la_lutte_du_materialisme_contre_l_apriorisme_idealiste_sous_les_dynasties_des_han_de_l_ouest_et_de_l_est.jpgpar Yang Jong­kouo

Lénine dit que l’idéalisme est « un instrument de la réaction, un propagateur de la réaction » ( « Nos abrogateurs »). Tout le long de l’histoire, l’apriorisme professé par les philosophes idéalistes a été l’instrument », le « propagateur » qu’utilisaient les classes réactionnaires gouvernantes pour duper et endormir les masses populaires, afin de consolider leur domination réactionnaire.

Un philosophe doit-­il se cultiver entre quatre murs pour méditer sur ce qu’il appelle la bonté innée de la nature humaine et les principes du Ciel ?

Ou doit-­il insister sur la nécessité pour les organes des sens d’avoir des contacts avec le milieu extérieur pour pouvoir connaître ce milieu ?

Dans l’histoire de la philosophie chinoise, cette question revêt une importance primordiale du point de vue de la lutte entre les deux lignes, entre l’apriorisme idéaliste et la théorie matérialiste de la connaissance. Avant la dynastie des Ts’in (221-­207 av. J.­C.), la lutte entre les deux lignes dans le domaine de la philosophie avait été acharnée, et elle avait pris de l’ampleur sous les dynasties des Han de l’Ouest (206 av. J.­ C. ­23 ap. J.­C.) et des Hans de l’Est (25-­220).

Sous les dynasties des « deux Han », la société féodale et les rapports de production féodaux étaient déjà établis, mais des vestiges du régime esclavagiste existaient toujours. Certaines grandes familles aux droits héréditaires, issues pour la plupart des descendants des gouvernants de l’aristocratie esclavagiste des différents États de l’époque Tchouentsieou et de celle des Royaumes combattants, étaient restées fort puissantes ; elles possédaient toujours un grand nombre d’esclaves qui travaillaient pour eux dans l’artisanat et le commerce.

Dans l’Histoire de la dynastie des Han, au chapitre sur la géographie, on lisait : « A Taiyuan et à Changtang, nombre de fils et de petits-fils des familles aristocratiques de l’Etat de Tsin usaient de supercherie et de perfidie les uns contre les autres, chacun se vantait de sa réputation et de ses exploits », ils faisaient régner l’arbitraire.

La classe féodale qui était au pouvoir sous la dynastie des Han avait des contradictions avec ces vieilles familles restées fort puissantes ; aussi avait-­elle pris des mesures pour contenir leur influence.

Mais d’un autre côté, comme les deux fractions de la classe exploiteuse possédaient des intérêts communs, elles s’entendaient entre elles pour exploiter et opprimer cruellement le peuple laborieux. La principale contradiction, dans la société d’alors, était la contradiction entre les propriétaires fonciers féodaux et ces puissantes familles héréditaires d’une part et les masses du peuple d’autre part.

Sous le règne de l’empereur Wouti (140-­87 av. J.­C.) de la dynastie des Han, la division du pays en États vassaux, qui existait encore au début de cette dynastie, avait pris fin, et la domination féodale au pouvoir centralisé semblait s’être consolidée ; mais les masses laborieuses subissaient toujours une oppression impitoyable. Beaucoup de gens n’avaient ni feu ni foyer ou mouraient de misère. Ils se révoltaient.

En l’an 99 avant notre ère, une insurrection paysanne, dirigée par Siu Pei, éclata dans la province du Chantong et les régions avoisinantes. Les paysans insurgés s’emparèrent des villes, prirent des armes aux forces officielles, libérèrent des prisonniers, renversèrent et tuèrent des fonctionnaires. Cette insurrection ébranla l’ensemble de la classe féodale dominante. Ce fut pour répondre aux besoins de cette classe qui voulait renforcer son pouvoir centralisé qu’apparurent les théories philosophiques réactionnaires de Tong Tchong-­chou (179-­104 av. J.­C.).

Tong Tchong­-chou et l’apriorisme du Vaste Débat dans la Salle du Tigre blanc

Tong Tchong­-chou avait compris que si les doctrines de Confucius et de Mencius, propagées par les confucéens dans la période d’avant la dynastie des Ts’in, avaient défendu la classe des aristocrates esclavagistes en déclin, elles pouvaient tout aussi bien, avec quelques modifications, servir la classe féodale dominante.

C’est pourquoi il proposa d’interdire les activités des autres écoles de pensée : « Honorer seulement la doctrine de Confucius et bannir toutes les autres écoles ». Sa proposition fut acceptée par l’empereur Wouti qui voulait justement consolider sa domination féodale fondée sur un pouvoir centralisé au moyen d’un renforcement du contrôle idéologique.

