L’organisation du brahmanisme en tant que « mélange » entre la religion traditionnelle des aryens et l’animisme des populations autochtones des territoires couverts par l’Inde, le Pakistan et le Bangladesh aujourd’hui, a permis la formation d’une base sociale féodale tendant principalement vers un système esclavagiste.

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Les diversités locales expliquent le nombre important de dieux et déesses qui témoignent des formes locales de l’animisme. Ces particularités étaient fortement mises en avant par les dirigeants féodaux locaux qui profitaient du système esclavagiste.

En effet, le système des castes a permis la formation de sociétés locales fortes, établies à l’échelle de villages, qui se sont parfois développées en vraies villes. D’où l’existence d’éléments sociaux qui tendaient vers une forme achevée de féodalisme, voire vers un pré-capitalisme.

Par ailleurs, les peuples colonisés ont commencé à renforcer leur animisme, ce qui a provoqué un gigantesque conflit idéologique.

Bases et forces idéologiques

Avec le brahmanisme, les peuples colonisés et opprimés ont commencé à s’impliquer dans la religion. C’était pour eux une façon transparente de défendre leurs intérêts, par le biais animiste de la religion.

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Le respect pour les animaux est ainsi devenu la bannière des opprimés. L’élargissement de la religion aux animaux a renforcé l’aspect animiste, et affaibli l’élément idéologique dominant, à savoir la « renaissance » comme membre de la classe dirigeante.

La reconnaissance de la vie animale est devenue une arme remettant directement en question la valeur unilatérale de la vie de ces dirigeants sanguinaires.

Néanmoins, les opprimés ne formaient pas une classe révolutionnaire. Pour cette raison, deux autres formations sociales ont elles aussi brandi la bannière de la « compassion » afin d’obtenir un soutien massif dans leurs efforts pour arriver au pouvoir.

La première de ces formations sociales était la monarchie absolue. Si un roi voulait régner au delà de son territoire, il devait d’abord s’attaquer aux disparités locales qui confortaient les dirigeants locaux, afin d’affaiblir la classe parasite religieuse des prêtres.

Ainsi, le premier grand souverain de l’Inde fut Ashoka (304-232 avant notre ère). La légende raconte qu’il embrassa la religion bouddhiste après avoir été témoin des massacres de la guerre du Kalinga (plus de 100 000 morts et 150 000 déportations).

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Dans les faits, Ashoka a unifié presque tout le territoire du Pakistan et de l’Inde actuels. Pour consolider son empire, il a construit une nouvelle idéologie, exactement comme l’avait fait Akhenaton en son temps.

La deuxième formation sociale était celle des marchands, préoccupés principalement par deux choses : maintenir leur existence en tant que tels au sein de la société et affaiblir la classe parasite des prêtres.

C’est pour cette raison qu’ils soutenaient le bouddhisme ainsi que le jaïnisme.

Bouddhisme et jaïnisme

Le bouddhisme et le jaïnisme ont tous deux été théorisés par des membres de royaumes locaux qui avaient tout abandonné pour mener une vie d’ascèse et « découvrir » la voie de la « moksha » (« libération »).

Cela signifie que Mahavira (vers 599 – 527 avant notre ère) et Gautama Bouddha (vers 563 – 483 avant notre ère) rejetaient tous les deux leur origine de classe, et en effet ils rejetaient le système des castes.

Mais il leur a fallu justifier ce rejet. Pour cela, ils se sont servi du concept d’esprit dans la réincarnation.

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Pour le brahmanisme, il s’agissait de justifier la possibilité, à moment donné, de se trouver au sommet de la société, au sein de la classe dirigeante. Donc, le brahmanisme proposa la fiction selon laquelle « l’âme », le « soi » personnel, se conservait dans le processus de réincarnation.

C’était un moyen de tromper les masses, de proposer, de façon idéaliste, une possibilité d’ascension sociale.

Le bouddhisme et le jaïnisme avaient entrepris de détruire cette idéologie en affirmant que, dans le système de réincarnation, l’aspect personnel n’était pas conservé. L’esprit se réincarnait mais sans ses propriétés individuelles.

Cela signifie que le bouddhisme et le jaïnisme se sont employés à afficher le caractère erroné de l’hindouisme, qui affirmait que tout le monde pouvait partir d’en bas et accéder au sommet de la société.

Bien sûr, les conséquences étaient énormes pour le clergé, dont la fonction sociale se voyait rejetée par la proposition d’une société « éclairée » où tout le monde pouvait dans l’égalité, se mettre en quête du « moksha » et où certains éléments formeraient une prêtrise ascétique retirée de la société et entretenue par elle.

Évidemment, il est impossible de ne pas voir à quel point cela est similaire en substance au protestantisme, qui allait apparaître 2000 ans plus tard.


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