André Cools

André Cools

La grève des travailleurs de l’A.L.E. pour une augmentation de salaire et une réduction du temps de travail met sur le tapis d’importantes questions politiques.

1. C’est une lutte qui oppose des ouvriers et des employés à des dirigeants du PSB dont le co-président du parti, Cools, et qui a amené ceux-ci à se démasquer dans la pratique comme les pires ennemis des travailleurs. Ceci met concrètement en question le PSB : quel genre de parti est-ce ?

2. L’A.L.E. appartient au secteur public. Or, précisément, les dirigeants réformistes du PSB [Parti Socialiste Belge « unitaire ». En 1978, ce parti se scindera en une aile francophone (le PS) et une aile flamande (le SP), ndlr] et de la FGTB, ainsi que les dirigeants révisionnistes du PCB, sont les chauds partisans de « l’initiative industrielle publique » de certaines nationalisations, etc. Quel genre de politique est-ce ?

3. La grève a provoqué un conflit entre la direction du PSB, qui en est la cible, et la direction de la CGSP (FGTB), qui la dirige. Mais Cools et Yerna sont-ils réellement des adversaires ? Si Cools est, de toute évidence un valet du capital, Yerna serait-il un véritable défenseur des travailleurs ?

4. L’organisation-TPO (Tout le Pouvoir aux Ouvriers) qui se réclame du communisme (marxisme léninisme), est intervenue dans la grève. Elle a pris certaines positions, qui correspondent à la « nouvelle » ligne politique qu’elle développe depuis un certain temps. Ces positions sont-elles effectivement communistes ?

La lutte à l’A.L.E.

Les dirigeantes socialistes, patrons de chocs

Au mois de mars, les intercommunales liégeoises déposent leur cahier de revendications. Leurs justes exigences sont : 38 heures avec maintien du plein salaire avant la fin de 1977, 7% d’augmentation de salaire.

Les patrons des intercommunales (il y en a 7 dans la province de Liège : Eau, Gaz, Electricité, Voirie, Mécanographies, Démergement, Socolie) sont en grande majorité des dirigeants et des responsables du PSB. Ainsi, l’A.L.E. (Association Liégeoise d’Electricité) est gérée par Cools, coprésident du parti, Mathot, bourgmestre de Seraing, Vandenbosch, 1er échevin de Seraing, etc. et dirigée par Mottard, gouverneur de la province. En théorie, le PSB soutient la revendication des 36 heures. En pratique, c’est un peu différent ! L’accord de 1976, qui prévoyait l’application rapide des 39 heures, n’est toujours pas réalisé. Quant aux 7 %, les administrateurs de l’A.L.E. s’y opposent également, tandis qu’ils pompent plus de 2 millions 1/2 par an et qu’ils viennent de s’accorder une augmentation de 10%. Ils ont royalement proposé une augmentation de 2 % aux travailleurs !

A l’approche des élections le préavis de grève est suspendu dans toutes les intercommunales, sauf à l’A.L.E. Les travailleurs et les délégués de l’A.L.E. s’opposèrent à la liquidation du mouvement de lutte entamé contre le plan Egmont. Une telle rupture de la trêve électorale ne fut pas du goût du PSB qui prépare son entrée au gouvernement.

Les différents sièges de l’A.L.E. (1.300 travailleurs) organisèrent une grève tournante, et les gestionnaires du PSB vont dès lors tout mettre en œuvre pour casser la lutte.

Ils commencent par la provocation, disant aux travailleurs : Le réseau électrique est automatisé, vous pouvez faire grève pendant 6 mois, on ne le remarquera même pas. Puis ils prennent des sanctions contre 10 travailleurs, dont 5 délégués syndicaux : mise à pied de 3 semaines, réduction de 5% du salaire de 5 d’entre eux. Motif : être allé trouver des entrepreneurs privés pour leur demander de ne pas aller travailler pour l’A.L.E. pendant la grève. Le délégué principal de l’A.L.E., François Heine (FGTB), échevin d’Ans, est menacé d’être exclu du PSB.

