[Article paru au début des années 2000 dans la revue Front Social.]

pcer-3-2.jpgLe Parti Communiste d’Espagne (reconstitué) est directement issu de l’élan révolutionnaire des années 1960, où se conjuguent la crise capitaliste, la guerre du Vietnam, la révolution culturelle en Chine populaire, le mouvement de mai-juin 1968 en France…

Ce sont des années où dans tous les pays du monde le révisionnisme des « Partis Communistes » pro-soviétiques est critiqué et où de nouvelles organisations sont formées.

En Espagne les choses se passent néanmoins légèrement différemment.

En effet, au lieu de vouloir dépasser les anciens Partis Communistes en apprenant de Mao Zedong, comme c’est le cas des futures Brigades Rouges, de la Gauche Prolétarienne, etc., les communiste d’Espagne « reconstituent » le Parti Communiste d’Espagne.

Ils/Elles entendent de fait continuer la Guerre Antifasciste commencée lors des années 1930.

Dans son Manifeste-Programme, le PCE[r] nous dit ainsi que :

« La crise économique capitaliste mondiale eut aussi une forte répercussion en Espagne, dans un moment où l’on touchait le plafond des plans de développement industriel, le régime entrait entièrement dans la crise politique et commençait, en tâtant le terrain, la manœuvre d’ »ouverture » avec laquelle il aurait une sortie.

Le mouvement ouvrier et populaire s’était remis des effets de la déroute subie en 1939 et des longues années de terreur fasciste ouverte, et chaque fois qu’échoua la politique de réconciliation carriliste [de Carillo, leader révisionniste du PC d’Espagne] et ses consignes pour une « grève nationale pacifique », le mouvement commençait à se diriger vers la voie de la résistance et de la lutte armée.

Ce contexte général va donner lieu à l’apparition de nouveaux mouvements ouvriers organisés. L’Organisation Marxiste-Léniniste d’Espagne (OMLE) fut l’une de ces premières organisations communistes nées dans cette période (1968) ».

Le PCE[r] est directement issu de l’OMLE en juin 1975, à un moment crucial où l’Espagne passe du fascisme ouvert à un régime se prétendant « normalement démocratique ».

Comme le dit le Manifeste-Programme du PCE[r],

pcer-3.jpg« dans un moment d’aggravation maximale de la crise politique du régime, ainsi que de toutes les contradictions et tensions sociales, le Congrès constitua une plate-forme qui permettra au PCE[r], à peine né, de jouer un rôle important dans la vie politique, tout particulièrement dans la dénonciation de la Réforme ».

« En 1975, quand Franco disparaît de la scène politique et qu’on intronise la monarchie des Bourbon, en suivant les consignes de succession établies par le dictateur, les anciennes formes de domination fasciste venaient d’êtres démolies par la lutte des masses des dernières années. Il était clair que le régime ne pouvait plus tenir debout en conservant son caractère ouvertement fasciste.

D’un autre côté, la stabilité de ces formes engourdissait chaque fois d’avantage la réalisation des plans de la classe dominante espagnole, poussée à son intégration totale, économiquement et militairement, dans le bloc impérialiste.

C’est ainsi qu’on ouvre le pas, au milieu de la division des chapelles politiques et des groupes financiers, à la réforme politique ».

D’un côté le PCE[r] ne remet donc pas en cause la ligne politique du PC d’Espagne, pourtant révisionniste comme on a pu le voir dans la guerre antifasciste. Le PC d’Espagne avait alors positivement rejeté les anarchistes et les trotskystes, mais n’avait pas dirigé la lutte, se cachant derrière le Front Populaire comme l’a fait à la même époque le PC en France (et à l’opposé du PC de Chine).

Le PCE[r] reste sur ce terrain et se veut simplement « marxiste-léniniste » ; il ne critique pas les erreurs du passé, il ne fait que se « reconstituer ».

De l’autre côté, justement parce qu’il conserve dans sa ligne politique de nombreux enseignements de Lénine et Staline, il rejette la pseudo transition démocratique, et à ce titre ne sombre justement pas comme les anarchistes et les trotskystes dans l’opportunisme le plus complet. Toute la culture du PCE[r] et des GRAPO se fondent sur cette contradiction.

Le programme du PCE[r] : entre ambiguïté anti-Parti et pragmatisme

Le Manifeste-Programme du PCE[r] dit :

« Le Parti Communiste d’Espagne (reconstitué) est un parti politique prolétaire, noyau dirigeant et détachement de l’avant-garde la classe ouvrière.

Notre organisation se considère comme héritière et continuatrice de l’œuvre révolutionnaire entreprise par le Parti Communiste d’Espagne que commença José Diaz, le Parti Communiste d’Espagne aujourd’hui décadent, transformé par le révisionnisme en un instrument de l’oppression et de l’exploitation capitaliste.

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Le Parti Communiste d’Espagne (reconstitué) forme une partie du mouvement communiste international et est guidé par les principes du marxisme-léninisme dans l’élaboration de sa ligne politique et dans son action révolutionnaire ».

« Le PCE(r) se fixe comme objectif primordial l’avènement du communisme, ce qui veut dire, la suppression de la propriété privée capitaliste et des classes, avec lequel se créeront les conditions nécessaires pour l’extinction de l’Etat.

A cette fin le Parti se propose principalement d’organiser la classe ouvrière dans la lutte contre le système capitaliste, pour parvenir à la démolition complète de son appareil bureaucratico-militaire, et l’instauration de la dictature du prolétariat contre la bourgeoisie.

Actuellement le Parti centre ses principaux efforts sur l’éducation et l’organisation politique de la classe ouvrière, défend l’unité d’action avec d’autres organisations ouvrières et populaires et la lutte de résistance contre le fascisme et l’impérialisme, lutte qui conduit à accumuler les forces révolutionnaires et a crée les conditions pour le déroulement de la Guerre Populaire Prolongée et le triomphe de l’insurrection armée générale.

