Après 40 ans de domination personnelle absolue, meurt le dernier dictateur d’Europe. Franco nous laissera comme héritage d’innombrables morts, torturés, prisonniers et exilés : un peuple, le nôtre, qui au bord même du génocide, pleure à grands cris sur les cendres ; une légalité politique sans partis, sans syndicats ni libertés d’aucun type ; un Monarque par la grâce divine et non celle du peuple ; et un Parlement qui, ne représentant personne, sinon une oligarchie, décide du destin non seulement du peuple espagnol, mais d’autres comme le nôtre dont il ne reconnaît même pas l’existence.

Ce sera ce Parlement qui approuvera, non sans de graves difficultés internes, la nouvelle loi de Réforme Politique de l’Etat.

Le Peuple Basque, une fois de plus, montrera l’inexistence de la prétendue unité de l’Espagne. En défendant son droit à décider de son destin, il refusera de reconnaître l’autorité de la chambre législative espagnole et fasciste, par l’abstention la plus forte au référendum.

La loi de réforme politique décidera les nouveaux organes législatifs, se réservant le droit, au dernier moment, de concrétiser la loi électorale qui indique les voies pour la participation populaire aux élections du Congrès et du Sénat.

Les élections se rapprochent et ETA comme toutes les forces politiques d’Euskadi doit donner son opinion à leur sujet.

Le Gouvernement Suarez prétend nous faire croire qu’il s’agit d’élections démocratiques par le seul fait d’admettre le suffrage universel secret et direct. Les différences entre ces élections qui approchent et celles d’un régime démocratique sont évidentes, du moins en Euskadi ; la Monarchie ne peut être remise en question ; certains membres du Sénat sont directement désignés par Juan Carlos ; les partis représentant la ligne abertzale socialiste ne sont pas légalisés, leur action publique n’est pas tolérée ; les syndicats sont illégaux ; notre langue demeure interdite sans la reconnaissance de son identité ; le Peuple Basque continue à être politiquement institutionnalisé ; les prisonniers et les exilés continuent loin de leur famille et de leur pays ; les organisations populaires sont brutalement réprimées dans leur manifestation publique ; les détentions et les emprisonnements continuent à se produire de façon arbitraire ; la torture, bien que de façon plus sélective qu’à certains moments antérieurs, continue à être pratiquée dans des commissariats et des casernes de la Guardia Civil ; les forces répressives espagnoles continuent à occuper notre territoire rendant impossible la moindre garantie de sécurité pour les militants abertzale-socialistes et une quelconque formule de coexistence pacifique.

Le Gouvernement Suarez a tenté avec un certain succès l’intégration du peuple espagnol dans son plan de réforme politique. En Euskadi, cette tentative échoua et aujourd’hui il la répète par l’intermédiaire des élections.

Le Peuple Basque veut la paix. Cela exige la création de voies démocratiques minimum au travers desquelles puissent se matérialiser ses aspirations sans nécessité de recourir à la violence. Ces voies ne peuvent être autres que la solution positive aux négociations exposées auparavant ; solutions qui, selon nous, sont données dans le programme d’alternative de KAS.

En supposant que ce programme ne puisse aujourd’hui être offert par le Gouvernement Suarez, il existe au moins deux points qu’on ne peut ajourner parce que sans eux, les promesses du gouvernement espagnol de commencer à marcher sur le chemin de la démocratie n’offrent aucune crédibilité.

Ces deux points sont :

1) L’Amnistie totale.

Mais attention, il ne suffit pas de sortir les prisonniers des prisons. On entend parler avec insistance d’un projet du Gouvernement selon lequel les prisonniers basques accusés d’exécutions seraient exilés ou relégués dans quelque endroit reculé de l’Etat Espagnol. Nous voulons qu’il soit bien clair que cette solution n’est pas valable. Le Peuple Basque a beaucoup lutté pour la liberté de ses militants et la relation des forces dans la conjoncture actuelle lui est clairement favorable.

L’AMNISTIE TOTALE SUPPOSE LE DROIT DE TOUS LES PRISONNIERS ET EXILES DE REVENIR DANS LEURS FOYERS AVEC TOUS LEURS DROITS DE CITOYENS.

Et, s’il vous plaît, qu’on ne nous dise pas que le gouvernement ne peut pas garantir leur sécurité. Si c’est là le problème, nous leurs offrons une solution : qu’ils retirent d’Euskadi la Guardia civil, la Police armée et le Corps général de police, et le peuple basque créera lui-même des corps chargés de la défense des citoyens.

2) Des libertés démocratiques minimales, comme l’absolue liberté de réunion, d’association et d’expression de toutes les tendances politiques existant en Euskadi ; le droit à la manifestation et à l’égalité d’accès de toutes les forces politiques basques aux moyens de communication de masse officiels et à la subvention d’Etat.

Sans ces conditions minimales, le Peuple Basque ne peut considérer ouvert, ni même entrouvert, le chemin vers la démocratisation de l’Etat. Il ne peut non plus légitimer par son vote un régime qui se maintient par l’unique force des armes. Si le gouvernement ne satisfaisait pas à ces conditions au plus tard un mois avant la date prévue pour les élections, ETA appelle le Peuple Basque à l’abstention et proclame sa volonté de relancer la lutte armée jusqu’au succès du programme d’alternative du K.A.S.

Le Peuple Basque veut la paix, mais celle-ci exige la liberté. Si le gouvernement refuse d’ouvrir le chemin qui y mène, que personne n’accuse ETA ni le Peuple Basque de recourir à d’autres chemins comme celui de la lutte armée.

Il est possible que certains partis basques, s’abritant derrière mille excuses (il y a toujours des raisons même pour la trahison) se sentent tentés de se rendre aux élections législatives sans la réalisation des deux conditions fixées, se réfugiant derrière les privilèges que leur offre la défense d’intérêts étrangers à ceux des couches populaires basques dans le but de rechercher le pouvoir : qu’ils sachent qu’ils le font en marge du consensus populaire librement exprimé, qu’ils soient conscients qu’ils se convertiraient non seulement en ennemis de la liberté mais aussi en supports d’une monarchie fondamentalement dictatoriale et en agents continuateurs de la répression que notre peuple supporte depuis déjà trop de temps.

Et que ces basques-là qui aideraient ces partis sachent qu’avec leur vote ils aident au maintien d’une dictature qui, pendant presque un demi-siècle, a essayé par les moyens les plus sanglants d’en finir avec notre peuple et de perpétuer l’exploitation des travailleurs, arrantzales (pêcheurs), baserritarra (paysans), techniciens, employés, petits commerçants, etc., de tous ceux qui, d’une façon ou d’une autre gagnent leur pain à la sueur de leur front.

AUX ELECTIONS OUI, MAIS AVEC UNE AMNISTIE TOTALE ET DES LIBERTES DEMOCRATIQUES.

SANS ELLES NON.

VIVE L’EUSKADI LIBRE ! VIVE L’EUSKADI SOCIALISTE !


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