[Note : La surdi-mutité est une infirmité que l’on rencontre couramment parmi les larges masses des travailleurs ; elle avait été considérée en Chine comme « incurable » par les prétendues « célébrités » et « sommités » bourgeoises.

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En mars 1968, en vue de matérialiser les directives du président Mao sur le travail médical et sanitaire, le service sanitaire d’une unité de l’Armée populaire de Libération envoya une équipe médicale à l’Ecole des Sourds-Muets de la municipalité de Liaoyuan, dans la province du Kirin. Cette équipe médicale était composée de trois médecins militaires et de cinq infirmiers dont un seul avait achevé les études secondaires du premier cycle, les autres, y compris le camarade Tchao Pou-yu, n’avaient fréquenté que l’école primaire ; aucun d’entre eux n’avait mis les pieds dans une école de médecine.

Mais, mus par le sentiment profond de leur responsabilité à l’égard de la révolution, ils ont fait des enquêtes minutieuses sur les sourds-muets, étudié consciencieusement l’acupuncture traditionnelle chinoise, et enfin, après des essais répétés, ils ont réussi à franchir le seuil de la surdi-mutité, et apporté une contribution importante à la médecine.

Cette brochure réunit trois articles qui exposent, faits à l’appui, les véritables miracles accomplis par le camarade Tchao Pou-yu au moyen de l’acupuncture dans le franchissement du « seuil du mutisme ».

C’est dans sa volonté d’étudier les œuvres philosophiques du président Mao pour transformer le monde objectif et le monde subjectif, et dans son profond sentiment prolétarien envers les sourds-muets que le camarade Tchao Pou-yu a puisé le courage de se consacrer à la pratique pour arriver à cette fin. Il a également obtenu des résultats remarquables dans les traitements d’autres maladies, toujours par l’acupuncture.

Cette brochure présente en outre les exploits émouvants du camarade Tchao Pou-yu, auteur de ces réalisations qui, loin de se laisser griser par le succès, tient à prendre la dialectique matérialiste pour guide de son action afin de poursuivre ses enquêtes et ses progrès.]


La connaissance authentique de la pratique

« L’arbre de fer se recouvre de fleurs » et « les sourds-muets retrouvent la parole » sont des proverbes chinois pour décrire l’impossible. En réalité, personne n’avait jamais entendu les sourds-muets parler ou chanter.

Et pourtant, au cours de la Grande Révolution culturelle prolétarienne, l’impossible est devenu possible. Tchao Pou-yu, travailleur sanitaire d’une unité de l’Armée populaire de Libération (A.P.L.) et ses compagnons d’armes ont franchi le « seuil du mutisme » et ont réussi à faire parler les sourds-muets. Ce succès a eu un énorme retentissement, il fut salué partout et largement commenté. Les ouvriers, paysans et soldats considèrent que Tchao Pou-yu et ses camarades ont pu franchir le « seuil du mutisme » parce que, guidés par la pensée-­maotsétoung, ils étaient hardis dans la pratique pour la révolution.

D’autres, cependant, ont prétendu que le jeune Tchao Pou-­yu était un génie, doué d’une intelligence supérieure.

Lequel des deux arguments est juste ?

Laissons parler les faits.

Tchao Pou­-yu s’est engagé dans l’A.P.L. au printemps 1966, alors qu’il venait d’avoir dix-huit ans et n’avait fait que quatre ans d’études intermittentes.

Sans aucune formation professionnelle préalable, il fut affecté dans un dispensaire d’un hôpital militaire peu de temps après son enrôlement. Son travail, consistant à distribuer les médicaments aux malades d’après les ordonnances, était bien simple, mais il eut du mal au début malgré son zèle.

Il trouvait difficile à retenir les noms des médicaments au nombre de quelques centaines. Parfois, il se trompait, ce qui le tourmentait beaucoup. Il se disait : « S’il y avait seulement une panacée qui guérirait toutes les maladies, ce serait merveilleux ! » Une nuit Tchao fit un rêve : Ayant trouvé un chaudron, il y versa toutes les drogues des rayons. Il fit une potion.

A chaque patient qui venait à lui il en donnait une cuillerée et tous se trouvaient guéris. Le lendemain quand il raconta son rêve à ses camarades, ils se mirent à rire. « Comment un type aussi intelligent que toi peut-il avoir une idée si saugrenue ! » dit l’un d’eux. A dire vrai, Tchao Pou­-yu était un garçon brillant, mais ce rêve naïf s’expliquait par son manque d’expérience dans la pratique. Qu’un simple infirmier comme lui soit parvenu à une telle réalisation dans l’histoire de la médecine est un phénomène qui s’explique fort bien si l’on suit le chemin plein de vicissitudes parcouru par Tchao, pour passer de son rêve de la fameuse « panacée » au succès remporté en franchissant le « seuil du mutisme ».

En 1967, lorsque la tempête de la Grande Révolution culturelle prolétarienne balaya la ligne révisionniste contre-révolutionnaire de Liou Chao-chi dans le domaine de l’hygiène et de la santé publique, la grande directive du président Mao : « Axer le travail médical et sanitaire sur les régions rurales » fut publiée, créant un élan d’enthousiasme sur ce front.

Pour mettre résolument en pratique cette directive, Tchao Pou­yu et ses camarades formèrent une équipe médicale et, avec leurs trousses et les œuvres du président Mao, allèrent établir un dispensaire dans un quartier d’ouvriers et d’employés de la ville de Liao­yuan. En contact direct avec les masses, Tchao Pou­-yu constata avec indignation les effets néfastes de la ligne révisionniste contre-révolutionnaire de Liou Chao-­chi sous le règne de laquelle beaucoup de travailleurs n’avaient pu être soignés convenablement. « Je suis un travailleur sanitaire du prolétariat, se dit-il.

Il est de mon devoir de soulager les souffrances de mes frères de classe. Mais que puis-­je faire sans connaissances médicales ? Eh bien, j’en acquerrai en travaillant. Le savoir n’est pas inné. » Il commença par apprendre l’acupuncture [L’acupuncture est une méthode de guérison traditionnelle consistant à insérer des aiguilles en des points cutanés déterminés sur le corps. La manipulation des aiguilles excite les nerfs et amène la guérison des malades.] auprès de ses collègues. Chaque fois qu’on lui avait appris à localiser un point, il le notait dans un cahier, le cherchait sur son propre corps et se piquait pour éprouver les effets. Au bout d’un certain temps, il parvint à connaître plusieurs dizaines de points d’acupuncture.

Fort de ces notions élémentaires, il réussit à guérir un vieil ouvrier nommé Wang Kouei, qui avait souffert de l’arthrite des jambes pendant une dizaine d’années.

Ce premier résultat encouragea beaucoup Tchao Pou-yu. La connaissance vient de la pratique, se dit-­il. Nous ne possédons pas la technique, nous l’apprendrons.

Il en sera de même pour traiter les maladies. Par la suite, nombreux furent ceux qui venaient trouver Tchao Pou-­yu pour se faire soigner par l’acupuncture.

Souvent, il ne rentrait à la caserne que tard dans la nuit. Quelquefois ses doigts tremblaient de fatigue au point qu’ils ne pouvaient pas tenir les baguettes aux repas ; ils étaient tout en sang à force de manipuler les aiguilles ; il y collait un bout de sparadrap et n’en continuait pas moins à soigner les malades. De toute cette période, il n’arrêta pas d’étudier les manuels de médecine, si bien qu’il fut rapidement à même de pouvoir guérir un grand nombre de maladies courantes et certaines maladies plus compliquées par l’acupuncture.

