDL.

La lutte idéologique avec lui se poursuivit dans les réunions de responsables de Bruxelles et dans sa cellule, sous la direction d’un cadre du CDT.

A partir de ce moment, le point de vue central défendu par D était qu’« une fraction défend ses positions politiques et qu’il faut d’abord détruire ces positions avant de condamner la fraction ». Par conséquent, le fait d’établir et de critiquer le fractionnisme serait secondaire par rapport aux critiques que les opposants adressaient à l’organisation. A les en croire, si l’organisation traitait le fractionnisme comme la contradiction principale, c’est parce qu’elle désirait étouffer la lutte idéologique. Il fallait donc, par exemple, de l’avis de D, donner à A la faculté de défendre ses vues devant la réunion des responsables (28 décembre), « la base vivante de l’organisation », pour la raison qu’il avait été le « chef de file » de la fraction et qu’il était donc le mieux à même de la défendre3.

A cette même réunion du 28 décembre, la lutte tirant à sa fin, les responsables, afin de laisser à D une issue, lui demandèrent formellement d’exposer les positions qu’il avait jusque-là sans cesse agitées. Or, D fit ce que, dans la même situation, avait déjà fait A dans sa cellule : il se déroba. Comme les responsables insistaient, D consentit à leur répéter les points épars déjà souvent cités. La baudruche des « positions », à ce moment, éclata publiquement.

D refusa de donner suite à la convocation pour la suivante réunion des responsables. Il était prévenu que son exclusion allait être demandée, et il allégua que si l’organisation voulait l’exclure et le considérait comme un ennemi, il était absurde de sa part de réclamer sa présence ! Une fois de plus, D se substituait à l’organisation et tirait des conclusions à sa place.

Le refus obstiné de mettre un terme aux manœuvres fractionnelles et la réprobation croissante du cadre de l’organisation, amenèrent les opposants à défendre le droit à la fraction (sous le nom d’« indiscipline »). Ils faisaient – justement – valoir que la discipline est toujours liée à la ligne. Mais ils se heurtaient ainsi à une nouvelle contradiction, car si la subversion contre le Parti est juste, ce ne peut être que parce que le Parti est devenu révisionniste et qu’il n’y a plus moyen de le transformer autrement. Or, c’est ce qu’ils n’osèrent affirmer, – du moins, pas clairement. Le 6 janvier, le NDN convoqua une dernière fois A. Il lui posa cette question, et A resta sans répondre. D n’attaquait sur ce point que par sous-entendus : « L’UC(ML)B emploie les méthodes de Grippa : ne jamais discuter de la la ligne ; toute critique est considérée comme antiparti ». « L’UC(ML)B connaît un échec sur toute la ligne. Les tracts sont plus mauvais les uns que les autres. Les critiques pleuvent après chaque tract. Où faut-il chercher la cause de tout cela ? Dans l’idéologie des camarades qui les écrivent ? Non, dans la ligne. Quand on essaie de mettre la ligne de l’UC en pratique, ça donne du révisionnisme. » (réunion de cellule, 13 janvier) Suivait dans la plus grande incohérence, une série de critiques » à la volée, relatives à tous les aspects de notre activité et qui étaient, comme toujours, destinées à donner le change sur la propre activité de D : « La position sur le front antiimpérialiste est opportuniste ; il y a de graves déviations qui empêchent la lutte idéologique ; Lutte Communiste ne sait pas si Grippa est révisionniste, et l’UC les appelle des marxistes-léninistes ; il y a eu des erreurs graves dans l’unification UR-TPT ; il y a incapacité à diriger les tâches : vous n’avez même pas compris que les cadres doivent être des permanents et qu’ils ne doivent pas travailler ; le travail de ma cellule dans l’usine a reculé depuis qu’on y diffuse la propagande de l’UC : j’ avais cinq contacts, et je les ai perdus », etc.

Lors de cette réunion, et sur proposition des responsables, l’exclusion de D fut demandée, faisant suite à celle de A. Le vote devait être négatif, et la cellule fut dissoute sur ordre du NDN4, à cause du soutien porté à la fraction par des militants dont l’un abandonna la lutte et Z (de l’ex-UR) qui la poursuivit pour rejoindre les scissionnistes.

La défection de Z

Z eut un comportement irresponsable. Lorsque la lutte contre le fractionnisme fut menée dans la cellule, il commença par soutenir les critiques que faisait l’organisation à D sur son style de travail et son style de vie, mais (seul dans toute l’organisation) il avait des « réticences » sur la question de la fraction.

A la réunion du 6 janvier, Z déclara « soutenir entièrement » l’attaque en règle de D contre l’UC(ML)B. Cette attaque portait sur une série de questions dont certaines n’avaient jusqu’alors été discutées que par les dirigeants et les cadres ; d’autres, qui auraient dû l’être, n’avaient pas encore été examinées par la cellule (bulletin intérieur n° 1, article sur l’unification des marxistes-léninistes) ! Z se plaignit que « la lutte idéologique était impossible et qu’il continuerait la lutte avec les moyens qui lui restaient ». Ceci, alors qu’il n’avait jusqu’alors jamais porté aucune critique à la ligne de l’UC(ML)B ! Z répétait de confiance tout ce qu’il plaisait à A et D d’inventer.

Après la dissolution de sa cellule et son affectation à une autre cellule, Z confirma la « théorie » des fractionnistes, faisant du centre de la lutte non les principes communistes d’organisation, mais la ligne d’unification de l’UC(ML)B.

La discussion découvrit pleinement l’inconsistance de ses positions. A la question « l’organisation a besoin de s’assurer que la lutte idéologique a en vue de renforcer la capacité combative du Parti : voulez-vous donc suivre le processus unité-critique-unité ou continuerez-vous à attaquer l’organisation ? », Z ne put que répondre « qu’on ne peut renforcer une organisation qui n’est peut-être pas marxiste-léniniste ». Et sur les critères de définition d’une organisation marxiste-léniniste, « il lui était encore nécessaire de réfléchir ! »

La cellule le lui accorda, bien que ce fût une réponse étonnante. Elle critiqua sévèrement l’attitude de Z qui lançait contre son organisation de telles attaques, tout en étant incapable de les argumenter. Elle lui indiqua le caractère opportuniste de son ralliement à la ligne fractionniste. Puis Z scissionna, cessant de venir aux réunions.

Enfin, le 15 janvier, le soi-disant « Comité Joseph Staline pour l’Unité rouge », sous la signature de D, fit parvenir à l’UC(ML)B le factum suivant :

« L’organisation communiste reconstituée, Comité Joseph Staline pour l’Unité rouge, fait savoir à la direction de l’UC(ML)B qu’elle rompt l’unité sans principe qu’elle a réalisée avec l’organisation communiste TPT.

Au nom du Comité Joseph Staline pour l’Unité rouge, je fais part ici des critiques fondamentales qui exigent notre départ actuel de l’UC(ML)B.

Ces critiques sont :

1. L’unité établie par Tout le Pouvoir aux Travailleurs et Unité rouge ne fut pas fondée sur les principes léninistes. Il en résulte que les germes du scissionnisme contenus dans l’unité ont développé et maintenu deux lignes dans l’organisation qui se sont affrontées en permanence sans que la ligne d’UR puisse sur le plan « légal » du Parti être débattue pour la démarcation et l’unité.

2. La ligne d’unification pour le centre, actuellement proposée par l’UC(ML)B est une ligne sans principe qui refuse la lutte politique et accepte le marchandage sur les principes.

3. La ligne politique générale use, en permanence, de l’opportunisme de droite ou de gauche dans ses développements théoriques et pratiques, conséquence logique de la ligne de capitulation devant la lutte politique.

4. Du point de vue de la lutte dans l’organisation, l’idéologisme, qui est une révision du marxisme-léninisme, rend responsable en priorité, l’idéologie de chaque membre ou structure de l’organisation, rejetant par là le principe que la politique commande en tout, et « innovant » la méthode de « l’idéologie commande en tout ».

5. La discipline organisationnelle ne s’appuie pas sur une ligne correcte, d’où il est exclu que la conscience politique de chaque militant puisse se développer et, de plus, la discipline est devenue un aveuglement constant.

6. a) Le travail d’organisation et de propagande dans la classe ouvrière est de l’économisme, et lorsque des informations politiques sont lancées, elles sont subjectives et dogmatiques.

b) Un refus constant d’organiser selon les principes l’avant-garde ouvrière.

7. La lutte contre l’impérialisme de l’UC(ML)B est une « phrase creuse et mensongère », parce que l’UC(ML)B a refusé la lutte contre le révisionnisme et la social-démocratie, sur tous les plans, au nom de l’absence d’analyse « scientifique » de l’opportunisme ».