Dans son mémoire adressé à l’empereur Wouti : « Pour recommander des hommes vertueux et compétents », et dans son livre : Rosée luxuriante des « Annales de Tchouentsieou », Tong Tchong­-chou prêcha la doctrine mystique du yin­-yang et des cinq éléments (bois, feu, terre, métaux et eau), prétendant que toute chose en ce monde, y compris le pouvoir de la monarchie féodale, est arrangée par le Ciel dans un but déterminé.

Il a ainsi lié l’autorité divine émanant du Ciel à celle de la monarchie sur la terre et développé l’idée de Mencius sur « la fusion du Ciel et de l’homme en un tout », fournissant un fondement théorique à la conception selon laquelle « l’autorité de la monarchie émane du Ciel ».

Pour asseoir solidement l’ordre féodal, il avança les « trois principes cardinaux » : « Le souverain dirige les sujets, le père dirige le fils, et le mari dirige la femme », prétendant que ces rapports avaient été décidés par le « Ciel » et étaient par conséquent immuables.

Ces principes ont constitué les dogmes moraux, sacrés et inviolables de la société féodale chinoise pendant 2.000 ans. Comme l’indiquait le président Mao : « Ces quatre formes de pouvoir politique, clanal, religieux et marital représentent l’ensemble de l’idéologie et du système féodal-­patriarcal et sont les quatre grosses cordes qui ligotent le peuple chinois et en particulier la paysannerie. » (« Rapport sur l’enquête menée dans le Hounan à propos du mouvement paysan » )

Si Tong Tchong­-chou prêcha un apriorisme idéaliste, ce fut justement pour donner une base à sa théorie politique réactionnaire du point de vue de la théorie de la connaissance. Développant les théories à priori de Confucius et de Mencius, Tong Tchong­-chou formula les « trois sortes de nature humaine » : « la nature du sage », « la nature des petites gens » et « la nature de l’homme moyen ». D’après lui, seuls les gens ayant « la nature de l’homme moyen » peuvent devenir bons par l’éducation et l’étude.

Ceux qui possèdent « la nature du sage » connaissent « la loyauté, la sincérité et l’amour universel, l’honnêteté et les convenances » (Rosée luxuriante des « Annales de Tchouentsieou ») ; ils sont nés bons. Quant à « la nature des petites gens », elle désigne la nature des gens du peuple travailleur qui sont asservis. Ceux-ci sont nés stupides et doivent se laisser gouverner par les « sages ».

Confucius lui-même les considère comme des « gens de basse condition », des gens sans importance, insignifiants et négligeables (Louen Yu). La théorie des « trois sortes de nature humaine » de Tong Tchong­-chou est en fait une réplique des formules de Confucius telles : « En haut l’intelligence, en bas la bêtise », « Les hommes qui sont au-dessus de l’intelligence moyenne peuvent être instruits dans les plus hautes connaissances du savoir humain ; ceux qui sont au-dessous de l’intelligence moyenne ne peuvent pas être instruits des hautes connaissances du savoir humain. » (Louen Yu)

Aux yeux de Tong Tchong­-chou et de ses semblables, les « sages » sont nés bons, alors que les « petites gens » sont nés vils ; les premiers ont une intelligence absolue, alors que les seconds une stupidité absolue.

Par conséquent, les premiers doivent être haut placés pour gouverner, et les seconds, se résigner à être opprimés et asservis. Tout cela est prédestiné et a été décidé par le Ciel ; on ne peut absolument rien y changer. Tels étaient les arguments employés pour prouver au moyen de l’aprio­risme que l’ordre établi par la domination féodale était absolument « justifié ».

L’insurrection paysanne qui éclata dans les dernières années de la dynastie des Han de l’Ouest ébranla sérieusement la domination féodale et porta un coup rude à la puissance des grandes familles héréditaires. Mais le représentant des propriétaires fonciers, Lieou Sieou (devenu plus tard l’empereur Kouangwou), s’empara des fruits de cette victoire et fonda la dynastie des Han de l’Est.

En l’an 79, sous le règne de l’empereur Tchangti, une conférence ayant pour but de renforcer sur le plan idéologique le pouvoir féodal centralisé fut tenue dans la Salle du Tigre blanc. Les lettrés confucéens y furent conviés pour discuter des problèmes d’interprétation des canons classiques.

Au cours de cette conférence, ils s’employèrent à propager la théorie mystique de « la fusion du Ciel et de l’homme en un tout » de Tong Tchong­-chou et la doctrine superstitieuse du yin-­yang et des cinq éléments, toutes des formes de l’apriorisme idéaliste.

