Mao Zedong
Les taches du Parti communiste chinois 

dans la période de la résistance au Japon1
3 mai 1937

L’ETAPE ACTUELLE DU DEVELOPPEMENT DES CONTRADICTIONS INTERNES ET EXTERNES DE LA CHINE

1. Comme les contradictions entre la Chine et le Japon sont devenues dominantes, et que les contradictions internes se trouvent reléguées à une place secondaire et subordonnée, des changements sont intervenus dans les relations de la Chine avec l’extérieur et dans ses rapports de classes internes, marquant le début d’une nouvelle étape de développement dans la situation actuelle.

2. Longtemps la Chine a été en proie à deux sortes de contradictions aiguës et fondamentales — contradictions entre elle et l’impérialisme et contradictions entre le féodalisme et les masses populaires. En 1927, la bourgeoisie, représentée par le Kuomintang, trahit la révolution et vendit les intérêts nationaux à l’impérialisme ; un antagonisme aigu entre le pouvoir des ouvriers et des paysans et celui du Kuomintang en résulta, et le Parti communiste chinois dut assumer à lui seul la tâche d’accomplir la révolution nationale et démocratique.

Décembre 1929 : Mao Zedong durant son allocution à la Conférence de Gutian, Conférence au cours de laquelle le rôle de l'Armée rouge chinoise a été largement clarifié

Décembre 1929 : Mao Zedong durant son allocution à la Conférence de Gutian, Conférence au cours de laquelle le rôle de l’Armée rouge chinoise a été largement clarifié

3. Depuis l’Incident du 18 Septembre 1931, et surtout depuis les événements de 1935 en Chine du Nord2, ces contradictions ont subi les changements suivants :

a) Les contradictions générales entre la Chine et l’impérialisme ont fait place aux contradictions particulièrement accentuées et aiguës qui opposent la Chine à l’impérialisme japonais. Celui-ci poursuit en effet une politique de conquête totale de la Chine. Par conséquent, les contradictions entre la Chine et certaines puissances impérialistes sont passées au second plan, et la fissure entre ces puissances et l’impérialisme japonais s’est élargie. Il s’ensuit aussi que le Parti communiste chinois et le peuple chinois ont la tâche de lier le front uni national antijaponais en Chine au front de la paix dans le monde. En d’autres termes, la Chine ne doit pas seulement s’unir avec l’U.R.S.S., qui a toujours été une amie fidèle du peuple chinois, elle doit également, autant que possible, se lier, en vue d’une lutte commune contre l’impérialisme japonais, avec les pays impérialistes désireux actuellement de maintenir la paix et de s’opposer à de nouvelles guerres d’agression. Notre front uni doit avoir pour but la résistance au Japon, il ne doit pas s’opposer à toutes les puissances impérialistes en même temps.

b) Les contradictions entre la Chine et le Japon ont modifié les rapports de classes en Chine ; elles menacent l’existence même de la bourgeoisie, voire des seigneurs de guerre, elles les ont donc amenés à changer progressivement leur attitude politique et celle de leurs partis. Cela pose au Parti communiste chinois et au peuple chinois la tâche d’établir un front uni national antijaponais. Notre front uni comprendra la bourgeoisie et tous ceux qui sont pour la défense de la patrie ; il sera l’expression de l’unité nationale contre l’ennemi extérieur. Cette tâche doit être accomplie et elle peut l’être.

c) Les contradictions entre la Chine et le Japon ont changé l’aspect des choses pour les masses populaires du pays — prolétariat, paysannerie et petite bourgeoisie urbaine — et ont modifié la politique du Parti communiste. La lutte du peuple pour le salut de la patrie a gagné en ampleur. La politique suivie par le Parti communiste après l’Incident du 18 Septembre tendait, moyennant trois conditions (arrêter les attaques contre les bases révolutionnaires, garantir les libertés et droits du peuple, armer le peuple), à conclure des accords avec les fractions du Kuomintang disposées à coopérer avec nous dans la résistance au Japon ; elle est devenue une politique visant à former un front uni antijaponais de toute la nation. De là découlent une série de mesures prises par notre Parti ; par exemple, en 1935, la Déclaration d’Août3 et la Résolution de Décembre4; en mai 1936, l’abandon du mot d’ordre de lutte contre Tchiang Kaï-chek5; en août, la lettre adressée au Kuomintang6; en septembre, la Résolution sur la république démocratique7; en décembre, l’affirmation de notre ferme position pour un règlement pacifique de l’Incident de Sian; et, en février 1937, le télégramme adressé à la troisième session plénière du Comité exécutif central du Kuomintang8.

d) En raison des contradictions entre la Chine et le Japon, des changements sont intervenus également dans les régimes instaurés par les seigneurs de guerre et dans les guerres intestines entre ces derniers, phénomènes dus à la politique impérialiste des sphères d’influence et aux conditions économiques semi-coloniales de la Chine. Les impérialistes japonais encouragent ces régimes séparés et ces guerres intestines qui ouvrent la voie à leur domination exclusive sur la Chine. Certains autres pays impérialistes, dans leur propre intérêt, sont temporairement favorables à l’unité et à la paix en Chine. Le Parti communiste chinois et le peuple chinois, pour leur part, déploient tous leurs efforts pour s’opposer aux guerres civiles et aux scissions et pour promouvoir la paix et l’unité.

e) Les contradictions nationales qui se développent entre la Chine et le Japon ont surpassé en importance politique et relégué à une place secondaire et subordonnée les contradictions entre les classes et entre les blocs politiques du pays. Mais ces contradictions existent toujours, elles n’ont nullement diminué ou disparu. Il en est de même des contradictions entre la Chine et les puissances impérialistes autres que le Japon. Ainsi, devant le Parti communiste chinois et le peuple chinois se pose la tâche suivante : effectuer à l’égard des contradictions internes et externes les rajustements appropriés qui, à l’heure actuelle, sont possibles et nécessaires, afin qu’elles puissent cadrer avec la tâche générale de l’union dans la lutte contre le Japon. De là découle la politique du Parti communiste chinois qui se prononce pour la paix et l’unité, la démocratie, l’amélioration des conditions de vie du peuple et les négociations avec les pays opposés au Japon.

4. Commencée le 9 décembre 1935, la première étape de la nouvelle période de la révolution chinoise se termina en février 1937, au moment où se tenait la troisième session plénière du Comité exécutif central du Kuomintang. Au cours de cette étape, les événements les plus marquants ont été le mouvement pour le salut national parmi les étudiants, dans les milieux culturels et dans la presse, l’entrée de l’Armée rouge dans le Nord-Ouest, le travail de propagande et d’organisation effectué par le Parti communiste en faveur de sa politique de front uni national antijaponais, les grèves antijaponaises à Changhaï et à Tsingtao9, un certain raidissement de la politique britannique à l’égard du Japon10, l’Incident du Kouangtong-Kouangsi11, la résistance dans le Soueiyuan et le mouvement d’aide au Soueiyuan12, l’attitude relativement ferme de Nankin dans les conversations sino-japonaises13, l’Incident de Sian et, enfin, la troisième session plénière, tenue à Nankin, du Comité exécutif central du Kuomintang14. Tous ces événements gravitent autour de la contradiction fondamentale représentée par l’antagonisme entre la Chine et le Japon, et sont en rapport direct avec la nécessité historique de la création d’un front uni national antijaponais. La tâche fondamentale de la révolution, à cette étape, était de lutter pour la paix dans le pays, de mettre un terme aux conflits armés à l’intérieur, afin de réaliser l’unité dans la résistance au Japon. Le Parti communiste lança à cette étape son mot d’ordre : “Arrêter la guerre civile et tous unis contre les envahisseurs japonais !” mot d’ordre qui fut réalisé pour l’essentiel, ce qui créa les conditions préalables à la formation effective du front uni national antijaponais.

