De par la construction du socialisme, les activités criminelles s’asséchaient d’elles-mêmes dans la société ; il y avait moins de crimes en 1935 dans toute l’URSS que dans la seule ville américaine de Chicago.

Cependant, les réseaux criminels s’entremêlaient avec la contre-révolution. Cela correspond tout à fait à l’affirmation soviétique des deux sociétés : à côté de la société socialiste, il y avait les éléments hostiles en général.

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Ainsi, sur la ligne ferroviaire de Tomsk, rien que pour les dix premiers mois de 1935, il y eut 5 972 « incidents », avec des soucis techniques significatifs pour 166 locomotives, 38 wagons de passagers, 1 256 wagons de fret. Cela provoqua 59 décès, 119 blessés et 62 kilomètres de rails avaient été endommagés

C’était une guerre anti-soviétique toujours plus insidieuse, épaulée par les pays capitalistes de manière forcenée.

Or, la supervision de la situation de la société par l’appareil de sécurité d’État était délicate en URSS socialiste initialement, de par le manque de moyens.

Ainsi, la police – en fait la milice ouvrière-paysanne – était financée par les budgets des soviets locaux ou de districts, ce qui impliquait des ressources plus que minimes.

En 1930, il n’y avait en République socialiste soviétique de Russie qu’un nombre très restreint de policiers. 53 000 étaient dédiés à la protection des entreprises, 33 563 étaient en tant que tels chargés de l’ordre public, dont 12 887 dans les campagnes, alors que 4441 étaient des enquêteurs. C’était là quatre fois moins de policiers qu’en 1913 dans la Russie tsariste.

Même une ville comme Moscou avait seulement un policier pour 750-1000 habitants, un nombre extrêmement faible (3,5 fois moins que la France en 2019).

A Novossibirsk, qui passa de 146 000 à 180 000 habitants entre 1930 et 1931, il n’y avait que 276 policiers en 1930, 197 en 1931. Dans la ville la plus importante des campagnes à l’ouest de Novossibirsk, Bisk, il y avait 69 policiers pour 53 000 habitants.

A Novokouznetsk, à 360 kilomètres de là, le nombre de policiers passa entre 1930 et 1931 de 24 à 38, la ville de 28 000 à 170 000 habitants.

A cela s’ajoute que seulement le quart des policiers était physiquement au point, les très faibles salaires n’attirant pas du tout. Il faudra attendre le début des années 1930 pour voir une véritable modification en profondeur, le budget de la police passant d’ailleurs à un organisme national en 1932.

Le nombre de policiers passa à 98 000 à la fin de 1932, 124 000 à la fin de 1934, 138 000 en 1937, 182 000 en 1938 et 213 469 en 1940. La police s’occupait désormais également des trains et disposait d’unités spécialement consacrées aux crimes économiques.

L’ossature de l’appareil de sécurité d’État reposait ainsi bien davantage directement sur les services de répression de la contre-révolution que sur la police, qui de toute façon ne pouvait se confronter à des réseaux organisés utilisant la clandestinité.

Eu égard à l’application du droit soviétique, l’appareil de sécurité d’État – dont dépendait la police, par ailleurs – disposait donc de modes d’organisation très particuliers selon les besoins ; ses membres possédaient une réalité active extrêmement différente.

Les résidents continuaient leurs propres activités en tant que responsables dans une entreprise ou à l’armée, tout en servant d’interface. Les agents infiltraient les opposants. Les agents spéciaux sont des spécialistes soit de l’économie, de l’industrie, en sciences, etc. devant vérifier le travail des entreprises, éviter les sabotages, etc., soit des spécialistes quant au crime spécialisé (des pickpockets aux cambrioleurs, etc.).

L’appareil de sécurité d’État tenait un registre concernant la qualification des opposants, dont voici les principaux exemples.

AS – éléments anti-soviétiques

B – blancs, pour les participants à la guerre civile du côté blanc

PR – antagonistes, désignant les membres des partis politiques avant 1917

KR – contre-révolutionnaires

TS – les éléments liés au clergé

S – les religieux prônant la dissidence

P – les insurrectionnels

N – les nationalistes

sI – en liaison avec des étrangers (que ce soit le personnel d’ambassade ou des correspondants)

ShP – les espions

T – les terroristes

D – les diversionnistes

Prav – les éléments droitiers dans le Parti (boukharinistes)

Tr – les trotskystes

F – les fascistes

H – les éléments pro-hitlériens

B – les soutiens de Bandera en Ukraine

Vl – les soutiens de Vlassov

ns – les serviles vis-à-vis de la bourgeoisie

Cette liste amène des individus à être « qualifiés ». Cela ne préjuge pas d’un dossier qui se fait en plus, par d’autres. Il y a deux niveaux : la qualification en général d’une personne, un dossier directement consacré à lui, le groupe auquel il participe, les personnes proches d’une manière ou d’une autre.

Cela permettait une véritable cartographie du pays. Un passeport interne et un système d’enregistrement local fut organisé de manière générale par ailleurs au début de 1933. Il faut néanmoins bien voir qu’une telle cartographie se situe dans un contexte de lutte de classes acharnée.

Ainsi, 1 802 392 koulaks et leurs familles avaient été bannis dans des endroits précis en 1930-1931.

En 1932 seulement 1 317 022 d’entre eux avaient obéi à cette consigne, les autres étant partis sans qu’on sache trop où, exigeant des campagnes de répression pour aller les récupérer.

Ces campagnes de répression ciblée firent littéralement halluciner la bourgeoisie mondiale de par sa capacité à avoir un impact généralisé. Ainsi, en mai 1935, le décret sur les éléments socialement hostiles aboutit à une série d’opérations et 266 000 personnes furent arrêtés et condamnés en ce sens.

Elles appartenaient à plusieurs catégories : les criminels déjà condamnés, libérés et maintenant leurs activités, les sans activités connues liées aux criminels, les mendiants professionnels, les personnes arrêtées à plusieurs reprises au même endroit sans permis de résidence, les personnes retournées aux endroits dont elles avaient été exilées, les enfants de plus de douze ans arrêtés pour des activités criminelles.


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