§ 3. UNITÉ-CRITIQUE-UNITÉ OU ATTAQUES FRACTIONNELLES

1. Ceux qui ont participé à la lutte savent, et tous les documents établissent, que A a constitué une fraction d’abord avec B et C, ensuite, quand cette fraction fut dissoute par le NDN et désavouée par B et C, avec D et Z, non pour défendre une ligne ou des positions qu’il ne serait pas parvenu à mettre à l’ordre du jour de l’organisation, mais parce qu’il rejeta d’emblée, dès le début de la campagne de bolchevisation, l’établissement du centralisme strict. Il est caractéristique qu’après la réfutation du texte de l’ex-CDT, A, bien qu’il n’ait plus songé à aucun moment à défendre ce qui avait été les positions de sa première fraction, n’eut rien de plus pressé que de mettre sur pied une seconde fraction, sur d’autres « positions » et avec d’autres membres de l’organisation5.

Ce simple rappel des faits suffit à priver à l’avenir A, D et Z de tout crédit politique auprès des communistes. Ils le savent si bien que toute leur tactique présente et future est et sera d’obscurcir la vérité historique, de remanier le déroulement de la lutte réelle et d’inventer une lutte livrée prétendument au sein de l’UC(ML)B entre eux, les tenants de la « ligne juste » (la « ligne d’UR »), et les membres de l’ex-TPT, lutte que les « bureaucrates » de l’UC(ML)B auraient étouffée ; d’où la « nécessité » objective et subjective de la fraction. Mais ils ne pourront produire un seul document allant dans ce sens, et toutes leurs affirmations ont déjà été démenties à l’avance dans ce bilan de la lutte (très réelle, celle-là) qui commença en septembre par l’insurrection de A et qui se termine aujourd’hui par sa faillite.

A « voulait » la révolution socialiste, à condition de la diriger. Quand il fut battu, le prolétariat cessa de l’intéresser. L’incohérence de sa « critique », le renoncement à la lutte mais non à l’hostilité contre l’UC(ML)B, l’abdication devant une critique acérée, représentent le versant opposé à celui que A avait parcouru lors de son offensive. La nature même de la déviation – l’orgueil, l’arrivisme – qui l’avait fait tomber dans le camp de la bourgeoisie l’a aussi empêché de revenir, par l’autocritique, dans le camp du prolétariat.

2. La « justification politique » utilisée par A et D pour échapper à la critique et pour faire accepter leur tactique fut la suivante : A et D ont soutenu qu’« il était erroné de faire porter la lutte sur le fait de la fraction en la coupant des positions des fractionnels, car cela revient, en pratique, à étouffer la lutte idéologique et, en théorie, à séparer l’idéologie de la politique ; l’essentiel, ce sont ces positions politiques, le fractionnisme est secondaire, et il se réduit à de l’indiscipline quand les positions en question sont justes ».

Cette position est la systématisation de la « théorie de l’autocritique différée », annoncée par A dès septembre.

A ce point de vue s’oppose la conception léniniste selon laquelle

« le fait de l’existence d’une fraction ne saurait être infirmé par le but qu’elle poursuit, quelle que soit d’ailleurs l’excellence de ce but ». (Lénine, De la nouvelle fraction des conciliateurs ou des vertueux, cité dans Lénine sur le trotskisme, Gît-le-Coeur, p ; 28).

Cela signifie que le terrain et les justes méthodes de la lutte à l’intérieur du Parti ne sont pas laissés à la libre initiative et appréciation individuelles, mais qu’ils sont déterminés par la conception marxiste-léniniste du Parti, et que ceux qui s’en écartent rejoignent inévitablement l’opportunisme. L’idéologie du fractionnisme, l’idéologie bourgeoise ou petite-bourgeoise, ne permet pas de développer une ligne prolétarienne. C’est une absurdité de penser le contraire. La fraction est une forme d’organisation erronée qui ne peut servir qu’une politique erronée.

Le NDN a dès le début posé – et il s’est jusqu’à la fin tenu à ce point de vue – que la véritable question de principe était : défendrons-nous strictement le centralisme démocratique ou prêterons-nous le flanc aux attaques et aux diversions des fractionnistes ?

Appelé à donner son avis sur les fractions qui sévissaient dans le Parti communiste des Etats-Unis, Staline porta sur ce sujet l’appréciation de principe suivante :

« Quel mal causent les fractions dans les rangs du Parti communiste ?

D’abord, elles affaiblissent le sentiment de discipline du Parti, émoussent l’esprit révolutionnaire, aveuglent les militants à tel point que dans leur emportement de fraction, ils placent forcément les intérêts de leur fraction au-dessus de ceux du Parti, au-dessus de ceux de l’I.C., au-dessus de ceux de la classe ouvrière. L’esprit de fraction a souvent pour résultat que les militants, aveuglés par la lutte des fractions, ont tendance à apprécier tous les faits, tous les événements de la vie du Parti non du point de vue des intérêts du Parti et de la classe ouvrière, mais de celui de leur clocher, de leur paroisse fractionnelle.

Lovestone et ses amis ne savaient-ils pas qu’il fallait se tenir à l’écart de Pepper, qu’il fallait s’en désolidariser pour ne pas se compromettre comme révolutionnaires ; Pourquoi ne s’en étaient-ils pas désolidarisés à temps, malgré les nombreux avertissements de l’I.C. ? Parce qu’ils agissaient avant tout comme hommes de fraction. Parce que dans la lutte des fractions, on fait cas de tout : on ramasse jusqu’aux menus éclats de bois, jusqu’aux bouts de corde ; un soldat même mauvais, un officier même sans valeur, tout est bon. Parce que dans la lutte des fractions on peut utiliser même des hommes tels que Pepper. Parce que l’aveuglement engendré par l’esprit de fraction les a obligés à mettre les intérêts de leur fraction au-dessus de ceux du parti.

Le camarade Foster ignorait-il donc qu’il fallait se tenir à l’écart des trotskistes cachés dans sa fraction ? Pourquoi ne s’en est-il pas désolidarisé à temps, en dépit à temps, en dépit de multiples avertissement ? Parce qu’il agissait avant tout comme homme de fraction. Parce que, dans la lutte fractionnelle contre le groupe Lovestone il comptait utiliser jusqu’aux trotskistes cachés. Parce que l’aveuglement fractionnel émousse dans les gens le sentiment de la discipline et les pousse à ne négliger aucun moyen. Bien entendu, une telle politique est néfaste et incompatible avec les intérêts du Parti. Mais les fractionnistes sont d’ordinaire enclins à oublier les intérêts du Parti pour ceux de leur clocher fractionnel.

En deuxième lieu, les fractions empêchent d’éduquer le Parti dans l’esprit d’une politique ferme, basée sur des principes déterminés. Elles empêchent d’éduquer les cadres dans un esprit révolutionnaire honnête, prolétarien, intègre, exemple de diplomatie pourrie et de combinaisons louches autant qu’injustifiées. Le léninisme enseigne que seule une politique fondée sur des principes déterminés est rationnelle et digne d’être pratiquée. Les partisans des fractions s’imaginent, au contraire, que la diplomatie fractionnelle et les combinaisons fractionnelles sans principes sont la seule politique acceptable. C’est pourquoi l’atmosphère de la lutte fractionnelle produit non des hommes politiques ayant des principes fermes, mais des tripoteurs fractionnels adroits, d’habiles filous et des menchéviks sachant entortiller l’« adversaire » et dissimuler leur jeu. Bien entendu, un tel travail « éducatif » des hommes de fraction est en contradiction avec les intérêts essentiels du Parti et de la classe ouvrière. Mais les hommes de fraction n’en ont cure, ils ne connaissent que leur cuisine diplomatique fractionnelle, que leurs intérêts personnels. Aussi, rien d’étonnant à ce que les militants à principes fermes et les révolutionnaires prolétariens honnêtes ne rallient pas les sympathies des hommes de fraction qui, par contre, accordent leur sympathie aux mystificateurs et rusés compères, aux individus sans principes habiles à machiner, dans les coulisses, des combinaisons et à former des blocs d’intérêts.

En troisième lieu, les fractions, en relâchant la volonté du Parti vers l’unité et en sapant la discipline de fer du Parti, créent un état de choses fractionnel spécifique où toute la vie intérieure du Parti se trouve découverte face aux ennemis de classe, tandis que le Parti lui-même risque de devenir un jouet entre les mains des agents de la bourgeoisie. Voici comment cela se fait généralement. Supposons qu’une question est discutée au Bureau politique du Comité central ? Supposons ensuite qu’il y ait au Bureau politique une minorité et une majorité qui examinent de leur point de vue fractionnel chacune des questions à l’étude. Lorsque dans le Parti règne l’esprit de fraction, les tripoteurs des deux fractions se mettent en devoir d’annoncer aussitôt à leur cercle la décision prise par le Bureau politique, essayant de préparer leur cercle en leur faveur. Cette façon d’annoncer se répète systématiquement, parce que chacune des fractions croit de son devoir de présenter les choses à sa façon, à son cercle, et de le tenir ainsi en état de mobilisation en vue des batailles à livrer contre la fraction adverse. A la suite de quoi d’importantes décisions secrètes du Parti deviennent des secrets de polichinelle. C’est ainsi que les agents de la bourgeoisie ont facilement accès aux décisions confidentielles du Parti et peuvent plus facilement utiliser les données sur la vie intérieure du Parti contre le Parti. Cet état de choses menace, il est vrai d’apporter la démoralisation complète dans les rangs du Parti. Mais les hommes de fraction s’en soucient bien peu, mettant au-dessus de tout les intérêts de leur groupe.

