AMADA ET L’UNITÉ DES MARXISTES-LÉNINISTES
bilan de janvier 1971 à septembre 1974
Publié en septembre 1974

INTRODUCTION

De toutes les questions qui nous opposent à AMADA, celle de l’unité est et a toujours été la plus importante, parce que la division des organisations communistes fait obstacle à la reconstruction du parti et que, d’une façon générale, elle affaiblit considérablement les moyens politiques et pratiques de la classe ouvrière face à la bourgeoisie et au révisionniste.

uc-bilan.jpg

La question de l’unité est aussi, nous l’avons dit souvent, la seule contradiction entre AMADA et nous qui mérite le nom de divergence, au sens strict, au sens programmatique du mot. Le seul principe qu’AMADA viole entièrement et ouvertement, c’est le principe d’organisation, le centralisme démocratique, obligatoire pour tous les communistes d’un pays, quelles que soient les contradictions pouvant exister entre eux. Les autres désaccords, les appréciations contradictoires que nous faisons, les uns et les autres, de la situation du mouvement ouvrier et de nos propres tâches de communistes, sont questions de nuances. Il ne s’agit pas de nier leur importance, car ces nuances peuvent déterminer à plus ou moins longue échéance des politiques divergentes, mais nous disons que, dans l’état actuel des contradictions, il est absolument aberrant d’y voir un obstacle l’unification.

Depuis plusieurs mois, des discussions se déroulent régulièrement entre nos deux organisations, à tous les niveaux. C’est un fait positif. A la faveur de cette lutte idéologique, des membres d’AMADA ont l’occasion de prendre à cœur les intérêts du mouvement marxiste-léniniste tout entier et d’étudier la ligne léniniste sur l’unité. Certains essaient sincèrement de nous convaincre de la justesse de leur ligne ; c’est là la première forme que prend le désir d’unité.

Cependant, tant que ces camarades resteront sur la ligne de division d’AMADA, leurs efforts ne peuvent aboutir à un bon résultat. Lorsque les contradictions au sein du peuple ne sont pas traitées correctement, qu’on le veuille ou non, les choses finissent immanquablement par se gâter.

Afin d’éclairer au maximum les contradictions qui existent entre AMADA et l’UC(ML)B sur la question de l’unité, afin de critiquer systématiquement l’erreur sectaire d’AMADA, nous allons retracer ici tout le processus de la lutte, depuis la fin de 1970 jusqu’aujourd’hui (septembre 1974) en rappelant les positions, les arguments, les attitudes qu’AMADA a successivement opposés à notre unification.

A travers ces positions, ces arguments et ces attitudes, c’est toujours le même. esprit sectaire, le même attachement à son propre « royaume », le même mépris pour les autres partis du mouvement marxiste-léniniste, qui se sont ouvertement affirmé.

Il est nécessaire que tous les membres du mouvement prennent sérieusement connaissance de tous les aspects de la lutte, afin qu’ils puissent se faire une opinion par eux-mêmes, en communiste. Ceci demande un travail d’étude personnel. Lors de l’unification des bolchéviks et des menchéviks en 1906, Lénine écrivait dans son rapport du congrès :

« … nous jugeons nécessaire de donner en annexe à cette brochure la documentation la plus complète possible relative au Congrès d’unification, afin que les membres du Parti puissent réellement étudier par eux-mêmes les désaccords, et non pas seulement répéter de confiance des phrases toutes faites entendues çà et là. Cette documentation est évidemment aride.

Tous n’auront pas suffisamment d’attention et de patience pour lire tes projets de résolution, pour les confronter avec les textes adoptés, pour réfléchir à la signification formulations de chaque paragraphe, de chaque phrase. Pourtant , sans ce travail sérieux, il est impossible d’avoir une attitude consciente vis-à-vis des décisions du congrès. » (t.10, p. 396)

Nous demandons à chaque militant, à chaque ouvrier conscient de prendre à cœur la lutte idéologique entre AMADA et l’UC(ML)B et de faire un travail d’étude personnel pour prendre position en connaissance de cause, sur la base des principes communiste. Nous demandons à tous, pour pouvoir se former une opinion ferme sur la question des deux lignes, d’examiner de près ce bilan et de s’armer des principes qui régissent les contradictions entre communistes et la création du parti.

Quels sont ces principes ? Ils tiennent en un petit nombre.

1. Le point de vue idéologique général dont il faut partir est le suivant : « … tenir compte des intérêts de l’ensemble. Chaque membre du Parti, le travail dans chaque secteur ; chaque parole où acte, tout doit avoir pour point de départ les intérêts de l’ensemble du Parti. Nous ne tolérerons pas la moindre infraction à ce principe. » (Mao Tsé-toung, Citations, p.299-300)

2. La règle politique fondamentale en la matière est qu’« il ne doit y avoir dans chaque pays qu’un seul et unique Parti Communiste. » (Internationale Communiste, 2e Congrès, Résolution sur le rôle du Parti Communiste dans la révolution prolétarienne).

3. Le fondement objectif de cette règle est que « c’est seulement par l’unité du Parti communiste que l’on réalisera l’unité de toute la classe et celle de toute la nation » (Mao Tsé-toung, Citations, p.277).

4. Pour construire le Parti, la méthode léniniste indique qu’il faut partir « du sommet » (Histoire du PC(b) de l’URSS., p. 37-38) : c’est-à-dire, dans un premier temps, de la centralisation de la lutte idéologique par l’avant-garde et ensuite du congrès de tous les délégués.

Tout d’abord, il faut se délimiter : « Avant de nous unir, et pour nous unir, nous devons commencer par nous démarquer nettement et résolument. » (Lénine, t.4, p.364) Les agents de la bourgeoisie, les révisionnistes, doivent être écartés Avec les communistes qui font des erreurs, qui sont influencés par la bourgeoisie, il faut mener la lutte idéologique dans un esprit d’unité, et ensuite s’unir : c’est la méthode unité-critique-unité.

5. A l’intérieur du parti, les contradictions entre les communistes doivent être traitées en observant les règles du centralisme démocratique : « Tout le Parti doit se soumettre à une discipline unique ; l’individu doit se soumettre à l’organisation, la minorité à la majorité ; l’échelon inférieur à l’échelon supérieur et l’ensemble du Parti au comité central. » (Statuts du Parti Communiste de Chine, art. 5).

Voilà la doctrine communiste sur ces questions.

C’est sur cette base que l’UC(ML)B a construit sa ligne d’unification du mouvement (marxiste-léniniste) de Belgique.

C’est elle qu’AMADA rejette depuis près de quatre ans avec acharnement.

Il est nécessaire de critiquer la politique d’AMADA envers l’ensemble du mouvement.

Notre critique revêt des aspects fondamentaux :

1. La ligne d’AMADA envers les faux marxistes-léninistes, les néo-révisionnistes.

2. La ligne d’AMADA envers les véritables marxistes-léninistes.

Au point 1, la ligne d ‘AMADA envers le parti de Grippa (1963-1966), L’Exploité et Clarté, nous consacrerons une brochure particulière.

Quant au point 2, qui est l’objet de cette brochure-ci, nous ne pouvons pas en traiter de façon tout à fait complète.

Plusieurs organisations marxistes-léninistes ont existé en Belgique entre 1968 et 1973, qui ont aujourd’hui disparu.

Il y a eu fusions d’organisations (d’Ouvrier en Colère et du Comité Joseph Staline pour l’Unité Rouge ; de ce Comité et de TPT) fusions reniées peu de temps après par le scissionnisme ; autres organisations ont sombré dans le néo-révisionnisme (Garde Rouge) ou l’anarcho-syndicalisme (Mouvement Syndical Etudiant). AMADA n’a jamais pris parti dans ces luttes, et n’a même jamais donné son avis à leur propos et aspect essentiel de la reconstruction du parti ne paraît pas le concerner.

AMADA a eu cependant quelques discussions bilatérales avec certains groupes, mais il n’en a jamais rendu compte au mouvement et à la classe ouvrière. C’est pourquoi nous devons nous limiter à reproduire ici a) les positions générales prises par AMADA à l’égard de l’ensemble du mouvement marxiste-léniniste authentique ; b) l’évolution de la lutte idéologique entre AMADA et TPT-UC(ML)B.

Au niveau international, TPT et AMADA ont participé en octobre 1971 à la réunion préparant une prétendue « Conférence internationale des Partis et Organisations marxistes-léninistes d’Europe », qui était destinée à ne réunir en réalité qu’un petit nombre d’entre eux et qui devait se tenir en dehors de la présence du Parti du Travail d’Albanie. TPT-UC(ML)B a fait l’autocritique de ce scissionnisme (Bulletin marxiste-léniniste 3, p.65 ; 5, p.14 ; Unité Rouge, n°22/1972) ; AMADA préfère garder le silence sur cette affaire, montrant par-là que son manque d’esprit d’unité ne concerne pas seulement le mouvement communiste de Belgique, mais qu’il s’étend au mouvement communiste international.

I. LA PREMIÈRE TACTIQUE D’AMADA : « CONSTRUIRE AMADA D’ABORD » ET ÉTOUFFER LA LUTTE IDÉOLOGIQUE AU SEIN DU MOUVEMENT
(FIN 1970 – JUILLET 1973).

La lutte pour l’unité dans le mouvement a commencé dès la fin de 1970, à l’époque où l’aile gauche d’UUU (Usines-Université-Unions) se délimitait de l’aile droite spontanéiste et se mettait progressivement sur les positions du marxisme-léninisme. La gauche d’UUU se fondait surtout sur les enseignements de Que faire ? et elle avait tiré les leçons de la lutte menée au sein d’AMADA contre l’économisme après la grande grève des mineurs. La pratique d’UUU dans les grèves spontanées à Michelin, à Citroën et aux Forges de Clabecq lui permettait de toucher du doigt les limites de l’agitation spontanéiste.

La gauche d’UUU estimait que cette lutte idéologique intéressait tout le mouvement, et elle invita AMADA à prendre part à la discussion, pour y défendre le bilan de sa rectification contre l’économisme et soutenir ainsi le marxisme-léninisme coutre le spontanéisme.

Mais la direction d’AMADA refusa d’intervenir. Invité – par les deux lignes – à donner son avis à la veille de la scission, elle envoya deux militants qui se comportèrent en conciliateurs sociaux, se bornant à faire quelques déclarations abstraites sur l’unité.

La gauche d’UUU, qui allait devenir Tout le Pouvoir aux Travailleurs [et ensuite l’UC(ML)B ndlr] avant de constituer une nouvelle organisation, demanda à discuter avec AMADA, dans le but de préparer la fusion. Elle mit justement en avant qu’elle était sur la ligne politique et tactique d’AMADA ; déjà, dès avant la scission, elle avait reconnu dans les faits la direction idéologique d’AMADA en adoptant son journal qu’elle traduisait et diffusait, et elle se proposait d’adhérer à AMADA.

Mais AMADA refusa de s’engager dans ce processus, sans donner à ce moment d’autres motifs que nos « insuffisances » (notamment « l’absence de lutte idéologique » dans notre groupe après la scission avec les spontanéistes) et le fait que « nous n’avions pas fait nos preuves ». On nous dit aussi qu’AMADA manquait de temps et de cadres pour s’occuper de la question.

Telles sont les circonstances où TPT apprit à connaître le sectarisme de la direction d’AMADA.

En mars-avril 1971, TPT, qui tenait néanmoins à poursuivre la discussion avec AMADA dans le but de l’unité, lui adressa le texte suivant :

« Note sur les réunions de contact AMADA – TPT.

Les responsables d’AMADA et ceux de TPT doivent exprimer la conception qu’ils ont de la discussion politique entre deux organisations, en vue de leur unification éventuelle : nous avons fait cette proposition, parce que les responsables d’AMADA n’ont pas jusqu’à présent mené la discussion d’une façon correcte. Nous avons nous-mêmes commis la faute de ne pas insister lors de la première réunion de contact, sur les principes qui doivent diriger ce travail.

Les principes.

1. S’unir est pour les organisations et les militants maoïstes un devoir. Les groupes qui sont sur des positions politiques et idéologiques semblables doivent discuter ensemble pour préparer leur unification. Envers ceux que nous jugeons en arrière de nous, il faut prendre l’initiative des contacts et proposer la discussion. Dans les deux cas − et surtout le premier parce qu’il aura des conséquences importantes et immédiates sur l’ampleur de notre action politique et eux le progrès des militants − nous devons dépasser les méthode artisanales qui ont été les nôtres jusqu’à présent.

‘Unir ce qui peut être uni’ signifie ici que nous devons à tout moment veiller à construire l’organisation la plus forte possible, pour mettre au service de la lutte des travailleurs un instrument de plus en plus efficace, Parler de la construction du parti sans prendre en main cette tache-là notamment, est un bavardage.

2. Tout travail d’unification ou mené en vue d’une unification se fait ‘par le haut’ et non ‘par le bas’. Sa réalisation est confiée à des responsables des deux groupes. Ces responsables doivent se mettre d’accord sur la méthode de discussion et concentrer toutes les informations en leurs mains (textes) ; ils doivent comprendre que les positions politiques et idéologiques des groupes ne peuvent valablement être communiquées que par eux. Enfin, pour connaître la pratique réelle de l’autre groupe, ils doivent faire une enquête.

3. Sur la question de l’unification elle-même, nous estimons évidemment qu’il faut, pour s’unifier, une identité de vues politiques et idéologiques. Mais cette identité, ou au contraire les éventuelles divergences et contradictions, ne peuvent apparaître politiquement que si la discussion et l’enquête sont menées de façon sérieuse et systématique.

Critique et autocritique.