Les résultats de ces discussions furent rapportés par Pan Kou (32­-92) dans le livre qui a pour titre : « Vaste Débat dans la Salle du Tigre blanc. »

Cet ouvrage prétendait que le sage est un homme pour qui « aucune chose relative à la Voie n’est inconnue », que seul un sage peut avoir de riches connaissances innées, prévoir le cours des événements futurs et communiquer avec le Ciel. Ainsi donc, l’empereur gouvernant féodal suprême, est nécessairement un sage, car « aucun, hormis le sage, ne pourrait être mandaté par le Ciel » et devenir le « Fils du Ciel ». Seul un tel sage peut posséder de riches connaissances innées et déceler « au moindre signe de manifestation, les choses ».

Cette formule des idéalistes signifie que toute idée qui commence à naître dans la conscience de l’homme, si dissimulée et si insignifiante qu’elle soit au début, peut prendre une importance majeure dans l’avenir. Tse Che (petit-fils de Confu­cius et maître du maître de Mencius) résumait cette formule en ces termes : « Rien n’est plus évident que ce qui est caché dans le secret de la conscience, et rien n’est plus manifeste que les causes les plus subtiles des actions.

C’est pourquoi l’homme supérieur veille attentivement sur les inspirations secrètes de sa conscience. » (Tchong Yong) En somme, l’homme n’a pas besoin de ses organes des sens pour entrer en contact avec le monde extérieur, il lui suffit de se cultiver en s’enfermant entre quatre murs et de prendre conscience des connaissances innées et des règles éthiques émanant de Dieu, avec lesquelles il pourra régulariser l’ordre de la société féodale.

C’est là un développement de l’idée de Tong Tchong­ chou selon laquelle « Les trois principes cardinaux de la Voie royale émanent du Ciel ». C’est donc prêcher l’idée que la connaissance humaine provient des concepts subjectifs, qu’elle procède du subjectif à l’objectif. C’est là purement de l’apriorisme idéaliste.

Dans le « Vaste Débat de la Salle du Tigre blanc », le peuple asservi était présenté comme étant dépourvu de connaissances innées ; de « nature simpliste », ignorant la Voie de la « bienveillance », il n’est bon qu’à travailler dans la production et à être asservi par la classe dominante. Si le peuple travailleur se révoltait, il faudrait le faire «revenir dans la bonne Voie ».

Ainsi donc, les « rites » étaient établis uniquement à l’intention de la classe féodale dominante possédant un savoir inné, tandis que les châtiments s’adressaient uniquement aux classes exploitées dépourvues de connaissances. C’était là une théorie tout à fait absurde destinée à sauvegarder la domination féodale.

La réfutation de l’apriorisme par Wang Tchong

Les philosophes matérialistes de l’époque, représentés par Wang Tchong, avaient vigoureusement critiqué, sous tous ses aspects, l’apriorisme idéaliste prôné par Tong Tchong­-chou et le livre : « Vaste Débat dans la Salle du Tigre blanc ». Wang Tchong (environ 27­-97 ap. J.­C.), né d’une famille plébéienne s’adonnant à l’agriculture et au commerce, eut des contacts avec les gens de couche inférieure et connut l’oppression et les humiliations infligées par les grandes familles héréditaires.

Il avait donc de la sympathie pour le peuple travailleur opprimé et exploité. Il comprit que les paysans s’étaient insurgés, parce qu’« avec la disette de vivres, on ne pouvait supporter ni la faim ni le froid », et il déclara que « les conflits provenaient de la pénurie ».

Il se lia d’amitié avec des gens de condition plus modeste, aussi voyait-­il les problèmes de façon plus objective. En écrivant son célèbre ouvrage Louera Heng (Discours bien pesés), il voulait justement soumettre à une critique rigoureuse les idées philosophiques idéalistes de Tong Tchong-­chou. A cette époque, les gouvernants de la dynastie des Han s’employaient à encourager le culte de Confucius et de Mencius.

Et Wang Tchong, qui s’approchait des dernières années de sa vie, alors que le gouvernant féodal suprême avait convoqué une conférence à la Salle du Tigre blanc, dans son livre Louen Heng, osa écrire des chapitres qui avaient pour titres : « Interpellons Confucius » et « Piquons au vif Mencius », reprochant vivement à Confucius et à Mencius d’avoir eu nombre de propos et d’actes contradictoires, d’avoir manqué d’objectivité et de s’être quelquefois trompés.

