L’isolement des quartiers populaires est le résultat d’une politique dont l’appareil administratif est l’exécutant direct. Il s’agit toujours de reléguer ces quartiers à l’extrême périphérie du tissu urbain où ils seront coupés du développement physique et social de la ville.
A ce fait s’ajoutent une pauvreté architecturale fondamentale, une très grave carence des équipements sociaux, des services et du réseau de communications ; ces éléments confèrent au quartier ce caractère de « ghetto » qui interdit pratiquement à ses habitants de participer activement à la connaissance et au développement des contradictions qui se forment petit à petit au « centre » du tissu urbain pris globalement.
L’exploitation économique et sociale intense que subissent les habitants des quartiers populaires opère une discrimination supplémentaire par rapport aux habitants du « centre ».
La sujétion psychologique et matérielle, ainsi que l’impuissance sociale qui en découle, empêchent de fait les habitants de constituer, aux niveaux individuel et de groupe, des centres de décision et d’organisation qui pourraient influer de quelque manière sur le développement physique et social du quartier.
Cette impuissance est d’autre part aggravée par des rivalités et par l’arrivisme individuel et familial nés de l’espoir illusoire (et entretenu par l’imagerie bourgeoise) de s’en sortir tout seul, chacun de son côté.
Tout cela se traduit par une capacité d’organisation et d’association faible, qui se répercute inévitablement sur les possibilités d’organisation à l’usine et à l’école : le cycle de l’exploitation se trouve ainsi bouclé.
Dans les quartiers populaires, l’organisation du groupe familial selon la morale bourgeoise est plus forte qu’ailleurs, ce qui rend ces quartiers peu perméables à la relative liberté de mœurs et de mouvement qui caractérisent les autres secteurs sociaux. La position du chef de famille est presque toujours autoritaire et exclusive. Celle de la femme est, à l’inverse, de soumission totale, tandis que les enfants n’ont que peu de possibilités de contacts et d’expériences sociales en dehors du noyau familial. Dans ces conditions, la famille augmente son propre isolement et celui du quartier.
D’autre part, les difficultés de la vie quotidienne, l’exploitation, la durée des trajets pour se rendre au travail et en revenir, ont pour effet de décomposer le noyau familial sur le lieu de l’exploitation et de le recomposer ensuite devant la télévision, ce qui revient à briser en fait l’unité politique de la famille, en réduisant celle-ci à un pur organisme de reproduction et de consommation.
L’organisation de l’isolement se fonde sur deux volontés parallèles qui naissent en même temps que le quartier lui-même.
La première est celle d’exercer un contrôle direct, politique et administratif sur les habitants du quartier ; la seconde est celle de les intégrer et de canaliser autoritairement leurs principaux besoins matériels et culturels. Cette double volonté est essentiellement exercée par les centres de pouvoir suivants :
L’Eglise
L’Église s’installe dans les quartiers populaires avec tout le poids et l’importance de son organisation, intervenant sur deux plans liés : « le spirituel et le matérie ». La fonction de contrôle qu’elle exerce sur la famille, en particulier en contribuant à la maintenir dans la voie étroite de la morale bourgeoise, est facilitée par le fait que l’Église détient le monopole de toutes les formes de divertissement, du terrain de jeu au cinéma.
En outre, les énormes possibilités qu’elle a de s’insérer dans la structure sociale extérieure et intérieure du quartier lui permet d’exercer une autre forme de chantage : procurer des postes de travail, des aides matérielles, des assistances diverses qui sont tout autant d’instruments lui permettant d’exiger des habitants du quartier un comportement social conforme à la « bonne paix » de tout le monde.
Les centres sociaux
Les centres sociaux sont toujours présents, surtout dans les quartiers les plus neufs ; ils ont pour fonction de récupérer et d’isoler, selon la ligne autoritaire qui les caractérise, puisqu’ils sont imposés de l’extérieur, ces petites forces isolées qui pourraient mener à une prise de conscience des contradictions inhérentes à la condition d’isolement des habitants du quartier.