La pratique de Tchao Pou-yu et ses camarades au dispensaire durant tout ce laps de temps peut être considérée comme les préparatifs, sur le plan idéologique et technique, de la bataille pour franchir le « seuil du mutisme ».

En mars 1968, Tchao et ses camarades de l’équipe médicale se rendirent à l’Ecole des Sourds-muets de la municipalité de Liaoyuan.

Dès leur arrivée, les membres de l’équipe furent entourés par des enfants qui s’exprimaient en gesticulant.

Une élève nommée Wang Ya­kin saisit Tchao Pou-yu d’une main et, de l’autre, désigna d’abord un portrait du président Mao dans le petit livre rouge : Citations du président Mao Tsé-toung, puis sa propre bouche, et ne put que proférer des « A… A… » montrant combien elle aurait voulu pouvoir crier « Vive le président Mao ! » Ensuite, après avoir pointé de son index l’insigne à l’effigie du président Mao que le jeune Tchao portait à la poitrine, elle se toucha l’oreille pour signifier qu’elle voulait entendre la voix du président Mao.

Son infirmité l’ayant privée de tout moyen de s’exprimer, les larmes lui vinrent aux yeux. Tchao, très ému, en pleura lui aussi. Un sentiment de classe propre à un combattant prolétarien brûlait dans sa poitrine.

Dans l’ancienne société pire que l’enfer, se dit-­il, les travailleurs étaient refoulés au bas de l’échelle sociale, ils avaient une bouche, mais il leur était interdit de parler et d’ailleurs à qui parler ; dans la société nouvelle, les travailleurs sont devenus maîtres, ils peuvent parler et chanter à leur guise.

Cependant les sourds-muets n’ont pas le bonheur de jouir de ces droits.

Y a-­t-­il douleur plus vive que d’avoir une bouche, et de ne pouvoir crier « Vive le président Mao », d’avoir des oreilles, et de ne pouvoir entendre la voix du président Mao ?

Tchao Pou-yu et ses camarades firent alors la promesse solennelle au président Mao de tout essayer pour franchir le « seuil du mutisme », apporter la sollicitude du président Mao aux sourds-muets, sa voix à leurs oreilles et leur permettre d’exprimer leurs sentiments. La nouvelle que les hommes de l’Armée populaire de Libération allaient traiter le mutisme se transmit de bouche en bouche et se répandit vite dans toute la ville de Liaoyuan.

L’on se mit à espérer qu’un jour les sourds-muets retrouveraient la parole et que l’arbre de fer se recouvrirait de fleurs. Cependant certaines « célébrités » et « sommités » bourgeoises de la médecine se montraient sceptiques quant au succès de l’entreprise : « J’ai étudié la médecine pendant des dizaines d’années, je n’ai jamais entendu dire qu’avec une simple aiguille on puisse guérir les sourds-muets. »

« Si c’est si simple que cela, alors le soleil peut bien se lever à l’ouest. » «Dans les livres étrangers il n’y a pas un chapitre sur le traitement des sourds-muets. »…

Tchao Pou-yu et ses camarades ne se laissaient pas intimider par ces « célébrités » et « sommités » qui déclaraient la mutité « incurable ».

Ils commencèrent par faire des enquêtes minutieuses. Un jour, Tchao rendit visite à la famille de Wang Ya­kin. Le père de cette dernière, Wang Yu­hai, lui raconta l’histoire de sa famille. Mineur de métier, il avait été entraîné, il y a plus de trente ans, par un capitaliste à quitter son pays natal, la province du Chantong,pour travailler comme coolie dans la Mine de Liaoyuan contrôlée par l’impérialisme japonais.

Son dos se voûta, il se blessa aux jambes, et faillit être jeté dans le « four crématoire ». C’est le président Mao qui l’avait sauvé de cet enfer et lui avait donné une vie heureuse.

Il se maria à 40 ans passés, et Wang Ya­kin était sa fille unique. Malheureusement, à l’âge de trois ans, après une grave maladie, elle devint sourde-muette.

Wang Yu­hai l’emmena dans un grand hôpital pour consulter un « médecin connu », mais ce médecin lui dit froidement : « Autant vouloir faire revivre un arbre desséché, la surdi-­mutité est incurable même à l’étranger ; rien à faire. »

Sur ce, ils furent éconduits. Par la suite, Wang Yu­hai fit le tour des hôpitaux avec sa fille, mais partout la réponse avait été la même.

Tchao Pou-yu rendit aussi visite à un autre élève nommé Tsiuan Teh­hsi et apprit qu’il avait connu à peu près le même sort. Refusé par les hôpitaux, il entendit finalement prononcer contre lui la sentence de « maladie incurable ».

Les enquêtes qu’il fit pendant plusieurs jours dans les différentes familles prouvèrent que ces enfants sourds-muets n’avaient reçu au fond aucun traitement sérieux et, dans les dossiers des hôpitaux, il ne put relever aucun cas de traitement de la surdi-mutité. Quelle conclusion tirer de tout cela ?

Tchao Pou­yu commença par étudier l’enseignement du président Mao : « Si l’on veut acquérir des connaissances, il faut prendre part à la pratique qui transforme la réalité.

Si l’on veut connaître le goût d’une poire, il faut la transformer : en la goûtant. » (De la pratique)

Comment pouvez-vous savoir si une poire est sucrée sans la goûter ?

De même, comment peut-on qualifier la surdi-­mutité d’« incurable » sans même avoir essayé de la traiter.

Il s’agissait donc d’une « maladie qu’on a refusé de guérir » plutôt que d’une « maladie inguérissable ». Tchao fit part de ses idées à ses camarades, ce qui redoubla leur confiance dans la réussite de leur entreprise.

Ces « petits hommes » qui respectent la pratique lancèrent un défi aux « grands hommes » idéalistes.

Tchao et ses camarades tout en consultant un traité d’acupuncture essayèrent d’abord sur eux-mêmes les points indiqués pour la surdi-­mutité. Ils préféraient tenter mille fois les effets des piqûres sur leur propre corps plutôt que d’aller se tromper une fois sur un malade. Sous l’effet des essais répétés leur cou était enflé et leurs oreilles bourdonnaient, leur mâchoire leur faisait mal quand ils mangeaient.

La joue gauche enflait-­elle, ils piquaient la droite… « Pour calmer les souffrances de nos frères et sœurs de classe, nous sommes prêts à endurer toutes les peines et à courir tous les risques », répondaient-­ils à ceux qui, peines pour eux, essayaient de leur faire prendre un peu de repos.

Le camarade Tchao Pou-­yu, après s’être piqué des centaines de fois, acquit une certaine maîtrise de la technique du traitement de la surdi­-mutité par l’acupuncture ; il essaya alors la méthode sur les enfants sourds-muets.

Un jour, après avoir procédé à une séance d’acupuncture sur Wang Ya­kin, il passa derrière son dos et claqua des mains. Immédiatement la jeune fille se retourna, fit un signe de tête et montra du doigt une de ses oreilles pour signifier qu’elle avait entendu.

Tchao Pou-yu recula de quelques pas et claqua encore trois fois des mains, l’enfant tourna encore une fois la tête et étendit trois doigts pour montrer qu’elle avait encore entendu. Quelle joie pour Tchao Pou-­yu et ses camarades, le dur apprentissage aboutissait à un premier succès.

En appliquant ce même traitement, au bout d’un certain temps, les camarades de l’équipe médicale avaient fait recouvrer l’usage de l’ouïe à la plupart des élèves de l’Ecole des Sourds-muets. Un proverbe dit : « Qui n’entend pas, ne s’énerve pas. » Ces enfants qui maintenant pouvaient entendre tous les bruits du monde environnant ne pouvaient cependant parler. Ils étaient bouleversés.

