Le Front de la Patrie mit en place comme régime la République Populaire de Bulgarie, dont les deux premiers articles de la constitution constatant que :

« La Bulgarie est une République populaire à gouvernement représentatif, établie et affermie à la suite des luttes héroïques du peuple bulgare contre la dictature monarcho-fasciste et de l’insurrection populaire victorieuse du 9 septembre 1944.

Dans la République populaire de Bulgarie, tout le pouvoir émane du peuple et appartient au peuple. Le peuple exerce ce pouvoir par des organes représentatifs librement élus et par référendum. Tous les organes représentatifs du pouvoir de l’État sont élus par les citoyens sur la base du droit électoral universel, égal et direct, au scrutin secret. »

Les articles 6, 7, 8 et 9 précisent les choses suivantes :

« Les moyens de production en République populaire de Bulgarie appartiennent soit à l’Etat (propriété commune du peuple), soit aux coopératives, soit aux particuliers — personnes physiques ou morales.

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Toutes les richesses naturelles, minerais et autres, du sous-sol, les forêts, les eaux, y compris les eaux minérales et thérapeutiques, les sources d’énergie hydraulique, les communications ferroviaires et aériennes, les postes, le télégraphe, le téléphone et la T.S.F., sont propriété de l’Etat, c’est-à-dire font partie de la propriété commune du peuple. Une loi spéciale réglera l’exploitation des forêts par la population.

La propriété commune du peuple est le principal appui de l’État dans le développement de l’économie nationale et jouit d’une protection particulière. L’état peut gérer lui-même ou confier à d’autres la gestion des moyens de production qu’il détient.

L’Etat subventionne et encourage les associations coopératives. »

La République Populaire se garde également le droit de nationaliser certaines branches ou entreprises, et conserve le monopole du commerce extérieur et intérieur. C’est ainsi une Démocratie populaire.

Dans son rapport politique du Comité central de décembre 1948, Georgi Dimitrov attribue la nature suivante au nouveau régime bulgare :

« La clique des grands capitalistes, groupée autour de la monarchie et étroitement liée à l’impérialisme allemand, fut renversée.

Le pouvoir de l’Etat passa aux mains de l’union de combat des ouvriers, paysans, artisans et travailleurs intellectuels, unis au sein du Front de la Patrie, sur l’initiative et sous la direction de notre Parti.

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Un changement radical fut apporté au caractère du pouvoir de l’Etat : l’institution servant à l’oppression et à l’exploitation des masses, au profit des classes capitalistes, s’écroula et un pouvoir populaire, instrument de la destruction du capitalisme, de l’affranchissement graduel des travailleurs de toute exploitation, se formait.

Il est vrai qu’au 9 septembre 1944, l’ancienne machine de l’Etat bourgeois ne fut pas entièrement détruite. Dans le gouvernement formé à ce moment, les communistes étaient en minorité.

De très importants postes dans l’Etat se trouvaient aux mains de gens, qui s’avérèrent par la suite peu sûrs, voire hostiles à l’égard du Front de la Patrie. Mais le Parti était l’âme et la force motrice du mouvement populaire antifasciste.

A la base, l’autorité se trouvait, en fait, aux mains des comités du Front de la Patrie. Notre Parti détenait le portefeuille de l’Intérieur, et contrôlait l’institution nouvellement créée des officiers politiques dans l’année.

Cela, dans l’intérêt général, étant donné que lui seul était à même d’organiser l’écrasement définitif de la clique monarcho- fasciste renversée, d’assurer l’ordre intérieur et la participation efficace de l’armée, en pleine réorganisation, à la guerre patriotique (…).

Un nouvel Etat se constituait, un Etat populaire démocratique, appelé à se développer et à se perfectionner de plus en plus.

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Bien que les tâches immédiates de l’insurrection du 9 septembre eussent été démocratiques, cette insurrection n’a pas pu ne pas ébranler à sa base même le système capitaliste et ne pas dépasser les cadres de la démocratie bourgeoise.

Cette particularité principale du soulèvement découle du fait que la suppression du fascisme, la garantie des droits démocratiques des travailleurs, leur consolidation et leur développement ne peuvent être établis, sans porter atteinte à la domination capitaliste.

Car, le fascisme n’est rien d’autre qu’une dictature terroriste, sans frein, du grand Capital. Il ne peut être radicalement supprimé, si l’on ne touche pas à la domination des capitalistes ; les droits démocratiques des travailleurs ne peuvent être garantis, si le grand Capital conserve sa toute-puissance politique et économique.

Voilà pourquoi l’Insurrection populaire du 9 septembre, portant au premier plan les tâches d’un caractère démocratique, ainsi que le grand devoir national : la participation de notre peuple à la guerre, pour la défaite définitive de l’hitlérisme, ne pouvait que diriger plus tard son glaive contre la domination du capitalisme, elle ne pouvait que lui porter d’autres coups sérieux et préparer les conditions de sa suppression, de l’abolition de ce système en général et le passage de la nation au socialisme. »

Georgi Dimitrov donne donc à la démocratie populaire la nature suivante :

Pour marcher avec assurance dans la voie du socialisme, il est indispensable d’éclaircir entièrement la question du caractère, du rôle et des perspectives de la démocratie populaire et de l’Etat populaire-démocratique.

