Depuis les évènements de la Place Maïdan en 2014, c’est la fraction nationaliste pro-occidentale des oligarques ukrainiens qui est au pouvoir. Ceux-ci sont liés à l’Ouest de l’Ukraine, à la Galicie notamment qui n’a été que tardivement formellement ukrainienne.

La fraction nationaliste pro-occidentale a remplacé la fraction pro-russe qui était représentée par Ianoukovytch, s’étant lui-même exilé en Russie en 2014. Les oligarques pro-occidentaux, n’ont cessé d’exacerber un nationalisme ardent depuis leur prise de pouvoir, pour se légitimer en tant que clique au pouvoir.

Pour cela, ils font appel à la figure nationaliste de Stepan Bandera, de l’UPA (Armée Insurrectionnelle Ukrainienne) et de l’OUN (Organisation des Nationalistes Ukrainiens) qui ont joué un rôle important dans les massacres de Polonais en Volhynie dans la guerre anti-soviétique et surtout dans l’application de la Solution Finale nazie en Ukraine.

C’est à dire qu’ils ont pleinement participé à la Shoah par balle en Ukraine en aidant notamment les troupes nazies pendant le massacre de Babi Yar.

Stepan Bandera, un nationaliste antisémite, antipolonais, anticommuniste et pro-nazi

Stepan Bandera rejoint l’Organisation des Nationalistes Ukrainiens en 1928, en entrant à l’école Polytechnique de Lviv qui à l’époque est une ville polonaise. Il fait partie des cadres dirigeants de l’organisation, il y est notamment en charge de la propagande.

Il part ensuite pour l’Allemagne dont il revient en 1933, et deviendra, d’après un rapport de l’ONU de 1947, à partir de 1934 un agent du renseignement nazi et membre dans la section spéciale de la Gestapo. Il est responsable de la zone de l’Ouest de l’OUN et dirige un nombre important d’assassinats politiques, surtout contre des civils ukrainiens accusés d’être des traîtres.

Après l’assassinat par les nationalistes ukrainiens du ministre de l’Intérieur polonais en 1934, il est condamné à mort par deux fois, mais sa peine est modifiée en prison à perpétuité. Cependant l’Allemagne Nazie le libère lors de l’invasion de la Pologne en septembre 1939. Les forces nazies lui donne des armes, fournissent des camps d’entraînements.

Quelques jours après la déclaration d’indépendance de l’Ukraine, il est arrêté par les nazis le 5 juillet 1941, il continue de diriger l’OUN depuis sa prison. Il est libéré de prison en 1944 et continue d’inciter les masses ukrainiennes à combattre l’Armée Rouge.

Après avoir collaboré avec les forces fascistes en Allemagne, où il avait trouvé refuge par ailleurs, Bandera en sentant la victoire de l’Armée Rouge sur le nazisme en Europe se précipita chercher de l’aide auprès des impérialistes anglais et américains.

Ceux-ci l’ont couvert alors que l’Armée Rouge et les forces démocratiques et populaires présentes dans l’Est de l’Allemagne cherchait à l’éliminer en tant qu’ennemi du peuple ukrainien.

L’Armée Rouge, en mai 1946, emprisonna, captura et tua bon nombre de criminels de guerre et bandits fascistes, d’après l’Université du Nord-Est de Boston, au nombre de 110 825 rien que pour 1946 et ces chiffres auraient doublé jusqu’en 1950.

Bandera, mais surtout son organisation continuera d’ailleurs son travail de sape anti-communiste, anti-ukrainien et anti-soviétique après la guerre, en dirigeant à distance, avec la protection des forces impérialistes et le soutien financier de l’impérialisme anglais et de la CIA, la guérilla en Ukraine qui continuera de se rendre coupable d’actes terroristes contre la population ukrainienne polonaise et russe jusqu’à la dissolution de l’UPA en 1954.

Ce fut notamment le cas le 28 mars 1947 où un commando de l’UPA assassina le général communiste polonais Karol Świerczewski, dit Général Walter lors d’une embuscade alors que celui-ci venait effectuer une inspection de garnison dans la région frontalière avec l’Ukraine des Bieszczady.

Mais l’UPA n’ayant pas de soutiens dans les larges masses en Ukraine disparaîtra peu à peu suite aux offensives du ministère de l’Intérieur soviétique. Ainsi son principal commandant en Ukraine, Roman Choukhevytch, sera abattu en 1950.

Depuis, coupé de soutien populaire et de nouveaux militants, les agitateurs fascistes se voient obligés de se dissoudre en 1954.

Bandera quant à lui continue de vivre en exil en Allemagne sous une fausse identité protégé par les impérialistes anglais et sous la couverture des impérialistes américains.

Il essaiera, avec l’aide notamment des services de renseignements ouest-allemands, le BND, dirigés par un ancien nazi, d’infiltrer des fascistes ukrainiens sur les terres de la République Socialiste Soviétique d’Ukraine. Après une longue traque qui commença au sortir de la Guerre, il finira par être éliminé en1959 par le KGB.

Stepan Bandera, liant pour la faction pro-occidentale de la bourgeoisie bureaucratique ukrainienne

Bandera est donc un nationaliste ukrainien pro-fasciste ayant collaboré avec le IIIe Reich, le fait qu’il soit aujourd’hui célébré depuis les événements de la place Maïdan témoigne du chaos régnant au sein de la clique bourgeoise bureaucratique en Ukraine.

