Accueil → Analyse → Culture → Rubriques du Petit dictionnaire philosophique de l'URSS (1955)
LENINE Vladimir Ilitch. Théoricien génial et guide du prolétariat mondial et de toute l’humanité laborieuse, créateur du marxisme de l’époque de l’impérialisme et des révolutions prolétariennes, fondateur du Parti communiste de l’Union Soviétique et du premier Etat socialiste du monde. Lénine naquit le 10 (22) avril 1870 à Simbirsk (aujourd’hui Oulianovsk).
Son père, Ilia Nikolaïévitch Oulianov, était inspecteur des écoles populaires de la province de Simbirsk. Son frère aîné, Alexandre, fut exécuté en 1887 pour participation à l’attentat contre le tsar Alexandre III. Sorti du gymnase en 1887, Lénine se fit inscrire à la faculté de droit de l’Université de Kazan, mais bientôt arrêté comme participant actif du mouvement révolutionnaire des étudiants, il fut exclu de l’Université et déporté à Kokouchkino, village de la province de Kazan où il vécut jusqu’à l’automne de 1888. Autorisé à revenir à Kazan, il y passa l’hiver de 1888-1889.
C’est à cette époque qu’il étudie « Le Capital » et adhère à un cercle marxiste. A l’automne de 1889 il se fixe à Samara où il poursuit l’étude des œuvres de Marx et d’Engels et se prépare aux examens de droit. Au printemps et à l’automne de 1891 il passe brillamment comme externe ses examens à la Faculté de droit à Pétersbourg.
A Samara, Lénine organise le premier cercle marxiste. Déjà à l’époque, Lénine étonnait par sa connaissance profonde du marxisme. Arrivé à Pétersbourg le 31 août 1893, il devient le dirigeant reconnu des marxistes de la capitale et jouit de l’ardente sympathie des ouvriers d’avant-garde avec lesquels il travaille dans les cercles.
Au printemps et en été 1894, il écrit son premier grand ouvrage, un véritable manifeste des communistes russes, « Ce que sont les « amis du peuple » et comment ils luttent contre les social-démocrates » (V.). Dans ce livre Lénine « a arraché le masque aux populistes, ces faux « amis du peuple » qui, en fait, marchaient contre le peuple…
Lénine a montré de façon juste le chemin que devait suivre la lutte de la classe ouvrière défini son rôle de force révolutionnaire d’avant-garde dans la société et défini le rôle de la paysannerie en tant qu’alliée de la classe ouvrière » (« Précis d’Histoire du P.C.(b) de l’U.R.S.S. »).
En 1895, il groupe tous les cercles ouvriers marxistes de Pétersbourg en une « Union de lutte pour la libération de la classe ouvrière» qui fut l’embryon du parti prolétarien révolutionnaire en Russie.
En décembre 1895, Lénine est arrêté. En prison, il continue à diriger l’activité de l’« Union de lutte ». Déporté en 1897 en Sibérie, au village de Chouchenskoïe, arrondissement de Minoussinsk, province de Iénisséïsk, il écrit la brochure « Les tâches des social-démocrates russes », termine sa grande étude commencée en prison : « Le développement du capitalisme en Russie» (paru en 1899). Il revient d’exil au début de 1900 et, en juillet de la même année, part pour l’étranger. C’est là qu’il fonde l’« Iskra », premier journal politique marxiste révolutionnaire pour toute la Russie.
L’« Iskra » de Lénine contribua beaucoup à la défaite idéologique de l’économisme (V.), principal ennemi de la création d’un parti politique prolétarien indépendant, et de la fusion des groupes et cercles isolés en un seul parti ouvrier social-démocrate de Russie.
C’est avec la participation de Lénine que le IIe congrès du P.O.S.D.R. rédigea et adopta le programme révolutionnaire du parti marxiste. En dépit des opportunistes, la revendication de la révolution socialiste et de la dictature du prolétariat fut incorporée pour la première fois au programme d’un parti social-démocrate.
En mars 1902 parut le livre de Lénine « Que faire ? » (V.) qui battit sur le plan idéologique l’économisme et sa « théorie » du culte de la spontanéité, et jeta les fondements idéologiques du parti marxiste. Dans cet ouvrage, Lénine dénonce l’opportunisme à l’échelle internationale.
Au IIe congrès du P.O.S.D.R. (juillet 1903), Lénine assura la victoire du marxisme révolutionnaire sur l’opportunisme, et groupa autour de lui les marxistes révolutionnaires. La lutte titanesque de Lénine pour la création d’un Véritable parti révolutionnaire prolétarien fut couronnée de succès. Dans sa lutte contre les menchéviks aussi bien au cours du IIe congrès que plus tard, il élabora les principes d’organisation du parti communiste, parti de type nouveau, différent des partis réformistes de la IIe Internationale.