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A la lumière de notre expérience et des faits les plus récents, nous devons donc préciser et mettre au point certaines de nos conceptions actuelles, relatives à cette question nouvelle et complexe, importante pour notre pays et pour les autres pays de la démocratie populaire.

On sait que la démocratie populaire et l’Etat démocratique populaire devinrent possibles après la défaite des forces germano-fascistes, par suite de la victoire historique remportée par l’Union soviétique dans la seconde guerre mondiale et de la lutte des masses, sous la direction de la classe ouvrière, pour la liberté et l’indépendance nationales ; ce qui permit à une série de pays de l’Est et du Sud-Est européens de se débarrasser du système impérialiste.

Le caractère de l’Etat démocratique-populaire est déterminé par ces quatre traits fondamentaux :

a) L’Etat démocratique-populaire représente le pouvoir des travailleurs, de la grande majorité du peuple, sous le rôle dirigeant de la classe ouvrière.

Ce, fait signifie premièrement, que le pouvoir des capitalistes et des gros propriétaires est renversé et que celui des travailleurs des villes et des campagnes est établi, sous la direction de la classe ouvrière; cette classe, la plus progressiste de la société contemporaine, joue dans l’Etat et dans la vie sociale, un rôle dirigeant. Deuxièmement, que l’Etat sert d’instrument aux travailleurs dans leur lutte contre les éléments exploiteurs, contre toutes tentatives et tendances, en vue de rétablir le régime capitaliste et la domination de la bourgeoisie.

b) L’Etat démocratique-populaire apparaît comme un état de la période transitoire, appelé à assurer le développement du pays, dans la voie du socialisme.

Ceci signifie : bien que le pouvoir des capitalistes et dés grands propriétaires fonciers soit renversé et que la fortune de cette classe soit devenue la propriété du peuple, les racines économiques du capitalisme ne sont pas encore extirpées : certains éléments subsistent encore et se développent, s’efforçant de rétablir l’esclavage.

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C’est pour cela que l’évolution vers l’avant, vers le socialisme, n’est possible qu’en menant une lutte de classe intransigeante contre eux, pour leur liquidation complète.

Ce n’est qu’en marchant sans détours vers le socialisme que l’Etat démocratique-populaire pourra se fortifier et accomplir sa mission historique.

Si la démocratie populaire cesse de lutter contre les classes d’exploiteurs, si elle cesse d’étouffer et de refouler les éléments capitalistes, ceux-ci l’emporteraient inévitablement, et non seulement saperaient les bases de la démocratie populaire, mais amèneraient sa perte.

c) L’Etat démocratique-populaire s’édifie dans la collaboration et l’amitié avec l’Union soviétique.

De même que l’affranchissement de notre pays des chaînes de l’impérialisme et la création de l’Etat démocratique-populaire ne devinrent possibles que grâce à l’appui et à la mission libératrice de l’U.R.S.S. dans la lutte contre l’Allemagne fasciste et ses alliés, le développement ultérieur de notre démocratie populaire suppose la conservation et le renforcement des relations étroites de collaboration sincère, d’assistance mutuelle et d’amitié, entre nos pays et le grand Etat soviétique. Toute tendance à affaiblir la collaboration avec l’U.R.S.S. est dirigée contre l’existence même de la démocratie populaire dans notre pays.

d) L’Etat démocratique-populaire appartient au camp démocratique anti-impérialiste.

Tout d’abord, ce n’est qu’en prenant rang dans le camp démocratique anti-impérialiste, qui a à sa tête le puissant Etat soviétique, qu’un pays de démocratie populaire peut garantir son indépendance, sa souveraineté et sa sécurité contre l’agression des forces impérialistes.

Deuxièmement : Dans les conditions de la défaite militaire des Etats fascistes agresseurs, de l’aggravation rapide de la crise générale du capitalisme, de l’énorme croissance de la puissance de l’Union soviétique et de notre collaboration étroite avec l’U.R.S.S., et les Etats populaires-démocratiques, notre pays, ainsi que les autres pays de démocratie populaire, voit s’ouvrir la possibilité de réaliser la transition du capitalisme au socialisme sans un régime soviétique, uniquement au moyen du régime de démocratie populaire, à la condition que celui-ci se renforce et se développe en s’appuyant sur l’aide de l’U.R.S.S., et des autres pays de démocratie populaire.

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Troisièmement : Incarnant la domination des travailleurs sous la direction de la classe ouvrière, le régime de démocratie populaire peut et doit, ainsi que l’expérience l’a déjà prouvé, exercer avec succès les fonctions de la dictature du prolétariat, pour la liquidation du capitalisme et l’organisation de l’économie socialiste.

Il peut briser la résistance des capitalistes et des propriétaires fonciers, étouffer et liquider leurs tentatives, en vue de restaurer le pouvoir du Capital.

