Projet de la délégation italienne publié dans le Bulletin du Vème Congrès de l’Internationale Communiste du 24 juin 1924

matteotti_3.jpgOuvriers et paysans d’Italie.

Le fascisme vient d’ajouter un nouveau crime la longue série d’assassinats, de pillage et de meurtres qui forme le bilan de sa lutte féroce contre le prolétariat d’Italie. Après avoir massacré des centaines d’ouvriers et de paysans révolutionnaires, après avoir emprisonné et martyrisé des milliers de travailleurs communistes et socialistes, il vient d’assassiner le député Matteotti, secrétaire du Parti réformiste. La bourgeoisie libérale et les chefs réformistes qui n’avaient élevé que faiblement la voix quand le fascisme s’acharnait sur les ouvriers révolutionnaires s’émeuvent aujourd’hui parce qu’un des leurs est atteint par la terreur blanche les bandes de Mussolini.

Le Vème congrès du Comintern salue cette nouvelle victime dont la fin tragique couronne une vie de combat et de dévouement à une foi politique courageusement professée et il salue avec elle toutes les innombrables victimes plus obscures, mais non moins héroïques tombées dans la lutte contre la dictature fasciste. Cependant, il croit que son devoir de faire ressortir aux yeux des militants et des prolétaires italiens et de tous les pays les enseignements politiques qui découlent de cet événement pour en tirer toutes les conséquences utiles à la lutte révolutionnaire.

Camarades.

Le fascisme ne pourrait être combattu que par l’union de tous les ouvriers et paysans décidés à organiser leur défense et répondre à la violence des fascismes par l’action révolutionnaire des masses prolétariennes. Mais les chefs réformistes, aveuglés par leurs préjugés pacifistes et démocratiques, effrayés à l’idée des combats révolutionnaires nécessaires pour sauver le prolétariat, ont déserté la lutte et ont essayé de détourner les coups en cherchant des compromis avec le fascisme.

En collaboration avec les chefs maximalistes désorientés et perpétuellement hésitants, ils ont commencé par signer avec lui une trêve qui permettait aux fascistes de porter tous leurs coups contre les ouvriers et les paysans du Parti communiste, et qui divisait le prolétariat au moment où il eut fallu l’unir pour la lutte violente contre la terreur qui déjà l’atteignait.

Les chefs réformistes de la C.G.T. d’Aragona, Baldesi, Buozzi, Bruno ont cherché à plusieurs reprises un terrain d’entente avec Mussolini et étaient prêts à collaborer avec lui, tandis que Turatti prêchait aux masses un tolstoïsme qui les jetait dans la passivité, les berçait d’illusions démocratiques et les livraient désarmées à leurs bourreaux. Les chefs réformistes, appuyés par les chefs maximalistes de droite ont tout fait pour détourner la classe ouvrière de la résistance révolutionnaire, ils l’ont divisée en livrant son avant-garde aux coups des fascistes et en rendant ainsi leur victoire plus facile et plus complète sur l’ensemble du prolétariat italien.

Toute cette politique bornée, les oraisons pacifiques de Turatti, les salamalecs de d’Aragona, la collaboration honteuse de Bruno, n’ont pas désarmé le fascisme, qui, après avoir combattu et massacré les révolutionnaires dans la passivité complice des réformistes et de la bourgeoisie libérale, répond à leur pacifisme par l’assassinat.

Ouvriers et paysans d’Italie.

Avec sa sauvagerie habituelle, le fascisme vient de vous donner un enseignement lumineux qui doit contribuer à sa défaite et vous indiquer le chemin de la libération. Aux coups du fascisme, à sa fureur sanguinaire, il est vain de répondre par des litanies des invocations larmoyantes à la démocratie et au pacifisme, et par des tentatives honteuses et traîtresses de collaboration. La lutte de classe impitoyable, le combat révolutionnaire seul vous libéreront.

Devant le meurtre de Matteotti, ajouté à celui de centaines d’autres, vous n’avez qu’une voie qui mène à la victoire sur vos oppresseurs : Unissez-vous pour l’action, renforcez vos organisations de classe, regroupez-vous dans les syndicats, redonnez vie aux commissions internes des fabriques et formez le front unique de toutes vos forces éparses pour préparer l’action de masses nécessaire à la défense ouvrière et à sa victoire sur le fascisme.

Ouvriers unitaires et maximalistes, devant cet assassinat d’un des chefs qui a cru dans les méthodes démocratiques de lutte contre le fascisme, vous devez vous convaincra de l’erreur et du néant de la tactique réformiste, qui a paralysé vos efforts sans vous épargner les coups. Vous la condamnerez et la rejetterez définitivement pour vous tourner vers les ouvriers communistes et pour unir vos forces aux leurs dans un front d’acier pour combattre sans merci vos oppresseurs sous la bannière de l’Internationale Communiste qui héritière de la tactique éprouvée de Lénine qui a conduit à la victoire les ouvriers et les paysans de la Russie tzariste, conduira à la victoire le prolétariat du monde entier.

Vive le front unique des ouvriers et des paysans d’Italie !

Vive la lutte de classe révolutionnaire contre le fascisme !

Vive l’Internationale Communiste !


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