Il est une chose qu’il ne faut jamais perdre de vue : le matérialisme dialectique considère que tout mouvement est une contradiction ; or, qui dit contradiction dit deux aspects.

Cela signifie que pour comprendre la contradiction, il faut parfaitement connaître les deux aspects, et non simplement un, ni même la « contradiction » comme forme abstraite.

Sans ces aspects, on rate la dimension concrète du mouvement, qui repose justement sur la dialectique propre aux deux aspects pris spécifiquement. D’où cet appel à porter toute son attention sur le caractère propre aux deux aspects d’une contradiction en particulier :

« Pour faire apparaître le caractère spécifique des contradictions considérées dans leur ensemble ou dans leur liaison mutuelle au cours du processus de développement d’une chose ou d’un phénomène, c’est-à-dire pour faire apparaître l’essence du processus, il faut faire apparaître le caractère spécifique des deux aspects de chacune des contradictions dans ce processus ; sinon, il sera impossible de faire apparaître l’essence du processus ; cela aussi exige la plus grande attention dans notre étude. »

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Si on ne fait pas cela, quelles sont les conséquences ? On rate la réalité, on pratique une analyse abstraite, car coupée des faits, du mouvement réel. C’est là un idéalisme qui se masque derrière un discours pseudo-scientifique, pour cacher qu’il évite les faits, qu’il n’affronte pas l’essence réel du phénomène.

C’est un discours vain, qui tourne en rond, qui s’auto-nourrit et se répète, sans aucune consistance. Sa nature stérile, desséchée, ne peut bien entendu plus échapper à personne, alors que la réalité se modifie.

Mao Zedong parle également d’une attitude fondamentalement erronée, consistant à être unilatéral, parce qu’on oublie ou nie certaines parties de la réalité. On est là dans le subjectivisme, qui nie justement les interrelations entre les phénomènes, prétendant passer au-dessus d’elles, pouvoir agir sur la réalité sans les prendre en compte.

Encore une fois, ici on a la perspective de la totalité. Tout est relié à tout, et même si on ne peut pas connaître toutes les médiations et inter-relations des phénomènes, on peut cerner les principaux aspects, comprendre la tendance, et même le mouvement général.

Cela demande un travail de fond, une connaissance de la nature dialectique de la matière elle-même. Il ne s’agit pas d’une « méthode » dialectique, mais de la saisie de la réalité telle qu’elle est. Mao Zedong affirme de manière parfaitement juste :

« Dans leur être objectif, les choses sont en fait liées les unes aux autres et possèdent des lois internes ; or, il est des gens qui, au lieu de refléter les choses telles qu’elles sont, les considèrent d’une manière unilatérale ou superficielle, sans connaître leur liaison mutuelle ni leurs lois internes ; une telle méthode est donc subjective. »

C’est d’autant plus faux que d’être unilatéral que, dans le processus de résolution de la contradiction principale, les contradictions secondaires changent : certaines se résolvent, d’autres s’accentuent, certaines apparaissent, d’autres semblent avoir disparues mais en fait c’est seulement de manière temporaire, etc.

Ne pas saisir la multiplicité des contradictions dans un phénomène peut avoir de graves conséquences, et faire perdre de vue la contradiction principale.

Mao Zedong donne l’exemple de la révolution chinoise, avec justement une présentation des interrelations historiques comprises par le Parti Communiste de Chine, dans le cadre de la situation concrète. Il présente également la juste analyse de Staline dans les Principes du léninisme.

Il en revient cependant toujours à la dimension générale, à la conception générale du matérialisme dialectique, n’hésitant pas à constater que :

« Comme les choses et les phénomènes sont d’une prodigieuse diversité et qu’il n’y a aucune limite à leur développement, ce qui est universel dans tel contexte peut devenir particulier dans un autre. Inversement, ce qui est particulier dans tel contexte peut devenir universel dans un autre. »

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Cela rend bien entendu difficile l’approche des phénomènes ; il faut se rappeler cependant qu’il ne s’agit jamais d’une vue « neutre », concept bourgeois par excellence : une analyse concrète se fonde toujours, et ne peut que se fonder que sur le nouveau, sur ce qui naît.

Le communisme ne peut être compris que d’un point de vue prolétarien ; le matérialisme dialectique ne saurait être employé sans être à l’avant-garde du processus révolutionnaire.

Il ne s’agit pas d’une question de choix subjectif, mais de se situer au bon endroit, afin que sa pensée reflète la réalité de manière adéquate.

C’est pour cela que Mao Zedong enseigne qu’il est nécessaire, en quelque sorte, de bien discerner les aspects et de savoir faire le tri. Mao Zedong prend l’exemple de l’histoire chinoise ; l’analyse matérialiste dialectique de l’histoire chinoise ne pouvait réussir qu’en se fondant sur le point suivant :

« Dans un processus de développement complexe d’une chose ou d’un phénomène, il existe toute une série de contradictions ; l’une d’elles est nécessairement la contradiction principale, dont l’existence et le développement déterminent l’existence et le développement des autres contradictions ou agissent sur eux (…).

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Dans toute contradiction, les aspects contradictoires se développent d’une manière inégale. Il semble qu’il y ait parfois équilibre entre eux, mais ce n’est là qu’un état passager et relatif ; la situation fondamentale, c’est le développement inégal. Des deux aspects contradictoires, l’un est nécessairement principal, l’autre secondaire. Le principal, c’est celui qui joue le rôle dominant dans la contradiction.

Le caractère des choses et des phénomènes est surtout déterminé par cet aspect principal de la contradiction, lequel occupe la position dominante.

Mais cette situation n’est pas statique ; l’aspect principal et l’aspect secondaire de la contradiction se convertissent l’un en l’autre et le caractère des phénomènes change en conséquence.

Si, dans un processus déterminé ou à une étape déterminée du développement de la contradiction, l’aspect principal est A et l’aspect secondaire B, à une autre étape ou dans un autre processus du développement, les rôles sont renversés ; ce changement est fonction du degré de croissance ou de décroissance atteint par la force de chaque aspect dans sa lutte contre l’autre au cours du développement du phénomène (…).

Rien au monde ne se développe d’une manière absolument égale, et nous devons combattre la théorie du développement égal ou la théorie de l’équilibre. »


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