Wang Tchong avait vraiment l’audace d’un matérialiste. Par ses critiques contre l’apriorisme idéaliste de Confucius et de Mencius propagé par Tong Tchong­chou et ses adeptes, Wang Tchong fit d’abord remarquer que l’idée de la « bonté pure » de la nature humaine, mise en avant par Tong Tchong­chou, était fausse et « ne concordait pas avec la réalité ». Il critiqua aussi Mencius, déclarant que sa thèse selon laquelle l’homme est bon par nature « ne correspondait pas à la réalité ». Il soutint que la nature de l’homme, qu’elle soit bonne ou non. Ne se formait graduellement qu’après sa naissance. Il comparait cette formation aux fils de soie que l’on donnait à teindre.

Avec l’indigo, on obtenait du fil bleu, et avec de la teinture vermeille, du fil rouge. Un enfant sans expérience devient bon ou mauvais tout comme les fils de soie qui changent de couleur sous l’effet de la teinture. En d’autres termes, la nature d’un homme, bonne ou mauvaise, est conditionnée par le milieu dans lequel il vit après sa naissance. Nul n’a des connaissances et de la capacité dès sa naissance, elles ne peuvent être acquises que par une pratique continue. Pour réfuter l’apriorisme, Wang Tchong prit des exemples dans l’art artisanal. Dans la capitale de l’État de Tsi, dit-­il, où la broderie était un art transmis de génération en génération, il n’y avait pas une femme, même très ordinaire, qui ne sût broder.

La région de Hsiang était connue pour son tissage traditionnel de la soie, et toute femme, même peu intelligente, y excellait dans cet art. Pourquoi ? Parce qu’à force de voir les gens tisser et de tisser elles-mêmes tous les jours, elles acquéraient tout naturellement une grande habileté dans cet art. Ce qui prouve que les connaissances et le talent ne sont pas « des dons accordés par le Ciel ».

Wang Tchong montra que c’est pure duperie de prétendre qu’un sage «peut savoir ce qui s’est passé il y a mille ans et ce qui se passera dans dix mille ans », qu’il peut « connaître sans avoir appris et comprendre sans s’être informé ». En réalité, sans l’ouïe ni la vue, ni les autres organes des sens, on ne peut rien connaître du monde extérieur. Donc, comment pourrait-­il exister une connaissance innée ?

Dans le chapitre : « Connaissance de la vérité », Wang Tchong cita seize exemples pour montrer que «le sage n’est pas un dieu capable de connaître les choses à l’avance ». En voici quelques-­uns : Confucius et son disciple Yen Yuan furent cernés par les gens de la localité Kouang.

Confucius réussit le premier à s’échapper, et son disciple le rejoignit plus tard. «Je croyais que tu avais été tué par les Kouang », lui dit­-il. Or, si Confucius possédait le don de savoir les choses à l’avance, il aurait su que son disciple était sorti de l’affaire sain et sauf. Le fait de croire que son disciple était déjà mort prouve qu’il était incapable de savoir à l’avance. Confucius ne voulait pas voir Yang Houo. Mais celui­ci lui fit parvenir un jambon, ce qui l’obligea à lui rendre une visite en retour. Il choisit un jour où il avait appris qu’il n’était pas chez lui pour lui rendre visite.

Mais le hasard voulut que Confucius le rencontrât sur le chemin du retour. Si Confucius avait su d’avance ce qui allait se passer, fit remarquer Wang Tchong, il ne se serait pas rendu chez Yang Houo ce jour-­là et il ne l’aurait pas rencontré sur le chemin du retour.

Les seize exemples cités par Wang Tchong prouvent qu’il n’est pas de connaissance innée dans le monde, même pour un « sage » comme Confucius. Wang Tchong indiqua que « les talents peuvent varier d’un homme à l’autre », mais pour connaître une chose, tout le monde doit apprendre. Quiconque «ne s’informe de rien » « ne connaît rien ». De tout temps, nul n’a jamais pu « savoir ce qui s’est passé il y a mille ans et ce qui se passera dans dix mille ans. »

Puisque même un « sage » comme Confucius devait apprendre pour avoir des connaissances, il en ressort qu’il n’y a pas de « sage » né. L’homme ne peut connaître le monde extérieur que par l’étude et la pratique.

Tout en niant l’existence des connaissances innées, Wang Tchong souligne la nécessité d’acquérir des connaissances par les organes des sens.

Par ailleurs, il indique que pour savoir si une chose est vraie ou fausse, on ne peut compter uniquement sur ses organes des sens, il faut encore employer son cerveau pour réfléchir, ainsi aura­-t­-on une connaissance plus approfondie des choses. Partant de l’idéalisme, Tong Tchong­-chou soutient que le Ciel a une volonté qui est Dieu ; que Dieu, ce Ciel doué d’une volonté, est éternel et immuable, aussi la « Voie » et la « raison » qui émanent de Sa volonté sont­-elles également éternelles et immuables. « La grandeur de la Voie vient du Ciel.