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Le Parti pose et défend les droits politiques, économiques et sociaux immédiates des travailleurs et applique une ligne de masse, de manière à ce qu’elle lui permette de demeurer lié aux luttes et de rassembler et synthétiser les expériences de la lutte.

Mais comme chef politique de la classe ouvrière, le Parti ne marche pas à la remorque d’un mouvement spontané, sinon pour s’efforcer d’élever les ouvriers jusqu’à la compréhension de leurs véritables intérêts de classe, pour marquer les objectifs à conquérir et les diriger dans la lutte.

Le Parti doit inculquer la discipline consciente aux masses d’ouvriers sans parti, étendre les méthodes de lutte révolutionnaire, la solidarité de classe, l’esprit d’organisation et la fermeté, la combativité ; pour cela, le Parti doit être la personnification de la discipline, de l’organisation et de l’abnégation révolutionnaire » (Manifeste Programme).

« Le fascisme a été le principal instrument dont s’est servi l’oligarchie financière et des propriétaires fonciers pour soumettre les masses populaires, et mener à bien le développement économique du pays par la voie monopoliste. Ce double caractère, monopoliste (impérialiste) et fasciste, est la principale caractéristique de l’Etat espagnol.

Le développement de la grande industrie, l’agriculture capitaliste, le commerce a grande échelle, les transports, etc.. a conduit à terme à la fusion de tous les secteurs économiques avec la banque et la mise ne place de l’Etat à leur service ; l’oligarchie a créé les conditions matérielles pour la réalisation du socialisme, a fait croître le prolétariat et l’a éduqué dans l’école de la guerre civile quasi permanente.

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En accord avec les conditions générales que nous venons de mettre en valeur, la révolution à mener en Espagne peut seulement avoir un caractère socialiste. Il n’existe pas en notre pays d’étape révolutionnaire intermédiaire, aucune « marche de la chaîne historique  » antérieure à la révolution socialiste.

Par conséquent, l’objectif stratégique que poursuit le Parti est la démolition de l’Etat fasciste, l’expropriation de l’oligarchie financière – propriétaire terrienne et l’instauration de la République Populaire.

Le prolétariat est la classe la plus exploitée et opprimée, la mieux organisée et la plus révolutionnaire de la population et par cela même la classe appelée a diriger d’autres secteurs populaires ; le prolétariat constitue la principale force motrice de la révolution.

Joints à la classe ouvrière, les petits paysans et beaucoup d’autres travailleurs et semi-prolétaires (petits transporteurs, les employés, autonomes, etc.), ainsi que les peuples des nations opprimées et les intellectuels progressistes pourront prendre une part active dans la lutte pour la destruction du capitalisme ou observer une position de neutralité.

De ces secteurs, les plus proches du prolétariat sont les semi-prolétaires et les petits paysans qui plient sous les dettes des banques. Dans la perspective de leurs intérêts futurs, tous ces secteurs sont objectivement intéressés par la révolution socialiste, quoique oscillant continuellement entre les positions conséquemment démocratique et révolutionnaire du prolétariat et celles du réformisme bourgeois.

La tactique du Parti est de les chercher, de les attirer aux côtés du prolétariat, avec pour but de renverser par la force l’oligarchie financière et propriétaire terrienne, et de gagner la petite bourgeoisie ou de tenter de la neutraliser (…).

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Avec l’instauration de la République Populaire commencera une période qui ira de la destruction de l’Etat fasciste et impérialiste à l’instauration de la dictature du prolétariat.

Cette période couvrira une courte étape de transition qui pourra être considérée aussi comme le commencement de la restructuration socialiste, laquelle devra être présidée par un gouvernement provisoire qui agira comme organe des grandes masses du peuple soulevé en armes.

La principale mission de ce gouvernement sera d’écraser l’opposition violente de la grande bourgeoisie et des autres secteurs réactionnaires, et de garantir le déroulement des élections véritablement libres pour une Assemblée Constituante.

Cette Assemblée élaborera la constitution et nommera un nouveau gouvernement démocratique.

Le programme du Parti pour une étape de transition se résume en seize points :

1) Formation d’un Gouvernement Provisoire Démocratique Révolutionnaire.

2) Création de Conseils ouvriers et populaires comme base du nouveau pouvoir.

3) Dissolution de tous les corps répressifs de la réaction et armement général du peuple.

4) Libération des prisonniers politique antifascistes et mise en procès de leur tortionnaires et assassins contre-révolutionnaires. Large grâce pour les prisonniers sociaux.

5) Expropriation et nationalisation des banques des grandes propriétés agricoles, des monopoles industriels et commerciaux et des principaux moyens de communication.

6) Reconnaissance au droit à l’autodétermination des peuples basque, catalan et galicien. Indépendance pour la colonie africaine des Canaries. Retour de Ceuta Y Melila au Maroc.

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7) Suppression de tous les privilèges économiques et politiques de l’Eglise ; séparation radicale de l’Eglise et de l’école. Liberté de conscience.

8) Liberté d’expression, d’organisation et de manifestation pour le peuple. Le droit de grève sera une conquête irréversible des travailleurs.

9) Incorporation de la femme, sur un pied absolue d’égalité avec l’homme, dans la vie économique, politique et sociale.

10) Reconnaissance de tous les droits électoraux politique, sociaux, etc. des travailleurs immigrés. Suppression de toute forme d’oppression et de discrimination raciale, sexuelle et culturelle.

11) Réduction de la journée de travail. Travail pour tous. Amélioration des conditions de vie et de travail.

12) Logements dignes et économiques ; sécurité sociale, santé et enseignement a la charge de l’Etat.

