galilee-1.jpgGalilée (Galileo Galilei en italien) est une figure très connue ; on sait de lui, d’habitude, qu’il a affirmé l’héliocentrisme et que l’Église s’est opposée à lui, car elle considérait que la Terre était au centre de l’univers.

Toutefois, une telle interprétation des faits est erronée ; il ne faut pas considérer de manière unilatérale que Galilée est le représentant du matérialisme, un ennemi de l’idéalisme et du féodalisme. D’ailleurs, Galilée, qui agissait au XVIIe siècle, avait même le soutien du pape.

Galilée est en réalité un auteur à mi-chemin, exactement comme René Descartes, à l’opposé de Baruch Spinoza.

Il est quelqu’un qui combine, qui mélange, qui associe ; il est à ce titre tout à fait dans la tradition de la Renaissance italienne ; il n’appartient pas au courant de l’humanisme, du protestantisme, de la peinture flamande, de l’affirmation scientifique en tant que telle.

L’héliocentrisme est d’ailleurs une question tout à fait secondaire, le vrai fond du travail de Galilée étant la physique. Toute la question était de savoir comment combiner ces avancées scientifiques avec la vision du monde de l’Église.

Il faut se rappeler ici que l’Église avait, jusqu’au XIIe siècle, catégoriquement refusé tout apport scientifique réel, afin de promouvoir une vision du monde d’un féodalisme totalement primitif. La pénétration des conceptions d’Aristote, à partir du monde arabo-persan, principalement avec Avicenne et Averroès (ce qu’on a appelé l’averroïsme), a forcé l’Église à adapter son discours.

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C’est Thomas d’Aquin qui se chargea de cette adaptation, ce qui fera de lui un « père de l’Eglise ». Et la question par rapport à Galilée, est de savoir comment ses apports étaient, ou non, combinables avec ce que disait l’Église.

Or, il y avait une contradiction fondamentale dans l’adaptation faite par l’Église des thèses d’Aristote qui, lui, professait le matérialisme.

Aux yeux d’Aristote, le monde obéissait à une combinaison logique, la matière brute étant « formée » par une super-entité ayant produit indirectement le monde, par un surplus de bonté.

La moindre chose produite par cette super-identité a ainsi une identité à la base, une nature précise. Les événements qui se produisent sont cohérents, s’inscrivant dans les rapports nécessairement ordonnés dès le départ, de par l’existence même du monde.

Il n’y a donc pas de hasard, mais un emplacement tout désigné pour chaque être, qui lui-même possédait une définition particulière, une « forme » bien précise.

Aristote s’apercevant bien que les êtres humains meurent et que leurs enfants sont « différents », il théorise également les espèces, chaque espèce s’inscrivant dans un cycle infini, tout comme le mouvement des planètes.

A la question de l’œuf ou de la poule (qu’il pose), il répond qu’il n’y a pas de première poule, ni de premier œuf : les cycles se répètent de manière infinie. Il n’y a donc pas de création du monde, pas de premier homme.

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A la question de la pensée, Aristote explique que les humains ne pensent pas, leur capacité d’atteindre la vérité n’étant qu’une correspondance avec l’intellect agent, pensée correcte, juste, universelle nécessairement, coexistant avec le monde qu’il exprime, auquel il correspond.

Le matérialisme dialectique ajoute à la conception d’Aristote la notion d’auto-développement : il n’y a pas de première poule, mais la poule évolue à travers les millénaires, car la matière s’auto-transforme. Quant à la pensée (scientifique) des êtres humains, elle n’est pas en correspondance avec un intellect agent virtuel de l’univers, mais le reflet de l’univers lui-même.

Tout cela, la bourgeoisie ne pouvait pas le comprendre, nécessairement. C’est là qu’intervient Galilée.

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L’Église avait gommé l’aspect matérialiste d’Aristote, afin de proposer un contre-Aristote à l’Aristote matérialiste de l’averroïsme arabe, puis latin. Cependant, il y avait forcément des contradictions en série entre l’Aristote christianisé et les enseignements d’Aristote concernant la physique.

Aristote considérait ainsi que le repos était le statut normal de chaque chose, et qu’une chose pouvait être mis en mouvement, mais depuis l’extérieur d’elle-même seulement. C’est là le fameux principe de la cause et de la conséquence.

C’est pourquoi l’univers a besoin d’un premier moteur (« Dieu »), qui fournit la première « pichenette » amenant un enchaînement de mouvements en série (il va de soi que le premier moteur, cause de toutes les causes, est immobile, sans quoi il aurait lui-même besoin d’un moteur ; ce statut particulier fait de lui justement « Dieu »).

La conception d’Aristote dans la physique est ainsi tout un enchaînement de causes et de conséquences. Le judaïsme et l’Islam reprendront cette conception d’une « cause de toutes les causes », tout comme le christianisme par la suite ; à chaque fois il y aura des modifications des enseignements d’Aristote afin de les faire correspondre aux « révélations ».

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Le problème était donc qu’Aristote ne connaissait pas la nature en auto-mouvement de la matière ; il a donc cherché le mouvement hors de la matière – d’où l’idée d’une intervention extérieure.

Le matérialisme dialectique ajoute cela à Aristote, sans remettre en cause la conception « totale » d’Aristote : il y a bien un seul univers, une seule réalité, où tout est entremêlé, associé, combiné, synthétiquement lié. Pour le matérialisme dialectique, il n’y a au fond qu’une entité : l’univers. Tout le reste n’est que composants de l’univers.

C’est exactement sur ce point qu’intervient Galilée, remettant en cause le principe du « tout ».

Chez Aristote, le monde est cohérent, comme pour le matérialisme dialectique, mais il est statique. Galilée veut reconnaître le mouvement, alors il nie la cohérence du monde, et affirme que tout est tout le temps en mouvement.

Le repos n’est que la rencontre de forces s’opposant, s’auto-annulant.


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