Non contents d’attaquer le droit de grève, Cools et Cie vont plus loin encore : ils appellent la BSR pour surveiller les grévistes. (La Brigade spéciale de Recherche est une division de la gendarmerie dont une tâche importante est d’espionner et d’intimider les révolutionnaires et les ouvriers en lutte. Ses attaques odieuses contre les travailleurs sont innombrables. Il est établi qu’elle collabore avec les polices politiques les plus réactionnaires, telle la DINA chilienne.)

Au siège de l’A.L.E.-Flémalle, les ouvriers avaient affiché sur la façade leurs mots d’ordre et leurs revendications. Or, Monsieur André Cools, coprésident du PSB, patron de l’A.L.E. est également bourgmestre de Flémalle. Cet individu s’est amené, accompagne de son commissaire de police et d’une quarantaine de personnes, des membres de sa milice privée et des pompiers. Il confisqua les panneaux d’affichage et les fit brûler. En quittant les lieux, Cools lança aux grévistes : « Vous pouvez crever ! »

Le grand défenseur des ouvriers, André Cools, en réalité les hait. Il utilise contre eux les méthodes des fascistes allemands qui brûlaient les livres révolutionnaires dans les années 30.

Le 1er mai, à Liège, Cools prit la parole devant les travailleurs. Dans un discours hystérique, trépignant de rage, il attaque la grève de l’A.L.E., insulta les grévistes et les traita de sous-corporatistes :

« Préférant ce qu’ils appellent leur beefsteak, rejetant toute solidarité à l’égard des autres agents des intercommunales de la province et des communes, certains irresponsables ont déserté le combat et entrainé leurs compagnons dans la bataille dont la seule victime devait être le parti »

cria-t-il, et de conclure :

« Il faut choisir entre le socialisme et l’égoïsme exacerbé des mieux nantis. »

On voit tout de suite ce qu’est le socialisme de M. Cools : les méthodes et le langage des pires patrons.

Dans les journaux socialistes, Cools orchestre une campagne visant à isoler les grévistes et à dresser la population contre eux. Étant mieux payés que certains de leurs collègues du secteur public, les travailleurs de l’A.L.E. n’auraient pas droit, selon le PSB, à une augmentation de salaire. Oubliant qu’ils sont plus mal payés que les travailleurs du privé, le PSB plaide ainsi pour un nivellement des salaires par le bas.

Mais surtout, les dirigeants socialistes mettent en cause le droit de grève dans le secteur public, en faisant valoir, de façon démagogique, les intérêts de la population. Dans un éditorial du « Monde du Travail » et du « Peuple » (16 mai), le rédacteur en chef de ces feuilles officielles socialiste, J. L. Lhoest, lance une attaque en règle contre les travailleurs du secteur public et écrit notamment :

« En utilisant les méthodes classiques antipatronales contre une intercommunale qui, elle, avait démontré (sa) supériorité, on en est arrivé au résultat navrant d’un conflit qui est en train de gravir tous les échelons de l’escalade, ignorant les droits élémentaires du public, ébréchant la réputation et la crédibilité d’une méthode de gestion qui est a la base des conceptions doctrinales socialistes. »

Le 11 mai, le délégué CGSP Louis Dujardin et un autre camarade sont arrêtés. Ils sont accusés d ‘avoir provoqué des coupures de courant en déconnectant des fusibles et ils sont traités pour cette raison par la bourgeoisie et le PSB de saboteurs. Une campagne démagogique est lancée contre eux par la presse « socialiste ». Les patrons refusent de leur payer leur salaire. Le camarade Dujardin a été maintenu en détention. Il est réprimé parce qu’il est un délégué combatif, qui a fait son devoir envers la classe ouvrière.

Les travailleurs de l’A.L.E. arrachent le masque du socialiste Cools

La lutte des grévistes de l’A.L.E. a montré, grâce à sa détermination, le véritable visage du coprésident du PSB : celui d’un briseur de grèves, d’un ennemi acharné des travailleurs un bourgeois endurci prêt à employer les méthodes fascistes pour défendre ses intérêts, et maintenir l’ordre capitaliste.

Loin de se laisser par la répression de leurs patrons socialistes, les grévistes mènent au contraire une lutte exemplaire, qui a bientôt suscité. la solidarité de leurs de leur camarades des autres intercommunales.

