Note du Centre MLM[B] : Une organisation petite-bourgeoise, même si elle prétend se ranger sur des positions prolétariennes reste une organisation petite-bourgeoise. Nous étant confrontés à ce document très parlant de Fernand Lefebvre et des siens, voilà, en substance, ce que nous pouvons en dire.
En 1975, le PCMLB de Lefebvre était totalement aligné sur le PCMLF du social-chauvin français Jacques Jurquet dont il partage pour l’essentiel les positions ultra-subjectivistes.
Il est ici une nouvelle fois expliqué qu’il faut combattre le social-impérialisme soviétique et l’impérialisme américain… tout en s’alignant sur ce dernier aux fins d’exploiter son « affaiblissement ». Le « tiers-mondisme » et les « trois mondes » comme ligne de conduite stratégique générale dont nous avons largement parlé dans un document ne sont ici pas très loin.
La vérité est que Lefebvre et les siens n’ont rien compris à Mao Zedong. Il en résulte que nous avons la même idéologie que Deng Xiaoping, chef de la fraction pro-capitaliste dans le Parti Communiste de Chine, qui a présenté publiquement sa conception anti-maoïste des « trois mondes » à la session spéciale de l’assemblée générale de l’ONU, le 10 avril 1974 ; ce discours de Deng Xiaoping étant lui-même cité comme référence dans le présent document.
Les positions social-chauvines du PCMLB rejoignent également sur de nombreux points celles du Parti Communiste de Belgique de Jacques Grippa, notamment quant à la lutte pour l’indépendance nationale qu’il faudrait substituer à la lutte révolutionnaire dans les pays impérialistes.
Le PCMLB oubliant opportunément que la contradiction entre la bourgeoisie et le prolétariat est antagoniste, la politique extérieure du gouvernement bourgeois de l’époque peut être ici aisément défendue, la Belgique réactionnaire en la personne de son premier ministre, Léo Tindemans, ayant fait, à l’occasion de son voyage en Chine, des « déclarations positives » que le PCMLB approuve et qui « s’inscrivent dans le cadre de la lutte contre les deux superpuissances quand il [Tindemans] exalte l’union des peuples d’Europe, quand il cite l’exemple de la convention de Lomé entre la CEE et les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. »
La révolution dans les pays impérialistes ne dépend pas d’une « liaison » avec le Tiers-Monde, mais d’une pensée-guide qui se situe dans le cadre de la Révolution Mondiale. Dire autre chose signifie nier la contradiction antagonique entre la bourgeoisie et le prolétariat dans un pays capitaliste.
Cela montre la nécessité d’une analyse de la réalité, sur la base du matérialisme dialectique, à travers la participation à la lutte de classe et avec la naissance d’une pensée-guide ; la révolution ne peut pas être fondée sur le subjectivisme, sur le rupturisme, même au nom du Tiers-Monde.
Présentation
Le week-end du 8 novembre s’est réunie la Conférence nationale du Parti communiste marxiste-léniniste de Belgique consacrée à la situation internationale.
Les problèmes de politique étrangère ont toujours été une préoccupation majeure de notre Parti. Les documents du premier Congrès (1er et 2 juillet 1972) insistaient sur la nécessité de mener une lutte énergique contre les deux superpuissances ; les documents de la Conférence nationale de réunification (février 1974)1 soulignaient en outre, même si l’analyse restait encore insuffisante, que le social-impérialisme russe « est un impérialisme plus répugnant et plus dangereux que l’impérialisme américain ».
Cependant, en ces années d’affrontement permanent, de rivalité sans cesse exacerbée des deux superpuissances, les événements évoluent rapidement et il importe de voir clairement ce qui change.
Les marxistes-léninistes sont très attentifs aux analyses du Parti communiste chinois, notamment à l’analyse exprimée par le camarade Chou En-lai dans le rapport qu’il a présenté, le 13 janvier 1975, à la première session de la IVè Assemblée populaire nationale de la République populaire de Chine. Il disait :
« Les États-Unis et l’Union soviétique, ces deux superpuissances, constituent à notre époque les plus grands oppresseurs et exploiteurs internationaux, de même que le foyer d’une nouvelle guerre mondiale. Leur dispute acharnée aboutira un jour ou l’autre à une guerre mondiale, et les peuples du monde doivent y être préparés ».
Cette thèse est émise à la lumière du marxisme-léninisme, de la pensée maotsétoung. Elle dit bien « aboutira » et non « peut aboutir ». Il ne faut pas se leurrer. Lénine nous a montré que tant qu’il y a l’impérialisme, les guerres impérialistes sont inévitables. Plus particulièrement, l’affrontement en Europe des deux superpuissances, leur armement porté à un degré jamais atteint auparavant, la supériorité écrasante du social-impérialisme russe en ce domaine, montrent que la troisième guerre mondiale est inévitable, que l’Europe en sera l’enjeu et que nous devons être prêts. Mais il est certain également que cette troisième guerre mondiale entrainera l’effondrement, au moins en grande partie, du système impérialiste mondial.
Dans ces conditions, l’attitude des communistes est capitale. C’est eux qui doivent prendre la tête de la lutte pour l’indépendance nationale, pour défaire l’agresseur impérialiste, pour transformer la guerre déclenchée par l’impérialisme en tombeau de l’impérialisme.
La discussion a eu lieu dans notre Parti, à tous les niveaux. Elle s’est développée, a remis en cause certaines positions antérieures qui cessaient d’être justes dans des circonstances nouvelles. Il y a eu lutte entre deux lignes, une discussion prolongée qui a amené à réétudier des textes marxistes-léninistes essentiels. Et cela a conduit à l’organisation d’une Conférence nationale qui a fait le bilan de cette discussion et mis au point le document intitulé : « La révolution prolétarienne, la lutte contre les deux superpuissances, pour l’indépendance nationale et la pratique du front uni ».
Pour la préparation de cette Conférence, le Bureau politique avait soumis un premier projet qui a été discuté dans toutes les cellules et les assemblées régionales. En fonction de ces discussions, le Comité central a établi le projet de document qui a été analysé en profondeur, amendé et amélioré par la Conférence nationale ; celle-ci a adopté le texte définitif à l’unanimité.
La Conférence nationale a commencé par le rapport du premier secrétaire du Comité central qui a rappelé les étapes de la discussion et a rencontré diverses objections présentées. Les interventions ont été de deux sortes. Les unes venaient de porte-parole de collectifs qui s’étaient constitués dans diverses régionales et avaient analysé certains problèmes concrets. La Conférence a entendu et longuement applaudi d’excellentes analyses sur les thèmes suivants :
– La guerre est inévitable ; il faut en rendre conscient notre peuple, lui prouver que l’Europe est le point-clé de la rivalité ; il faut lui montrer la nécessité et la possibilité de lutter contre les deux superpuissances et que le danger principal, c’est le social-impérialisme ;
– La lutte pour l’indépendance nationale ne s’inscrit pas contre la lutte de classe, elle en est un aspect essentiel ; il faut lutter pour unir les pays et les peuples d’Europ contre les deux superpuissances, pour l’indépendance nationale ; la classe ouvrière doit être à la tête de ce combat ;
– Nous devons viser à l’union la plus large contre les deux superpuissances mais en aucun cas nous ne pouvons nous mettre sur le même pied que la bourgeoisie et encore moins nous mettre à sa remorque ;
– Le social-fascisme est le pire ennemi de la classe ouvrière ; il faut démasquer clairement devant les masses le danger social-impérialiste, les nouveaux hitlériens que sont les révisionnistes soviétiques ;
– Au Portugal, les superpuissances interviennent cyniquement ; le social-fascisme constitue le danger principal ; ceux qui ne démasquent pas par priorité le social-fascisme et les complots social-impérialistes nuisent gravement au combat révolutionnaire ;
– En Angola, les deux superpuissances intriguent ; l’URSS en particulier a comploté contre l’unité du peuple angolais ; elle intervient, appuie un mouvement de libération contre les deux autres dans des buts néocolonialistes ; nous soutenons l’unité des trois mouvements et la lutte du peuple angolais pour son indépendance nationale ;
– Les peuples du tiers monde sont notre meilleur allié dans la lutte contre les deux superpuissances ; pour la sauvegarde de notre indépendance nationale.