Enfin, les fractions ont ceci de préjudiciable qu’elles coupent dans la racine tout travail positif dans le Parti, en détournant les militants des tâches quotidiennes de la classe ouvrière (salaires, journée de travail, amélioration des conditions d’existence de la classe ouvrière, etc.), affaiblissant l’action du Parti en vue de préparer la classe ouvrière aux batailles de classe contre la bourgeoisie et créant ainsi un état de choses où l’autorité du Parti doit nécessairement diminuer aux yeux des travailleurs qui, au lieu d’entrer au Parti par groupes compacts, sont obligés d’abandonner ses rangs. C’est ce qui se produit en ce moment dans le P.C. américain. Depuis quelque temps, les chefs des fractions de la majorité et de la minorité s’occupaient surtout d’intrigues mesquines, de futilités et de bagatelles de fraction ; ils s’occupaient à rédiger des plates-formes, grandes et petites ; à composer des amendements, grands et petits, par dizaines et centaines, à ces plates-formes. On perd des semaines et des mois à chercher noise à un adversaire de fraction, à fouiller dans sa vie personnelle pour y trouver quelque fait compromettant, et au cas où l’on ne réussit pas à en trouver, à inventer quelque canard. Il est évident que dans cette atmosphère le travail positif s’en ressent, la vie au Parti doit baisser de niveau, l’autorité du Parti tomber, et les ouvriers, les meilleurs et les plus révolutionnaires d’entre eux, qui aspirent à l’action, abandonnent le Parti.

Telles sont en substance les conséquences néfastes des fractions dans les partis communistes.

C’est pourquoi la tâche le plus importante du P.C. américain est de liquider les fractions et de se guérir enfin de cette maladie ». (Staline, Les fractions de droite dans le P.C. des Etats-Unis d’Amérique, Discours prononcé au Présidium du Comité exécutif de l’I.C. sur la question américaine, le 14 mai 1929, Les Questions du Léninisme, Ed. soc. Intern. ; 1931, t. II, p ; 344-347).

Telle est la leçon que nous avons suivie et que nous continuerons à suivre fidèlement.

Les fractionnistes déclarent la guerre au Parti, parce qu’« ils placent forcément les intérêts de leur fraction au-dessus de ceux du Parti, au-dessus de ceux de l’I.C., au-dessus de ceux de la classe ouvrière », dit Staline. La logique de la fraction égare nécessairement ceux qui conspirent contre l’autorité du Comité central, quelles que puissent être les positions qu’ils entendent défendre. Toutes les contradictions s’enveniment, les amis sont traités en ennemis, la critique se transforme en lutte à outrance. A et D firent flèche de tout bois. Tout allié était le bienvenu, même s’il ne pouvait pas ne pas voir que la petite bourgeoisie parlait par sa bouche. Comme A avait d’abord exercé son influence du B et C en profitant consciemment de leur déviation anarchiste, de même il essaya avec la complicité de D, de racoler plusieurs camarades : l’un parce qu’il avait été membre ou sympathisant de l’ex-UR ; l’autre parce qu’il avait été recruté par l’UC(ML)B grâce à l’action de D ; un autre, X, parce qu’il venait de faire défection. On voit tout de suite sur quelle solide « base de principe » le « nouveau centre » fonctionne et de quel ciment il compte « unir » ses clients. Il ne s’agissait que de faire la retape en se fondant sur l’esprit de cercle, l’amicalisme, l’opportunisme. Mais les militants, fidèles à l’organisation, montrèrent leur fermeté de principe et avertirent la direction de ce qui se tramait.

Le premier devoir du Comité central du Parti communiste est de dissoudre la fraction et de lutter avec les fractionnistes pour qu’ils renoncent complètement à leurs agissements. Une fraction est un complot, et ceux qui tentent d’imposer leur ligne et leur direction par des moyens illégaux, doivent accepter de désarmer, de renoncer au fractionnisme, de cesser toute pratique en ce sens, avant que le Parti ne discute de leurs positions. Aussi longtemps que la révolte n’est pas cassée, les fractionnistes n’ont pas à développer leurs vues dans le Parti. Le fondement politique de ce principe est que, dans un Parti communiste, la lutte idéologique et la critique ont pour but de renforcer la capacité combative du Parti, et non de la saper. Les fractionnistes, par définition, ne parlent pas au nom du prolétariat, mais dans l’intérêt de la bourgeoisie. Le seul fait de se constituer en fraction, en deuxième « centre », en « état-major » parallèle, révèle par lui-même une absence totale de confiance dans l’organisation et la volonté d’imposer sa propre loi. Cela n’est justifié que si le Parti est révisionniste. Si le Parti est communiste, les fractionnistes sont des opportunistes qui se détournent du Parti et des masses pour ne plus défendre que leurs propres intérêts particuliers. A se plaignait que toutes les « critiques » qu’il faisait à l’UC(ML)B étaient considérées comme autant de rafales de balles. En effet, c’est bien ainsi que nous l’entendions : toute « critique » d’un fractionniste est une attaque et ne peut être qu’une attaque, parce que l’orientation générale du fractionnisme dévie de la voie marxiste-léniniste. Lorsqu’une ligne fractionnelle s’oppose au Parti, c’est donc à son aspect désorganisateur que les communistes s’en prendront avant tout (que l’on voie, par exemple, les raisons de l’exclusion du Parti de Trotski et de Zinoviev, cfr. (Annexe 6).

Il s’ensuit que même si elle défend des positions justes, une fraction doit d’abord être amenée à renoncer à son complot, avant de pouvoir défendre ses vues. Le Parti montrera que les positions créent une contradiction au sein des communistes, qu’il faut résoudre par la méthode unité-critique-unité. L’unité du Parti, l’autorité du pouvoir, le respect de la discipline de l’organisation, font partie des conditions de la victoire du prolétariat. Aucune vue particulière – fût-elle juste – ne peut prévaloir contre cela. A plus forte raison quand la ligne fractionnelle est improvisée au jour le jour par un aventurier en mal de justifications. Les statuts du Parti communiste chinois adoptés au IXème congrès prévoient en leur article 3 qu’ « il faut être particulièrement vigilant afin d’empêcher les arrivistes, les comploteurs et les individus à double face d’usurper la direction du Parti (…), à quelque échelon que ce soit et de garantir que la direction du Parti (…) soit à jamais entre les mains des révolutionnaires marxistes ». La raison politique de ce principe est qu’un arriviste, défendant son propre intérêt personnel contre l’intérêt de la classe ouvrière, se met nécessairement sur les positions idéologiques, politiques et théoriques bourgeoises.

Notre pratique a vérifié la justesse de la position communiste contre le fractionnisme. A et D avaient montré, et ils continuaient à montrer chaque jour, leur absence de loyauté envers l’organisation. Ils nous avaient ouvertement déclaré la guerre, et toute leur manœuvre (menée par D surtout) consista à nier le fractionnisme et à mettre en avant une « contradiction principale » de leur invention qui leur permettrait, croyaient-ils, de reprendre l’avantage sur les communistes conséquents. Ils avaient des critiques à émettre, d’autres conceptions que nous sur telle ou telle question, etc., mais avant tout ils refusaient absolument de reconnaître et d’appliquer le centralisme démocratique, de remplacer l’autorité des idées par l’autorité du pouvoir. Si l’UC(ML)B avait dû les suivre sur cette voie, cela aurait signifié le démantèlement de l’organisation, et tout ce qui s’ensuit : fin de la lutte pour l’unité du mouvement marxiste-léniniste et instauration d’un sectarisme triomphant ; anarchie et coups de force bureaucratiques à l’intérieur ; désorganisation complète de notre pratique dans la classe ouvrière L’argument « théorique » de A et D, selon lequel notre lutte contre le fractionnisme aurait coupé l’idéologie de la politique, parce que leurs « positions » seules auraient été politiques et que toutes les critiques de l’UC(ML)B contre l’esprit de fraction, l’indiscipline, la lutte à outrance n’auraient pas été politiques, mais « seulement idéologiques », cet argument est également caractéristique de leur conception du Parti. Selon les fractionnistes, les principes d’organisation ne seraient pas des principes politiques. Ces vues sont, bien entendu, en opposition complète avec la théorie marxiste-léniniste. Toute la campagne de bolchévisation a été placée sous la direction du principe selon lequel « le centralisme démocratique est une importante composante de la ligne du président Mao sur l’édification du Parti » (Pékin Information, 10, 1971, p. 5).