S’il y avait eu une sorte de statu quo, dû au fait que la faction pro-russe avait une importance énorme dans le pays, étant historiquement plutôt à l’Est de celui-ci.

Mais depuis que celle-ci a été évincée par la fraction nationaliste, pro-occidentale, pour légitimer leur pouvoir ils ont usé d’un nationalisme ardent et même financé des paramilitaires fascistes comme la brigade Azov avant de les intégrer dans l’armée régulière ukrainienne.

Stepan Bandera est utilisé comme liant pour unir les masses ukrainiennes dans la volonté de la clique bureaucratique nationaliste, pro-occidentale, de brutalement mettre fin à la domination de la clique bureaucratique pro-russe.

Ainsi Porochenko, président de 2014 à 2019, remplace la Journée du défenseur de la Patrie, ayant lieu le 23 février, qui était une fête soviétique nommée « journée de l’Armée et de la Marine soviétique » à partir de 1949, par une fête le 14 octobre commémorant la fondation de l’UPA.

Et cette même clique réécrit entièrement l’Histoire ukrainienne, en dénonçant Staline et sa politique dans les Républiques Soviétiques, qui a justement permis aux larges masses ukrainiennes d’apprendre la langue ukrainienne.

Aujourd’hui, alors même que ces peuples sont des peuples avec une histoire commune, des siècles de métissages culturels, il y a un véritable repli nationaliste comme peut en témoigner une simple phrase de Dmytro Kouleba, ministre des affaires étrangères ukrainien dans une interview donnée à Libération en date du 6 avril 2021 :

« Lors de leur rencontre à Paris en décembre 2019, le président Volodymyr Zelensky avait semblé plutôt enclin au dialogue avec Vladimir Poutine. Qu’en est-il désormais ?

Une des raisons du changement de comportement du président Poutine est qu’il a sous-estimé le président Zelensky. »

Les Ukrainiens s’imaginent bien entendu invincibles, car soutenu par les États-Unis.

Ceux-ci d’ailleurs veulent rentrer dans l’OTAN aujourd’hui, et multiplient les demandes d’aides diplomatiques. C’est là le sens des différents voyages de Zelensky en Europe et dans le monde, comme sa rencontre avec le président français Emmanuel Macron mi-avril 2021.

Plus tard Kouleba poursuit :

« Les officiels russes associent systématiquement Washington à l’Ukraine dans leurs déclarations. Assiste-t-on à un premier test de l’administration Biden ?

Absolument.

Moscou est en train de tester Washington, c’est un des buts affichés. Je suis satisfait de la manière dont les Etats-Unis répondent. En une semaine, les ministres des Affaires étrangères de nos pays, ceux de la Défense, les chefs d’état-major, les conseillers à la sécurité et finalement les deux présidents, se sont parlé.

C’est la première fois que nous avons une telle diversité de contact avec les Etats-Unis sur une période si courte.

Les messages que nous avons entendus des Américains, que nous avons rendus publics, ont certainement été entendus à Moscou. »

C’est ici une illustration de la volonté des nationalistes ukrainiens, historiquement et culturellement pourtant liés à la Russie (dès le Rus’ de Kiev), ils font comme Bandera et au lieu de s’émanciper pleinement aujourd’hui de l’impérialisme russe, ils veulent se soumettre à un autre impérialisme (d’abord allemand puis américain − anglais pour Bandera), l’impérialisme américain aujourd’hui.

C’est bien là le sens des agitations diplomatiques du président Zelensky ces derniers jours.

Ainsi, il est logique que Bandera soit célébré dans les rues ukrainiennes, comme ce fut le cas le 1er janvier de cette année où plus d’un millier de personnes ont marché au flambeau dans les rues de Kiev à sa gloire, et ce malgré que le président actuel soit lui-même juif, puisque c’est la fraction nationaliste de la bourgeoisie bureaucratique qui l’a placé là.

La figure de Bandera permet à elle seule de réécrire l’histoire récente de l’Ukraine, d’entamer « naturellement » un rapprochement sur la base d’une soumission avec l’Ouest. La fraction nationaliste de la bourgeoisie bureaucratique ukrainienne est liée aux couches occidentales de l’Ukraine, les mêmes territoires où l’UPA avait un réel poids.

C’est à dire principalement la Galicie, qui était jusqu’en 1939 sous domination polonaise, ce sont les territoires les plus occidentaux de l’Ukraine, n’ayant été rattaché à l’Ukraine en tant que telle que grâce à l’Union Soviétique avec l’ajustement de la ligne Curzon après la seconde guerre mondiale.

L’utilisation des banderistes permet de nier que l’Ukraine est au contraire ukrainienne grâce à l’action des communistes ukrainiens qui ont permis de développer pleinement la culture ukrainienne.

On se retrouve ainsi aujourd’hui comme au temps du Tsar, avec une Russie impérialiste qui nie totalement les autres peuples présents dans la région et rêve d’une Grande-Russie et des nationalistes ukrainiens qui nient pleinement l’Histoire et préfère se tourner vers une romance totale en pensant pouvoir s’en sortir comme par miracle avec l’aide des États-Unis.


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