Aucun de ces principes n’a été respecté par AMADA, et nous-mêmes ne les avons observés qu’en partie.

Sur 1 Cela a été une attitude constante d’AMADA de ne pas rechercher la discussion avec les autres groupes maoïstes, et même de négliger de diffuser tout ce qui pouvait les faire avancer. Ceci est vrai tant au niveau national qu’international. L’exemple le plus grave de cette carence est le bilan du Limbourg. Les camarades flamands n’ont pas pleinement compris le devoir des maoïstes de s’unir, et n’ont pas compris non plus qu’étant en Belgique le groupe le plus avancé (pour des raisons de pratique, d’organisation, de nombre) c’est principalement sur eux que repose la responsabilité de cette tâche.

A l’égard d’UUU une telle pratique s’est manifestée à plusieurs reprises. Exemples récents : – curieuse attitude dans les discussions qui ont mené à la scission : volonté affichée d’intervenir (et même d’assurer la formation sur Que faire ?), passivité totale dans les faits ;

– Actuellement les attitudes négatives dans les contacts témoignent de nouveaux ce manque de sérieux. Les préventions qu’AMADA nous oppose -, qu’elles soient fondées ou qu’elles ne soient que des préjugés ont à leurs yeux beaucoup plus de poids que la nécessité d’unir nos forces. Ceci ressort du crédit accordé à la légère à n’importe quels bruits de couloir où calomnies, et de la négligence mise à en contrôler la véracité. Si nous avons donné tant d’exemples de cette attitude lors de la réunion passée et si-nous insistons sur ce point, c’est parce que cette erreur empoisonne nos rapports, ne fait avancer personne, et qu’elle montre qu’AMADA fait passer les principes au second rang.

Sur 2 Nous sommes déjà tombés d’accord sur l’empirisme et le pragmatisme dont nous nous sommes rendus coupables les uns et les autres, en organisant l’unité d’action à la base (Citroën) et même au niveau central (journal) sans que des responsables en aient discuté sérieusement ensemble. Nous sommes tombés d’accord là-dessus, mais que font les camarades flamands pour remettre la situation sur ses pieds ? En attendant, nous maintenons inchangée notre collaboration au journal, parce que l’intérêt des masses passe avant la stricte fidélité aux principes d’organisation.

Sur 3. Si, comme il nous semble, les camarades d’AMADA refusent l’unification du moins dans l’immédiat, pour des motifs qu’ils n’affirment pas et qui ne sont pas clairs pour nous, et si, d’autre part, ils s’y prennent mal pour discuter, il est naturel que les arguments qu’ils nous opposent ne sont pas corrects, et que leurs critiques sans principe (c’est-à-dire, en ce cas, sans enquête) sont souvent dénuées de sens politique. Les interprétations données à notre volonté d’unification elle-même, en sont le meilleur exemple. Non seulement nous prenons en main une tâche qui incombait surtout aux camarades d’AMADA, mais en plus ceux-ci nous attribuent des intentions apolitiques et erronées ! Un autre exemple comique est l’absence de lutte idéologique à TPT’. La scission d’UUU était certainement un jeu de société pour intellectuels théoriciens !

La seule proposition effective d’AMADA dans le travail de discussion est de lancer ‘un mouvement de rectification à porte ouverte’ pour les différents groupes et sur la base des 25 points. Ici aussi, il y a incompréhension des exigences politiques qu’il faut mettre à la discussion. La conception proposée est spontanéiste. Un mouvement de rectification ne peut se réaliser avec succès que sur la base d’une unité dans la perspective politique. Un accord éventuel sur les 25 points ne peut suffire à s’assurer de cette unité, car sur une base aussi générale toutes les contradictions et les divergences politiques et idéologiques ne peuvent apparaître. S’en tenir à cela comme base, c’est mettre en avant une conception académique de la rectification et de la discussion ».

Ce texte ne reçut pas de réponse.

Il comporte des carences et des maladresses, mais le désir de l’unité y apparaît clairement. Cependant, la position selon laquelle « parler de la construction du parti sans prendre en main cette tâche-là (la tâche de l’unification) notamment

(nous soulignons), est du bavardage », est une position centriste. Elle veut tenir le milieu entre la lutte (primordiale) pour l’unité des communistes et les tâches (secondaires) de la construction de chaque organisation. Ceci explique que TPT à l’époque lâcha rapidement prise devant le mur qu’AMADA lui opposait et qu’il chercha à discuter plutôt avec d’autres groupes : Ouvrier en Colère (OC), Unité Rouge (UR) et, peu de temps après, Garde Rouge (GR). Mais il continuait à partir toujours des intérêts du mouvement, et il proposa à chaque groupe de publier sa position sur l’unité des marxistes-léninistes.

A la suite de cette proposition, AMADA fit connaître, en octobre 1971, son « Point de vue sur l’unification des marxistes-léninistes et les étapes de la construction du parti » ; en janvier 1972, OC donna son texte « Marxistes-léninistes, unissons-nous ! » et PT publia le bulletin marxiste-léniniste 1 – « marxistisch-léninistische bulletin 1 ».

Nous rappelons le « Point de vue (d’AMADA) sur l’unification des marxistes-léninistes et les étapes de la construction du parti » déjà publié en annexe du bulletin marxiste-léniniste 3) :

« 1. La question la plus importante qui se pose en ce qui concerne l’unification des marxistes-léninistes est : voulons-nous une unification formelle et bureaucratique ou une unité qui est capable de résister aux tempêtes de la lutte de classe et qui est formée dans la lutte de classe ?

Unification et construction du Parti selon les principes suppose l’édification d’un Centre national.

Un Centre national ne se fait pas par la fusion formelle de marxistes-léninistes capables ni par une lutte idéologique sur des principes abstraits d’édification du Parti.

Une unité sur le principe que le Parti se construit à partir d’un Centre ne peut nous avancer d’un pas, si cette unité n’est pas forgée dans le développement d’une ligne de propagande, d’agitation et d’organisation.

L’étape de la construction du Centre implique une lutte idéologique sur des fragments de programme et d’organisation.

Ces fragments sont une élaboration de la théorie marxiste-léniniste et de la pratique d’un groupe, des principes et des expériences spécifiques.

Les groupes doivent prouver autour de points pratiques et concrets qu’ils peuvent contribuer à l’élaboration et l’application d’une ligne.

2. En plus, il faut tenir compte des conditions spécifiques de la Flandre et de la Wallonie.

La construction d’un seul Parti unifié et la construction d’un Centre national passe par et se fait simultanément avec la construction d’un Centre de direction unique et ferme en Wallonie et en Flandre.

Les tâches immédiates dans cette perspective :

– l’élaboration d’une plate-forme de propagande et d’agitation, des revendications concrètes, pour la lutte salariale et contre les conventions collectives ;

– l’élaboration de la ligne d’organisation, avec comme proposition concrète les 15 points d’AMADA ;

– l’élaboration d’un bulletin de discussion interne sur la ligne politique, la construction du Parti et la ligne d’organisation ;

– l’élaboration d’un journal de propagande unique pour la Wallonie rédigé par une rédaction composée par des délégués de chaque organisation ;

– l’élaboration d’un programme d’étude et la division des tâches d’étude ».

L’erreur fondamentale de cette position est de se dérober devant la tâche principale de l’unification et de la nier dans les faits en inventant le « danger principal » d’une « unité formelle et bureaucratique » des marxistes-léninistes capables ». Qu’une organisation se réclame du marxisme-léninisme (et non du révisionnisme, du trotskisme, du spontanéisme, de l’anarchisme) et qu’elle s’emploie réellement à l’appliquer (ce qu’une analyse concrète, un bilan permettent à tout moment de vérifier) n’a, du point de vue communiste, rien de « formel », et l’unité conclue après lutte idéologique entre de telles organisations, rien de bureaucratique ». Sous l’apparence d’une opposition au « formalisme » et au « bureaucratisme » AMADA sabotait les tâches de l’unification.

La seule façon d’éviter le formalisme et le bureaucratisme, c’était de mener la lutte idéologique dans le but de s’unir et c’est bien ce qu’AMADA refusait obstinément de faire. AMADA donnait aussi un tour concret à son attaque contre l’unité : « Les groupes doivent prouver autour de points pratiques et concrets qu’ils peuvent contribuer à l’élaboration et l’application d’une ligne ». C’était la confirmation de l’argument déjà opposé à TPT : « Vous n’avez pas fait vos preuves ». Une pareille exigence nous permet d’apercevoir la différence qu’il y a entre l’esprit étroit du sectarisme et l’esprit ouvert du communisme.

Lorsque Lénine luttait pour unifier tous les social-démocrates russes sous la direction idéologique de l’Iskra, voici comment il traitait de la même question :

« Un cercle qui n’a pas encore travaillé et cherche à s’employer, pourrait commencer non comme un artisan isolé dans son petit atelier, ne connaissant ni l’évolution antérieure de l’industrie », ni l’état général des moyens de production industrielle, mais comme le collaborateur d’une vaste entreprise qui reflète la poussée révolutionnaire générale contre l’autocratie ». (Que faire ? t. 5, p. 520).

Mais AMADA ne songeait qu’à une chose : élever des barrières entre les organisations. Car « en plus » de la lutte contre le « formalisme » et le « bureaucratisme », il fallait encore « tenir compte » de ses préjugés nationalistes ; AMADA proposait la « construction d’un Centre de direction unique et ferme en Wallonie et en Flandre ». AMADA essayait ainsi d’écarter la menace d’un Centre unique pour tout le pays ; il proposait le polycentrisme, c’est-à-dire la reconnaissance officielle et le maintien de la division existante. Cette solution lui donnerait la possibilité de se laver les mains de toute l’affaire, puisqu’en dehors de lui, toutes les organisations marxistes-léninistes étaient francophones.

TPT critiqua immédiatement AMADA pour son sectarisme et le mit en garde contre le danger révisionniste. Il adressa, en mars 1972, cette lettre à la direction : « Critique de la position d’AMADA – Kritiek op de positie van AMADA », en lui demandant de la faire connaître à l’intérieur de l’organisation :

« Nous ne pouvons pas être d’accord avec un pareil ‘point de vue’.

VEUT-ON OU REFUSE-T-ON L’UNITE : telle est pour nous ‘la question la plus importante qui se pose en ce qui concerne l’unification des marxistes-léninistes’. Il est clair qu’AMADA actuellement ne la veut pas. Celui qui cherche l’unité en propose les véritables moyens. Celui qui cherche l’unité, met en avant la ligne de démarcation avec les ennemis, insiste sur l’importance de la lutte idéologique et en précise l’enjeu principal, propose un procès d’unification concret. Qu’est-ce que les camarades d’AMADA ont à dire sur ces points ?

Sur la question qui sont ennemis et comment nous devons nous délimiter d’eux, pas un mot. Pour AMADA l’obstacle du révisionnisme moderne et du néo-révisionnisme ne semble pas se poser dans la construction du Parti. La contradiction entre Flamands et Wallons lui paraît certainement beaucoup plus importante que la contradiction entre marxistes-léninistes et révisionnistes. Que les camarades d’AMADA prennent garde qu’à force de nier le révisionnisme à l’extérieur, ils ne le retrouvent bientôt installé chez eux.

En ce qui concerne la lutte idéologique – et ceci est l’erreur principale -, on rejette « une lutte idéologique sur des principes abstraits d’édification du parti ». Comme s’il y avait des principes concrets… Ce sont les opportunistes qui parlent ainsi, parce qu’ils refusent de voir l’importance d’une discussion qui se fonde nécessairement sur des principes abstraits d’édification du Parti ». Comme s’il y avait des principes concrets… Ce sont les opportunistes qui parlent ainsi, parce qu’ils refusent de voir l’importance d’une discussion qui se fonde nécessairement sur les principes abstraits, mais qui porte sur de sujets qui sont bel et bien concrets.

Parler « des principes abstraits d’édification du Parti », au moment où la tâche centrale des marxistes-léninistes consiste précisément à former l’unité idéologique sur la conception du parti, parler aujourd’hui de cette façon, c’est tourner le dos à ce qui demande nos efforts les plus grands. Ces ‘principes abstraits’ et la façon que nous aurons de les comprendre et de les appliquer, seront en réalité le ciment de notre unité. Les camarades d’AMADA négligent les principales leçons de Mao sur les problèmes de l’organisation.

Mao a toujours répété et appliqué le principe abstrait selon lequel ‘pour avoir de l’ordre dans l’organisation, il faut d’abord qu’il y ait de l’ordre sur le plan idéologique, il faut développer une lutte qui oppose l’idéologie prolétarienne à l’idéologie non-prolétarienne’ (Entretiens à Yenan sur la littérature et l’art). Enfin, il n’y a pas trace d’un processus concret, d’un ordre de priorité et d’importance de nos tâches d’unification, sur lesquelles nous allons maintenant donner notre opinion.

Si AMADA se détourne de tout ce qui soit être discuté prioritairement ou s’il garde là-dessus le silence, il y a d’autre part des propositions effectives qui par malheur touchent des points secondaires ou bien reflètent des exigences contraires au matérialisme dialectique (les ‘fragments de programme’).

Une unité ‘forgée dans le développement d’une ligne de propagande, d’agitation et d’organisation’ (idée qui est concrétisée dans les points 1 et 2 des ‘tâches immédiates’) est certainement indispensable, mais quelle est la portée d’une telle exigence lorsqu’on sait que cette unité est déjà pour une grande part acquise, tout au moins entre AMADA, TPT, UR et OC, pour qui la conception du journal, les thèmes principaux de notre propagande actuelle, les principes communistes d’organisation posés par la IIe Conférence d’Organisation de l’Internationale Communiste ne posent plus de contradictions notables et ne constituent donc plus, entre ces organisations, une véritable ligne de délimitation.