Un matin, Tchao Pou-­yu vit Wang Ya­kin pleurer en cachette derrière une porte ; elle était triste parce qu’elle avait vu les soldats de l’Armée populaire de Libération chanter L’Orient rouge au lever du soleil et réciter les citations du président Mao et qu’elle ne pouvait faire comme eux.

Cela rappela à Tchao Pou-yu qu’après les résultats obtenus dans la guérison de la surdité, des efforts devaient être encore faits pour vaincre le mutisme.

Pourquoi avait-on obtenu des résultats pour guérir les sourds et pas les muets jusqu’ici ? Se demanda-t-­il.

En récapitulant le travail accompli, il conclut que si l’on était allé assez loin en piquant les points situés sur l’oreille pour provoquer de vives réactions, l’on n’avait pas introduit l’aiguille suffisamment en profondeur au point yamen [Le point yamen : le « seuil du mutisme » situé sur la nuque.], le « seuil du mutisme », lequel est peut-être la « porte » menant à la guérison de la mutité ! La médiocrité des effets était probablement due au fait qu’on n’avait pas osé franchir ce seuil. Il décida de faire l’expérience sur lui-même.

Dans le but de trouver des fondements théoriques à son idée, Tchao se mit à feuilleter la littérature médicale.

Il était stipulé dans le Traité universel d’acupuncture [Le Traité universel d’acupuncture : ouvrage important traitant de la théorie de l’acupuncture dans la médecine traditionnelle.], le plus ancien ouvrage du genre, comme dans les publications les plus récentes, jusqu’en 1966, que la profondeur limite à ne pas dépasser pour le point yamen était de 3 à 5 fen [Dans l’acupuncture, la profondeur de l’introduction des aiguilles varie suivant la taille des patients, on utilise les termes tsouen et fen dans la mesure de cette profondeur. Quand un patient forme un anneau en joignant le majeur et le pouce, la distance intérieure entre la jointure du majeur et celle du pouce représente un tsouen, ou dix fen].

Certains auteurs allaient jusqu’à dire que le yamen était un « point interdit », un « point vital », et que l’introduction de l’aiguille à 10 fen de profondeur entraînerait la mutité. A 15 fen de profondeur, c’était la mort.

Est-ce que ces conclusions étaient justes ? Mille ans durant, cette limite de 3 à 5 fen n’avait point été changée.

Tchao Pou-­yu se rappela l’enseignement du président Mao et écrivit à côté de ces chiffres cette parole du président Mao : « Dans les domaines de la lutte pour la production et de l’expérimentation scientifique, l’humanité ne cessera jamais de progresser et la nature de se développer, jamais elles ne s’arrêteront à un certain niveau.

Aussi l’homme doit-­il constamment faire le bilan de son expérience, découvrir, inventer, créer et progresser. Les points de vue inspirés par l’immobilisme, le pessimisme, le sentiment d’impuissance, l’orgueil et la présomption sont erronés. » Quelles énergiques critique et réfutation de l’idéalisme et de la métaphysique ! Tchao Pou-yu réfléchissait longuement sur cette question de la profondeur maxima.

A une réunion de discussion de l’équipe médicale il exposa ainsi ses idées : «Les livres d’acupuncture tant anciens que modernes disent que l’aiguille ne doit pas dépasser 5 fen au point yamen. Cela veut dire que la limite a été dépassée par nos prédécesseurs dans leur pratique, mais que des accidents se sont produits. Du fait des restrictions imposées par l’idéologie de classe et le stade de développement des sciences de leur époque, ils ne pouvaient pas tirer une conclusion scientifique de leurs expériences ni trouver la cause réelle de leurs échecs afin de continuer leur expérimentation, ils ont battu en retraite jusqu’à cette limite de 5 fen qui ne présente aucun danger. Du point de vue physiologique, 5 fen n’est pas assez profond pour provoquer une réaction sensible.

Nous, les combattants prolétariens, nous voulons délivrer nos frères de classe de leurs souffrances. Nous devons aller de l’avant et ne pas nous laisser arrêter par cette profondeur limite. » C’est à cette réunion que Tchao Pou-yu proposa au chef de l’équipe Fang Ying­teng de tenter l’expérience sur lui-même. Fang, en docteur expérimenté, fut beaucoup impressionné par l’argumentation de Tchao Pou-­yu, mais en tant que chef d’équipe, il devait y réfléchir doublement.

Il soutint donc la proposition de Tchao Pou-­yu tout en soulignant la nécessité de discuter des mesures de sécurité concrètes. La nuit était très avancée quand la discussion se termina. Tchao Pou-yu rentra sans se presser de l’Ecole des Sourds-Muets au dispensaire de l’armée.

Assis dans la salle de physiothérapie, il fut assailli par mille images : la porte de l’hôpital fermée aux ouvriers et paysans malades, des visages d’enfants sourds-muets tourmentés qui n’arrivaient pas à crier « Vive le président Mao ! » Il sentit sa responsabilité peser lourdement sur ses épaules. Il se rendit compte de la signification d’une insertion profonde au point yamen et de la nécessité de dépasser cette fameuse « zone interdite ». Il décida de ne plus attendre, ne serait-ce qu’un jour, qu’une minute.

Résolument il prit l’aiguille d’acier et se piqua au point yamen. A 5 fen de profondeur, réaction médiocre ; à 10 fen, sensations plus fortes ; à 15 fen, effets tellement violents que ses deux mains, comme parcourues par un courant électrique, n’arrivaient plus à manier l’aiguille.

Abandonner ou continuer ?

Tchao savait bien qu’en allant plus loin, il susciterait de meilleurs effets mais aussi qu’il exposait sa vie.

Si je perds la parole et risque ma vie, c’est pour appliquer la ligne du président Mao en matière d’hygiène et de santé publique, pensa Tchao, seulement, s’il m’arrive malheur, comment faire pour que les camarades puissent bénéficier de mon sacrifice ? Là-dessus il ouvrit son carnet, nota la localisation du point d’acupuncture, son angle, sa profondeur et les sensations qu’il avait éprouvées à toutes les profondeurs de l’insertion. Puis il écrivit la parole suivante : Camarades, je suis en train de piquer le point yamen en profondeur.

L’aiguille atteint 15 fen et je commence à avoir des réactions violentes.

Je vais continuer. Si je viens à mourir, il faut que vous tiriez la leçon de mon échec et continuiez les recherches.

Nous devons absolument pénétrer dans la « zone interdite » afin que les sourds-muets puissent entendre la voix du président Mao et crier « Vive le président Mao ! »

En se récitant «s’armer de résolution, ne reculer devant aucun sacrifice et surmonter toutes les difficultés pour remporter la victoire », il reprit l’aiguille qu’il poussa en profondeur. Tout à coup il sentit un gonflement au niveau du cou, une brûlure dans la gorge et un engourdissement dans tous les membres. Son corps fut comme traversé par un courant électrique. Réaction idéale enfin trouvée !

Il sortit l’aiguille, constata qu’elle avait atteint 25 fen de profondeur, et sauta de joie.

Ensuite il répéta l’expérience et éprouva à chaque fois les mêmes effets. Les « petits hommes » avaient vaincu les « grands hommes », le matérialisme avait triomphé de l’idéalisme et la dialectique de la métaphysique.

Grâce à son esprit révolutionnaire de se sacrifier pour le peuple et au terme d’une expérimentation répétée, Tchao Pou-­yu avait réussi à dépasser les limites établies par ses prédécesseurs et à acquérir de véritables connaissances sur l’insertion en profondeur au point yamen.

Le lendemain de grand matin, Tchao rendit compte de son expérience à ses supérieurs, qui le félicitèrent et lui accordèrent un ferme soutien.