C’est ce principe essentiel que les fractionnistes ont rejeté – d’abord dans la pratique, ensuite théoriquement. Dans le texte de l’ex-CDT, A soutenait (à sa manière !) la nécessité du « centralisme strict », et cette exigence était encore qualifiée par lui de « position de principe » et d’« aspect de la ligne ». A présent, A, et à sa suite D, ne considéraient pas que le contraire spécifique du « centralisme strict » – le fractionnisme – soit une position politique, de peur d’avoir à qualifier sa nature de classe.

« On ne peut couper la discipline de la ligne », répétaient inlassablement A, D et Z. Or, ceci peut se comprendre et s’appliquer de deux manières. Si la ligne du Parti est révisionniste, et la direction perdue sans retour, l’insurrection est une bonne chose, et la discipline envers le Comité central ne peut être exigée. Mais, A, D et Z n’osèrent jamais pousser leurs attaques jusqu’à ce point, même si, emportés par leur logique de destruction, ils ne parvenaient pas toujours à cacher leur sectarisme exacerbé. Si le Parti est marxiste-léniniste, s’il suit une orientation fondamentalement juste, la devise « on ne peut couper la discipline de la ligne » n’est que la remise à jour de la « théorie » menchévique de l’organisation.

Au moment où Lénine et les léninistes luttaient pour implanter une juste compréhension et une juste pratique du centralisme démocratique dans le P.O.S.D.R., les opportunistes menchéviks s’élevèrent contre lui. Un de leurs chefs, Trotski, défendait le « principe » : « Je ne suis tenu à la discipline du Parti que si je suis d’accord avec la ligne ».

« Les (léninistes) supposent, sans aucun doute, que ne peuvent se mettre en travers du travail organisé par le Comité central que des « économistes », des « opportunistes » et, en général, pour employer leur expression des « représentants des autres classes de la population ». Admettons que les courants en lutte se désigneront toujours ainsi. Mais où trouver une tendance assez sotte, même si elle est « opportuniste », pour se laisser « dissoudre », pour admettre que ses partisans soient « privés de leurs droits », sans opposer auparavant toute la résistance dont elle soit capable ? Est-il vraiment si difficile de comprendre que toute tendance sérieuse est importante (car cela ne vaut même pas la peine de lutter contre une tendance qui n’est pas sérieuse et importante) placée devant l’alternative : se dissoudre elle-même (sans piper mot) par esprit de discipline ou combattre pour l’existence, sans tenir compte d’aucune discipline – choisira à coup sûr la seconde éventualité ? Car la discipline n’a un sens que lorsqu’elle assure la possibilité de se battre pour ce que l’on croit juste ; et c’est au nom de cela que l’on s’impose la discipline. Mais quand une tendance donnée se trouve devant la perspective d’être « privée de ses droits » (c’est-à-dire de ne plus avoir la possibilité de lutter pour l’influence idéologique), la question de son existence se transforme de Rechtsfrage en Machtfrage, c’est-à-dire qu’elle ne se pose plus en termes de droit, mais en terme de rapport de forces.

D’après la situation et le degré de la crise, les représentants du courant dissident, ou bien scissionnent, mettant la discipline réellement envers leurs principes plus que les « principes » de la discipline formelle, ou bien restent dans le Parti et s’efforcent, par leur propre pression, de réduire au minimum les limitations que leur impose la discipline de parti, afin de s’assurer le maximum de liberté d’action (et de résistance envers les tendances perturbatrices). Le choix dépend de l’acuité des contradictions qui les opposent au reste du Parti. C’est dans la mesure où ils agiront consciemment pour se libérer des contraintes du Parti – au nom des intérêts du Parti tels qu’ils les conçoivent – et où leur influence leur permettra de le faire, que toute tentative de la partie adverse pour les retenir en répétant le mot « discipline », s’avérera lamentablement illusoire. Rien ne saurait imposer moins de respect que la figure d’un « chef » politique, recourant au moment décisif à de telles objurgations ! Il faut se le mettre dans la tête une fois pour toutes. » (Trotski, « Nos tâches politiques »)6.

« On ne doit pas juger le fractionnisme sans examiner d’abord les positions », fut la thèse favorite des fractionnistes. Mais l’accusation primordiale de fractionnisme ne peut cesser d’être recevable que si le Parti est un Parti révisionniste. Si le Parti n’est pas révisionniste, ceux qui soutiennent ces « vues » se retrouvent encore une fois d’accord sur le trotskisme :

« Les tâches organisationnelles sont pour nous totalement soumises aux méthodes de tactique politique. Voilà pourquoi cette brochure aussi, qui est née des divergences sur les questions d’organisation », prend comme point de départ les questions de tactique. Pour comprendre les divergences en matière d’organisation, il faut sortir de leurs limites, autrement on s’asphyxie dans la scolastique et les logomachies de même acabit ! » (Ibid).

Voilà le miroir où A et D ont à présent tout le temps de reconnaître leurs traits.
L’enjeu de la lutte entre l’UC(ML)B et les fractionnistes, tel que nous l’avons posé, était éminemment politique. Il est d’une importance pratique et théorique vitale. Il s’agit de savoir si nous voulons un Parti doté d’une organisation bolchévique ou un Parti livré à l’idéologique petite-bourgeoise. Il s’agit de savoir quel Parti nous construisons effectivement.

« Refuser de se soumettre à la direction des organismes centraux, c’est refuser d’être membre du Parti. Ce n’est pas un moyen de destruction. Substituer la destruction à la persuasion, c’est montrer l’absence de fermeté de principe, l’absence de foi en ses idées » (Lénine, Un pas en avant, deux pas en arrière, t. 7, p. 381).

Dans la situation actuelle du mouvement marxiste-léniniste, caractérisée par l’esprit de cercle et la division organisationnelle, la lutte contre le fractionnisme et la rigueur à l’égard de celui-ci ne peuvent souffrir aucun relâchement. L’unité du Parti doit être en tout temps fidèlement sauvegardée. Lorsque, comme c’est le cas aujourd’hui, l’édification elle-même du Parti est soumise au préalable de l’unification communiste, cette question devient d’une importance exceptionnelle, parce que l’opportunisme prendra pour formes principales le sectarisme et le fractionnisme.

Centralisme démocratique ou « droit de tendance » trotskiste, esprit de parti ou anarchisme : telles sont les questions auxquelles tous les membres du mouvement marxiste-léniniste doivent donner une réponse réfléchie. Cette réponse est la réponse décisive pour l’édification du Parti, à l’étape actuelle.

§ 4. LE FRACTIONNISME « CONSÉQUENT » MÈNE INÉVITABLEMENT AU SCISSIONNISME

La dégénérescence des fractionnistes a suivi en un temps assez bref un cours très rapide. Comme les critiques atteignaient leur cible, à mesure que l’idéologie fractionnelle était démasquée, à mesure que la nouvelle physionomie politique de A et D se dessinait, ils devaient trouver d’autres parades. La seule façon pour les opportunistes de s’affranchir de la critique, c’est de calomnier les communistes conséquents.

La fraction de A-D-Z parcourut trois étapes.

a) Elle commença par attaquer l’unité de l’UC(ML)B.

A complota pour le pouvoir, il a fait fiasco. Ensuite, il a refusé de reconnaître ce fait et il monta une seconde fraction. Il fut de nouveau condamné, par toute l’organisation. Isolés, défaits, lui et ses deux acolytes devaient nécessairement tenter de jeter le discrédit sur l’UC(ML)B, sa ligne, ses dirigeants.

D’une semaine à l’autre ils « découvrirent » donc que leur organisation était hautement suspecte. Le « processus de leur connaissance » qui est en réalité le processus de leur dégénérescence, fut fortement activé par le processus de la critique auquel les soumettaient les dirigeants, les cadres, les responsables de Bruxelles et les membres de leurs cellules. A chaque critique, à chaque sanction, ils avaient de nouvelles raisons de trouver à l’UC(ML)B d’autres « tares ». Jamais on n’a vu une organisation communiste « changer de nature » avec autant de rapidité !

Le 4 décembre, D déclarait : « Il n’existe pas pour moi le moindre doute sur la nature marxiste-léniniste du NDN, ainsi que sur la juste ligne de l’UC(ML)B. » Vers le 15 décembre, A et lui appelaient des camardes de la base à la « vigilance » (ce qui dans leur bouche signifiait : à la révolte) à l’égard du NDN.

Le 12 décembre, D écrivait dans son autocritique : « Une positon est acquise : rien ne peut justifier de quitter l’organisation ». Le 28 décembre, il disait à la réunion des responsables de Bruxelles : « La ligne est pourrie ».

A ce moment, cette réunion était cependant encore nommée par D « La base vivante de l’UC ». Mais le 15 janvier, sous sa signature, le soi-disant « Comité Joseph Staline pour l’unité rouge », scissionniste écrit que « la discipline est devenue un aveuglement constant ».