Le 29 avril, ils organisèrent une manifestation combative, place Saint-Paul, à Liège, aux cris de Mottard, démission ! Vandenbosch, démission ! Pas de contrôle ouvrier par le P.S.B. ! Des barricades bloquent la porte des sièges, les jours de grève tournante. Des ouvriers rendent inutilisables des appareils électriques. Ce sont les fameux sabotages. En réalité, il s’agit d’actions qui doivent rendre la grève effective et qui empêchent qu’elle reste symbolique. Cools et Cie ont hurlé à « l’action irresponsable de quelques égarés », etc., mais les véritables provocateurs, ce sont eux, et la masse des ouvriers soutiennent ces sabotages. L’arrestation de Dujardin les révolte et ils désirent lutter pour sa libération.

Le 16 mai, l’assemblée générale des travailleurs de l’A.L.E. vote la grève générale à une majorité de 92% : le même jour, les intercommunales du gaz et de l’eau lancent, avec respectivement 73 et 76% des voix, la grève générale au finish pour appuyer l’A.L.E.

Le 23 mai, occupation des locaux de l’A.L.E. et retour au système des grèves tournantes. Socolie part à son tour en grève de solidarité.

La grande majorité des ouvriers de la région sympathise avec les grévistes et est profondément indignée par les méthodes de Cools et consorts. Ils ont vu, de façon indiscutable, que le PSB est un parti dirigé par des bourgeois, par des ennemis irréconciliables de la classe ouvrière.

Une importante leçon politique

Le PSB est un parti ouvrier bourgeois

Devant le comportement fasciste de Cools et de ses acolytes, de nombreux travailleurs se posent la question : comment de telles choses peuvent-elles se passer dans un parti qui se dit ouvrier ?

Disons d’abord qu’il ne s’agit pas, bien entendu, d’un fait exceptionnel. Cools aujourd’hui ne fait que suivre les traces de tous ses prédécesseurs qui ont dirigé le PSB, à la botte de la bourgeoisie. Hendrik De Man, président du POB, a accueilli les envahisseurs allemands à bras ouverts, voyant dans le nazisme le vrai « socialisme ». P. H. Spaak a saboté la lutte contre Léopold III et la monarchie et est ensuite devenu secrétaire général de l’OTAN, pacte agressif dirigé par l’impérialisme américain. A. Van Acker a saboté la grande grève de 60-61. A. Vranckx, en 66, a fait tirer sur les mineurs de Zwartberg : 2 morts. Voilà quelques jalons qui marquent dignement la glorieuse tradition ouvrière du PSB. Alors, quel genre de parti est-ce ?

Toutes ces trahisons indiquent clairement la nature de classe du PSB. Le PSB se dit « ouvrier », mais en réalité il est bourgeois. C’est un parti entièrement au service de la bourgeoisie. Il a pour tâche de faire accepter les politiques des capitalistes par la classe ouvrière.

Le programme réformiste du PSB est un programme de trahison de la classe ouvrière et de la révolution. Il souvient qu’on peut « améliorer » fondamentalement le capitalisme et, de cette façon, parvenir petit à petit au socialisme. Il prétend arriver à une société libre, démocratique, prospère et heureuse, sans passer par le dur chemin de la révolution, de la lutte armée pour le pouvoir.

L’expérience a montré que la bourgeoisie n’abandonne jamais le pouvoir de plein gré et qu’elle n’hésite pas à massacrer les ouvriers, comme au Chili en 1973, pour conserver ses privilèges. La classe ouvrière se rendra maitresse de l’économie non pas au moyen de réformes réalisées dans le cadre du capitalisme mais uniquement en détruisant de fond en comble l’appareil d’Etat capitaliste (armée, gendarmerie, police, tribunaux, prisons, parlement, etc.) et en prenant le pouvoir : à ce moment ils exproprieront les capitalistes, et c’est l’État ouvrier qui dirigera l’économie, dans l’intérêt du peuple travailleur.