Les autres interventions concernaient des points particuliers du document proposé : l’alliance avec certaines fractions de la bourgeoisie pour la sauvegarde de l’indépendance nationale ; les positions développées par le Premier ministre Tindemans ; l’énoncé du principe « que ce soit la guerre qui provoque la révolution ou que ce soit la révolution qui conjure la guerre, l’avenir sera toujours radieux » ; la nécessité et la possibilité de transformer la guerre impérialiste en tombeau de l’impérialisme ; la notion de non-alignement. Il en est résulté une discussion très large, très vivante à travers laquelle le texte définitif a été établi.
Les travaux de la Conférence ont témoigné de la maturité et de la santé du Parti ; les interventions, toutes d’un excellent niveau idéologique, venaient pour la plupart de jeunes militants. C’est un aboutissement : à travers une lutte intense, nous avons abouti à une unité supérieure. Nous avons progressé de façon évidente.
Il reste encore beaucoup à faire. La discussion continue dans le Parti pour approfondir nos connaissances et enrichir notre ligne ; elle continue aussi en dehors de nos rangs avec tous les travailleurs, avec tous ceux que nous rencontrons, que nous côtoyons pour faire pénétrer cette ligne dans les larges masses populaires, pour convaincre, pour vaincre. C’est un énorme travail ; nous le mènerons à bien.
1 – La cible de la révolution prolétarienne c’est la bourgeoisie monopoliste
En Belgique, les monopoles capitalistes dominent la vie économique et politique. Le capital financier est tout puissant ; il pratique sur une grande échelle l’exportation des capitaux ; il participe à des unions de capitalistes monopolistes pour le partage du monde. Les monopoles belges n’exploitent pas seulement les travailleurs de Belgique, mais en outre des millions de travailleurs sur tous les continents, dans les pays du tiers monde et même dans les pays capitalistes développés.
Le capitalisme belge en est au stade de l’impérialisme.
Il en résulte qu’en Belgique, nous en sommes à l’étape de la révolution prolétarienne. La contradiction fondamentale de la société belge est celle opposant la classe ouvrière et la bourgeoisie. Cette contradiction est antagonique et irréductible.
Le programme fondamental du parti prolétarien révolutionnaire, le Parti communiste marxiste-léniniste de Belgique est de renverser la classe des capitalistes, de substituer la dictature du prolétariat à la dictature de la bourgeoisie qui, dans notre pays, revêt la forme d’une démocratie parlementaire. Ainsi pourra être réalisé le socialisme, étape vers la société communiste.
Il est clair que pour la victoire de la révolution prolétarienne, la bourgeoisie monopoliste n’est pas et ne peut être une alliée pour le prolétariat : elle est la cible de la révolution en Belgique.
C’est pourquoi la politique d’union que réalisent la classe ouvrière et son parti prolétarien s’adresse en premier lieu aux autres couches travailleuses : les employés et agents des services publics, les paysans travailleurs, la petite bourgeoisie et même la moyenne bourgeoisie, pour frapper la cible, la bourgeoisie monopoliste.
2 − La rivalité des deux superpuissances conduit à une troisième guerre mondiale ; celle-ci est inévitable
La Belgique n’est pas isolée, elle n’est pas un ilot coupé du reste du monde. Vouloir s’occuper uniquement des problèmes belges et même des problèmes de la classe ouvrière pour l’indépendance nationale belge sans les relier à ce qui se passe dans le monde serait tromper la classe ouvrière, la désarmer et faire le jeu de ses plus féroces ennemis.
A l’heure actuelle, la situation internationale est caractérisée par de grands bouleversements dans le monde et ceux-ci ne cessent de s’amplifier. Le monde capitaliste se trouve confronté à une crise économique d’une gravité exceptionnelle ; la bourgeoisie veut s’en tirer en accentuant son exploitation de la classe ouvrière et des masses laborieuses ; comme celles-ci résistent, elle accentue partout la fascisation et si elle ne peut en sortir elle recourra au fascisme.
L’impérialisme américain et le social-impérialisme soviétique constituent à notre époque les plus grands oppresseurs et exploiteurs internationaux. Ils se disputent avec un acharnement croissant en vue de l’hégémonie mondiale. Ils réarment tant et plus. Il n’y a pas de détente dans le monde mais affrontement permanent de deux superpuissances.
Lénine a montré que tant qu’il y aura l’impérialisme, il y aura des guerres impérialistes ; cela est indépendant de la volonté des hommes. La rivalité exacerbée des deux superpuissances conduit inévitablement à une troisième guerre mondiale. Nous devons nous y préparer.
3 − Le point-clé de la rivalité des deux superpuissances, c’est l’Europe
Devant l’unité et la force grandissantes du tiers monde, devant les échecs que les deux superpuissances ont subis et subissent dans leurs manœuvres en direction du tiers monde, le point-clé de leur rivalité, c’est l’Europe.
L’Europe est la proie qu’ils convoitent. Elle est un continent d’une richesse industrielle prodigieuse, supérieure aux USA et à l’URSS, actuellement le plus vaste marché pour l’écoulement des marchandises, le plus grand centre de commerce extérieur.
L’impérialisme américain étend ses tentacules sur l’Europe occidentale ; la plupart des pays de cette région sont intégrés dans l’OTAN, organisation agressive sous la conduite de l’impérialisme américain ; il y a des bases américaines dans plusieurs pays d’Europe occidentale, dont la Belgique. En outre, les investissements de capitaux américains dans l’économie des pays d’Europe occidentale, dont la Belgique, même s’ils sont en recul, restent considérables.
Le social-impérialisme russe occupe la plupart des pays d’Europe orientale ; il y fait régner une terreur policière, social-fasciste. Il a intégré ces pays dans l’organisation du Pacte de Varsovie sous commandement du vice-ministre de la Guerre de l’URSS. La dépendance économique des pays contrôlés par l’URSS est totale ; toute l’activité agricole, industrielle et commerciale est conduite en fonction exclusive du social-impérialisme russe.
Il ne peut être question pour les peuples européens de choisir entre ces deux impérialismes ; ce sont des brigands de la même espèce ; les peuples d’Europe souhaitent et doivent faite en sorte qu’ils périssent tous les deux.
4 – L’attitude des communistes devant la marche de la troisième guerre mondiale
Les communistes n’oublient jamais l’expérience glorieuse de l’Internationale communiste. Quand le fascisme pour l’indépendance nationale hitlérien a triomphé en Allemagne, elle a clairement désigné le danger principal : c’était l’impérialisme allemand qui avait pour allier les impérialismes italiens et japonais. Il s’agissait de l’impérialisme montant. Celui-ci n’est pas nécessairement celui qui a la plus forte production économique, ni celui qui investit le plus de capitaux à l’étranger ; c’est celui qui est en pleine expansion, qui revendique un nouveau partage du monde qui lui soit plus favorable et qui appuie ses exigences d’un réarmement colossal, qui utilise des cinquièmes colonnes.
L’Internationale communiste a alerté les plus larges masses. Elle a dit : « Le fascisme, c’est la guerre ». Elle a montré qu’en fonction de la grande crise qui frappait alors le monde capitaliste, des contradictions impérialistes, la deuxième guerre mondiale était inévitable. Elle a préconisé le front uni le plus large contre le principal danger, l ‘impérialisme allemand et ses alliés.
