L’anarchisme est une théorie du XIXe siècle, né sur le terrain de la petite propriété et faisant de l’individu la figure historique de notre époque, tout comme le libéralisme.

Au sein de la première Internationale, le marxisme a réussi à vaincre l’anarchisme, dont les figures les plus connues étaient alors Pierre-Joseph Proudhon et le russe Mikhaïl Bakounine.

L’anarchisme a de son côté suivi son propre chemin, alors que le mouvement ouvrier est devenu social-démocrate, au sein de la seconde internationale, avec notamment Karl Kautsky, Émile Vandervelde, Lénine, Rosa Luxembourg.

Ce chemin n’a pas consisté en un développement rationnel, car l’individualisme anarchiste est une philosophie dont la base sociale est par définition petite-bourgeoise.

L’anarchisme est la philosophie de la petite production associative, de la délocalisation des décisions, de l’autogestion, c’est-à-dire d’un capitalisme local où il y a entraide, afin de se maintenir et d’empêcher la formation d’un capitalisme plus développé, aboutissant nécessairement aux monopoles.

De par la force historique de la petite propriété dans notre pays, l’anarchisme a toujours été très puissant.

Les figure de l’anarchisme français traverse de manière romantique l’histoire et nos frontières, que cela soit dans ses variantes de gauche (Daniel Cohn-Bendit, Renaud, Georges Brassens, Léo Ferré) comme de droite (principalement dans la littérature et le cinéma, avec Louis-Ferdinand Céline, etc.).

Toutes les variantes ont également existé en Belgique, depuis l’anarchisme pacifiste entièrement individualiste, à celui de variante terroriste avec la « propagande par le fait », en passant par le syndicalisme révolutionnaire, avec Henri Fuss-Amoré et son journal « L’Action Directe ».

Cette tendance historique à l’anarchisme a été si forte qu’il y a même eu des tentatives internes de la dépasser, soit vers un marxisme libertaire largement influencé par le trotskysme, soit vers le marxisme en tant que tel.

Enfin, de manière importante depuis la fin du XIXe siècle, il existe le courant de type syndicaliste, qui prétend rejeter les institutions pour former un mouvement ouvrier « pur », alors qu’il porte en réalité l’apolitisme traditionnel de l’anarchisme.

L’anarcho-syndicalisme et le syndicalisme révolutionnaire ne sont que des variantes de l’anarchisme, leur noyau dur correspondant à cette idéologie : éloge des petites structures décentralisées, refus de la centralisation, négation des questions politiques et culturelles, etc.

Dans tous les cas, l’anarchisme est une idéologie portée par la petite-bourgeoisie radicalisée. Le discours « révolutionnaire » ne vise qu’à masquer le fait que le mouvement anarchiste n’est qu’une expression mécanique de la protestation petite-bourgeoise contre la bourgeoisie et l’État.

Le caractère diffus et décomposé de l’anarchisme est d’ailleurs ici sa force, puisque toutes les variantes semblent cohérentes, apparaissant comme une sorte de convergences des protestations.

Cela sera d’ailleurs érigé en théorie « insurrectionnelle » qui trouvera un large écho en Belgique, avec la tendance de « L’insurrection qui vient », qui prône des communautés autogérées diffusant leur modèle et rompant avec le « système ».

L’anarchisme tombe d’ailleurs le masque à chaque grande crise, où sa nature de classe est démasquée et où il disparaît inexorablement. En France, il n’a ainsi pas participé au combat lors de l’affaire Dreyfus, il a basculé dans le patriotisme en 1914, il a refusé le Front populaire, il est resté à l’écart de la Résistance.

A chacune de ces crises, l’anarchisme s’est effondré, pour ne se relancer que lentement par la suite, avec des individus profitant du caractère diffus de l’anarchisme pour le relancer.

La seule fois où l’anarchisme a possédé un rôle historique, en Espagne avec la CNT, il a remis en cause ses principes pour soutenir le Front populaire, avant de succomber à ses factions ultras, d’abord en 1937 et enfin à la toute fin de la guerre, avec la capitulation.

L’anarchisme, s’il est raisonné, n’est plus de l’anarchisme et d’ailleurs il a souvent profité d’individus plus ou moins liés au prolétariat cherchant à faire avancer les luttes de classes et cherchant à former une théorie conséquente du communisme libertaire, c’est-à-dire d’un anarchisme organisé, capable d’intervenir politiquement.

Cependant, cela s’appelle précisément le bolchevisme, une fois qu’on a compris sa réelle nature et qu’on a rejeté les déviations révisionnistes.

L’anarchisme n’est jamais capable de dépasser l’individualisme ; l’anticommunisme a toujours été son aspect principal, dans la mesure où pour lui la société consiste justement en le collectivisme qu’il refuse.

Même ses mutations – comme le fameux « maoïsme » de type anarchiste – en restent aux valeurs essentielles de l’anarchisme : spontanéité dans l’action, refus de la politique et de l’idéologie, incapacité à systématiser ses positions, caractère diffus sur le plan de l’organisation, etc.

Cela est également tout à fait vrai pour « l’antifascisme » anarchiste apparu ces dernières années, qui modifie le sens du terme antifasciste pour l’utiliser de manière post-moderne comme mot fourretout anti « oppression ».

Là encore, la force de l’anarchisme consiste en ce caractère diffus, permettant d’agglomérer une partie réelle de la petite-bourgeoisie radicalisée. Ce qu’on appelle communément l’extrême-gauche depuis mai 1968 n’est d’ailleurs, en pratique, rien d’autre que cette petite-bourgeoisie radicalisée.

Avec la seconde crise générale du capitalisme, on voit cet anarchisme se renforcer, charrier toujours davantage de variantes décomposées.

Faut-il considérer qu’il s’agit d’un tendance progressiste, d’une contribution aux luttes de classe du prolétariat ? Faut-il participer à la mouvance anarchiste, au sens large ?

Absolument pas. L’anarchisme a son propre agenda. Ce qu’il vise, c’est soit le ralentissement du capitalisme, soit la formation d’un capitalisme associatif, soit une protestation symbolique contre l’État.

Même quand il prétend être antifasciste, l’anarchisme ne se focalise jamais sur le fascisme, préférant ramener celui-ci à l’État.

L’anarchisme n’est rien d’autre qu’une obsession sur l’État produite par la précarité de la situation de la petite-bourgeoisie, qui n’est pas une classe, mais une simple parenthèse liée au développement des forces productives.

Protester contre l’État, tout en prétendant le nier, prétendre combattre le capitalisme afin de faire pression sur la bourgeoisie, telle est la nature de l’anarchisme.

Qui ne rompt avec l’anarchisme, avec ses méthodes, sa conception individualiste du monde, est incapable de raisonner en termes de lutte des classes, de front antifasciste.

Les différentes variantes d’anarchisme – depuis le pacifisme individualiste jusqu’au pseudo maoïsme – ont toutes en commun de ne chercher à lutter que contre « l’oppression », sans jamais avoir d’analyses politiques et culturelles.

Le combat contre l’anarchisme est donc logique et a la même nature que celui mené par Karl Marx dans la Première Internationale, ainsi que par la social-démocratie de la fin du XIXe siècle.

Centre Marxiste-Léniniste-Maoïste de Belgique
27 mai 2024


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