L’Organisation météorologique mondiale (OMM) est une institution de l’ONU qui publie chaque année depuis 25 ans un rapport sur l’état du climat de la planète. Ces informations sont d’une importance capitale : c’est le regard le plus précis dont l’humanité dispose pour évaluer la situation climatique de la Terre, ainsi que sa propre situation par rapport au climat.

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Les données sont collectées par des organismes nationaux et régionaux et la Déclaration bénéficie de la contribution des Services météorologiques et hydrologiques nationaux. C’est une sorte de document de référence, avec un caractère exhaustif.

L’édition actuelle, portant sur l’année 2018, vient de paraître et est disponible ici :

Déclaration de l’OMM sur l’état du climat mondial en 2018 (WMO Statement on the state of the global climate in 2018)

Le document est en anglais, mais sera disponible prochainement en français – nous mettrons le lien à jour.

Il n’y a aucune surprise dans ce qui y est dit. La situation est dramatique, notamment en ce qui concerne les océans et les phénomènes climatiques qui leurs sont liés.

L’Organisation météorologique mondiale résume ainsi ce rapport, dans un communiqué de presse publié ce jeudi 28 mars 2019 :

« Les manifestations physiques du changement climatique se multiplient et son impact socio‑économique s’accroît. Les concentrations record de gaz à effet de serre entraînent en effet à la hausse les températures mondiales qui atteignent des niveaux inquiétants […].

La Déclaration de l’OMM sur l’état du climat mondial, dont c’est la 25e édition, met en exergue la hausse record du niveau de la mer et les températures exceptionnellement élevées observées ces quatre dernières années à la surface des terres et des océans.

Cette tendance au réchauffement ne s’est pas démentie depuis le début de ce siècle et devrait se poursuivre. »

Le Secrétaire général de l’organisation, Petteri Taalas, a ainsi expliqué que :

« Depuis qu’a été publiée la première Déclaration sur le climat, le savoir climatologique a atteint une rigueur sans précédent. On a pu mettre ainsi en évidence de manière irréfutable la hausse de la température moyenne et ses corollaires que sont, entre autres, l’élévation du niveau de la mer à un rythme accéléré, le recul de la banquise et des glaciers et des phénomènes extrêmes tels que les vagues de chaleur ».

Il ajoute ensuite que :

« Les phénomènes météorologiques extrêmes se sont poursuivis au début de 2019, comme en témoigne le cyclone tropical Idai qui a provoqué tout récemment des inondations dévastatrices et fait de très nombreuses victimes au Mozambique, au Zimbabwe et au Malawi. Ce pourrait bien être une des catastrophes d’origine météorologique les plus meurtrières qu’ait connues l’hémisphère austral. Idai a commencé par frapper la ville portuaire de Beira, au Mozambique, ville en pleine expansion située à faible altitude sur un littoral exposé aux ondes de tempête et subissant déjà les conséquences de la hausse du niveau de la mer. L’ampleur de la catastrophe démontre la nécessité d’agir à l’échelle internationale en faveur du développement durable, de l’adaptation au changement climatique et de la prévention des catastrophes. »

Voici les « Points saillants » de la Déclaration, tels que résumés dans le communiqué de l’OMM :

Incidences du climat

(d’après les informations fournies par les organisations partenaires du système des Nations Unies)

Dangers naturels :

En 2018, la plupart des dangers naturels, dont ont été victimes près de 62 millions de personnes, étaient liés à des extrêmes météorologiques et climatiques. Comme par le passé, ce sont les inondations qui ont touché le plus de personnes – plus de 35 millions – selon une analyse portant sur 281 phénomènes répertoriés par le Centre de recherche sur l’épidémiologie des désastres (CRED) et le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes.

Les ouragans Florence et Michael font partie des 14 catastrophes ayant entraîné des milliards de dollars de pertes aux États-Unis d’Amérique en 2018. Ils ont causé des dégâts qui se chiffrent à 49 milliards de dollars de dégâts et entraîné la mort de plus de 100 personnes. Quant au super typhon Mangkhut, il a touché plus de 2,4 millions de personnes et fait au moins 134 victimes, surtout aux Philippines.