La social-démocratie mondiale n’a pas répondu à cet appel ; elle a minimisé le danger, elle a saboté l’union et la mobilisation des peuples contre le fascisme. Au nom de la révolution immédiate, totale et intégrale ; brandissant le drapeau rouge, les trotskistes ont mis sur le même pied le danger principal et les dangers secondaires ; ils ont saboté le front uni, attaqué la défense nationale, fait le jeu de l’impérialisme montant donc le plus dangereux, à l’époque l’impérialisme allemand.
Devant la marche à une troisième guerre mondiale, les communistes aujourd’hui s’inspirent des leçons du passé. Comme jadis Dimitrov en son rapport historique au VIIè Congrès de l’Internationale communiste, ils n’hésitent pas à préconiser le front uni le plus large contre les superpuissances ; ils n’hésitent pas à dire que l’agression d’une superpuissance aux dépens d’un ou de plusieurs pays européens donnera lieu dès le début à une guerre de libération nationale. Même si ces pays ont encore un régime capitaliste, la classe ouvrière et les communistes participeront au premier rang à cette guerre juste. Mais il est évident que toute nouvelle guerre impérialiste entraînera inévitablement un essor révolutionnaire d’une ampleur jamais atteinte et que la révolution triomphera sur la majeure partie du monde si pas dans le monde entier. Les communistes seront évidemment l’avant-garde dirigeante de ces luttes révolutionnaires.
5 – Le social-impérialisme russe est actuellement le danger principal
L’impérialisme américain est un impérialisme en déclin.
Il vient de subir des défaites considérables devant les peuples en armes du Cambodge, du Vietnam, du Laos. Il n’a pas pu imposer ses vues au Moyen-Orient et a dû accepter un partage d’influence temporaire avec son rival. Il est en recul partout devant la montée des peuples. Il subit, plus qu’un autre, la dure crise économique ; il compte près de dix millions de chômeurs complets ; sa monnaie ne cesse de se détériorer.
L’OTAN lui-même est affaibli. La France en est sortie, il y a plusieurs années déjà ; la Grèce vient d’en sortir ; la Turquie a fait mine d’expulser les bases américaines ; le Portugal n’est plus sûr du tout ; en Italie, demain, les révisionnistes peuvent participer au gouvernement et ce sera le rival introduit dans la place ; même l’Espagne franquiste a employé des procédés de maquignon à propos des bases américaines pour obtenir un meilleur prix. Et parmi les pays d’Europe occidentale, les milieux dirigeants expriment de plus en plus le souci de se distancer de l’impérialisme américain. En Asie du Sud-Est, comme conséquence des défaites encourues, les gouvernements réactionnaires de Thaïlande, de Birmanie, de Malaisie, des Philippines, aux prises avec une guerre populaire conduite par le parti marxiste-léniniste, ont tendance à aller à l’autonomie et l’OTASE, cet équivalent de l’OTAN a dû être dissous. Certes l’impérialisme américain peut encore faire beaucoup de mal mais son déclin est irrémédiable.
Par contre, le social-impérialisme russe est l’impérialisme montant. Partout, il entend prendre la place de l’impérialisme américain. Il réarme de façon démentielle. Il dresse l’essentiel de ses armes contre l’Europe occidentale. Les trois-quarts du potentiel militaire soviétique est dirigé contre l’Europe occidentale. La flotte soviétique dans la Méditerranée est supérieure à la flotte américaine. La base navale de la presqu’ile de Kola est la plus importante du monde et permet aux social-impérialistes russes de contrôler tout l’Atlantique septentrional, la mer de Norvège et la presqu’ile de Barentz. Un rideau de sous-marins russes équipés de roquettes à tête nucléaire est dressé dans l’Atlantique depuis le Cap Nord jusqu’au large du Maroc.
En Europe même, le rapport des forces de l’armement est largement favorable à l’URSS : celle-ci aux frontières de l’Europe occidentale a trois fois plus de tanks, près de trois fois plus de divisions blindées, mécanisées et aéroportées, deux fois plus d’avions de combat que l’OTAN. Elle dispose de centaines de missiles sol-sol à capacité nucléaire et à portée européenne. Au total, les moyens militaires soviétiques sont trois fois supérieurs à ceux de l’OTAN. L’État-major soviétique peut, en l’espace de 48 à 72 heures, se rendre maitre du Bassin de la Ruhr et de là, avancer vers l’hinterland portuaire de la Belgique et du nord de la France. Il est clair que nous nous trouvons devant une armée d’agression de même type que l’armée hitlérienne.
Le danger du social-impérialisme russe est d’autant plus grand que celui-ci marche masqué en se couvrant du drapeau rouge et peut de ce fait abuser bien des travailleurs ; il utilise dans chaque pays des partis qui se proclament ouvriers : les organisations révisionnistes, trotskistes, voire gauchistes. Il a à son service des membres et des dirigeants de partis, de syndicats, d’organisations diverses : révisionnistes, sociaux-démocrates ou démocrates-chrétiens. Toutes ces troupes non seulement sabotent le combat ouvrier mais sont, à visage découvert ou sous un masque « révolutionnaire », une cinquième colonne particulièrement virulente.
Une agression du social-impérialisme russe est actuellement le danger principal pour les peuples d’Europe.
6 – Développer le Front uni pour l’indépendance nationale
L’obstacle majeur à la révolution prolétarienne mondiale, ce sont les deux superpuissances, leurs intrigues, leur rivalité exacerbée et leur marche à la troisième guerre mondiale. C’est pourquoi notre combat pour la révolution passe par le stade de la lutte pour l’indépendance nationale. C’est pourquoi nous devons lutter pour constituer le front uni le plus large ; celui-ci s’étend à des secteurs de la bourgeoisie qui, bien sûr, sont des ennemis de la révolution mais qui s’opposent aux deux superpuissances, même si leur opposition ne va sans hésitation ni retours en arrière.
Voilà pourquoi nous avons approuvé le voyage du Premier ministre Tindemans en Chine.
Nous considérons les déclarations que celui-ci a faites à cette occasion comme positives. Une certaine tendance au distancement à l’égard de l’impérialisme américain tout en étant vigilant à l’égard des menées agressives du social-impérialisme russe, l’idée d’une union des pays d’Europe occidentale y compris sur le plan de la défense et même l’idée moins clairement exprimée de l’union des pays d’Europe avec le tiers monde, ce sont là des points que nous soutenons. D’ailleurs, les social-impérialistes ne s’y sont pas trompés qui, en juin dernier, ont réservé un accueil glacial à Tindemans.
Certes, Tindemans est un politicien réactionnaire et le porte-parole de certaines fractions du capital monopoliste belge. Cela confirme notre analyse que certaines fractions de la bourgeoisie belge sont, pour des raisons qui tiennent évidemment à leurs intérêts de classe, opposées aux deux superpuissances et qu’elles sont un allié possible dans la lutte pour la sauvegarde de l’indépendance nationale.
Mais pour avancer dans ce domaine et préciser notre politique, nous devons développer l’analyse de classe dont les premiers éléments sont contenus dans les documents de notre premier Congrès. Nous devons déceler les contradictions au sein de la bourgeoisie belge, quels peuvent être nos alliés contre les impérialistes américains, nos alliés contre les social-impérialistes russes, nos alliés contre les deux impérialismes. Nous devons approfondir l’analyse des formations politiques belges, voir quels sont nos alliés possibles Et jusqu’à quel point.
Une juste politique de front uni pour l’indépendance nationale est une exigence majeure de l’heure.
7 – Les erreurs opportunistes de « gauche » et de droite font le jeu de l’ennemi
Il faut combattre les erreurs sectaires opportunistes de « gauche » et de droite dans la pratique du front uni.
Il faut bannir le sectarisme, les déclamations ultra-gauche, les slogans « purs et durs » qui s’inscrivent contre la lutte pour l’indépendance nationale, qui sont une caractéristique de la politique de la « porte close » et favorisent les visées des deux superpuissances et particulièrement celles du social-impérialisme russe.
