A propos de la lettre ouverte du Comité Central du P.C.U.S.(III)
Rédaction du Renmin Ribao et Rédaction du Hongqi, 26 septembre 1963

La Yougoslavie est-elle un pays socialiste ?

La question ici n’est pas seulement de savoir comment déterminer la nature de l’Etat yougoslave, mais encore de savoir quelle voie les pays socialistes doivent suivre, la voie de la Révolution d’Octobre, afin de poursuivre la révolution socialiste jusqu’au bout, ou bien celle de la Yougoslavie, menant à la restauration du capitalisme. Il s’agit également de savoir si la clique Tito est un parti frère et une force anti-impérialiste ou un groupe de renégats du mouvement communiste international et de laquais de l’impérialisme.

Tito à Brioni en 1964

Tito à Brioni en 1964

Sur cette question, des divergences fondamentales existent entre, d’une part, la direction du Parti communiste de l’Union soviétique et, d’autre part, nous et tous les autres marxistes-léninistes du monde.

Tous les marxistes-léninistes estiment que la Yougoslavie n’est pas un pays socialiste. Ayant trahi le marxisme-léninisme, trahi le peuple yougoslave, les milieux dirigeants de la Ligue des Communistes de Yougoslavie sont des renégats du mouvement communiste international et des laquais de l’impérialisme.

La direction du P.C.U.S. soutient, cependant, que la Yougoslavie est un pays socialiste, que la Ligue des Communistes de Yougoslavie se fonde sur le marxisme-léninisme, qu’elle compte parmi les partis frères et fait partie des forces anti-impérialistes.

Dans sa lettre ouverte du 14 juillet dernier, le Comité central du P.C.U.S. proclamé la Yougoslavie « pays socialiste » et la clique Tito « parti frère au pouvoir ».

Le camarade Khrouchtchev a visité récemment la Yougoslavie, il y a prononcé de nombreux discours, dans lesquels il a révélé plus clairement que jamais, le véritable point de vue de la direction du P.C.U.S., levant une fois pour toutes le voile pudique dont elle s’était servie pour se couvrir dans cette question.

Aux yeux de Khrouchtchev, la Yougoslavie est non seulement un pays socialiste, mais encore un pays socialiste « avancé », un pays où l’on n’entend pas de « bavardages sur la révolution » mais où l’on constate « l’édification concrète du socialisme », un pays dont le développement apporte « une contribution concrète à l’ensemble du mouvement ouvrier révolutionnaire international1. Khrouchtchev considère que tout cela mérite d’être admiré et étudié par lui.

Aux yeux de Khrouchtchev, la direction du P.C.U.S. et la clique Tito sont « non seulement des frères de classe », mais aussi des « frères liés … par les objectifs communs qu’ils ont devant eux », et la direction du P.C.U.S. est « une alliée sûre et fidèle » de la clique Tito2.

Khrouchtchev estime qu’il a trouvé au sein de la clique Tito le vrai « marxisme-léninisme ». Or, dans sa lettre ouverte, le Comité central du P.C.U.S. disait que « des désaccords sur plusieurs questions idéologiques de principe demeurent entre le P.C.U.S. et la Ligue des Communistes de Yougoslavie ». C’était une feinte, car maintenant Khrouchtchev déclare aux dirigeants yougoslaves : « Nous avons une seule et même idéologie et sommes guidés par la même théorie », avec la même position « marxiste-léniniste »3.

Il y a longtemps que Khrouchtchev a jeté par-dessus bord la Déclaration de 1960.

La Déclaration dit : « Les Partis communistes ont condamné à l’unanimité la variante yougoslave de l’opportunisme international, qui est une expression concentrée des ’théories’ des révisionnistes contemporains. »

Elle poursuit : « Ayant trahi le marxisme-léninisme, proclamé par eux périmé, les dirigeants de la Ligue des Communistes de Yougoslavie ont opposé à la Déclaration de 1957 leur propre programme révisionniste et anti-léniniste. Ils ont opposé la L.C.Y. à tout le mouvement communiste international… »

Elle dit encore : Ils ont ’fait dépendre la Yougoslavie « de la soi-disant ’aide’ des impérialistes, américains et autres, et ont mis ainsi le peuple yougoslave en danger de perdre les conquêtes révolutionnaires qu’il avait acquises au prix d’une lutte héroïque ».