13) Droit de la jeunesse à recevoir une formation intégrale et gratuite, droit à un travail sain et bien rétribué, de disposer de locaux et d’autres moyens pour le libre déroulement de ses activités.

14) Sortie immédiate de l’OTAN et de l’UE, ainsi que des autres organisations créées pour l’agression et le pillage impérialiste.

15) Démantèlement des bases militaires étrangères sur notre territoire et réintégration de Gibraltar.

16) Application des principes de coexistence pacifiques dans les relations avec tous les pays. Appui de la lutte de libération des peuples opprimés.

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Seul un gouvernement révolutionnaire formé par les représentants des organisations populaires, qui agit comme organe de l’insurrection populaire victorieuse, possédera la force et l’autorité nécessaire pour organiser les élections et une assemblé de représentants du peuple.

Avec le nouveau gouvernement se mènera au bout la démolition complète de la vieille machine étatique de la bourgeoisie, sur laquelle siège la domination et les privilèges du capital.

Ceci est la condition première de toute révolution véritablement démocratique et populaire. Seront entreprises immédiatement les transformations économique et sociales nécessaires, ceci facilitera ainsi l’établissement du pouvoir populaire et l’hégémonie politique du prolétariat.

Tout pouvoir qui se dit populaire doit avoir pour base un peuple en arme et des organisations politiques authentiquement démocratiques.

Organisant sa propre armée et sa propre police, et la fondant sur les organes politiques du pouvoir, les masses révolutionnaires pourront défendre leur conquêtes et exercer le contrôle sur le gouvernement.

Les masses populaires pourront élire librement et révoquer, dans les cas nécessaires, leurs représentants.

Dans chaque usine, entreprise agricole, unité militaire, centre d’enseignement, village, cité, district, etc., seront élus des Conseils. Ils seront les organes de décisions et d’exécution du nouveau pouvoir, avec une autorité et autonomie propre pour organiser et diriger tout type d’activités sociales : depuis le travail jusqu’au sport, et depuis la police jusqu’à l’ administration de la justice.

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Tous les prisonniers communistes, indépendantistes, anarchistes, antimilitaristes, anti-impérialistes et antifascistes seront immédiatement libérés. C’est aujourd’hui une sincère aspiration que ne se fera pas attendre. […]

Les tortionnaires et les criminels contre-révolutionnaires s’étant fait remarquer dans la répression seront détenus et punis de manière exemplaire […]. Ceci ne se fera pas par soif de vengeance, mais par nécessité politique, les réactionnaires, même après la révolution, essaieront de récupérer le pouvoir et leurs privilèges perdus, la révolution devra se défendre face a eux, les réprimer et les en dissuader.

La révolution mènera au bout la nationalisation des moyens essentiels de production ; cela ne veut pas dire l’expropriation des épargnants ou des petites propriétés légitimement acquises à travers le travail, l’effort personnel et familial , comme peut l’être la terre des petits paysans, ni tous ces biens ou objets d’usage particulier ou domestique (comme les logements, l’automobile, etc.).

Le nouveau pouvoir mettra a la disposition des familles et personnes sans toit les habitations inoccupées. Le capital et les grandes entreprises nationalisées passeront à l’Etat et seront contrôlées par les Comités ou Conseils Ouvriers et Populaires. De cette manière, les travailleurs se convertiront en maîtres effectifs de l’économie nationalisée et la mettront à leur service.

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Le principe de l’autodétermination est un droit universellement reconnu de la démocratie politique que le nouvel Etat né de la révolution en Espagne devra rendre effectif.

Dans le délai le plus court possible sera mis sur pied une consultation pour que les peuples des nationalités décident de fonder un Etat séparé ou de continuer d’être unis sur un plan d’égalité économique absolue.

Quel que soit le résultat, le nouveau gouvernement, les partis politiques et les organisations populaires devront respecter la décision librement exprimée par les peuples des nations et faciliter l’exercice de tous leurs droits.

Le nouveau Pouvoir Populaire mènera à bien l’expropriation des contre-révolutionnaires, de tous ceux qui auront collaboré activement avec la contre-révolution ; les autres qui, quoique étant petits propriétaires, se placeront du côté du peuple, l’Etat les aidera de manière effective, moyennant crédit à intérêts bas ou nuls ; ils paieront un prix juste pour leurs produits, prestations, aides techniques, etc. Ces mesures seront en accord avec les intérêts politiques et économique de la révolution.

Après le renversement de l’oligarchie, les principaux moyens de communication, d’édition, de distribution, etc.. passeront sous le contrôle et la direction du peuple grâce à ses organisations représentatives. C’est seulement de cette manière que pourra être assuré l’exercice de leur droits d’expression et une information vraie et objective, ainsi qu’une culture véritablement démocratique ».

Comme on le voit, le rôle dirigeant du Parti Communiste, un principe essentiel pourtant, n’est pas clairement établi. Le gouvernement est « révolutionnaire démocratique »… afin de pouvoir rassembler les différentes couches sociales contre « l’oligarchie ».

La dictature du prolétariat n’est pas directement instauré, car une période intermédiaire est nécessaire, celle de la « république populaire ».

Cette position a également été celle du PCMLF [PC Marxiste-Léniniste de France] dans les années 1960 ; le PCMLF lui aussi « reconstituait » simplement le PC et ne voyait pas en le maoïsme une étape supérieure, même s’il revendiquait de Mao Zedong. Le PCMLF a été fondé à partir de gens comprenant que le PC en France avait sombré dans le révisionnisme, mais ils n’ont pas réussi à sortir du bourbier et ont conservé un schéma petit-bourgeois.

De fait, le PCE[r] est un parti de ce type : critique du révisionnisme, mais refusant de couper les ponts avec.