Si pour s’unifier il était nécessaire de s’entendre sur ces points-là surtout, on pourrait dire que la fusion de ces organisations pourrait avoir lieu dans les prochaines semaines. C’est précisément parce qu’un accord existe sur cette base que la question du Centre national est à l’ordre du jour. Les camarades d’AMADA mettent en question ce qui est déjà pratiquement résolu et se taisent sur les moyens véritables de l’unification.

IMPORTANCE PRIMORDIALE DE LA DISCUSSION SUR LES TACHES INTERNES

Pourquoi centrons-nous la discussion sur la volonté de s’unir et sur la juste conception du parti marxiste-léniniste et sa construction (et non pas, comme AMADA l’insinue, sur le principe du Centre) ?

1. Parce que ce sont les questions qui ont trait à la contradiction principale dans le mouvement, et, par conséquent, à notre tâche politique centrale. Si le désir de l’unité fait défaut, à quoi sert-il de parler de toute autre question idéologique et politique ? Avec quelle perspective en parlerions-nous ? Allons-nous échanger nos opinions sur les syndicats, les conventions collectives, la fascisation, alors que le programme central est passé sous silence et avant de lever une aussi lourde hypothèque ?

2. Parce que c’est, bien entendu, précisément sur la question du centre, c’est-à-dire sur la question de l’unité, qu’AMADA est le plus dans l’erreur. Nous affirmons ceci avec d’autant plus de certitude que l’attitude actuelle d’AMADA, loin d’être exceptionnelle, est en réalité une constante que nous observons déjà depuis longtemps, aussi bien au plan national qu’international.

AMADA a systématiquement négligé tout ce que les relations avec d’autres révolutionnaires peuvent avoir d’utile, aussi bien pour les uns que pour les autres. Qu’il s’agisse par l’absence d’un bilan de la grève du Limbourg (dont il fallait tirer les leçons à l’encontre de l’anarcho-syndicalisme en Italie et du spontanéisme en Belgique et ailleurs), que ce soit lors de la réunion internationale des Partis et Organisations marxistes-léninistes où le représentant d’AMADA a trouvé bon de s’abstenir de la discussion sous prétexte que son organisation n’était pas prête (ni à donner ni à recevoir), ou qu’il s’agisse de ses rapports avec les organisations belges (TPT en particulier avec qui AMADA a partagé l’édition de son journal !), jamais AMADA ne s’est donné la peine de discuter sérieusement, jamais AMADA n’a dans cette question accompli ses devoirs marxistes-léninistes.

Cette attitude est d’autant plus inacceptable qu’AMADA était jusqu’il y a quelques mois à l’avant-garde idéologique du mouvement marxiste-léniniste de Belgique.

L’absence de critique de la part d’AMADA à l’égard des autres organisations rend son ‘splendide isolement’ d’aujourd’hui inacceptable, car un accord de principe fondamental, établi par une lutte idéologique sérieuse, pourrait justifier valablement sa volonté d’édifier seul le « Vlaamse Kommunistiese Partij »

Le refus de l’unité, qui s’exprime principalement dans le refus de la lutte idéologique et qui, organisationnellement, prend la forme du sectarisme, manifeste l’existence dans le mouvement marxiste-léniniste d’un courant petit-bourgeois, l’idée de la propriété privée, quel que puissent être les différents prétextes sous lesquels cette erreur fondamentale puisse se cacher.

3. Parce que c’est en définitive le facteur idéologique qui détermine la couleur de l’organisation. Si sur un point aussi important que celui de l’unité, la position marxiste-léniniste est niée ou même seulement obscurcie, nous sombrerions inévitablement dans une politique révisionniste ou petite bourgeoise. Les camarades d’AMADA nous en donnent eux-mêmes une preuve, sans le vouloir. En partant d’une position particulariste non-prolétarienne, ils en viennent immédiatement à commettre des erreurs aussi bien sur le plan théorique que sur le plan politique et organisationnel.

ERREUR THÉORIQUE. En dehors de la ‘ligne de propagande, d’agitation et d’organisation’, AMADA propose de mener la discussion sur des ‘fragments de programme’. AMADA raisonne dont comme ceci : il y a en ce moment plusieurs organisations marxistes-léninistes, ces organisations veulent fusionner, elles doivent donc ‘prouver autour de points pratiques et concrets qu’(elles) peuvent contribuer à l’élaboration et l’application d’une ligne’. En réalité, il faut que les dirigeants montrent leur capacité à résoudre la contradiction principale du mouvement. Comme AMADA passe à côté de ce point, il estime que la vérification doit porter sur le programme politique dont chaque organisation doit élaborer et appliquer son morceau. Voilà comment on tombe dans la défense ouverte du polycentrisme et du travail artisanal !

La ligne politique des communistes de Belgique sera élaborée sur la base d’une pratique et d’une étude unifiées, accomplies de façon centralisée, au niveau national. La théorie marxiste-léniniste de la connaissance doit nous guider dans notre travail politique ; elle nous enseigne : 1/ qu’il faut à tout moment lier la théorie à la pratique, 2/ qu’il faut faire la synthèse des connaissances particulières. Seul un Centre national, qui unisse le travail d’analyse à la direction de la pratique, satisfait à ces exigences de la dialectique. C’est tirer le mouvement en arrière que de réclamer de chaque organisation qu’elle prenne sur elle une partie de la tâche unitaire du futur Centre. C’est en fait nier la nécessité du Centre.

ERREUR POLITIQUE. L’erreur politique qui apparaît dès à présent consiste à insister à tort sur la contradiction entre les deux nations de la Belgique. Pour chacune d’elles, la contradiction principale est la même : la classe ouvrière de Wallonie et de Flandre détruira l’Etat belge pour établir le socialisme. Par conséquent, l’unité de la classe ouvrière et de son Parti est primordiale. Nous ne sommes cependant pas d’avis d’ouvrir maintenant la discussion sur la question nationale en Belgique, parce que nous pensons que ce ne serait ici qu’une diversion.

ERREUR DANS LA CONCEPTION DE L’ORGANISATION. En ce qui regarde les problèmes d’organisation, les camarades d’AMADA, ne sont pas mieux inspirés.

En ce qui concerne le Centre, ils ont d’abord, dans une proposition faite oralement, parlé de l’érection de deux Centres (correspondant à la nation flamande et à la nation wallonne) en prévision de la construction d’un seul parti (correspondant à l’Etat belge), selon la théorie bien connue de Liu Chao-chi : deux ‘fusionnent en un’.

Ensuite, sans explication ni autocritique, apparaît dans la version écrite un brouillamini où il s’agit d’un seul centre national dont la construction ‘passe et se fait simultanément avec la construction d’un centre de direction unique et ferme en Wallonie et en Flandre’, proposition dont le sens est incertain, mais d’où il ressort en tout cas que le critère linguistique et géographique demeure important pour les camarades d’AMADA.

C’est d’ailleurs ce qu’ils confirment quand ils parlent des ‘conditions spécifiques de la Flandre et de la Wallonie’ qu’ils ne se donnent d’ailleurs pas la peine de définir. Il y a certainement des conditions spécifiques propres à la nation flamande et à la nation wallonne, mais la question est de savoir si elles sont de nature à influencer la conception que nous devons avoir du PC(ML)B.

Pour nous ces conditions spécifiques sont secondaires ; elles portent entre autres sur des questions de tactique, d’organisation de masse, de séparations organisationnelles (fédérations, etc.) du Parti, et il est clair que la condition principale dans la lutte pour la révolution socialiste et, par conséquent, le programme, la stratégie, la ligne de masse, en un mot le Parti, ne peuvent être définis justement qu’au niveau de la Belgique.

Parler maintenant des conditions spécifiques de la Flandre et de la Wallonie, signifie que l’on traite du problème de la tactique alors qu’il faut encore parler de la stratégie, que l’on aborde la question des organisations de masse avant d’avoir réglé la question du Parti, que l’on met en avant des problèmes de structure du Parti avant de s’être unis sur la conception idéologique du Parti. Cette confusion correspond bien au praticisme qui ressort de l’ensemble de la proposition, où l’accent est toujours mis sur la ‘pratique’, le ‘concret’ et où on méprise l’ ‘abstraction idéologique’.

La position d’AMADA est erronée du début à la fin, elle contient autant d’erreurs que de mots, mais elle a au moins le mérite d’être cohérente et logique avec elle-même. En remettant la question de l’organisation sur ses pattes, nous verrons que loin d’être un facteur de division les ‘conditions spécifiques’ secondaires ne font que confirmer la nécessité d’un Centre unique et un Parti unique, si nous ne voulons pas être la grenouille dans son puits qui pense que la rondelle de ciel qu’elle aperçoit représente tout le firmament.

Continuons à examiner le « point de vue » d’AMADA. Quoi qu’il en soit du nombre de centres, on nous propose ‘l’élaboration d’un journal de propagande unique pour la Wallonie, rédigé par une rédaction qui est composée par des délégués de chaque organisation’. Cette proposition est vraiment remarquable ! Nous aimerions demander aux camarades d’AMADA pourquoi selon eux, le journal flamand doit être écrit par AMADA seul et quelle sorte d’unité doit à leur avis fonder l’association journalistique des ‘Wallons’. Pour des camarades qui craignent par-dessus tout une « unification formelle et bureaucratique » (lorsqu’ils sont eux-mêmes en cause), il faut convenir qu’ils ne manquent pas d’aplomb dès qu’il s’agit de donner à ce sujet des conseils à d’autres.

Concluons. AMADA n’est pas à même de présenter aux organisations marxistes- léninistes autre chose qu’une marmelade où il est question de tout dans n’importe quel ordre, où l’idéologique est séparé du politique, l’étude de la pratique, les Flamands des Wallons, le centralisme de la démocratie. Il est déjà très clair que le mépris d’un principe aussi important que celui de l’unité des marxistes-léninistes empêche l’élaboration d’une ligne politique communiste. AMADA aurait tout à fait tort de croire que sous prétexte qu’elle est l’organisation la plus nombreuse, qu’elle a la pratique la plus développée et qu’à elle seule elle couvre toute la partie flamande du pays, qu’elle aurait moins que les autres organisations besoin de réaliser l’unité. Ce n’est pas une question de taille, etc., c’est une question de principe. Personne ne peut y échapper.

Le spontanéisme qui a été vaincu dans le mouvement en ce qui concerne les tâches envers les masses s’est à présent retranché dans la question du Centre, sous la forme du praticisme. L’aspect principal de notre contradiction principale, notre désunion, est soutenu, renforcé par AMADA.

AUTOCRITIQUE. Dans la voie erronée où AMADA s’engage actuellement, nous portons une part de responsabilité. Quand nous avons commencé à travailler ensemble à Bruxelles et surtout quand nous nous sommes mis d’accord pour éditer le journal « Tout le Pouvoir aux Travailleurs », nous aurions au moins dû nous assurer qu’AMADA avait l’intention de mener la lutte idéologique avec nous, pour parvenir à l’unité. A ce moment, nous nous étions contentés d’un accord formel et sans principe où chacun trouvait ce qu’il fallait : AMADA qui trouvait à bon compte une version française de son journal à diffuser et nous qui voyions un journal tomber du ciel. Cette erreur se perpétua. Nous nous sommes rendus compte de notre opportunisme et de notre libéralisme envers AMADA, et à plusieurs reprises nous avons demandé à avoir des discussions systématiques, tant au niveau national que local, mais sans nous montrer assez déterminés en ce sens. Cette situation malsaine est devenue intenable. Il n’est absolument plus possible d’être lié par un lien aussi important qu’un journal à une organisation avec laquelle nous ne sommes pas unis, et nous renonçons à ce qu’on peut difficilement nommer une collaboration.

Tout le Pouvoir aux Travailleurs

Cette lettre, à son tour, resta sans réponse.

En même temps, TPT exposa sa propre position sur l’unification des communistes dans le bulletin marxiste-léniniste, (janvier 1972) intitulé : « Proposition pour l’unité des marxistes-léninistes de Belgique ».

Ce bulletin esquissa l’analyse concrète du mouvement marxiste-léniniste : 1/ il traça une nette ligne de démarcation avec le révisionnisme moderne et il désigna le néo-révisionnisme (le grippisme, avec ses représentants actuels, Clarté et l’Exploité) comme l’ennemi principal infiltré dans le mouvement marxiste-léniniste ; 2/ il définit le mouvement véritable composé, à l’époque, d’AMADA, de Garde Rouge (RG), du Mouvement Syndical Etudiant (MSE), du MUBEF (en réalité, une fraction du MUBEF, le futur Lutte Communiste (marxiste-léniniste) et le Comité Joseph Staline pour l’Unité Rouge (UR) : 3/ il posa les tâches d’édification du parti et indiqua ainsi la contradiction principale au sein du mouvement véritable : « la nécessité actuelle de construire le Parti, c’est-à-dire d’unifier la ligne politique et la direction du mouvement national, d’une part, et la désunion des marxistes-léninistes belges, d’autre part » (p. 17).

La solution de cette contradiction d’un Centre (la fusion des organisations placées sous une direction unique »), qui « devra prendre sur lui toutes les tâches d’un Parti, telles qu’elle s’imposeront aux marxistes-léninistes à l’étape atteinte » (p. 17). En application du principe léniniste selon lequel le parti doit se construire à partir du sommet, le bulletin précisait : « La construction de la ligne politique doit s’effectuer de façon unitaire et organique. Elle se fera par une pratique (travail de masse) nationale, liée au travail d’étude (analyses) et d’enquêtes national, tous deux dirigés idéologiquement et politiquement par un Centre national. Ce sont là les conditions de la systématisation à réaliser par les dirigeants communistes dans l’élaboration de la ligne de masse » (p. 18).

