Nous vivons une époque régressive où c’est la facilité qui triomphe, avec une surenchère d’effets pour masquer l’inanité du contenu, son vide. Star Wars 7, qui est sorti il y a quelques semaines, n’a été qu’un film reprenant le scénario de Star Wars 4, avec tous les clichés chrétiens à la Disney (amour romantique, contrariété familiale, rédemption, etc.). Et pourtant il a très bien marché.
Et que réserve 2016 ? S.O.S. Fantômes 3, Jason Bourne 5, Rocky VII, L’Âge de glace 5, Les Visiteurs 3 (en fait 4), Brice de Nice 3 (en fait 2), Camping 3, Les Tuche 2, Joséphine s’arrondit (le 2 donc), La Tour 2 Contrôle infernale, Independence Day Resurgence, Batman Vs Superman, Point Break (un remake du film de 1991), Star Trek Beyond, Les Tortues Ninjas 2, La légende de Tarzan… Sans parler des innombrables adaptations de comics Marvel, de jeux vidéos (War Craft, Assassin’s Creed, etc.), les nombreux spin-off issus d’univers d’autres films (Harry Potter, Star Wars, etc.). On voit évidemment la même chose au niveau des séries TV avec le retour de X-Files (dont le premier épisode de la nouvelle saison a été diffusé hier aux États-Unis d’Amérique), Twin Peaks, Heroes Reboot, etc.
Le capitalisme ne peut pas produire, il ne peut que se copier, recopier. Il en va de même dans les sentiments, le style, l’apparence, la culture : tout est faux, copié. C’est la généralisation de la copie de type analytique, en opposition complète à l’esprit de synthèse. On prend, on reprend, on mélange, on modifie un peu, beaucoup, à la folie.
Pour comprendre cette question, rappelons ici le syllogisme d’Aristote : « Socrate est un homme, les hommes sont mortels, donc Socrate est mortel ». Cette méthode permet de formuler des vérités à partir d’autres vérités. Elle ne permet cependant pas d’en découvrir de nouvelles : pour cela, il faut la métaphysique, une réflexion sur l’univers, son organisation, son fonctionnement, etc.
Le capitalisme se moque de cet aspect général, il ne conserve que l’approche utilitaire, comme le faisait René Descartes par ailleurs, ainsi que les empirismes anglais. Du moment que cela marche, cela marche.
De la même manière qu’un beauf va aller en discothèque afin de tenter d’avoir un « coup d’un soir » et essayer frénétiquement jusqu’à ce que cela marche, le capitalisme produit en série, sans se préoccuper du contenu, jusqu’à ce que cela marche.
Cette approche est d’ailleurs généralisée dans les pratiques des individus fonctionnant comme de véritables petites entreprises capitalistes. Tout le monde est contaminé par cette démarche, mais il ne faut pas généraliser de manière trop abrupte : les contradictions sont inévitables.
Ce sont ces contradictions – comme celle du chef d’entreprise qui est noir et donc possiblement victime du racisme – que les post-modernes mettent en valeur pour nier la réalité du capitalisme et prétendre que tout serait plus compliqué, plus complexe, qu’il faut « déconstruire », nier l’existence des hommes et des femmes, etc.
En réalité, le mode de production capitaliste subit les assauts de la classe ouvrière et les masses sont partagées entre les valeurs de la bourgeoisie d’un côté et celles de la classe ouvrière de l’autre. Les sensibilités ne sont pas les mêmes, l’idéalisme et le matérialisme se combattent, et le but de l’avant-garde doit être de renforcer le camp prolétarien, en apportant un caractère scientifique à sa vision du monde.
Car nulle révolution n’est possible avec des masses appréciant Star Wars 7, niant la complexité de la culture, acceptant de ne pas réfléchir dans ce qui est censé être époustouflant et divertissant.
Il n’y a là ni grandeur, ni héroïsme, ni valeurs, alors que c’est précisément de cela qu’a besoin notre époque. Il y a là un décalage immense. Notre temps doit être celui de batailles grandioses pour faire de notre monde un havre de paix et de culture ; au lieu de cela on a l’esprit petit-bourgeois de la fuite, de la médiocrité, du « biz » (le business) et du relativisme.
L’histoire va bousculer tout cela. La petite-bourgeoisie se précipitera toujours davantage dans des voies illusoires, de type fascistoïde, hippie de droite, communautariste, régionaliste, etc. C’est la fuite dans la « protection », l’illusion de pouvoir faire revenir la roue de l’histoire en arrière. Les zadistes sont un bon exemple de cette délétère tendance petite-bourgeoise à la régression, de tentative de former un « socialisme français » à la Proudhon.
Star Wars 7 dans les villes, la ZAD dans quelques campagnes, quelques nihilistes islamistes au milieu : voilà le programme qui nous est donné. Il est indigne de notre époque, affreux, à rejeter catégoriquement.
Nous avons besoin d’abnégation, de combat révolutionnaire, d’âmes immenses, de batailles populaires de grande ampleur, d’apothéose dans la protection de la nature. C’est là l’appel de l’histoire ; l’idéal communiste va s’exprimer toujours davantage depuis la transformation qualitative de la matière vers plus de complexité, plus d’esprit de synthèse, plus de collectivisme.
C’est cela qu’il faut voir, et non pas le morne caractère du petit-bourgeois apeuré, du prolétaire paralysé par l’anti-culture décadente fournie par le capitalisme, du bourgeois s’imaginant la figure éternelle d’un monde en réalité en perdition !