Par Tang Hsiao-wen − publié dans Pékin Information n° 36, 1972

etude.jpgEnjoignant aux cadres supérieurs de notre Parti d’étudier consciencieusement les œuvres de Marx, Engels, de Lénine et de Staline, le président Mao leur a recommandé de lire quelques ouvrages sur l’histoire de la philosophie − chinoise et européenne. Cette instruction est très importante pour apprendre à observer et à analyser les questions du point de vue du matérialisme dialectique et du matérialisme historique et pour critiquer à fond l’idéalisme et la métaphysique sous toutes leurs formes.

Les deux camps adverses en philosophie

Toute l’histoire de la philosophie est traversée par la lutte entre le matérialisme et l’idéalisme, et entre la dialectique et la métaphysique. Toutes les tendances et écoles philosophiques qui se sont manifestées au cours des millénaires procèdent soit du matérialisme soit de l’idéalisme, soit de la dialectique soit de la métaphysique, quelles que soient la marque de l’époque qui les caractérise et la forme qu’elles épousent dans des conditions historiques différentes.

L’affrontement de ces deux camps sur le front philosophique est une manifestation du conflit d’intérêts des classes antagonistes. De tout temps, l’opposition de l’idéalisme et de la métaphysique au matérialisme et à la dialectique a été, pour les classes réactionnaires, un important aspect de leurs attaques contre les classes révolutionnaires. L’acuité et la complexité de la lutte de classes dans la société se traduisent nécessairement dans le débat entre le matérialisme et l’idéalisme et entre la dialectique et la métaphysique.

Et ce débat se poursuit après la prise du pouvoir par le prolétariat. En vue de recouvrer leur « paradis » perdu, les classes exploiteuses vaincues s’appuient toujours sur l’idéalisme et la métaphysique pour façonner l’opinion publique à leur profit.

Prenons l’exemple de la Chine. A l’instigation de Liou Chao-chi et de ses acolytes et avec leur soutien, les traîtres, agents secrets et représentants de la bourgeoisie infiltrés au sein du Parti n’ont cessé d’attaquer la philosophie marxiste, après la fondation de la République populaire de Chine, dans le but de préparer l’opinion publique en faveur d’une restauration du capitalisme.

Or, en pénétrant, par l’étude de l’histoire de la philosophie, la loi régissant le conflit entre le matérialisme et l’idéalisme et entre la dialectique et la métaphysique, nous sommes en mesure de discerner l’essence de la lutte de classes à travers la lutte sur le front philosophique, et pouvons ainsi mieux comprendre que la propagation du matérialisme dialectique et du matérialisme historique et la critique de l’idéalisme et de la métaphysique constituent une tâche de combat de longue haleine et qu’il faut toujours veiller à déceler les attaques de l’ennemi de classe sur le front philosophique et y riposter.

Toutes les écoles philosophiques réactionnaires de l’histoire ont leurs origines idéologiques. L’idéalisme d’aujourd’hui découle de celui d’hier. Les théories idéalistes et métaphysiques colportées sous une étiquette nouvelle, par les opportunistes et les révisionnistes sont simplement de la camelote prise dans l’arsenal de la philosophie réactionnaire de leurs prédécesseurs.

La théorie idéaliste de l’apriorisme des escrocs du genre de Liou Chao-chi, selon laquelle les connaissances seraient innées, n’est pas une innovation. Ils ne font que ressasser les propos que toutes les classes réactionnaires avaient tenus pendant des millénaires pour induire en erreur le peuple travailleur.

A l’époque de Tchouentsieou, dans la Chine ancienne, Confucius (551-479 av. J.-C.), penseur représentatif des propriétaires d’esclaves, vanta les « sages » nés avec la « science infuse » et prétendit que l’intelligence et la sottise étaient innées et immuables. Après lui, beaucoup de maîtres à penser de la classe des propriétaires fonciers, propagèrent aussi, d’une manière ou d’une autre, des théories aprioristes de l’idéalisme.

En Europe, Platon, philosophe des propriétaires d’esclaves et de l’aristocratie de la Grèce antique, prôna l’immortalité de l’âme et affirma qu’avant de naître, l’homme était déjà muni de tout son savoir dans le « monde des idées » et que l’étude est simplement une réminiscence des connaissances acquises au cours d’une vie antérieure.

De son côté, le philosophe bourgeois allemand Kant, tout en admettant que l’expérience était aussi une source de la connaissance, soutenait pourtant qu’avant de connaître une chose, l’homme possède « la forme pure des intuitions sensibles en général… a priori dans l’esprit ». Malgré leur formulation différente, ces philosophes idéalistes étaient d’avis que la connaissance est innée et niaient qu’elle découle de la pratique, qu’elle est le reflet du monde objectif.