5. En raison de la présence dans ses rangs du groupe projaponais, le Kuomintang n’apporta aucun changement net et radical à sa politique lors de la troisième session plénière de son Comité exécutif central, et il ne sut résoudre aucun problème d’une façon concrète. Néanmoins, la pression du peuple et les changements intervenus dans ses propres rangs le contraignirent à commencer à changer sa politique erronée des dix dernières années, c’est-à-dire à abandonner la politique de guerre civile, de dictature et de non-résistance au Japon pour se tourner vers une politique de paix intérieure, de démocratie et de résistance au Japon et à se mettre à accepter la politique de front uni national contre le Japon. Ce premier changement du Kuomintang se dessina lors de la troisième session plénière de son Comité exécutif central. Désormais, il s’agit d’amener le Kuomintang à changer radicalement sa politique. Pour cela, il faut que notre Parti et notre peuple tout entier développent encore plus largement le mouvement de résistance au Japon et le mouvement pour la démocratie, s’emploient davantage à critiquer le Kuomintang, à le pousser en avant, à faire pression sur lui, s’unissent à ceux de ses membres qui sont pour la paix, la démocratie et la résistance au Japon, fassent avancer ses éléments hésitants, irrésolus, et écartent ses éléments projaponais.

6. L’étape actuelle est la seconde de la nouvelle période. Tout comme la précédente, elle constitue une étape transitoire vers une résistance armée contre le Japon à l’échelle nationale. Si la tâche de l’étape précédente consistait principalement à lutter pour la paix intérieure, celle de la phase actuelle est avant tout la lutte pour la démocratie. Il faut comprendre que la paix intérieure et la démocratie dans le pays sont l’une et l’autre indispensables à l’établissement d’un front uni national antijaponais véritable et solide. C’est pourquoi la lutte pour la démocratie constitue, à l’étape du développement actuel, le maillon principal dans la chaîne des tâches de la révolution. Si nous ne voyons pas clairement l’importance de la lutte pour la démocratie, si nous relâchons nos efforts dans cette lutte, nous serons incapables d’établir un front uni national antijaponais, véritable et solide.

LA LUTTE POUR LA DEMOCRATIE ET LA LIBERTE

7. L’impérialisme japonais se prépare activement à envahir la partie de la Chine située au sud de la Grande Muraille. De concert avec Hitler et Mussolini, qui préparent fiévreusement leur guerre de brigandage en Occident, le Japon, conformément à un plan bien défini, déploie en Orient toute son énergie pour préparer les conditions propres à lui permettre de subjuguer la Chine du premier coup — conditions militaires, politiques, économiques et idéologiques dans son propre pays, conditions diplomatiques sur le plan international, et soutien donné aux forces projaponaises en Chine. Sa propagande sur la “collaboration sino-japonaise” et une certaine détente dans son activité diplomatique procèdent précisément, à la veille de la guerre, d’une nécessité tactique de sa politique d’agression. La Chine approche du moment critique où elle aura à décider elle-même de son sort, et elle doit accélérer ses préparatifs pour résister au Japon et sauver la nation. Nous ne sommes pas du tout contre ces préparatifs, nous nous opposons simplement à la théorie de la préparation prolongée, à la mollesse insouciante des fonctionnaires civils et militaires et à leur fainéantise, qui conduisent le pays à la ruine ; tout cela rend en fait service à l’ennemi et il faut y mettre fin au plus vite.

8. Les préparatifs de défense nationale dans les domaines politique, militaire, économique et dans celui de l’éducation sont les conditions nécessaires de la résistance armée pour le salut de la nation, et aucun de ces préparatifs ne peut souffrir le moindre délai. Or, la clé de la victoire dans la résistance est, sur le plan politique, la lutte pour la démocratie et la liberté. La résistance exige la paix et l’unité à l’intérieur du pays; sans la démocratie et la liberté, il n’est pas possible de consolider la paix, ni de renforcer l’unité. La résistance exige la mobilisation du peuple ; sans la démocratie et la liberté, il n’est pas possible de le mobiliser. Sans une paix et une unité solide, sans la mobilisation du peuple, notre résistance connaîtra le même sort que celle de l’Abyssinie. Si ce pays a été vaincu, c’est principalement parce que son régime féodal était incapable d’assurer l’unité intérieure et de susciter l’initiative du peuple. Donc, sans la démocratie, il n’est pas possible d’établir en Chine un véritable et solide front uni national contre le Japon et d’accomplir les tâches qui incombent à ce front.

9. La Chine doit entreprendre immédiatement des réformes démocratiques sur deux plans. Premièrement, pour ce qui est du régime politique, la dictature réactionnaire du Kuomintang, exercée par un seul parti et une seule classe, doit faire place à un régime démocratique fondé sur la coopération de différents partis et de différentes classes. A cet égard, il faut, pour commencer, renoncer aux méthodes non démocratiques d’élection et de convocation de l’Assemblée nationale, procéder à des élections démocratiques et assurer à l’Assemblée la liberté de se réunir, pour passer ensuite à l’élaboration d’une véritable Constitution démocratique, à la convocation d’un véritable parlement démocratique, à l’élection d’un véritable gouvernement démocratique qui puisse faire une véritable politique démocratique. Ainsi seulement on pourra réellement consolider la paix intérieure, faire cesser les hostilités dans le pays, renforcer l’unité intérieure, de façon que toute la nation puisse résister, d’un commun accord, à l’ennemi extérieur. Il peut arriver que l’impérialisme japonais nous attaque avant que nous ayons achevé ces réformes. Aussi devons-nous y procéder rapidement et parvenir à les achever au cours même de la guerre de résistance, afin de nous tenir prêts à repousser l’attaque japonaise et à la briser complètement. Les patriotes des différents partis politiques comme le peuple chinois tout entier doivent sortir de leur indifférence à l’égard de la question de l’Assemblée nationale et de la Constitution et consacrer tous leurs efforts au mouvement pour une assemblée nationale et une Constitution, mouvement qui intéresse la défense nationale; ils doivent critiquer sévèrement le Kuomintang, parti au pouvoir, le pousser en avant et faire pression sur lui afin qu’il renonce à la dictature d’un seul parti, d’une seule classe, et se conforme à la volonté du peuple. Dans les quelques mois à venir, nous devons déclencher dans tout le pays un large mouvement démocratique dont l’objectif immédiat sera la complète démocratisation de l’Assemblée nationale et de la Constitution. Deuxièmement, il s’agit de donner au peuple les libertés de parole, de réunion et d’association. Sans ces libertés, il ne sera pas possible de faire aboutir la réforme démocratique du système politique, de mobiliser le peuple pour la résistance, de remporter la victoire dans la défense de la patrie et la reconquête des territoires perdus. Dans les quelques mois à venir, l’effort du mouvement démocratique de toute la nation doit arriver au moins à réaliser un minimum de ces libertés, dont la libération des détenus politiques et la levée de l’interdiction des partis politiques. La réforme démocratique du système politique et l’octroi des libertés et des droits au peuple représentent une partie importante du programme du front uni national antijaponais et constituent en même temps les conditions indispensables de la création d’un front uni national antijaponais véritable et solide.