Plus de 1600 décès ont été liés aux vagues de chaleur intense et aux incendies de forêt qui ont frappé l’Europe, le Japon et les États-Unis, les dommages matériels avoisinant le chiffre record de 24 milliards de dollars dans ce dernier pays. En Inde, l’État du Kerala n’avait pas connu de pluies aussi abondantes et d’inondations aussi dévastatrices depuis presque un siècle.

Sécurité alimentaire :

L’exposition du secteur agricole aux extrêmes climatiques menace de compromettre les progrès réalisés dans la lutte contre la malnutrition. Il s’avère que la faim dans le monde, qui avait reculé durablement, est repartie à la hausse, selon les données récentes recueillies par plusieurs organismes des Nations Unies, dont l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Programme alimentaire mondial (PAM).

En 2017, selon les estimations, le nombre de personnes sous-alimentées avait augmenté, atteignant 821 millions, notamment à cause des graves sécheresses liées au puissant Niño de 2015/16.

Déplacements de populations :

Sur les 17,7 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays recensées par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 2 millions l’étaient en raison de catastrophes liées à des phénomènes météorologiques et climatiques (situation en septembre 2018). La sécheresse, les inondations et les tempêtes (y compris les ouragans et les cyclones) sont les phénomènes qui ont entraîné le plus grand nombre de déplacements liés à des catastrophes en 2018. Dans tous les cas, les populations déplacées ont besoin de protection et sont vulnérables.

Selon le Réseau pour la surveillance des retours et des dispositifs de protection du Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), quelque 883 000 nouveaux déplacements internes ont été enregistrés entre janvier et décembre 2018, dont 32 % étaient causés par des inondations et 29 % par la sécheresse.

Chaleur, qualité de l’air et santé :

Il existe de nombreuses interconnexions entre le climat et la qualité de l’air qui sont exacerbées par le changement climatique. On estime que le nombre de personnes exposées aux vagues de chaleur a augmenté d’environ 125 millions entre 2000 et 2016, la durée moyenne des vagues de chaleur s’étant allongée de 0,37 jour par rapport à la période 1986–2008, d’après l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

Ces tendances sont autant de signaux d’alerte pour le secteur de la santé publique, dans la mesure où l’intensité, la fréquence et la durée des épisodes de chaleur extrême devraient continuer d’augmenter.

Conséquences pour l’environnement :

On mentionnera le blanchissement des coraux et la diminution de la teneur en oxygène de l’océan, la disparition du «carbone bleu» associé aux écosystèmes côtiers comme les mangroves, les herbiers et les marais salés, et la perturbation d’écosystèmes très divers. Le réchauffement du climat devrait contribuer à la diminution de l’oxygène qui est observée en haute mer et dans les eaux côtières, y compris dans les estuaires et les mers semi-fermées.

Depuis le milieu du siècle dernier, la teneur en oxygène de l’océan à l’échelle du globe aurait baissé de 1 à 2 % d’après les estimations de la Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’UNESCO.

Le changement climatique est devenu une grave menace pour les écosystèmes des tourbières, car il exacerbe les effets du drainage et accroît le risque d’incendie, d’après le Programme des Nations Unies pour l’environnement. Les tourbières sont importantes pour les sociétés humaines du monde entier. Elles contribuent considérablement à l’atténuation du changement climatique et au processus d’adaptation grâce à la fixation et au stockage du carbone, au maintien de la biodiversité, à la régulation du flux hydrologique et de la qualité de l’eau, et à la fourniture d’autres services écosystémiques offrant des moyens de subsistance.

Indicateurs climatiques

Contenu thermique de l’océan :

Ce dernier a atteint de nouveaux pics en 2018 entre 0 et 700 m de profondeur (relevés remontant à 1955) et entre 0 et 2 000 m (relevés remontant à 2005), pulvérisant les records de 2017. Les océans absorbent plus de 90 % de l’énergie piégée par les gaz à effet de serre, et leur contenu thermique traduit directement cette accumulation d’énergie dans les couches marines supérieures.