Les centres sociaux, gérés par des organismes publics ou des instituts confessionnels, récupèrent les poussées politiques en les transformant et les réduisant en un conformisme « culturel ».
La radio et la télévision
L’influence de la radio-T.V. est d’autant plus forte que l’isolement est plus grand.
En outre, des ressources limitées réduisent la possibilité d’utiliser le temps libre d’une autre manière : à tel point que, dans les quartiers populaires, l’écoute des programmes de télévision s’étend à toutes les heures de transmission de la journée. Le fantôme du « monde chez soi » est la compensation manipulatrice et autoritaire à l’isolement des quartiers populaires : c’est pourquoi la petite chance qu’il y a de recomposer politiquement l’unité du noyau familial autour des grands sujets de l’exploitation est immédiatement compromise et annulée par l’effet centrifuge des programmes de télévision.
Administrations décentralisées des « habitations populaires ».
Dans les quartiers populaires, l’administration du patrimoine immobilier est confiée à des comités qui ont leur siège dans le quartier et qui sont essentiellement de deux types : autonomes et forfaitaires.
Les comités autonomes, qui devraient être élus au suffrage populaire, sont contrôlés par l’administration centrale et peuvent être dissous à n’importe quel moment. La gestion forfaitaire est entièrement contrôlée par l’administration centrale.
Dans les deux cas il se forme un rapport de délégation entre les habitants du quartier et ces comités, ce qui pousse les premiers à se désintéresser de la question et facilite toutes les formes possibles d’escroqueries de la part des organismes de gérance.
L’exploitation se fait en deux moments : l’exploitation directe à la fabrique, l’exploitation indirecte dans le quartier. L’ouvrier qui rentre du travail n’est plus un ouvrier, mais un habitant du quartier : il oublie ce qu’est son patron, au point même de jouer le rôle de patron dans sa famille.
La séparation entre ces deux moments est nette ; si bien que, souvent, les habitants des quartiers deviennent, ou du moins tendent à devenir, des petits-bourgeois.
Et c’est précisément l’autoritarisme du chef de famille, confirmé, contrôlé et renforcé par les centres d’autorité extérieurs au noyau familial, qui est le point de rencontre et de séparation entre ces deux moments.
Le fait d’être inséré dans le processus productif signifie pour le chef de famille qu’il est le porteur et le gardien de la « dignité » et de la « noblesse » du travail et, donc, qu’il est le seul à offrir les garanties « morales » nécessaires à la promotion et à la direction de la famille. Son poids économique lui permet d’agir directement sur les membres du noyau familial : sur les enfants, en les contraignant à s’insérer dans le processus productif ; sur la femme, en l’isolant dans une position de mère et de ménagère.
En définitive, l’ouvrier qui rentre de son travail s’isole dans son noyau familial et isole celui-ci d’une structure sociale plus large : il finit donc par « avoir sa famille à charge » ; charge qui, inévitablement, le freine et l’affaiblit au moment de la lutte.
L’attitude autoritaire et donc répressive du chef de famille est en définitive le lien qui unit l’exploitation directe et sa continuation indirecte au niveau de la famille. Les centres autoritaires extérieurs, d’autre part, de l’Église à la T.V., confirment, renforcent, généralisent ce type de relation au niveau du quartier.
Le quartier n’est pas seulement le lieu où le cycle de l’exploitation est bouclé, mais il constitue aussi un inépuisable réservoir d’exploitation directe, concrète, immédiate. Le quartier moderne n’est presque jamais un quartier homogène : il est essentiellement formé de deux groupes : d’une part, les ouvriers moyens qui aspirent à posséder leur maison ; de l’autre, toutes les couches sociales « en marge » : ex-habitants des bidonvilles, qui ne sont spécialistes que d’une seule technique, celle de la survie, de l’expédient comme forme de subsistance. Et ce n’est pas un hasard.