10. Nos ennemis — les impérialistes japonais et les collaborateurs, éléments projaponais et trotskistes chinois — s’emploient à ruiner par tous les moyens chacune des dispositions prises en Chine en faveur de la paix et de l’unité, de la démocratie, des libertés et de la résistance au Japon. Dans le passé, lorsque nous luttions pour la paix et l’unité, ils s’évertuaient à fomenter la guerre civile et la scission. A présent et dans le proche avenir, alors que nous luttons de toutes nos forces pour la démocratie et la liberté, ils vont sans aucun doute reprendre leurs activités de sape. Leur objectif général est de nous faire échouer dans notre tâche de résistance et de défense de la patrie et d’exécuter leur plan d’agression pour l’asservissement de la Chine. Dorénavant, dans notre lutte pour la démocratie et la liberté, nous devons non seulement faire d’énergiques efforts de propagande, d’agitation et de critique auprès des éléments irréductibles du Kuomintang et des éléments rétrogrades de la population, mais aussi dévoiler dans toute leur étendue et combattre résolument les intrigues des impérialistes japonais ainsi que celles des éléments projaponais et des trotskistes qui leur servent de valets dans l’agression contre la Chine.

11. Dans l’intérêt de la paix intérieure, de la démocratie et de la résistance et en vue d’établir un front uni national antijaponais, le Parti communiste chinois a pris les quatre engagements suivants, dans un télégramme adressé à la troisième session plénière du Comité exécutif central du Kuomintang :

1) remplacer le nom du Gouvernement de la Base révolutionnaire du Chensi-Kansou-Ninghsia qu’il dirige par celui de Gouvernement de la Région spéciale de la République chinoise, renoncer à la dénomination d’Armée rouge et faire de l’Armée rouge une partie de l’Armée révolutionnaire nationale, en plaçant ce Gouvernement et cette Armée sous l’autorité respective du Gouvernement central de Nankin et de son Conseil militaire ;

2) appliquer intégralement le régime démocratique sur tout le territoire administré par le Gouvernement de la Région spéciale ;

3) cesser de suivre une politique de renversement du régime du Kuomintang par la force ;

4) cesser de confisquer les terres des propriétaires fonciers.

Ces engagements étaient nécessaires et admissibles. Ils sont, en effet, le seul moyen de faire disparaître, à l’intérieur du pays, à la suite des changements intervenus dans les contradictions externes et internes quant à leur importance politique, l’hostilité entre les deux pouvoirs politiques afin de mener dans l’union la lutte commune contre l’ennemi. Ce sont là des concessions permises par les principes et soumises à des conditions déterminées ; elles sont faites pour obtenir en échange ce dont toute la nation a besoin — la paix, la démocratie et la résistance. Toutefois, ces concessions ont des limites. Le maintien de la direction du Parti communiste sur la Région spéciale et sur l’Armée rouge et le maintien de l’indépendance du Parti et de sa liberté de critique dans ses rapports avec le Kuomintang sont ces limites qu’il n’est pas permis de franchir. Faire des concessions signifie en faire des deux côtés : le Kuomintang renoncera à sa politique de guerre civile, de dictature et de non-résistance à l’ennemi extérieur, et le Parti communiste renoncera à faire une politique qui laisse subsister l’antagonisme entre les deux pouvoirs politiques. C’est au prix de cette concession que nous obtiendrons celle du Kuomintang et que nous reprendrons notre coopération avec lui afin de mener la lutte pour le salut national. Qualifier cela de capitulation du Parti communiste ne serait que de l’“Ah Q-isme”15 et une calomnie perfide.

12. Le Parti communiste est-il d’accord sur les trois principes du peuple ? Nous répondons : oui, il est d’accord16. Les trois principes du peuple ont subi des variations au cours de leur histoire. Les trois principes du peuple révolutionnaires du Dr Sun Yat-sen, appliqués avec résolution par suite de la coopération de celui-ci avec le Parti communiste, ont conquis la confiance du peuple et sont devenus le drapeau victorieux de la révolution de 1924-1927. Cependant, l’ostracisme contre le Parti communiste — l’épuration du Parti17 et la guerre anticommuniste — et la politique diamétralement opposée aux trois principes du peuple, que le Kuomintang s’est mis à pratiquer en 1927, ont entraîné la défaite de la révolution et mis la nation en péril, si bien que le peuple cessa d’avoir confiance dans les trois principes du peuple. Maintenant que la nation traverse une crise extrêmement grave et que le Kuomintang ne peut plus continuer à gouverner comme par le passé, les éléments patriotes qu’il compte dans son sein réclament, comme le peuple chinois tout entier, une nouvelle coopération entre les deux partis. Faire revivre l’esprit des trois principes du peuple et reprendre, conformément au principe du nationalisme, ou lutte pour l’indépendance et la libération nationale, au principe de la démocratie, ou conquête de la démocratie et de la liberté, au principe du bien-être du peuple, ou promotion de la prospérité du peuple, la coopération entre les deux partis, pour qu’à la tête du peuple ils appliquent résolument ces principes, correspond par conséquent parfaitement — il faut que tout communiste le comprenne bien — aux exigences historiques de la révolution chinoise. Les communistes ne renonceront jamais à leur idéal du socialisme et du communisme ; ils l’atteindront en passant par l’étape de la révolution démocratique bourgeoise. Le Parti communiste chinois a son propre programme politique et économique. Son programme maximum est le socialisme et le communisme, ce qui est différent des trois principes du peuple. Même son programme pour la période de la révolution démocratique va plus loin que celui d’aucun autre parti en Chine. Mais le programme du Parti communiste dans la révolution démocratique s’accorde, pour l’essentiel, avec le programme des trois principes du peuple proclamé par le Ier Congrès national du Kuomintang. C’est pourquoi, loin de rejeter les trois principes du peuple, nous sommes prêts à les appliquer résolument, nous exigeons même du Kuomintang qu’il passe avec nous à leur mise en œuvre et nous invitons tout le peuple chinois à les mettre en pratique. Nous estimons que le Parti communiste, le Kuomintang et le peuple tout entier doivent s’unir dans la lutte pour atteindre ces trois grands objectifs — l’indépendance nationale, la démocratie et la liberté, le bien-être du peuple.

13. Le mot d’ordre d’une république démocratique des ouvriers et des paysans que nous avons lancé antérieurement était-il erroné ? Non, il ne l’était pas. Puisque la bourgeoisie, et particulièrement la grande bourgeoisie, s’était retirée de la révolution et que, passant dans le camp des impérialistes et des forces féodales, elle était devenue l’ennemie du peuple, il ne restait plus comme forces motrices de la révolution que le prolétariat, la paysannerie et la petite bourgeoisie urbaine, et comme parti révolutionnaire que le Parti communiste; la tâche de l’organisation de la révolution retombait ainsi forcément sur les épaules de l’unique parti révolutionnaire de Chine, le Parti communiste. Seul le Parti communiste continua de porter haut le drapeau de la révolution et garda intactes les traditions de la révolution ; il lança le mot d’ordre de république démocratique des ouvriers et des paysans et mena pendant de nombreuses années une âpre lutte pour le réaliser. Ce mot d’ordre n’allait pas à l’encontre de la tâche de la révolution démocratique bourgeoise, il impliquait au contraire la ferme exécution de cette tâche. Dans notre combat, nous n’avons pris aucune mesure politique qui soit en désaccord avec elle. Notre politique, qui comprenait notamment la confiscation des terres des propriétaires fonciers et l’application de la journée de huit heures, ne sortait nullement des limites de la propriété privée capitaliste ; elle n’était pas la mise en pratique du socialisme. Quelle sera d’autre part la composition de la nouvelle république démocratique ? Elle sera constituée par le prolétariat, la paysannerie, la petite bourgeoisie urbaine, la bourgeoisie et tous ceux qui, dans le pays, se rallient à la révolution nationale et démocratique ; elle sera l’alliance de toutes ces classes dans la révolution nationale et démocratique. Le trait distinctif est ici l’inclusion de la bourgeoisie ; en effet, dans les circonstances présentes, il est possible que la bourgeoisie coopère cette fois encore avec nous et participe à la résistance au Japon ; aussi le parti du prolétariat ne doit-il pas la repousser, mais l’accueillir et renouveler l’alliance avec elle dans la lutte commune, pour faire avancer la révolution chinoise. En vue d’arrêter les conflits armés à l’intérieur du pays, le Parti communiste est disposé à mettre fin à sa politique de confiscation par la force des terres des propriétaires fonciers et à résoudre le problème agraire par voie législative, ou par tout autre moyen approprié, au cours de l’établissement de la nouvelle république démocratique. La première question qu’il importe de régler est de savoir si la terre de Chine sera japonaise ou chinoise. Puisque la solution du problème agraire des paysans est subordonnée à la défense de la Chine, il est absolument nécessaire de passer de la confiscation par la violence à de nouvelles méthodes appropriées.