Elle ajoute : « Les révisionnistes yougoslaves se livrent à des agissements subversifs contre le camp socialiste et le mouvement communiste mondial. » « … ils déploient une activité qui porte préjudice à l’unité de toutes les forces et de tous les Etats pacifiques. »

La Déclaration est on ne peut plus claire, et pourtant la direction du P.C.U.S. ose affirmer : « Conformément à la Déclaration de 1960, nous estimons que la Yougoslavie est un pays socialiste »4. Quelle impudence !

Nous voudrions demander :

Un pays qui, comme le dit la Déclaration, a pour guide les théories du révisionnisme contemporain, variante de l’opportunisme international, peut-il être un pays socialiste ?

Un pays qui, comme le dit la Déclaration, a trahi le marxisme-léninisme et s’est opposé à tout le mouvement communiste international, peut-il être un pays socialiste ?

Un pays qui, comme le dit la Déclaration, se livre à des agissements subversifs contre le camp socialiste et le mouvement communiste mondial, peut-il être un pays socialiste ?

Un pays qui, comme le dit la Déclaration, déploie une activité qui porte préjudice à l’unité de toutes les forces et de tous les Etats pacifiques, peut-il être un pays socialiste ?

Un pays qui est entretenu au prix de plusieurs milliards de dollars américains par les pays impérialistes, ayant les Etats-Unis pour chef de file, peut-il être un pays socialiste ?

Ce serait vraiment là un phénomène étrange, inouï !

Il semble que le camarade Togliatti soit plus explicite que le camarade Khrouchtchev. Ainsi, Togliatti a dit sans ambages que la position de la Déclaration de 1960 vis-à-vis de la clique Tito était « erronée »5. Puisque Khrouchtchev s’obstine à réhabiliter la clique Tito, il devrait s’exprimer avec plus de franchise, sans avoir nullement besoin de faire mine de défendre la Déclaration.

La conclusion de la Déclaration sur la Yougoslavie est-elle erronée ? Doit-elle être rejetée ? Togliatti a dit qu’elle était erronée et devait être rejetée. En réalité, Khrouchtchev, lui aussi, a dit qu’elle était erronée et devait être rejetée. Nous disons, quant à nous, qu’elle n’est pas erronée et qu’elle ne doit en aucun cas être rejetée. Les autres partis frères qui s’en tiennent fermement au marxisme-léninisme, qui défendent la Déclaration de 1960 affirment tous, eux aussi, qu’elle n’est pas erronée, et qu’il n’y a pas lieu de la rejeter.

La direction du P.C.U.S. estime qu’agir comme nous le faisons, c’est maintenir une « formule stéréotypée », c’est s’en tenir à la « loi de la jungle du monde capitaliste »6, c’est « ’excommunier’ la Yougoslavie du socialisme »7. Elle soutient, de surcroît, que celui qui dit que la Yougoslavie n’est pas un pays socialiste verse dans le « subjectivisme », « ne tenant point compte des faits »8. Tandis que lorsqu’elle affirme, les yeux fermés, que la Yougoslavie est un pays socialiste, la direction du P.C.U.S., elle, aurait « procédé à partir des lois objectives, de la théorie du marxisme-léninisme » et dégagé une conclusion découlant d’ »une analyse approfondie de la réalité »6.

Quelle est donc la situation réelle en Yougoslavie et à quelle conclusion parvient-on lorsque, partant des lois objectives et de la doctrine du marxisme-léninisme, on ’procède à une analyse approfondie de la réalité en Yougoslavie ?

Examinons maintenant cette question.

LE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL PRIVE DANS LES VILLES YOUGOSLAVES

L’un des arguments dont Khrouchtchev se sert pour affirmer que la Yougoslavie est un pays socialiste est que, dans ce pays, il n’y a pas de capital privé, pas d’entreprises privées, pas de capitalistes.

En est-il vraiment ainsi ? Absolument pas.