L’idéologie du PCE[r] : marxiste-léniniste anti-maoïste

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Le PCE[r] se revendique de Marx, Engels, Lénine et Staline. Pour ce parti, il n’y a pas de critique de Staline qui tienne. Mao Zedong est considéré comme un révolutionnaire, mais ses apports (en philosophie notamment) sont considérés comme erronés. Le PCE[r] s’oppose catégoriquement au marxisme-léninisme-maoïsme.

De fait, le PCE[r] défend un point de vue révisionniste, tout en s’en défendant. D’un côté il dit : l’URSS d’après Staline et la Chine d’après Mao Zedong sont révisionnistes, la clique au pouvoir dans ces pays est révisionniste. Mais de l’autre, l’URSS jusqu’en 1991 et la Chine encore aujourd’hui sont considérés comme socialistes.

Pour comprendre l’ampleur de ce qui est pour nous maoïstes un délire complet, regardons ce que disait le secrétaire général du PCE[r] en 1991 :

« Pour toutes ces raisons, et comme le confirment l’analyse historique et les événements les plus récents, nous nions que puisse se produire un recul ou un retour au capitalisme dans l’ensemble des pays socialistes.

Et même dans l’hypothèse où se déroulerait un phénomène de ce type, nous devrions considérer que le socialisme parviendrait à réapparaître avec des forces décuplées. Il faut avoir en tête que le système socialiste est fondamentalement composé de l’URSS et de la RPC [république populaire de Chine], deux grands pays extrêmement peuplés, de grande superficie, aux énormes capacités économiques, scientifiques, technologiques et militaires.

Ils sont de plus dotés d’une considérable expérience en matière d’organisation et de direction des affaires publiques. Il est vrai que les révisionnistes et la bourgeoisie ont fait beaucoup de mal aux masses populaires de ces pays, les menant au bourbier dont il est assez difficile de sortir maintenant, mais ils n’ont pas atteint, ni n’atteindront l’objectif d’y rétablir le capitalisme « .

En conséquence, le PCE[r] travaille par exemple avec les gens de « northern compass », une revue canadienne travaillant à la « reformation de l’Union Soviétique » avec des vieux schnocks issus des « Partis Communistes » favorables à l’ancien social-impérialisme russe.

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Nous maoïstes sommes en opposition catégorique avec cette interprétation des choses.

Pour nous, avec la prise du contrôle du PC d’URSS par Khrouchtchev et sa clique, l’URSS devient social-impérialiste. Le socialisme, dirigé par le PC, devient un capitalisme d’Etat au service d’une clique bureaucratique menant une politique fasciste en URSS. Les pays socialistes de l’Est deviennent des néo-colonies exploitées par ce que le communistes de Chine ont appelé à juste titre  » le social-impérialisme russe « .

De même, avec l’accession au pouvoir en Chine de Deng Xiaoping et l’écrasement des dirigeants communistes appelés par les révisionnistes chinois « la bande des quatre », la Chine devient un État fasciste, un État semblable à l’URSS : un capitalisme d’État au service d’une bourgeoisie bureaucratique.

En ce sens, nous maoïstes, rejetons catégoriquement l’idéologie du PCE[r]. Nous sommes solidaires de cette force progressiste, mais ne nous considérons pas cette organisation comme réellement communiste. Nous pensons qu’on ne peut pas être communiste sans défendre le marxisme-léninisme-maoïsme.

C’est pourquoi nous avons rejeté les partisans de cette « ligne » pro-soviétique, qui d’ailleurs aujourd’hui tentent en France de former un « secours rouge international » avec uniquement des groupes anti-maoïstes défendant un telle ligne .

Car nous maoïstes ne sommes pas des opportunistes, nous ne faisons pas des constructions alambiquées pour éviter de regarder les masses en face et d’assumer le travail révolutionnaire immense qui est à faire.

Nous maoïstes assumons toutes les facettes du communisme, nous ne sommes pas des fétichistes de la « bonne vieille union soviétique » ou de n’importe quel autre bibelot idéologique.

Nous maoïstes plaçons la politique au poste de commande.

Nous ne faisons pas de la politique « au nom des masses », nous ne faisons pas de l’ »anti » (anti-répressif, anti-fascisme…). Nous avons des objectifs : la révolution, le communisme. Nous avons des principes, une morale, une base : le marxisme-léninisme-maoïsme.

En conséquence, notre solidarité avec les révolutionnaires du PCE[r] n’est pas un chèque en blanc à leur ligne politique.

Les GRAPO

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Nous avons vu que le PCE[r] considérait qu’avant la dictature du prolétariat il y avait une phase intermédiaire. Nous avons également vu que le PCE[r] était le PC d’Espagne de la guerre antifasciste reconstitué.

Une conséquence directe est l’appui du PCE[r] à la guérilla, mais non sa direction. Tous les membres du PCE[r] ne sont pas dans les GRAPO, et il y a dans les GRAPO des antifascistes, des démocrates, etc. qui ne sont pas du PCE[r].

La différence pratique avec le maoïsme est flagrante : pour le maoïsme l’armée est directement organisé et dirigé par le Parti (ainsi l’Armée Populaire de Libération est dirigée par le PC du Pérou, le TIKKO par le TKP(ML)…).

Les Groupes de Résistance Antifasciste du Premier Octobre ont été formé en été 1975, cinq mois après la reconstitution du PC d’Espagne, à partir du noyau du PCE[r] s’occupant des actions militaires (financement, répression des indicateurs…).

Le PCE[r] avait décidé de la création d’une organisation

« encadrant le plus grand nombre possible de combattants anti-fascistes, formant ses propres cadres (ne devant pas être nécessairement de membres du Parti ni professer l’idéologie communiste) ; en outre, on exigeait que l’Organisation agirait dorénavant de façon autonome du Parti et qu’elle adopterait ses propres décisions ».