Il peut organiser la construction d’une industrie sur la base de la propriété publique et de l’économie planifiée.

Le régime de démocratie populaire sera également en état de surmonter l’instabilité de la petite bourgeoisie des villes et de la paysannerie moyenne, de maîtriser les éléments capitalistes dans les campagnes et d’unir les masses fondamentales des travailleurs autour de la classe ouvrière, dans la lutte décisive pour le passage au socialisme.

Dans l’application de cette ligne, qui a pour but d’éliminer les éléments capitalistes de l’économie nationale, le régime de démocratie populaire ne restera sans doute pas sans subir des transformations.

Il sera nécessaire de renforcer continuellement les positions-clés de la classe ouvrière dans tous les domaines de la vie publique et de l’Etat ; il sera nécessaire d’unir, dans les campagnes, tous ceux qui peuvent être des alliés sûrs de la classe ouvrière pendant la période de la lutte aiguë contre les koulaks et leurs aides.

Il sera nécessaire également de renforcer et d’améliorer le régime de démocratie populaire, comme le moyen de limitation et de liquidation des ennemis de classe.

Quatrièmement : Les pays de démocratie populaire, y compris le nôtre, se sont déjà engagés dans la voie du socialisme, sans interrompre la lutte conne les forces ennemies de l’intérieur et surtout de l’extérieur.

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Actuellement, dans ces pays, comme chez nous, on travaille à créer les conditions indispensables à l’édification du socialisme, à poser les fondements économiques et culturels de la future société socialiste.

C’est en cela, notamment, que réside, dans l’étape actuelle, la tâche fondamentale de la démocratie populaire, et par conséquent, celle de la classe ouvrière et de son guide, le Parti communiste.

Cette tâche générale en comporte une série d’autres, de grande importance, dont quelques-unes ont une portée décisive.

Les voici :

1. Le renforcement ininterrompu des positions-clés de la classe ouvrière, avec le Parti communiste en tête, dans tous les domaines de l’Etat, de la vie économique, politico-sociale et culturelle.

2. La consolidation de l’union de la classe ouvrière et des paysans travailleurs sous la direction de cette classe.

3. Le développement accéléré du secteur public dans l’économie nationale et en particulier dans la grande industrie.

4. La préparation des conditions nécessaires à la liquidation des éléments capitalistes exploiteurs dans l’économie rurale, cela par une politique conséquente visant, d’abord, à les limiter, ensuite, à les écarter et à les liquider.

5. Le développement dans tout le pays de coopératives de production au sein des masses fondamentales de la paysannerie. L’aide à apporter aux paysans pauvres et moyens par les services des stations de tracteurs et machines agricoles, des crédits, des semences, etc. Augmenter l’intérêt que ces derniers portent à leur union avec la classe ouvrière, les persuader, par l’exemple des fermes coopératives, des avantages d’une gestion commune des exploitations rurales et les éduquer dans un esprit d’intransigeance vis-à-vis des éléments capitalistes.

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Nous considérons que dans nos conditions et avec le développement des fermes coopératives, la question de la nationalisation de la terre n’a pas une importance pratique, c’est-à-dire que l’application de cette nationalisation n’apparaît pas comme une condition indispensable au développement et à la mécanisation de notre agriculture.

Cinquièmement : La démocratie populaire est en faveur de l’internationalisme, mais incompatible avec le nationalisme. Dans l’internationalisme, dans la collaboration internationale, avec le grand Staline en tête, notre Parti voit la garantie de l’existence indépendante, de la prospérité et de l’essor de notre pays vers le socialisme.

Nous pensons que le nationalisme, quel que soit le masque sous lequel il se cache, est l’ennemi du communisme.

Ceci est démontré, en effet, par la pratique anticommuniste du groupe nationaliste de Tito en Yougoslavie. C’est pour cette raison que la lutte contre le nationalisme devient un devoir primordial pour les communistes.

En combattant toutes ses manifestations, nous devons former les travailleurs dans l’esprit de l’internationalisme prolétarien et de dévouement à leur patrie, c’est-à-dire dans l’esprit du véritable patriotisme.

Ainsi, Georges Dimitrov prolongea son analyse du Front populaire jusqu’à établir les principes de la Démocratie populaire. Ce régime voit son existence permise par l’existence de l’Union Soviétique et sa victoire sur l’agresseur nazi, faisant que les forces démocratiques purent librement se développer.

La Démocratie populaire est ainsi une application toujours plus large de la démocratie, par un État dont la classe ouvrière forme l’ossature, les oppositions réactionnaires étant mises de côté.

Dans ce cadre, deux tentatives contre-révolutionnaires furent mises en échec : celle de l’agrarien Nicolas Petkov en 1947, celle du pro-titiste Traïcho Kostov en 1949.

Georgi Dimitrov décéda lui-même le 2 juillet 1949 ; un mausolée fut construit pour lui à Sofia. Valko Tchervenkov lui succéda, mais fut mis de côté en 1954 par le révisionnisme, qui réhabilita également immédiatement Traïcho Kostov, faisant de Georgi Dimitrov une icône sans contenu.


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