A et D se mirent à frapper dans l’air en tous les sens, espérant que l’un ou l’autre de leurs coups porterait. Leur texte du 15 janvier fait la synthèse de ces « critiques ». Passant en revue les différents aspects de l’activité communiste, ils se contentent d’affirmer que l’UC(ML)B ne satisfait à aucune de ses exigences.

II n’est pas nécessaire de prouver la fausseté de chacune de ces allégations : il suffit d’analyser leur objectif et de démonter leur mécanisme.

b) A cet égard, toutes les déclarations des scissionnistes sur la question de l’unité sont extrêmement révélatrices de leur tactique. Il ne leur suffisait pas de dresser un catalogue de « critiques » dont le caractère disparate et improvisé est par trop évident. Il leur fallait surtout s’attaquer au maillon décisif et mettre en cause l’unité de TPT et d’UR.

« L’unité établie par TPT et UR ne fut pas fondée sur les principes léninistes… ».

Ils espèrent ainsi faire d’une pierre deux coups.

D’une part, ils se serviront de cette attaque venimeuse pour « confirmer » rétrospectivement « l’opportunisme » de TPT, perpétué par l’UC(ML)B, et « l’intégrité » des membres de l’ex-UR minoritaires. D’où ce mensonge (inopérant à l’intérieur de l’UC(ML)B – chacun sachant à quoi s’en tenir là-dessus –, mais que les scissionnistes espèrent certainement accréditer auprès des camarades du mouvement forcément privés d’information sur cette question)

« … Il en résulte que les germes du scissionnisme contenus dans l’unité ont développé et maintenu deux lignes dans l’organisation qui se sont affrontées en permanence… ».

Mais, pour justifier la fraction – le seul but de toute cette machine –, il ne suffit pas aux membres de l’ex-UR d’avoir été minoritaires. Il fallait encore qu’ils fussent opprimés. D’où :

« … deux lignes qui se sont affrontées en permanence ; sans que la ligne d’UR puisse sur le plan « légal » du parti être débattue pour la démarcation et l’unité ».
Il est difficile d’accumuler plus de contresens et de mensonges en aussi peu de mots.

La ligne UR – sur les positions « justes » – et la ligne TPT – sur des positions « opportunistes » – se seraient affrontée en permanence.

La vérité est que la direction de l’UC(ML)B dut à plusieurs reprises réfuter et critiquer des positions de A qui renouaient, en effet, avec la ligne sectaire qui avait été celle d’UR. Tel fut le cas de la position antagoniste qu’A désira faire adopter à l’égard de l’ex-OC (voir p. 127) ; tel fut aussi le cas de la position « nous sommes dès à présent le centre », défendue par A au lendemain de l’unification (voir p. 128-129) ; tel fut encore le cas des difficultés qu’A fit pour reconnaître son sectarisme (le mépris des révolutionnaires), lors de l’établissement du bilan d’UR (voir p. 129) ; tel fut enfin le cas de la rectification sur le scissionnisme de la réunion préparatoire à la « conférence internationale », rectification à laquelle A fut le dernier à se rallier, sans jamais faire l’autocritique de ce retard. Le scissionnisme du rejet actuel de la ligne d’unification de l’UC(ML)B est lui-même la poursuite du sectarisme de la ligne d’UR, poussé jusqu’à ses dernières conséquences : il est d’ailleurs dans la tradition du retournement fractionnel que fit UR contre OC après la fusion de ces deux groupes.

En revanche, il y a mensonge pur et simple de la part des fractionnistes quand ils affirment que les deux lignes se seraient affrontées en permanence et que l’« oppression » de l’UC(ML)B les empêcha de défendre leurs positions. Pourquoi l’ex-CDT, qui cherchait fébrilement dans tous les coins des critiques à adresser au NDN se serait-il tu sur une pareille « oppression » et pourquoi dut-il imputer au NDN des déviations imaginaires s’il avait eu de telles accusations à faire valoir contre lui ? Pourquoi le 28 décembre D affirma-t-il devant la réunion des responsables de Bruxelles que « la contradiction au sein de l’organisation, le regroupement ne se faisaient pas sur la base de l’ex-UR ? ». Où enfin sont les textes qui témoigneraient de cette opposition permanente et toujours étouffée ?

La vérité est que A et D furent relativement passifs dans l’élaboration de la ligne, et qu’il y eut même, en ce sens, des critiques du NDN à l’adresse de A.

La vérité est que lorsqu’une lutte idéologique soutenue fut menée contre A, à partir de septembre, il refusa cette lutte, parce qu’il craignait qu’on établisse la nature de classe de sa déviation.

La vérité est que l’antagonisme s’affirma et se développa chez A et D au moment où ils furent accusés de fractionnisme, d’orgueil et de présomption, et qu’ils se déchaînèrent au moment où ils auraient dû faire leur autocritique.

c) D’autre part, la mise en question de l’unité UR-TPT permet aux falsificateurs d’étendre leur attaque à tout le mouvement. Ils veulent freiner l’unification des marxistes-léninistes en essayant de jeter le discrédit sur la ligne de l’UC(ML)B, sachant bien que l’UC(ML)B lutte avec le plus d’esprit de suite pour l’unité communiste et la construction du Parti.

Ils devaient donc écrire :

« La ligne d’unification pour le centre, actuellement proposée par l’UC(ML)B, est une ligne sans principe qui refuse la lutte politique et accepte le marchandage sur les principes. »

Les scissionnistes espèrent trouver une oreille complaisante parmi les camarades qui dans le mouvement hésitent et temporisent sur le chemin de l’unité. Mais qui voudrait prendre en charge ce cadeau empoisonné et s’appuyer sur les « arguments » de gens aussi douteux ? Il y a aurait plutôt de quoi s’inquiéter d’être en accord avec eux, et nous engageons ceux qui se trouveraient dans ce cas de réexaminer leurs positions et de tirer les conclusions utiles de cette convergence.

Le soi-disant « Comité Joseph Staline pour l’Unité Rouge » scissionniste pourra se contorsionner dans tous le sens et fabriquer contre l’unification des communistes (marxistes-léninistes) tous les textes qu’il voudra : le fait est qu’il a donné au problème de l’unité une réponse pratique et qu’il a ainsi fourni aux matérialistes le moyen de vérifier la nature de ses « théories » scissionnistes présentes et à venir.

A l’instar de la bourgeoisie et des révisionnistes, ce que le soi-disant « Comité Staline pour l’Unité Rouge » scissionniste redoute le plus, c’est l’unification des marxistes-léninistes et la construction du Parti. C’est sur les progrès de cette lutte qu’il concentra le tir. C’est aussi le point sur lequel il est déjà complètement démasqué.
Les événements ont pleinement confirmé la logique de la dégénérescence contre laquelle la direction avait mis A en garde dès novembre :

« Pour « justifier » le refus de faire son autocritique, A doit nécessairement attaquer notre ligne, notre pratique, notre organisation. S’il persistait dans son attitude, il devrait bientôt chercher à les liquider complètement. Telle est la logique objective de l’opportunisme. A furet en avant vers le révisionnisme et le scissionnisme, il met en danger son existence même de militant communiste ».

La lutte pour les statuts, pour la reconnaissance et l’application du centralisme démocratique est toujours une lutte dure, parce que les exigences communistes sur ce front obligent directement à une attitude politique précise, qui s’oppose aux misérables revendications de l’individualisme petit-bourgeois.

La campagne de bolchevisation a soumis à une première épreuve les dirigeants et les cadres. Deux cadres et un militant de la base ne surent pas s’élever au niveau des exigences posées par la construction du Parti. Ils ont développé des conceptions et des pratiques que la lutte révolutionnaire en Belgique condamne sans rémission. Le mouvement communiste (marxiste-léniniste) progresse vers son unité, malgré le fractionnisme et l’esprit de cercle.

Seuls les marxistes-léninistes qui acceptent de respecter le centralisme démocratique construisent un Parti véritablement communiste, parce que seule la volonté d’unité, et le désir profond de conserver l’unité lorsqu’elle se réalise sur la base du marxisme-léninisme et du centralisme démocratique, permettra de résoudre les contradictions qui divisent encore les marxistes-léninistes.

La vie de la fraction et de la scission est la voie bourgeoise dans le mouvement, la voie qui est une aide directe au néo-révisionnisme et au révisionnisme moderne.