Ainsi les GRAPO ne sont pas le PCE[r], et vice-versa. Le PCE[r] ne fait qu’appuyer les GRAPO, qui sont également composés d’antifascistes, de démocrates, etc. (même si le PCE[r] a reconnu être la principale origine des militantEs des GRAPO).

Les premières actions des GRAPO consistèrent en une réponse claire à ce qui est connu comme « l’été de la terreur », où les forces fascistes réprimèrent violemment les masses populaires, et où furent passées les premières lois antiterroristes (qui furent élargies par les gouvernements « démocratiques »).

Le 2 août deux membres de la Guardia Civil furent attaqués par les GRAPO en plein centre de Madrid, un fut tué et l’autre grièvement blessé.

Le début des GRAPO fut un processus difficile. Comme ils le disent eux-mêmes :

pcer-10.jpg« Au début, il y avait la pratique. On peut considérer que nous fûmes poussés à prendre les armes par la nécessité d’affronter le fascisme au moment où cet ennemi de tout le peuple prétendait se perpétuer en faisant appel, comme il l’a toujours fait, à la répression et au terrorisme ouvert.

Certes, les conditions n’étaient pas déjà les mêmes d’autres époques antérieures. Le régime avait épuisé ses possibilités dans ce domaine. Évidemment, nous avions une idée très nébuleuse sur ce sujet.

Nous nous sentions surtout solidaires avec les victimes de la répression ; quelques fois nous fûmes aussi le but direct de la répression, mais nous ne savions pas comment l’affronter. La charlatanerie dominante aux milieux de la gauche la plus « radicale » nous attristait et, nous mêmes, nous nous y voyions impuissants et extraordinairement limités par la faiblesse de l’Organisation et par la pénurie de moyens matériels.

En sorte qu’il n’y eût rien d’autre à faire qu’aller au combat avec ce que nous avions : quelques pistolets, des matraques, des marteaux, etc. Nous devions arracher des mains de l’ennemi les armes que nous avions besoin ».

Le 27 septembre l’Etat fasciste exécuta cinq antifascistes (deux membres d’ETA et trois membres du FRAP). En réponse, le premier octobre cinq différentes unités exécutèrent cinq policiers et en blessèrent grièvement un autre dans plusieurs quartiers de Madrid, pendant que Franco et ses acolytes « célébraient  » les exécutions plaza de Oriente.

 

Cette action eut un grand retentissement. Plus de vingt procès avec le risque de condamnation à la peine de mort furent bloqués.

C’est un moment historique pour les GRAPO, car les masses généralisaient leurs luttes contre le fascisme, et les GRAPO réussissaient à intervenir pour casser la tentative fasciste de casser le mouvement par une répression sanglante.

Les GRAPO disent ainsi que

« nous pouvons dire qu’autant cette expérience-là que celle que nous avons accumulée dans la longue lutte que nous livrons depuis lors, nous a pourvu de la certitude absolu sur la nécessité que la lutte armée et les mouvements des masses doivent marcher ensemble pour arracher des concessions et pouvoir renverser finalement le fascisme et le monopolisme ».

Les GRAPO ne revendiquèrent l’action que le 18 juillet 1976, où 60 bombes explosèrent contre des cibles fascistes. C’était la manière des GRAPO de « saluer » le soixantième anniversaire du début de la guerre civile. Les attaques continuèrent de manière continue ; deux membres des GRAPO périrent en tentant de faire sauter le palais de justice de Séville.

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Les GRAPO organisèrent par la suite l’ »opération papier » contre la télévision, outil des fascistes, puis en décembre 1976 un commando enleva le président du conseil d’Etat Oriol y Urquiso, et en janvier 1977 le président de la Cour Suprême de la justice militaire, le lieutenant-général Villaescusa. L’ »opération chrome » visait à libérer les prisonnierEs politiques et à combattre l’institutionnalisation du fascisme sous le masque de la « démocratie ».

Mais le même mois la police arrête à Madrid et Barcelone 40 membres du PCE[r] et des GRAPO, réussissant à libérer les prisonnierEs de l’oligarchie. La direction des GRAPO était arrêtée.

Quelques jours auparavant les GRAPO avaient exécuté deux policiers et un garde civil, en blessant trois autres, lors de deux attaques contre les forces fascistes suite à l’exécution de cinq avocats de gauche par une unité paramilitaire supervisée par la Garde Civile.

Les GRAPO firent leur autocritique, considérant qu’ils avaient pris trop de liberté avec les régles de sécurité et sous-estimé la capacité tactique de l’Etat à intervenir.

C’est alors une nouvelle période pour les GRAPO, qui diront ainsi que

« De même que la formation du Commando Central marque le commencement de l’étape constitutive de l’Organisation, son arrestation, autant par les conditions concrètes où elle s’est produite que par la nouvelle situation crée dans l’Organisation, marquerait la fin de cette étape et le commencement d’autre étape différente.

Jusqu’ici nous pouvons dire que l’un des objectifs que nous nous avions montré était de démontrer qu’on pouvait combattre le fascisme les armes à la main, cela était accompli pour l’essentiel.

Maintenant il fallait démontrer qu’on pouvait continuer à résister, jusqu’à ouvrir une brèche par où faire irruption le mouvement révolutionnaire des masses ».

Le 4 juin deux gardes civils furent exécutés à Barcelone, le jour de la première élection générale « libre » depuis 1936. Cette action fut le symbole clair du refus du masque « démocratique » du fascisme.

La stratégie des GRAPO est claire :

« Nos actions ont correspondu à chaque moment aux nécessités politiques du mouvement politique : comme réponse aux crimes fascistes, comme dénonciation de la mascarade électorale et de la permanence du fascisme, comme encouragement et soutien aux masses pour la lutte de résistance contre l’exploitation et l’oppression des monopoles ».