La vérité est que le capital privé et les entreprises privées existent en Yougoslavie sur une grande échelle et qu’ils se développent rapidement.

Compte tenu de la situation existant en général dans les pays socialistes, il n’est pas étonnant que divers secteurs économiques, y compris le secteur du capital privé, subsistent dans l’économie nationale pendant une période assez longue après la prise du pouvoir par le prolétariat. Il s’agit de savoir quelle politique est adoptée par le pouvoir à l’égard de l’économie du capital privé, la politique d’utilisation, de limitation, de transformation et d’élimination, ou la politique de laisser-faire, de soutien et d’encouragement. C’est là un critère important permettant de » juger si un pays se développe dans le sens du socialisme ou dans celui du capitalisme.

En ce qui concerne cette question, la clique Tito a tourné le dos au socialisme. Les réformes sociales qui furent appliquées par la Yougoslavie dans les premiers temps de l’après-guerre n’étaient déjà pas radicales. Après que la clique Tito eut consommé sa trahison, la politique adoptée par elle n’a pas été celle de la transformation et de l’élimination du capital privé et des entreprises privées, mais une politique consistant à les soutenir et à les développer.

Une réglementation rendue publique par la clique Tito en 1953 stipule que « des groupes de citoyens » ont le droit de « fonder des entreprises » et d’ »employer de la main-d’œuvre ». Aux tenues d’un décret promulgué dans la même année par la clique Tito, les particuliers ont le droit d’acquérir des biens immobiliers appartenant aux organisations économiques d’Etat.

En 1956, par sa politique fiscale et diverses autres mesures, la clique Tito a encouragé les autorités locales à donner appui au capital privé.

En 1961, la clique Tito décida que les particuliers auraient le droit d’acheter des devises étrangères.

En 1963, la clique Tito inscrit sa politique de développement du capital privé dans sa Constitution. Celle-ci stipule qu’en Yougoslavie, les particuliers peuvent fonder des entreprises et employer de la main-d’œuvre.

Avec l’aide et l’encouragement de la clique Tito, les entreprises privées et le capital privé se sont très rapidement développés dans les villes yougoslaves.

Selon le Mémento de statistiques de Yougoslavie, 1963, publication officielle de Belgrade, on compte en Yougoslavie plus de 115.000 entreprises « artisanales » privées. En fait, beaucoup de leurs propriétaires ne sont pas des « artisans », mais de typiques capitalistes.

Comme l’admet la clique Tito, bien que la loi ne permette pas aux propriétaires d’employer plus de cinq ouvriers, il en est qui dépassent ce chiffre de dix fois ou de plus de vingt fois ; certains même emploient « cinq à six cents ouvriers »9. Et un certain nombre d’entreprises privées réalisent chaque année un chiffre d’affaires supérieur à 100 millions de dinars10.

Le Politika de Yougoslavie a révélé le 7 décembre 1961 que bien souvent ces propriétaires d’entreprises privées sont de « gros propriétaires », « Il serait difficile de préciser l’étendue de leur réseau et le nombre d’ouvriers employés par eux, Aux termes de la loi, ils ont le droit d’employer cinq ouvriers pour les aider. Mais ceux qui connaissent bien la question savent que ces cinq ouvriers sont en fait cinq entrepreneurs qui, à leur tour, ont leurs propres ’sous-entrepreneurs’ », « Souvent, ces entrepreneurs ne travaillent plus eux-mêmes, mais donnent des ordres, font des plans, vont en automobile d’une entre prise à l’autre et signent des contrats. »

D’ailleurs, des, profits réalisés par ces propriétaires privés, il ressort que ceux-ci sont purement et simplement des capitalistes. Le journal yougoslave Svet écrivait le 8 décembre 1961 que « le revenu net de certains artisans privés atteint un million de dinars par mois » ; Le Vecernje novosti de Belgrade écrivait le 20 décembre 1961 qu’à Belgrade « les propriétaires de 116 entreprises privées ont eu chacun, l’année dernière, un revenu supérieur à 10 millions de dinars », certains propriétaires « ont obtenu en une seule année un revenu se montant à environ 70 millions de dinars », chiffre équivalant à près de 100.000 dollars américains au taux de change officiel.

