Vos lettres du 17 mai 1943 et du 20 mai 1943, portant les signatures des camarades Tito et Kardelj ont été reçues.

Le CC du PC (b) estime que les dirigeants du Parti communiste yougoslave font avec ces lettres un nouveau pas sur la voie qui aggrave les erreurs de principe les plus grossières dont le CC du PC (b) a souligné le danger et la nuisance dans sa lettre du 4 mai 1943.

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1. Les camarades Tito et Kardelj écrivent qu’ils se sentent « si inégaux en droits, qu’il nous est impossible d’accepter que cette affaire soit débattue devant le Kominform », et ils se permettent de nouveau d’insinuer que c’est le CC du PC (b) qui les a mis dans cette position.

Le CC du PC (b) estime qu’il n’y a pas la moindre parcelle de vérité dans cette affirmation. Il n’y a aucune inégalité en droits du parti communiste yougoslave et il ne peut y en avoir au sein du Bureau d’Information des neuf partis communistes.

Chacun sait que lors de la formation du Bureau d’Information des neuf partis communistes tous les partis communistes ont décidé sans conteste que chaque parti devait soumettre ses rapports au Bureau d’Information, de même que chaque parti avait le droit de critiquer les autres partis.

C’est justement de ce point de vue qu’est partie la conférence des neuf partis lorsqu’à ses réunions de septembre 1947, elle entendit les rapports des CC de tous les partis communistes sans exception.

Lorsqu’elle soumit l’activité des partis communistes italiens et français a la sévère critique bolchevique, la conférence des neuf partis se basait sur l’égalité en droits permettant a chaque parti de critiquer les autres partis.

On sait que les camarades français et italiens, non seulement n’ont pas refusé aux autres partis le droit de critiquer leurs erreurs, mais ont eu, au contraire, une attitude bolchevique devant cette critique et en ont tiré les conclusions nécessaires.

On sait encore que les camarades yougoslaves, de même que tous les autres, ont utilisé a la conférence la possibilité de critiquer les erreurs des camarades italiens et français et n’ont pas jugé, de même que tous les autres, qu’en critiquant les italiens et les français, les autres partis communistes détruisaient l’égalité en droits des partis communistes italien et français.

Mais pourquoi les camarades yougoslaves font-ils maintenant ce retour complet, exigeant la liquidation de l’ordre établi au Bureau d’Information ?

Justement parce qu’ils pensent que le parti yougoslave et sa direction doivent avoir la faveur d’une position privilégiée, que les statuts du Kominform ne sont pas pour eux, qu’ayant le droit de critiquer les autres partis, ils ne doivent pas eux-mêmes subir la critique de ceux-ci.

Mais une telle morale, si l’on peut ainsi s’exprimer, n’a rien de commun avec l’égalité de droits.

Ce n’est rien d’autre qu’une exigence de la part des camarades yougoslaves de privilèges pour le PCY, comme n’en a pas et ne peut en avoir aucun parti.

Nous avons soutenu et nous soutenons un point de vue sans lequel l’existence et l’activité du Bureau d’Information deviendraient impossibles : chaque parti communiste est tenu de soumettre son rapport au Bureau d’Information, chaque parti communiste a le droit de critiquer chaque autre parti communiste.

Le refus de la part des yougoslaves de faire un rapport sur leur activité devant le Bureau d’Information, et d’entendre la critique des autres partis communistes est une atteinte a l’égalité en droits des partis communistes.

2. Dans leur lettre du 17 mai, les camarades Tito et Kardelj répètent, comme dans leur dernière lettre, que la critique des erreurs de la direction du parti communiste yougoslave par le CC du PC (b) est soi-disant fondée sur des informations inexactes.

Mais les camarades yougoslaves ne citent aucune preuve à l’appui de cette affirmation.