S’il était juste, dans le passé, d’avancer le mot d’ordre de république démocratique des ouvriers et des paysans, il est également juste de le retirer aujourd’hui.

14. En vue d’établir un front uni national et de lutter en commun contre l’ennemi, il est nécessaire de résoudre convenablement certaines contradictions internes en veillant à ce que leur solution contribue à renforcer et à élargir ce front antijaponais et n’ait pas pour effet de l’affaiblir ou de le restreindre. A l’étape de la révolution démocratique, il est impossible d’éviter les contradictions et les luttes à l’intérieur du pays entre les classes, entre les partis politiques et entre les blocs politiques, mais on peut et on doit arrêter les luttes préjudiciables à l’unité et à la résistance au Japon (guerre civile, confits antagonistes entre partis politiques, séparatisme provincial; oppression féodale politique et économique d’un côté, politique d’insurrection et revendications économiques excessives, nuisibles à la résistance, de l’autre, etc.), tout en continuant les luttes profitables à l’unité et à la résistance au Japon (liberté de critique, indépendance des partis politiques, amélioration des conditions politiques et économiques du peuple, etc.).

15. Dans le cadre des tâches générales de la lutte pour un front uni national antijaponais et pour une république démocratique unifiée, les tâches de l’Armée rouge et des bases antijaponaises sont les suivantes :

1) Pour répondre aux conditions de la guerre de résistance, l’Armée rouge doit se réorganiser immédiatement en unités de l’Armée révolutionnaire nationale et élever le niveau de sa formation sur les plans militaire, politique et culturel afin de devenir une armée modèle dans cette guerre ;

2) nos bases d’appui doivent devenir une partie intégrante de l’Etat, appliquer le système démocratique répondant aux conditions nouvelles, réorganiser leurs corps de sécurité publique et liquider les collaborateurs et les saboteurs pour devenir des régions modèles au point de vue de la résistance et de la démocratie ;

3) faire dans ces régions le travail d’édification économique indispensable et améliorer les conditions de vie du peuple ;

4) entreprendre le travail culturel nécessaire.

NOUS AVONS LA RESPONSABILITE D’ASSUMER LA DIRECTION

16. C’est une loi confirmée par l’histoire de la Chine que la bourgeoisie chinoise, susceptible de prendre part à la lutte contre l’impérialisme et le système féodal dans certaines circonstances historiques, peut, dans d’autres, vaciller et trahir, en raison de sa faiblesse économique et politique. Aussi est-ce un verdict de l’histoire que la révolution démocratique bourgeoise contre l’impérialisme et le féodalisme est une tâche qui ne peut être accomplie que sous la direction du prolétariat et non de la bourgeoisie. De plus, on ne pourra surmonter l’instabilité et l’inconséquence propres à la bourgeoisie et empêcher la révolution d’avorter qu’en donnant aux qualités de persévérance et de volonté d’aboutir du prolétariat leur plein essor dans la révolution démocratique. Est-ce au prolétariat de suivre la bourgeoisie, ou à la bourgeoisie de suivre le prolétariat ? Cette question de la responsabilité de la direction dans la révolution chinoise est le facteur décisif dont dépend l’issue de la révolution. L’expérience des années 1924-1927 montre avec quel succès la révolution se développait lorsque la bourgeoisie suivait la direction politique du prolétariat et quelle défaite elle a essuyée lorsque le prolétariat, dont répond le Parti communiste, était politiquement à la remorque de la bourgeoisie18. Il ne faut pas que ce fait historique se répète. Dans la situation présente, sans la direction politique du prolétariat et de son Parti, il est impossible d’établir un front uni national contre le Japon, impossible d’atteindre les objectifs de paix intérieure, de démocratie et de résistance, impossible de défendre la patrie et impossible de créer une république démocratique unifiée. Aujourd’hui, la bourgeoisie, que représente le Kuomintang, se montre encore très passive et conservatrice, la preuve en est son indécision prolongée à accepter le front uni national antijaponais proposé par le Parti communiste. Cette situation accroît la responsabilité du prolétariat et de son Parti dans la direction politique. Assumer les fonctions d’état-major général dans la résistance au Japon pour le salut de la nation est une responsabilité que le Parti communiste ne saurait décliner, une obligation à laquelle il ne saurait se soustraire.

17. Comment le prolétariat, par l’intermédiaire de son Parti, exerce-t-il sa direction politique sur toutes les classes révolutionnaires du pays ? Premièrement, il avance des mots d’ordre politiques fondamentaux qui correspondent au cours du développement de l’histoire et, pour traduire ces mots d’ordre dans la réalité, il lance des mots d’ordre d’action pour chaque étape de développement et à chaque événement important. Nous avons lancé, par exemple, les mots d’ordre fondamentaux “Pour un front uni national antijaponais” et “Pour une république démocratique unifiée”, puis, nous avons également avancé les mots d’ordre : “Arrêter la guerre civile”, “Lutter pour la démocratie”, “Résister au Japon” comme objectifs concrets des actions concertées de la nation tout entière. Sans ces objectifs concrets, il ne saurait être question de direction politique. Deuxièmement, lorsque le pays tout entier entrera en action pour ces objectifs, le prolétariat, et en particulier son avant-garde, le Parti communiste, devront montrer ce qu’il faut faire pour les atteindre en faisant preuve d’un enthousiasme et d’un dévouement sans bornes. Dans la lutte pour l’accomplissement de toutes les tâches que comportent la création d’un front uni national antijaponais et la fondation d’une république démocratique, les communistes devront se montrer les plus clairvoyants, les plus capables d’abnégation, les plus résolus et aussi les plus aptes à saisir une situation sans idée préconçue, ils devront s’appuyer sur la majorité des masses et conquérir leur soutien. Troisièmement, sans perdre de vue l’objectif politique fixé, le Parti communiste devra établir avec ses alliés des relations convenables, développer et consolider son alliance avec eux. Quatrièmement, il faudra élargir les rangs du Parti communiste, maintenir l’unité de son idéologie et la rigueur de sa discipline. C’est en remplissant toutes ces conditions que le Parti communiste assurera la direction politique sur le peuple tout entier. Elles sont fondamentales pour garantir notre direction politique et assurer à la révolution, en empêchant que l’instabilité de nos alliés la disloque, une victoire complète.

18. Lorsque la paix intérieure sera réalisée et la coopération des deux partis établie, les formes de lutte, d’organisation et de travail que nous avions adoptées, en suivant la ligne fondée sur le maintien de l’antagonisme entre les deux pouvoirs politiques, devront changer. Ce changement consistera principalement à passer des moyens militaires aux méthodes pacifiques, de l’illégalité à la légalité. Il ne sera pas facile d’y procéder et nous devrons nous remettre à l’étude. Donner une nouvelle formation aux cadres deviendra l’une de nos tâches principales.