Dans les villes de Yougoslavie, il existe non seulement des industries privées, des entreprises privées de services publics, des établissements commerciaux privés, des sociétés immobilières privées, des affaires de transport privées, mais encore des usuriers connus sous le nom de « banquiers privés ». Ces derniers mènent leur activité au grand jour et font même paraître dans les journaux des annonces de ce genre : « Offre prêt de 300.000 dinars pour trois mois, remboursement 400.000 dinars, nantissement exigé »11.

Ce sont là autant de faits incontestables.

Nous voudrions demander à ceux qui s’attachent à réhabiliter la clique Tito : A moins que vous ne cherchiez à mystifier les gens, comment pouvez-vous prétendre qu’en Yougoslavie il n’y a ni capital privé, ni entreprises privées, ni capitalistes ?

LE CAPITALISME ENVAHIT LES RÉGIONS RURALES YOUGOSLAVES

Examinons maintenant la situation dans les régions rurales de Yougoslavie.

N’existe-il vraiment plus de capitalistes dans les campagnes yougoslaves, ainsi que le prétend Khrouchtchev ?

Si. Les faits sont encore là pour le prouver.

C’est dans les régions rurales que la pénétration du capitalisme se manifeste avec le plus d’évidence.

Le marxisme-léninisme nous enseigne que l’économie individuelle et la petite exploitation engendrent le capitalisme chaque jour, chaque heure, et que seule la collectivisation peut engager l’agriculture dans la voie du socialisme.

Staline a souligné : « Lénine dit que tant que l’économie des paysans individuels, qui engendre des capitalisa tes et le capitalisme, prédomine dans le pays, le danger d’une restauration du capitalisme existera. Évidemment, aussi longtemps qu’existe ce danger, on ne peut parler sérieusement de la victoire de la construction socialiste dans notre pays »12.

Dans cette question, la clique Tito suit une ligne qui est diamétralement à l’opposé du socialisme.

Dans les premiers temps de l’après-guerre, la Yougoslavie avait effectué une réforme agraire et organisé un certain nombre de coopératives paysannes de travail, cependant, l’économie des paysans riches restait pour l’essentiel intacte.

En 1951, la clique Tito proclama ouvertement son abandon de la voie de la collectivisation agricole et commença à dissoudre les coopératives paysannes de travail ; elle commençait ainsi à s’engager sérieusement dans la voie de la trahison du socialisme.

Alors qu’en 1950 le nombre de ces coopératives était de 6.900 et quelques, en 1953, il dépassait à peine 1.200, et, en 1960 il n’y avait plus que 147 coopératives paysannes de travail, Les campagnes yougoslaves ont sombré dans l’océan de l’économie individuelle.

La clique Tito a dit ouvertement que la collectivisation ne peut réussir en Yougoslavie. Elle l’a dénigrée perfidement en affirmant que « collectivisation est synonyme d’expropriation13, et qu’elle est une voie qui sert à « maintenir aussi longtemps que possible le servage et la pauvreté »14. Par ailleurs, elle avance l’idée absurde de développer l’agriculture « sur la base de la libre compétition des forces économiques »15.

Tout en procédant à la dissolution massive des coopératives paysannes de travail, la clique Tito a promulgué depuis 1953 une série de lois et décrets portant application dans les campagnes de l’achat, de la vente et de l’affermage libres des terres, ainsi que du libre emploi de la main-d’œuvre, elle a abrogé le système d’achat planifié des produits agricoles et instauré le libre commerce dans ce domaine, tout ceci en vue d’encourager l’expansion du capitalisme dans les régions rurales.

Avec une telle politique, les forces du capitalisme ont rapidement envahi les campagnes et le processus de différenciation s’est accéléré de jour en jour. C’est là un aspect important des efforts de la clique Tito pour restaurer le capitalisme.

