NEGATION DE LA NEGATION. Notion philosophique traduisant un des aspects du développement dialectique. Cette formule employée pour la première fois dans la philosophie de Hegel (V.) désigne le développement de l’inférieur au supérieur en gardant certains éléments positifs de l’ancien.
Tout le processus de développement est subordonné chez lui à des « triades » (V.) (thèse, antithèse synthèse). La thèse est niée par l’antithèse qui, à son tour, est niée par la synthèse (« négation de la négation »). Au stade de la synthèse le développement semble revenir à son point de départ, mais à un niveau supérieur.
Pour Hegel la « négation de la négation » est essentiellement un instrument lui permettant de bâtir ses constructions idéalistes artificielles. Les ennemis du marxisme (Dühring, Mikhaïlovski), voulant discréditer la dialectique marxiste, prétendaient que Marx et Engels avaient créé leur théorie en s’appuyant sur la triade hégélienne et que c’est à l’aide de la triade (« négation de la négation ») qu’ils démontraient la chute inévitable du capitalisme.
Répondant à Mikhaïlovski, Lénine faisait observer que la tâche des matérialistes consiste à représenter fidèlement le processus historique réel, que c’est ainsi que le socialisme scientifique aborde les choses, alors que les « triades » ne sont que des vestiges des formules hégéliennes.
Chez Marx et Engels, le terme « négation de la négation » revêt un sens matérialiste et n’exprime que le caractère ascendant du développement de la réalité objective elle-même, développement qui reproduit dans un certain sens les étapes révolues, mais à un niveau plus élevé.
Ainsi Marx montre dans « Le Capital » que la propriété privée capitaliste est la première négation de la propriété individuelle des moyens de production basée sur le travail individuel.
Mais ensuite le capitalisme en raison des lois propres à son développement, prépare lui-même les conditions de sa chute : l’expropriation du capital est la négation de la négation, le rétablissement de la propriété individuelle, c’est-à-dire la propriété des travailleurs eux-mêmes sur les moyens de production, mais à un niveau supérieur, caractérisé par « la coopération et la possession commune de tous les moyens de production, y compris le sol » (Marx : « Le Capital », L. 1, t. 3. P. 1939, p. 225).
Le mouvement de progression est conditionné par toutes les lois de la dialectique, en particulier la loi de la conversion des changements quantitatifs en changements qualitatifs, par le caractère dialectique de la négation de ce qui est ancien, de ce qui meurt, et de la naissance du nouveau. La transition de l’ancienne qualité à la qualité nouvelle ne signifie pas une simple suppression de tout ce qui a été créé antérieurement.
Selon Lénine, la négation dialectique n’est pas un simple rejet de tout ce qui est vieux. « Nier, en dialectique, ne signifie pas simplement dire non, ou déclarer qu’une chose n’existe pas, ou la détruire d’une manière quelconque » (Engels : « Anti-Dühring », P. 1950, p. 172).
Le socialisme, par exemple, est une négation catégorique du régime capitaliste. Mais c’est aussi le maintien de ce qui a été créé de positif et de précieux sous le capitalisme : les forces productives, la culture progressiste, etc.
Ainsi, la conversion de l’ancienne qualité en qualité nouvelle, la naissance du nouveau s’effectue toujours sur la base de ce qui a été conquis aux étapes précédentes ; le nouveau s’élève plus haut, marque un degré supérieur à l’ancien, un nouveau pas en avant dans le processus unique du développement. C’est ce qui conditionne le caractère progressif du développement, le développement en ligne ascendante.
NEO-HEGELIANISME. Courant philosophique réactionnaire au XIXe et au XXe siècle, basé sur les éléments réactionnaires de la philosophie de Hegel (V.).
Les néo-hégéliens critiquent l’idéalisme objectif de Hegel sous l’angle de l’idéalisme subjectif, et transforment la dialectique hégélienne en une dialectique subjective, en rejetant son noyau rationnel : l’idée du développement.
Ennemis du matérialisme dialectique, ils sont des réactionnaires en politique, les porte-parole des théories qui voilent et défendent la dictature de la bourgeoisie et l’exploitation des travailleurs, le nationalisme et le chauvinisme bourgeois.
Né avec l’impérialisme, le néo-hégélianisme, qui fut une des manifestations de la réaction politique, se répandit surtout après la première guerre mondiale.
Le néo-hégélianisme reprit les principes fondamentaux de la « Philosophie de la nature » et de la « Philosophie du droit » de Hegel, où le côté conservateur du système hégélien apparaît avec le plus de relief.
