L’un des aspects essentiels du XIXe congrès est une critique récurrente de l’appareil du Parti. Il y a ici deux types de critiques. La première, c’est qu’il y a un vrai problème avec la critique et l’autocritique. Il s’agit de revenir au principe de Staline comme quoi une critique, même si elle n’est valable qu’à 5 ou 10 %, doit être pris en compte, considérée comme recevable au moins partiellement et ainsi étudiée avec soin.

Il y a de fait dans le Parti une tentative de contournement de cet aspect, et cela d’autant plus que les années d’immédiates après-guerre ont exigé une implication concrète décisive mettant de côté la focalisation sur la dimension idéologique.

Il y a donc un formalisme dans les réunions, les assemblées, les conférences, etc. La vigilance s’estompe d’autant plus.

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La seconde critique revenant lors du XIXe congrès est donc qu’il y a justement des comportements incorrects se manifestant de manière parfois dangereuse. Il y a un conformisme et une insouciance de la part des cadres, et même des secrets de l’État ou du Parti qui se voient divulgués.

Il y a ainsi une situation qui se produit où la sélection des postes se fait de manière arbitraire, perdant donc toute caractère politique correct et permettant la formation d’espaces pour les opportunistes.

Les orateurs du congrès sont lourdement revenus sur ces deux critiques à l’appareil du Parti.

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Un autre aspect est mentionné, mais sans qu’il se voit reconnu une importance fondamentale : l’énorme agrandissement du Parti.

Le PCUS(b), au premier octobre 1952, avait 6 013 259 membres et 868 886 candidats au statut de membre. En termes de nombre, la différence avec le congrès précédent, treize ans plus tôt, est très marquée. En 1938, le PCUS(b) avait en effet 1 588 852 membres et 888 814 candidats au statut de membre.

Il y a eu donc un véritable saut quantitatif, qui ne doit pas masquer un aspect fondamental : une partie significative des meilleurs membres du Parti sont morts en raison de la Seconde Guerre mondiale. Il y a ici une véritable tentative par le PCUS(b) de compenser la perte qualitative par un mélange nombre + dynamique.

L’ouverture du Parti a une nouvelle génération, associée à un élan dans la construction d’une étape nouvelle, devait être la clef pour la continuité. Tel était l’espoir de Staline.

Or, il va qu’un tel accroissement implique une perte de niveau, et cela d’autant plus qu’il y a eu une mortalité massive chez les meilleurs éléments qui ont été en première ligne face à l’envahisseur hitlérien. Staline a ici effectué un choix unilatéral : tenter de forcer la continuité du Parti en s’appuyant sur la dynamique du renforcement du pays dans l’après-guerre et dans ce qui était considéré, à tort, comme une nouvelle étape.

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Deux autres aspects essentiels s’ajoutent à cela, jouant précisément sur cette question qualitative qui plus est. Ainsi, parmi les délégués, il n’y a que 147 femmes, soit 12,3% du nombre total. C’est la preuve d’un véritable problème de fond dans le Parti et on devine que la question de la guerre a joué à l’arrière-plan, en plus du travail devant être à parcourir initialement sur cette question.

Il y a ici un problème fondamental dans le PCUS(b).

Un autre problème est la prépondérance de certains centres. Les délégués de Moscou, bastion du Parti, sont 129, soit plus de 10 % de l’ensemble. Cela forme un poids écrasant dans la vie du Parti, déformant forcément la vie démocratique interne, et cela d’autant plus dans un pays de la dimension de l’URSS.

Il faut se rappeler ici que le Parti à Leningrad – qui a 60 délégués au congrès – a dû être littéralement décapité après-guerre en raison de la formation d’une fraction appelant à former une mini-république semi-autonome.

Les autres villes russes suivent loin derrière : Gorki a 25 délégués, Sverdlovsk 23, Rostov 18, Saratov 18, Khabarovsk 18, Krasnodar 17, Voronej 17, la région de Primorye (avec Vladivostok) 17, Chelyabinsk 16, Kouibyshev 16, Bachkir 15, etc.

Il en va de même pour les villes ukrainiennes : Kiev a 20 délégués, Kharkov 16 ans, Stalino (devenue Donetsk en 1961) 15, Dnepropetrovsk 12, etc.

La délégation kazakh a 42 délégués, la géorgienne 32, la biélorusse 28, l’ouzbek 25, l’azerbaïdjanaise 23.

Cela signifie que le Parti a son centre de gravité, le plus grand nombre de membres, à Moscou et qu’il y a là-bas une dynamique particulière, inévitablement. C’est là ouvrir un espace pour les opportunistes.


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