Toutes les théories de « réformes de structure », de « passage pacifique au socialisme », inventées par le PSB – et, à sa suite, par le soi-disant PCB – sont des théories criminelles destinées à détourner la classe ouvrière de la révolution socialiste.

Les dirigeants réformistes sont les meilleurs serviteurs du capitalisme d’État

L’A.L.E. est une entreprise du secteur public. Nous avons vu, dans la pratique, comment les patrons « socialistes » d’une telle entreprise combattent les ouvriers, autant et même plus que les patrons capitalistes privés.

Les grévistes diffusent une affiche dénonçant Cools et Mottard et sur laquelle on peut lire : « Capitalisme public= capitalisme privé= exploitation ».

C’est le moment d’examiner d’un peu plus près le sens réel de « l’initiative industrielle publique » et des nationalisations réclamées à cor et à cri par le PSB, le PCB et les directions syndicales.

Les réformistes de tout acabit font grand tapage pour leur programme de « réformes de structure » et le présentent comme un pas en avant pour la classe ouvrière. Ce serait là le meilleur moyen de libérer les travailleurs : en remplaçant les capitalistes privés par la gestion de l’État. Celui-ci dirigerait les entreprises, les banques, le crédit, etc. dans l’intérêt du peuple.

Il ne s’agit évidemment pas de défendre d’une façon quelconque le capitalisme privé. Les travailleurs de notre pays le combattent depuis plus d’un siècle. Mais ils doivent bien voir que le capitalisme public, le capitalisme d’Etat, ne représente pas pour eux un progrès, une amélioration quelconque de leur situation politique et économique, bien au contraire.

Le programme des « réformes de structure » est une escroquerie.

L’initiative publique, les nationalisations, etc. représentent une aide aux capitalistes.

Prenons l’exemple de l’électricité.

En Belgique, l’électricité est, pour la plus grande partie, aux mains du capital privé (dans le cadre des sociétés intercommunales mixtes) ; cette branche réaliste de gros bénéfices ; l’électricité est plus chère que dans les pays voisins. Ce coût exagéré de l’énergie place l’ensemble des capitalistes belges en mauvaise posture sur le marché international. Le transfert au secteur public permettrait d’abaisser les coûts. En nationalisant, l’État intervient dans l’intérêt de la classe des capitalistes en son entier. C’est ce que veut le PSB, en tant que véritable parti des monopoles.

Dans le capitalisme d’État, les secteurs vitaux de l’économie (transports, énergie, banque, acier, etc.) passent dans le secteur public, et l’État joue un rôle croissant dans la direction générale de l’économie (plan, crédit, etc.). Cela est nécessaire au grand capital pour abaisser les prix à son profit, pour accélérer la concentration des monopoles, pour faire face à la concurrence étrangère.

Le PSB et le PCB sont chargés par la bourgeoisie de défendre ses intérêts devant la classe ouvrière, en lui faisant croire que les mesures réclamées par le grand capital représentent un progrès social pour les travailleurs.

Dans notre société, l’État capitaliste est et restera nécessairement au service de la bourgeoisie. Il gère les entreprises publiques dans l’intérêt des monopoles, qui le dominent entièrement. Et surtout : l’État protège l’exploitation capitaliste par la force, par la violence de son appareil. Les travailleurs ont bien souvent appris cette vérité au prix de leur sang.

Le capitalisme d’État n’est pas le socialisme, c’est tout le contraire : il est la forme la plus développée du système d’exploitation capitaliste.

Les entreprises publiques, en système capitaliste, obéissent toujours à la loi du profit. La production capitaliste (privée ou publique) est entièrement organisée en fonction de la rentabilité. Mottard, directeur de l’A.L.E., a parlé de la « nécessité de rester compétitif », et cela est parfaitement conforme à la logique capitaliste. Il faut donc peser sur les salaires, les cadences et l’emploi, comme dans n’importe quelle entreprise privée. Il suffit de voir le sort des ouvriers « nationalisés » Val-Saint-Lambert et Fabelta en Belgique, Renault en France, l’acier en Grande-Bretagne, la chimie en Italie… : fermetures, licenciements et souvent des bas salaires. Ces exemples montrent que les nationalisations maintiennent et renforcent l’exploitation. L’A.L.E. confirme la règle : les salaires y sont plus bas que dans les entreprises privées d’électricité.

