La mort récente de Hugo Chavez a créé un choc et une douleur dans une grande partie du peuple vénézuélien, déclenchant une lutte entre les révolutionnaires sur la position face au chavisme, à propos duquel ce journal [Revolución Obrera] a déjà pris une position par le passé :
« En fait, la « révolution bolivarienne » a laissé subsister le vieil État bourgeois et les anciens rapports sociaux et a laissé intacts les rapports de dépendance à l’impérialisme, y compris face à l’impérialisme américain, qui continue à avoir le privilège de l’exploitation et du commerce du pétrole.
Le discours « anti-impérialiste » et « anti-capitaliste » du « socialisme du XXIe siècle » est du baratin pour tromper le mouvement ouvrier et, dans ce sens, il est erroné que les communistes se joignent aux coryphées, quand leur obligation est de les démasquer et de les combattre comme faux socialistes et communistes. »
(Lettre de mai 2011 publié par Revolución Obrera 317)
Chavez et ses réformes au nom de la « révolution bolivarienne » et du « Socialisme au XXIe siècle » ont provoqué un grand déchaînement dans la société vénézuélienne : ils ont donné des boutons au secteur bourgeois propriétaire terrien dont les intérêts ont été affectés par le gouvernement Chavez, et ils ont gagné un appui et la sympathie dans les secteurs qui admirent sa confrontation contre certains groupes monopolistes de la bourgeoisie vénézuélienne et de l’impérialisme américain, sentant que les réformes chavistes atténuent certains besoins immédiats et soulagent leur tragédie en tant qu’exploités sous le système capitaliste.
Les grandes masses du peuple vénézuélien qui sont maintenant en deuil pour la mort de Chavez et en défense de son œuvre gouvernementale le font parce qu’elles croient que la « révolution bolivarienne » guérit les maux de leur situation, et que le « socialisme du XXIe siècle » est un nouveau système supérieur et différent du capitalisme.
Cela a été le grand service fourni par Chavez au système basé sur l’exploitation du travail des autres. Cela a été la grande tromperie du chavisme aux ouvriers et aux paysans, aux masses du peuple vénézuélien vilipendées, exploitées et opprimées par les classes dirigeantes pro-impérialistes centenaires, qui n’ont pas été vaincues par une révolution, mais se sont à peine divisées dans les rangs de l’opposition et du parti au pouvoir.
L’essence du réformisme est d’atténuer le mal, mais pas de le supprimer (Lénine), et c’est ce qu’a fait le chavisme pendant 14 ans dans un gouvernement qui n’est ni vraiment révolutionnaire, ni vraiment anti-impérialiste et, à la place, il a servi à masquer la dictature des exploiteurs sur le peuple, le joug de la domination semi-coloniale impérialiste et les privilèges de classe d’une minorité sur le compte du travail de la majorité dans la société.
La « révolution bolivarienne » n’a fait que passer un chiffon humide et chaud sur les plaies du capitalisme. C’est du réformisme bourgeois qui ne mine pas le pouvoir de la bourgeoisie, mais qui s’attribue l’étiquette de « révolution ».
Il contribue à rincer les maux du capitalisme, avec quoi il sépare et dissuade le peuple d’une véritable révolution. Il maintient intact le pouvoir du vieil Etat réactionnaire et le régime de l’exploitation du travail, tout étant dirigé par la faction bourgeoise bolivarienne.
Mais le peuple vénézuélien ne peut lui-même briser les chaînes de l’exploitation que lorsque, avec l’aide des communistes, il trouve le chemin de la révolution prolétarienne dont la force principale sera l’alliance des ouvriers et des paysans. Et la voie ne sera pas le « remodelage » de l’Etat des exploiteurs, mais sa destruction avec la violence révolutionnaire, avec la guerre populaire, avec la guerre des masses.
Le « socialisme au XXIe siècle » est aussi une farce et une falsification bourgeoise du socialisme. Le discours « socialiste » de Chavez est un mélange de bolivarisme et de nationalisme, qui l’a érigé en caudillo représentant d’un supposé socialisme continental, fondée sur l’utopie de la création d’une société socialiste sans la nécessité de détruire avec la violence révolutionnaire le pouvoir politique des exploiteurs.