Le livre de Lénine « Un pas en avant, deux pas en arrière » (V.), paru en mai 1904 joua un rôle très important pour la mise au point des principes d’organisation du bolchévisme. Là, pour la première fois dans l’histoire du marxisme, Lénine formule la doctrine sur le parti en tant qu’organisation dirigeante du prolétariat en lutte pour la dictature prolétarienne ; il y démasque l’opportunisme et l’œuvre de désorganisation accomplie par la nouvelle « Iskra » menchevique.
A la veille de la Révolution de 1905-1907, dans la lutte contre les désorganisateurs menchéviks (P. Axelrod, Martov, Trotski et autres), Lénine fonde un organe de presse bolchevik, le journal « Vpériod ». Il préparait le parti à prendre la direction de la révolution qui s’annonçait.
Au début du mois de novembre 1905, Lénine rentre en Russie pour assumer la direction immédiate de la révolution. Il lutte contre les cadets (principal parti de la bourgeoisie russe), les socialistes-révolutionnaires, les menchéviks, les trotskistes qui entravaient le développement de la révolution, il appelle à l’insurrection armée et à la conquête de la dictature révolutionnaire démocratique du prolétariat et de la paysannerie, dirige toute la bataille de la classe ouvrière.
Dans son livre historique « Deux tactiques de la social-démocratie dans la révolution démocratique » (V.), paru en juillet 1905, il jette les bases de la tactique révolutionnaire du parti communiste et donne une nouvelle conception du rapport entre la révolution bourgeoise et la révolution socialiste : il met au point le problème de l’hégémonie du prolétariat dans la révolution démocratique bourgeoise, de la transformation de cette dernière en révolution socialiste.
Il avance une nouvelle théorie de la révolution socialiste, accomplie non par le prolétariat isolé, contre toute la bourgeoisie, mais par le prolétariat exerçant l’hégémonie, allié aux éléments semi-prolétariens, aux masses travailleuses.
Cet ouvrage de Lénine ne concluait pas encore à la possibilité, pour le socialisme, de vaincre dans un seul pays capitaliste pris à part, mais il renfermait déjà tous les éléments nécessaires pour tirer cette conclusion. C’est ce que fit Lénine au cours de la première guerre mondiale.
Après la défaite de la révolution, Lénine fut de nouveau contraint d’émigrer à l’étranger (décembre 1907). Dans les années de réaction, il resserre les rangs des bolcheviks dans la lutte contre les « liquidateurs » qui voulaient supprimer le parti clandestin, contre les « otzovistes » qui s’opposaient à l’utilisation des moyens légaux, contre les trotskistes ; il se consacre à forger un parti de type nouveau, un parti révolutionnaire marxiste. L’ouvrage de Lénine « Matérialisme et empiriocriticisme » (V.), paru en 1909, fut d’une importance capitale pour la préparation théorique d’un tel parti.
C’était la défense des principes théoriques du parti marxiste — le matérialisme dialectique et le matérialisme historique — en lutte contre l’idéalisme subjectif de Bogdanov (V.) et Cie. Lénine y développe et fait progresser la philosophie marxiste, généralise du point de vue matérialiste tout ce que la science, et avant tout les sciences de la nature, avaient acquis d’important postérieurement à la mort d’Engels.
Les longs efforts de Lénine en vue de créer un parti de type nouveau aboutirent, à la conférence de Prague (1912), à l’exclusion des menchéviks-liquidateurs du P.O.S.D.R. et à la constitution définitive des bolcheviks en parti indépendant. En 1912 fut créé sur l’initiative des ouvriers de Pétersbourg, le quotidien bolchevik légal, la « Pravda ». Lénine qui se trouvait alors à Pans, vint se fixer à Cracovie, plus près de la Russie, pour assumer la direction immédiate du travail révolutionnaire.
Arrêté par la police autrichienne lorsque la guerre impérialiste éclata, puis remis en liberté, il s’établit en Suisse. Pendant la guerre, Lénine élabora la théorie et la tactique du parti communiste dans les questions de la guerre, de la paix et de la révolution. En 1916, il écrivit son ouvrage remarquable « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme » (V.) où il formule la loi, découverte par lui, du développement inégal du capitalisme à l’époque de l’impérialisme, montre que l’impérialisme, c’est le capitalisme en putréfaction agonisant, la veille de la révolution socialiste.