Le « Conflit » PSB-FGTB

Comment la FGTB dirige la grève

Aujourd’hui on parle beaucoup du « conflit » qui opposerait les dirigeants FGTB aux dirigeants PSB. Ils n’agissent pas de même : les dirigeants PSB exploitent et répriment ; en face d’eux, les dirigeants CGSP (FGTB) dirigent la grève.

Devons-nous dire en conséquence que si le PSB est réactionnaire la FGTB, elle, serait progressiste ?

Voyons d’abord comment la FGTB dirige cette grève.

Le mouvement de solidarité actuel montre bien qu’il est possible de créer dans toute la région un vaste front ouvrier pour appuyer la lutte de l’A.L.E. et la faire triompher. Pourtant, en cette fin mai, on constate du découragement chez les ouvriers de l’A.L.E. et un certain piétinement de la lutte, qui ne se développe pas comme il le faudrait.

Pourquoi ?

Parce que la grève continue à être dirigée par les hautes instances syndicales FGTB. Celles-ci ne peuvent la mener réellement à la victoire, parce qu’elles partagent fondamentalement les positions bourgeoises des dirigeants PSB qu’elles prétendent combattre.

Le retard mis à appeler à la grève générale, la décision, après une semaine, d’en revenir aux grèves tournantes, décision prise de façon antidémocratique, en divisant les travailleurs par centrales et en les empêchant de voter (alors que la grève générale avait été décidée la semaine d’avant par 92% des voix), la passivité générale dans l’organisation (les directions syndicales refusent d’organiser aucune action, aucune manifestation pour réclamer la libération immédiate du camarade Dujardin et pour arracher l’obtention des autres revendications). Toutes ces manœuvres bureaucratiques démobilisent les travailleurs. Elles servent à canaliser la lutte, à la contenir à l’intérieur du cadre voulu par la bourgeoisie et à la liquider quand le moment sera venu.

La libération du camarade Dujardin et la levée de toutes les sanctions doivent être notre revendication principale : pas question de reprendre le travail ni même de négocier aussi longtemps que ces conditions ne seront pas réalisées. C’est une question de principe.

Il y a deux façons de conduire une grève : la façon réformiste et la façon révolutionnaire.

La façon réformiste, suivie par la direction FGTB, consiste à en appeler au calme et à respecter la légalité bourgeoise. Les dirigeants syndicaux disent : Si l’on fait des actions, la justice sera plus excitée et cela se retournera en définitive contre Dujardin. Autrement dit : si on tient comme des moutons, le loup ne nous mangera pas. Voilà pourquoi on ne fait rien.

La façon révolutionnaire, c’est de compter sur la force des ouvriers et de les mobiliser pleinement contre la « justice » bourgeoise. C’est l’idée que l’UC(ML)B a défendue dans ses tracts. Nous partons du point de vue qu’il faut combattre la bourgeoisie sans concilier avec elle et préparer ainsi la classe ouvrière à ses tâches révolutionnaires.

Nous appelons aussi les travailleurs les plus combatifs et les délégués des intercommunales en grève à prendre eux-mêmes en main l’organisation de leur lutte, à ne pas en laisser la direction aux hautes instances syndicales. Pour cela il faut élire démocratiquement un comité de grève comprenant les travailleurs de l’A.L.E. et des autres intercommunales les plus dévouées, les plus capables de mener la bataille. Ce Comité organisera toutes les actions et manifestations qui rendront la grève de plus en plus combative, de plus en plus forte. Il prendra les initiatives nécessaires pour développer le soutien des ouvriers de la région.

Ainsi la lutte de l’A.L.E. et des autres intercommunales pourra prendre toute son ampleur et arracher la victoire.

Quelle classe servent Yerna et les autres réformistes « de gauche » ?

Jacques Yerna, président Gazelco [Syndicat du secteur gaz et électricité, ndlr] et secrétaire national FGTB Liège-Huy-Waremme a pris plusieurs fois publiquement position en faveur des grévistes de l’A.L.E.

