Publié dans l’hebdomadaire Clarté et L’Exploité n°230, semaine du 22 au 28 juin 1978

Lorsque nous déclarons que le Vietnam joue le rôle de tête de pont du social-impérialisme, lorsque nous disons que les dirigeants vietnamiens pratiquent une politique chauvine agressive (voir Clarté numéro 229), nous ne le disons pas de gaieté de cœur.

Votre parti a été à l’avant-garde de la solidarité avec la lutte du peuple vietnamien contre la criminelle agression de l’impérialisme américain ; nombre de nos militants ont été arrêtés, matraqués, soumis à de multiples menaces durant les manifestations de soutien au peuple vietnamien.

Nous avons donc été totalement solidaires de la République Démocratique du Vietnam et du FNL du Sud-Vietnam tout au long de leur juste combat.

Mais cette solidarité n’est pas une chose aveugle. Notre politique doit toujours tenir compte de l’évolution de la situation internationale, du rapport des forces, du développement de la lutte des classes tant à l’échelle mondiale que dans chaque pays.

UN MILLION DE RESSORTISSANTS CHINOIS AU VIETNAM

Or que voyons-nous ? Le Vietnam qui agresse d’abord le Kampuchéa. Ensuite il s’en prend à la République Populaire de Chine et à ses citoyens d’outre-mer résidant au Vietnam.

Dans cet article, nous allons expliquer la situation telle qu’elle se présente et non telle que les officines à la solde du social-impérialisme la décrivent.

Vivent au Vietnam plus d’un million de ressortissants chinois. Ce sont essentiellement des travailleurs et non des commerçants ou des hommes d’affaires.

Dès 1955, les Partis Communistes chinois et vietnamien avaient conclu un accord concernant le problème de la citoyenneté de ces populations en distinguant bien celles qui habitaient le nord ou le sud du Vietnam encore occupé, à l’époque, par l’impérialisme étranger.

Le Vietnam a déclaré à plusieurs reprises conformément aux accords de 1955 :

« Les Chinois doivent jouir d’une liberté totale quant à l’option pour la nationalité vietnamienne, ii ne faut absolument pas les y obliger ».

« Il faut continuer à accorder tous les droits à ceux qui mort pas encore adopté de leur propre gré la nationalité vietnamienne et s’abstenir d’adopter une attitude discriminatoire à leur égard. Il n’est absolument pas permis de précipiter les choses en leur donnant des ordres et de les mépriser ».

Tout cela était conforme à l’esprit de fraternité entre les deux peuples. Et les résidents chinois au Vietnam jouissaient des mêmes droits et devoirs politiques que les citoyens vietnamiens : sur le plan économique, il en était de même et sur le plan culturel, ils avaient leurs propres écoles, leurs journaux, etc. Or, tout à coup, depuis ces dernières années, malgré l’accord convenu entre les deux partis, les deux pays, le gouvernement vietnamien a forcé les résidents chinois à adopter la nationalité vietnamienne, a fermé leurs écoles, a interdit leurs journaux, allant jusqu’à les brimer sur le plan des traditions et à les refouler du territoire vietnamien.

POURQUOI CES EXACTIONS CHAUVINES ?

On peut se poser la question du pourquoi de cette décision arbitraire et unilatérale prise par le Vietnam. Une décision qui n’a rien à voir avec l’internationalisme prolétarien, avec la phrase du Président Ho Chi-Minh qui disait que la Chine et le Vietnam étaient aussi proches que les lèvres et les dents.

Remontons à l’époque de l’agression du Vietnam contre le Kampuchéa… La république Populaire de Chine a tout fait pour que les différends surgis entre les deux pays puissent être résolus par des entretiens, par des discussions. Mais la volonté affirmée du Vietnam d’entreprendre des négociations tout en occupant une partie du territoire kampuchéen, ainsi que de maintenir son projet de « fédération indochinoise », a fait échouer les tentatives de pourparlers.

La Chine a pris alors une juste position, défendant l’agressé contre l’agresseur, défendant la juste position en la matière du Parti Communiste du Kampuchéa.

C’est alors qu’au Vietnam les éléments chauvins ont commencé à s’en prendre aux ressortissants chinois, allant jusqu’à leur faire craindre le pire en laissant circuler le bruit qu’une guerre allait éclater entre la Chine et le Vietnam.

En outre, les Vietnamiens ont refoulé vers l’intérieur du pays des centaines de milliers de Chinois qui étaient installés depuis des générations dans les régions frontières du Vietnam.

Puis, troisième étape, en octobre 1977, l’opération a abouti à l’expulsion massive des Chinois. A la fin du mois de mai 1978, on en était à un chiffre de plus de cent mille.

Cet afflux soudain de réfugiés en République Populaire de Chine a créé à ce pays des difficultés de ravitaillement, de mise au travail, de logements, etc. Or, la Chine veut compter sur ses propres forces pour régler ce problème et ne désire pas faire appel aux organisations internationales comme l’UNRA pour aider les réfugiés.

Aussi la Chine a-t-elle décidé de résilier certains projets de fourniture d’équipements complets au Vietnam pour affecter ces ressources financières à l’installation des Chinois revenus au pays.

OUI SE TROUVE LÀ-DESSOUS ?

C’est là une juste position qui tient compte de la réalité de la situation.

Déjà depuis le rétablissement de la paix au Vietnam, l’aide chinoise avait diminué en accord total avec le Parti Vietnamien et pour des raisons fort compréhensibles.

Non seulement ces dernières années, la Chine a connu les sabotages dus à la bande des Quatre mais elle a également souffert de calamités naturelles importantes.

Le Premier ministre Chou En-laï déclarait à un dirigeant vietnamien en visite à Pékin :

« Dans les années de guerre, quand vous connaissiez les moments les plus difficiles, parmi les choses que nous vous avons données, beaucoup ont été prélevées sur des unités de notre armée.

Nous avons fait de gros efforts pour vous soutenir. A présent, le montant global affecté à l’aide au Vietnam occupe toujours la première place dans notre aide à l’étranger. Vous devriez nous laisser reprendre haleine et nous accorder un peu de répit ».

Or, aujourd’hui, le Vietnam se lance dans une campagne de calomnies à l’égard de la Chine quant à son aide qui a été la plus importante de toutes durant la guerre de résistance du peuple vietnamien à l’agression américaine. C’est là une chose inadmissible.

Le peuple chinois, son Parti, son gouvernement ont tout fait pour maintenir de bonnes relations avec le peuple vietnamien.

Mais qu’ont fait les dirigeants vietnamiens pendant ce temps-là ? De plus en plus dépendants du social-impérialisme sur le plan économique, politique et militaire, ils ont été jusqu’à accepter l’installation sur leur territoire de bases étrangères − des bases militaires russes − pour encercler la République Populaire de Chine.

C’est une politique criminelle que celle qui consiste à opposer les peuples aux peuples, à diviser pour régner, à fomenter des troubles pour en tirer avantage. C’est ainsi que Cuba a agi en Afrique (en Angola, en Ethiopie, etc…), c’est ainsi que le Vietnam agit en Asie.

Notre solidarité va au peuple chinois et à ses résidents qui sont brutalement arrachés de leurs foyers, jetés à la rue, battus, blessés, dépossédés de leurs biens, expulsés.

Autant hier nous étions fermes dans notre soutien au peuple vietnamien, autant fermes serons-nous dans notre dénonciation du rôle de valets du social-impérialisme que jouent actuellement les dirigeants vietnamiens.


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