A son exemple, les autres membres de l’équipe médicale firent la même expérience sur leur propre corps pour maîtriser cette nouvelle méthode.

Tchao l’appliqua tout d’abord à Wang Ya­kin qui, après trois séances jour pour jour, arriva à crier pour la première fois de sa vie à 17 ans : « Vive le président Mao ! »

Grâce aux efforts déployés par tous les membres de l’équipe médicale, 157 sur les 168 élèves de l’Ecole des Sourds-Muets de Liaoyuan ont recouvré l’usage de l’ouïe, 149 ont réussi à parler. Ce « monde du silence » a commencé à s’animer. Les enfants guéris chantèrent :

La vigne dépouillée étale un nouveau feuillage ; L’arbre de fer se recouvre de fleurs ; Grâce au président Mao, notre grand dirigeant ; Les sourds-muets retrouvent la parole.

Ce chant composé par les sourds-muets guéris et le chemin parcouru pour franchir le « seuil du mutisme » nous font voir clairement que ce succès n’est pas dû au « génie » d’un certain « héros », mais à la pratique entreprise par les combattants prolétariens sous la conduite de la pensée-­maotsetoung, à l’esprit révolutionnaire de ne craindre ni les épreuves ni la mort. C’est dans la pratique pour franchir le « seuil du mutisme » que la sagesse et le talent de ces combattants sont nés et se sont développés.

Quand les succès de Tchao Pou-yu et de ses camarades furent publiés dans la presse, une «sommité » bourgeoise qui faisait des recherches dans ce domaine depuis une dizaine d’années sans aucun résultat dit dédaigneux : « Il y a beau temps que j’ai étudié tous ces points d’acupuncture ! »

« Oui, peut-être, répliqua quelqu’un, mais avez-vous essayé une seule piqûre sur vous-même ? »

La sommité en eut le bec cloué.

Il en est souvent ainsi, la vérité appartient toujours à ceux qui osent se lancer dans la pratique et y excellent, tandis que ceux qui rejettent la pratique par crainte de payer trop cher ne trouveront jamais la porte de la vérité.

Né du peuple et grandi en son sein

Au printemps 1969, Tchao Pou-yu vint à Canton avec l’équipe de propagande artistique de l’Ecole des Sourds-­Muets de Liaoyuan (Nord-­Est de la Chine).

Les jeunes sourds-muets guéris donnèrent une représentation devant les amis étrangers venus à l’occasion de la Foire des articles chinois d’exportation.

Beaucoup parmi ceux-ci exaltèrent cette performance comme un miracle.

Mais qui en était l’auteur ?

Un jour, certains amis étrangers vinrent trouver Tchao Pou-­yu et un journaliste d’Occident lui demanda : Quels sont parmi ces enfants ceux que vous avez guéris vous-même ?

Par mes seuls soins, aucun ! Répondit-­il en souriant mais avec sérieux ; la «zone interdite » de la surdi-mutité a été franchie en se guidant sur la pensée-­maotsétoung et la sagesse des masses. Ce n’est pas la seule modestie qui poussa Tchao Pou-yu à parler de la sorte, c’est que, pour répondre correctement à la question de savoir qui a franchi la « zone interdite » de la surdi-mutité, il est parti du point de vue matérialiste de l’histoire.

Tels sont les faits, aucune découverte technique et scientifique n’est à mettre au crédit du mérite personnel, c’est le résultat de la longue pratique d’un grand nombre de personnes.

L’acupuncture est une méthode importante qui a été employée depuis des milliers d’années dans la lutte contre les maladies par le peuple travailleur dont elle résume les riches expériences pratiques.

La nouvelle méthode du traitement par l’acupuncture a été créée par les travailleurs sanitaires chinois sur la base de l’ancienne pendant la Grande Révolution culturelle prolétarienne et au cours du traitement médical des ouvriers, paysans et soldats. S’ils n’étaient pas partis de cette base, comment Tchao Pou-yu et ses compagnons d’armes auraient-ils eu l’idée de guérir la surdi-mutité par l’acupuncture et surtout de piquer le point yamen en profondeur ?

Ils ont travaillé en collectivité dans leurs recherches pour franchir la « zone interdite » du mutisme.

« C’est cette collectivité, dit Tchao Pou­yu, qui m’a donné le courage et l’intelligence ; si j’avais été seul ; j’aurais peut-être reculé devant de si nombreuses difficultés. » Et derrière cette collectivité se tiennent des milliers et des milliers de personnes ainsi que notre grand Parti.

Dans la lutte pour franchir le «seuil du mutisme », les habitants et le Comité révolutionnaire de la municipalité de Liaoyuan, les instituteurs de l’Ecole des Sourds-Muets et les parents des élèves ont beaucoup contribué au succès ; les jeunes sourds-muets aussi ont apporté contribution, quoiqu’ils fussent objets du traitement ; on peut même dire qu’ils comptent parmi les créateurs du miracle. Tchao Pou-yu n’oubliera jamais qu’au commencement, lorsque l’équipe médicale arriva à l’école, les ennemis de classe affichaient une grande arrogance : ils tentèrent de tirer profit de l’infirmité des élèves sourds-muets pour duper certains d’entre eux dans l’intention de chasser l’équipe.

A ce moment crucial, c’est Wang Ya­kin et Tcheng Ki­yun, deux élèves, qui se dressèrent pour dénoncer le complot des ennemis de classe.

Une fois le traitement commencé, certains enfants, par crainte d’avoir mal, se cachaient sous la table pour échapper à la piqûre, c’est Wang Pao-tsai et quelques autres élèves qui prirent l’affaire en main et énoncèrent par signes l’enseignement du président Mao : « S’armer de résolution, ne reculer devant aucun sacrifice et surmonter toutes les difficultés pour remporter la victoire. » Puis Wang Pao-tsai demanda à Tchao Pou-yu de le piquer le premier pour que ses camarades se rendent compte qu’il n’y avait pas de quoi s’effrayer. Ceux-ci se rassurèrent et finirent presque par se bousculer pour recevoir plus vite la piqûre.

Sans leur concours, comment aurait-on pu franchir le « seuil du mutisme » ?

Ces faits frappèrent Tchao Pou-yu et le convainquirent que les activités d’un individu quel qu’il soit ne peuvent se séparer des activités de sa classe.

Le rôle principal dans la pratique est tenu par les masses. Les masses, c’est la mer, tandis que l’individu n’est qu’une goutte d’eau dans la mer.

Des milliers et des milliers de gouttes d’eau forment une mer houleuse. Un individu ne peut jouer un rôle que s’il s’allie à la masse.

Après avoir réalisé que « les masses sont les véritables héros », Tchao Pou-yu accorda une plus grande attention à s’assimiler la sagesse des masses, au cours de la pratique médicale, et à apprendre auprès de tous ceux qui ont de l’expérience pratique afin d’enrichir ses propres connaissances et d’accroître son aptitude à servir le peuple.

Il arrive souvent qu’un médecin réussisse à guérir un malade là où beaucoup d’autres ont échoué. Naturellement tout le monde admire ce médecin, mais quelle attitude lui-même doit-­il prendre ?

Quelle appréciation doit-­il porter sur lui et sur les autres médecins qui n’ont pas guéri le patient ?

Voyons comment Tchao Pou-­yu s’est conduit dans une telle situation.

Une femme souffrait d’une métrorragie fonctionnelle depuis près de dix ans et était de surcroît cardiaque.

Elle reçut les soins de plusieurs vieux médecins pratiquant la médecine traditionnelle sans voir son cas s’améliorer. Finalement, cette femme vint trouver Tchao Pou-yu. C’était la première fois qu’il traitait une maladie aussi complexe, il manquait d’assurance et n’arrivait pas à discerner la source principale du mal, par conséquent, il ne savait par où commencer le traitement.

