Mao Zedong
Quelques appréciations sur la situation internationale actuelle (1)
Avril 1946
1. Les forces de la réaction mondiale préparent effectivement une troisième guerre mondiale, et le danger de guerre existe. Mais les forces démocratiques des peuples du monde dépassent les forces réactionnaires mondiales et poursuivent leur essor ; elles doivent et peuvent certainement triompher du danger de guerre. C’est pourquoi, dans les relations entre les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France d’une part et l’Union soviétique de l’autre, la question n’est pas de savoir s’il y aura compromis ou rupture, mais si le compromis se fera plus tôt ou plus tard. Par compromis on entend ici: accord obtenu par voie de négociations pacifiques. Par plus tôt ou plus tard, on entend: dans quelques années ou dans dix ans et plus, ou même encore davantage.
2. Le genre de compromis mentionné ci-dessus ne signifie pas compromis sur toutes les questions internationales, compromis impossible tant que les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France continuent à être sous la domination des réactionnaires. Ce genre de compromis signifie compromis sur un certain nombre de questions, y compris des questions importantes. Mais de tels compromis ne seront pas encore nombreux dans un proche avenir. Il y a, cependant, possibilité que se développent les relations commerciales des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France avec l’Union soviétique.
3. Des compromis de ce genre entre les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France d’une part et l’Union soviétique de l’autre ne peuvent être que le résultat de luttes résolues et efficaces de toutes les forces démocratiques du monde contre les forces réactionnaires des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France. De tels compromis n’exigent pas des peuples des différents pays du monde capitaliste qu’ils fassent en conséquence des compromis dans leur propre pays. Les peuples de ces pays continueront à engager des luttes différentes selon les conditions différentes. Le principe qu’observent les forces réactionnaires à l’égard des forces démocratiques populaires est de détruire résolument toutes les forces démocratiques qu’elles peuvent, et de se préparer à détruire plus tard celles qu’elles n’arrivent pas à détruire pour le moment. Face à cette situation, les forces démocratiques populaires doivent appliquer le même principe à l’égard des forces réactionnaires.
Notes
(1) Ce document a été rédigé pour combattre une appréciation pessimiste portée à l’époque sur la situation internationale. Au printemps 1946, l’impérialisme, ayant à sa tête les États-Unis, et la réaction dans les différents pays intensifiaient chaque jour davantage leurs activités antisoviétiques, anticommunistes et antipopulaires et clamaient: “la guerre entre les États-Unis et l’Union soviétique est inévitable”, “une troisième guerre mondiale doit inévitablement éclater”. Dans ces circonstances, par le fait qu’ils surestimaient la force de l’impérialisme et sous-estimaient la force du peuple, qu’ils avaient peur de l’impérialisme américain et craignaient qu’une nouvelle guerre mondiale n’éclatât, certains camarades montraient de la faiblesse face aux attaques armées du bloc réactionnaire États-Unis – Tchiang Kaï-chek et n’osaient pas opposer résolument la guerre révolutionnaire à la guerre contre-révolutionnaire. Dans ce document, le camarade Mao Zedong combat cette façon de penser erronée. Il montre que les forces des peuples du monde triompheront du danger d’une nouvelle guerre mondiale, à condition d’engager des luttes résolues et efficaces contre les forces réactionnaires mondiales. En même temps,il indique que les pays impérialistes et les pays socialistes ont la possibilité de parvenir à certains compromis, mais que de tels compromis “n’exigent pas des peuples des différents pays du monde capitaliste qu’ils fassent en conséquence des compromis dans leur propre pays” et que “les peuples de ces pays continueront à engager des luttes différentes selon les conditions différentes”. Ce document ne fut pas rendu public à l’époque et circula seulement parmi certains camarades dirigeants au sein du Comité central. Il fut distribué lors de la session de décembre 1947 du Comité central du Parti communiste chinois. Les camarades présents à cette session ayant approuvé unanimement son contenu, le texte intégral fut inclus par la suite dans la “Circulaire sur les décisions prises à la session de décembre 1947 du Comité central”, émise par le Comité central du Parti en janvier 1948.