19. Beaucoup de camarades nous ont posé des questions sur la nature de la république démocratique et sur son avenir. Voici notre réponse : Du point de vue de sa nature de classe, elle est l’alliance de toutes les classes révolutionnaires ; pour ce qui est de son avenir, elle peut évoluer vers le socialisme. Notre république démocratique s’établira au cours de la résistance nationale, sous la direction du prolétariat et dans la nouvelle conjoncture internationale — après la victoire du socialisme en Union soviétique et à la veille d’une nouvelle période de la révolution mondiale. Ainsi, à considérer ses conditions sociales et économiques, elle restera bien un Etat démocratique bourgeois, mais, de par ses conditions politiques concrètes, elle sera un Etat fondé sur l’alliance des ouvriers, des paysans, de la petite bourgeoisie et de la bourgeoisie et différera en cela des républiques bourgeoises en général. Donc, en ce qui concerne son avenir, bien qu’elle puisse prendre une direction capitaliste, elle peut aussi s’engager dans la voie du socialisme, et le parti du prolétariat chinois doit lutter de toutes ses forces pour cette seconde perspective.

20. La lutte contre l’attitude sectaire de “porte close” et l’aventurisme et en même temps contre le suivisme est indispensable à l’accomplissement des tâches qui incombent au Parti. Dans les mouvements de masse, notre Parti a une tendance traditionnelle à prendre une attitude de “porte close” particulièrement grave, ou à verser dans le sectarisme hautain et l’aventurisme. C’est une tendance nuisible qui empêche le Parti d’établir un front uni national antijaponais et de conquérir la majorité du peuple. Il est absolument nécessaire de l’éliminer de tous les secteurs de notre travail. Ce que nous devons faire, c’est de nous appuyer sur la majorité et de tenir compte de l’ensemble de la situation. Nous ne devons pas davantage tolérer que renaisse le suivisme de Tchen Tou-sieou, reflet du réformisme bourgeois dans les rangs du prolétariat. Altérer la position de classe du Parti, estomper son visage, sacrifier les intérêts des ouvriers et des paysans pour répondre aux besoins du réformisme bourgeois, c’est conduire inévitablement la révolution à la défaite. Ce que nous devons faire, c’est d’appliquer une politique révolutionnaire ferme, c’est de lutter pour la victoire totale de la révolution démocratique bourgeoise. Afin de surmonter les tendances néfastes mentionnées ci-dessus, il est absolument indispensable d’élever dans tout le Parti le niveau théorique marxiste-léniniste, car seul le marxisme-léninisme est la boussole qui conduira la révolution chinoise à la victoire.

