Tous ceux qui s’intéressent de manière plus ou moins régulière à l’actualité, auront relevé que dix-neuf fusillades, pour la plupart liées au trafic de drogue, ont été recensées durant l’année écoulée en Région bruxelloise. Les bruits de balles ont ainsi retenti dans neuf communes différentes de l’Agglomération, les plus touchées étant Bruxelles-centre, Anderlecht, Ixelles, Saint-Gilles et Molenbeek. Au total, ces fusillades ont provoqué seize blessés et sept décès.

Dans le même temps, sur les 220 tonnes de cocaïne saisies dans les ports de départ sud-américains, principalement d’Equateur et de Colombie, une importante quantité était destinée au marché belge. Une structure placée sous la double tutelle d’une agence de l’ONU et de l’Organisation mondiale des douanes, la « Passenger and Cargo Border Team » rapporte que sur les 220 tonnes saisies en 2023 au moins 43 tonnes devaient arriver en Belgique, principalement via le port d’Anvers.

Ce qui est expliqué par le Belge Bob Van den Berghe, responsable adjoint de la PCBT est ici exemplaire :

« Sur les 220 tonnes, 183 tonnes étaient destinées à l’Union européenne, dont 43 tonnes à la Belgique. Un autre port de destination important reste Rotterdam, mais on note également une augmentation des saisies dans les pays d’origine avec comme port de destination Hambourg (39 tonnes). »

Ajoutons à cela que les ports français de Brest, de Marseille et celui du Pirée en Grèce, sont pour leur part tout aussi largement utilisé comme lieu de transit vers l’Europe par les trafiquants sud-américains.

Il a souvent été dit ici qu’à l’époque de la seconde crise générale du mode de production capitaliste, le chaos l’emporte sur toute la planète. Nous savons que les économies des principales puissances européennes ont été torpillées par la crise commencée en 2020. Mais l’initiative russe en Ukraine a fait de la Belgique un maillon faible, comme celle-ci s’est alignée sur l’OTAN, donc sur la superpuissance américaine, dans un processus de vassalisation total.

De plus, à cette situation de pourrissement généralisée s’ajoute encore la volonté de séparation entre les deux entité fédérées du Nord et du Sud du pays largement impulsée par un nationalisme flamand jusqu’au-boutiste et délirant qui ne vit que dans la fuite en avant, que par un mythe mobilisateur qu’il faut constamment renforcer au moyen de contes et légendes.

Tout ceci représente en soi une contradiction bourgeoise terrible, qui n’a pas d’équivalant dans les pays voisins frontaliers.

Source : Le Soir

Source : Le Soir

A ce « général » viens s’ajouter un « particulier » qui voit la Belgique basculer dans le chaos mondial généralisé, avec la multiplications de gangs se professionnalisant et se militarisant. Ainsi, depuis dimanche soir, cinq fusillades distinctes se sont produites à Bruxelles, faisant un nouveau mort et deux blessés graves.

La complexité des institutions bourgeoise ultra-décentralisées de notre pays étant ce qu’elle est, il s’en est immédiatement suivi toute une cacophonie sur les responsabilités respectives : les Communes et la Région bruxelloise accusant le gouvernement Fédéral, les polices locales accusant celle, fédérale, de grave manquement. Et réciproquement…

C’est dans ce contexte que le nouveau ministre de la Justice, Paul Van Tigchelt (son prédécesseur, Vincent Van Quickenborne, avait pour sa part échappé de peu à une tentative d’enlèvement en septembre 2022…), ira jusqu’à déclarer que si les fusillades se multiplient en ce moment à Bruxelles, c’est parce que les mafias de la drogue subissent la pression des autorités policières et judiciaires, alors qu’il est avéré que les organisations criminelles n’ont jamais encore bénéficié d’autant de moyens financiers tout en corrompant autant de personnes.

Ce qui signifie qu’en termes d’organisations criminelles, on est en train d’assister à une prise de possession économique dans de nombreux secteurs de la société belge.

Qu’il nous suffise de rappeler le procès qui se déroule actuellement Bruxelles aux fins de juger 125 prévenus et quatre sociétés impliqués dans le volet le plus important de l’affaire Sky ECC, du nom de cette messagerie cryptée qui permettait aux narcotrafiquants de communiquer entre eux. Le « cassage » de plus d’un million de messages cryptés Sky ECC avait permis aux policiers de procéder à de multiples arrestations de trafiquants et de complices corrompus au sein des forces de police, du service des douanes, d’avocats, etc…

A ce jour, et sans même tenir compte des condamnations qui ne manqueront pas de tomber dans le cadre du procès en cours à Bruxelles, le décryptage du réseau Sky ECC a déjà donné lieu à plus de 1000 condamnations prononcées par les tribunaux de plusieurs arrondissements judiciaire.

Cette réalité a-t-elle fait reculer les activités criminelles des trafiquants de drogues en Belgique ? Pas du tout ! C’est même le contraire ! Dans le milieu du trafic, les assassinats, les fusillades, l’utilisation d’explosifs contre les habitations de personnes soupçonnées de liens avec ce milieu ;  les tabassages et les enlèvements suivis de tortures sont en hausse exponentielle partout dans le pays depuis plusieurs mois.

Dans le capitalisme, ce qui compte de manière principale, c’est le profit. Or, il est estimé qu’environ 1000 tonnes de cocaïne transitent chaque année par le port d’Anvers et qu’avant coupe, le gramme de cocaïne pure est vendu 50 euros. Mais la conversion en doses individuelles vendues dans la rue par les dealers permet l’obtention d’une quantité trois fois plus importante de drogue. Il est dès lors facile de comprendre que ce trafic qui génère des milliards d’euros de bénéfice sera impossible à combattre par des institutions judiciaires et policières bourgeoises engoncées dans la métaphysique et le subjectivisme, sans aucune vision collective, démocratique et rationnelle du monde.

Face à cette réalité délétère, nous devons dire qu’en 2024, il apparaît qu’en finir avec les drogues et leurs trafics ne peut passer par une simple « remise en ordre », une « fermeté policière et judiciaire » mais doit passer par la construction d’un nouvel ordre débarrassé des maux de l’ancien monde. « Il y a tout à revoir », voilà ce qui ressort de manière générale car la drogue et son trafic condensent l’ensemble des problèmes d’une société capitaliste en chute libre.

Il existe le besoin d’un tel électrochoc général : viser la révolution dans ce pays ne peut se faire sérieusement sans avoir pour objectif le règlement de cette problématique populaire. Et tout le monde sait bien au fond de lui qu’au rythme où vont les choses, cela finira avec la constitution de milices populaires contre les dealers… et les consommateurs.

Il est même tout à fait probable que l’apparition d’un mouvement de ce type soit le prélude à l’enclenchement d’un processus plus large de remise en cause de l’ordre existant. Et dialectiquement de rétablissement de l’ordre tout court, mais nouveau, car socialiste.

Centre Marxiste Léniniste Maoïste de Belgique
18 février 2024


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