Après la réunion des responsables de Bruxelles du 28 décembre, un responsable a noté dans son rapport :

« On comprend que l’unité est le maillon principal à saisir. Quiconque perd de vue le désir d’unité se dirige en droite ligne dans les bras du néo-révisionnisme. Quiconque combat l’unité soutient directement le néo-révisionnisme. Or, ce principe simple qui vit profondément dans le cœur de chaque ouvrier conscient, certains camarades l’ont laissé tomber. A la dernière réunion des responsables, un camarade (D) s’en est même moqué, prétendant qu’on « ne peut pas mesurer le degré de volonté d’unité ». Lorsqu’on lui fit remarquer qu’il avait laissé tomber le désir d’unité, il fit mine de chercher sous la table pour voir « où il l’avait laissé tomber », montrant ainsi combien peu l’unité lui tient à cœur. Non, camarade, pas besoin de chercher sous la table. Depuis le début de la campagne de bolchevisation, certains camarades, perdant le désir d’unité, sont tombés dans le fractionnisme ».

VII. BILAN DE LA LUTE ENTRE LES DEUX LIGNES

Le point faible de l’UC(ML)B était son organisation. Pour redresser la ligne en cette matière, le NDN lança une campagne de rectification pour préparer l’élaboration et l’adoption de statuts. Le NDN désigna trois cadres A, B, C chargés de prendre en main la direction pratique de la campagne. Ces trois cadres, au lieu d’accomplir leur tâche, se constituèrent en fraction et lancèrent une offensive contre le NDN et la ligne. C’était une révolte petite-bourgeoise contre le centrisme démocratique. Le NDN décida la dissolution immédiate du comité des trois fractionnels et engagea la lutte idéologique contre A, B, C et ceux des cadres qui les soutenaient. B et C, ainsi que le centre, admirent leur erreur et firent leur autocritique.

A poursuivit l’attaque. So n refus de la lutte idéologique, son refus de la critique portant sur son idéologie et ses visées politiques fractionnelles, jetèrent une lumière crue sur sa conception du monde. Sa position politique, consistant à faire dépendre l’autocritique de sa « critique » à l’organisation, « critique » qu’il n’était pas encore capable de faire, faute de systématisation », manifestait clairement à la fois son hostilité à l’UC(ML)B et l’absence de fondement objectif à cette hostilité. Ces quatre éléments : le fractionnisme et le refus de renoncer au fractionnisme, le mépris orgueilleux des justes critiques des camarades, l’opposition violente et sans principe à l’UC(ML)B, montrent que ce qui animait A, c’était sa volonté consciente de s’emparer de la direction par tous les moyens. A se découvrit comme un comploteur et un arriviste. Au lieu de rentrer dans la légalité de l’organisation, il remit une fraction sur pied, avec D et Z. L’organisation continua de mener la lutte idéologique avec lui, mais il se laissa entraîner par la logique de la trahison, poussant toujours plus loin ses attaque sans principe contre la ligne et l’organisation.

D, l’allié de A, se révélait depuis plusieurs mois comme un élément instable. L’accomplissement de ses tâches, son style de travail et son style de vie étaient de plus en plus vivement critiqués par l’organisation, à tous les niveaux. D commença par apporter un soutien assez hésitant à l’organisation contre la fraction. Très vite, à cause de son manque d’esprit de parti prolétarien, il partagea son allégeance entre le NDN et A. Il choisit définitivement le camp fractionniste au moment où il cessa de pouvoir éluder la critique, où les exigences du Parti étaient devenues trop dures pour lui et où sa fonction de cadre fut mise en cause par le NDL.

« Du temps d’UR, chacun, en fin de compte, organisait « sa » vie comme il l’entendait, et le manque de pratique (…) n’astreignait pas les militants à une discipline de fer. L’unité entre TPT et UR, la nouvelle organisation créée, les conditions changent. J’ai toujours mené le travail politique comme JE l’entendais. Maintenant je dois le mener comme l’organisation l’entend ». (Autocritique de D, 12 décembre).

Comme la vérité est simple, et comme elle sonne clair ! UR ne respectait pas le centralisme démocratique et son activité dans les masses était quasi inexistante. Sur ce terrain ne peuvent fleurir que des conceptions et des pratiques d’organisation bureaucratique et petite-bourgeoise. Au lieu de rectifier leur conception et leur pratique à l’intérieur de l’UC(ML)B, A et D glissèrent au contraire dans l’opportunisme organisationnel et refusèrent la critique des camarades. Mais l’arrivisme bourgeois et l’opposition petite-bourgeoise à l’esprit de parti prolétarien ne sont vaincus par l’idéologie communiste que s’il y a refonte totale dans la conception du monde. C’est à ce travail que A, D et Z viennent haineusement de se refuser. Plutôt que de contribuer, avec modestie, à la construction du Parti. Ils ont préféré s’opposer au mouvement marxiste-léniniste et retaper un soi-disant « comité » anticommuniste.

ESPRIT DE PARTI OU ESPRIT FRACTIONNEL ;

Camarades ! La construction du Parti communiste exige de nous que nous consolidions l’esprit du Parti prolétarien. L’attachement à la cause révolutionnaire du prolétariat, l’application du socialisme scientifique, la construction de la ligne communiste, la lutte contre le révisionnisme moderne et le néo-révisionnisme, la pratique du centralisme démocratique et de la morale communiste, sont depuis le début de la construction du Parti, les caractéristiques principales de l’esprit de parti prolétarien.

L’esprit de parti prolétarien se forme et se consolide dans la lutte contre l’opportunisme et le révisionnisme. C’est essentiellement par la lutte à l’intérieur du mouvement et de l’organisation que nous poserons les fondements du Parti : la théorie marxiste-léniniste sur les contradictions au sein du Parti est l’idée directrice fondamentale de l’édification et de la consolidation du Parti. La contradiction entre esprit de parti et esprit de fraction est une contradiction de classe au sein de l’organisation.

Les progrès et les retards de la lutte des classes entre le prolétariat et la bourgeoisie dépendent en dernière instance de la nature idéologique du Parti communiste. Si le Parti renie le marxisme-léninisme, s’il trahit la cause du prolétariat et sombre dans le révisionnisme, la révolution sera freinée et subira des défaites. L’ennemi s’acharnera donc, tant de l’extérieur qu’à l’intérieur, à faire dévier la ligne communiste, à décapiter le Parti de sa direction marxiste-léniniste, à le désorganiser et à le désunir au moyen d’idées et de pratiques anarchistes.

« La conquête et le maintien de la dictature du prolétariat, a dit Staline, sont impossibles sans un parti fort par sa cohésion et sa discipline de fer. Mais la discipline de fer dans le Parti ne saurait se concevoir sans l’unité de volonté, sans l’unité d’action complète et absolue de tous les membres du Parti. (…) L’existence de fractions est incompatible avec l’unité du Parti et avec sa discipline de fer ; il est à peine besoin de démontrer que l’existence de fractions entraîne la formation de plusieurs centres ; or l’existence de plusieurs centres signifie l’absence d’un centre commun dans le Parti, la division de la volonté unique, le relâchement et la désagrégation de la dictature. Certes, les partis de la IIème Internationale qui combattent la dictature du prolétariat et ne veulent pas mener les prolétaires à la conquête du pouvoir, peuvent se permettre ce libéralisme qu’est la liberté des fractions, car ils n’ont aucunement besoin d’une discipline de fer. Mais les partis de l’Internationale communiste, organisant leur travail sur la base de cette tâche : conquête et consolidation de la dictature du prolétariat, – ne peuvent accepter ni « libéralisme », ni liberté de fractions.

Le Parti, c’est l’unité de volonté excluant tout fractionnisme et toute division du pouvoir dans le Parti.

C’est pourquoi Lénine montre « le danger du fractionnisme du point de vue de l’unité du Parti et de la réalisation de l’unité de volonté de l’avant-garde du prolétariat, condition essentielle du succès de la dictature du prolétariat », idée qui a été fixée dans une résolution spéciale adoptée du Xe Congrès de notre Parti « Sur l’unité du Parti ».

C’est pourquoi Lénine réclame la « suppression complète de tout fractionnisme » et la « dissolution immédiate de tous les groupes sans exception qui se sont constitués sur telle ou telle plate-forme », sous peine « d’exclusion certaine et immédiate du Parti » (…).

Les éléments opportunistes du Parti, voilà la source du fractionnisme ».(Staline, Des principes du léninisme, p 115-117)

Le camarade Enver Hoxha a réaffirmé avec force cette position :

« Un parti marxiste-léniniste …ne peut … pas tolérer l’existence d’une fraction … Même si une chose semblable venait à se manifester, le Parti ne peut pas et ne doit pas tolérer (son) existence ne fût-ce que pour une courte période. Une fraction dans le Parti se trouvant en opposition avec l’unité de pensée et d’action marxiste-léniniste, s’efforce de transformer le Parti en un parti social-démocrate et le pays socialiste en un pays capitaliste ». (La révolutionnarisation ultérieure du Parti et du pouvoir, Discours 1967-1968, p. 44).

Les cadres qui pendant un court temps apportèrent leur appui direct aux fractionnistes, concentrèrent leurs attaques contre la direction sur la question : discipline communiste ou « libre processus de la lutte idéologique ».
Ils rejoignaient par là la rébellion « antiautoritaire » d’un des cadres fractionnels, B, proclamant que « c’est étouffer la lutte idéologique que de venir immédiatement discuter avec le NDN », que suivre les directives sans être d’accord est du servilisme », etc. et adhérant à la vue que les positions montées par le CDT étaient « plus importantes que la discipline ».