Le Ciel est immuable, immuable aussi est la Voie ». C’est là un point de vue purement idéaliste et métaphysique. En partant de cette idée réactionnaire, Tong Tchong-­chou estime que les choses elles-mêmes ne changent pas ni ne se développent, et que les règles éthiques et morales féodales à priori sont éternelles et immuables.

Par contre, Wang Tchong soutient qu’il y a transformation et développement ; il déclare que l’homme qui n’avait rien pour se vêtir dans les temps anciens porte maintenant des vêtements ; ce qui prouve que les choses changent et se développent et que le temps progresse. Wang Tchong a critiqué les vues métaphysiques de Tong Tchong­-chou et aussi le point de vue des conservateurs des grandes familles selon lequel « le présent ne vaut pas le passé ».

Un autre philosophe, du nom de Wang Fou, qui vécut sous le règne des empereurs Hoti et Anti de la dynastie des Han de l’Est et qui eut de fréquentes relations avec l’homme de science éminent de l’époque, Tchang Heng, fut fortement influencé par les idées matérialistes de Wang Tchong. Dans son livre le Tsien Fou Louen (Discours des anonymes), Wang Fou, partant de la théorie matérialiste de la connaissance, nie également qu’il existe une connaissance innée et des « sages » qui possèdent des connaissances dès leur naissance.

Il dit que le sage n’est pas « né doué de savoir » ni « né capable », qu’il lui faut apprendre et étudier, après sa naissance, s’il veut acquérir « des connaissances étendues et une haute vertu ». Il cita l’exemple d’un objet en bois.

Pour que le bois d’oeuvre se transforme en un objet utile, il faut passer par la main du menuisier qui, ayant conçu l’objet, trace les lignes sur son morceau de bois et le travaille. Il en est de même pour l’homme. Il n’y a pas de « génie » né. C’est seulement en se trempant dans le creuset de la vie et en étudiant que l’homme devient utile.

Il ressort de ce qui précède que la lutte entre les deux pensées philosophiques était, à l’époque, extrêmement violente, elle reflétait la lutte de classes dans la société. Un problème important était de savoir s’il fallait s’en tenir à la théorie matérialiste de la connaissance ou propager l’apriorisme idéaliste.

Les matérialistes affirmaient que toute connaissance provient de l’étude et de l’expérience et qu’il n’existe pas de connaissances innées.

Ils estimaient que toute chose n’est pas immuable, mais change et se développe ; que le temps progresse, que le présent surpasse le passé ; qu’il est faux de prétendre que le présent fait marche arrière, qu’il s’achemine vers la réaction, que «le présent ne vaut pas le passé ».

Mais les partisans de l’apriorisme idéaliste soutenaient le contraire. Ils persistaient dans le divorce entre l’objectif et le subjectif, propageaient des inepties pour empoisonner et duper la masse du peuple.

De nos jours, Liou Chao-­chi, Lin Piao et autres escrocs politiques prônaient également l’apriorisme idéaliste, propageaient des absurdités sur le « génie » et le « super­génie », sur le «processus du subjectif à l’objectif », etc.

N’est-­il pas évident que leur but criminel était de faire tourner à rebours la roue de l’Histoire et de renverser la dictature du prolétariat pour restaurer le capitalisme en Chine ?

L’étude de la lutte du matérialisme contre l’apriorisme idéaliste dans l’histoire de la philosophie nous permet de mieux comprendre le caractère réactionnaire de l’apriorisme idéaliste, philosophie au service des classes réactionnaires au pouvoir.

Dans l’histoire de la Chine, par exemple, l’apriorisme idéaliste prêché par Confucius était au service du pouvoir des propriétaires d’esclaves en décadence ; plus tard, Tong Tchong­-chou et d’autres développèrent cet apriorisme, fournissant un fondement théorique aux gouvernants féodaux pour opprimer le peuple pendant plus de deux mille ans.

L’étude de la lutte entre les deux lignes dans l’histoire de la philosophie chinoise nous permet de mieux comprendre l’importance de la lutte de classes dans le domaine idéologique. Comme l’a indiqué le président Mao :

« Pour renverser un pouvoir politique, on commence toujours par préparer l’opinion publique et par agir dans le domaine idéologique. Cela est vrai aussi bien pour une classe révolutionnaire que pour une classe contre-révolutionnaire. »

Il est donc extrêmement important pour nous de mener, selon les enseignements du président Mao, la lutte de classes dans le domaine de la superstructure.


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