planification_sovietique-electrification-1.jpgLe premier plan réalisé après la révolution d’Octobre 1917 fut adopté par le 8e congrès des soviets, en décembre 1920 ; entre-temps, la guerre civile et l’intervention étrangère avaient empêché une réorganisation générale d’un pays qui, rappelons le, était extrêmement arriéré dans son développement.

Pour toutes ces raisons – chaos, guerre civile, arriération culturelle – la direction centrale des statistiques mise en place par le nouveau régime dirigé par le Parti Communiste ne possédait pas de vue d’ensemble avant la fin de l’année 1919.

Ce premier plan ne concernait toutefois qu’une quinzaine de branches de l’industrie, bien qu’un aspect important tenait à la construction de trente centrales électriques.

Il y a de multiples raisons à cela : tout d’abord, l’ensemble de l’économie n’était pas encore socialisée, il y avait le recul temporaire menée avec la période dite de la « NEP ».

Ensuite, on ne peut pas socialiser une industrie qui n’existe pas et pour qu’elle existe, il faut des forces productives déjà établies.

La production, pour exister, a besoin d’une production produisant cette production : il faut des machines pour être en mesure de fabriquer des biens de consommation.

Une phrase de Lénine est connue à ce sujet, au sujet du communisme comme résultat de l’équation pouvoir soviétique + électrification ; dans Notre situation extérieure et intérieure et les tâches du parti, Lénine expliquait en novembre 1920 :

planification_sovietique-electrification-2.jpg« Tout l’ordre du jour est construit de telle sorte que toute l’attention et la sollicitude de tous les délégués rassemblés, de toute la masse des militants soviétistes et communistes de toute la république, soient concentrées sur la question économique, sur le rétablissement des transports et de l’industrie, sur ce qui est appelé prudemment « aide à l’économie paysanne » mais cela veut dire beaucoup plus, puisqu’il s’agit de tout un système, toute une série réfléchie de mesures tendant à élever l’économie paysanne, destinée à subsister encore assez longtemps, à la hauteur voulue.

En lien avec ceci, le congrès des Soviets entendra le rapport concernant l’électrification de la Russie, afin que le plan économique unique de rétablissement de notre économie nationale dont nous avons parlé soit solidement assis du côté technique.

Sans instaurer en Russie une technique perfectionnée, plus élevée qu’auparavant, il ne saurait être question ni de rétablissement de la vie économique, ni de communisme.

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Le communisme, c’est le pouvoir des Soviets plus l’électrification de tout le pays, car sans électrification il est impossible de perfectionner l’industrie.

C’est là une tâche de longue haleine, qui exige au moins 10 ans, à condition d’y faire participer une masse de ces techniciens qui donneront au congrès des Soviets une série de documents imprimés où tout ce plan [d’électrification de la République socialiste fédérative soviétique de Russie, Rapport au 8e Congrès des Soviets de la Commission d’Etat pour l’électrification delà Russie] est étudié en détail.

En moins de 10 ans, nous ne pouvons pas réaliser les fondements de ce plan, ni créer les 30 grandes régions de stations électriques permettant de placer sur le pied moderne toute notre industrie.

Il est clair que sans cette transformation de notre industrie pour la mettre à la hauteur de la grande production mécanique contemporaine, le régime socialiste restera un ensemble de décrets, une alliance politique de la classe ouvrière avec le paysan, une défense du paysan contre les Koltchak et les Denikine, un exemple pour toutes les puissances du monde, mais n’aura pas de base propre. »

Dans son Rapport au VIIIe congrès des Soviets de la R.S.F.S.R., Lénine expliquera cela également de la manière suivante :

« Tant que nous vivons dans un pays de petits paysans, il existe en Russie, pour le capitalisme, une base économique plus solide que pour le communisme. Il faut bien retenir cela.

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Tous ceux qui ont observé attentivement la vie rurale en la comparant à la vie urbaine, savent que nous n’avons pas arraché les racines du capitalisme, ni sapé les fondements, la base de l’ennemi intérieur.

Ce dernier se maintient sur les petites exploitations, et pour en venir à bout il n’est qu’un moyen: faire passer l’économie du pays, y compris l’agriculture, sur une nouvelle base technique, sur la base technique de la grande production moderne…

C’est lorsque le pays sera électrifié, lorsque nous aurons donné à l’industrie, à l’agriculture et aux transports la base technique de la grande industrie moderne, c’est alors seulement que notre victoire sera définitive. »

Dépasser l’arriération de la petite production amenait la nécessité de l’électrification pour que la grande industrie existe. Un plan d’électrification fut, pour cette raison, réalisé.

C’est une Commission d’État pour l’Électrification de la Russie, dont l’acronyme était GOELRO, qui s’en chargea ; son objectif était de faire passer la production nationale annuelle d’électricité à 8,8 milliards de kWh, soit bien au-delà d’avant la première guerre mondiale impérialiste, le chiffre étant de 1,9 milliards de kWh en 1913.

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La GOELRO avait été mise en place dans la foulée de la révolution, par le Conseil des Commissaires du peuple, comme composante d’un vaste Conseil Suprême de l’Économie Nationale, dont l’acronyme était Vesenkha (ou VSNKh).

Ce Conseil Suprême va, dans les faits, s’occuper de l’économie jusqu’à la mise en place réelle et complète de la planification, en 1932. Lorsque Nikita Khrouchtchev prendra le pouvoir à la mort de Staline en 1953, il abolira justement la planification et rétablira le Conseil Suprême.

Une figure importante de la GOELRO fut le vieux bolchevik et scientifique Gleb Krzhizhanovsky (ou encore Kryjanovsky), qui devint jusqu’à sa mort en 1959 un spécialiste de la question. La GOELRO divisait le pays en plusieurs zones : Région économique du Sud, Région économique du Centre, Région économique du Nord, Bassin de l’Oural, Bassin de la Volga, Turkestan, Région du Caucase et de Sibérie de l’Ouest.

Cette division était un préalable pour la relance de l’économie, déjà fragile de par sa base, qui s’était effondrée de manière quasi complète. En 1920, les zones agricoles ont perdu 76 % de leur surface, alors que l’industrie produisait 1/7e du niveau de 1913.

La situation des chemins de fer était particulièrement terrible, puisque non seulement plus de la moitié des locomotives et le quart des wagons de marchandises avaient été rendues inutilisables, mais en plus leur production n’était qu’à 15 % d’avant-guerre.

L’électrification était la base pour relancer la production, pour faciliter les transports, pour remettre sur pied l’économie au niveau national. De fait, entre 1927 et 1934, la grande bataille lancée en 1921 était gagnée. Dès 1924-1925, l’économie soviétique avait atteint environ 75 % de l’économie d’avant-guerre.

Cette mise en place par en haut n’est cependant qu’un seul aspect de la planification.


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