Le bulletin proposait la méthode de construction du Centre : par la lutte idéologique, dirigée par l’organisation ou les organisations d’avant)garde. Il définissait enfin les tâches politiques, idéologiques et d’organisation à remplir par le Centre. L’élaboration du programme occupe ici la première place.

Cette ligne d’unification de TPT, qui est toujours la nôtre aujourd’hui, est une application fidèle des principes marxistes-léninistes.

Quelle fut la réponse d’AMADA à cette proposition ?

Dans un texte de mai 1972 (cfr. Bulletin marxiste-léniniste 3, annexe 2) AMADA fut amené à « approfondir » la position spontanéiste qu’avait annoncée son « point de vue » d’octobre 1971.

AMADA évitait de prendre explicitement position sur le fond de la question (la nécessité primordiale pour des communistes divisés de s’unir) : à vrai dire, il se refusait même à indiquer que l’unification est une tâche, mais il concentrait effectivement le tir contre l’unité en attaquant notre proposition de mener la lutte idéologique entre toutes les organisations marxistes-léninistes en vue de former le Centre. « Les uns disent : les principes marxistes-léninistes nous apprennent qu’il faut un centre. Unissons-nous autour de ce principe. C’est de l’idéalisme historique à cent pour cent. Le centre unique se fera dans la lutte sur les problèmes de la ligne politique, tactique et organisationnelle ».

La réponse est facile :

1/ Tout d’abord une unité sur le principe « il faut un centre » est très supérieure à une unité ( ?) sur la position des deux centres prônée par AMADA. Mais AMADA niait le caractère politique de cette contradiction. Ainsi, lorsque TPT disait que « la nécessité actuelle de construire le Parti, … d’une part, et la désunion des marxistes-léninistes belges, d’autre part, constituent la contradiction principale du mouvement » (bulletin marxiste-léniniste 1, p. 17), AMADA répondait « La contradiction principale est toujours politique, entre des positions marxistes et des positions bourgeoises ».

C’est bien ainsi que nous l’entendions ! La contradiction principale dans le mouvement est celle qui oppose ceux qui luttent pour l’unité des communistes et ceux qui luttent contre elle. Et c’est déjà ce que nous avions laissé entendre dans le bulletin marxiste-léniniste 1 : « La constitution du Centre est actuellement ce maillon qui, selon les termes de Lénine, permet si on s’en saisit solidement, de s’emparer de toute la chaîne. Le refus persistant de l’unité, la remise à plus tard du Centre serait aujourd’hui la faute majeure, et ceux qui s’en rendraient coupables cesseraient bientôt d’être des marxistes-léninistes. Sur ce point nous mènerons une lutte idéologique intransigeante. Nous nous efforcerons de convaincre l’unanimité des camarades belges. (…) Il est clair que tout ce qui, d’une façon ou d’une autre, s’opposerait à la construction du Centre sur la base des principes marxistes-léninistes sera un obstacle sur la voie de l’édification du Parti, et sera critiqué comme position contre-révolutionnaire entraînant la division du prolétariat et l’affaiblissement de sa lutte. » (p. 18)

Ces phrases sont aujourd’hui plus actuelles que jamais, et elles indiquent parfaitement, pour qui veut entendre, la lutte entre position communiste et position bourgeoise sur la question de l’unité.

2/ AMADA éludait ce désaccord en mettant tout de suite en avant une autre question : comment construire le centre ? « Le Centre unique se fera dans la lutte », etc. C’était, bien entendu, exactement ce que nous avions écrit nous-mêmes : « La mise sur pied du Centre se fera à travers une confrontation générale entre les organisations marxistes-léninistes et portant sur les questions idéologiques, politiques et de style de travail » – suivait l’énumération concrète des questions à discuter (bulletin marxiste-léniniste 1, p. 24-26). Cela signifierait-il qu’AMADA et TPT auraient été entièrement d’accord sur la procédure à suivre pour s’unir ? Non, là aussi, une divergence existait entre eux, parce que TPT insistait sur le fait qu’il faut, à partir du début, reconnaître que la construction du Centre est le but nécessaire et inévitable de la lutte idéologique.

Aussi l’attaque d’AMADA était-elle déjà plus franche, quand il écrivait : « Dans les textes de TPT, on voit la glorification d’un DEUS EX MACHINA qui s’appelle : Centre, Parti, Programme ; on voit l’Idée dans sa forme pure du Centre, du Parti, du Programme ». Selon AMADA, il faut « partir de ce qu’on a » (c’est une des formules du suivisme qu’il affectionne particulièrement) ; pour nous, il faut surtout montrer les limites de ce qu’on a (c’est-à-dire, concrètement, le division des marxistes-léninistes !) et insister sur la nécessité de dépasser cette étape, de préparer et de créer ce qui n’existe pas encore (le Centre) et de se mettre d’accord sur cette perspective.

En mai 1972 eut lieu une discussion entre des dirigeants et des cadres d’AMADA et de TPT. Lors de cette discussion, AMADA déclara qu’à son avis la question de l’unité « devenait « importante et qu’il voulait passer de « l’échange d’expériences entre organisations » (qui n’eut, en réalité, jamais lieu) à « l’échange de critiques ».

L’échange d’expériences et l’échange de critiques sont de bonnes choses, mais elles ne suffisant pas. Ce que les communistes organisent, c’est la centralisation des idées justes. Nous voulons que le mouvement élabore et applique une seule ligne, se soumette à une seule discipline au sein d’un seul parti.

Dans cette discussion, AMADA persiste dans sa ligne de division :

« TPT : Comment expliquez-vous que, pour vous, le développement interne d’un groupe peut être plus important que la lutte idéologique au niveau de tous les marxistes-léninistes du pays ?

AMADA : Il y a des organisations qui posent la question du Parti, mais cela ne correspond à rien. Il faut un développement interne dans le groupe au point de vue pratique de cette ligne. Lancer arbitrairement des formules sur le Parti n’est pas valable ». (Procès-verbal, p. 6).

AMADA s’efforça de défendre ses pratiques sectaires passées :

« TPT : Quand on était d’accord sur la ligne, quand nous traduisions votre journal, vous refusiez l’unité. Etes-vous encore d’accord avec cette attitude que vous aviez ?

AMADA : A ce moment-là, l’attitude était logique, car nous ne posions pas comme problème central la question de l’unité.

TPT : Mais au niveau du mouvement, était-ce objectivement le problème central ? Si oui, alors vous devez faire une autocritique et en tirer les conséquences.

AMADA : Nous n’avons pas d‘autocritique à faire pour avoir refusé de diriger tout le mouvement à une époque où nous n’étions pas capables de le faire.

TPT : C’est scandaleux comme affirmation ! Alors, selon vous, recruter de nouveaux militants, cela ne pose pas plus de problèmes que de rallier des marxistes-léninistes ? A ce moment dont nous parlons, non seulement vous avez refusé la lutte pour l’unité, mais en plus vous avez même refusé de soutenir la gauche dans la lutte contre les spontanéistes au sein de l’UUU ; alors que vous étiez plus avancés sur ce point-là. Quand vous êtes à l’avant-garde, vous refusez de mettre au premier plan la question de l’unité. La tâche centrale n’a pas changé depuis un an, depuis plus longtemps même, depuis qu’il n’existe pas de Parti communiste en Belgique. Et vous refusez toujours de la considérer comme centrale. Existe-t-il une autocritique sur la position que vous avez défendue sur la question des deux centres ? Quelle était l’origine de cette erreur ?

AMADA : La position défendue sur les deux centres n’est pas une position de principe, c’est une façon d’avancer vers l’unification. C’est la préparation des tâches d’unité.

TPT : Pourquoi faut-il deux centres pour cela ? Parce qu’il faut d’abord l’unité linguistique avant l’unité idéologique et politique ?

AMADA : Ce n’est pas une question de principe.

TPT : C’est faux que ce n’est pas un principe. C’est un principe bourgeois.

AMADA : Il faut une période de transition où nous restons le centre de notre organisation. Car il y a plus de facilité à élaborer une tactique commune par région.

TPT : C’est la question politique qui est principale. Pas la question linguistique. Cette position est une séquelle du nationalisme bourgeois. Il faut en faire une sérieuse critique, et derrière cette position, se cache votre individualisme, AMADA étant le seul groupe flamand. La question des deux centres ne peut pas être vue en dehors des principes.

AMADA : Les quatre organisations francophones wallonnes (OC, GR, TPT, UR) ont travaillé ensemble. Si l’unité entre ces quatre organisations avait réussi, il aurait été plus facile pour nous de nous unir avec une seule organisation wallonne.

TPT : C’est à vous que nous avons demandé l’unité. Nous avons travaillé avec vous aussi. Et vous avez refusé l’unité avec nous. Cet ‘argument’ est une diversion. Nous étions plus proches de vous politiquement que de GR et de OC. Comment idéologiquement, interprétez-vous ces faits ? Pourquoi n’étiez-vous pas capables alors de jouer le rôle de centre et maintenant oui ? Parce que vous avez progressé dans les tâches envers les masses ? Il se pose une double question :

1) Pourquoi le centralisme démocratique est-il applicable à partir d’un certain moment seulement ?

2) Pourquoi est-ce le progrès autonome d’AMADA qui fixe ce moment ? (Procès-verbal, p.13-14).

TPT : … Votre sectarisme est la preuve de votre manque d’idéologie communiste. Par exemple, ce sectarisme s’est manifesté lorsque vous avez refusé de nous assister dans notre lutte contre le spontanéisme, quand vous avez refusé l’unité que nous vous demandions.

AMADA : A ce moment-là, ce n’était pas du sectarisme, c’était une question de forces. Nous ne les avions pas.

TPT : Vous ne considériez pas l’unité comme tâche principale ; c’était une erreur.

AMADA : Non, nous n’avions pas les armes.

TPT : Ce qui est important, c’est de savoir si c’est le moment de prendre les armes, alors on les trouve, les armes ! On ne regarde pas d’abord si on les a. D’ailleurs, vous les aviez. Dans la lutte contre l’économisme et le spontanéisme, vous étiez plus avancés que nous, et nous nous sommes basés sur vos textes pour mener notre propre lutte.

La question de l’autocritique ne revient pas à dire si une position est ‘logique’ en fonction du développement interne … » (Procès-verbal, p. 16-17).

AMADA cherchait la justification de son sectarisme dans les « vertus « du polycentrisme :

« TTP : Pourquoi chaque organisation doit-elle progresser seule ? Et comment progresse-t-elle, si elle est séparée des autres ? Jusqu’où doit-elle progresser de façon autonome ?

AMADA : Il faut partir des contradictions dans chaque organisation.

TPT : C’est du polycentrisme. La contradiction principale est à l’intérieur de tout le mouvement. Concrètement, il y a nécessairement une organisation qui est plus avancée que les autres sur la question de la contradiction principale. Pourquoi refusez-vous qu’elle entraîne les autres ?

AMADA : Selon vous, l’apport le plus valable à l’unité, c’est que chaque organisation fasse part de ses expériences aux autres, pour leur permettre de se corriger en même temps qu’elle, d’éliminer leurs déviations » (Procès-verbal, p. 5).

Cette explication fut confirmée en octobre 1972 par un dirigeant d’AMADA : « En 1971, la cohésion idéologique d’AMADA n’était pas encore assez grande » et « AMADA manquait de cadres pour s’occuper des tâches d’unification ».

Ainsi AMADA proclamait lui-même le fondement de sa déviation, le polycentrisme, la « théorie » selon laquelle chaque groupe doit d’abord se constituer et se renforcer, faire ses expériences, etc., avant de passer à la lutte pour l’unification de tous les groupes.

Avant de faire la critique de principe de cette position, nous devons observer tout de suite qu’en ce qui concerne TPT, elle ne tient même pas dans les faits, parce que fin 1970 à fin 1971, il n’existait en aucun domaine un désaccord notable entre AMADA et lui (sauf précisément sur la question de l’unité elle-même), que TPT adhérait à la ligne et jugeait la capacité organisationnelle d’AMADA suffisante pour s’unir à lui.

Et, sur le fond, que peut bien vouloir dire qu’on n’est « pas prêt pour l’unité », que « l’organisation n’était pas encore une organisation communiste conséquente » (en réalité, sa pire inconséquence était précisément de rejeter TPT !) et qu’elle « manquait de cadres pour prendre en charge les tâches d’unification ».

C’est là spéculer sur son propre retard, pour tirer tout le mouvement en arrière ! C’est invoquer les limites inhérentes au travail artisanal et local pour rejeter le travail systématique et national !

Selon les principes, il ne peut exister aucun facteur qui s’oppose à l’unification des communistes. Il faut partir des intérêts de la classe ouvrière et reconnaître que si la tête n’est pas unie, il n’est pas possible de diriger le corps. Il faut s’en tenir à l’esprit de parti prolétarien et poser la question : si les communistes ne sont pas prêts à s’unir entre eux, comment peuvent-ils prétendre unir le peuple contre ses ennemis ? Il est clair que la question dépend entièrement de l’idéologie de l’organisation et de ses dirigeants. Ne dites pas : je ne peux pas, mais dites : je ne veux pas.