Une vraie société socialiste ne pourra s’édifier en Venezuela que lorsque les masses populaires des campagnes et des villes démoliront l’actuel État bourgeois propriétaire foncier pro-impérialiste, et construiront le nouvel État des ouvriers et des paysans, le nouvel État de la Dictature du Prolétariat, dans lequel le pouvoir est directement exercé par les masses armées et non à travers des intermédiaires et des sauveurs bolivariens.
La « Révolution Bolivarienne » et le « Socialisme du XXIe siècle », sont les deux jambes du réformisme bourgeois chaviste, qui détourne le peuple du véritable chemin révolutionnaire, faisant illusion quant à une transition pacifique au travers de la prise de l’État bourgeois par la voie parlementaire et les élections, comptant sur un pouvoir qui n’est pas vraiment entre ses mains, mais toujours fermement entre les mains des détenteurs du capital et des terres, et dont on retrouve à la tête aujourd’hui les bolivariens.
De même, « l’anti-impérialisme yankee » de Chavez n’est pas un anti-impérialisme révolutionnaire, mais un pseudo-anti-impérialisme, un anti-impérialisme bourgeois, qui occulte et dissimule la domination économique et politique semi-coloniale de l’impérialisme sur la société vénézuélienne, mais ne la supprime pas par la voie révolutionnaire ; il y a les diatribes contre l’impérialisme yankee, mais il défend et se compromet ouvertement avec les impérialistes chinois ou russes.
En effet, son économie dépend fortement des ventes de pétrole et de l’achat d’une grande quantité de marchandises à l’impérialisme américain lui-même, tandis que la Chine est le deuxième partenaire commercial du Venezuela avec un échange annuel de plus de 12.000 millions de dollars, en grande partie par environ 500.000 barils de pétrole, pétrole envoyé chaque jour par le pays opprimé d’Amérique du Sud au pays impérialiste asiatique.
Le peuple vénézuélien ne peut se libérer du joug de l’impérialisme américain et de tout impérialisme que lorsque la lutte anti-impérialiste se lie à la lutte révolutionnaire pour renverser l’État réactionnaire.
Ni la « Révolution bolivarienne » au Venezuela, ni la « Révolution Citoyenne » en Equateur, ni celle « sandiniste » au Nicaragua, ni leurs homologues dans d’autres pays, ne peuvent rompre les chaînes qui asservissent les masses laborieuses à l’exploitation et à la dictature des exploiteurs.
Tous ces arnaques réformistes bourgeoises sont aussi exécrables que les autres régimes bourgeois du type Santos en Colombie ou de Piñera au Chili. Tous sont essentiellement une dictature de classe des exploiteurs sur les exploités.
Les 14 ans de réformisme bourgeois bolivarien au Venezuela, tandis qu’il a détourné le peuple d’une véritable révolution, ne pouvait pas supprimer la nécessité d’une telle révolution, parce qu’il a servi à affiner davantage la lutte des classes, pour amener davantage le peuple aux problèmes de la politique, du pouvoir et de l’État, ce qui a contribué à fertiliser le terrain pour le travail des révolutionnaires authentiques, pour l’activité politique portant les véritables idées du socialisme au peuple vénézuélien, pour guider le processus qui inévitablement doit abattre le pouvoir des classes réactionnaires et construire un nouvel Etat des ouvriers et des paysans vers le vrai socialisme dirigé par le prolétariat.
Après la mort de Chavez, les prochaines élections ont été convenues pour le 14 avril, de sorte que, dans une farce électorale, les classes dominantes dirigeantes décident de qui garde la direction de la gestion des affaires des capitalistes. Bien que le peuple vénézuélien soit aujourd’hui bouleversé, divisé et opposé en ses propres rangs, il doit se convaincre que :
Ni Capriles ! Ni Maduro !
Seul le peuple peut sauver le peuple !