Le processus de différenciation dans les régions rurales se manifeste en premier lieu par des changements dans l’appartenance des terres. L’ancien secrétaire fédéral à l’Agriculture et à la Sylviculture de Yougoslavie, Komar, a avoué qu’en 1959, dans les campagnes yougoslaves, les familles de paysans pauvres qui avaient moins de cinq hectares de terre, et qui représentaient 70 pour cent du total des familles paysannes, ne possédaient que 43 pour cent des terres privées, alors que les familles de paysans aisés qui avaient chacune plus de huit hectares, et qui ne représentaient que 13 pour cent du total des foyers paysans possédaient 33 pour cent des terres privées. Komar a avoué en outre que, chaque année, environ 10 pour cent des familles paysannes vendaient ou achetaient des terres16. Parmi celles qui ont dû vendre des terres, la majorité sont des familles de paysans pauvres.

En ce qui concerne la concentration de la terre, la situation réelle est beaucoup plus sérieuse que ne le laissent apparaître les données susmentionnées. Le Borba, porte-parole de la clique Tito, révélait le 19 juillet 1963 : dans un seul district, « des milliers de foyers détiennent des terres dépassant largement le maximum légal de dix hectares ». Dans la région de Bijeljina, « on a constaté que cinq cents foyers paysans avaient de 10 à 30 hectares ». De pareils cas ne sont pas isolés.

Le processus de différenciation dans les régions rurales se manifeste encore par une grande inégalité dans la propriété du bétail et des instruments aratoires. Parmi les 308.000 foyers paysans de la province de Voïvodine, principale région productrice de céréales, 55 pour cent ne possèdent pas de bétail. Les familles paysannes ayant moins de deux hectares représentent dans cette région 40,7 pour cent du total des familles paysannes, mais elles ne possèdent que 4,4 pour cent du nombre total des charrues, soit en moyenne une charrue pour vingt familles. Tandis que les paysans riches de cette région détiennent non seulement un grand nombre de charrues et de véhicules à traction animale, mais encore plus de 1.300 tracteurs et de nombreuses autres machines agricoles17.

Le processus de différenciation se manifeste encore par le développement du système du travail salarié et d’autres formes d’exploitation capitaliste.

Dans son numéro du 7 février 1958, l’hebdomadaire Komunist a révélé qu’en 1956, en Serbie, 52 pour cent des familles paysannes possédant plus de huit hectares employaient de la main-d’œuvre salariée.

Komar a dit en 1962 : « Ces dernières années, les chefs de certains foyers paysans « sont devenus de plus en plus puissants. Leurs revenus ne proviennent pas de leur propre travail, mais du commerce illicite, de la transformation non seulement de leurs propres produits, mais aussi de ceux des autres, de la distillation privée des vins, de l’obtention de terres dépassant le maximum prescrit de dix hectares, terres obtenues par achat, ou plus souvent par affermage, par partage fictif des terres, par empiétement ou dissimulation de terres publiques, ils proviennent aussi de l’acquisition de tracteurs par des moyens spéculatifs et de l’exploitation de leurs voisins pauvres par la culture mécanisée des terres de ces derniers »18.

Le Borba a déclaré le 30 août 1962 : « Les soi-disant bons producteurs » sont des « fermiers exploitant les terres d’autrui, des employeurs de main-d’œuvre et des commerçants expérimentés ». « Ce ne sont pas des producteurs, mais des propriétaires d’entreprises. De toute l’année, certains d’entre eux ne prennent pas la houe en mains une seule fois. Ils emploient de la main-d’œuvre … et se contentent de surveiller les travaux des champs et de faire du commerce. »

Les usuriers aussi sont particulièrement actifs dans les campagnes yougoslaves, le taux d’intérêt s’élevant très souvent à plus de cent pour cent. En outre, il se trouve des gens qui, tirant avantage de la situation difficile des chômeurs, monopolisent le marché du travail et, jouant le rôle d’intermédiaires, se livrent à l’exploitation.

Privés de terres et d’autres moyens de production, nombre de paysans pauvres ne peuvent subsister qu’en vendant leur force de travail. Selon les données rendues publiques le 20 août 1962 par le Politika, en 1961, les familles paysannes ayant moins de deux hectares de terre ont obtenu environ 70 pour cent de leurs revenus en espèces par la vente de leur force de travail. Exploitées de toutes sortes de manières, elles vivent dans la misère.