Cependant il se dit : puisque plusieurs médecins expérimentés ont longtemps soigné la malade, il est clair qu’ils connaissent bien son cas. Il décida donc d’aller les voir.

Un jour de grand vent, Tchao Pou-yu, le visage couvert de poussière, et trempé de sueur, se présenta devant l’un d’entre eux : « Docteur, je viens pour apprendre », dit-­il, et il expliqua le motif de sa visite. Touché de la sincérité de Tchao Pou-yu, le vieux docteur exposa en détail tout ce qui se rapportait à la malade : « Elle a plusieurs maladies, mais il me semble que la métrorragie dont elle souffre depuis longtemps est la source de toutes les autres. Sa santé étant délicate, j’ai dû lui administrer des fortifiants en coordination avec l’acupuncture superficielle pour causer un effet de légère excitation. »

Tchao Pou-­yu trouva que l’analyse faite par ce vieux docteur était bien fondée, mais que sa méthode de traitement était trop passive. Fortifier au lieu d’arrêter l’hémorragie utérine ne pourrait changer fondamentalement la santé de la patiente.

Tchao Pou-yu s’apprêta à effectuer une piqûre en profondeur dans le but de causer un effet d’excitation forte pour résoudre tout d’abord le problème de la métrorragie.

Entre-temps, il entendit dire que la femme s’était trouvée mal une fois au cours d’un traitement donné par un autre praticien de la médecine traditionnelle.

Il se rendit chez lui.

« Est-ce qu’on peut pratiquer sur clic une piqûre en profondeur pour causer un effet d’excitation forte ? » lui demanda-t-­il. L’autre répondit : « Absolument pas. Avec sa santé délicate, elle risque fort des complications sous l’effet de la piqûre. » Tchao Pou-yu trouva que les conseils du docteur étaient fort utiles, car ils l’aidèrent à mieux voir les contradictions existant dans les méthodes de traitement : Si l’excitation est faible, on ne peut pas guérir la malade ; le contraire fait craindre des complications. Comment provoquer une excitation forte sans inconvénient ? Tchao Pou-yu se rappela tout à coup un petit incident de sa vie d’infirmier débutant : Une fois, il avait sorti de l’eau froide une bouteille pour médicaments qu’il rinça à l’eau bouillante, la bouteille se brisa.

Ses camarades plus expérimentés trempaient d’abord les bouteilles dans de l’eau tiède un instant avant de verser dessus de l’eau bouillante, et les bouteilles ne craquaient pas.

Tchao Pou-yu en tira la conclusion qu’il fallait procéder graduellement.

Il remania son plan de traitement, décidant d’administrer l’acupuncture de façon progressive en augmentant de jour en jour la profondeur de l’aiguille.

Au terme de ce traitement, la patiente fut enfin guérie. Elle se montra très reconnaissante envers Tchao Pou-­yu qui l’avait débarrassée d’une maladie dont elle souffrait depuis près de dix ans.

Mais Tchao Pou-­yu trouva qu’il lui fallait tout d’abord exprimer sa gratitude aux deux vieux médecins traditionnels.

« C’est vous qui avez guéri la malade, et pas les autres, dirent certains ; c’est donc vous qu’on doit remercier. »

« Ne parlez pas comme ça, intervint Tchao. Quand nous avons réussi à faire quelque chose ou acquis une connaissance, c’est toujours le fruit des efforts de beaucoup de personnes ; c’est comme à la course de relais, celui qui atteint le but n’a pas le droit de prétendre qu’il a parcouru tout le trajet. En ce qui concerne le traitement de cette maladie, je ne fais que recevoir le bâton témoin transmis par de vieux médecins pour continuer la course. Ce sont eux qui m’ont fait voir les contradictions principales dans la maladie et bénéficier de leurs conseils, c’est à travers leurs expériences positives et négatives que j’ai trouvé la méthode de traitement efficace. »

Tel est le combattant prolétarien armé de la pensée-­mao­tsétoung. Quand il a fait quelques contributions pour le peuple, il pense tout d’abord au rôle joué par les masses, alors qu’il considère son propre apport comme une toute petite partie d’un tout. Le camarade Tchao Pou-yu ne s’arrêta pas là dans sa compréhension du problème des relations entre l’individu et les masses.

Au cours de la pratique médicale, Tchao Pou-­yu soignait le peuple, et le peuple le traitait comme un des siens avec chaleur. Au commencement, Tchao Pou-yu en fut très ému, il comprenait bien ces sentiments.

Mais de telles manifestations de sympathie qui se répétaient si souvent l’entraînèrent à de mûres réflexions : les masses me sont reconnaissantes parce que je les ai guéries ; c’est la preuve du profond sentiment de classe des masses populaires et c’est aussi un encouragement pour moi.

Mais il s’agit d’adopter une juste attitude envers tout cela. Et la situation dans son village natal, il y a quelques années, lui revint en mémoire.

A la suite de l’influence néfaste de la ligne révisionniste contre-révolutionnaire de Liou Chao-­chi dans le domaine de l’hygiène et de la santé publique, le village manquait alors de médecins et de médicaments.

Quand un paysan tombait malade, il lui était difficile de faire appeler le médecin. C’est ainsi que s’établit l’état de choses décrit dans cette poésie populaire :

On supplie le médecin de venir en cas de maladie, Même en bonne santé, on respecte le médecin. Si le médecin passe devant votre porte, Vous le priez de venir en hôte.

Et certains médecins acceptaient cette considération sans rougir. Ils pensaient : «Moi, je ne demande rien à personne, et tout le monde vient me prier. » Ils considéraient les soins donnés aux masses comme «une grâce » qu’ils leur accordaient. Ce point de vue est évidemment erroné.

Un fait vint éclairer Tchao Pou-­yu ; ce fut pour lui une sérieuse leçon qui le débarrassa de ses vieilles conceptions et lui fit acquérir une connaissance toute nouvelle.

Début 1970, Tchao Pou-­yu vint camper avec son unité dans une région montagneuse.

Ils cantonnèrent au pied de la montagne Woulong où se trouve une brigade de production.

Dans la journée Tchao se livrait à un entraînement intense ; d’autre part, très tôt, le matin et dans la soirée, portant sur lui sa trousse médicale et bravant le vent et la neige, il faisait sa tournée de consultation chez les paysans pauvres et moyens-pauvres. Un jour, apprenant qu’Oncle Li Siang­yu, un vieux paysan pauvre, qui nourrissait les bêtes, avait mal au bras, Tchao Pou-­yu se rendit chez lui. Cependant par deux fois, il le manqua, les siens disaient qu’il était allé au travail.

Alors, cela ne doit pas être bien grave, se dit Tchao Pou-yu, et il renonça à l’idée d’aller le trouver une troisième fois. Quelques jours après, Tchao Pou-yu rencontra enfin le vieil homme.

Il fut tout surpris de voir que son bras, une fois dégagé de la manche, était tout rouge et brillant du fait de l’enflure ; c’était déjà assez grave.

Oncle, demanda Tchao Pou-­yu impatienté, depuis quand êtes vous dans cet état ? Pourquoi ne vous êtes-vous pas fait soigner plus tôt ?

­Ça fait déjà pas mal de temps, dit le vieil homme souriant, c’était à l’époque où la truie allait mettre bas ; je ne m’en suis pas autrement alarmé.