Pas de distinction sans comparaison. De nos jours, niant catégoriquement le rôle de la pratique dans la connaissance, les escrocs du genre de Liou Chao-chi clament que certains sont nés « hommes de génie ». N’est-ce pas là une variante de la théorie éculée de l’apriorisme ? La seule différence est qu’ils se réclament du marxisme, recourant à des citations tronquées pour en imposer aux gens.

En lisant quelques ouvrages sur l’histoire de la philosophie, en nous renseignant sur la lutte entre les deux lignes en matière de philosophie et sur les formes par lesquelles elle s’extériorise à chaque époque, et en liant les luttes passées à celles d’aujourd’hui, nous sommes en mesure de saisir la différence entre la théorie matérialiste de la réflexion et la théorie idéaliste de l’apriorisme, et d’accroître notre aptitude à percer à jour les mensonges et sophismes des pseudo-marxistes.

Un aspect important de la lutte entre les deux lignes

Les éducateurs de la révolution prolétarienne, qui attachent toujours une grande attention à la lutte dans le domaine philosophique, considèrent la critique de l’idéalisme et de la métaphysique bourgeois comme un aspect important de la lutte entre les deux lignes. Pour démolir la philosophie opportuniste et révisionniste, ils ne se contentent pas de signaler sa nature réactionnaire sur le plan politique et théorique, mais révèlent aussi son étroite parenté avec l’idéalisme et la métaphysique dans l’histoire, dont ils exposent les grands maîtres au grand jour.

Dans les années 70 du XIXe siècle, Dühring, se posant en « réformateur du socialisme », fit beaucoup de battage autour de sa philosophie qu’il présentait comme « une vérité définitive en dernière analyse ». Il attaqua furieusement le marxisme et complota pour « grouper autour de sa personne une coterie, le noyau d’un parti séparatiste de l’avenir ».

Le démasquant sans merci dans l’Anti-Dühring, Engels décrivit comment, après avoir ostensiblement tout dénigré, il concocta furtivement une macédoine philosophique en plagiant la métaphysique de Kant et l’idéalisme de Hegel. Engels dénonça ce « charlatan » achevé et déjoua ses manœuvres criminelles visant à diviser le Parti social-démocrate allemand.

Au début du XXe siècle, les révisionnistes russes, Bogdanov et ses semblables, affublèrent la doctrine de Mach du manteau de « philosophie scientifique la plus moderne » afin de « rectifier » le marxisme et d’appliquer une ligne opportuniste consistant à liquider la révolution et le parti prolétarien. Tout en menant contre eux une lutte résolue dans le domaine politique, Lénine les stigmatisa à fond sur le plan philosophique.

Dans Matérialisme et empiriocriticisme, il prouva, nombre de documents historiques à l’appui, que cette doctrine était, sur tous les points de la théorie de la connaissance, incompatible avec le marxisme. Il indique encore qu’elle dérivait de l’idéalisme subjectif de George Berkeley, évêque irlandais du XVIIe siècle, et de l’agnosticisme de David Hume, qu’elle avait pour compagnon d’armes l’immanence, théorie archiréactionnaire, et pour continuateur le fidéisme réactionnaire, qui prêche ouvertement le théisme.

Critiquant la doctrine de Mach, Lénine cita cet adage : « Si tu veux connaître ton ennemi, va dans son pays. » Déclarer simplement que l’idéalisme est une absurdité ne suffit pas pour le vaincre. On n’en vient à bout qu’après l’avoir compris et critiqué de façon approfondie. Et pour réfuter radicalement la philosophie bourgeoise et révisionniste, nous devons nous inspirer de l’esprit de combat, sérieux et scientifique, des grands éducateurs de la révolution. Il est donc impératif de consacrer un certain temps et de faire quelques efforts pour étudier certains ouvrages sur l’histoire de la philosophie.

Comment transformer le monde − selon la conception prolétarienne ou selon la conception bourgeoise du monde ? Tel est, en fin de compte, l’enjeu de la lutte entre les deux lignes menée au sein du Parti. Cette lutte met également aux prises le matérialisme dialectique d’une part, et l’idéalisme et la métaphysique d’autre part.

Depuis un demi-siècle, le président Mao a toujours envisagé la lutte entre les deux lignes au sein du Parti sous l’angle de la conception du monde pour y trouver une juste solution ; aux moments cruciaux, pour faire échec aux lignes opportunistes et révisionnistes et liquider leur influence néfaste, il a toujours recommandé à tout le Parti de veiller à étudier la philosophie et son histoire, et à détruire les fondements théoriques de ces lignes.

Pour combattre la ligne opportuniste du renégat Wang Ming, il rédigea en 1937 les célèbres essais philosophiques De la pratique et De la contradiction. Le premier récapitule les luttes qui opposèrent dans l’histoire de la philosophie le matérialisme à l’idéalisme au sujet de la relation entre le savoir et l’action ; donnant un exposé systématique de la théorie matérialiste-dialectique de l’unité du savoir et de l’action, il montre que le dogmatisme et l’empirisme, qui sont deux formes de subjectivisme, ne font que répéter les erreurs du rationalisme et de l’empirisme du passé.