Les faits prouvent que dans les campagnes yougoslaves, ce sont les classes exploiteuses qui occupent la position dominante.

En soutenant que la Yougoslavie est un pays socialiste, la lettre ouverte du Comité central du P.C.U.S. prétend que le « secteur socialiste » est passé de 6 à 15 pour cent dans les régions rurales yougoslaves.

Hélas, ces modestes pourcentages eux-mêmes ne relèvent pas du secteur socialiste.

Les 15 pour cent qui, pour la direction du P.C.U.S., constituent le « secteur socialiste » ne sont autres que les « fermes agricoles », les « coopératives générales des travailleurs agricoles » et autres organisations agricoles instaurées par la clique Tito. Or, ces « fermes agricoles » sont en fait des fermes capitalistes, et ces « coopératives générales des travailleurs agricoles », des organisations économiques capitalistes qui s’occupent essentiellement d’activités commerciales. Non seulement elles n’affectent pas la propriété privée de la terre, mais de plus, leur rôle principal est d’encourager le développement de l’économie des paysans riches.

Dans l’ouvrage Problèmes de l’Agriculture en Yougoslavie, publié à Belgrade, il est dit à propos des coopératives qu’ »à en juger par leur état actuel et leur fonctionnement, elles ne signifient en aucune façon la transformation socialiste de l’agriculture et des régions rurales. Elles n’œuvrent pas à la création de bases socialistes à la campagne, mais cherchent plutôt à développer et à aider les facteurs capitalistes. Il existe des cas où ces coopératives sont devenues des associations de koulaks ».

La clique Tito a attribué aux « coopératives générales des travailleurs agricoles » le monopole de l’achat des produits agricoles aux paysans. Usant de ce privilège « ans leurs activités commerciales et profitant de la constante fluctuation des prix agricoles, ces « coopératives » s’adonnent à une intense spéculation au moyen de laquelle elles exploitent les paysans. En 1958, l’agriculture yougoslave connut une baisse de production. Les « coopératives » et autres organismes commerciaux profitèrent de l’occasion pour provoquer une hausse massive des prix de vente des produits agricoles. En 1959, la production agricole s’étant accrue, les « coopératives » violèrent les contrats d’achat qu’elles avaient passés avec les paysans et réduisirent leurs achats, n’hésitant pas à laisser les récoltes pourrir dans les champs.

Les « coopératives générales des travailleurs agricoles » et les « fermes agricoles » emploient un grand nombre d’ouvriers, entre autres des journaliers, qu’elles exploitent durement. Selon l’Annuaire de statistiques de la République fédérale populaire de Yougoslavie de 1962, plus de cent mille ouvriers étaient employés de façon permanente en 1961 par les différentes « coopératives ». Un grand nombre de journaliers venaient s’y ajouter. Le Rad du 1er décembre 1962 a révélé que ces ouvriers salariés « sont souvent victimes d’une impitoyable exploitation (la journée de travail est de 15 heures) et leurs revenus individuels sont en général extrêmement bas ». Il ressort de tout ceci que ces organisations agricoles que l’on prétend être du « secteur socialiste » ne sont que des organisations agricoles de caractère capitaliste.

Expropriation des paysans pauvres et extension des fermes capitalistes, telle est la politique fondamentale de la clique Tito sur le plan agricole. En 1955, Tito a déclaré : « Nous n’écartons pas l’idée qu’en Yougoslavie les petites exploitations puissent fusionner sous une forme ou sous une autre… En Amérique, cela est déjà fait. Nous devons trouver une solution à cette question. »

En vue de suivre la voie capitaliste, la clique Tito a élaboré en 1959 la « Loi sur l’utilisation des terres agricoles », loi stipulant que si les paysans individuels sont dans l’impossibilité de cultiver leurs terres selon les conditions requises, celles-ci devront être placées sous l’ »administration obligatoire » des « coopératives générales des travailleurs agricoles » ou des « fermes agricoles » ; ceci revient en fait à développer les fermes capitalistes par l’expropriation des paysans pauvres et l’annexion forcée de leurs terres. Cette voie est authentiquement celle du développement de l’agriculture capitaliste.