L’autre jour, la douleur devint insupportable, alors je me suis dirigé vers le dispensaire. Mais, comme je passais près de la porcherie, j’ai vu les porcelets qui attendaient que je leur donne à manger. Pouvais-je les abandonner ? Une fois à la besogne j’ai oublié le bras. Les paroles du vieillard émurent profondément Tchao Pou­yu. Tout en faisant les piqûres, il s’accablait de reproches : Oncle Li persévérait dans son travail malgré son mal, et moi, je me figurais qu’il n’avait rien de grave.

C’est impardonnable !

Rentré de sa tournée d’inspection, Tchao Pou-yu parla de cette affaire au propriétaire de la maison où il habitait, et apprit ainsi qu’Oncle Li s’était abîmé le bras en protégeant les biens de la collectivité.

A soixante ans passés, le vieillard gardait quelques dizaines de cochons pour l’équipe de production.

Une fois, il les faisait paître sur la colline lorsqu’une averse dispersa le troupeau pris de panique.

Il eut beaucoup de peine à le faire rentrer dans la porcherie ; soudain il remarqua qu’il manquait un porcelet.

Sans prendre de repas ni changer de vêtement, il repartit sous la pluie battante, chercha de colline en colline, tombant presque à chaque pas, et c’est ainsi qu’il se foula le bras droit. Quand il finit par retrouver le porcelet, le vieil homme, sous l’effet du froid, avait son bras tout engourdi.

En entendant cette histoire, Tchao Pou-yu se sentit encore plus mal à l’aise et ne dormit pas de la nuit. Combien de héros comme celui-ci avons-nous dans notre grande patrie socialiste, pensait-­il.

Ils s’usent la santé en travaillant sans cesse, pour la révolution et pour le peuple. Ils sont dévoués de tout cœur à l’intérêt public et conduits par l’héroïsme révolutionnaire dans leur lutte contre les maladies.

Si l’on n’apprécie pas ces nobles qualités du peuple révolutionnaire, si l’on ne se pénètre pas de ces pensées et sentiments des masses, il est impossible de bien servir le peuple. Les larges masses des ouvriers, paysans et soldats travaillent nuit et jour pour la patrie et la révolution. Ils font l’histoire et ils créent le monde. Sans leur labeur le monde n’aurait rien. Il est tout naturel que les travailleurs médicaux soient à leur service.

Quand à savoir qui il faut remercier, c’est tout d’abord les masses que les médecins doivent remercier, parce que ce sont elles qui les ont élevés et éduqués.

A partir de cet incident, Tchao Pou-­yu eut conscience de ses insuffisances dans sa révolutionnarisation idéologique ; il décida d’apprendre plus systématiquement auprès des paysans pauvres et moyens-­pauvres. Tout en les soignant, il s’informait des souffrances de leur famille dans le passé et de leurs exploits d’avant-garde. Et il puisait dans ces matériaux pris sur le vif pour son auto-éducation, afin de mieux servir le peuple.

En un peu plus d’un mois Tchao alla chez tous les paysans pauvres et moyens-pauvres de la brigade de production. Partout il trouva l’endroit propice à ses études et chacun était son professeur. Des liens de chair et de sang s’établirent entre lui et les masses. Dans les premiers temps, tout le monde l’appelait « docteur ». Plus tard les vieillards l’appelèrent « fils », et les enfants « oncle ». Tchao apprécia hautement ce changement comme un témoignage de confiance et d’affection des masses à son égard. En tant que médecin du peuple, il ne faisait que son devoir, mais le peuple lui témoignait un sentiment de classe très vif, lui insufflait une noble idéologie et lui donnait une riche nourriture politique. Tout cela était précieux pour lui !

Il écrivit dans son carnet de note personnel les mots suivants :

« Le peuple est comme le sol, je suis comme un jeune plant. Le jeune plant dépérit dès qu’il se détache du sol. Moi, je ne pourrai pas mûrir si je me détache des masses. Je dois prendre racine parmi les masses et y puiser sans cesse la sève. »

En août 1970, Tchao Pou­-yu fut demandé pour former des médecins aux pieds-nus pouvant pratiquer l’acupuncture. Les apprentis l’appelèrent « professeur Tchao » et apprirent auprès de lui avec assiduité.

Ce jeune combattant qui avait toujours été un écolier et n’avait fait que quatre ans d’études devenait maintenant professeur et montait sur l’estrade socialiste.

Voilà un changement radical.

Quelle conduite lui fallait-­il adopter ?

Il n’y avait pas bien réfléchi au début, il était surtout plein d’enthousiasme et très fier.

Ce n’est qu’à travers la pratique de l’enseignement que Tchao acquit une connaissance plus poussée de l’art d’être un bon professeur.

Après que le stage d’étude eut commencé, les étudiants travaillèrent avec zèle jusqu’à en oublier le manger et le dormir ; ils s’entraînèrent au diagnostic tout en essayant de se piquer les uns les autres pour éprouver l’effet des aiguilles, impatients qu’ils étaient de posséder rapidement et à fond la technique de l’acupuncture. En voyant qu’ils se donnaient bien du mal pour se rappeler la localisation des points sur la tête, un vieux camarade se fit raser la tête et alla demander à Tchao Pou-­yu d’y marquer à l’encre rouge les points afin de faciliter l’étude des jeunes.

Tout cela toucha profondément Tchao Pou-­yu. Il dressa le bilan des bonnes idées et expériences et s’empressa de les répandre de sorte que les cours se déroulèrent beaucoup plus rapidement que prévu.

A voir le progrès des étudiants, Tchao se dit : L’histoire a confié aux ouvriers, paysans et soldats la mission de la rééducation des intellectuels, mais pour la mener à bonne fin, les ouvriers, paysans et soldats eux-mêmes doivent aussi persister dans l’étude y compris apprendre de ceux qui font leur rééducation auprès d’eux. Si l’on endossait le lourd fardeau d’être un éducateur sans apprendre auprès des masses, on rétrograderait et on se montrerait indigne d’être un éducateur.

Désormais Tchao s’imposa une conduite plus stricte encore. Une fois, dans la classe, il prononça un mot d’une façon incorrecte. On chuchota. Tchao crut que les élèves n’avaient pas entendu, il répéta à haute voix. On rit.

Après la classe, Tchao Pou-yu comprit enfin qu’il avait fait une erreur de prononciation. Il n’y avait là rien d’extraordinaire, surtout que Tchao Pou-yu n’avait fréquenté que quatre ans l’école. Les élèves oublièrent vite l’incident. Mais Tchao prit la chose au sérieux.

Le lendemain en classe, il corrigea spécialement cette faute et fit son autocritique, ce qui impressionna tellement les étudiants qu’ils écrivirent sur le tableau noir leur résolution d’apprendre auprès de Tchao.

Qu’est-ce qui les avait émus et impressionnés si profondément ? C’est le caractère exceptionnel et la pensée avant-garde d’un combattant prolétarien.

Après l’incident, certains dirent que Tchao avait fait d’un rien une montagne, qu’il prenait les choses trop au sérieux. Tchao répliqua :

« Une faute de prononciation, ce n’est pas grave. Mais oser ou non corriger son erreur en public revient à prendre ou non les masses en considération. Nous, les combattants prolétariens, agissant conformément à la pensée-maotsétoung et aux règles scientifiques, ne pouvons tolérer aucune malhonnêteté ! »

Vers la connaissance de la vérité

II y a plus de trois ans que le « seuil du mutisme » a été franchi.Cette réalisation nouvelle dans l’histoire de la médecine s’est propagée dans tout le pays et a obtenu des résultats très appréciables.

Elle a éveillé aussi dans le monde l’attention d’un nombre toujours croissant de personnes.

Trois ans ont passé, quelles ont été les autres réalisations de ces combattants sanitaires ?