  1. Rapport présenté en mai 1937 par le camarade Mao Zedong à une conférence nationale du Parti communiste chinois tenue à Yenan.
  2. Il s’agit de l’invasion de la Chine du Nord par les Japonais en 1935, à la suite de laquelle le gouvernement du Kuomintang, qui avait à sa tête Tchiang Kaï-chek, commit dans cette partie du pays une série d’actes contre l’honneur national et les droits souverains de la Chine. En mai de la même année, les envahisseurs japonais exigèrent du gouvernement du Kuomintang la reconnaissance de leur autorité sur la Chine du Nord. En juin, Ho Ying-kin, le représentant du gouvernement du Kuomintang dans cette région, se soumit à cette exigence et conclut avec Yoshijiro Umezu, commandant des forces japonaises en Chine du Nord, un accord connu sous le nom d’“Accord Ho-Umezu”. Aux termes de cet accord, la Chine perdait la plupart de ses droits souverains sur le Hopei et le Tchahar (province aujourd’hui incorporée dans le Chansi, le Hopei et la Région autonome de Mongolie intérieure). En octobre, à l’instigation des envahisseurs japonais, des collaborateurs chinois déclenchèrent une émeute à Hsiangho, dans le Hopei, et s’emparèrent du chef-lieu de ce district. En novembre, d’autres collaborateurs chinois, poussés par l’envahisseur japonais, organisèrent un “Mouvement pour l’autonomie des cinq provinces de la Chine du Nord” et créèrent dans l’est du Hopei un “Gouvernement autonome anticommuniste”, gouvernement fantoche. Sur l’ordre du gouvernement du Kuomintang, Song Tcheh-yuan et d’autres formèrent un “Conseil politique du Hopei-Tchahar”, afin de satisfaire les envahisseurs japonais, qui exigeaient une “administration spéciale pour la Chine du Nord”.
  3. Il s’agit de la Déclaration du Parti communiste chinois, publiée le 1er août 1935. En voici les passages essentiels :
    A l’heure où notre pays est menacé d’asservissement et notre peuple d’extermination, le Parti communiste lance, une fois de plus, à tous nos compatriotes l’appel suivant : Quelles qu’aient pu être, aujourd’hui comme hier, les divergences d’opinions et d’intérêts entre les partis politiques, les différences de vues et d’intérêts entre nos compatriotes de divers milieux, l’hostilité entre les différentes armées du pays, nous devons tous nous pénétrer de l’idée que “les frères qui se querellent chez eux s’unissent pour repousser les attaques venant de l’extérieur”, et avant tout nous devons cesser la guerre civile afin de faire concourir toutes les énergies du pays (les ressources humaines, matérielles et financières aussi bien que les forces armées) à la lutte pour la cause sacrée de la résistance au Japon et du salut de la patrie. Le Parti communiste réaffirme solennellement ceci : Que les troupes du Kuomintang cessent leurs attaques contre l’Armée rouge, que l’une quelconque des unités militaires résiste au Japon, et l’Armée rouge non seulement cesse immédiatement tout acte d’hostilité contre elles, mais elle est prête à lutter avec elles la main dans la main pour sauver le pays, quelles que puissent demeurer les inimitiés et les divergences de vues sur les problèmes intérieurs.
    … Le Parti communiste est disposé à prendre l’initiative de l’établissement d’un tel gouvernement de défense nationale. Il est prêt à négocier immédiatement avec tous les partis politiques, avec toutes les organisations (syndicats ouvriers, unions paysannes, associations d’étudiants, chambres de commerce, sociétés d’éducateurs, associations de journalistes, associations d’enseignants, associations d’originaires de la même région, Tche Kong Tang, Association pour la Défense nationale armée, Association antijaponaise, Association pour le Salut de la Nation, etc.), avec tous les savants, tous les hommes politiques et autres personnalités éminentes, avec tous les organes militaires et administratifs locaux, bref, avec tous ceux qui sont désireux de travailler pour la résistance au Japon et le salut de la nation, en vue de former en commun un gouvernement de défense nationale. Formé à l’issue de ces négociations, le gouvernement de défense nationale devra être un organisme dirigeant provisoire chargé d’assurer le salut de la patrie. Ce gouvernement devra œuvrer pour la convocation d’une assemblée qui représentera véritablement tous nos compatriotes (avec la participation de délégués élus sur une base démocratique par les ouvriers, les paysans, les militaires, le personnel des organismes gouvernementaux, les hommes d’affaires et les intellectuels, par tous les partis et toutes les organisations qui désirent résister au Japon et sauver la nation, ainsi que par tous les Chinois d’outre-mer et toutes les nationalités peuplant la Chine), afin d’examiner d’une manière concrète tous les problèmes relatifs à la résistance contre le Japon et au salut de la patrie. Le Parti communiste fera l’impossible pour contribuer à la convocation d’un tel organe représentatif et en exécutera rigoureusement les décisions.
    … Une armée coalisée antijaponaise doit grouper toutes les troupes qui désirent combattre le Japon. Un commandement unique de cette armée sera créé sous la direction du gouvernement de défense nationale. Quant à la question de savoir si ce commandement sera composé de représentants élus par les officiers et les soldats des différentes unités militaires antijaponaises, ou s’il sera constitué autrement, ce sont les représentants de tous les milieux et la volonté du peuple qui en décideront. L’Armée rouge sera la première à faire partie de cette armée coalisée, afin de s’acquitter du devoir sacré de résister au Japon et de sauver la nation. Pour que le gouvernement de défense nationale puisse véritablement assumer la lourde tâche de défendre le pays, et l’armée coalisée antijaponaise celle de résister au Japon, le Parti communiste lance à toute la nation l’appel que voici: Que ceux qui ont de l’argent donnent leur argent; ceux qui ont des fusils, leurs fusils; ceux qui ont des grains, leurs grains; que ceux qui ont des forces donnent leurs forces; que ceux qui ont des talents les apportent en contribution; de manière à mobiliser tous nos compatriotes et à équiper des millions d’hommes avec toutes les armes dont nous disposons, anciennes et modernes.
  4. Il s’agit de la “Résolution sur la situation politique actuelle et les tâches du Parti”, adoptée à la réunion du Bureau politique du Comité central du Parti communiste chinois, le 25 décembre 1935, à Wayaopao, dans le Chensi du Nord. Cette Résolution donna une analyse complète de la situation intérieure et internationale, ainsi que des changements survenus dans les rapports de classes en Chine et définit la politique du Parti. En voici un extrait :
    La situation actuelle montre que les tentatives des impérialistes japonais d’annexer la Chine ont secoué toute la Chine et le monde entier. Dans la vie politique du pays, des changements se sont produits ou sont en train de se produire dans les relations entre les classes et couches sociales, entre les partis politiques et entre les forces armées. Un regroupement des forces dans le front de la révolution nationale et dans le front de la contre-révolution nationale est en train de s’opérer. Aussi la ligne tactique du Parti est-elle de mobiliser, d’unir et d’organiser toutes les forces révolutionnaires à travers le pays et parmi toutes ses nationalités, afin de lutter contre l’ennemi principal de l’heure, l’impérialisme japonais et Tchiang Kaï-chek, le chef des traîtres à la patrie. Pour autant qu’ils soient opposés à l’impérialisme japonais et au traître Tchiang Kaï-chek, tous les hommes, tous les partis, toutes les forces armées et toutes les classes doivent s’unir pour mener une guerre révolutionnaire nationale, une guerre sacrée, pour chasser les impérialistes japonais hors du pays, renverser la domination de leurs valets en Chine, réaliser la libération complète de la nation chinoise et sauvegarder l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Chine. Seul un front uni national contre le Japon, aussi large que possible (englobant les couches supérieures et inférieures de la société), pourra vaincre l’impérialisme japonais et son laquais Tchiang Kaï-chek. Bien entendu, en prenant part à la révolution nationale contre le Japon, les différentes personnes, organisations, classes et couches sociales, comme les différentes armées, obéissent à des motifs différents et partent de positions de classe différentes. Certains ont pour but de se maintenir dans la situation qu’ils se sont faite, d’autres visent à s’emparer de la direction du mouvement, de peur qu’il ne dépasse les limites acceptables pour eux, d’autres enfin se proposent réellement de lutter pour l’émancipation totale de la nation chinoise. C’est précisément parce qu’ils ont des motifs différents et prennent une position différente que certains vacillent et trahissent dès le début du combat, que d’autres peuvent devenir passifs ou quitter le champ de bataille à mi-chemin et que d’autres, enfin, se promettent de lutter jusqu’au bout. Mais notre tâche est non seulement d’unir toutes les forces fondamentales susceptibles de résister aux envahisseurs japonais, elle vise encore à unir tous ceux qui peuvent devenir nos alliés dans notre lutte contre le Japon ; il faut faire en sorte que le peuple du pays entier donne ce qu’il possède, qui sa force, qui son argent, qui son fusil, qui ses connaissances, sans laisser un seul Chinois patriote en dehors du front antijaponais. Telle est la ligne générale formulée par le Parti pour la tactique d’un front uni national aussi large que possible. C’est seulement en suivant cette ligne que nous arriverons à mobiliser toutes les forces du pays pour la lutte contre l’ennemi commun — l’impérialisme japonais et le traître Tchiang Kaï-chek. La classe ouvrière et la paysannerie demeurent les forces motrices fondamentales de la révolution chinoise. Les larges masses de la petite bourgeoisie et les intellectuels révolutionnaires sont leurs alliés les plus sûrs dans la révolution nationale. L’alliance solide des ouvriers, des paysans et de la petite bourgeoisie représente la force principale qui vaincra l’impérialisme japonais, les collaborateurs et les autres traîtres à la nation. Le soutien moral, la neutralité bienveillante ou la participation directe d’une partie de la bourgeoisie nationale et des seigneurs de guerre à la lutte contre le Japon et contre les collaborateurs et les traîtres à la nation contribueront à élargir le front antijaponais, quelle que soit par ailleurs leur désapprobation à l’égard de la révolution agraire et du pouvoir rouge. Car la force totale de la contre-révolution s’en trouvera réduite et celle de la révolution augmentée d’autant. A cette fin, le Parti doit employer des méthodes et des moyens appropriés pour rallier toutes ces forces au front antijaponais. D’autre part, même dans le camp des propriétaires fonciers et de la bourgeoisie compradore, l’unité est loin d’être totale. Les rivalités entre différentes puissances impérialistes en Chine y ont fait apparaître des groupes rivaux de traîtres, avec leurs contradictions et leurs conflits ; le Parti doit aussi prendre diverses mesures afin d’obtenir que certaines forces réactionnaires s’abstiennent pour le moment de s’opposer activement au front antijaponais. La même tactique doit être appliquée à l’égard des puissances impérialistes autres que le Japon. Tout en mobilisant, unissant et organisant les forces du peuple chinois pour le combat contre l’ennemi commun, le Parti doit lutter résolument, sans défaillance, au sein même du front uni antijaponais, contre toute tendance aux hésitations, aux compromis, à la capitulation et à la trahison. Quiconque sape le mouvement antijaponais du peuple chinois est un collaborateur, un traître, qui doit s’attirer un châtiment unanime. Le Parti communiste doit conquérir la direction au sein du front antijaponais en intervenant et en agissant avec autant de justesse que de fermeté contre les impérialistes japonais, les collaborateurs, les traîtres. C’est seulement sous sa direction que le mouvement antijaponais pourra remporter une victoire complète. Quant aux larges masses qui participent à la guerre antijaponaise, il est nécessaire de satisfaire leurs revendications relatives à leurs intérêts fondamentaux (revendications de terres chez les paysans, revendications pour l’amélioration des conditions de vie chez les ouvriers, les soldats, les indigents des villes et les intellectuels). Ce n’est qu’en donnant satisfaction à ces revendications qu’on pourra mobiliser les masses populaires dans une plus large mesure pour la lutte contre le Japon, faire durer le mouvement antijaponais et le conduire à la victoire complète. Et ainsi seulement le Parti pourra conquérir la direction dans la guerre antijaponaise.
    Voir “La Tactique de la lutte contre l’impérialisme japonais”, pp. 169-197 du présent tome.
  5. Le 5 mai 1936, le commandement de l’Armée rouge adressa au gouvernement de Nankin un télégramme ouvert demandant l’arrêt de la guerre civile et l’ouverture de négociations de paix avec le Parti communiste en vue d’une résistance commune au Japon. Voici le texte de ce télégramme :