A propos du passage de la petite exploitation paysanne à la grande exploitation, Staline a dit : « Il existe ici deux voies, la voie capitaliste et la voie socialiste ; la voie en avant, vers le socialisme et la voie en arrière, vers le capitalisme ».

Y a-t-il encore une troisième voie en dehors de la voie socialiste et de la voie capitaliste ? Staline dit à ce sujet : « La prétendue troisième voie n’est en réalité que la seconde, la voie du retour au capitalisme. » « En effet, que signifie revenir à l’économie individuelle et rétablir la classe des koulaks ? C’est rétablir le joug du koulak, c’est rétablir l’exploitation de la paysannerie par les koulaks, c’est donner le pouvoir à ces-derniers. Mais peut-on rétablir la classe des koulaks et conserver en même temps le pouvoir des Soviets ? Non. Le rétablissement de la classe des koulaks mènerait à la création d’un pouvoir koulak et à la destruction du pouvoir des Soviets. Par conséquent, il conduirait à la formation d’un gouvernement bourgeois.

Et la formation d’un gouvernement bourgeois, à son tour, conduirait au rétablissement des grands propriétaires fonciers et des capitalistes, au rétablissement du capitalisme. »19.

La voie suivie durant ces dix dernières années et quelques par l’agriculture yougoslave est précisément la voie du rétablissement du capitalisme.

Ce sont là autant de faits indéniables.

Nous voudrions demander à ceux qui s’emploient à réhabiliter la clique Tito : A moins que vous ne cherchiez à tromper les gens, comment pouvez-vous prétendre qu’il n’y a plus de capitalistes en Yougoslavie ?

L’ÉCONOMIE SOCIALISTE DU PEUPLE ENTIER DÉGÉNÈRE EN ÉCONOMIE CAPITALISTE

La restauration du capitalisme en Yougoslavie ne se manifeste pas uniquement par le fait que le capitalisme privé s’étend librement, tant dans les villes qu’à la campagne. Chose plus importante encore, c’est que les entreprises « publiques », qui occupaient une place déterminante dans l’économie de la Yougoslavie, ont dégénéré et changé de nature.

L’économie d’ »autogestion ouvrière » de la clique Tito est un capitalisme d’Etat d’un genre particulier. Ce capitalisme d’Etat n’est pas celui existant dans les conditions de la dictature du prolétariat, c’est un capitalisme d’Etat existant dans de tout autres conditions, celles d’une dégénérescence de la dictature du prolétariat, transformée par la clique Tito en dictature de la bourgeoisie bureaucratique et compradore. Les moyens de production des entreprises d »’autogestion ouvrière » n’appartiennent pas à un ou plusieurs capitalistes, ils appartiennent en réalité à la bourgeoisie bureaucratique et compradore d’un type nouveau, représentée par la clique Tito et englobant bureaucrates et gérants. Cette bourgeoisie, usurpant le nom de l’Etat, se subordonnant à l’impérialisme américain et s’abritant sous le manteau du « socialisme », s’est approprié les biens qui appartenaient aux travailleurs. Le système d’ »autogestion ouvrière » est en fait un système d’exploitation féroce sous la domination du capital bureaucratique et compradore.

Depuis 1950, la clique Tito a promulgué une série de lois et décrets qui portent application de l’ »autogestion, ouvrière » dans les usines, les mines, les transports et communications, le commerce, l’agriculture, la sylviculture, les services publics et toutes les autres entreprises d’Etat. Le contenu essentiel de cette « autogestion ouvrière » consiste à placer ces entreprises sous la gestion de « collectivités de travail ». Ces entreprises achètent elles-mêmes les matières premières, fixent la variété des articles à produire, leur quantité et leurs prix, vendent elles-mêmes leurs produits sur le marché, fixent elles-mêmes les salaires et décident de la répartition d’une partie des bénéfices. La loi yougoslave stipule en outre que les entreprises ont le droit de vendre, d’acheter et de louer des biens immobiliers.

La clique Tito qualifie le système de propriété des entreprises placées sous l »’autogestion ouvrière » de « forme supérieure de la propriété socialiste ». Elle prétend que c’est seulement .avec l’ »autogestion ouvrière » qu’il est possible d’ »édifier réellement le socialisme ».

