La réincarnation est le premier concept que les gens associent à l’hindouisme, au bouddhisme et au jaïnisme. Voyons ici comment ce concept a été formé et ce qu’il signifie du point de vue du matérialisme historique.

Les Védas des Aryens ne parlent pas de réincarnation

Si nous nous penchons sur les prémisses de l’histoire de l’Inde, nous constatons que les conquérants venaient de l’Ouest et ont triomphé grâce à leur supériorité militaire. Ces conquérants étaient les « aryens », aussi appellés les « Indo-Iraniens ».

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En effet, nous trouvons des similarités dans les textes sacrés des aryens d’Iran et dans ceux des aryens d’Inde, par exemple dans l’ « avesta » et dans le « ṛgveda ».

Ces textes exprimaient la vision du monde des aryens ; en plus du ṛgveda, nous trouvons aussi en Inde le Sama-Veda, le Yajur-Veda, et l’Atharva-Veda. Ainsi, nous ne trouvons pas le principe de la réincarnation dans les « Védas ».

Pourquoi cela ? Les aryens étaient des tribus patriarcales, décrites comme des pasteurs semi-nomades dans le ṛgveda, qui formaient des groupes lançant des expéditions guerrières sous les ordres d’un chef (le « raja », ce qui a donné le mot « raj », le roi, en Inde) et avec le « soutien » de prêtres appelés brahmans.

C’est pour cette raison que la question de la vie après la mort était patriarcale. Soit le combattant mort prenait la direction du nord, celle des Dieux (devayaana), soit il prenait la direction du sud, celle du père (pitryaana).

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Les conquêtes, les raids, etc., ont fondamentalement structuré la vision du monde de ces tribus. Elles se considéraient comme « choisies » par les dieux, ce qui justifiait leurs opérations militaires.

La colonisation aryenne et les Upanishad : naissance du brahmanisme

Quand les aryens se sont fixés sur le territoire de l’Inde du Nord et du Pakistan, leur vision du monde a dû se transformer, pas seulement parce que leur propre existence changeait, mais aussi au contact des populations qu’ils avaient colonisées.

Dans ce contexte, les védas les plus tardifs ont divisé la société en deux : d’un côté, il y a les conquérants qui gouvernaient à pouvoirs égaux en tant que Brahmanas, Kshatriyas et Vaishyas (prêtres, guerriers, propriétaires). De l’autre, il y a les Shudras, dont le rôle était de servir les gouvernants.

Cela a finalement engendré le « Vedanta », la « fin des Védas » aussi nommé « Upanishad », qui formule la conception générale du système des castes.

Cette conception est en fait un amalgame entre la conception des aryens et la conception animiste des populations colonisées.

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L’animisme attribue une essence spirituelle à tout ce qui vit : les humains, les animaux, les plantes, considérés comme interreliés. Il est certain que cet animisme était très développé, comme les peuplades colonisées par les aryens étaient les continuateurs de la civilisation de la vallée de l’Indus, dite civilisation harappéenne.

Nous connaissons peu de choses sur cette civilisation très importante. Plus d’un millier de villes et de sites ont été découverts, comme le célèbre Mohenjo-daro qui remonte à 2500 ans avant notre ère, ce qui coïncide ou est même avant avec les civilisations grecque, mésopotamienne et crétoise.

Les aryens ont élaboré une religion en prenant ce principe animiste de la vie interconnectée, mais en le mélangeant avec la vie après la mort de leur propre tradition. Cela est devenu un système de réincarnation justifiant l’existence des hautes castes : la réincarnation dans ces castes dépendait du respect que l’on portait aux valeurs religieuses.

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Les populations soumises avaient ainsi la possibilité, après une nouvelle naissance, d’intégrer les classes supérieures. Et afin d’établir une religion commune aux gouvernants et aux gouvernés, le monde ne devait pas être considéré comme une chose importante, le véritable but étant de « disparaitre du monde ».

Cela était nécessaire pour masquer les contradictions de classe, pour pour ne pas formuler la religion uniquement en terme de hiérarchie sociale, et ce concept a pris le nom de Yathaakarman, ce qui signifie « d’un état à un autre ».

Dans l’un des premiers Upanishad, le Chāndogya Upanishad, il est expliqué que les âmes des morts partent pour la Lune, qu’elles reviennent plus tard avec la pluie, qu’elles sont accueillies dans les plantes puis mangées par les humains et les animaux et qu’on les retrouve dans le sperme.

Dans cet Upanishad, on peut lire (5, 10, 7 et 8) :

« Ceux qui ont eu une bonne conduite sur terre accéderont rapidement à une bonne naissance – ils naîtront brahmin, kshatriya, ou vaisya. Mais ceux dont la conduite ici a été mauvaise accéderont rapidement à une mauvaise naissance – ils naîtront chien, cochon ou chandala.

Ceux qui ne pratiquent la méditation, ni n’accomplissent de rituels, ne suivent aucune de ces deux directions. Ils deviennent ces créatures insignifiantes qui vont et viennent, et desquelles on peut dire ‘Vis et meurs.’ »

Voilà la construction classique de la réincarnation dans le brahmanisme, fondée sur le védisme des conquérants, les aryens (ce mot signifiant les « nobles ») et amalgamée à l’animisme des peuples colonisés et assujettis, telle qu’elle a été formulée 600 ans avant notre ère.


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