Et c’est un processus long, une guerre populaire prolongée :

pcer-18.jpg« Actuellement il existe un déséquilibre de forces à la faveur de la réaction. Les forces populaires partent d’une position d’infériorité et, pour cela, elles se voient obligées à maintenir une lutte de stratégie défensive.

Mais comme elles sont porteuses de tout le neuf et qu’elles luttent pour une cause juste et progressiste, elles se renforcent au cours de la guerre et trouveront un large soutien. Par contre, les forces réactionnaires partent d’une position de supériorité.

Mais comme elles sont porteuses de tout le vieux et déjà caduc et qu’elles défendent une cause injuste, elles s’affaibliront et resteront isolées, jusqu’à la fin ou produise un nouveau déséquilibre, seul que cette fois à la faveur des forces populaires.

Ainsi pourront celles-ci passer à l’offensive stratégique pour anéantir dans un délai de temps relativement court, aux forces principales de l’ennemi et pour introduire un régime populaire ».

Mais l’ennemi qu’affrontent les GRAPO est intelligent :

« La classe dominante espagnole sait, vue sa large expérience dans la répression du mouvement ouvrier et populaire, que si elle n’arrive pas à décapiter et à anéantir le mouvement révolutionnaire organisé et à couper ses liens avec les masses dans cette première étape, il lui en sera impossible plus tard. Pour cela il emploie toutes ces forces et ses moyens afin de nous détruire le plus tôt possible.

Etant consciente du dur coup qu’ils nous avaient assené et des encore faibles liens nous unissant aux masses, à la fois qu’ils nous posent un siège policier, ils déploient une campagne venimeuse de désinformation fondée sur les prétendues « origines obscures » de notre Organisation et sur ses « obscurs » et « étranges » buts et objectifs. Dans ce contexte, notre activité révolutionnaire devrait passer sous une pression et un harcèlement continuels ».

pcer-19.jpgLe 27 septembre 1977, le capitaine de la police Herguedas est exécuté par les GRAPO à Madrid ; il était un des volontaires fascistes qui avaient exécuté cinq antifascistes deux années auparavant. Les GRAPO exproprièrent en passant plus de 500 kilos d’explosifs.

En octobre, le comité central du PCE[r] est arrêté. Les GRAPO continuèrent difficilement leurs actions en 1977 et en 1978, actions consistant principalement en des attaques à l’explosif des forces de la police et de l’armée ainsi que des bâtiments du gouvernement.

Des actions furent menées en solidarité avec les prisonnierEs de la Fraction Armée Rouge en Allemagne et avec les prisonnierEs d’ETA en France.

Le 22 mars 1978 le directeur général des prisons fut exécuté à Madrid ; il était notamment responsable de l’assassinat sous la torture d’un prisonnier anarchiste à la prison de Carabanchel, la police essayant de lui arracher des informations sur un plan d’évasion de prisonnierEs du PCE[r] et des GRAPO.

Les GRAPO publièrent alors un document intitulé « Expériences de trois années de lutte « .

Y est expliqué que la guerre contre le fascisme passe le mouvement de résistance populaire et doit être dirigée par la classe ouvrière.

« La classe ouvrière avec son parti d’avant-garde est la force guidant et dirigeant notre révolution, c’est le secteur le plus clair et au premier rang, et en tant que tel celui appelé pour guider et diriger la révolution ; l’unité de la résistance comprend la guérilla ».

Le PCE[r] et les GRAPO sont deux organisations indépendantes mais profitent l’une de l’autre.

Le document dit aussi :

« En raison de l’existence du fascisme avec comme conséquence le manque de libertés réelles et la super-exploitation que nous avons vu et que nous voyons toujours soumettre le prolétariat et les larges masses populaires, la contradiction principale qui joue est celle entre l’Etat espagnol se confrontant au peuple, contre le fascisme et les monopoles ».

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Pour les GRAPO politiquement le climat est favorable aux avancées du mouvement révolutionnaire, mais l’organisation est rendue difficile à cause de la répression et de l’hyper centralisation de la répression.

1978 est l’année d’une grande crise politique, avec une énorme vague de grèves, notamment en Andalousie, en Galicie, et surtout en Euzkadi où à San Sebastian la police fut attaquée. Le régime fut obligé de modifier les apparences, et proclama une constitution.

Un programme en cinq point fut par la suite proposé par les GRAPO, le PCE[r] et d’autres organisations, un programme en recul par rapport au programme communiste, mais considérée comme une avancée à moyen terme en raison d’un effet de polarisation face au fascisme.

Le gouvernement rejeta ce programme, qui prévoyait l’amnistie des prisonnierEs et des exiléEs, l’abolition des lois anti-terroristes, une purge antifasciste des institutions, les libertés politiques et syndicales, le rejet de l’OTAN, la dissolution du parlement et des élections libres.

De 1979 à 1984 les GRAPO suivirent cette ligne politique, et l’année 1979 fut ainsi une année cruciale.

Elle fut marquée par le plus grand nombre d’actions armées depuis la guerre civile. Les GRAPO exécutèrent Agustia Munoz Vazques, un chef militaire ayant négocié l’intégration de l’Espagne dans l’OTAN, ainsi que Rodrigues Roman, le directeur général de la DGS lorsqu’une manifestation ouvrière fut mitraillée en 1976.

Ils attaquèrent le commissaire police Beltan, connu à Séville comme le bourreau d’ouvriers anti-fascistes, ainsi que le directeur général des institutions pénales, Garcia Valdes et le commissaire de police pour le district de Madrid. Le 6 avril ils exécutèrent à Séville le chef de la brigade  » antiterroriste  » de la police nationale.