Et surtout qu’est-il advenu de Tchao Pou-­yu qui risqua sa vie par une insertion profonde sur lui-même au point yamen et qui apporta ainsi une contribution remarquable à la mise au point de ce traitement de la surdi-mutité ?

En juin 1969, nous retrouvons Tchao Pou-yu dans une maison d’accueil d’un organisme de Pékin après son retour de Canton où il avait été présenter ses expériences aux amis étrangers venus participer à la Foire des articles chinois d’exportation. Tard dans la nuit, comme il était en train de soigner des camarades habitant la maison d’accueil, un employé de service vint le demander pour un cas urgent.

Tchao Pou­yu s’empressa d’y aller. La chambre était remplie de monde. Le patient était étendu sur son lit ; sous l’effet de la douleur il avait la tête de sueur, sa respiration était oppressée et ses mains grattaient sa poitrine jusqu’à laisser des traces de sang. Tchao traita le patient pour des douleurs de poitrine et des difficultés respiratoires ; il inséra promptement une aiguille comme il avait souvent fait en pareil cas, mais cette fois pas de succès.

L’inquiétude le prit quand il leva les yeux et vit la foule qui le regardait avec anxiété ; la sueur perla à ses tempes. Il se trouvait dans l’embarras lorsqu’il s’aperçut que le malade avait vomi et apprit qu’il avait rendu tous les médicaments qu’on lui avait fait prendre.

Retrouvant son sang-froid, Tchao Pou-yu se dit : J’ai fait un faux diagnostic. C’est l’estomac qui est malade, non la poitrine.

Après de minutieuses analyses, il conclut qu’il s’agissait d’un spasme gastrique aigu ; il inséra donc une aiguille dans l’abdomen pour la stimulation d’un mouvement violent de l’estomac qui mit rapidement fin à la douleur.

Le spasme gastrique est une maladie commune peu difficile à traiter que Tchao Pou-yu avait eu maintes fois l’occasion de soigner.

Pourquoi cette fois-­ci avait-­il eu tant de peine à établir son diagnostic ? Tchao Pou-yu ne dormit pas cette nuit-­là, bien décidé à tirer leçon de son erreur. Après mûre réflexion, il arriva à la conclusion qu’il n’avait pas fait d’enquête assez minutieuse en tenant compte de tous les facteurs et s’était laissé tromper par l’apparence. Mais pourquoi ce manque d’enquête ?

Tchao ne trouva la réponse que plus tard lorsqu’il prit part à une conférence nationale sur la santé publique en tant que délégué spécial des rangs des ouvriers, paysans et soldats.

Là, il écouta les rapports faits par les dirigeants du Comité central et par beaucoup de délégués, et en fut très impressionné. Comparant les exploits avant-garde de ces délégués aux siens, il put mesurer ses propres insuffisances.

Ce qu’il vit et entendit à la conférence élargit son horizon. Dans la médecine, se dit-il, les connaissances n’ont pas de borne, les problèmes sont nombreux.

Le Parti et le peuple attendent beaucoup des travailleurs médicaux, et nombreux sont ceux qui ont déjà à leur actif de remarquables contributions dans ce domaine.

Tout comme le président Mao nous l’enseigne : « Le mouvement de transformation, dans le monde de la réalité objective, n’a pas de fin, et l’homme n’a donc jamais fini de connaître la vérité dans le processus de la pratique. » Je m’étais jusque-­là enfermé dans un cercle étroit où je plaçais mes succès, sans vouloir réfléchir aux choses inconnues de ce vaste monde.

Voilà où réside le problème et la raison pour laquelle j’ai tant sué ce soir­là pour guérir un simple spasme gastrique.

Une fois Tchao Pou-yu traita par l’acupuncture une femme qui, âgée d’une soixantaine d’années, était devenue sourde. Tchao avait guéri beaucoup de sourds et acquis une certaine expérience dans ce domaine, mais cette fois-ci le traitement ne donna aucun résultat. Quelqu’un lui dit en guise de consolation : « La surdité et la faiblesse de la vue sont courantes chez les personnes âgées, c’est sans remède. »

La patiente, elle, l’encourageait : « Faites ce que vous pouvez, ne soyez pas en peine pour le résultat. »

Mais Tchao Pou­yu se disait :

« En tant que travailleur médical révolutionnaire, je ne dois nullement considérer ma responsabilité comme diminuée par ces paroles de consolation du patient. Une difficulté non résolue, c’est peut-être des milliers de personnes qui en souffriront. Est­ce que tous les cas de surdité chez les personnes âgées sont dû à la sénilité, donc incurables ? Je dois étudier ceci plus à fond. »

Un jour, la patiente marchait dans la rue accompagnée de Tchao lorsqu’un coup de klaxon retentit derrière eux. La vieille femme tourna la tête comme si elle avait entendu quelque chose. Il y a de l’espoir, pensa Tchao Pou-yu, ses nerfs auditifs ne sont pas complètement morts.

Il réfléchit alors au traitement qu’il avait donné : II n’avait pas pénétré au fond du problème ni étudié les particularités de la contradiction présentées par ce cas.

Il n’avait pratiqué que l’insertion douce en tenant compte seulement de l’âge et de la faiblesse physique de la vieille femme, et de sa mauvaise adaptation à l’acupuncture ; il avait oublié que l’âge fait perdre la sensibilité à l’acupuncture et demande justement une stimulation forte.

Une insertion forte pour les jeunes pouvait être faible pour les gens âgés, et une insertion faible pour les jeunes, sans effet sur les gens âgés.

Tchao Pou-yu opta donc pour l’insertion forte, quelquefois même plus forte que pour les jeunes gens.

Le traitement s’avéra efficace à chaque séance.

En moins d’une semaine, la vieille femme guérit d’une surdité datant de trois ans. Plus tard en parlant de ce cas, Tchao Pou-yu eut une pensée pénétrante :

« Le développement des techniques médicales ne peut se détacher de la pratique, quand j’avais un maigre bagage de connaissances, j’attachais beaucoup d’attention à la pratique, mais quand j’en eus acquis un peu, consciemment ou non, je négligeai la pratique aux dépens du peu de connaissances que j’avais. Les expériences accumulées dans la pratique sont précieuses, mais elles ne sont utiles qu’après avoir été vérifiées, révisées et perfectionnées dans une nouvelle pratique. La substitution des expériences d’hier à la pratique d’aujourd’hui, ce qui revient à la substitution de la connaissance d’hier à celle d’aujourd’hui sont des plus nuisibles dans le travail médical. »

Tchao Pou-­yu parle ici en tant que médecin, mais ses pensées sont en même temps une réfutation énergique de Liou Chao­-chi et autres escrocs politiques du même genre qui préconisaient la théorie absurde de « la connaissance complète en une seule étape ». Les succès et défaites rencontrés au cours de la guérison d’une maladie peuvent devenir un obstacle pour de futurs progrès. Tchao Pou-yu, pour sa part, osa dépasser les expériences déjà acquises, et en outre surmonter les échecs et les revers dans son avance vers la connaissance de la vérité. En 1970, un vétéran révolutionnaire demanda à Tchao Pou-yu de traiter sa hernie discale lombaire.

C’était la première fois que Tchao Pou­yu appliquait l’acupuncture à cette maladie, mais pour ce camarade il acquiesça sans hésitation à la demande du malade.

Pendant plusieurs jours, le traitement s’avéra inefficace, alors on l’exhorta à y renoncer pour éviter tout déboire.

Tchao Pou­yu ne se tint pas pour battu, comme auparavant, lorsqu’il rencontrait des difficultés, il puisa sa force et son courage dans les œuvres du président Mao et notamment dans cet enseignement : « La défaite est la mère du succès et… les leçons tirées des défaites sont à la base des victoires futures. » Tchao Pou-yu se dit : Dans le travail médical, comme dans tout autre travail révolutionnaire on se heurte toujours à des difficultés quand l’expérience n’est pas encore généralisée.