L’attachement à la « pureté » de son « royaume indépendant » est la seule cause qui empêche des communistes de s’unir. « Construire son groupe avant de construire le parti avec les autres groupes », est, en matière d’organisation, la rengaine favorite des opportunistes, le lieu commun où tous les amateurs de l’esprit de cercle se rencontrent. « Renforcer les organisations locales », disait l’économiste Nadiéjine, « Unifier le Parti à partir de la constitution des comités d’usine », confirmait Trotski, et Lénine de leur répondre : la défense de l’autonomisme contre le centralisme est le trait caractéristique de l’opportunisme des menchéviks » (t. 7, p. 413).

« C’est en consolidant d’abord son propre groupe qu’on travaille le mieux dans l’intérêt de tout le mouvement », tel est bien le point de vue anarchiste, le mot d’ordre petit-bourgeois qui s’oppose directement au centralisme communiste : se renforcer, avant de s’unir et pour s’unir ! Il ne vient pas à l’esprit de ces opportunistes que c’est justement l’inverse qui est vrai : il faut s’unir pour se renforcer. Prêcher le développement séparé de chaque organisation, c’est vouloir que plusieurs partis s’édifient en même temps dans le pays, c’est diviser l’avant-garde du prolétariat et semer la confusion dans la classe ouvrière.

Les conséquences de cette ligne de déviation se font sentir dans tout le mouvement, comme dans chaque organisation en particulier :

a) Elle entrave le progrès idéologique, politique et théorique en faisant obstacle à l’unification de la classe ouvrière et à la centralisation unique dans l’élaboration et l’application de la ligne politique des communistes ; elle retarde la construction du parti, affaiblit la portée de notre activité, encourage le style de travail artisanal, occasionne le gaspillage des forces, facilite la répression de la bourgeoisie ;

b) Elle favorise le scissionnisme des pires opportunistes, qui spéculent sur la division pour, à leur tour, tirer leur épingle du jeu. L’exemple du groupe « De Vonk » (L’Etincelle) est à cet égard des plus instructifs. Lorsqu’il quitte AMADA, il affirma : « Le temps n’est pas encore mûr pour le centralisme démocratique. (…) Il n’y a pas de base (politique commune) suffisante pour vouloir conserver à tout prix l’unité quand il n’y pas d’accord sur la ligne politique. En effet, en prenant le droit d’avoir une pratique propre nous apporterons une contribution qui, au moment venu, sera utile à l’unité des marxistes-léninistes. En ce moment, la diversité énorme des groupes qui se réclament du marxisme-léninisme s’explique surtout par le fait qu’il faut chercher l’application du marxisme-léninisme à notre situation concrète » (Cité dans : Bulletin voor ideologiese strijd 1, p. 5 et 32).

Que répondit AMADA ?

« Ceci est une glorification du tripotage de cercle. Selon cette thèse le morcellement des cercles serait la forme organisationnelle adaptée pour ‘chercher l’application du marxisme-léninisme à notre situation concrète’.

C’est une thèse erronée qui nous replace deux ans en arrière. (…)

La ‘diversité des groupes’ s’explique surtout par le fait que des idées petites-bourgeoises dominant toujours encore dans le mouvement marxiste-léniniste et nullement par le fait que nous essayons d’appliquer le marxisme-léninisme à la réalité belge ». (Ibid. p. 32).

La direction d’AMADA a un double visage : à l’époque même où, à l’intérieur de son organisation, elle faisait campagne pour l’établissement d’un centre national unique de direction et combattait le scissionnisme à l’échelle d’AMADA, elle se faisait, à l’échelle du mouvement marxiste-léniniste tout entier, le champion de l’opportunisme.

L’aspect dominant est l’opportunisme, parce qu’on ne peut pas efficacement défendre la discipline communiste quand on ne s’y soumet pas soi-même. Aussi, AMADA était-il politiquement désarmé devant « ses » scissionnistes. Il écrivait :
« L’application du marxisme-léninisme en Flandre (nous soulignons) n’est possible que dans une organisation de parti centralisée ». (Ibid) L’Etincelle saisit la balle au bond et rétorqua naturellement « qu’en fait, AMADA applique donc les thèses de TPT à la Flandre » (Ibid. p. 17). La morale de l’histoire est que ceux qui s’opposent à l’unité des marxistes-léninistes se montrent faibles devant les scissionnistes, parce qu’ils ont, dans une certaine mesure, partie liée avec eux ;

c) Loin de renforcer chaque organisation en particulier, la division et l’esprit de division encouragent au contraire l’économisme et l’autonomisme vis-à-vis des organes dirigeants. AMADA, dans ses textes internes, revient régulièrement à la charge avec le principe : « le parti se construit à partir du sommet » et critique avec insistance l’esprit particulariste des cellules et de certains centres provinciaux. Mais ce sera là un travail toujours à refaire, car comment la direction pourrait-elle inculquer le respect du centralisme démocratique aux militants et obtenir des résultats décisifs en ce sens, quand en même temps elle freine des quatre fers l’unification du mouvement ? Comment insuffler l’esprit de parti quand on pratique soi-même l’esprit de cercle sur une grande échelle et quand on s’applique à étouffer la critique des communistes qui luttent pour l’unité ?

En juillet 1972, le bulletin marxiste-léniniste 3 donnait une première systématisation de notre critique à la ligne d’édification du parti d’AMADA.

Il comporte une critique de la déviation économiste d’AMADA, qui va de pair avec la négligence des tâches d’unification, des tâches idéologiques (délimitation avec le révisionnisme et le néo-révisionnisme) et des tâches théoriques. Il montre qu’AMADA n’a pas posé correctement les fondements du parti et qu’il voudrait se comporter comme un parti à la seconde étape de sa construction.

A propos de l’unité, la position marxiste-léniniste était encore une fois affirmée : « L’unité des communistes est une exigence qui doit être satisfaite à tout moment, quel que soit le niveau politique du mouvement et quel que soit le niveau politique de chaque organisation prise en particulier. Les ouvriers ont, en général, une conscience beaucoup plus claire de cette nécessité que les petits-bourgeois inclinant au particularisme et à l’individualisme ». (p. 36)

En novembre de la même année, l’UC(ML)B adressait dans son journal une « Proposition à tous les communistes (marxistes-léninistes) de Belgique pour la réalisation de leur unité – Voorstel aan al de kommunisten (marxisten-leninisten) van België voor de verwezenlijking van hun eenheid ». Cette proposition reprend les éléments constitutifs de notre ligne d’unification, tout en leur donnant pour la première fois une forme concrète, et en étant débarrassée de tout reste de sectarisme.

Quel est le plan d’unification proposé ?

La première phase est la démarcation.

Les trois organisations marxistes-léninistes, AMADA, Lutte Communiste et l’UC(ML)B, doivent présenter chacun sa plateforme, ses statuts et le bilan de son activité. Ensuite, chaque organisation critiquera les autres pour faire apparaître toutes les divergences importantes, avant l’unification. (Aujourd’hui, cette démarcation a déjà commencé à se faire, mais elle n’est pas encore systématique, large et intensive, et surtout elle n’est pas faite par tous dans le but déclaré de s’unir organisationnellement, quel que soit l’état des contradictions entre les trois organisations marxistes-léninistes.

La deuxième phase est l’unification, réalisée par le Congrès de fondation du Parti.

Le Parti se construit à partir du sommet, par les meilleurs représentants du prolétariat. Il faut donc que les délégués des cellules de base tiennent un Congrès unificateur. A ce Congrès, les trois organisations seront dissoutes. Les délégués n’auront pas de mandat impératif ni de leur cellule ni de leur organisation. Le Congrès sera le lieu d’une large lutte idéologique. Les délégués adopteront la plate-forme et les statuts du nouveau Parti, et ils éliront les organes dirigeants.

Le centralisme démocratique, légalisé par les statuts, garantira l’unité du Parti, parce que la minorité se soumettra à la discipline de la majorité. La minorité défendra son point de vue, à l’intérieur du Parti, sans se livrer à des manœuvres fractionnelles ni provoquer de scission.

Le Parti sera ainsi guidé par une volonté unique et soudé par une discipline de fer. Il sera armé pour accomplir ses tâches révolutionnaires et il renforcera progressivement son unité.

L’UC(ML)B ne reçut pas de réponse à cette proposition. Cependant, elle intensifia la lutte pour l’unité :

a) En cherchant systématiquement l’unité d’action dans des questions politiques importantes.

L’UC(ML)B proposa au mouvement de mener une campagne unie contre le projet Vranckx qui vise à interdire les organisations révolutionnaires et en particulier le nouveau Parti communiste en construction.

En janvier 1973, l’UC(ML)B chercha l’accord du mouvement pour mener en commun une campagne en l’honneur de Staline, pour commémorer de façon unitaire le vingtième anniversaire de sa mort.

En février 1973, nous provoquions une nouvelle fois une discussion avec la direction d’AMADA afin de mener une propagande commune contre le projet 430.

Aucune de ces propositions ne reçut une suite positive.

Cependant, AMADA accepta que l’UC(ML)B se joigne à lui dans les manifestations qu’il organisa contre le projet Vranckx, pour la défense des médecins de Hoboken et le 1er mai 1973. A l’échelle locale, des unités d’action purent se faire en plusieurs occasions (campagnes et meetings communs).

Enfin, dans certains centres les deux organisations vendirent le journal l’une de l’autre et s’aidèrent mutuellement dans la construction de cellules.

b) En approfondissant la délimitation des marxistes-léninistes avec le néo-révisionnisme.

AMADA se mit à qualifier publiquement L’Exploité d’ «organisation marxiste-léniniste » et à l’introduire en fraude dans le mouvement marxiste-léniniste, espérant de cette façon rallier plus sûrement des éléments opposants. L’UC(ML)B critiqua cette tactique opportuniste. (Le procès-verbal de la discussion sera publié dans la brochure consacrée à la politique d’AMADA envers le néo-révisionnisme).

D’autre part, peu après la publication des documents du 1er Congrès de Clarté, l’UC(ML)B invita AMADA à composer avec elle une critique systématique de cette imposture révisionniste. Elle présenta un plan et les arguments essentiels de cette critique, et un dirigeant d’AMADA s’engagea à mener ce travail jusqu’à son terme, puis il y renonça sans explication, et l’UC(ML)B dut à ce moment s’acquitter seule de cette tâche.

c) En portant la question de l’unification devant la classe ouvrière.

L’UC(ML)B édita à l’occasion de la manifestation commune contre le projet 430, en mars 1973, une brochure « Pour l’unité des communistes (marxistes-léninistes) et de la classe ouvrière – Voor de eenheid van de kommunisten (marxist-leninisten) en van de arbeiderklasse », afin de populariser sa ligne d’unification. Elle publia également dans son journal (Unité Rouge 26 (mars 1973) à 33 (octobre 1973) le texte de cette brochure qui établissait le bilan du mouvement, critiquait le sectarisme et établissait et renouvelait sa proposition d’unité. Nous rappelions à cette occasion les paroles de Lénine qui mettent en évidence l’importance de soumettre les contradictions internes au contrôle et au jugement des ouvriers : « … pour que les ouvriers ne puissent cesser de nous comprendre, pour que leur expérience de la lutte et leur instinct de prolétaires puissent apprendre quelque chose aussi à nous, ‘dirigeants’, pour cela, il faut que les ouvriers organisés apprennent à observer attentivement les sujets de scission qui surgissent (…), à les envisager à bon escient, à apprécier les événements qui se produisent dans quelque trou perdu, en Russie ou à l’étranger, du point de vue des intérêts de l’ensemble du Parti, des intérêts du mouvement tout entier ». (Lettre à la rédaction de l’Iskra, t. 7, p. 116).

Pour obtenir qu’AMADA en fasse autant, l’UC(ML)B lui adressa la lettre suivante :

Le 27 février 1973

Chers camarades,

En janvier 1972, nous avons publié un premier appel à l’unité des marxistes-léninistes.

En juin 1972, nous nous sommes démarqués des organisations marxistes-léninistes, dans le seul but de mieux préparer l’unification du mouvement.

En novembre 1972, nous avons publié un deuxième appel pour l’unité des marxistes-léninistes. Cet appel était lancé sous la forme d’une proposition concrète (Unité Rouge 22). Votre réponse à notre premier appel (publiée dans le bulletin marxiste-léniniste 3) éclaircissait sans doute certaines divergences existant entre nous, mais elle ne contenait aucune proposition pour l’unité des marxistes-léninistes.
Nous avons également eu quelques discussions sur des points particuliers, au niveau de deux représentants.

Depuis novembre nous attendons de vous une réponse à notre démarcation et à notre proposition concrète pour l’unité des marxistes-léninistes.

Dernièrement votre journal AMADA 42 a, pour le première fois, fait mention de l’existence de plusieurs organisations marxistes-léninistes en Belgique. Nous approuvons entièrement ce début d’explication de la situation du mouvement marxiste-léniniste parmi les militants et la classe ouvrière. Mais le marxisme-léninisme nous enseigne que l’unité doit se préparer par une lutte idéologique positive, active parmi les militants et dans la classe ouvrière. Or, il n’est pas possible de considérer que l’ensemble de nos rapports soient actuellement réglés par une lutte idéologique positive, active. Déjà de nombreuses difficultés dans notre activité découlent de notre division.

Le travail politique et théorique de la construction du programme est fortement retardé, alors qu’il est d’une importance primordiale pour la construction du Parti. Aussi longtemps que noter division perdurera, l’opportunisme dominera dans les rangs du mouvement, l’esprit de cercle continuera à l’emporter sur l’esprit de parti, et la ligne de démarcation avec le révisionnisme sous toutes ses formes ne pourra pas être établie nettement par l’ensemble des communistes authentiques. Plusieurs activités importantes (campagne Vranckx, lutte des écoliers, campagne Staline…) n’ont pu être organisées en commun à la suite de divergences politiques et de l’absence de centralisme démocratique entre nous. Dans une organisation unifiée, les divergences politiques n’empêchent pas l’activité unifiée, puisque la minorité se soumet à la majorité.

