Selon le matérialisme dialectique, chaque phénomène a deux aspects, qui forment une unité et qui, en même temps, sont en lutte. L’unité permet l’existence de phénomènes, cependant la lutte interne est la base de sa transformation (et donc de son existence). L’unité et la lutte forment elles-mêmes une contradiction.
La question s’est posée de savoir dans quelle mesure les termes d’unité et d’identité (des contraires) étaient équivalents ou lequel il fallait privilégier. On s’est vite aperçu que, plutôt que réduire le principe à un seul concept, il était plus adéquat d’élargir le champ des termes qu’on pouvait employer.
Lénine, dans ses remarques au sujet de la dialectique, souligne le caractère commun de ces deux termes d’unité et d’identité ; il déplace la question vers le rapport du général et du particulier. Il dit ainsi :
« Les contraires (le particulier est le contraire du général) sont identiques : le particulier n’existe pas autrement que dans cette liaison qui conduit au général. Le général n’existe que dans le particulier, par le particulier.
Tout particulier est (de façon ou d’autre) général. Tout général est (une parcelle ou un côté où une essence) du particulier. Tout général n’englobe qu’approximativement tous les objets particuliers. Tout particulier entre incomplètement dans le général, etc., etc. »
Il assimile de ce fait le terme unité à d’autres termes : coïncidence, identité, équivalence ; voici ce qu’il expose :
« L’unité (coïncidence, identité, équivalence) des contraires est conditionnelle, temporaire, transitoire, relative. La lutte entre contraires s’excluant mutuellement est absolue, comme sont absolus le développement et le mouvement. »
Puisque le mouvement est absolu, l’unité est particulière et relative ; de ce fait le rapport entre les contraires de cette unité des contraires est lui-même particulier et relatif. Il échappe à toute absolutisation en un seul terme.
Dans son immense classique De la contradiction, Mao Zedong présente la chose de la même manière, en élargissant les termes équivalents ou approximativement équivalents :
« L’identité, l’unité, la coïncidence, l’interpénétration, l’imprégnation réciproque, l’interdépendance (ou bien le conditionnement mutuel), la liaison réciproque ou la coopération mutuelle – tous ces termes ont la même signification et se rapportent aux deux points suivants : premièrement, chacun des deux aspects d’une contradiction dans le processus de développement d’une chose ou d’un phénomène présuppose l’existence de l’autre aspect qui est son contraire, tous deux coexistant dans l’unité ; deuxièmement, chacun des deux aspects contradictoires tend à se transformer en son contraire dans des conditions déterminées.
C’est ce qu’on appelle l’identité. »
On ainsi un rapprochement ou une assimilation des termes suivants :
– unité ;
– identité ;
– coïncidence ;
– équivalence ;
– interpénétration ;
– imprégnation réciproque ;
– interdépendance ;
– conditionnement mutuel ;
– liaison réciproque ;
– coopération mutuelle.
On a alors le paradoxe : le mouvement est absolu et pourtant on le définit de manière statique, alors que l’unité est relative (et statique) et pourtant on en a une définition mouvante, changeante, en mouvement, au moyen de différents termes pour essayer de la caractériser.
Ce paradoxe est en réalité lui-même dialectique. L’unité est en effet statique mais le statique est en mouvement, de par l’identité des contraires ; de même le mouvement est identique au statique, et donc il n’est pas en mouvement.
C’est que l’identité, l’unité, la coïncidence… des contraires est présente partout, pour tout phénomène ; cela fait qu’elle est présente :
– dans le phénomène lui-même, dans le rapport entre l’unité et la lutte des contraires, unité et lutte formant elles-mêmes une contradiction ! ;
– dans le rapport qu’on peut avoir au phénomène : la saisie d’un phénomène au moyen de l’intellect est elle-même dialectique et donc contradictoire.
Ainsi, l’identité des contraires est valable pour la saisie de cette identité des contraires elle-même – la dialectique de la matière est dialectique et ne peut être saisie que dialectiquement.