AMADA nous offre d’emblée le tableau sinistre du subjectivisme typique de la ligne des comploteurs populistes : la plateforme d’apparence marxiste-léniniste adoptée en 1971 pour attirer les militants de Flandres, est transformée de plus en plus brutalement par des revirements gauchistes, puis droitiers.

Ces volte-face successives ont pour but d’ébranler la conscience des militants. Elles ont pour seule cohérence la conception que « on peut tout prouver à partir du marxisme-léninisme » comme déclarait Ludo Martens le 12 février 1976 devant la Jeunesse communiste de l’UC(ML)B ; déclaration totalement sans objet venant d’une organisation incapable d’appliquer les conceptions matérialistes-dialectiques.

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Les militants en viennent à penser que les principes marxistes-léninistes et la ligne politique peuvent varier à l’infini, selon l’opportunité du moment ; ils s’habituent à défendre des formules toutes faites, qu’ils ne peuvent relier ni aux principes, ni à la pratique.

De revirement gauchiste en revirement droitier, on en arrive au coup de grâce final, qui liquide ouvertement la façade marxiste-léniniste et entraîne la destruction de l’organisation.

D’autre part, dès le début, la démarcation avec le révisionnisme, le trotskysme et le réformisme est très faible. L’histoire du SVB permet déjà de montrer la continuité dans le chauvinisme et l’attachement à la Volksunie. La ligne reprise de Jacques Grippa en 1968 est aménagée pour répondre aux aspirations principales du mouvement : AMADA prétend lutter pour la révolution socialiste.

Dès l’été 1973, dans la première critique de la ligne de l’UC(ML)B, « Politische lijn », AMADA étale sa complaisance avec les courants anti-marxistes : l’économisme le plus plat étouffe le programme révolutionnaire ; des positions ouvertement trotskystes apparaissent, la social-démocratie est qualifiée d’« honnête » etc.

L’année suivante, la campagne électorale de mars 1974, permet à nouveau de mettre à l’épreuve la façade marxiste-léniniste : le programme électoral, diffusé à des milliers d’exemplaires, propage la conciliation avec le révisionnisme et l’anarcho-syndicalisme. (voir le document de l’U(CM)LB « Critique du programme électoral d’AMADA)

Les oscillations de la ligne se marquent principalement sur le but final et l’alliance de classe. La tactique n’a aucune consistance.

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Fin 70-71 : de l’économisme des premiers numéros d’AMADA, on passe au dogmatisme de la campagne Indochine, au printemps 71 (liquidation des « comités de lutte et du travail syndical, propagande abstraite sur les quatre contradictions fondamentales dans le monde, etc.)

Sur la construction du Parti aussi, le dogmatisme occupe le devant de la scène, en l’absence de toute démarcation avec les faux marxistes-léninistes de Clarté et L’Exploité, et même avec les trotskystes (proposition de réunion des délégués de Clarté, Exploité − grippistes ; Le Travailleur − trotskyste).

Juillet 1972 : dans le texte de lutte idéologique interne : « Rapport sur la critique du révisionnisme », l’économisme et l’anarcho-syndicalisme sont correctement critiqué (notamment à partir des journaux d’usines). Une ligne proche de celle de l’UC(ML)B est avancée au détour de ce texte, sans être ni développée ni soutenue par ailleurs. (« Le problème central du parti marxiste-léniniste » p. 19).

Été 1973 : à côté de la propagande politique dans la grève des dockers, et d’articles d’AMADA acceptables, le texte « Critique de la ligne politique » apporte une profession de foi économiste qui n’a plus rien il voir avec le marxisme-léninisme :

« Lénine nous apprend que la lutte pour le pouvoir n’est rien d’autre que la lutte révolutionnaire pour les revendications économiques et démocratiques » (p. 10)

Dans son document intitulé « AMADA a inventé un complot », l’UC(ML)B riposta fermement à cette première tentative de liquider ouvertement le programme communiste mais resta déconcertée par cette attaque imprévisible, en contradiction avec l’ensemble du travail d’AMADA.

Ce même texte défendait pour la première fois une ligne scissionniste déclarée, au nom de la révision des principes léninistes d’unification. (première version des positions développées en 74 dans la brochure verte « Critiquons à fond les théories menchéviques et trotskistes de l’UC(ML)B »). Il attaquait alors violemment la direction de l’UC(ML)B, traitée d’intellectuels trotskystes.

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Été 1974 : un an plus tard, rétablissement des positions communistes sur la révolution socialiste, dans la critique de Clarté. Les positions de Clarté critiquées sont exactement celles défendues par AMADA dans le texte d’été ’73 sur la lutte économique et politique, réforme et révolution. De même la question de l’unité et de la démarcation est traitée correctement dans l’introduction.

L’alliance de classes est fondée sur la ligne trotskyste : gauchisme exacerbé envers la bourgeoisie nationale des pays anti-impérialistes, unité sans principes, révisionniste avec la paysannerie, les employés, les commençants en Belgique. La future alliance avec la bourgeoisie nationale est bien sûr préparée de cette façon.

En septembre ’73, AMADA a trouvé l’occasion d’exprimer ce gauchisme : lors du coup d’Etat fasciste au Chili, il se retourne contre le seul Allende, le « responsable » du sang versé et de la dictature rétablie ; il « oublie » la responsabilité directe de l’impérialisme US, de la bourgeoisie bureaucratique du Chili. Cette arrogance scandaleuse va de pair avec la démission devant l’hégémonie du prolétariat en Belgique.

Pendant les luttes paysannes de l’été 1974, AMADA qualifia ces actions de « révolutionnaires », apporta un soutien total aux revendications favorables aux paysans riches et refusa de reconnaître les antagonismes de classe au sein de la paysannerie, à qui il taisait honteusement le programme communiste : l’abolition de la propriété privée.

75-76 : AMADA s’est décidé à prendre position sur le danger de guerre en Europe. D’abord au début 1975, des positions gauchistes, puis en automne de la même année, la déclaration du Bureau national appelant à soutenir les « monopoles belges indépendants », enfin, au début de 1976, l’abandon ouvert de la révolution socialiste pour une étape de « libération nationale », le soutien à Paul Vanden Boeynants − alors Ministre de la Défense nationale au sein du gouvernement de Leo Tindemans −, le soutien à l’OTAN, à l’économie capitaliste nationale.

Ludo Martens en revient ainsi à l’essentiel de sa ligne de trahison de 1968, où l’alliance avec la bourgeoisie belge était réclamée contre l’impérialisme américain.


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