La ville qui ne cesse de consommer et de gaspiller a besoin de cette grande réserve de main-d’œuvre bonne à tout faire, de ces personnes prêtes à fournir n’importe quel service, de ces familles d’où sortent ces petits garçons qui servent dans les bars et les boutiques au lieu d’aller à l’école, de ces maçons, de ces éternels apprentis qui se voient licenciés à la fin de l’apprentissage, de ces superexploités qui travaillent, à domicile, pour le compte d’autrui, de ce nouveau marché d’esclaves, privés de toute force de représailles.
Ce sont ceux-là qui finissent dans les maisons les plus laides et qui subissent saisies sur saisies parce qu’ils n’arrivent pas à payer leur loyer ; et c’est à travers eux que prennent une forme concrète les rivalités au sein du quartier ; et c’est aussi en se comparant à eux que l’ouvrier se sent « plus avancé » et se contente de ce qu’il a.
Car l’ouvrier, lui, paie presque toujours son loyer, un loyer qui peut être incroyablement élevé. Le prix des maisons et des appartements dits « populaires » (I.N.A.Casa, G.E.S.C.A.L., I.A.C.P.) sont maintenant presque aussi élevés que ceux des logements privés : ils peuvent représenter jusqu’à 40% des salaires.
Par l’intermédiaire des « maisons populaires », l’office-patron, qui est d’ailleurs le même patron qu’à l’usine, mais masqué derrière une apparente volonté d’« assistance » et derrière une incroyable complexité bureaucratique-administrative de gestion, réussit à tirer du quartier des gains énormes. Les maisons I.A.C.P., en particulier, sont l’objet de spéculations frénétiques qui favorisent les entrepreneurs privés, le capital financier privé, des partis et des individus. La politique du « logement populaire » coûte cher : ce sont les locataires qui la paient.
Mais cesser de payer signifie défendre le salaire réel ; ne pas payer signifie porter la lutte commencée sur le lieu du travail au-delà des grilles de l’usine : car l’exploitation ne s’arrête pas là, elle pénètre chaque moment de chaque vie individuelle.
Les habitants des quartiers populaires, ouvriers, employés, artisans, commerçants, policiers, chauffeurs de taxi, doivent commencer à comprendre que la classe exploitée n’est pas seulement la classe travailleuse traditionnelle, non propriétaire de ce qu’elle produit et contrainte à le racheter au triple.
Il faut aussi que l’alliance se forme au niveau du logement parce que, à côté des problèmes traditionnels de la classe ouvrière sur les lieux de travail, il y en a maintenant d’autres : ceux de l’exploitation en dehors de l’usine. Le problème de la condition des masses exploitées ne se pose donc plus seulement au niveau de la lutte syndicale, mais à celui de la lutte politique, c’est-à-dire de la lutte contre l’intensification de l’exploitation à l’usine et dans le quartier, de manière que la lutte serve à renforcer l’organisation politique et à éduquer dans le sens de l’autogestion à tous les niveaux.
Les augmentations de salaire que l’ouvrier réussit à arracher par l’intermédiaire des syndicats sont tout de suite absorbées par l’augmentation du coût de la vie : en particulier par le loyer, l’alimentation, l’école, les services, les transports, l’assistance médicale ; la lutte pour le salaire ne suffit donc pas si on ne lutte pas parallèlement contre ces augmentations.
Sans prétendre approfondir le problème complexe de l’exploitation par le logement, disons que la bataille qu’on peut et doit mener pour la réduction des loyers, dans le cadre de la défense du salaire réel des ouvriers, constitue le sens essentiel de la lutte de quartier.
L’extension des quartiers populaires et leur structure sociale complexe rendent nécessaire une intervention massive et systématique qui s’auto-programme et se modifie au fur et à mesure de la pénétration dans la réalité vivante du quartier.
D’autre part, le M.S. (Movimento Studentesco) doit comprendre que sa stratégie de travail politique de masse et sa méthode de révolution culturelle doivent dépasser les revendications universitaires et envahir la ville de façon à y créer, comme à l’école et à l’usine, des instruments autonomes de lutte, permettant aux habitants sous-privilégiés de s’organiser et de refuser de déléguer la défense de leurs intérêts à de quelconques organismes qu’ils ne peuvent pas contrôler efficacement eux-mêmes.