Le but principal du NDN en lançant la campagne de bolchévisation a été de renforcer le centralisme démocratique dans l’UC(ML)B. Les justes rapports entre discipline et lutte idéologique sont, à cet égard, d’une très grande importance.

« Il s’agit de savoir, disait Lénine aux menchéviks, si votre lutte idéologique revêtira des formes plus hautes, les formes d’une organisation de parti obligatoires pour tous, ou les formes de l’ancienne débandade et des anciens cercles. On nous a ramenés des formes supérieures à des formes primitives ; et l’on affirme pour se justifier que la lutte idéologique est un processus, et que les formes ne sont que des formes. » (Un pas en avant, deux pas en arrière, t. 7, p. 407-407).

IDÉOLOGIE COMMUNISTE OU IDÉOLOGIE BOURGEOISE

L’individualisme caractérise la déviation idéologique du fractionnisme.

« L’erreur du CDT trouve sa source principale dans l’individualisme, l’indiscipline des intellectuels petits-bourgeois qui veulent n’en faire qu’à leur tête, refusent les directives, n’admettent pas la moindre erreur chez les dirigeants mais sont pleins de sollicitude pour leurs propres manœuvres et pleins de suffisance quant à la « portée historique » de leurs propres positions ». (Autocritique de C).

« On n’obéit pas aux ordres, on place ses opinons personnelles au-dessus de tout. On n’attend pas des égards de l’organisation et on ne veut pas de sa discipline. C’en est la quatrième forme (de libéralisme) » (Mao Tsétoung, Contre le libéralisme, t. 2, p. 26).

B fit un moment valoir pour la défense du CDT que les trois cadres qui le composaient avaient été jugés par le NDN comme les plus aptes à mener la campagne et qu’il serait donc invraisemblable que brusquement ils se retrouvent en opposition radicale avec l’UC(ML)B. En réalité ce fait prouve que la faiblesse idéologique de l’UC(ML)B et du mouvement en général est encore grande : ceux qui se trouvaient être les meilleurs cadres ont, en effet, montré leur vulnérabilité et la persistance dans nos rangs de l’idéologie petite-bourgeoise. Le danger apparaît le plus clairement chaque fois que l’organisation se prépare à faire un nouveau progrès politique.

Le CDT et ses alliés formaient un nid d’opportunistes dont les perspectives et les préoccupations n’étaient pas identiques. Entre les opportunistes il n’y a pas d’unité politique, et il ne peut y en avoir, parce qu’ils opposent leurs intérêts particuliers aux intérêts du plus grand nombre et qu’il n’existe pas de base scientifique à leurs menées. Le texte du CDT est éloquent à cet égard : la base politique en est réduite au minimum ; ce qui importait avant tout aux fractionnistes, c’était de composer une attaque où se trouveraient réunies le plus grand nombre possible de balles contre le NDN. L’alliance conclue entre opportunistes est toujours une alliance sans principe. Au point de vue idéologique, l’individualisme des fractionnistes a pris des formes différentes, et plus ou moins graves.

L’opportunisme le plus dangereux se révéla pleinement dans la direction assurée par A aux menées subversives des trois, puis dans la seconde fraction qu’il monta après avoir été défait et isolé une première fois. A a déclaré cyniquement qu’il était conscient de la déviation anarchistes des deux autres cadres du CDT (ce qui montre bien à la fois la nature délibérée de ses menées et le mépris qu’il avait pour ses comparses). Lui connaissait les principes d’organisation communiste, mais il n’était prêt à les appliquer qu’aux autres, n’estimant pas nécessaire qu’on se soumette à un centralisme qu’il n’assure pas lui-même.

A s’écarta de la voie communiste, en appliquant le marxisme-léninisme aux autres et en se dispensant lui-même de se plier à la discipline. Il est de ceux qui, se jugeant seuls dignes de confiance, se mettent au-dessus de la direction, au-dessus de la critique.

« L’esprit d’« indépendance » est souvent inséparable de la tendance à mettre son « moi » au premier plan. Ceux qui y sont enclins ont fréquemment une manière incorrecte d’aborder le problème des rapports entre l’individu et le Parti. En paroles, ils respectent, eux aussi, le Parti, mais dans la pratique, ils placent leur personne au premier plan et le Parti au second ». (Mao Tsétoung, Pour un style de travail correct dans le Parti, t. 3, p. 41).

L’esprit d’« indépendance », l’orgueil ont entraîné A à monter un complot visant à renverser la direction et à prendre le pouvoir. Les deux autres cadres du CDT étaient d’accord de marcher avec lui, B pour faire valoir ses « revendications », C à cause de ses flottements centristes. Plus tard, D le rejoignit pour trouver une couverture « politique » à sa propre faiblesse idéologique et pour se soustraire à la discipline et à la critique.

A était travaillé par le besoin de centraliser et de diriger. Ce besoin a fini par dominer sa conscience révolutionnaire. Il a montré qu’il voulait le pouvoir, sans être préparé idéologiquement et politiquement à en assurer les tâches.

Le même orgueil l’empêcha ensuite de reconnaître cette déviation et de se soumettre à la légalité communiste.

L’orgueil, s’il n’est pas extirpé de l’idéologie d’un communiste, peut le conduire très rapidement à la bourgeoisie.

« Si notre Parti, terrorisé sans merci par les colonialistes et en butte à de multiples difficultés et danger durant les années de lutte clandestine, s’est sans cesse développé, est devenu chaque jour plus fort, et s’il a mené la révolution et la résistance à la victoire, c’est parce qu’il a su employer cette arme acérée que sont la critique et l’autocritique.

Mais un petit nombre de membres du Parti, prisonniers de leur individualisme, sont devenus orgueilleux, trop fiers de leurs mérites, ont une trop haute opinion d’eux-mêmes. Ils critiquent les autres mais ne veulent pas qu’on les critique ; ils ne pratiquent pas l’autocritique ou bien ils la pratiquent mais sans sincérité ni sérieux. Ils craignent de perdre la face et de se discréditer. Ils ne sont pas attentifs aux avis des masses, font peu de cas des cadres sans parti. Ils ne comprennent pas qu’il est difficile de ne commettre aucune erreur quand on milite.

Nous ne craignons pas de reconnaître nos erreurs ; ce qui est à craindre, c’est de ne pas être résolu à les corriger. Pour cela il faut se prêter de bon gré à la critique des masses et pratiquer sincèrement l’autocritique. Repousser la critique et s’abstenir de l’autocritique conduira immanquablement à la rétrogradation morale, à la régression. Et celui qui y tombe sera rejeté par les masses. C’est une conséquence inévitable de l’individualisme ». (Ho Chi Minh, De la moralité révolutionnaire, Ecrits (1920-1969), p. 207).

La lutte entre les deux idéologies au sein du Parti vise à rejeter ce qui est altéré et à absorber le nouveau.

Ce qui est altéré : l’esprit de fraction et l’indiscipline, la suffisance et l’amour-propre bourgeois.

Ce qui est nouveau : le souci de l’unité, la volonté de renforcer la direction et de consolider la ligne, l’application de la critique et de l’autocritique.

L’ENJEU POLITIQUE DE LA LUTTE

L’objet immédiat de la lutte qui se mena entre le NDN et l’ex-CDT, entre la ligne marxiste-léniniste de l’organisation et le fractionnisme de l’opposition est très simple à saisir dans son essence : le NDN est-il le quartier prolétarien ou le quartier bourgeois de l’UC(ML)B ?

S’il est le quartier bourgeois, comme le CDT essaya de le faire croire, toute notre orientation doit être remise en question. Jusqu’à présent seuls les néo-révisionnistes de Clarté ont soutenu tel point de vue. Le CDT, lui, passe à l’action.

Si le NDN est le quartier prolétarien, c’est le CDT lui-même qui s’instaurait en quartier bourgeois, car qui attaque le prolétariat sinon la bourgeoisie, qui attaque le mouvement marxiste-léniniste sinon les révisionnistes ?

Pour trancher la question, il faut s’appuyer sur les principes et se baser sur le bilan de l’organisation en entier et du NDN en particulier. En faisant le bilan, le principal est de distinguer la gauche de la droite, le marxisme-léninisme de l’opportunisme ; il faut suivre le fil rouge de l’organisation et ceux qui l’ont tenu le plus solidement en main.

L’inversion du vrai et du faux, de la gauche et de la droite a trouvé sa forme accomplie dans la thèse selon laquelle le NDN appliquait le « centralisme bureaucratique » et le CDT le « centralisme démocratique ».

La distinction entre les amis et les ennemis est la question décisive de la lutte des classes et de la révolution.