Ainsi en est-il de l’antimilitarisme diffusé par les révisionnistes et par les groupes trotskistes ouverts et camouflés. Ils visent à saboter la défense nationale au profit de l’agresseur.
Ainsi en est-il de l’opposition ouverte ou camouflée à la lutte pour l’indépendance nationale, particulièrement l’affirmation qu’il n’est pas d’indépendance nationale possible en dehors de la révolution prolétarienne. Cette position vise à empêcher la large union et à favoriser les manœuvres de l’agresseur.
Non seulement il faut bannir l’opportunisme de « gauche » mais aussi, il faut traquer l’opportunisme de droite. C’est la politique « tout par le front uni » qui fait abandonner l’autonomie du parti au profit du front, la direction du parti dans le front. Il ne peut être question à l’intérieur du front de freiner la lutte de classe. Il n’y a pas d’union sans lutte.
Dans la situation internationale actuelle, il peut y avoir dans un domaine particulier mais essentiel – l’indépendance nationale – une concordance d’intérêts entre le prolétariat et des fractions de la bourgeoisie belge. Cela va pour le prolétariat et son parti révolutionnaire jusqu’à soutenir activement une véritable défense nationale.
Mais il s’agit d’une concordance momentanée qui ne met pas fin à la lutte de classe. La classe ouvrière continue évidemment à se battre contre l’exploitation capitaliste dont elle, est l’objet, contre la paix sociale, contre l’utilisation de l’armée et de la gendarmerie pour réprimer ses luttes, contre la fascisation du régime, contre l’appareil d’État de la bourgeoisie, pour la révolution prolétarienne. La classe ouvrière n’a aucune raison d’être solidaire des capitalistes, de cesser le combat classe contre classe.
8 – Pour l’indépendance totale, pour le non-alignement de la Belgique, pour un Front uni mondial contre les deux superpuissances
Le front uni ne se limite pas à la Belgique. Les marxistes-léninistes de tous les pays s’attachent avec ténacité à la constitution du front uni mondial contre les superpuissances.
Cela signifie que nous soutenons l’union des peuples et des pays d’Europe occidentale contre les deux superpuissances ; nous appuyons tout ce qui dans le processus d’intégration européenne, politique, économique et militaire se développe contre les deux superpuissances. Mais là encore, il s’agit d’une concordance d’intérêts dans un domaine particulier mais essentiel. Nous mènerons une lutte intransigeante contre les monopoles capitalistes qui utilisent cette union pour accroitre l’exploitation des masses laborieuses.
Nous sommes solidaires de l’héroïque République populaire d’Albanie qui mène une ferme politique d’indépendance nationale et dénonce les chantages du social-impérialisme russe.
Nous nous réjouissons des tendances de plus en plus marquées d’une série de pays d’Europe à mener une politique d’indépendance et de non-alignement. Nous enregistrons avec satisfaction l’apparition dans certains pays d’Europe de l’Est de positions visant à échapper à la mainmise soviétique.
Nous soutenons la politique extérieure de principe de la République populaire de Chine, partie intégrante du tiers monde.
Le front uni mondial contre les deux superpuissances signifie encore l’union des peuples et des pays d’Europe occidentale avec les peuples et les pays du tiers monde, force motrice de l’histoire. Mais cette union exige une lutte constante, de grande envergure, contre les tendances au colonialisme, au néo-colonialisme, à l’exploitation du tiers monde qui existent dans la bourgeoisie d’Europe occidentale, y compris la Belgique.
Notre lutte est une lutte politique à la tête des masses populaires pour un front uni contre l’hégémonisme des deux superpuissances :
– pour l’indépendance totale de la Belgique,
– pour une Belgique non-alignée, débarrassée de toute tutelle étrangère, américaine ou autre,
– pour l’union la plus large, y compris dans le domaine de la défense, des pays d’Europe indépendants, non-alignés, égaux en droit,
– pour l’union de la Belgique et des pays d’Europe avec le tiers monde.
Tout ce qui va dans ce sens doit être soutenu ; tout ce qui s’inscrit contre ces objectifs doit être combattu.
Notre politique de front uni ne s’oppose pas au combat pour la révolution prolétarienne mais en est au contraire partie intégrante.
« A présent les facteurs de la révolution de même que ceux de la guerre vont grandissant. Que la guerre provoque la révolution ou que la révolution conjure la guerre, la situation internationale continuera d’évoluer à l’avantage des peuples et l’avenir du monde sera toujours radieux ».
(Chou En-lai)
Les textes qui suivent ont été publiés dans une rubrique de « Clarté l’Exploité », les semaines qui ont suivi la Conférence nationale du 8 novembre 1975.
Dans notre Parti, nous l’avons dit, il y a eu une large discussion sur les problèmes de politique étrangère. La lutte a été intense. Elle a abouti à la convocation de la Conférence nationale et à l’adoption unanime du document reproduit dans cette brochure. Au cours de la discussion, maintes objections à notre ligne ont été présentées que nous avons abordées et surmontées.
Depuis la publication de ce document, diverses objections nous ont été présentées, cette fois venant de l’extérieur du Parti. Ceux qui les présentent le font souvent en toute bonne foi et nous devons leur répondre franchement.
Pour toutes ces raisons, notre Parti estime qu’il faut reprendre les principales objections, en publier la teneur et y répondre par une argumentation serrée. C’est d’autant plus nécessaire que la discussion continue dans notre Parti pour approfondir les données du document, pour en faire une arme efficace dans notre combat, pour que chaque militant assimile de façon complète la ligne du Parti et qu’il soit ainsi mieux à même de convaincre.
Première objection : Il y a une incohérence dans le document adopté. Dans le chapitre 1, vous dites : « Il est clair que pour la victoire de la révolution prolétarienne, la bourgeoisie monopoliste n’est pas et ne peut être une alliée pour le prolétariat : elle est la cible de la révolution en Belgique ». Dans le chapitre 6, vous écrivez que « certaines fractions de la bourgeoisie belge sont (…) un allié possible dans la lutte pour la sauvegarde de l’indépendance nationale ». Alors, finalement, considérez-vous la bourgeoisie monopoliste comme une cible ou comme une alliée ?
Il n’y a aucune incohérence dans le document. Le chapitre 1 s’inscrit contre les déviations opportunistes de droite. En Belgique, le capitalisme belge en est à son stade suprême, le stade de l’Impérialisme. Par conséquent, il est évident que nous en sommes à l’étape de la révolution prolétarienne : par la révolution, sous la direction de la classe ouvrière et de son parti révolutionnaire, les masses détruisent la dictature de la bourgeoisie et instaurent la dictature du prolétariat. Dans ces conditions, il existe entre le prolétariat et la bourgeoisie monopoliste une contradiction antagonique, irréductible.
Mais nous devons constater que l’obstacle majeur à la révolution prolétarienne mondiale, ce sont les deux superpuissances dont la rivalité conduit à une nouvelle guerre mondiale. Dès lors, le combat pour la révolution passe nécessairement par le stade de la lutte pour l’indépendance nationale. Et dans ce domaine, il peut exister et il existe des fractions de la bourgeoisie belge et européenne qui, uniquement pour leurs intérêts de classe, sont opposées aux deux superpuissances. Dans le combat contre les deux superpuissances, elles peuvent être un allié temporaire.
Il ne s’agit donc pas d’incohérence ni de choses contradictoires. Il s’agit d’aspects complémentaires.
L’expérience historique nous prouve la justesse de cette analyse. Avant la deuxième guerre mondiale, l’Internationale Communiste avait montré que « le fascisme, c’est la guerre », qu’il constituait l’obstacle majeur à la révolution prolétarienne et que l’impérialisme allemand hitlérien était le danger principal.
