Documents sur la fondation du Parti Communiste de Belgique
MOTION SE RAPPORTANT A LA FUSION DU P.C.B. ET DE L’AILE GAUCHE DU P.O.B.
(« L’Exploité », 27 juillet 1921 « L’Ouvrier communiste », 30 juillet 1921)
La rupture de l’aile gauche du P.O.B. (Amis de !’Exploité) avec ce parti a donné lieu à la constitution d’un deuxième parti communiste en Belgique.
L’existence de deux partis communistes dans un même pays étant incompatible avec les statuts de l’I.C. et ne pouvant que semer la confusion dans les rangs prolétariens, la fusion des deux groupements communistes s’impose.
Les élections législatives très proches (fixées au 23 octobre) exigent que la fusion se fasse rapidement, dans un délai de 2 mois après le IIIe congrès de l’Internationale communiste.
[…] 1
La fusion devra se faire sur la base des statuts de l’I.C. et des décisions des 2e et 3e congrès universels.
Le C.E. insiste spécialement pour que le P.C. observe la discipline internationale dans la question parlementaire d’une part, et d’autre part pour que l’ancienne aile gauche du P.0.B. fasse dans la presse et la propagande un grand effort de précision et de clarification, afin de combattre vigoureusement toute tendance centriste et pacifiste.
Pour préparer la fusion, une commission composée de quatre membres par groupement et sous la présidence d’un représentant du C.E. sera nommée. Elle sera chargée de l’élaboration du programme et des statuts du parti communiste unifié.
Dans un délai de 2 mois, on convoquera un congrès commun qui prendra toutes les décisions ultérieures. Le P.C. unifié ne négligera rien pour établir le contact le plus large avec les masses.
Pour préparer et mener communément la campagne électorale, il sera également formé un comité d’action par les deux groupements 2.
(« L’Exploité », 27 juillet 1921)
Notre ami Jacquemotte, que le Parti Communiste Belge − ancienne gauche du P.O.B. − avait délégué, avec le camarade Poulet, au IIIe congrès de la Troisième Internationale, vient de rentrer de Moscou 3. Poulet est resté plus longtemps en Russie pour y étudier la situation économique. Nous avons tenu pour tous nos camarades du pays qui attendent avec impatience des nouvelles de nos délégués, à poser à Jacquemotte − qui nous est revenu en excellente santé et plus combatif que jamais − quelques questions sur les points de brûlante actualité.
La position du Parti Communiste Belge.
« Et avant tout, demandons-nous, quels sont les résultats de la mission : sommes-nous reconnus par la IIIe Internationale ? »
– Les résultats sont excellents, me dit Jacquemotte, j’ai exposé au congrès et au Comité exécutif, nos points de vue ; j’ai indiqué l’effort que nous avions fait au sein du P.O.B. et j’ai constaté avec satisfaction que nos camarades du Comité exécutif notamment apprécient le travail que nous avons fourni.
Nous sommes en complet accord avec eux sur toutes les questions.
– Ils veulent comme nous un parti de masse. La révolution ne se fera pas autour d’une table par quelques conspirateurs romantiques, mais avec la majorité des travailleurs. Nous sommes également d’accord sur notre conception de l’action syndicale rester dans nos syndicats, dans notre commission syndicale, et y travailler vigoureusement.
Et l’action parlementaire ?
– Nous devons y participer. C’est ce qui ressort nettement de l’ordre du jour de fusion que voici et que je te prie d’insérer dans « L’Exploité ».
– Le sentiment très net de la IIIe Internationale est que nous devons participer aux prochaines élections législatives. Ce sentiment de la nécessité de l’action parlementaire en Belgique m’a même été traduit de façon très nette par Zinoviev dont la première question a été : « Avez-vous des députés communistes en Belgique ? »
Dans notre pays, où le fétichisme parlementaire est si accentué, où l’illusion démocratique est si puissante encore, n’y a-t-il pas, pour la clarté et la netteté de l’action communiste, quelque danger à aborder l’action parlementaire ?