Niveau de la mer :

La hausse du niveau de la mer s’est poursuivie à un rythme accéléré. En 2018, le niveau moyen de la mer dépassait de quelque 3,7 mm celui de 2017 et c’était le plus haut jamais constaté. Entre janvier 1993 et décembre 2018, le rythme annuel moyen d’élévation du niveau de la mer était de 3,15 ± 0,3 mm, l’accélération étant estimée à 0,1 mm/an2. Le rythme accru de perte de masse glaciaire des inlandsis est la cause principale de l’accélération de la hausse du niveau moyen de la mer ainsi qu’il ressort des données altimétriques transmises par satellite, d’après le Groupe sur le bilan du niveau de la mer relevant du Programme mondial de recherche sur le climat.

Acidification des océans :

Ces dix dernières années, les océans ont absorbé environ 30 % des émissions anthropiques de CO2. Le CO2 absorbé réagit avec l’eau de mer et modifie le pH de l’océan. Ce processus d’acidification peut influer sur l’aptitude des organismes marins, comme les mollusques et les coraux constructeurs de récifs, à fabriquer et maintenir de la coquille et du squelette. Les observations faites en haute mer ces 30 dernières années ont clairement mis en évidence la diminution du pH. Comme l’annonçaient déjà un certain nombre de rapports et de projections, le processus d’acidification des océans se poursuit, le pH de l’océan mondial continuant de baisser, d’après la COI de l’UNESCO.

Glaces de mer :

L’étendue de la banquise arctique a été bien inférieure à la normale tout au long de 2018, affichant des records à la baisse en janvier et février. Le maximum annuel a été observé à la mi-mars et la superficie moyenne pour ce mois figure au troisième rang des plus faibles qui aient été constatées pour un mois de mars depuis 1979, lorsqu’ont débuté les observations par satellite. L’étendue moyenne de la banquise arctique en septembre se classe au sixième rang des plus faibles jamais observées pour un mois de septembre, et les 12 moyennes de septembre les plus faibles sont toutes postérieures à 2006. À la fin de 2018 l’étendue des glaces de mer, en moyenne journalière, était proche des plus faibles jamais observées.

L’étendue de la banquise antarctique a atteint son maximum saisonnier à la fin du mois de septembre et au début du mois d’octobre. Après son pic du début du printemps, l’étendue de la banquise antarctique a diminué rapidement, chaque valeur mensuelle, jusqu’à la fin de l’année, se classant parmi les cinq plus faibles jamais constatées.

L’inlandsis groenlandais accuse une perte de masse glaciaire presque chaque année depuis 20 ans. Le bilan de masse en surface a enregistré une hausse en raison de chutes de neige plus abondantes que la normale, en particulier sur la partie orientale du Groenland, et d’une saison de fonte proche de la normale. Cette situation s’est traduite par une augmentation globale du bilan de masse en surface mais n’a eu guère d’incidence sur la tendance générale constatée depuis deux décennies, l’inlandsis du Groenland ayant perdu environ 3 600 gigatonnes de glace depuis 2002. Une étude récente a porté sur des carottes de glace prélevées au Groenland, qui nous renseignent sur les épisodes de fonte survenus entre aujourd’hui et le milieu du XVIe siècle. Il s’avère que la nappe glaciaire du Groenland n’avait pas connu d’épisodes de fonte d’une telle intensité depuis au moins 500 ans.

Recul des glaciers :

Le Service mondial de surveillance des glaciers suit de près le bilan de masse de ces derniers en s’appuyant sur un ensemble de glaciers de référence, répartis dans 19 régions montagneuses du monde, pour lesquels on dispose de plus de 30 ans de données d’observation sur la période 1950–2018. D’après les résultats préliminaires disponibles pour 2018, qui concernent une partie de ces glaciers de référence, l’année hydrologique 2017/18 est la 31e année consécutive affichant un bilan de masse négatif.


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