    Au Conseil militaire du Gouvernement national de Nankin, à toutes les forces navales, terrestres et aériennes, à tous les partis et groupements politiques, à toutes les organisations, à tous les journaux et à tous nos compatriotes qui ne veulent pas être asservis par une nation étrangère : Après avoir opéré, dans sa marche vers l’Est, la traversée du fleuve Jaune organisée par la Commission militaire révolutionnaire de l’Armée rouge chinoise, l’Avant-garde antijaponaise de l’Armée rouge populaire de Chine a remporté partout des victoires et gagné l’appui de toute la nation. Cependant, alors qu’elle venait d’occuper la ligne ferroviaire Tatong-Poutcheou et se préparait activement à pousser vers l’Est pour déboucher dans le Hopei et entreprendre des opérations directes contre les impérialistes japonais, Tchiang Kaï-chek a envoyé dans le Chansi plus de dix divisions, afin de l’empêcher, de concert avec Yen Si-chan, d’avancer sur les Japonais. En outre, il a ordonné aux troupes de Tchang Hsiué-liang et de Yang Hou-tcheng, ainsi qu’aux unités du Chensi du Nord, de marcher sur les régions rouges du Chensi-Kansou en vue de harceler nos arrières antijaponais. Pour être en mesure d’engager des actions militaires directes contre les Japonais, l’Avant-garde antijaponaise de l’Armée rouge populaire de Chine aurait dû concentrer toutes ses forces et anéantir les troupes de Tchiang Kaï-chek qui lui barraient la route du front. Mais la Commission militaire révolutionnaire de l’Armée rouge, après mûre réflexion, est arrivée à la conclusion suivante : Au moment où la patrie est en danger, une bataille décisive entre les deux parties, quelle qu’en soit l’issue, ne ferait qu’affaiblir la capacité défensive de la Chine, à la grande satisfaction des impérialistes japonais. Du reste, il se trouve dans les armées de Tchiang Kaï-chek et de Yen Si-chan nombre de militaires patriotes qui désirent l’arrêt de la guerre civile et une action commune dans la résistance au Japon ; et c’est contre leur conscience qu’ils exécutent à présent l’ordre qu’ils ont reçu de Tchiang Kaï-chek et de Yen Si-chan de barrer la route à l’Armée rouge allant combattre les Japonais. Aussi, pour préserver les forces de défense nationale et hâter le développement de la guerre de résistance, pour appliquer résolument les déclarations répétées que nous avons faites à la nation sur la nécessité de mettre fin à la guerre civile et de nous unir dans la lutte contre le Japon, pour contribuer, enfin, à l’éveil définitif de Tchiang Kaï-chek et des militaires patriotes de son armée, la Commission militaire révolutionnaire de l’Armée rouge a fait revenir l’Avant-garde antijaponaise sur la rive occidentale du fleuve Jaune, malgré les nombreuses victoires remportées dans le Chansi. Cet acte prouvera au gouvernement de Nankin, à toutes les forces navales, terrestres et aériennes du pays et à toute la nation la sincérité de nos intentions, et, dans le but de mettre fin à la guerre civile et d’organiser la résistance au Japon, nous sommes prêts à conclure, dans le délai d’un mois, un armistice et à négocier la paix avec toutes les troupes qui se battent contre l’Armée rouge antijaponaise. La Commission militaire révolutionnaire de l’Armée rouge tient à vous déclarer solennellement, Messieurs les Membres du gouvernement de Nankin, qu’en ce moment critique où notre pays est menacé d’asservissement et notre peuple d’extermination, vous devriez, comme la raison vous le commande, vous repentir et, pénétrés de l’idée que “les frères qui se querellent chez eux s’unissent pour repousser les attaques venant de l’extérieur”, cesser la guerre civile dans tout le pays et au premier chef dans le Chensi, le Kansou et le Chansi; après quoi, les deux parties désigneront leurs représentants afin d’étudier en commun les mesures concrètes pour la résistance au Japon et pour le salut de la nation. Ce sera un bonheur pour la nation et le pays, et vous aurez agi pour votre bien aussi. Mais si vous refusez obstinément d’écouter la voix de la raison et préférez être des collaborateurs ou des traîtres à la nation, votre régime finira par s’écrouler et la nation entière vous repoussera et vous renversera. “Celui que mille hommes montrent du doigt meurt sans même être malade”, dit un vieux proverbe. Et un autre : “Le boucher qui pose son couteau devient bouddha sur-le-champ”. Telles sont, Messieurs, les paroles que nous vous donnons à méditer. La Commission militaire révolutionnaire de l’Armée rouge en appelle également à toutes les organisations, à tous les partis, à tous nos compatriotes, à tous ceux qui refusent d’être asservis, afin qu’ils appuient nos propositions concernant le cessez-le-feu, les négociations de paix et l’unité dans la lutte contre le Japon, afin qu’ils organisent des comités d’action pour arrêter la guerre civile, envoient des représentants au front pour obtenir le cessez-le-feu de part et d’autre, et contribuent par leurs actes à l’exécution totale, sous leur contrôle, de toutes ces propositions.

  6. Voir “A propos d’une déclaration de Tchiang Kaï-chek”, note 7, pp. 291-294 du présent tome.
  7. Le mot d’ordre de république populaire figura d’abord dans la “Résolution sur la situation politique actuelle et les tâches du Parti”, adoptée en décembre 1935 à la réunion du Bureau politique du Comité central du Parti communiste chinois, et dans le rapport du camarade Mao Zedong : “La Tactique de la lutte contre l’impérialisme japonais”. Par la suite, les circonstances exigèrent que la politique du Parti fût de forcer Tchiang Kaï-chek à résister au Japon et, comme ce mot d’ordre était jugé inacceptable par la clique de Tchiang Kaï-chek, il fut remplacé, dans la lettre que le Parti adressa au Kuomintang en août 1936, par celui de république démocratique. Peu après, dans sa “Résolution sur la situation nouvelle du mouvement pour la résistance au Japon et le salut de la patrie et sur la république démocratique”, adoptée en septembre de la même année, le Comité central du Parti donna des éclaircissements sur le mot d’ordre de république démocratique. Ces deux mots d’ordre, différents par la forme, sont pourtant identiques quant au fond. Voici deux extraits de la Résolution adoptée en septembre 1936 par le Comité central du Parti qui concernent la république démocratique :

    Le Comité central estime que, dans la situation actuelle, il est nécessaire d’avancer le mot d’ordre de création d’une république démocratique, parce que c’est le meilleur moyen d’unir toutes les forces antijaponaises pour assurer l’intégrité territoriale de la Chine et préserver notre pays de l’asservissement et notre peuple de l’extermination et aussi parce que, jailli des revendications des larges masses pour la démocratie, c’est le mot d’ordre qui convient le mieux à la formation d’un front uni. Par république démocratique, nous entendons une démocratie géographiquement plus étendue que le régime de la dictature démocratique des ouvriers et des paysans établis sur une partie du territoire de la Chine et un régime politique beaucoup plus progressiste que la dictature d’un seul parti instaurée par le Kuomintang dans les principales régions de la Chine.

    Par conséquent, la république démocratique offrira une meilleure garantie pour une mobilisation générale de toutes les énergies et pour une victoire complète dans la résistance au Japon. En même temps, elle permettra aux masses les plus larges de Chine de participer à la vie politique du pays, d’élever le niveau de leur conscience politique et d’accroître leurs forces organisées ; de plus, elle offrira au prolétariat chinois et à son guide, le Parti communiste, un champ d’activité plus vaste pour faire triompher le socialisme dans l’avenir. C’est pourquoi le Parti communiste chinois déclare qu’il appuie activement le mouvement pour une république démocratique. Il déclare également que lorsque la république démocratique sera établie dans toute la Chine, et qu’un parlement, élu au suffrage universel, sera convoqué, les régions rouges deviendront aussitôt partie intégrante de la république, la population de ces régions élira ses représentants au parlement et le même système démocratique y sera appliqué. … Le Comité central souligne que le développement du mouvement du peuple chinois pour la résistance au Japon et le salut de la patrie, l’élargissement du front uni national antijaponais de tous les partis et groupements politiques, de tous les milieux sociaux et de toutes les forces armées, le renforcement du rôle du Parti communiste chinois dans la direction politique du front uni national, la consolidation maximum du pouvoir rouge et de l’Armée rouge, la lutte résolue contre toutes les paroles et tous les actes préjudiciables aux droits souverains comme à l’honneur national de la Chine ou susceptibles d’affaiblir le front uni national sont les seuls moyens pour amener le gouvernement du Kuomintang à Nankin à lutter contre le Japon et pour créer les conditions préalables à l’établissement d’une république démocratique. La république démocratique ne peut devenir une réalité sans des luttes âpres et soutenues, sans la mobilisation du peuple tout entier et sans l’essor de la révolution. Au cours du combat pour la république démocratique, le Parti communiste chinois doit faire en sorte que cette république réalise, pour commencer, le Programme en dix points pour la résistance au Japon et pour le salut de la patrie présenté par lui, et qu’elle poursuive, jusqu’à leur accomplissement, les tâches fondamentales de la révolution démocratique bourgeoise en Chine.