La seconde moitié de l’année, 30 militantEs furent arrêtéEs, de nombreux laboratoires démantelés. L’Etat fasciste pensait avoir écrasé les GRAPO ; 20 membres de la police fasciste furent exécutés cette année-là par les GRAPO, qui perdirent 7 membres.

Les GRAPO avaient voulu éviter de rendre coup pour coup, mais la direction avait pris le risque de les amener en ce sens là ; une autocritique fut faite par la suite : un repli tactique eut été préférable.

A Paris, un commando des services secrets espagnols exécutèrent deux membres en exil du PCE[r], responsable des relations extérieures : Martin Eizaguirre et Fernandez Cario.

Le 20 avril Juan Carlos Delgado de Codes, un membre du Comité Central du PCE[r], fut assassiné par la police alors qu’il n’était pas armé (il ne faisait pas non plus partie des GRAPO).

Mais peu après, le 17 décembre, 5 dirigeants s’échappèrent de la prison de Zamora grâce à un tunnel (certains membres du PCE[r] étaient mineurs de profession !).

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En même pas six mois les GRAPO se réorganisèrent totalement, disposant à nouveau de commandos et de laboratoires pour les explosifs. Mais trois des cinq échappés furent exécutés par la police (1980,1981,1982) et les deux autres furent capturés. 1980 et 1981 furent donc des années assez difficiles pour les GRAPO, qui perdirent neuf membres, exécutés par la police.

Un militant du PCE[r] mourut en 1980 à cause de la torture, un autre, Crespo Galende, après 94 jours de grève de la faim. L’Etat espagnol criminalise le PCE[r], l’assimilant aux GRAPO ; des milliers de ses sympathisants passèrent par les prisons.

Les GRAPO menèrent ces deux années huit exécutions, dont deux généraux de l’armée et un colonel, visant l’armée à cause de son importance dans la contre-révolution.

La longue grève de la faim fut également une grande victoire. Les prisonniers furent réunis en communes, dont la Commune Karl Marx, dans la prison de Soria, rassembla 80 prisonnierEs du PCE[r] et des GRAPO jusqu’à ce que les  » socialistes  » la cassèrent en 1989.

En octobre 1982, la veille des élections, 30 explosions eurent lieu dans 15 parties différentes du pays, pour dénoncer la farce électorale. Mais alors que les socialistes arrivent au pouvoir, les services secrets exécutent le leader des GRAPO, Juan Martin Luna, désarmé.

Les auteurs de l’action, qui l’avaient criblé de balles, eurent un procès dans lequel ils furent acquittés. L’exécution de Juan Martin Luna marque la réponse des sociaux-fascistes du PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol) à la déclaration unilatérale de trêve des GRAPO.

Le PSOE mena une dure politique répressive et organisa une politique de « repentance ». Le régime pensait qu’avec 10 millions de voix il pourrait isoler et liquider les organisations populaires armées. Le PSOE lança donc un grand programme terroriste d’Etat.

Alors,  » considérant que les dernières illusions réformistes des masses ont disparu, que les partis et syndicats vendus sont en faillite totale, que les mouvements ouvriers et populaires sont en croissance et utilisant des moyens vraiment radicaux et révolutionnaires…, et qu’en définitive les conditions qui motivaient et rendaient possible le programme en 5 points ont disparu « , les GRAPO cessèrent de mettre l’accent sur d’éventuelles négociations.

Désormais c’est le renversement de l’Etat des monopoles qu’il faut, selon eux, organiser. En conséquence les GRAPO se réorganisèrent pour continuer dans la durée, pour une guerre prolongée, pour non seulement maintenir mais développer la guérilla dans les masses populaires, dans le « mouvement populaire de résistance ».

Il s’agit d’avoir « un parti communiste fort, bien ancré dans le prolétariat, un large mouvement de masse à caractère révolutionnaire et une armée populaire de guérilla ».

En pratique, cela est encore difficile.

En 1983 les GRAPO durent travailler à se relancer ; mais la nouvelle direction eut une position militariste. Le manque de formation des nouveaux cadres fit que l’hégémonie politique du PCE[r] se perdit, amenant une ligne militariste, semi-anarchiste.

La nouvelle direction n’entendait plus se subordonner à la stratégie du PCE[r] et la plupart des actions visaient à son propre renforcement.

L’année 1984 fut par conséquent une année de réorganisation du financement : plus de 100 capitalistes payèrent cette année là un impôt aux GRAPO. Un capitaliste qui refusait de payer fut exécuté, ainsi que Manuel de la Padure, un capitaliste connu à la tête de l’association des employeurs.

Le responsable de la Radio Nationale fut blessé comme réponse à la propagande contre-révolutionnaire qu’il organisait. Un membre des GRAPO fut tué suite à cette opération, un autre blessé et arrêté dans la planque.

En juin, le  » camarade Arenas  » (Manuel Perez Martinez), secrétaire général du PCE[r] fut libéré de prison ; il y était depuis 1977 pour  » association illégale « .

Il dut, comme d’autres, passer immédiatement dans l’illégalité.

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En 1984 46 actions furent menées, toujours en liaison avec les luttes populaires ou l’internationalisme.

Le 19 janvier 1985 fut un jour catastrophique : 19 militantEs des GRAPO furent arrêtéEs dans 19 provinces, 17 appartements planquant armement et argent furent découverts.

Les GRAPO avaient pris des libertés avec leurs propres consignes de sécurité, et en 48 heures la police en profita. La ligne militariste avait permis qu’un seul infiltré permette le démantèlement rapide d’une grande partie de l’organisation.

En 1985 les GRAPO n’existaient donc pratiquement plus. La réorganisation fut très difficile ; 7 membres furent arrêtés la même année dans ce processus.