L’usine et la ville, l’usine et le quartier, l’usine et l’école sont des structures dépendantes les unes des autres. L’action que le M.S. devra exercer aux niveaux théorique et pratique pourra établir la liaison entre les diverses situations d’exploitation, la poussée et l’organisation, la vérification et la concrétisation politique de l’interdépendance des fato et la possibilité de contrepouvoirs qui appuient la lutte du M.S. dans la ville et la société. Il faudra constamment rappeler, à ce propos, qu’il n’y a pas de distinction entre le moment de l’analyse et celui de la mobilisation, entre ceux qui pensent et ceux qui agissent, entre le moment théorique global de définition et d’étude et celui de l’action pratique ; mais il doit y avoir une relation dialectique continue entre les deux moments ; le travail d’enquête et d’analyse ne peut jamais être séparé des luttes et des interventions.
Le travail de quartier se présente donc comme un travail politique essentiellement extérieur et, en même temps, comme un des moments de la croissance politique du M.S. comme mouvement de masse ; cet aspect a été négligé au profit de l’objectif partiellement corporatif que s’était donné le M.S. en se repliant sur lui-même, en confondant l’endoctrinement idéologique de l’avant-garde avec la croissance politique globale. De cette manière la lutte ne pouvait être qu’évasion limitée au seul milieu de la faculté et sans aucun débouché politique réel.
Pour reprendre l’action dans les facultés, il est possible d’intervenir dans les quartiers par un travail analytique utilisant toutes les compétences disciplinaires spécifiques. Il s’agit ce faisant d’utiliser de manière anti-institutionnelle les diverses disciplines, pour relier directement le travail interne et le travail externe, ainsi que les travaux internes entre eux.
En effet, à l’inverse de la structure du M.S., subdivisé en secteurs de travail indépendants les uns des autres, les types d’intervention possibles et nécessaires sur les divers problèmes peuvent trouver dans le travail de quartier leur moment de contact et l’homogénéisation politique, au-delà de la sectorialisation imposée par la structure universitaire.
Schématisons les interventions : dans les quartiers, les étudiants en médecine pourraient étudier et relancer tous les problèmes relatifs à la surpopulation, au travail et à l’hygiène ; les étudiants des écoles d’ingénieurs et les étudiants en droit pourraient s’occuper de la structure physique et administrative des « maisons populaires » ; ceux de Lettres et de Langues, la composition générale du quartier, du noyau familial, la situation de la femme et tous les facteurs sur lesquels se fonde la sélection scolaire.
Cette manière de poser les tâches, directement liée à la réalité concrète de la ville, peut être éventuellement accompagnée d’une récupération des recherches analytiques effectuées à l’Université, sans tomber dans la logique de la « restructuration de la recherche et de l’enseignement » et du « renouvellement culturel de la Faculté ».
« La commission de quartier » devrait donc naître de la convergence des divers secteurs de travail et d’étude, en s’organisant elle-même en cours d’intervention, dans la pratique sociale de masse, pour combattre l’isolement auquel on condamne les quartiers, pour ne laisser aucun champ à l’idéologie de la classe dominante qui, à travers certains instruments comme la T.V. et l’Église, manipule les masses socialement subordonnées.
La « Doposcuola ». [Doposcuola : ensemble des activités (surtout d’étude surveillée) organisées les après-midi, dans les écoles et, au dehors, puisqu’il n’y a généralement classe que le matin.]
Le « doposcuola » est la première forme d’intervention dans un quartier ; elle est issue d’une exigence d’assistance générale, dans le but de réparer les dommages causés par la structure sélective de l’école ; elle agit en particulier sur les enfants des ouvriers et des sous-prolétaires.
Mais l’engagement solidaire envers les habitants du quartier ne suffit absolument pas à donner un caractère politique à la « doposcuola ».
D’où l’effort pour lui conférer un effet incisif sur les structures scolaires et les habitants du quartier. On essaie de résoudre le problème par la formation d’une espèce de contre- école qu’on s’épuise à faire fonctionner à l’aide d’« expériences didactiques nouvelles » qui devraient notamment expliquer à une dizaine de gosses ce qu’est vraiment l’école, ce qu’est vraiment le patron.
