Picasso-le charnier

Picasso-le charnier

L’espagnol Pablo Picasso (1881-1973) est un peintre membre de « l’avant-garde » décadente du début du XXe siècle, principalement du courant cubiste qu’il a contribué à fonder, avant de participer de manière décisive à ce qui deviendra l’art abstrait.

Menant une vie de bohème à la manière d’un millionnaire, Pablo Picasso était très proche du Parti Communiste français, qui combinait thorézisme et une ligne culturelle justement tournée vers les courants cubistes – futuristes – surréalistes qui avaient été catégoriquement rejetés par le réalisme socialiste en URSS.

Pablo Picasso participa ainsi à certaines activités du Parti Communiste français, qu’il finit par rejoindre en 1946. Il dessina une colombe de la paix comme emblème du mouvement pacifique et anti-nucléaire lancé par le Mouvement Communiste International.

A ce titre, il fut arrêté pendant douze heures par les services d’immigration lors de son voyage à Londres en 1950, et il refusera par la suite de retourner en Angleterre. Pareillement fut refusée sa demande de visa pour les États-Unis où il devait remettre au congrès américain un appel à la paix et contre les armes atomiques.

Picasso-la guerre et la paix

Picasso-la guerre et la paix

Pablo Picasso était tout à fait dans la ligne élaborée par Louis Aragon et Paul Eluard au sein du Parti Communiste français : l’artiste mène une vie de Bohème totalement indépendante, mais doit prendre parti à certains moments.

Pour cette raison, Pablo Picasso peignit notamment en 1951 une fresque appelée La Guerre et la Paix ainsi que le tableau Massacre en Corée, ou de manière plus connue Le charnier en 1944 et Guernica en 1937.

Cette démarche, aussi engagée qu’elle puisse avoir été, était en contradiction formelle avec la définition des arts et de la littérature par le réalisme socialiste. Aussi, Nikita Khrouchtchev l’utilisa directement, en organisant une grande exposition Pablo Picasso en Union Soviétique en 1956, dans le prolongement du XXe congrès.

C’est Ilya Ehrenbourg qui se chargea de la mettre en place, chose qu’il rééditera en 1963. Il avait, dès 1953, publié un article dans le quotidien du Parti Communiste italien, L’Unita, pour faire l’éloge de Pablo Picasso à l’occasion d’une rétrospective à Rome et Milan.

Picasso-massacres en Corée

Picasso-massacres en Corée

Cependant, officiellement, c’est le VOKS, organisme chargé des relations culturelles avec les pays étrangers, et plus précisément son « secteur des amis de la science et de la culture français », qui proposa au Comité Central du Parti Communiste d’Union Soviétique l’exposition pour célébrer les 75 ans de Pablo Picasso, à Leningrad puis à Moscou.

C’était par conséquent une initiative ouvertement officielle, mais qui contournait le système artistique officiel en URSS, avec également, pour contourner d’autant plus les musées, une organisation extrêmement rapide en quelques semaines, et donc un personnel des musées débordé et incapable de faire face idéologiquement et esthétiquement à 38 œuvres habilement choisies et remises à l’ambassade soviétique à Paris par Pablo Picasso lui-même, qu’on ne saurait par conséquent officiellement sélectionner ou refuser.

Picasso-guernica

Picasso-guernica

C’était, en pratique, un coup d’État par rapport aux instances artistiques traditionnelles, et un appel d’air pour la réouverture du musée d’art contemporain occidental, fermé depuis 1941, alors qu’en même temps des cercles d’artistes moscovites appelaient à réhabiliter l’impressionnisme.

Un autre événement fut organisé pour renforcer cette tendance au libéralisme et au progressisme « bourgeois bohème », avec la tenue en URSS du Festival International de la Jeunesse, en 1957.

34 000 jeunes de 131 pays, appartenant à des structures de jeunesse liées aux Partis Communistes, vinrent à Moscou, dans une ambiance commençant déjà à célébrer le pacifisme dans le sens de la « coexistence pacifique », qui était au coeur même de l’affirmation idéologique du révisionnisme de Nikita Khrouchtchev.


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