Les succès ne sont possibles qu’après plusieurs échecs. Un combattant révolutionnaire ne craint pas les défaites mais sait y trouver des possibilités de succès et changer les échecs en succès. Tchao Pou-­yu discuta donc sérieusement du cas avec ses camarades. On lui posa la question suivante : Le traitement par l’acupuncture consiste à exciter les nerfs par l’aiguille. Mais dans le cas de la hernie discale lombaire, le nerf sciatique est comprimé. Le traitement par l’acupuncture seul peut­il être suffisant ? Cette question fit voir clair à Tchao Pou­-yu. Les choses dans le monde sont complexes, pensa-­t-­il, n’adoptons pas devant elles une attitude simpliste.

Après une étude sérieuse, il modifia le plan du traitement en combinant l’acupuncture avec les massages.

Et ce cadre révolutionnaire recouvra pour l’essentiel la santé. Mais peu de temps après, notre vétéran alla travailler dans une région montagneuse où il fit une rechute par excès de fatigue. Sa jambe droite se paralysa.

Des médecins proposèrent une opération, mais le patient préféra l’acupuncture et eut de nouveau recours à Tchao Pou­-yu. La situation avait changé, mais Tchao Pou-yu traita le patient par la même méthode qu’autrefois ; le résultat fut mauvais. Cette nouvelle défaite ne le découragea pas.

Une analyse minutieuse lui fit comprendre qu’avec une seule insertion, la sensation ne pouvait être transmise dans la jambe paralysée du patient. Tchao eut l’idée de pratiquer l’acupuncture par «relais », il appliqua d’abord une aiguille à la hanche, une autre sur la fesse et la dernière à la cuisse.

La sensation fut immédiatement transmise jusqu’à la pointe des pieds.

Très vite le malade recouvra la santé, la paralysie de la jambe disparut si bien qu’il marche normalement à présent. Plus tard, on demanda à Tchao Pou-­yu : «Vous avez réussi à guérir les gens de maladies incurables. Quel est votre secret ? » Tchao Pou-­yu répondit : « II n’y a pas de secret, je me contente de faire ce que le président Mao recommande à un combattant révolutionnaire consciencieux : réfléchir beaucoup devant les problèmes. »

Réfléchir beaucoup est devenu une habitude de Tchao Pou-­yu. Dans la pratique médicale, il analyse souvent les problèmes à la lumière de la pensée philosophique du président Mao. Quand il formule une idée, il la vérifie dans la pratique. S’il réussit, il fait le bilan de ses expériences ; s’il échoue, il en tire une leçon. Son esprit révolutionnaire le pousse sans discontinuer à explorer, à percer les mystères de la science médicale. Il accorde une importance spéciale à la réflexion. Il dit : « Quand un médecin apprend à penser selon la conception philosophique du président Mao, il peut transformer une maladie incurable en curable et alléger les souffrances de nos frères de classe.

S’il ne réfléchit pas profondément, il agira en aveugle, et ne viendra même pas à bout des maladies guérissables, ainsi aggravera-­t-­il les souffrances de nos frères de classe. On ne peut attendre de tels médecins ni découvertes ni innovations. Réfléchir beaucoup ou ne pas réfléchir relève du sentiment de classe. »

Une fois, Tchao Pou­yu était en tournée médicale. Une femme vint le trouver pour des névralgies qui la tourmentaient depuis vingt ans.

Au cours des crises, la douleur la prenait en vingt endroits du corps, elle avait le vertige et sa vue se troublait.

Elle avait fait le tour des hôpitaux et reçu de multiples soins sans obtenir aucune amélioration.

Après une consultation minutieuse, Tchao Pou­yu découvrit que les points douloureux situés en une vingtaine d’endroits sur le corps étaient symétriques. Tchao Pou­yu diagnostiqua une ataxie du système nerveux central. Un hôpital avait donné précédemment le même diagnostic, mais n’avait pas soigné la maladie à sa racine même.

Les docteurs avaient seulement voulu calmer les douleurs et prescrit des analgésiques, le traitement par l’acupuncture aux endroits douloureux et la stimulation prolongée en reliant les points avec les fils d’intestin de mouton, puis des injections de tissu embryonnaire, mais rien n’y fit.

Une fois, au cours d’une crise, le docteur lui avait demandé où elle avait le plus mal, elle répondit que c’était à deux dents. Le docteur ordonna d’extraire ces deux dents. Mais les douleurs ne furent pas atténuées pour autant.

Tchao Pou-­yu réalisa que les remèdes palliatifs n’étaient d’aucun secours.

Comme toutes les choses ont un lien interne, ce n’est qu’en s’attaquant à la cause fondamentale que la maladie peut être guérie. Il décida d’insérer une aiguille au point nerveux central. La patiente fut surprise et demanda :

­ Pourquoi me piquez­vous là où je n’ai pas mal, et non là où j’ai mal ?

Tchao Pou-­yu expliqua :

­Le système nerveux de l’homme est comparable à un arbre. Le centre nerveux est la racine. Les feuilles se dessécheront si la racine est malade. Si l’on arrose les feuilles qui jaunissent au lieu de la racine, les feuilles se détacheront. Vos deux dents arrachées, c’est tout comme les feuilles emportées par l’eau. Votre maladie est due à un mauvais fonctionnement du centre nerveux, c’est donc là que l’aiguille doit être insérée.

La patiente, contente de ces explications, se laissa soigner. Deux séances de piqûres lui apportèrent déjà un certain soulagement. Depuis plusieurs années, dans ses progrès sur la voie de la connaissance, Tchao Pou­yu a avancé à pas rapides et assurés. Quelle distance a­t­il parcourue ?

Comment considère­t­il ses progrès ?

Le 5 mars 1971, Tchao Pou-­yu prit part à une réunion commémorative en l’honneur du camarade Lei Feng, organisée par une unité de l’Armée populaire de Libération.

Il étudia à nouveau la brillante inscription du président Mao, lut le journal et les exploits de Lei Feng qui a servi le peuple entièrement et totalement, écouta les rapports des différentes unités sur les autres camarades avant-garde, tout cela l’émut beaucoup. A se comparer à Lei Feng, il trouva qu’il était encore loin de l’égaler au point de vue idéologique et de sa contribution au peuple.

Un cadre dirigeant, suivi d’un jeune homme, s’avança alors vers lui et lui dit en souriant : «Camarade Tchao Pou-­yu, ce camarade est malade… » Tchao Pou-­yu regarda le jeune homme ; il était plein d’ardeur juvénile, mais présentait une main anormale, trois fois plus grande que l’autre. Tchao Pou-­yu n’avait jamais vu un tel cas. Il prit cette main, la caressa doucement et la regarda en silence.

Comme il aurait voulu être utile à ce frère de classe ! Mais il ne savait pas encore quelle pouvait bien être cette maladie. Le cadre dirigeant regarda longuement Tchao Pou-­yu comme s’il avait un flot de paroles à lui adresser, mais il dit simplement : « Camarade, je ne te demande pas de guérir ce jeune homme, je viens te montrer son cas. »

Et ils s’en allèrent.

Tchao Pou­yu les suivit des yeux jusqu’à ce qu’il les perdit de vue. Cet incident le fit réfléchir.

Il comprit l’intention du cadre dirigeant qui avait voulu qu’il sache que d’innombrables inconnues existent dans le monde. Le chemin conduisant à la vérité est interminable. Il n’y a lieu pour personne de s’enorgueillir.


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