Nous sommes fatigués des interminables déclarations de principe, de concepts déjà énoncés dans les − C.P.M, − « Sinistra Proletaria », − « Nuova Résistenza ». La nouveauté consiste par dessus tout dans l’opération de systématisation accomplie.
La bourgeoisie, face à sa crise n’a pas d’autre alternative que la militarisation non pas de type fasciste traditionnelle, mais fasciste-gaulliste qui prend une apparence démocratique (prépondérance du premier ministre et du président de la République sous la Constitution de la Vème).
La gauche non réformiste n’est pas préparée à faire face à ce type d’affrontement armé.
Il y a donc deux possibilités :
1°) répondre sur le mode de la troisième Internationale avec des variantes anarcho-syndicaliste ; les « groupes » ont déjà choisi celle-ci.
2°) ou rejoindre l’expression révolutionnaire métropolitaine de notre époque à savoir : les B.R. et ce en référence au marxisme-léninisme, la révolution culturelle prolétarienne sur le modèle d’expériences des mouvements de guérillas métropolitaines.
Nous voulons seulement être le premier point de rencontre des formations du parti armé, qui n’est pas le bras armé d’un mouvement de masse désarmé, mais plutôt le point d’unification le plus élevé.
Nous n’acceptons pas les schémas des P.C. européens, surtout en ce qui concerne la question des rapports entre une organisation politique et militaire.
Nous voulons une guérilla !
1°) Comment voyez-vous la phase actuelle de l’affrontement de classe ?
La gauche révolutionnaire extra-parlementaire s’est trouvée démunie, pas préparée face à la recherche d’un nouvel équilibre de la part de la bourgeoisie.
Notre expérience politique naît de cette exigence.
2°) Quelles sont les causes à la base de la crise actuelle ?
Aujourd’hui on est face à un revirement de prospective politique de la bourgeoisie mise au pied du mur face à l’initiative de la classe ouvrière qui a refusé le réformisme comme projet de stabilisation sociale, mettant à l’ordre du jour la fin de l’exploitation.
3°) Comment va évoluer la situation politique ?
Il n’y a qu’une seule possibilité pour la bourgeoisie : rétablir la situation, moyennant une organisation toujours plus despotique du pouvoir. Le despotisme croissant du capital sur le travail, la militarisation progressive de l’État et de l’affrontement de classe, la montée de la répression comme fait stratégique sont les conséquences objectives et inexorables.
En Italie on assiste à la formation d’un bloc de type réactionnaire alternatif au centre gauche, tout ça sous le drapeau de la droite nationaliste qui tend à se réassurer le contrôle de la situation économique et sociale ; c’est-à-dire de la répression de toute forme de lutte révolutionnaire et anti-capitaliste.
4°) Pensez-vous à un retour du fascisme ?
La question ne se pose pas en ces termes. La décision répressive pour le moment vise moins à la liquidation institutionnelle de l’État « démocratique » comme l’a fait le fascisme qu’à la répression plus féroce du mouvement révolutionnaire.
En France le « coup d’État » de De Gaulle et l’actuel « fascisme » gaullien vivent sous les apparences de la démocratie.
Il serait cependant ingénu d’espérer une stabilisation modérée de la situation économique et sociale en présence d’un mouvement révolutionnaire combatif.
5°) Quels sont donc vos choix ?
La réponse de la bourgeoisie par la répression est déjà amorcée et tend à supprimer la capacité de résistance de la classe ouvrière.
L’heure X de l’Insurrection n’arrivera pas, en tout cas pas celle que se figurent de nombreux camarades, à savoir un affrontement décisif entre prolétariat et bourgeoisie, comme ce fut le cas en 1922.
6°) Finalement à quel filon idéologique et historique vous rattachez-vous ?
Nos points de repère sont le marxisme-léninisme, la révolution culturelle chinoise et l’expérience d’actes des mouvements de guérilla métropolitaine en un mot : la tradition scientifique du mouvement ouvrier et révolutionnaire international ; ce qui signifie aussi que nous n’acceptons pas en bloc les schémas qui ont guidé les partis communistes européens dans la phase révolutionnaire de leur histoire, surtout en ce qui concerne la question de l’organisation politique et militaire.
7°) Votre problème est donc celui de commencer la lutte armée ?
La lutte armée a déjà commencé.
C’est la bourgeoisie qui frappe, il faut donc créer l’instrument de classe capable de l’affronter au même niveau.
Les B.R. sont le premier sédiment du processus de transformation de l’avant-garde politique de classe en avant-garde politique armée.
La lutte armée en Italie doit être conduite par une organisation qui soit la directe expression du mouvement de classe, et pour cela nous travaillons à l’organisation des noyaux ouvriers d’usine et de quartiers dans les pôles industriels et métropolitains où il existe une concentration de révolte et d’exploitation.
8°) Vous êtes donc dans une phase de préparation ?
On ne peut en être qu’à ce stade car en fonction de la route que nous avons choisi, il nous faut accumuler expériences et schémas ; mais elle ne constitue pas une phase détachée de la lutte de classe mais se réalise à l’intérieur de celle-ci.
9°) Les B.R. sont donc engagées dans l’affrontement ?
Nous exigeons, à la différence des organisations extra-parlementaires, de nouvelles formes d’organisation de la lutte révolutionnaire : organisation de l’auto-défense, premières formes de la clandestinité, actions directes.
De ces premières expériences de phase tactique nécessaire, nous devons passer à la phase stratégique de lutte armée.
10°) Quelles sont les conditions pour que ce passage se produise ?
Il existe deux conditions fondamentales : se mesurer à tous les niveaux avec le pouvoir (libérer les détenus politiques, exiger la peine de morts contre les policiers assassins, exproprier les capitalistes… et bien sûr, prouver qu’on peut survivre à ce stade d’affrontement.
Faire naître un pouvoir alternatif dans les usines et les quartiers populaires.
11°) Qu’entendez -vous par pouvoir prolétaire alternatif ?
La révolution n’est pas seulement un fait technico-militaire ; et l’avant-garde armée n’est pas le bras armé d’un mouvement de masse désarmé, mais son point d’unification le plus élevé, de sa demande de pouvoir.
12°) Quelle direction désirez-vous suivre dans la phase actuelle ?
Radicaliser le discours stratégique, casser l’offensive tactique de la bourgeoisie, lier la lutte à tous les aspects de l’organisation capitaliste du travail, ne pas laisser les sbires espions impunis, ni les magistrats qui attaquent le mouvement de classe dans ses intérêts ni ses militants.
Dans l’immédiat cette action doit se maintenir à un haut niveau de mobilisation populaire pour empêcher tout courant pessimiste et défaitiste ; le choc ne peut déboucher par un retour à la situation précédente mais constituer la promesse pour un choc stratégique : la lutte armée pour le pouvoir.
13°) Les B.R. c’est donc un organisme de transition ?
Non, car la lutte armée ne peut être envisagée par des organismes intermédiaires comme les comités de base, les cercles étudiants, ouvriers ou des organisations politiques extra-parlementaires ; iI faut une organisation stratégique à la base.
14°) Vous voulez dire un parti ?
Exactement.
Les B.R. sont un premier point d’agrégation pour la formation du parti armé du prolétariat.