Les communistes belges se sont portés à la tête des luttes contre le fascisme. C’est une lutte qui aété menée sur tous les fronts avec une rare énergie. Même le front électoral n’a pas été négligé. Lors de l’élection partielle de 1937 à Bruxelles, le Parti communiste a soutenu la candidature de Van Zeeland contre Degrelle. Il s’est agi d’une alliance temporaire, avec un représentant typique des monopoles financiers, contre le fascisme. Qui plus est, à cette occasion, il y a eu une alliance de fait avec Mgr Van Roey, cardinal-primat de Belgique, ultra-réactionnaire qui, du fait du déroulement impétueux du combat antifasciste, a été contraint de condamner Degrelle.
Bien sûr, l’écrasement du rexisme n’est pas dû à cet épisode électoral, comme certains historiens bourgeois le prétendent. Il est dû à l’ample mobilisation des masses, à leur combat par tous les moyens de l’action directe, à la juste politique de front pratiquée par les communistes. Cette bataille électorale a été un aspect de ce combat. Van Zeeland et Van Roey, liés comme ils l’étaient au capital monopoliste, étaient évidemment des cibles de la révolution prolétarienne, mais ont été un temps des alliés temporaires dans un combat essentiel : le combat contre le fascisme qui conduisait à la deuxième guerre mondiale. Cela n’a pas empêché, en dehors de cette alliance momentanée, les communistes de combattre avec vigueur ces deux fieffés réactionnaires.
Il est d’autres exemples. Durant la deuxième guerre mondiale, contre l’ennemi principal, l’impérialisme allemand, les communistes d’URSS avec à leur tête Joseph Staline, les communistes des autres pays d’Europe, qui conduisaient la résistance populaire antifasciste, se sont alliés avec les impérialismes anglais et américain. Alliance temporaire dans un combat essentiel.
De même, contre l’impérialisme japonais, le président Mao Tsé-toung a préconisé le front uni le plus large, y compris avec ceux qui étaient les hommes des impérialistes britanniques, américains, français, etc. Alliance temporaire dans un combat essentiel.
L’expérience a prouvé que ces tactiques étaient justes. Il s’agit d’ailleurs de l’application d’un enseignement de. Lénine. Dans le chapitre 8 intitulé « Jamais de compromis ? » de son livre « La maladie infantile du communisme, le gauchisme », Lénine écrit :
« Faire la guerre pour le renversement de la bourgeoisie internationale, guerre cent fois plus difficile, plus longue, plus compliquée que la plus acharnée des guerres ordinaires entre États, et renoncer d’avance à louvoyer, à exploiter les oppositions d’intérêts (fussent-elles momentanées) qui divisent nos ennemis, à passer des accords et des compromis avec des alliés éventuels (fussent-ils temporaires, peu sûrs, chancelants, conditionnels), n’est-ce pas d’un ridicule achevé ? N’est-ce pas quelque chose comme de renoncer d’avance, dans l’ascension difficile d’une montagne inexplorée et inaccessible jusqu’à ce jour, à marcher parfois en zigzags, à revenir parfois sur ses pas, à renoncer à la direction une fois choisie pour essayer des directions différentes ? (…)
On ne peut triompher d’un adversaire plus puissant qu’au prix d’une extrême tension des forces et à la condition EXPRESSE d’utiliser de la façon la plus minutieuse, la plus attentive, la plus circonspecte, la plus intelligente, la moindre « fissure » entre les ennemis, les moindres oppositions d’intérêts entre les bourgeoisies des différents pays, entre les différents groupes ou catégories de la bourgeoisie à l’intérieur de chaque pays, ainsi que la moindre possibilité de s’assurer un allié numériquement fort, fût-il un allié temporaire, chancelant, conditionnel, peu solide et peu sûr. Oui n’a pas compris cette vérité n’a pas compris goutte au marxisme, ni EN GENÉRAL au socialisme scientifique contemporain. Oui n’a pas prouvé PRATIOUEMENT, pendant un laps de temps assez long et en des situations politiques assez variées, qu’il sait appliquer cette vérité dans les faits, n’a pas encore appris à aider la classe révolutionnaire dans sa lutte pour affranchir des exploiteurs toute l’humanité laborieuse. Et ce qui vient d’être dit est aussi vrai pour la période qui PRÉCEDE et qui SUIT la conquête du pouvoir politique par le prolétariat. » (Ce qui est souligné dans ce texte l’a été par Lénine).
Nous croyons qu’une étude en profondeur de cet enseignement montre que la ligne, défendue par notre Parti, de front uni contre les deux superpuissances, pour l’indépendance nationale est une ligne juste, conforme aux enseignements du marxisme-léninisme. Il s’agit bien d’exploiter « de la façon la plus minutieuse, la plus attentive, la plus circonspecte, la plus intelligente » les fissures qui apparaissent, « les moindres oppositions d’intérêts » qui existent entre les bourgeoisies des différents pays comme entre les différents groupes ou catégories de la bourgeoisie à l’intérieur de chaque pays. Il s’agit évidemment de compromis « temporaires, peu sûrs, chancelants, conditionnels » mais qui ne comprend pas cela ne peut se revendiquer du marxisme-léninisme, de la pensée maotsétoung.
Deuxième objection : Vous dites dans le chapitre 3 de la résolution : « Il ne peut être question pour les peuples européens de choisir entre ces deux impérialismes ; ce sont des brigands de la même espèce ; les peuples d’Europe souhaitent et doivent faire en sorte qu’ils périssent tous les deux ». Et après avoir écrit cela, vous faites tout un chapitre pour dire : « Le social-impérialisme russe est actuellement le danger principal ». C’est de l’incohérence ! D’une part, vous dites que les deux impérialismes sont de la même espèce puis vous dites qu’il y en a tout de même un qui est plus dangereux que l’autre. Comment voulez-vous que les travailleurs s’y retrouvent ?
Les travailleurs s’y retrouveront fort bien et ils sont capables de comprendre ce qu’on peut comprendre par un raisonnement partant d’un point de vue de classe. Tout impérialisme est un ennemi mais tous les ennemis n’ont pas la même force. Il est donc juste de déterminer la cible. Il est clair que l’impérialisme américain et le social-impérialisme russe constituent à notre époque les plus grands oppresseurs et exploiteurs internationaux. Ils se disputent avec un acharnèrent croissant en vue de l’hégémonie. Il arrive qu’ils se concertent et s’allient un temps contre les peuples en lutte mais leur collaboration est toujours temporaire ; ce qui domine c’est la rivalité. Devant l’affrontement entre impérialismes de cette nature, il est nécessaire d’appliquer la règle énoncée par Lénine : « L’attitude de la démocratie (et du socialisme) à son égard découle de la règle : ‘Quand deux voleurs se battent, qu’ils périssent tous les deux’ ».
Lénine a énoncé aussi la loi du développement inégal.
Tout ne progresse pas de la même façon dans le monde de l’impérialisme ; le déclin suit la progression. C’est ce que le camarade Kiao Kouang-houa faisait remarquer dans son intervention lors de la vingt-neuvième session de l’assemblée plénière de l’ONU : « Quant au prétendu équilibre, il est depuis toujours, dans la nature comme dans la société humaine, relatif et temporaire, tandis que l’inégalité est absolue et constante. »
Lénine a montré qu’il y avait des impérialismes montants et des impérialismes descendants ; c’est évidemment l’impérialisme montant qui est le plus dangereux, C’est pourquoi, même si les deux impérialismes rivaux sont de même nature et que les peuples doivent faire en sorte qu’ils disparaissent tous les deux, il y en a un qui constitue le danger principal.
Est-ce de l’incohérence que de dire cela ? Prenons un exemple dans le domaine des sports. Un entraîneur prépare ses joueurs pour le match de dimanche prochain. Il leur dit : « Attention, si nous voulons vaincre, il faut absolument tenir en respect Pierre et Paul, les deux avants de l’équipe adverse ; ce sont nos deux plus dangereux adversaires ; ce sont des joueurs de la même espèce ; ils procèdent de la même façon mais dans les deux, Pierre est encore plus dangereux que Paul, car son shoot est actuellement plus ‘meurtrier’ ». Quel est le joueur de football qui est incapable de comprendre un tel raisonnement ?