« Quels sont nos ennemis, quels sont nos amis ? C’est là une question d’une importance primordiale pour la révolution. Si, dans le passé, toutes les révolutions en Chine n’ont obtenu que peu de résultats, la raison essentielle en est qu’elles n’ont point réussi à unir autour d’elles leurs vrais amis pour porter des coups à leurs vrais ennemis » (Mao Tsétoung, Analyse de classes de la société chinoise, T.1, p. 9.)

Le but principal de l’opportunisme est d’obscurcir cette question. Il aide la bourgeoisie en divisant le camp de la révolution, en semant la confusion dans le Parti, en empêchant le peuple de s’unir contre ses oppresseurs. Tel est le fondement de la ligne politique de tous les opportunistes.

Le CDT prit soin de ne pas attaquer de front nos positions dans leur ensemble, encore qu’il ait commencé des attaques ouvertes sur des aspects importants. Mais il s’en prit surtout à la ligne en la dénaturant, en usant de la calomnie envers le NDN et de la démagogie envers la base.

Un mot sur la tactique de l’opportunisme et sur la façon dont le CDT en usa.

Les opportunistes se servent des points faibles des marxistes-léninistes pour dénigrer ceux-ci, faire passer le faux pour le vrai et enfin faire triompher leur propre plate-forme. Dans un premier temps, ils « détruisent » la confiance du peuple et des militants en leurs dirigeants, puis ils rétablissent la domination de l’idéologie bourgeoise, du capitalisme. Dans ce cas-ci, le point faible était le centralisme et la direction de la pratique de masse. C’est pourquoi, le CDT lança le « cri déchirant » que « la ligne politique n’est pas liée au travail de masse », que le « centralisme démocratique est, par conséquent, impossible ». Il exagéra démesurément les erreurs en niant tout l’acquis de notre travail de masse et de notre fonctionnement. Sur cette base, l’ex-CDT remit en cause l’idéologie du NDN en prétendant qu’il était « théoriciste », opposé au centralisme démocratique et qu’il rejetait ses erreurs sur le dos de la base en refusant toute autocritique. Et ainsi de suite. Tous les faits démentent ces allégations. Au contraire, la pratique du CDT fut révélatrice de l’idéologie qui l’inspirait. L’organisation en son entier sut juger le vrai et le faux et apprendre à mieux connaître les tactiques de l’opportunisme. Elle progressa ainsi dans une meilleure application du centralisme démocratique, qui est le principe d’organisation dressé contre l’opportunisme.

L’issue de la lutte décida de la question : renforcement ou retard de la construction du Parti communiste.

Les conditions objectives de la construction du Parti sont définies par les contradictions entre les classes, par les luttes du prolétariat et par la situation du mouvement marxiste-léniniste.

Il dépend des communistes de transformer ces conditions en pratiquant le marxisme-léninisme, en réalisant leur unité selon le principe du centralisme démocratique, en se démarquant du révisionnisme et de l’opportunisme sous toutes leurs formes et en construisant la ligne politique marxiste-léniniste en liaison avec la pratique révolutionnaire.

Le fractionnisme a été une offensive de l’opportunisme sur l’ensemble de ces questions. Sur le front de la construction du Parti, il représente une aide directe au néo-révisionnisme et au courant opportuniste dans le mouvement ; les « positions » défendues tout à tour par les deux fractions rejoignent les accusations des néo-révisionnistes ; elles alimentent la confusion idéologique du mouvement et approfondissent sa désunion.

Mais il ne suffit pas de dire que les fractionnels apportent une aide directe au néo-révisionnisme. Les néo-révisionnistes sont les scissionnistes du mouvement marxiste-léniniste, et les fractionnels eux-mêmes s’étaient mis sur cette voie, les uns pour se rendre rapidement compte de leur erreur et y renoncer, les autres pour la suivre jusqu’au bout et sombrer dans le révisionnisme.

Aussi longtemps que l’unité des communistes ne sera pas faite et que nous présenterons un front désuni à la bourgeoisie et au révisionnisme, l’opportunisme continuera à dominer dans le mouvement. La ligne de l’UC(ML)B nous assigne, par conséquent, comme tâches principales d’unifier le mouvement et de critiquer le néo-révisionnisme. C’est contre cette ligne et contre les principaux responsables de sa construction que le CDT se leva.

« Si le CDT avait pu continuer ses activités, cela eût conduit à saper l’unité de l’UC, à destituer la direction et enfin à renier la ligne. C’était retarder considérablement la construction du PC. Il faut que chaque camarade du CDT, et ceux qui l’ont soutenu, se persuade de la gravité d’une telle situation ; il pourra ainsi corriger plus facilement ses erreurs » (Autocritique de C).

En posant la question : lutte pour la construction du Parti ou lutte pour la division du mouvement et de l’UC(ML)B , le CDT mit en cause le rôle positif que notre organisation peut et doit jouer dans le mouvement. Une défaite de la ligne et de la direction de l’UC(ML)B aurait signifié une régression pour tout le mouvement ; il est clair qu’une organisation tombant sous la coupe de fractionnistes n’a plus rien à apporter dans une lutte visant à nous unifier et à faire respecter le centralisme démocratique par tous.

A l’intérieur de l’UC(ML)B, le niveau idéologique général de l’organisation s’est élevé. La lutte pour les statuts est un terrain privilégié de la lutte des intérêts collectifs du prolétariat et du Parti contre les intérêts individuels.

Le fractionnisme a été complètement vaincu ; les éléments scissionnistes sont démasqués. C’est la première victoire importante de la campagne de bolchevisation.

Dans cette lutte, les forces unificatrices du mouvement marxiste-léniniste ont été consolidées ; la démarcation avec le scissionnisme néo-révisionniste a été approfondie. Les bases idéologiques de l’édification du Parti se trouvent ainsi renforcées.

  1. Allusion à la définition donnée par Lénine du fractionnisme
  2. L’individualisme continuait à inspirer D, à son insu, même quand il essayait de commencer une autocritique sincère. Ainsi le manque de confiance dans le Parti était doublé d’un « manque de confiance en moi-même », ce qui n’est pas une autocritique communiste, mais un tourment petit-bourgeois. Les communistes ont confiance dans les masses et dans le Parti. Ce sont les masses qui font la révolution, et les armes de la théorie et de l’organisation sont les principaux instruments de leur victoire.
  3. « Et non pas, ajouta D, parce que la contradiction au sein de l’organisation, le regroupement se feraient sur la base de l’ex-UR ».
  4. Des camarades ont estimé qu’il était superflu de dissoudre la cellule. D’après eux, l’accord unanime du NDN, du NDL et des responsables de Bruxelles doit suffire à exclure un membre, même si cette décision ne recueille pas la majorité de la cellule de l’intéressé.

    Le NDN a cependant jugé préférable de dissoudre parce qu’il proposera dans le projet de statuts de prévoir que toute exclusion soit votée par la cellule. Il est nécessaire de garantir les droits de la minorité, et ce n’est pas dans tous les cas que la décision d’exclure rencontrera l’adhésion du cadre national et local en son entier.

  5. Ces « positions » elles-mêmes ne portèrent d’abord que sur des questions relativement secondaires, et la tactique du fractionnisme ne devint réellement “plausible” qu’à partir du moment où D s’en prit de plus en plus à la “ligne d’unification sans principe de l’UC(ML)B. Jusqu’alors sa « défense » avait été très incertaine en ce sens qu’il s’en prenait à l’UC(ML)B en se saisissant de tout ce qui lui paraissait erreur ou faiblesse, même s’il s’agissait de points tout à fait mineurs.
    A agit de la sorte jusqu’à la fin, parce qu’il avait en fait abandonné la lutte à partir du moment où il se savait démasqué. Il avait lancé sont brandon contre l’appel à l’unité du mouvement (Unité rouge, 18), le 5 octobre ; par la suite, il n’utilisa plus cette question et n’essaya jamais de fonder sur elle (pas que sur aucune autre) sa « ligne » d’opposition. Ce fut au point que lorsque X souleva ce point (réunion cellule, 14 novembre), A ne réagit même pas.
    D, de son côté, vit bien que pour faire pièce aux graves accusations qui pesaient sur la fraction, il fallait opposer en fait des « positions politiques » autre chose que les minables cartouches dont A et lui s’étaient saisis au départ. Il agita donc cette question avec plus d’insistance, mais ce ne fut qu’à l’issue extrême de la lutte qu’il se mit réellement à compter sur cette arme : le 6 janvier, soit au moment où son exclusion était déjà demandée par la réunion des responsables, il mit pour la première fois par écrit l’opinion que « l’UC liquidait la ligne du centre et qu’au demeurant elle n’avait jamais eu de conception correcte à ce sujet ».
  6. « Nos tâches politiques » est le premier pamphlet de Trotski contre le léninisme, écrit en 1904, pour soutenir l’opportunisme dans le domaine de l’organisation contre « Un pas en avant, deux pas en arrière »

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