De sorte que la déclaration reste phrase creuse, et la critique du CC du PC (b) reste une fois de plus sans réponse, bien que les camarades Tito et Kardelj écrivent dans leur lettre qu’ils « ne cherchent par a fuir la critique sur les questions de principe ».

Peut-être que les dirigeants yougoslaves n’ont tout simplement rien a dire pour se justifier ?

C’est l’un ou l’autre : ou bien le Bureau politique du CC du PCY, conscient de la gravité des erreurs qu’il a commises, mais désirant les cacher au Parti communiste de Yougoslavie et induire celui-ci en erreur, établit une version sur l’inexistence de ces erreurs et accuse, comme coupables, des personnes innocentes qui auraient soi-disant mal informé le CC du PC (b) ou bien il ne comprend réellement pas que par ses erreurs il s’éloigne du marxisme-léninisme.

Mais il faut alors reconnaître que l’ignorance des questions du marxisme est trop grande au Bureau politique du CC du PCY.

3. Évitant de répondre aux questions directes du CC du PC (b) et aggravant leurs fautes par leur entêtement, ne désirant ni les reconnaître ni les corriger, les camarades Tito et Kardelj affirment en paroles qu’ils prouveront a l’oeuvre qu’ils restent fidèles a l’Union soviétique, fidèles aux leçons de Marx, Engels, Lénine et Staline.

Après tout ce qui s’est passé, nous n’avons aucune raison de croire a ces affirmations.

Les camarades Tito et Kardelj ont déjà fait au CC du PC (b) bien des promesses, sans les tenir.

Leurs lettres, et en particulier la dernière, nous en ont encore plus convaincus.

Le Bureau politique du CC du PCY, et en particulier le camarade Tito doivent savoir que, par leur politique antisoviètique et antirusse qui a été appliquée ces derniers temps dans la pratique quotidienne, ils ont tout fait pour saper la confiance du parti communiste et du gouvernement de l’URSS.

4. Les camarades Tito et Kardelj se plaignent d’être dans une situation difficile et disent que les conséquences de tout cela sont très lourdes pour la Yougoslavie.

Cela est, bien entendu, exact, mais les camarades Tito et Kardelj en sont exclusivement coupables et, de concert avec eux, les autres membres du Bureau politique du CC du parti communiste yougoslave qui ont placé leur prestige et leur ambition au-dessus des intérêts du peuple yougoslave et qui, au lieu de reconnaître et de corriger leurs erreurs, dans l’intérêt de leur peuple, nient opiniâtrement ces erreurs, dangereuses pour le peuple yougoslave.

5. Les camarades Tito et Kardelj déclarent que le CC du PCY refuse de se présenter à la session du Bureau d’Information pour y discuter la question de la situation dans le parti communiste yougoslave.

Si c’est la leur décision définitive, cela veut dire alors qu’ils n’ont rien a dire au Bureau d’Information pour se justifier, que par cela même ils reconnaissent tacitement qu’ils sont coupables et qu’ils craignent de se montrer en face des partis communistes frères.

De plus, leur refus de venir devant le Bureau d’Information signifie que le CC du PCY est entré dans la voie d’une scission avec le front socialiste unique des démocraties populaires, avec l’Union soviétique et que maintenant il prépare son parti et le peuple yougoslave a trahir le front unique des démocraties populaires et l’URSS.

Étant donné que le Bureau d’Information est la base de parti du front unique, une telle politique mène à la trahison de la cause de la solidarité internationale des travailleurs et au passage sur les positions du nationalisme, hostile à la cause de la classe ouvrière.

Que les représentants du CC du PCY se présentent ou non a la session du Bureau d’Information, le CC du PC (b) insiste pour que la question de la situation dans le parti communiste yougoslave soit débattue a la prochaine session du Bureau d’Information.

Les camarades tchécoslovaques et hongrois demandant que la convocation du Bureau d’Information soit remise a la seconde moitié de juin, le CC du PC (b) déclare être d’accord avec cette proposition.
22 mai 1948


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