Le 0 joue un rôle majeur dans les mathématiques ; en fait, sans le 0, il ne peut plus y avoir de mathématiques. Le 0 est en effet à l’intersection des contradictions fondamentales des mathématiques, il forme le nexus du rapport contradictoire.

Voici comment le problème se pose. Si on prend les mathématiques dans leur forme élémentaire, on tombe sur la quantité. On a par exemple 1+1=2, 2+3=5, etc. Le rapport avec la physique est facile à voir : une chose s’ajoute à une autre chose, on obtient deux choses, deux choses s’ajoutent à trois choses et on obtient alors cinq choses, etc.

Faut-il alors voir du côté de la qualité ? On pourrait penser que oui, puisque la qualité est le contraire de la quantité ; ce qui n’est pas d’un côté doit se retrouver de l’autre.

Mais si on prend la qualité, si on va dans cette direction, on passe dans le développement des mathématiques en soi. Or, ce qu’on veut, c’est aller en arrière dans le processus, vers la matrice des mathématiques.

Le développement des mathématiques transporte ses propres contradictions et cela va rendre plus complexe la question, de manière inutile.

Ce qu’il faut, c’est comprendre comment il y a une contradiction interne dans les mathématiques dans leur émergence même.

Il faut donc en rester à la quantité, puisque les mathématiques naissent de la quantité.

Quelle est la contradiction de la quantité ? La quantité a deux aspects : elle est un processus d’accumulation et un aboutissement. On a 1 et ensuite on a de nouveau 1, ce qui donne 2. L’accumulation des deux 1 aboutit au 1.

Le processus est par contre masqué, dans la mesure où mathématiquement parlant, l’aboutissement est l’accumulation et inversement. On a tout autant 1+1=2 que 2=1+1.

En soi, cela ne nous amène de toutes façons pas très loin, puisqu’il s’agit en fin de compte de la contradiction relevant de l’identité. 2 est à la fois 2 et non-2.

Mais prenons non-2 et constatons qu’il s’agit aussi de 1+1. On n’est plus dans la négation – 2 n’est pas 2 – mais dans la contradiction entre qualité (2) et quantité (1+1).

Que devient alors la négation, justement, par rapport à cela ? Car dans l’identité, en tant que non-2, 2 est aussi 0, dans la mesure où toute chose est ce qu’elle est et, en même temps, n’est pas ce qu’elle est.

Il faut se fonder là-dessus.

On a en effet par conséquent : 1 + 1 = 2, et en même temps : 1 + 1 = 0.

2 est une qualité relevant d’une quantité (1+1) et en même temps il n’est pas lui-même (0).

Or, comme on le sait, en mathématiques, on a 1 – 1 = 0.

Ce qui revient donc à dire que : 1 + 1 = 1 – 1.

Est-ce juste ? Tout à fait, c’est une contradiction. On découvre donc un aspect nouveau et essentiel dans les mathématiques. Il relève de la quantité et on voit que c’est par le 0 qu’on le retrouve.

Le 0 est la clef de l’identité de la quantité. Le 0 est le nexus où les contradictions se rejoignent.

En fait, pour les mathématiques, 0 n’est rien… même si les mathématiques sentent bien le problème et ont développé le principe de « tendre vers 0 ».

Karl Marx, dans ses études sur les mathématiques, a précisément remarqué comment avec le calcul différentiel, les mathématiques butaient sur 0 et son rapport au pratiquement rien, et s’en sortaient avec un tour de passe-passe.

C’est inévitable, car seul le matérialisme dialectique révèle la nature du 0.

Pour les mathématiques, le 0 est le néant. Mais pour le matérialisme dialectique, la matière est inépuisable.

Cela signifie que l’inverse de 0, selon les mathématiques, c’est « quelque chose ». Pour le matérialisme dialectique, par contre, l’inverse de 0, c’est l’infini.

« Quelque chose », pour le matérialisme dialectique, est en effet inépuisable.

L’inverse du néant, c’est l’infini, pas le fait qu’il y ait « quelque chose ».

Et là on peut encore passer un cap et cela résout la question du 0, enfin !

Pour le matérialisme dialectique, en effet, le néant n’existe pas. Cela veut dire que le 0 ne peut en fait pas exister.

0, c’est en réalité quelque chose qui tend vers 0, mais qui ne peut absolument jamais devenir 0.

Même dans 1-1=0, le 0 n’est pas un 0 absolu, car dans tout processus il y a inégalité de développement. Il serait unilatéral d’affirmer que 1=1 et que 1-1=0.

Il y a forcément un décalage, une nuance, une différence entre 1 et 1 dans les deux 1 de 1-1.

Les mathématiques pratiquent un raccourci en supprimant l’inégalité de développement entre les éléments, dans le processus. Elles fonctionnent en posant une égalité relative à prétention absolue quant à ses éléments.

1 est 1, 2 est 1 et 1 où le premier 1 est pareil au second 1, etc. C’est erroné. Mais c’est le prix à payer pour obtenir une formalisation statique du mouvement ininterrompu dans la matière.

Et là où cela se lit, du point de vue du matérialisme dialectique, c’est dans le 0.

Dans tout processus mathématique, c’est 0 qui transporte l’inégalité, inégalité à laquelle il est impossible d’échapper. C’est dans le 0 que l’inégalité vient se cacher.

0 n’est donc pas 0 en tant que « rien », mais une expression du caractère inépuisable de la matière.

Si on dit 1-1=0, on doit comprendre qu’en même temps, cela veut dire 1-1=l’infini.

La raison est que rien ne peut « disparaître » d’une part, qu’il y a toujours de l’inégalité entre des développements, de l’autre.

C’est ainsi à travers le 0 que les mathématiques vont se développer du point de vue dialectique, puisque c’est par lui qu’on comprend que tout résultat est d’une double nature : tout résultat est non seulement lui-même et non lui-même, mais également dialectique en tant que processus contradictoire nécessairement marqué par une inégalité de développement de ses éléments.

Le 0 n’est donc pas la fin d’un processus mathématique, mais exprime le redémarrage infini de la matière inépuisable dans ses processus, phénomènes, dans son mouvement.


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