Camarades, notre désunion fait un tort énorme à la révolution, au prolétariat. Notre désunion retarde la révolution socialiste en Belgique. Les communistes sont responsables devant le mouvement communiste international, devant les peuples du monde, devant le peuple belge. Leur unité internationale et nationale est indispensable pour que la cause du communisme progresse à grands pas.
La lutte idéologique est le moyen de préparer notre unification, à condition qu’elle parte du désir d’unité et qu’elle soit active et étendue à tout le mouvement. « Nous sommes pour la lutte idéologique positive, car elle est l’arme qui assure l’unité à l’intérieur du Parti et des groupements révolutionnaires dans l’intérêt de notre combat. Tout communiste et révolutionnaire doit prendre cette arme en main. » (Mao Tsétoung)

Nous vous demandons de manifester un grand désir d’unité, en facilitant et en amplifiant la lutte idéologique sur nos positions principales. Concrètement, nous vous demandons :

– de répondre rapidement et positivement à notre appel de novembre ;

– d’autoriser que chaque texte important de nos organisations soit défendu dans tous les centres (pour l’immédiat : notre appel à l’unité cité ci-dessus et votre prochain texte) ;

– de mettre tout en œuvre pour que notre pratique soit coordonnée autant que possible, dans les conditions actuelles de désunion.

Il est évident que, de notre côté, nous respecterons strictement cet engagement.
Nous adressons une lettre dans le même sens à Lutte communiste (marxiste-léniniste).

Salutations communistes

Cette lettre resta sans réponse, et la proposition de porter la discussion dans le journal « Alle Macht aan de Arbeiders » demeura sans suite.

d) En exposant le fondement théorique de notre ligne d’unification au moyen du cahier « La ligne léniniste d’unification de la social-démocratie russe, de 1898 à 1912 », qui rapporte l’ensemble des principes élaborés par Lénine dans sa lutte contre les économistes et les menchéviks et qui indique comment appliquer ces principes à la situation actuelle du mouvement marxiste-léniniste de Belgique.

Nous engageons tous les camarades à étudier sérieusement l’expérience de la lutte de Lénine pour la construction du parti, d’en assimiler les enseignements et de lutter pour leur application.

Conclusion.

Ce bilan de la période allant de la fin 1970 à juillet 1973 montre qu’AMADA a opposé une résistance passive à l’unification du mouvement, qu’il a perpétué et renforcé la division de la classe ouvrière de Belgique.

Sa tactique a consisté à se retrancher derrière des arguments polycentristes (avec des relents nationalistes), à étouffer la lutte idéologique et à refuser de répondre à nos appels et à nos critiques.

Ceci est la marque d’une insuffisance d’esprit de parti.

Les organisations communistes conséquentes ont à cœur, dès le premier jour de leur formation, de prendre position sur toutes les questions du mouvement, de lutter contre l’opportunisme et d’unifier les forces communistes.

II. LA DEUXIÈME TACTIQUE D’AMADA : LA LUTTE A OUTRANCE
(A PARTIR DE JUILLET 1973)

En juillet 1973, AMADA sortit son texte : « Critique des positons de l’UC(ML)B – Kritiek op de stellingen van UC(ML)B », qui est une attaque violente contre la ligne, l’activité et les dirigeants de notre organisation.

Sur la base de sa propre déviation empiriste et de ses conceptions économiques, et en prenant prétexte d’erreurs réelles de l’UC(ML)B qu’il savait en cours de rectification, AMADA qualifiait la ligne de l’UC(ML)B de ‘ligne de sabotage de la lutte de classes » et traitait les dirigeants de l’organisation de « révisionnistes », de « comploteurs », d’«intellectuels trotskistes qui se dissimulent dans les rangs bolchéviks ». La rectification des erreurs elle-même (après la grève de Caterpillar, en mars 1973) devenait le prétexte d’attaques redoublées : « manœuvre à la Peng Chen », etc.

Ces qualifications insultantes, qui ne conviennent qu’aux organisations révisionnistes (en Belgique, le PCB révisionniste et le PCMLB (Clarté-L’Exploité) néo-révisionniste), AMADA les adressait à une organisation qu’elle reconnaît par ailleurs comme une organisation marxiste-léniniste.

Comment une organisation marxiste-léniniste pourrait-elle avoir été mise sur pied et comment pourrait-elle toujours encore être dirigée par des comploteurs qui depuis le début suivent une ligne contre-révolutionnaire ? C’est une position insoutenable.

Première contradiction absolue.

Poursuivons. La position sur l’unification des organisations marxistes-léninistes, donnée pour la première fois clairement dans ce même texte, est la suivante : « AMADA prend comme base de l’unification avec une autre organisation marxiste-léniniste les rapports et les textes importants concernant la ligne : politique et organisationnelle, qui sont le fondement de l’activité pratique de l’organisation. Pour arriver à l’unification, il faut aussi que nous arrivions à un point de vue uni sur les rapports et les textes les plus importants de l’autre organisation ».

Appliquant cette position à l’UC(ML)B, AMADA écrit : « AMADA estime que la ligne politique contenue dans les bulletins 1, 2 et 3 de l’UC(ML)B est un obstacle absolu à l’unité des marxistes-léninistes. La critique de la ligne de droite, intellectualiste et son fondement philosophique, l’idéalisme et la métaphysique, est une condition à l’unité des deux organisations. »

Il est clair que l’UC(ML)B, organisation marxiste-léniniste et reconnue comme telle par AMADA, est donc traitée par lui, dans les faits, exactement sur le même pied que les organisations révisionnistes, puisqu’il exige une autocritique avant l’unification.

Seconde contradiction absolue.

La plus grave puisqu’elle fait directement obstacle à l’unification communiste et à la reconstruction du Parti. Cette contradiction confirme la première et en tire toutes les conséquences, dans le sens scissionniste.

Rétablissons à présent la vérité et les principes marxistes-léninistes.

La première chose à faire, c’est donner les raisons politiques concrètes en vertu desquelles on qualifie la nature des organisations marxistes-léninistes. C’est ce qu’AMADA ne s’est jamais risqué à faire. Nous l’y avons pourtant engagé plusieurs fois, afin de faire apparaître crûment les contradictions dans lesquelles il s’empêtre. L’UC(ML)B est une organisation marxiste-léniniste, parce que (comme AMADA et Lutte Communiste) elle définit son orientation et son programme en suivant la théorie et les principes du communisme. Son activité poursuit un seul but : l’établissement de la dictature du prolétariat par la révolution violente. Sa tâche principale actuelle est la reconstruction du parti, sur la base de la démarcation avec le révisionnisme moderne et le néo-révisionnisme.

Cette ligne politique fondamentale, commune à l’UC(ML)B, AMADA et LC, est la base nécessaire et suffisante pour l’établissement du centralisme démocratique national.

Sur cette base, il y a aussi, il est vrai, des désaccords. En ce qui concerne AMADA, cette organisation marxiste-léniniste a des conceptions erronées marquées par le sectarisme, l’économisme et l’empirisme. A cause de ces erreurs, de ces déviations, AMADA a construit une ligne d’édification du parti opportuniste : AMADA est une organisation marxiste-léniniste inconséquente, une organisation marxiste-léniniste qui subit l’influence de l’idéologie bourgeoise, néo-révisionniste.

La position sur la nature de chaque organisation est naturellement une question de fait, qui ne peut être éclaircie que par une analyse concrète, un bilan scientifique de l’organisation, de sa ligne, de son activité. Cette analyse, ce bilan ne seront faits correctement que si l’on travaille à la lumière d’une idéologie marxiste-léniniste conséquente, sans opportunisme de droite ni « de gauche », sans confondre l’ami et l’ennemi.

AMADA est empêché de mener ce travail à bien, parce qu’il est aveuglé par l’opportunisme « de gauche », le sectarisme. Ce sectarisme, nous l’avions déjà vu abondamment à l’œuvre dans sa pratique, depuis la fin de 1970.

Mais il se marque aussi directement dans la façon dont AMADA interprète le marxisme-léninisme dans cette question. Car il a commencé à « théoriser » son erreur. Nous allons relever ici deux points :

1. Pour faire passer sa camelote opportuniste, AMADA s’est mis à trafiquer la ligne d’unification élaborée et appliquée par Lénine au sein du P.O.S.D.R. Nous avons déjà fait justice de ce procédé, en écrivant :

« De 1900 à 1912, Lénine a mené sans relâche la lutte pour l’établissement et le renforcement de l’unité de la social-démocratie, envers les économistes d’abord, envers les menchéviks ensuite.

Au cours de cette période, les deux sortes de contradiction ont existé. En 1901-1902, Lénine définit la contradiction avec les économistes comme une contradiction antagoniste : les économistes rejetaient les principes fondamentaux du marxisme en matière de théorie, de tactique et d’organisation. Il fallait donc que leur ligne soit battue avant que les révolutionnaires puissent s’unir avec eux. C’est ce qui se passa au 2ème Congrès, en 1903. A ce moment l’unité du Parti fut réalisée, sur la base de la ligne léniniste. De 1903 à 1912, des contradictions ne cesseront pas d’opposer les deux lignes du Parti. Ces contradictions devinrent très profondes lorsque bolchéviks et menchéviks adoptèrent devant la révolution de 1905 deux attitudes diamétralement opposées. Mais Lénine et les bolchéviks, estimant qu’elles n’étaient pas antagoniques, luttèrent résolument contre le scissionnisme et l’opportunisme des menchéviks, afin de sauvegarder l’unité du Parti. AMADA passe sous silence toute cette période et se réfère exclusivement aux déclarations de Lénine portant sur la contradiction antagonique envers les économistes. Il fait ainsi d’une pierre deux coups :

1. Il donne aux militants une idée fausse de la ligne léniniste d’unification, en insinuant que dans tous les cas, il faut aplanir les divergences avant de s’unir ; 2. il oppose des citations de Lénine qui, toutes, s’appliquent à des ennemis (les économistes) à des citations de l’UC(ML)B qui s’appliquent, elles, à des amis (le mouvement marxiste-léniniste authentique, AMADA notamment !) et il crée ainsi l’illusion que la ligne d’unification de l’UC(ML)B est ‘antiléniniste’ ! absolument tout ce que l’on veut ». (AMADA a inventé un « complot » de l’UC(ML)B afin d’empêcher l’unité des marxistes-léninistes et de retarder l’édification du Parti unique de la classe ouvrière, p. 14).

2. Dans un texte plus récent (Critique du rapport Limbourg sur la grève de la FN – début 1974) la direction d’AMADA écrit que l’UC(ML)B est « une organisation marxiste-léniniste avec une ligne opportuniste ».

Cette qualification est sensiblement plus modérée que la première (en fait, elle reproduit celle que nous-mêmes appliquons à AMADA. Mais ce radoucissement est formel, puisque la ligne de division est demeurée inchangée.

« Nous disons que l’UC(ML)B est une organisation marxiste-léniniste qui suit une ligne opportuniste de droit et intellectualiste. Nous parlons d’une ligne, parce que les fautes de l’UC(ML)B témoignent d’un ensemble général. Quand elle donne tellement l’impression qu’il s’agit seulement de ‘déviations intellectualistes », alors elle chasse le point le plus aigu de la lutte : « Nous sommes quand même d’accord sur l’essentiel, nous ne sommes séparés que par des points de détail. ‘. Il y a points de détail et points de détail. Nous pourrions encore être d’accord qu’il ne s’agit «’que de points de détail’ si nous pouvions voir dans l’UC(ML)B une attitude honnête qui veut réellement saisir les fautes et les extirper, mais cela devient quelque chose de tout à fait différent quand elle s’accroche avec bec et ongles à ces points de détail et les défend avec toute une philosophie ».

Laissons de côté le fait que nous défendions énergiquement notre ligne (c’est le droit imprescriptible de tout communiste), remarquons, une fois de plus, la façon qu’a AMADA de lancer des accusations (cette fois de « malhonnêteté ») sans l’ombre d’une preuve, et rappelons pour mémoire le fait que l’UC(ML)B n’a jamais traité ses désaccords avec AMADA – et moins que tout autre, la question de l’unité – de « points de détail ».

Ce qui nous intéresse surtout ici, c’est la façon nouvelle dont AMADA essaie de justifier son sectarisme.

L’unité serait impossible parce que, selon AMADA, l’UC(ML)B systématise ses « erreurs ».

C’est là une innovation dans la théorie de la contradiction. La théorie marxiste-léniniste enseigne que « les contradictions et la lutte sont universelles, absolues, mais les méthodes pour résoudre les contradictions, c’est-à-dire les formes de lutte, varient selon le caractère de ces contradictions : certaines contradictions revêtent le caractère d’un antagonisme déclaré, d’autres non

(nous soulignons) » (Mao Tsétoung, De la contradiction, t. 1, p. 383).

Il y a deux sortes de contradictions dans la société : les contradictions avec l’ennemi de classe et les contradictions au sein du peuple.

« Nous sommes en présence de deux types de contradictions sociales : les contradictions entre nous et nos ennemis et les contradictions au sein du peuple. Ils sont de caractère tout à fait différent » (Mao Tsétoung, De la juste solution des contradictions au sein du peuple, Textes choisis, p. 469).

Comment peut-on les distinguer ?

Est-ce un critère de logique formelle, du genre « la contradiction est ‘systématique’ ou ‘non-systématique’ », comme voudrait le faire croire AMADA ?