En 1986 le mouvement continua, ainsi qu’en 1987 ; il y eut des expropriations de banques et de commissariats.

La taxe révolutionnaire fut de nouveau instaurée en 1988 ; le 27 mai le président de la banque de Galice, récalcitrant, fut exécuté. Deux mois après un autre capitaliste fut tué, un autre blessé. Le 4 octobre les GRAPO réussirent à se procurer 800 cartes d’identité dans le commissariat du centre de Madrid. Les années 1987-1988 furent celles de la réorganisation réussie des GRAPO.

1989 fut une année de relance. Le 10 mars deux gardes civils furent exécutés alors le groupe TREVI se réunissait (le groupe TREVI coordonne les activités contre-insurrectionnelles des pays européens).

En juillet les GRAPO se procurèrent 148 millions de pesetas (plusieurs millions de francs) à la banque de Castellon. En novembre commença une grève de la faim des prisonnierEs politiques pour mettre fin à l’isolement. Les GRAPO soutinrent le mouvement dès décembre.

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Le 13 un commandant de l’armée fut grièvement blessé à Madrid ; le 15 ce fut le tour à un colonel de l’armée à Valence ; le 18 un membre des services secrets fut exécuté près de Barcelone ; le 28 deux membres de la Garde Civile en faction à Gijon furent exécutés.

Le gouvernement accusa alors indistinctement les membres du PCE[r] de faire partie des GRAPO et amena les prisonnierEs à l’hôpital, où ils/elles furent enchaînéEs et nourriEs de force. L’organisateur de cela, le docteur Munoz, fut exécuté le 27 mars 1990 par un commando des GRAPO à Saragosse. Il avait même rejeté l’ordre d’un juge de cesser cette méthode.

La grève continua, et le 25 mai, après 177 jours de grève, José Manuel Sevillano Martin mourut. Il était membre des GRAPO et en prison depuis 1987.

Un colonel de l’armée fut exécuté le 15 juin à Valladolid, puis les GRAPO attendirent, pour lancer une offensive en septembre.

Six bombes explosèrent à Madrid (le cour suprême, la bourse, le ministère de l’économie), Tarragona (une dizaine de millions de francs de dégâts pour des installations liées au pétrole), Barcelone (destruction du bâtiment du PSOE, un million de francs de dégâts) et Gijon (récupération de documents d’identité puis destruction du bâtiment).

En novembre deux bombes visèrent des bâtiments officiels à Barcelone. Un pipeline destiné pour les bases de l’OTAN fut également attaqué.

En 1991 et 1992 les actions continuèrent. L’année 1992 était une année très importante pour le régime : c’était la dixième année du gouvernement PSOE, les jeux olympiques de Barcelone, l’exposition universelle à Séville et l’année de Madrid comme « cité culturelle de l’Europe ».

Les GRAPO ne cherchèrent pas à attaquer ces manifestations, la pression étant d’avance calculée comme trop grande.

Ils se  » contentèrent  » ainsi de bloquer le TAV (l’équivalent du TGV) le jour même de son inauguration, de faire sauter des oléoducs et une station électrique, ainsi qu’en avril 1992 d’une attaque de l’institut national de l’industrie et du ministère du travail.

En 1993 les GRAPO échouèrent à exécuter l’ex-Directeur Général des Prisons Galavis.

En juillet trois membres des GRAPO furent tués lors de l’explosion du fourgon blindé qu’ils attaquaient.

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7 bombes furent déposés à Madrid (bâtiments du PSOE et du syndicat patronal, Ministère du travail, Institut National de l’Industrie…) et le centre de distribution de gaz de Saragosse fut attaqué. Mais un commando chargé du renseignement fut arrêté à Madrid en pleine célébration de la conférence sur le Moyen-Orient.

En 1994 les GRAPO menèrent des actions de soutien au mouvement de résistance ainsi que des réappropriations (quelques millions de francs obtenus par l’attaque de fourgons blindés). Le 27 juin ils enlevèrent Publio Cordon, président de l’assurance Previasa.

Il fut libéré le 17 août après avoir payé une dizaine de millions de francs. Il devait payer autant après sa sortie, mais disparut dans la nature (pour des motifs personnels obscurs), ce qui causa et cause encore un scandale chez les médias espagnols.

En novembre trois membres des GRAPO furent arrêtés. Ainsi, de 1975 à 1995, 3000 personnes eurent affaire à la police en raison de leur sympathie pour les GRAPO, 1400 furent emprisonnées, les GRAPO menèrent 60 exécutions, 300 attaques à l’explosif, 3.000 actions armées (le gouvernement espagnol en reconnaît 545). Vingt membres des GRAPO furent tués, ainsi que 7 membres du PCE[r].

Il y a alors selon la police une centaines de personnes dans la clandestinité.

A partir de 1996 les GRAPO firent une trêve, et des pourparlers eurent lieu entre l’Etat espagnol et des membres emprisonnés du PCE[r] et des GRAPO.

Mais le PCE[r] refusant toujours de reconnaître la constitution espagnole, les négociations cessèrent et les GRAPO reprirent la lutte. Parmi les nombreuses actions menées (consulter les différents Front Social pour cela), on notera l’attaque à l’explosif de la vallée des morts, immense monument funéraire abritant les tombes des généraux d’Espagne.

Les actions des GRAPO ne doivent pas non plus faire oublier les très nombreuses actions de la « guérilla diffuse ».

L’arrestation des militantEs du PCE[r] est donc clairement à comprendre comme un soutien à la politique anti-révolutionnaire du régime espagnol.

Et à ce titre nous devons clairement soutenir les révolutionnaires emprisonnéEs du PCE[r] !

Liberté pour les révolutionnaires emprisonnéEs


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