Il accorde une importance particulière aux « doctrines » selon lesquelles plus l’homme s’applique à connaître Dieu, plus il est libre ; la nation, l’Etat bourgeois forment un tout éternel, alors que l’homme, qui en est une partie, leur est entièrement subordonné, se dissout en eux et doit tout leur sacrifier ; le contenu essentiel de l’histoire est la lutte des nations, et non celle des classes.
Selon Richard Kroner, la dialectique n’existe que dans l’esprit et a un caractère irrationnel. L’idéalisme subjectif de Gentile, néo hégélien italien, proclame : seul le sujet actif existe ; l’histoire est le produit de la création libre de l’esprit ; il n’y a pas de lois objectives, le sujet actif dicte ses lois au monde. L’« actualisme » de Gentile est une idéologie réactionnaire qui s’oppose à la nécessité historique objective.
Dans sa « dialectique critique », le social-réformiste Siegfrid Mark amalgame le néo-hégélianisme et le néo-kantisme (V.). Il lutte contre la théorie dialectique de Hegel sur l’automouvement comme résultat de la lutte des contraires. Dans son livre dirigé contre le marxisme, il s’évertue à démontrer que le matérialisme ne peut être allié à la dialectique.
Arthur Liebert prêche la dialectique « tragique » qui exprime l’« indestructibilité » de l’antagonisme, la contradiction éternelle entre la réalité et « ce qui devrait être ». Liebert exprime l’idéologie décadente de la bourgeoisie réactionnaire qui ne voit pas d’issue à la crise générale du capitalisme.
Le néo-hégélianisme est intimement lié au fascisme (V.) S’appuyant sur le néo-hégélianisme, le fascisme cherchait à « justifier » son idéologie barbare.
NEO-KANTISME. Courant philosophique de la seconde moitié du XIXe siècle, qui érige en système les éléments idéalistes et subjectifs les plus réactionnaires et les plus caducs de la philosophie de Kant (V.). Dirigé contre le marxisme, le néo-kantisme était répandu en Allemagne, en Italie et en Russie où les « marxistes légaux » : Strouvé, Boulgakov, etc. (V. Marxisme légal) en étaient les principaux tenants.
Lénine dénonça la révision néo-kantienne du marxisme et en révéla la nature hostile à la classe ouvrière. Après la guerre impérialiste de 1914-1918, le néo-kantisme céda le terrain à un autre courant réactionnaire — le néo-hégélianisme (V.).
Les promoteurs du néo-kantisme, les philosophes Liebmann, Lange et le physicien Helmholtz s’évertuaient à concilier la science avec la philosophie idéaliste de Kant. Ils niaient l’existence de la « chose en soi » (V.) qualifiée de « goutte de sang étrangère », répudiaient les lois objectives de la société, réduisaient les catégories de la science à des normes subjectives, etc.
Non seulement ils préconisaient le « retour à Kant », mais ils critiquaient ce dernier pour les éléments matérialistes de sa philosophie. Le néo-kantisme prit sa forme la plus achevée dans deux écoles : celle de Marbourg (Cohen, Natorp, Cassirer) et celle de Fribourg (Windelband, Rickert).
A peu de choses près, le néo-kantisme fut la philosophie officielle de la IIe Internationale. Bernstein, Kautsky, M. Adler et d’autres révisionnistes s’appliquaient à combiner le néo-kantisme avec le marxisme.
Les socialistes de droite — continuateurs actuels des anciens réformistes — se réclament également du néo-kantisme dans leur lutte contre le marxisme.
NEO-PLATONISME. Philosophie mystique réactionnaire à l’époque de la décadence de l’Empire Romain (IIIe-VIe siècles), idéologie de l’aristocratie esclavagiste. La doctrine idéaliste de Platon (V.) selon laquelle le monde réel est une ombre du monde suprasensible des « idées », devient chez les néo-platoniciens la théorie d’une « émanation » mystique du monde matériel à partir d’un principe spirituel.
Pour le néo-platonisme, la matière n’est qu’un maillon inférieur dans la hiérarchie de l’univers, une émanation d’une divinité, de l’« âme du monde ». Les cimes de la philosophie sont atteintes non à l’aide de la raison et de l’expérience mais par une extase mystique.
L’idéalisme dégénère ainsi en théosophie (V.), terrain des plus absurdes superstitions. La première école néo-platonicienne surgit à Alexandrie (Egypte). En 244, Plotin (204-270) en fonde une autre à Rome.
Au IVe siècle se forma en Syrie l’école de Jamblique (mort vers 330). La dernière école néo-platonicienne fut ouverte par Proclus (410-485) à Athènes. Le néo-platonisme joua un rôle primordial dans la patristique (V.) chrétienne et exerça une grande influence sur toute l’idéologie féodale dans les pays chrétiens et musulmans.