Pas du tout, le critère est toujours concret ; c’est un critère qui porte sur la nature de la contradiction, sur son caractère de classe.

« Pour avoir une connaissance juste de ces deux types de contradictions, il est tout d’abord nécessaire de préciser ce qu’il faut entendre par ‘peuple’ et par ‘ennemis’. La notion de ‘peuple’ prend un sens différent selon les pays et selon les périodes de leur histoire… » (Ibid., p. 469).

Cette question de fond, AMADA l’a déjà tranchée concrètement dès le moment où il a qualifié l’UC(ML)B d’organisation marxiste-léniniste.

Bien entendu, l’aggravation de la contradiction, l’accroissement du degré de « systématisation » des deux aspects opposés, peuvent transformer une contradiction, non antagoniste au départ, en contradiction antagoniste. Mais ici, de nouveau, c’est l’analyse concrète qui seule peut éclaircir la question.

« … Nous devons étudier d’une manière concrète les différentes situations dans lesquelles se trouve la lutte des contraires et éviter d’appliquer hors de propos à tous les phénomènes le terme mentionné ci-dessus (antagonisme). (…). Suivant la développement concret des choses et des phénomènes, certaines contradictions primitivement non antagonistes se développent en contradictions antagonistes, alors que d’autres, primitivement antagonistes, se développent en contradictions non antagonistes » (Mao Tsétoung, De la contradiction, t., 1, p. 383-384).

Quelles sont, à présent, les méthodes correctes pour résoudre ces deux sortes de contradictions ?

Avec les ennemis, aucune unité n’est possible. Il faut les dénoncer, les isoler, liquider leur influence sur la classe ouvrière. Dans la vie d’un parti, cela signifie, selon les circonstances : refus de l’unité, scission ou exclusion.
Avec les amis, aucun scissionnisme n’est tolérable. Il faut suivre un processus unité-critique-unité. Dans la vie d’un parti, cela signifie : créer le parti (par le haut, le Congrès) et appliquer le centralisme démocratique (les « quatre soumissions »).
Arrêtons-nous à ce point qu’AMADA a tant de peine à comprendre.

« Comme les contradictions entre nous et nos ennemis et les contradictions au sein du peuple sont de nature différente, elles doivent être résolues par des méthodes différentes. En somme, il s’agit, pour le premier type de contradictions, d’établir une claire distinction entre nous et nos ennemis, et, pour le second type, entre le vrai et le faux » (Mao Tsétoung, De la juste solution des contradictions au sein du peuple, Textes choisis, p. 471).

Quelles est la méthode à suivre, au sein du peuple ?

« La dictature ne s’exerce pas au sein du peuple. (…) Au sein du peuple, c’est le centralisme démocratique qui est appliqué. (…)

Toute question d‘ordre idéologique, toute controverse au sein du peuple ne peut être résolue que par des méthodes démocratiques, par la discussion, la critique, la persuasion et l’éducation ; on ne peut la résoudre par des méthodes coercitives et répressives. Mais afin de pouvoir exercer une activité productrice efficace, étudier avec succès et vivre dans des conditions où règne l’ordre, le peuple exige de son gouvernement (…) qu’(il émette) des ordres administratifs appropriés ayant un caractère de contrainte ». (Ibid. p. 472, 475).

Mao Tsétoung donne ensuite cet exemple de la juste méthode appliquée au sein du parti communiste :

« Ce procédé démocratique destiné à résoudre les contradictions au sein du peuple, nous l’avons résumé en 1942 dans la formule : ‘Unité-critique-unité’. Plus explicitement, c’est parti du désir d’unité et arriver, en résolvant les contradictions par la critique ou la lutte, à une nouvelle unité reposant sur une base nouvelle. Nous avons pu constater d’après notre expérience que c’est là une méthode correcte pour résoudre les contradictions au sein du peuple. En 1942, nous l’avons utilisée pour résoudre les contradictions qui existaient au sein du Parti Communiste entre les dogmatiques et la masse des membres du Parti, entre le dogmatisme et le marxisme. Les dogmatiques ‘de gauche’ avaient employé dans la lutte à l’intérieur du Parti la méthode ‘lutter à outrance, frapper sans merci’. C’était une méthode erronée. En critiquant le dogmatisme ‘de gauche’, nous n’avons pas employé cette vieille méthode ; nous en avons adopté une nouvelle : partir du désir d’unité et arriver, en distinguant le vrai du faux par la critique ou la lutte, à une nouvelle unité reposant sur une base nouvelle. (…) L’essentiel est ici de partir du désir d’unité. Car s’il n’y a pas subjectivement ce désir d’unité, la lutte une fois déclenchée, les choses finissent toujours par se gâter irrémédiablement. » (Ibid., p. 475-476)

Le centralisme démocratique au sein du parti est organisé par les statuts, sur la base des « quatre soumissions » ; l’individu doit se soumettre à l’organisation, la minorité à la majorité, l’échelon inférieur à l’échelon supérieur et l’ensemble du Parti au comité central.

A tout moment, des désaccords et des divergences apparaissent au sein du Parti. Ils sont le reflet des contradictions entre les classes et de la lutte des classes dans la société. Ces contradictions, aussi longtemps qu’elles restent au sein du peuple, sont traitées et doivent être résolues par la lutte idéologique, la critique et l’autocritique.
La minorité « se soumet à la majorité » ; elle a le droit de réserver son opinion et de la défendre au sein du Parti, en observant la discipline et l’unité d’action sur la base de la ligne du parti.

L’issue de la lutte entre les deux lignes (deux lignes non antagonistes) au sein du parti peut mener à l’antagonisme. Mais cela n’est pas inévitablement le cas :

« L’histoire du Parti communiste de l’U.R.S.S. nous montre que les contradictions entre les conceptions justes de Lénine et de Staline et les conceptions erronées de Trotski, Boukharine et autres ne se sont pas manifestées d’abord sous une forme antagoniste, mais que, par la suite, elles sont devenues antagonistes. Des cas semblables ne sont présentés dans l’histoire du Parti communiste chinois. Les contradictions entre les conceptions justes de nombreux camarades de notre Parti et les conceptions erronées de Tchen Tou-sieou, Tchang Kouo-tao et autres ne se sont pas manifestées non plus, au début, sous une forme antagoniste, mais elles sont devenues antagonistes plus tard. Actuellement, les contradictions entre les conceptions justes et les conceptions erronées, au sein de notre Parti, n’ont pas pris une forme antagoniste, elles n’iront pas jusqu’à l’antagonisme si les camarades qui ont commis des erreurs savent les corriger. C’est pourquoi, le Parti doit, d’une part, mener une lutte sérieuse contre les conceptions erronées, mais, d’autre part, donner pleine possibilité aux camarades qui ont commis des erreurs d’en prendre conscience. Dans ces circonstances, une lutte poussée à l’excès est évidemment inadéquate. Toutefois, si ceux qui ont commis des erreurs persistent dans leur attitude et les aggravent, ces contradictions peuvent devenir antagonistes. » (Mao Tsétoung, De la contradiction, t. 1, p. 384)

Voilà la théorie de la juste solution des contradictions au sein du Parti. Appliquée à la situation actuelle en Belgique, elle montre que les deux lignes dans le mouvement marxiste-léniniste, opposant AMADA, LC et l’UC(ML)B au PCMLB (Clarté-L’Exploité) sont antagonistes – il faut donc chasser ce « parti » du mouvement – et que les désaccords entre AMADA, LC et L’UC(ML)B sont non antagonistes – ils doivent donc se délimiter et s’unifier.

AMADA refuse de faire cette distinction et d’en tirer toutes les conséquences. Il tire prétexte du caractère systématique de nos « erreurs » pour traiter de la contradiction non antagoniste en contradiction antagoniste. Nous avons éclairé l’aspect théorique de cette déviation sectaire. Dans les faits, il est certain que la position d’AMADA contre l’unité des marxistes-léninistes ne pourra avoir comme conséquence que l’aggravation des contradictions existant entre nous. AMADA voudrait aplanir les désaccords avant de s’unir, mais la division ne pourra que les approfondir : c’est pour le coup qu’ils deviendront systématiques. La seule façon de résoudre les contradictions entre communistes, la seule façon d’arriver à une unité complète, c’est la lutte idéologique menée sur la base du centralisme démocratique. Toute autre proposition relève de l’anarchisme.

La ligne de division qu’AMADA veut absolument nous imposer est démentie par la pratique elle-même. L’unité d’action, tant à l’échelle nationale (tract, meeting et manifestation du 1er mai 1974 ; lutte contre la répression des ouvriers immigrés) qu’à l’échelle locale (divers meetings et manifestations), s’est développée. Lors d’actions importantes (grèves du Limbourg, à la FN, à Caterpillar, à Mol, élections), des échanges de cadres et de militants s’effectuent entre les deux organisations.
Les intérêts de la classe ouvrière, le désir d’unité, les nécessités de la pratique, tout nous rapproche et nous indique clairement le chemin à suivre.

Le fait, pour AMADA, de se définir et d’accepter en juillet 1973 la lutte idéologique avec l’UC(ML)B a été un fait positif parce qu’il permettait au mouvement d’organiser la discussion t de se soumettre au contrôle de la classe ouvrière.

A partir de septembre 1973, sur la base du texte d’AMADA et de notre réponse : « AMADA a inventé un ‘complot’ de l’UC(ML)B afin d’empêcher l’unité des marxistes-léninistes et de retarder l’édification du Parti unique de la classe ouvrière – AMADA heeft een ‘komplot’ van de UK(ML)B verzonnen om de eenheid van de marxist-leninisten te beletten en de opbouw van de ene Partij van de arbeidersklasse uit te stellen » -, des discussions s’engagèrent entre les directions et à l’échelle des centres régionaux. Ces discussions ne sont pas menées selon la ligne de l’UC(ML)B, c’est-à-dire qu’il n’est pas défini au départ par les deux organisations qu’elles s’unifieront à l’issue de la délimitation, mais elles doivent s’observer et se combattre sans pouvoir connaître la conclusion de la lutte.

La discussion est, malgré tout, pour un certain nombre de membres des deux organisations, une occasion de mieux se connaître, d’apprendre à s’estimer et de confronter leurs idées dans le but d’arriver ensemble, par la lutte, à la vérité.

Mais, en même temps, la ligne sectaire d’AMADA a des conséquences immédiates négatives qui empoisonnent les rapports entre nos deux organisations. Au cours des derniers mois, ces faits négatifs se sont multipliés. Dans une lettre envoyée à AMADA le 30 août 1974, nous avons fait la critique des principaux d’entre eux :

Le 30 août 1974

Au Comité Central d’AMADA

Camarades,

Au cours de ces derniers mois, un nombre croissant de faits indiquent que vous permettez que les relations se dégradent entre nos deux contradictions.
La lutte idéologique qui avait commencé à la fin de l’année passée risque ainsi de tourner court, et l’unité des marxistes-léninistes ne peut dès lors apparaître que comme une perspective de plus en plus lointaine.

Nous ne citons ici que les plus marquants de ces faits :

1. Discussion entre les comités centraux. En avril, vous nous avez mis en demeure d’adopter un plan de discussion arrêté par vous unilatéralement. Nous nous sommes à ce moment pliés à vos exigences arbitraires afin de ne pas compromettre la suite des discussions pour une question de procédure. Le seul résultat de tout ceci a été que depuis lors les discussions ont été interrompues de votre fait, le texte que vous vous étiez engagés à faire ne nous parvenant pas.

2. Sur notre proposition, AMADA et l’UC(ML)B ont résumé leurs positions aux fins de publication dans les deux organes centraux. Cet engagement conclu, l’UC(ML)B a aussitôt publié les deux textes dans les numéros 37 et 38 (janvier et février 1974) ; AMADA, de son côté, s’est empressé de faire connaître ses positions (63, 4 février 1974), mais, après une demi-année, n’a toujours pas publié celles de l’UC(ML)B.

3. Lors de la venue organisée de cadres et de militants à l’occasion d’une grève, il est apparu que les membres visiteurs d’AMADA, débarquent chez l’UC(ML)B avec une mission d’«observateurs ». Au lieu de mener une discussion constructive avec la cellule et le comité régional, ils s’efforcent de rassembler des munitions, qu’ils lancent ensuite dans tous les sens, à tort et à travers. A Charleroi, le résultat pratique de cette attitude a été que les camarades d’AMADA, essayant de monter la cellule Caterpillar contre la direction de l’UC(ML)B et contre le secrétaire de la cellule, ont conduit les rapports avec les militants jusqu’au bord de l’antagonisme et de la violence.

4. Les mêmes camarades visiteurs d’AMADA ayant, après la grève de Caterpillar, fait publier dans Alle Macht 72 (20 mai 1974) un rapport de leur façon, la cellule a envoyé à votre journal une réponse pour rétablir la vérité (lettre ouverte parue dans Unité Rouge, 44, juin 1974). Le Comité de Rédaction d’AMADA a refusé de publier cette rectification. Une lettre de protestation contre ce fait, adressée par la cellule au Comité de Rédaction, est elle-même restée sans réponse. C’est là une violation flagrante de la démocratie ouvrière (la démocratie bourgeoise elle-même, aussi limitée qu’elle soit, reconnaît le droit de réponse dans la presse).

5. Le Centre de Gand d’AMADA ayant posé au Comité de Charleroi de l’UC(ML)B un ultimatum sur l’ordre du jour de la discussion qu’ils mènent entre eux et Charleroi ayant rejeté cette mesure dictatoriale, Gand annonce à présent qu’il veut rompre les discussions, contrevenant ainsi à l’accord conclu entre nos deux organisations au niveau des comités centraux.