Il s’est opposé à Cools, le 1er mai, quand il quitta ostensiblement le meeting, en disant « C’est dégoutant ». Il a proclamé à la télévision, face à Mottard, qu’il défendait le droit de grève dans le secteur public. Dans une interview à « Spécial » (18 mai), il souhaitait que tout soit mis en œuvre, si le conflit se généralise, pour qu’aucun accord ne soit signé sans que soit garantie la réintégration des ouvriers sanctionnés et même condamnés.

Tout cela est fort bien.

Seulement Yerna prétend défendre les travailleurs, et en même temps il déclare, écoutez bien ceci « qu’il est soucieux, dans cette même grève, de sauver l’image de marque de l’entreprise publique ».

Il faudrait s’entendre. Les intérêts des travailleurs sont une chose, l’image de marque de l’entreprise publique en est une autre : c’est la bonne réputation du capitalisme d’Etat (face au capitalisme privé).

M. Yerna, on ne peut servir deux maîtres à la fois. Si vous tenez tant à l’entreprise publique, vous êtes un agent du capitalisme exactement comme les Cools et les Mottard. Et le « conflit » que vous dites avoir avec eux ne porte que sur la tactique, sur la manière de défendre au mieux le capitalisme d’État (contre les travailleurs) : eux frappent les travailleurs et vous vous les trompez. Il y a le réformisme de droite et le réformisme « de gauche », qui sont comme les deux mains d’un même corps.

La spécialité de Yerna, c’est la régionalisation. Récemment un certain groupe Bastin-Yerna a publié une brochure où ces réformistes prétendent « sauver la Wallonie » en soutirant plus de crédits de l’État au détriment de la Flandre. Cette politique nationaliste ne peut qu’opposer entre eux les ouvriers wallons aux ouvriers flamands. C’est une politique de division qui sert directement les intérêts de la bourgeoisie.

La conclusion pratique qu’il faut tirer de ceci est que les travailleurs ne doivent faire confiance à aucun dirigeant réformiste, qu’il soit de droite ou « de gauche », parce que tous défendent une seule et même classe : la bourgeoisie. Les réformistes « de gauche » sont les plus dangereux, parce que leur façade ouvrière peut induire les travailleurs en erreur.

Les ouvriers doivent s’en tenir à la défense intransigeante de leurs revendications propres et déjouer les pièges des hautes instances syndicales.

La nouvelle ligne de TPO-AMADA appliquée à l’A.L.E.

Soutien complet à Yerna et à l’appareil de la FGTB

Les dirigeants du PSB et du PCB font passer les militants de TPO pour des « gauchistes », de dangereux « agitateurs ». Dans leur langage, cela signifie révolutionnaires.

Mais la ligne de TPO appliquée dans la grève de l’A.L.E. est-elle vraiment révolutionnaire ?

Pendant plusieurs années, TPO a eu sur les dirigeants réformistes (PSB, directions syndicales) une position claire et nette, une position vraiment communiste : il les déclarait traîtres à la classe ouvrière.

Mais depuis quelques temps, TPO a retourné sa veste et il s’est mis à découvrir, au sein des directions réformistes nationales, des éléments progressistes et honnêtes qu’il faudrait gagner à la révolution. Lors des dernières élections communales, TPO appela les ouvriers à voter pour « les forces favorables à l’indépendance et à la démocratie dans le PSB » (TPO, n°71, 29-9-76). Et de qui s’agissait-il ? Une de ces perles n’était autre que… Cools, sacré « grand patriote » et « grand démocrate » !

Aujourd’hui, vu les circonstances, TPO a laissé tomber son champion (c’est un progrès, il faut en convenir !) pour reporter son amour du réformisme sur Yerna et l’appareil de la FGTB.

Dans un tract à l’A.L.E., TPO écrit :

« (Aux) organisations syndicales Cools a lancé un véritable défi en annonçant dans son discours du 1er mai que c’est le Congrès du PSB, donc le « politique », qui aurait à trancher le conflit. Il a ainsi clairement annoncé sa volonté de voir un mouvement politique, mené par quelques ténors, imposer sa loi au mouvement syndical, la masse des travailleurs.