Nous disons que les deux superpuissances sont de la même nature mais dans les deux l’une est devenue plus dangereuse que l’autre : c’est le social-impérialisme russe. C’est ce que précisait, en date du 8 octobre, avec une grande netteté, le « Renmin Ribao », organe du Comité central du Parti communiste chinois, dans un éditorial intitulé : « La rivalité soviéto-américaine pour l’hégémonie mondiale conduira inévitablement à la guerre mondiale. » Cet article montre clairement que les DEUX superpuissances rivalisent, intriguent, courent à la guerre en Europe et sont donc de même nature, mais qu’UNE des deux est la plus dangereuse. C’est très clair : « Le social-impérialisme soviétique doté de voraces appétits étend partout ses tentacules et se révèle beaucoup plus effréné et dangereux que le vieil impérialisme. Le danger de guerre actuellement provient principalement du social-impérialisme soviétique. »
Cette constatation est aujourd’hui, en Europe occidentale, une ligne de démarcation. Ceux qui refusent de le reconnaitre, qui font mine de ne pas le voir ou qui cherchent des incohérences dans une telle vue réaliste de la situation font le jeu du social-impérialisme russe. S’ils sont sincères en énonçant leurs positions, nous devons leur montrer leur erreur et ses conséquences tragiques ; s’ils ne sont pas sincères, ils agissent, quel que soit l’habit dont ils s’affublent, en agents révisionnistes, en serviteurs du social-impérialisme et ils doivent être dénoncés comme tels.
Troisième objection : Vous dites : « Voilà pourquoi nous avons approuvé le voyage du Premier ministre Tindemans en Chine. Nous considérons les déclarations que celui-ci a faites à cette occasion comme positives. » Mais, dans ces conditions, expliquez-nous comment ce que vous dites peut se concilier avec les paroles suivantes de Tindemans à Pékin :
« C’est pourquoi nous avons contribué à l’Alliance Atlantique, et nous entendons maintenir, au prix des sacrifices nécessaires et d’une vigilance constante, cet instrument essentiel de l’équilibre mondial. » Et vous avez le culot après cela d’écrire que Tindemans montre « une certaine tendance au distancement à l’égard de l’impérialisme américain » ! C’est de l’incohérence.
Il est clair que nous n’approuvons pas tout ce que dit et fait Tindemans tant sur le plan intérieur que sur le plan extérieur. Il s’agit simplement de savoir s’il y a quelque chose qui change dans la politique étrangère de la bourgeoisie belge dont Tindemans est un porte-parole principal.
Quand Tindemans a pris parti dans ce qu’on a appelé « le marché du siècle » pour l’avion français contre l’avion américain, personne ne doute qu’il se distançait ainsi de l’impérialisme américain. C’est tellement vrai que Ford est accouru à Bruxelles, que les pressions multiples, voire les chantages n’ont pas manqué. Même si Tindemans n’a pu faire prévaloir son point de vue, nous considérons qu’il s’agit d’un pas en avant.
Quand Tindemans, à Pékin, déclare : « Il n’y a pas de politique valable sans indépendance », quand il exalte l’union des peuples d’Europe, quand il cite l’exemple de la convention de Lomé entre la CEE et les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, il dit des choses que nous approuvons. Il s’inscrit dans la lutte contre les deux superpuissances et c’est pourquoi, quelques mois plus tard, en URSS, il a reçu un accueil glacial de la part des nouveaux hitlériens au pouvoir à Moscou.
Le coup de chapeau à l’OTAN ne gêne que ceux pour qui un vieil arbre est capable de cacher une jeune forêt qui se développe. Cela ne va pas, bien entendu, sans hésitation ni retour en arrière. Et toujours nous défroncerons ce qui est négatif. Par exemple, quand la CEE a conclu un accord avec Israël, nous avons dit notre hostilité.
Mais voyons ce qui avance. Est-ce que la Roumanie mène une politique positive d’indépendance nationale ? Cela nous paraît incontestable. Pourtant, elle fait toujours partie de l’organisation agressive du Pacte de Varsovie. Alors ? Seuls les sectaires et les aveugles volontaires refusent de voir une réalité en mouvement. Il y a peu, certains encore faisaient de l’OTASE une affreuse machinerie au service de l’impérialisme américain, sans voir que du fait du déclin de l’impérialisme américain, il était totalement vidé de sa substance. C’est à tel point que l’impérialisme américain a dissous l’OTASE.
Certes, l’OTAN n’en est pas au même point. Mais ce n’est pas une raison pour refuser de voir ce qui est mouvement. Si dans la bourgeoisie belge il existe des tendances qui veulent aller dans le sens de l’indépendance nationale et que nous refusons de le voir et d’en tenir compte, nous faisons le jeu de nos ennemis et plus particulièrement du social-impérialisme russe. Cette faute, seuls des sectaires peuvent la commettre. Les marxistes-léninistes mènent une juste politique de front uni.
Quatrième objection : Dans le chapitre 4 de votre document, vous dites que « notre combat pour la révolution passe par le stade de la lutte pour l’indépendance nationale. C’est pourquoi nous devons lutter pour constituer le front uni le plus large ; celui-ci s’étend à des secteurs de la bourgeoisie qui, bien sûr, sont des ennemis de la révolution mais qui s’opposent aux deux superpuissances, même si leur opposition ne va pas sans retours en arrière ». Et plus loin vous ajoutez que « certaines fractions de la bourgeoisie belge sont, pour des raisons qui tiennent évidemment à leurs intérêts de classe, opposées aux deux superpuissances et qu’elles sont un allié possible dans la lutte pour l’indépendance nationale ».
C’est de l’opportunisme de votre part. La bourgeoisie belge ne vise qu’à ses intérêts. Vous vous opposez à l’enseignement de Staline dans son discours au XIXè Congrès du PCUS : « Maintenant, la bourgeoisie troque les droits et l’indépendance de la nation contre des dollars. Le drapeau de l’indépendance nationale et la souveraineté nationale est jetée par-dessus bord ».
Et Staline précisait que nul autre que les communistes ne peuvent relever le drapeau de l’indépendance nationale. Or, vous allez tellement loin que vous en venez à vous rallier à la défense nationale alors que l’armée belge est une armée bourgeoise, donc réactionnaire, contre le peuple.
Puisque l’on parle de Staline, disons également qu’il a fustigé les gens qui, citant des textes à tort et à travers, pensent qu’ainsi :
« ils seront en mesure de résoudre n’importe quelle question, escomptant que les conclusions et les formules apprises leur serviront pour tous les temps et pour tous les pays, pour toutes les circonstances de la vie ».
Il ajoutait :
« Dans son développement, le marxisme ne peut manquer de s’enrichir d’expériences nouvelles et de connaissances nouvelles ; par conséquent, certaines de ses formules et de ses conclusions ne peuvent manquer de changer avec le temps, ne peuvent manquer d’être remplacées par des formules et des conclusions nouvelles qui correspondent aux nouvelles tâches historiques. Le marxisme n’admet pas de conclusions et de formules immuables, obligatoires pour toutes les époques et toutes les périodes. Le marxisme est l’ennemi de tout dogmatisme ». (A propos du marxisme en linguistique, 1950).
Le contenu du discours de Staline au XIXè Congrès du PCUS en 1952 se rapporte à une situation donnée. Celle où la bourgeoisie d’Europe occidentale était totalement inféodée à l’impérialisme américain ; celle où l’impérialisme américain dominait le monde, était de loin la plus forte des bêtes de proie. La situation a évolué depuis. L’URSS il cessé d’être un État de dictature du prolétariat, a vu, sous les auspices de la direction révisionniste, restaurer le capitalisme − capitalisme monopoliste d’État. L’URSS est un État impérialiste de la même espèce que l’impérialisme américain, mais bien plus dangereux encore puisqu’il s’agit d’un impérialisme montant alors que l’impérialisme américain est un impérialisme déclinant. Donc la situation est changée.