Nous estimons que l’ensemble de ces faits relèvent d’une même tactique faite de chicaneries et de manœuvres dilatoires et destinées à empêcher le rapprochement, à refréner le désir d’unité et à entraver la coopération communiste. Vous laissez ainsi s’établir et se développer un style bourgeois, inadmissible dans les rapports entre marxistes-léninistes. Nous vous invitons fermement à renoncer à ces pratiques et à mener avec nous une lutte idéologique positive et loyale. Nous espérons que vous voudrez bien tenir compte de cette demande pressante.

Nous vous proposons : 1/ De reprendre dès le mois de septembre la discussion entre les comités centraux, sur la base du texte prévu ; 2/ de veiller à ce que les discussions au niveau régional se déroulent régulièrement et correctement ; 3/ de pratiquer l’unité d’action dans les luttes et campagnes d’importance nationale ; 4/ de considérer ces discussions et ces actions comme autant de jalons vers notre unité organisationnelle.

Salutations communistes.
Comité Central de l’UC(ML)B

Suite à cette lettre, notre réponse de janvier 1974 a finalement été publiée, accompagnée d’une réplique d’AMADA, portant sur un texte interne de l’UC(ML)B datant de mai 1973 (numéro spécial, 15 septembre 1974). AMADA concentre son offensive contre la direction de l’UC(ML)B, sur qui de nouvelles calomnies sont déversées. A présent, « la direction de l’UC(ML)B prépare sa trahison ! » Le texte développe l’attaque qui avait été amorcée lors de la rectification Caterpillar : AMADA voudrait faire croire que l’idéologie du Comité Central de l’UC(ML)B est fondamentalement caractérisée par le mépris des masses et la position bourgeoise devant la lutte des classes ; que le Comité Central de l’UC(ML)B rejette la ligne de masses et la théorie marxiste de la connaissance ; que la pratique de l’UC(ML)B est entièrement vouée à l’échec.

De telles accusations gratuites ne déconsidèrent que ceux qui les lancent. L’activité de l’UC(ML)B progresse dans tous les domaines, et la pratique impose ainsi d’elle-même le démenti le plus cinglant aux outrances sectaires d’AMADA.

L’UC(ML)B voit dans cette dernière attaque un nouveau pas fait par AMADA sur le chemin qui mène au scissionnisme. Elle proteste contre l’esprit destructeur dans lequel AMADA persiste à vouloir mener la lutte idéologique.

Envers la classe ouvrière, AMADA, tient à se présenter toujours, de façon mensongère, comme étant « le Parti en construction », « la seule organisation qui construise le Parti et prépare la révolution ». Dans l’introduction au résumé de sa critique à l’UC(ML)B , AMADA a écrit (AMADA 63/74) que les communistes doivent agir dans un esprit d’unité. La pratique a montré que c’est une vérité qu’il est plus facile d’écrire que d’appliquer.

De son côté, l’UC(ML)B a continué à continuera à critiquer dans un esprit d’unité les déviations et les erreurs d’AMADA. Les dernières critiques en date ont été faites dans les brochures « AMADA et la question du Chili », « Critique du programme électoral d’AMADA », « La position communiste dans la lutte contre le chômage et les licenciements », dans Unité Rouge 47 (sur la lutte des paysans) et dans une lettre relative à la défection du candidat Goossens.

Afin de régler au mieux les contradictions qui surgissent au sein du mouvement à l’occasion de certaines exclusions et de certaines désertions de membres, l’UC(ML)B a proposé une méthode pour résoudre les difficultés (voir annexe). Bientôt se tiendra la première Conférence Nationale de l’UC(ML)B. A cette occasion nous avons demandé à AMADA et à Lutte communiste d’émettre leur avis sur les projets de plate-forme politique, de statuts et de rapports d’activité du Comité Central, pour clarifier la lutte idéologique et marcher vers l’unité. Nous avons également invité ces organisations à envoyer des observateurs à la Conférence.

Conclusion

Après avoir refusé la discussion active et positive pour l’unité pendant près de trois ans, AMADA est passé brusquement de l’inertie à la dénonciation, du refus de la lutte idéologique à la lutte à outrance. Il est clair que la théorie de l’antagonisme, du « complot » et de « la trahison », inventée par AMADA, ne tombe pas du ciel. Elle est le prolongement, la suite logique des théories et des pratiques sectaires que cette contradiction n’a pas cessé d’imposer au mouvement depuis ses origines.

Lorsqu’il n’existait pas de désaccords notables, AMADA, n’était « pas prêt » à l’unité. Il était dès lors à prévoir – et il s’est avéré – que lorsque les désaccords apparaîtraient, AMADA s’empresserait de les grossir outre mesure et de les déclarer « obstacles absolus à l’unification ».

Alors que toutes ses « justifications » précédentes tombaient en ruines, il devait recourir aux méthodes habituelles des sectaires. Nous savons bien que les « paroles effroyables » et les « accusations menaçantes » sont le propre de la période des cercle, ainsi que le notait ironiquement Lénine (t. 10, p. 396). Ces attitudes « radicales » trahissent la peur des contradictions, la peur de la lutte, le manque de confiance dans sa propre ligne.

Où donc y a-t-il « complot » ? Chez ceux qui, minoritaires dans le mouvement, se déclarent prêts à l’unité et à l’application du centralisme démocratique, ou chez ceux qui, majoritaires dans le mouvement, posent comme exigence à l’unification l’adhésion de tous à leur ligne opportuniste ?

Selon la théorie communiste, les communistes sont tenus de s’organiser au sein d’un seul parti, et ils doivent résoudre les contradictions entre eux selon des règles qui prévoient la soumission de la minorité à la majorité et le droit de la minorité de réserver son opinion et de la défendre à l’intérieur du parti, dans le respect de la discipline et de l’unité d’action. Toute autre « méthode » est le lot des anarchistes. La ligne qui consiste à vouloir aplanir les désaccords avant l’unification, est vouée à l’échec. Si elle continuait à être appliquée, c’est le contraire qui se passerait : le refus d l’unité aurait en définitive pour conséquence que les contradictions s’aggraveraient et s’envenimeraient. Ceci est une loi objective de la dialectique.
Les conditions mises par AMADA à l’unité sont irrecevables parce que personne ne peut exiger de communistes qu’ils renoncent à lutter pour leurs idées.

AMADA lui-même risque d’ailleurs d’éclater en autant de morceaux qu’il surgira en son sein de contradictions de ligne, du moment qu’elles seront « systématiques ».

Montrer qu’il n’y a pas d’antagonisme entre AMADA et l’UC(ML)B et faire reconnaître et appliquer les principes communistes d’organisation : telle est et telle reste aujourd’hui la tâche principale à remplir dans la lutte pour l’unification de notre mouvement.

Septembre 1974

ANNEXE

à AMADA
à LC(m-l)

POSITION DE L’UC(ML)B SUR LES EXCLUSIONS ET LES DÉSERTIONS DANS LE MOUVEMENT MARXISTE-LÉNINISTE

Situation actuelle

A la suite des trahisons révisionnistes du P.C.B. (Drapeau Rouge), du P.C.B. (Voix du Peuple) et le P.C.ML.B (Clarté-Exploité), la classe ouvrière de Belgique est restée sans Parti pour la guider à la révolution socialiste. Depuis 1970, un nouveau mouvement marxiste-léniniste s’est créé et se développe sur des bases révolutionnaires. Il ne fait aucun doute qu’il sera à l’origine de la fondation d’un véritable Parti communiste qui reprendra le flambeau du PCB de 1921. Cependant l’emprise révisionniste est loin d’être déjouée.

Elle se manifeste surtout par la dispersion des organisations marxistes-léninistes (AMADA, LC(ml), UC(ML)B) faisant ainsi régner une ambiance fractionnelle parmi les marxistes-léninistes. L’esprit de cercle et le sectarisme sont le seul obstacle à l’unité des marxistes-léninistes et retardent la reconstruction du Parti.

Dans le mouvement marxiste-léniniste véritable, LC(ml) et AMADA sont les plus influencés par le révisionnisme et propagent une ligne sectaire, une ligne de division des marxistes-léninistes. Ces deux organisations portent une lourde responsabilité dans le développement du scissionnisme néo-révisionniste, en s’opposant à la juste proposition d’unité formulée par l’UC(ML)B en janvier 1972 et en défendant des théories non marxistes-léninistes sur le refus de toute minorité dans le Parti.

Plus que jamais, le sectarisme doit être combattu comme la déviation la plus grave des principes marxistes-léninistes dans les conditions présentes, comme l’aide la plus grande que des marxistes-léninistes véritables apportent à la bourgeoisie. La domination de l’esprit de cercle a aussi pour conséquence d’encourager les désertions, les indisciplines. D’autre part, la ligne sectaire peut entraîner et entraînera inévitablement des exclusions à tort alors que les contradictions sont non antagoniques, et elle ne permet pas aux militants de distinguer les contradictions antagoniques des contradictions non antagoniques, ce qui encourage certains à déserter et à commettre des indisciplines.

Nos tâches

Devant cette situation qui fait le plus grand tort à la révolution, qui freine la confiance de la classe ouvrière dans le mouvement marxiste-léniniste, l’UC(ML)B doit renforcer sans cesse sa lutte pour l’unité des marxistes-léninistes et doit combattre le sectarisme et le scissionnisme avec la plus grande intransigeance. Dans nos positions et dans nos actes, tout scissionnisme, tout fractionnisme, tout sectarisme doit être écarté. Aucun compromis n’est possible avec les manifestations les plus insidieuses du révisionnisme dans nos rangs. Dans la lutte pour unir les marxistes-léninistes, l’UC(ML)B a fait progresser l’esprit du Parti. Quelles leçons tirons-nous de notre expérience de lutte pour l’unité des marxistes-léninistes ?

1. Seuls les défenseurs conséquents de l’unité des marxistes-léninistes, de l’esprit de Parti sont à même de tracer la voie de la reconstruction du Parti et de tenir en échec le révisionnisme et le scissionnisme.

2. Autant la fermeté sur les principes est indispensable pour combattre la division des marxistes-léninistes et l’esprit de cercle, autant la méthode utilisée pour faire pénétrer l’esprit de Parti doit être empreinte de patience et de souplesse.
L’impatience, la précipitation devant la difficulté des tâches d’unification ne sont rien d’autre que des manifestations de sectarisme.

Lorsque le sectarisme sera vaincu totalement et que les marxistes-léninistes seront unis sur une juste ligne, les conditions seront très différentes. Le fractionnisme et le scissionnisme, s’ils réapparaîtront, seront aussitôt dénoncés et rejetés par la grande majorité du Parti, soucieuse de conserver l’unité du Parti comme la prunelle de ses yeux.

Notre position envers les exclusions et les désertions

« Il faut encourager chaque camarade à tenir compte des intérêts de l’ensemble. Chaque membre du Parti dans chaque secteur, chaque parole ou acte, tout doit avoir pour point de départ les intérêts de l’ensemble du Parti. Nous ne tolérerons pas la moindre infraction à ce principe. » (Mao Tsétoung, Citations, p. 299)

La question des exclusions et des désertions n’est pas une question interne à l’organisation d’où ils proviennent. En effet quand le Parti existe, aucun membre ne peut soutenir à l’extérieur un exclu ou une désertion, mais il a la possibilité et le devoir de mener à l’intérieur la lutte idéologique pour que les cas soient traités correctement.

Du fait de la ligne sectaire, le Parti n’existe pas encore, et il n’y a évidemment pas la règle statutaire permettant de traiter la question à l’intérieur d’une autre organisation communiste. Force est de prendre position à l’extérieur.

C’est un devoir qui guide l’intérêt de l’ensemble du mouvement marxiste-léniniste. Il faut être intransigeant sur ce principe, ce qui signifie concrètement :

a) Il faut s’efforcer dans tous les cas d’établir une collaboration étroite entre les deux organisations marxistes-léninistes concernées : échange de rapports et discussions sur tout ce qui intéresse les cas qui se posent.

b) Envers les exclus justifiés (pour reniement de principes, actes anti-communistes, manquement grave à la morale communiste) : l’UC(ML)B les considère comme exclus du mouvement marxiste-léniniste véritable.

c) Envers les militants ayant déserté : l’UC(ML)B estime qu’ils ont commis une faute grave, scissionniste. C’est pourquoi il leur sera exigé une autocritique préalable à leur réintégration. L’autocritique doit porter sur leur faute fondamentale (scissionnisme). Sur la base de leur autocritique, ils poseront leur candidature à l’organisation d’où ils proviennent afin de prouver la sincérité qui doit guider tous les marxistes-léninistes. Si cette organisation refuse de les réadmettre et au cas où la collaboration entre les organisations concernées ne se fait pas, chaque organisation prend ses responsabilités devant le mouvement marxiste-léniniste et la classe ouvrière.

d) Envers les exclus injustifiés : il faut rétablir la vérité sur leurs droits en éclairant l’organisation d’où ils proviennent sur les méthodes à suivre pour résoudre les contradictions entre marxistes-léninistes.

La méthode utilisée dans les rapports entre marxistes-léninistes et avec ceux qui désirent se corriger doit être la persuasion, et doit être empreinte de patience, compte tenu de l’état actuel du mouvement marxiste-léniniste. Il faut inlassablement expliquer la situation actuelle et les tâches qui en découlent dans le but de réaliser l’unité des marxistes-léninistes et de faire régner un fonctionnement de Parti qui sonnera le glas de l’ambiance fractionnelle actuelle.

30.8.1974


Revenir en haut de la page.