Ce type d’expérience, naïve et vouée à l’échec, est l’aboutissement inévitable d’une « doposcuola » qui n’est pas insérée dans un travail de quartier plus général ; car la seule exigence des parents qui envoient leurs enfants à la « doposcuola » est de voir s’améliorer la performance scolaire de leurs enfants. Par conséquent, toute initiative qui va au-delà de cette exigence ou la gêne, est critiquée par les élèves eux-mêmes.
La « doposcuola » doit donc s’insérer dans des activités plus générales dans le quartier. Il faut avant tout l’utiliser pour gagner la confiance des habitants, pour rendre légitime et concrète la présence parmi eux, pour établir un rapport avec les parents à travers les enfants et pour lancer une discussion plus générale sur les problèmes de l’école et, surtout, du quartier.
Il est essentiel à cet égard que le M.S., organisé en groupe d’intervention spécifique, réussisse à introduire dans le quartier la discussion politique sur l’école, en se servant d’une analyse qui, partant de données générales, se concrétise et adhère à la situation particulière du quartier. Tous les instruments peuvent être utilisés à cet effet : dans l’entretien direct avec un noyau déterminé d’élèves-parents de la « doposcuola », qui sera ensuite élargie au reste des habitants, jusqu’aux enquêtes et statistiques sur le rapport entre école et quartier, sous l’angle des conditions d’exploitation des habitants du quartier.
Contre-presse.
L’instrument fondamental d’intervention dans le quartier est sansdoute le contact immédiat, direct, avec les habitants du quartier, d’abord individuellement, et ensuite en comités de travail, sur des problèmes spécifiques, ou en assemblées générales.
Il est cependant possible de combiner cette méthode d’intervention avec une activité d’information et de contre information, destinée à clarifier les problèmes qui apparaissent au fur et à mesure que l’intervention se développe et progresse.
Tracts, bulletins, numéros uniques, manifestations, placards mobiles, chansons, cinéma, etc., sont autant d’instruments politiques et techniques.
D’autre part, une activité de contre-presse proprement dite risquerait, sauf exceptions, de ne mener à rien, les journaux bourgeois n’étant lus que par un très petit nombre de personnes. L’activité de contre-presse ne peut donc être confiée à un groupe particulier, mais elle doit être utilisée par tous les groupes d’intervention du quartier, qui doivent s’en servir selon leurs propres exigences, selon le secteur dans lequel ils travaillent. Les différents groupes d’étude et d’intervention sur l’école, la femme, la maison, la santé, etc., en élaborant séparément leur propre travail, finissent par constituer tous ensemble l’organisation de l’activité de « contre-presse » dans le quartier.
Cinéma.
L’isolement des habitants du quartier, le sentiment d’abandon et de frustration dont ils souffrent, le sentiment d’être en marge de la société, de ne pas pouvoir décider de leur sort, rendent nécessaire la présence continuelle et massive d’un groupe qui circule parmi les habitants, va dans leurs maisons, est toujours prêt à discuter sous n’importe quelle forme et par n’importe quel moyen. Une présence, en somme, qui éveille la curiosité, contribue à la confiance réciproque et à l’information générale sur les problèmes du quartier.
Le cinéma, ou plutôt la caméra, l’enregistreur, le mégaphone peuvent être des instruments d’intervention politique valables s’ils sont utilisés non de l’extérieur à la manière du cinéma documentaire traditionnel, mais comme un aspect de la participation directe du M.S. aux problèmes du quartier. Par l’intermédiaire de la caméra, capable d’attirer l’attention et d’animer les discussions, mais qui refuse d’être l’instrument d’un cinéma imposé aux autres et les réduisant au rôle de spectateurs, il est possible de susciter un dialogue entre les groupes d’intervention et les habitants, et surtout entre les habitants eux-mêmes ; un dialogue ininterrompu allant du moment des prises de vue jusqu’à celui de la projection qui montre aux habitants les scènes dont ils sont eux-mêmes les protagonistes.