MAIS CE QUI EST GRAVE SURTOUT (en majuscules chez TPO), c’est que Cools dénie aux organisations syndicales d’être les représentants des travailleurs. Pour lui, les représentants des travailleurs, ceux qui auront à se prononcer sur le conflit, ce sont les affiliés du PSB (moins de 10% de la population dans le meilleur des cas). Il a également fait en sorte que les travailleurs, affiliés au PSB, se dressent contre la majorité des autres travailleurs. »

En clair, cela signifie que TPO prend au sérieux le « conflit » entre les dirigeants PSB et les dirigeants FGTB et qu’il présente ces derniers comme les « représentants des travailleurs ». C’est pourquoi il réclame « l’indépendance syndicale » de la FGTB. C’est exactement la position de Yerna et consorts. En réalité, nous savons très bien que dirigeants du PSB et dirigeants de la FGTB sont bonnet blanc et blanc bonnet, et c’est pur confusionnisme de la part de TPO de vouloir trouver dans un cas des ennemis et dans l’autre des amis de la classe ouvrière. Les affiliés du PSB et les syndiqués de la FGTB sont soumis à une seule et même dictature réformiste. Ils ont pour tâche commune de démasquer et de chasser du mouvement ouvrier les dirigeants traitres, par la violence révolutionnaire.

Emporté dans son élan, TPO, dans son dernier tract à l’A.L.E., félicite Yerna de sa détermination et s’autorise ainsi à blanchir tout l’appareil de la FGTB. :

« Cette position (de Yerna) doit encourager les travailleurs de l’A.L.E. et de toute la région, qui depuis « l’affaire des 7 Cockerill », en passant par le cas de Miel De Bruyne de la S.I.B.P. d’Anvers et des délégués de Caterpillar, craignaient que la FGTB ne soit une organisation sur la défensive et non pas un appareil combatif capable d’arracher de nouveaux droits aux travailleurs. »

Ouvriers, abandonnez toute « crainte » de ce genre : vous avez toujours eu la berlue quand vous constatiez les trahisons infâmes et répétées des dirigeants syndicaux et les communistes se sont toujours trompés quand ils expliquaient que l’appareil syndical, la direction syndicale nationale était intégrée à l’Etat capitaliste ! TPO lui-même disait cela naguère, mais il s’est révélé trop faible pour résister à la pression de la bourgeoisie et du réformisme.

TPO est en passe de devenir un appendice du réformisme « de gauche », un groupe qui cautionne, au nom de la révolution et du socialisme, des ennemis patentés de la classe ouvrière.

27 mai 1977

Annexe

Une prise de position

Un travailleur de L’A.L.E., militant du PCB, nous a remis le texte suivant, qu’il comptait lire devant l’assemblée. S’il ne l’a pas fait, c’est, dit-il, parce qu’il craignait d’appeler à la grève générale sans connaître l’état d’esprit des autres sièges. Voilà un résultat de la manœuvre de division des directions syndicales.

Nous approuvons la position défendue par ce camarade… et nous lui faisons remarquer qu’elle ne reflète pas exactement celle de son parti ! Il connaît les avances que Van Geyt et consorts ne cessent de faire à Cools pour pouvoir être embarqué dans le « front des progressistes ».

Voici le texte :

« Camarades,
Il ne faut pas oublier les punis et surtout les prisonniers politiques incarcérés par la faute des déclarations mensongères des gestionnaires PSB. Ils présentent un précédent dangereux sur la voie ouverte à la dictature de tendance national-socialiste. Est-ce ce possible que dans notre région déjà opprimée dans les années 40-50 des passionnés de portefeuille soient à la base même de ce retour au FASCISME. Est-il permis que des socialistes oublient que leur père et grand-père ont souffert dans les camps ? Est-il possible que ceux-Là mêmes qui préservent soi-disant l’acquis social des travailleurs AU MOMENT DES ÉLECTIONS, les fassent incarcérer en période de grève ?

Comment le président du PSB peut-il dire sur la voie publique des ouvriers en grève : « VOUS POUVEZ CREVER » ?

Nous réclamons la libération immédiate et le retrait des plaintes faites par les PSBistes et leurs acolytes. »


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