  8. Voici le texte du télégramme envoyé le 10 février 1937 :
    A la troisième session plénière du Comité exécutif central du Kuomintang :
    Messieurs,
    Le pays tout entier se réjouit du règlement pacifique de l’Incident de Sian. Désormais, il nous sera possible de mettre en application la politique de paix intérieure, d’unité et de solidarité contre l’agression étrangère ; c’est là un bonheur pour le pays et la nation. Au moment où les envahisseurs japonais sévissent avec rage, où l’existence même de la nation chinoise ne tient plus qu’à un fil, notre Parti souhaite que la troisième session plénière du Comité exécutif central de votre Parti veuille bien, en s’inspirant de la politique précédemment définie, adopter les points suivants comme politique d’Etat :
    1) cesser toute guerre civile et rassembler toutes les énergies du pays dans un même effort pour s’opposer à l’ennemi extérieur ;
    2) garantir les libertés de parole, de réunion et d’association et libérer tous les détenus politiques ;
    3) convoquer une conférence des représentants de tous les partis et groupements politiques, de tous les milieux sociaux et de toutes les forces armées et rallier ainsi tous les talents de la nation dans un effort commun pour sauver le pays ;
    4) achever au plus vite tous les préparatifs de la résistance au Japon ;
    5) améliorer les conditions de vie du peuple. Si la troisième session plénière du Comité exécutif central de votre Parti peut se décider, avec résolution et fermeté, pour cette politique d’Etat, notre Parti, en témoignage de sa bonne foi dans la solidarité contre l’agression étrangère, donnera les garanties suivantes :
    1) la politique d’insurrection armée pour renverser le Gouvernement national cessera dans tout le pays ;
    2) le nom du Gouvernement démocratique des Ouvriers et des Paysans sera remplacé par celui de Gouvernement de la Région spéciale de la République chinoise et l’Armée rouge renoncera à sa dénomination pour devenir une partie de l’Armée révolutionnaire nationale, ce Gouvernement et cette Armée étant placés sous l’autorité respective du Gouvernement central de Nankin et de son Conseil militaire ;
    3) le régime démocratique fondé sur le suffrage universel sera intégralement appliqué sur tout le territoire administré par le Gouvernement de la Région spéciale ;
    4) il sera mis fin à la politique de confiscation des terres des propriétaires fonciers et le programme commun du front uni national contre le Japon sera appliqué résolument.
  9. En novembre et décembre 1936, plus de 45.000 ouvriers de 26 usines textiles chinoises et japonaises de Changhaï déclenchèrent un mouvement de grève de grande envergure. En signe de solidarité avec les ouvriers de Changhaï, ceux des entreprises textiles japonaises de Tsingtao organisèrent une grève générale en décembre. Les ouvriers de Changhaï remportèrent la victoire : leurs salaires furent augmentés de 5 pour cent à partir de novembre, les employeurs s’engagèrent à ne pas procéder à des licenciements arbitraires ni à infliger des vexations ou des châtiments corporels aux ouvriers. Mais la grève de Tsingtao fut écrasée par l’infanterie de marine japonaise.
  10. L’occupation de Chanhaikouan par l’envahisseur japonais, sa pénétration en Chine du Nord en 1933 et, en particulier, la conclusion de l’“Accord Ho-Umezu” en 1935, qui étaient autant de coups directs portés par l’impérialisme japonais aux intérêts de l’impérialisme anglo-américain en Chine du Nord et en Chine centrale, incitèrent la Grande-Bretagne et les Etats-Unis à modifier leur attitude à l’égard du Japon et à influencer dans ce sens la politique du gouvernement de Tchiang Kaï-chek. Quand se produisit l’Incident de Sian, en 1936, la Grande-Bretagne manifesta son désir de voir la Chine repousser les exigences japonaises qui portaient préjudice aux intérêts britanniques en Chine et elle laissa même entendre que le gouvernement de Tchiang Kaï-chek, tant qu’il serait en état de gouverner le peuple chinois, aurait tout intérêt à conclure “une certaine forme d’alliance avec le Parti communiste”, afin de porter un coup à la politique d’agression du Japon.
  11. En juin 1936, les seigneurs de guerre du Kouangsi, Li Tsong-jen et Pai Tchong-hsi, ainsi que le seigneur de guerre du Kouangtong, Tchen Tsi-tang, prenant pour prétexte “la résistance au Japon et le salut de la patrie”, s’allièrent contre Tchiang Kaï-chek. En août de la même année, leur opposition fut brisée par Tchiang Kaï-chek au moyen de la corruption et de la division.
  12. En août 1936, les troupes japonaises et celles des fantoches chinois commencèrent l’invasion de la province du Soueiyuan. En novembre, les troupes chinoises du Soueiyuan ripostèrent et le peuple déclencha dans tout le pays un mouvement pour soutenir leur résistance.
  13. Après la conclusion de l’“Accord Ho-Umezu” en 1935, le gouvernement du Kuomintang à Nankin adopta une attitude relativement ferme sous la pression du mouvement antijaponais grandissant au sein du peuple chinois et sous l’influence d’un raidissement de la politique des impérialistes anglo-américains à l’égard du Japon. Dans les négociations qu’il eut avec le Japon de septembre à décembre 1936, le gouvernement du Kuomintang usa d’une tactique dilatoire, et l’on se sépara sans qu’aucun résultat ait été obtenu.
  14. Il s’agit de la réunion tenue le 15 février 1937 après le règlement pacifique de l’Incident de Sian.
  15. Ah Q est le héros du célèbre roman du grand écrivain chinois Lou Sin: La Véritable histoire de Ah Q. Dans le personnage de Ah Q, l’auteur a représenté un type d’homme qui se console, dans toutes les circonstances de l’existence, de ses malheurs et échecs en y voyant chaque fois une “victoire morale”.
  16. À l’étape de la révolution démocratique bourgeoise, les communistes se montrèrent d’accord avec les points essentiels du programme de Sun Yat-sen et coopérèrent avec lui, mais cela ne signifie nullement qu’ils étaient d’accord avec la conception bourgeoise et petite-bourgeoise du monde ou le système théorique dont il était le porte-parole. Avant-garde du prolétariat chinois, les communistes diffèrent radicalement de Sun Yat-sen quant à leur conception du monde ou à leur système théorique et quant à leur conception théorique sur la question nationale ou d’autres questions.
  17. Après sa réorganisation par Sun Yat-sen en 1924, le Kuomintang se transforma en une alliance révolutionnaire de toutes les classes et les communistes chinois y participèrent à titre individuel. Après avoir trahi la révolution en 1927, il déclencha dans toute la Chine ce qu’il appelait une “épuration du Parti”, massacrant les communistes ainsi que ses nombreux éléments de gauche qui soutenaient sincèrement les trois thèses politiques fondamentales de Sun Yat-sen. Dès lors, le Kuomintang devint un parti contre-révolutionnaire des gros propriétaires fonciers et de la grande bourgeoisie.
  18. Il s’agit de la situation qui s’était créée dans la première moitié de 1927 par la faute de la direction opportuniste du Comité central du Parti.

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