La situation est changée aussi parmi les puissances industrielles avancées. Certaines couches de la bourgeoisie veulent secouer la tutelle américaine. Ceux qui connaissent bien l’enseignement de Staline savent que dans son œuvre « Les Problème économiques du socialisme en URSS », il avait prévu qu’inévitablement les pays capitalistes avancés en arriveraient à se dresser contre les USA. C’est cette tendance qui aujourd’hui est dominante dans le second monde (pays industriels avancés). Il est conforme à l’enseignement marxiste-léniniste d’exploiter les contradictions intercapitalistes.
Croire que la bourgeoisie ne peut jamais défendre l’indépendance nationale, c’est du sectarisme. Peut-on nier que les pays comme l’Algérie, la Yougoslavie et dans une certaine mesure la France mènent globalement une politique d’indépendance nationale ? Pourtant, il s’agit de pays de dictature bourgeoise.
Si seulement un État de dictature du prolétariat est capable de défendre l’indépendance nationale, pourquoi parler d’indépendance nationale ? Parlons seulement de révolution prolétarienne. Or, c’est précisément la politique des trotskistes, ces contre-révolutionnaires.
Mais les marxistes-léninistes n’ont pas et n’auront jamais une telle position. Le camarade Ki Teng-kouéi, membre du Bureau politique du Parti communiste chinois, a dit :
« Le peuple belge possède des traditions d’attachement à l’indépendance nationale. Pendant la Seconde guerre mondiale, il a participé à la grande lutte de résistance contre l’agression barbare du fascisme, et apporté sa part de contribution au triomphe sur le fascisme. Le peuple chinois, instruit par sa propre expérience, connait pertinemment la valeur que représente l’indépendance nationale. C’est pourquoi il éprouve de l’admiration à l’égard des efforts déployés par le peuple belge pour maintenir l’indépendance nationale et la souveraineté d’Etat. »
Ce qui est vrai, c’est que la bourgeoisie, et plus encore la bourgeoisie monopoliste, ne voit que ses intérêts de classe. En fonction de ses intérêts de classe, elle peut défendre les intérêts nationaux mais elle peut aussi les trahir. C’est pourquoi ses positions ne sont jamais fermes, sont toujours vacillantes, ne vont pas sans retours en arrière. Toute alliance avec des secteurs de la bourgeoisie monopoliste aura toujours un caractère peu sûr et instable.
La classe ouvrière est une classe montante. Elle est la seule classe dont les intérêts sont en tout conformes à l’intérêt national. C’est pourquoi c’est la classe ouvrière, conduite par son parti révolutionnaire, qui doit prendre la direction du front uni pour l’indépendance nationale.
Mais il est nécessaire de voir ce qui évolue. C’est pourquoi c’est à juste titre que la Conférence nationale a dit :
« Nous devons lutter pour constituer le front uni le plus large ; celui-ci s’étend à des secteurs de la bourgeoisie qui, bien sûr, sont des ennemis de la révolution mais qui s’opposent aux deux superpuissances, même si leur opposition ne va pas sans hésitation ni retours en arrière ».
En ce qui concerne la défense nationale, nous en sommes totalement partisans en précisant qu’elle comprend non seulement l’armée sous sa forme « traditionnelle » mais aussi toute forme de lutte populaire armée et non armée pour l’indépendance nationale, contre les deux superpuissances, à l’instar du combat glorieux qui a été mené durant l’occupation hitlérienne, sous la direction du Parti communiste.
Cette position est conforme à la ligne que les marxistes-léninistes ont défendue devant la montée du fascisme hitlérien et ses préparatifs de guerre. Ils ont soutenu la défense nationale, ils ont lutté pour la rendre plus efficace. C’était la cinquième colonne d’Hitler qui sabotait la défense nationale ; c’étaient les contre-révolutionnaires trotskistes qui propageaient l’antimilitarisme et le refus de la défense nationale ; c’est d’ailleurs pourquoi ils ont alors mérité le surnom d’hitléro-trotskistes : avec des paroles ultra-gauche, ils faisaient le jeu d’Hitler.
Devant les préparatifs de guerre les deux superpuissances et, plus particulièrement, devant les préparatifs d’agression du social-impérialisme soviétique, nous devons soutenir activement une véritable défense nationale. C’est le point de vue qu’a souligné l’éditorial de « Zeri i Popullit », organe du Comité central du Parti du Travail d’Albanie, qui, en date du 25 octobre 1975, insiste sur la nécessité, face aux préparatifs de guerre des deux superpuissances, de « renforcer la capacité de défense de chaque pays ».
Bien entendu, tant que nous serons en régime capitaliste, l’armée sera un instrument de la dictature bourgeoise. Nous devons toujours tenir compte du double aspect des choses. C’est pourquoi le document issu de la Conférence nationale du Parti communiste marxiste-léniniste de Belgique précise :
« Dans la situation internationale actuelle, il peut y avoir dans un domaine particulier mais essentiel − l’indépendance nationale − une concordance d’intérêts entre le prolétariat et des fractions de la bourgeoisie belge. Cela va pour le prolétariat et son parti révolutionnaire jusqu’à soutenir activement une véritable défense nationale.
Mais il s’agit d’une concordance momentanée qui ne met pas fin-à la lutte de classe. La classe ouvrière continue évidemment à se battre contre l’exploitation capitaliste dont elle est l’objet, contre la paix sociale, contre l’utilisation de l’armée et de la gendarmerie pour réprimer ses luttes, contre la fascisation du régime, contre l’appareil d’État de la bourgeoisie, pour la révolution prolétarienne. La classe ouvrière n’a aucune raison d’être solidaire des capitalistes, de cesser le combat classe contre classe ».
Cinquième objection : Vous dites : « Le front uni mondial contre les deux superpuissances signifie encore l’union des peuples et des pays d’Europe occidentale avec les peuples et les pays du tiers monde, force motrice de l’histoire ». Soyons sérieux ! Allez-vous dire que vous placez sous le signe de la révolution des alliances éventuelles avec des réactionnaires comme le shah d’Iran, Ne Win ou Mobutu ? C’est de l’opportunisme ni plus, ni moins. Lutter pour la révolution exige de lutter partout pour abattre des réactionnaires de cette espèce.
D’autres noms pourraient être ajoutés à ces trois-là. Peu importe, d’ailleurs. Il y a plusieurs points à examiner. En premier lieu, nous disons alliance des peuples et des pays. C’est-à-dire qu’il s’agit de bien autre chose qu’une poignée de politiciens réactionnaires, seraient-ils à la tête de ces pays.
En deuxième lieu, ce n’est pas notre rôle à nous, parti de la classe ouvrière de Belgique, d’aller abattre tel ou tel réactionnaire dans un autre pays ; c’est au peuple concerné à le faire et à nous de développer la solidarité selon les règles de l’internationalisme prolétarien.
En troisième lieu, si des chefs d’État, quels qu’ils soient, aussi réactionnaires soient-ils, en fonction de leurs intérêts de classe, ont des contradictions d’intérêts avec les pires ennemis des peuples, l’impérialisme américain et le social-impérialisme russe, nous avons pour devoir de les soutenir en ce domaine. Citons une fois encore ce que Lénine enseigne dans « La maladie infantile du communisme, le gauchisme » :
« On ne peut triompher d’un adversaire plus puissant qu’au prix d’une extrême tension des forces et à la condition EXPRESSE d’utiliser de la façon la plus minutieuse, la plus attentive, la plus circonspecte, la plus intelligente, la moindre ‘fissure’ entre les ennemis, les moindres oppositions d’intérêts entre les bourgeoisies des différents pays, entre les différents groupes ou catégories de la bourgeoisie à l’intérieur de chaque pays, aussi bien que la moindre possibilité de s’assurer un allié numériquement fort, fût-il un allié temporaire, chancelant, conditionnel, peu solide et peu sûr. Qui n’a pas compris cette vérité n’a compris goutte au marxisme, ni en général au socialisme scientifique contemporain ».