– La IIIe Internationale estime au contraire − et je suis de cet avis − que ce qui importe ce ne sont pas les modalités de l’action, mais qu’il faut avant tout se placer sur le « plan révolutionnaire ». Les « thèses sur la tactique » présentées par Lénine, au nom du Parti Communiste Russe et adoptées par le IIIe congrès, nous offrent d’une façon générale des précisions utiles à cet égard. En ce qui concerne l’action parlementaire, l’Internationale, tu le sais, n’y voit pas la besogne réformiste de nos social-patriotes, mais bien au contraire l’agitation dans les masses, la propagande révolutionnaire permanente, la préparation de la classe ouvrière aux actions décisives. En un mot, l’action parlementaire est un moyen de lutte. Les communistes n’entrent pas au Parlement comme le font les social-patriotes réformistes pour le consolider, mais, au contraire, pour le combattre et le détruire.
Veux-tu me dire maintenant où nous en sommes avec nos relations avec l’autre parti communiste ?
– L’Internationale a décidé − ce qui va de soi − qu’il ne peut exister en Belgique qu’un seul parti communiste : la fusion entre les deux groupements s’impose donc. Un comité de fusion de huit membres − quatre de chaque parti existant − a été créé qui préparera l’unification des forces communistes. Incessamment, un congrès unique sera appelé à constituer le parti communiste unifié. Le Parti déjà affilié avait déposé une motion aux termes de laquelle il restait le seul groupe officiellement affilié jusqu’au moment de la fusion. Cette motion a été repoussée.
Nous sommes reconnus officiellement, et la fusion des deux groupes affiliés doit se faire dans les deux mois sur la base des principes et thèses admis par les IIe et IIIe congrès de l’Internationale communiste.
[…] 4.
Ch. MASSART.
(30 juillet 1921)
Des différends du caractère le plus sérieux n’ont cessé d’opposer notre parti à l’ancienne aile gauche du P.O.B. Nous n’avons cessé de les exposer, de les commenter depuis plus d’un an. Nous n’avons dissimulé aucune critique que nous croyions devoir adresser aux anciens « Amis de l’Exploité ». Il n’y a là nul besoin de critiquer pour le plaisir de critiquer. Nous étions animés par la ferme volonté de faire participer les meilleurs des travailleurs de ce pays à l’examen approfondi de leur situation, de notre milieu social, des caractères complexes de la déchéance du vieux parti ouvrier, des conditions qui doivent présider, en regard de toutes ces circonstances, à la naissance et au développement d’un parti communiste.
Le paragraphe V de la motion adoptée par le C.E. est le reflet de ces différends.
Avant le IIe Congrès de la IIIe Internationale, notre parti s’était rallié à l’anti-parlementarisme. Il ne l’a pas abandonné depuis. Mais, à son congrès du 1er novembre 1920, il fut décidé qu’un rapport détaillé sur la situation en Belgique serait envoyé au C.E. de l’I.C. Celui-ci aurait à juger, d’après ce rapport, si, malgré notre opposition quasi unanime au parlementarisme, celui-ci devrait nous être imposé par mesure de discipline internationale. Différents obstacles étant intervenus, la réponse du C.E. ne nous est jamais parvenue avant le IIIe Congrès. La motion du 14 juillet dit l’intention actuelle du C.E.
D’autre part, le paragraphe V justifie et appuie les critiques que nous n’avons cessé de faire de l’activité de l’ancienne aile gauche du P.O.B.
Nous ne voulons pas, en ce moment, anticiper, par nos commentaires, sur les travaux de la commission, à la formation et à la mise en activité de laquelle le C.E. du parti s’est rallié, dans sa séance de dimanche 25 courant. Selon la décision du C.E., nos camarades délégués à la commission de fusion travailleront sous la direction immédiate et constante du C.E. Celui-ci est chargé d’assurer la discussion la plus large et la plus approfondie de la motion dans tous les groupes.
LA RÉDACTION.