Le second dresse le bilan du conflit des conceptions dialectique et métaphysique du monde dans l’histoire de la connaissance ; il donne une explication pénétrante de la loi fondamentale de la dialectique matérialiste et fait remarquer que le mode de pensée dogmatique et empirique, qui est subjectif, superficiel et unilatéral, perpétue les erreurs de la métaphysique de jadis.

En 1957, dans sa grande œuvre De la juste solution des contradictions au sein du peuple, le président Mao a analysé, du point de vue du matérialisme dialectique et du matérialisme historique, les contradictions, les classes et la lutte de classes dans la société socialiste ; à la lumière de la ligne marxiste-léniniste, il a critiqué à fond la ligne révisionniste et montré qu’une des caractéristiques du révisionnisme était de combattre ou de dénaturer le matérialisme et la dialectique. Il a maintes fois souligné combien sont importantes l’étude et l’application du matérialisme dialectique pour discerner et critiquer le révisionnisme.

En 1959, s’opposant à la ligne opportuniste de droite de Peng Teh-houai, il a particulièrement mis l’accent sur la nécessité de repousser la tendance antiparti et antimarxiste sur le plan idéologique, c’est-à-dire théorique. Ainsi, il nous a appelés à étudier la philosophie, et ensuite son histoire, pour réfuter l’empirisme dans le domaine théorique.

Dans l’actuel mouvement d’éducation sous le rapport de l’idéologie et de la ligne politique, il nous a encore recommandé de lire quelques ouvrages sur l’histoire de la philosophie. On voit par là que dans la lutte entre les deux lignes, une importante expérience historique des victoires acquises par la ligne marxiste-léniniste sur la ligne révisionniste et contre-révolutionnaire est d’étudier la philosophie et son histoire, et de critiquer à fond l’opportunisme et le révisionnisme sous l’optique de la conception du monde.

Accroître l’aptitude à penser

Engels indiquait que pour développer et améliorer l’aptitude à penser, il fallait étudier la philosophie du passé, généralisation et synthèse des connaissances de la nature et de la société.

L’histoire de la philosophie est donc aussi celle de la connaissance humaine, au cours de laquelle l’homme a accumulé une expérience précieuse au travers de maints revers et vicissitudes. Le fait que certains versent dans l’idéalisme est dû non seulement à leur origine de classe, mais encore à des raisons gnoséologiques.

La connaissance humaine n’est pas un processus ascendant rectiligne mais suit un mouvement hélicoïdal. Si un aspect fragmentaire de ce processus est exagéré inconsidérément et pris comme une valeur absolue, on obtient une représentation déformée de la vraie nature des phénomènes objectifs qui mène droit à l’idéalisme. Lénine disait à ce propos : « Démarche rectiligne et unilatéralité, raideur de bois et ossification, subjectivisme et cécité subjective, voilà les racines gnoséologiques de l’idéalisme. »

Ne tenant compte ni de la nature sociale des hommes ni du développement de l’histoire, et dénué comme il l’était de dialectique scientifique, le matérialisme pré-marxiste recourut à des méthodes simplistes à l’égard de l’idéalisme et ne parvint pas à faire une analyse scientifique de son origine de classe ni à extirper ses racines gnoséologiques.

Aussi, ne parvint-il jamais à le vaincre complètement et le rôle actif de l’esprit, par lui négligé, fut développé par son adversaire. Seul le matérialisme dialectique du marxisme a pu en triompher et fournir à l’humanité une conception du monde et une méthodologie scientifique pour connaître et transformer le monde.

Les erreurs de nos prédécesseurs sont pour nous autant de leçons utiles. Ici, nous pouvons tirer en effet un enseignement d’importance capitale : Si nous nous appuyons uniquement sur une pensée matérialiste dialectique encore fruste, si nous n’étudions pas le matérialisme dialectique ni le matérialisme historique et n’améliorons pas consciencieusement notre aptitude à connaître, nous ne pourrons résister aux attaques de l’idéalisme et de la métaphysique, verserons sans nous en douter dans la voie de l’idéalisme et de la métaphysique et commettrons des erreurs « de gauche » ou de droite dans la lutte révolutionnaire.

Mais si, prenant le marxisme-léninisme comme guide, nous étudions l’expérience positive et négative acquise dans l’histoire de la philosophie par nos prédécesseurs dans le domaine de la connaissance et en tirons profit dans les luttes actuelles, nous serons en mesure d’éviter leurs erreurs, de posséder le marxisme, de comprendre et d’assimiler mieux encore le matérialisme dialectique, et d’implanter en nous la conception scientifique du monde du prolétariat.


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