Si on a assimilé convenablement cet enseignement léniniste, l’objection est balayée.
Mais, en quatrième lieu, il y a beaucoup plus. Il y a dans l’œuvre du président Mao Tsé-toung « La Démocratie nouvelle », qui date de janvier 1940, une importante étude qui concerne précisément les pays qui forment aujourd’hui le tiers monde. Son analyse s’appuie sur l’enseignement de Staline à propos de la question nationale. Il montre que dans les pays coloniaux et semi-coloniaux, même la lutte pour la révolution démocratique bourgeoise fait partie de la révolution socialiste prolétarienne mondiale.
Tout combat de libération d’une colonie ou d’une semi-colonie s’en prend pour l’indépendance nationale directement à l’impérialisme, à la bourgeoisie internationale ; il s’intègre dans le combat pour la révolution mondiale socialiste prolétarienne. Il s’agit donc d’une véritable révolution. Et le président Mao signale que les forces principales de la révolution socialiste prolétarienne mondiale sont le prolétariat de chacun des pays capitalistes avancés et ont pour alliés les peuples opprimés des colonies et semi-colonies (aujourd’hui le tiers monde). Il déclare :
« Peu importe, chez les peuples opprimés, quelles classes, quels partis ou individus participent à la révolution, et peu importe qu’ils soient conscients ou non de ce que nous venons d’exposer, qu’ils le comprennent ou non, il suffit qu’ils s’opposent à l’impérialisme pour que leur révolution devienne une partie de la révolution mondiale socialiste prolétarienne et qu’ils en soient les alliés ».
Voilà un enseignement très précieux qu’il importe d’appliquer à la situation actuelle. Il est nécessaire de bien observer l’ampleur du mouvement contre l’hégémonie des deux superpuissances, contre l’impérialisme américain et le social-impérialisme russe. Il est une force prodigieuse. C’est ce qu’a souligné le camarade Teng Siao-pinq dans son intervention devant l’Assemblée générale de l’ONU, le 10 avril 1974 :
« Les nombreux pays en voie de développement ont été pendant longtemps victimes de l’oppression et de l’exploitation du colonialisme et de l’impérialisme. Ils ont conquis l’indépendance politique ; cependant, ils se trouvent confrontés, sans exception, à la tâche historique de liquider les forces résiduelles du colonialisme, de développer l’économie nationale et de consolider l’indépendance nationale. Ces pays s’étendent sur de vastes territoires, où vit une population très nombreuse et où les ressources naturelles sont en abondance. Les plus cruellement opprimés, ils nourrissent un désir des plus ardents à s’opposer à l’oppression, d’acquérir la libération et d’œuvrer pour le développement. Dans la lutte pour la libération et l’indépendance nationales, ils témoignent d’une puissance prodigieuse sans pareille et remportent continuellement des victoires éclatantes. Ils constituent LA FORCE MOTRICE REVOLUTIONNAIRE qui fait avancer la roue de l’histoire universelle, de même que la force principale dans la lutte contre le colonialisme, l’impérialisme et, en particulier, contre les superpuissances ».
Nous avons souligné à dessein l’expression « force motrice révolutionnaire ». Tout ceci nous parait clair. Ceux qui se réclament de la révolution et qui oublient de parler de l’alliance avec les pays et les peuples du tiers monde, ou qui ne lui apportent que peu d’attention, prouvent qu’ils ont encore beaucoup à faire avant d’assimiler en profondeur le marxisme-léninisme, la pensée-maotsétoung.
Sixième objection : Vous dites : « La rivalité des deux superpuissances conduit à une troisième guerre mondiale ; celle-ci est inévitable ». Nous ne sommes pas d’accord. On peut conjurer la guerre. Mao Tsé-toung a écrit : « Ou bien c’est la guerre qui provoquera la révolution, ou bien c’est la révolution qui conjurera la guerre ». Dès lors, le problème ne revient-il pas, pour empêcher la guerre en Europe, à faire la révolution en Europe, et en ce qui nous concerne plus particulièrement, en Belgique ?
Nous sommes entièrement d’accord avec l’analyse du camarade Chou En-lai disant qu’« à présent les facteurs de la révolution de même que ceux de la guerre vont grandissant ».
Mais cela ne se manifeste pas avec la même intensité partout. Il nous parait évident, dans les conditions actuelles, que dans le tiers monde, ce sont les facteurs de la révolution qui dominent. En Europe, les deux superpuissances sont face à face, déploient un potentiel agressif toujours plus considérable − plus particulièrement le social-impérialisme russe ; sur ce continent, les facteurs de la guerre sont prépondérants.
Il faut renforcer la lutte pour la révolution : Il parait évident que le système capitaliste en Europe occidentale est en crise ; les grandes luttes de classe se succèdent : donc il y a néanmoins développement des facteurs de la révolution. Et l’histoire prouve que quand les circonstances sont favorables, le niveau de conscience des masses progresse rapidement. Mais si la révolution triomphait en Belgique et même dans un ensemble de pays ou dans tous les pays de l’Europe occidentale, peut-on dire qu’elle conjurerait du même coup la guerre en Europe ?
Non. La rivalité des deux superpuissances n’en serait que plus acharnée. D’une part, l’impérialisme américain qui garde des bases et des troupes en Europe occidentale interviendrait contre la révolution ; d’autre part, et plus encore, le social-impérialisme russe ne pourrait laisser s’installer sur le continent le plus développé économiquement des pays de dictature du prolétariat qui, par leur existence, porteraient un coup mortel aux mystifications et trahisons des dirigeants soviétiques et de leurs valets.
Il ne fait pas de doute que la clique du Kremlin déclencherait contre la révolution victorieuse une agression sans pitié. Même dans le cas de révolution victorieuse en Belgique et en Europe occidentale, la rivalité entre les deux superpuissances n’irait pas diminuant, au contraire. L’impérialisme inévitablement conduit à la guerre, c’est une loi indépendante de la volonté des hommes. L’enjeu de la rivalité entre les deux superpuissances continuerait à être l’Europe. Evidemment, l’indépendance nationale serait défendue de façon plus conséquente par des pays de dictature du prolétariat ; la défense nationale serait considérablement renforcée par des armées populaires, par des peuples en armes.
Mais il faut avoir le courage de dire la vérité très nettement et très fermement. Celle-ci tient en un certain nombre de constatations :
– la rivalité des deux superpuissances conduit à une troisième guerre mondiale ;
– celle-ci est inévitable et nous devons nous y préparer ;
– le social-impérialisme russe constitue actuellement le danger principal ;
– les communistes doivent être à la tête de la lutte pour un front uni pour l’indépendance nationale, contre les deux superpuissances ;
– les communistes doivent être à la tête de la lutte pour un front uni des peuples et des pays d’Europe tout en combattant les monopoles capitalistes qui utilisent cette union pour accroitre l’exploitation des masses travailleuses ;
– les communistes doivent être à la tête de la lutte pour l’union des peuples et des pays d’Europe occidentale avec les peuples et les pays du tiers monde, force motrice de l’histoire, tout en menant une lutte intransigeante contre les tendances au colonialisme, au néo-colonialisme, à l’exploitation du tiers monde qui existent dans la bourgeoisie d’Europe occidentale, y compris la Belgique.
Certes, nous savons fort bien qu’avec cette rubrique, nous n’en avons pas fini avec la polémique, loin s’en faut. Celle-ci continuera dans notre journal, éventuellement dans d’autres brochures.
Notre parti a clairement analysé la situation internationale et défini ses positions. Celles-ci ne permettent aucun faux-fuyant ; nous refusons de créer des illusions. La vérité est révolutionnaire. Quelles que soient les vicissitudes du combat, l’avenir du monde appartient aux peuples. Il est radieux.