Fort de sa théorie de l’impérialisme, Lénine arrive, dans ses écrits (« Sur le mot d’ordre des Etats-Unis d’Europe » — 1915, « Le programme militaire de la révolution prolétarienne » — 1916), à la conclusion que la victoire du socialisme est possible d’abord dans un seul pays pris à part, ou dans un petit nombre de pays, et que la victoire simultanée du socialisme dans tous les pays ou dans la plupart des pays capitalistes est impossible.
Il préconise la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile, formule le mot d’ordre de la défaite de « son propre » gouvernement dans la guerre impérialiste. Il dénonce et stigmatise la perfidie des chefs de la IIe Internationale, traîtres au prolétariat, partisans de la « défense de la patrie », c’est-à-dire de la dictature de la bourgeoisie.
Il arrache le masque aux social-chauvins dits centristes, Kautsky (V.) et Trotski. En même temps il continue à développer plus avant les principes philosophiques et théoriques du marxisme. Ses notes, résumés et fragments, écrits en cette période, formeront les « Cahiers philosophiques » (V.) qui constituent un apport précieux à la philosophie marxiste.
Après la chute du tsarisme en février 1917, Lénine rentre en Russie, il arrive à Pétrograd le 3 avril. Son retour fut un événement capital pour le parti, pour la révolution. Le 4 avril, il intervient avec ses célèbres « Thèses d’Avril » qui développent le génial programme de lutte pour passer de la révolution bourgeoise démocratique à la révolution socialiste sous le mot d’ordre : « Tout le pouvoir aux Soviets ! ». Après la répression de la manifestation pacifique de juillet, le Gouvernement provisoire lance un mandat d’arrêt contre Lénine. Celui-ci est contraint de rentrer dans la clandestinité.
Les menchéviks et les socialistes-révolutionnaires qui avaient définitivement sombré dans la contre-révolution, exigeaient que Lénine comparût devant le tribunal ; ennemis masqués du peuple, Trotski, Kaménev et Rykov les appuyèrent. Mais le VIe congrès du parti s’éleva résolument contre la comparution de Lénine devant un tribunal contre-révolutionnaire, estimant qu’on n’y procéderait pas à un jugement, mais à un règlement de comptes. La vie de Lénine fut sauvée. Réduit à l’illégalité, Lénine n’en continuait pas moins à diriger le parti. C’est alors qu’il écrivit son célèbre ouvrage « L’Etat et la Révolution » (V.).
Dans ce livre, il développe la doctrine de Marx et d’Engels sur la dictature du prolétariat et démontre la nécessité de démolir la machine d’Etat bourgeoise, de lui substituer la république des Soviets. En septembre 1917, les bolcheviks ayant obtenu la majorité dans les Soviets de Pétrograd et de Moscou, le parti lance de nouveau le mot d’ordre « Tout le pouvoir aux Soviets ! » qui avait été retiré après la répression de la manifestation révolutionnaire des ouvriers, soldats et matelots en juillet.
Dans une série d’articles et de lettres au Comité Central du parti et aux Comités de Pétrograd et de Moscou, Lénine appelle à l’insurrection armée et à la prise du pouvoir, donne le plan concret de l’insurrection. Les lettres de Lénine furent distribuées aux organisations locales du parti comme directives.
Le 7 octobre, Lénine arriva clandestinement de Finlande à Pétrograd et le 10 octobre le Comité Central adopta la résolution sur l’insurrection armée proposée par Lénine. Dans la nuit du 25 octobre Lénine arrive à Smolny et prend en main la direction de l’insurrection qui avait commencé le matin. Il passe à Smolny la nuit et la journée du 25 octobre (7 novembre) dirigeant l’insurrection, organisant les forces de la révolution.
Le 26 octobre (8 novembre), à la séance du IIe congrès des Soviets, il prononce un discours sur les projets de décrets historiques sur la paix et sur la terre. Lénine prend la présidence du Conseil des commissaires du peuple, premier gouvernement des ouvriers et des paysans, élu par le congrès.
Lénine se consacra tout entier à l’édification de l’Etat soviétique, à la construction du socialisme. Il traça la voie à suivre pour la construction du socialisme dans « Les tâches immédiates du pouvoir des Soviets » (1918). Plus d’une fois les ennemis attentèrent à la vie de Lénine.
Lors de l’attentat du 30 août 1918 perpétré par les socialistes-révolutionnaires de connivence avec Trotski et Boukharine, Lénine fut grièvement blessé. Dans des conditions extrêmement difficiles, la classe ouvrière dirigée par le parti communiste défendit et sauvegarda la jeune république soviétique contre la contre-révolution extérieure et intérieure. Le pays entier devint un camp retranché, toute la vie économique, politique et culturelle fut réorganisée conformément aux nécessités de la guerre ; l’Armée Rouge fut créée.
Dans une lutte longue et acharnée au cours de la guerre civile, l’Armée Rouge battit les hordes des interventionnistes et des gardes blancs. Les efforts de Lénine en vue de rassembler et d’organiser les forces du prolétariat mondial, aboutirent en 1919, à la création de la IIIe Internationale, l’Internationale communiste. Lénine mit au point le nouveau programme du P.C.(b) de Russie, adopté par le VIIIe congrès du parti.
Le rapport qu’il y fit détermina la nouvelle ligne du parti : le passage de la politique de neutralisation à celle d’une alliance solide avec le paysan moyen. Dans son ouvrage « L’économie et la politique à l’époque de la dictature du prolétariat » (1919), Lénine élucida les problèmes de la transition du capitalisme au socialisme.
Dans son article « La grande initiative » (1919) il mit en relief les principaux traits du socialisme et du communisme, montra que les samedis communistes (initiative des ouvriers de Moscou qui travaillaient sans rétribution pour la République, le samedi, aux heures libres) marquaient un tournant important dans l’attitude envers le travail et la propriété socialiste, qu’ils portaient en eux les germes du nouveau, et signifiaient « le début réel du communisme ».
La guerre civile terminée, Lénine dirigea le travail de restauration de l’économie nationale, créa le plan d’électrification. Il dressa le fameux plan de politique économique à l’époque de la dictature du prolétariat et dirigea la transition de la politique du communisme de guerre à la nouvelle politique économique (Nep).
Lénine soutint une lutte implacable contre les trotskistes, les boukhariniens et autres ennemis qui sapaient l’unité du parti et sa combativité ; il se soucie constamment de resserrer les rangs du parti, il enseigne que la direction collective est le principe suprême de direction du parti, invite à déployer la critique et l’autocritique. Au printemps de 192U, il écrit le livre : « La maladie infantile du communisme (le « gauchisme ») », le meilleur traité de stratégie et de tactique du léninisme.
Sur la proposition de Lénine, le Xe congrès du parti (1921) adopta les résolutions sur l’unité du parti et sur le remplacement des prélèvements obligatoires par l’impôt en nature. En mars 1922, Lénine écrivit l’article « De l’importance du matérialisme militant » où il applique magistralement l’esprit de parti à la théorie et à la philosophie.
Le 20 novembre 1922, déjà gravement malade, il prononce à l’assemblée plénière du Soviet de Moscou un discours sur les questions de politique extérieure et intérieure, qu’il termine par ces mots historiques : « De la Russie de la Nep sortira la Russie socialiste ». Ce fut son dernier discours devant le pays.
En 1923, dans une série d’articles de grande portée : « Pages du journal », « De la coopération », « A propos de notre révolution », « Comment réorganiser l’Inspection ouvrière et paysanne », « Mieux vaut moins, mais mieux », Lénine fait le bilan du travail accompli pendant les années de révolution et trace la voie du développement ultérieur de la révolution socialiste, lin montrant que le pays des Soviets possède tout ce qu’il faut pour construire la société socialiste intégrale, il indique au parti le chemin à suivre pour de longues années à venir.
Il élabore un programme, scientifiquement fondé, de la construction socialiste, comportant l’industrialisation du pays, la refonte socialiste de la campagne, la révolution culturelle.
Les dures conditions de sa vie sous le régime tsariste, un travail théorique et pratique intense, les conséquences d’une grave blessure, — tout cela avait ruiné la santé du grand chef, et abrégé ses jours. Le 21 janvier 1924 à 18 h. 00, Lénine mourut à Gorki, près de Moscou. La classe ouvrière du monde entier ressentit avec douleur la nouvelle de sa mort. Le peuple soviétique serra les rangs autour de son dirigeant reconnu, le parti communiste.
Le parti sous la direction de son Comité Central avec à sa tête J. Staline, grand continuateur de l’œuvre de Lénine, écrasa les trotskistes, les boukhariniens, les nationalistes bourgeois, il sauvegarda le léninisme et procéda résolument à la construction du socialisme en U.R.S.S. Le socialisme fut édifié, l’œuvre à laquelle Lénine avait consacré toute sa vie, triompha.
Aux jours de la Grande guerre nationale, la figure prestigieuse du grand Lénine animait les peuples de l’Union Soviétique aux exploits immortels. Dirigé par le parti communiste, le peuple soviétique défendit victorieusement les conquêtes de la révolution socialiste et la culture mondiale contre les envahisseurs fascistes.
A présent il poursuit avec succès la construction du communisme. Le nom de Lénine, chef et éducateur du prolétariat mondial, vivra éternellement dans le cœur de l’humanité laborieuse.