C’est là une pure duperie.

Si l’on se place du point de vue théorique, tous ceux qui ont tant soit peu connaissance du marxisme savent que les mots d’ordre du genre d’ »autogestion ouvrière », d’ »’usines aux ouvriers » n’ont jamais été des mots d’ordre marxistes, mais bien des mots d’ordre avancés par les anarcho-syndicalistes, les socialistes bourgeois, les vieux opportunistes, les vieux révisionnistes.

Les « théories » d’ »autogestion ouvrière » et d’ »usines aux ouvriers » sont diamétralement à l’opposé des principes fondamentaux du marxisme sur le socialisme. Elles ont été entièrement réfutées il y a longtemps par les auteurs marxistes classiques.

Dans le Manifeste du Parti communiste, Marx et Engels indiquent : « Le prolétariat se servira de sa suprématie politique pour arracher petit à petit tout le capital à la bourgeoisie, pour centraliser tous les instruments de production entre les mains de l’Etat ».

Dans Anti-Dühring, Engels indique : « Le prolétariat s’empare du pouvoir d’État et transforme les moyens de production d’abord en propriété d’État. »

Après la prise du pouvoir, le prolétariat doit concentrer les moyens de production entre les mains de l’État, État de dictature du prolétariat. Il s’agit là d’un principe fondamental du socialisme.

Dans les premiers temps du pouvoir des Soviets, au lendemain de la Révolution d’Octobre, lorsque certains suggérèrent de remettre les usines aux « producteurs » pour qu’ils puissent directement « organiser la production », Lénine critiqua sévèrement ce point de vue, soulignant qu’il revenait en fait à s’opposer à la dictature du prolétariat.

Lénine indiqua à juste titre : « Toute légalisation, directe ou indirecte, soit de la possession de leur propre production par les ouvriers d’une usine ou d’une profession prise en particulier, soit du droit de ceux-ci d’affaiblir ou d’entraver l’application des décrets du pouvoir d’Etat, constituerait la plus grande altération des principes fondamentaux du pouvoir des Soviets et l’abandon total du socialisme »20.

Il ressort de tout ceci que l’ »autogestion ouvrière » n’a rien à voir avec le socialisme.

En fait, l’ »autogestion ouvrière » que vante la clique Tito ne revient nullement à confier la gestion aux ouvriers eux-mêmes ; elle n’est qu’un rideau de fumée.

Les entreprises où est appliquée l’ »autogestion ouvrière » sont en fait sous l’emprise de la bourgeoisie bureaucratique et compradore de type nouveau, représentée par la clique Tito. Celle-ci contrôle tant les finances que le personnel des entreprises et s’approprie la majeure partie de leurs revenus.

Par l’intermédiaire des banques, la clique Tito contrôle les crédits du pays entier, les fonds d’investissements et les fonds de roulement de toutes les entreprises et surveille leurs finances.

Par des moyens tels que la perception fiscale et les intérêts, la clique Tito s’approprie les revenus des entreprises. D’après les données du Rapport d’activité de 1961 du Conseil exécutif fédéral de Yougoslavie, elle s’est emparée de cette façon des trois quarts environ des revenus nets des entreprises.

Les fruits du travail du peuple dont la clique Tito se saisit, servent essentiellement à satisfaire les dilapidations de cette clique de bureaucrates, à maintenir sa domination réactionnaire, à renforcer l’appareil de répression contre le peuple travailleur et à payer tribut aux impérialistes sous forme de versement des intérêts des dettes étrangères et de remboursement de ces dettes elles-mêmes.

Par ailleurs, la clique Tito contrôle les entreprises par l’intermédiaire de leurs gérants.

Nominalement, ceux-ci sont recrutés par les entreprises, mais en fait, ils sont désignés par la clique Tito. Ils sont les agents de la bourgeoisie bureaucratique et compradore au sein de ces entreprises.

Dans ces entreprises, dites d »’auto-gestion ouvrière », les rapports entre gérants et ouvriers sont, en réalité, des rapports entre employeurs et employés, entre exploiteurs et exploités.

Le fait est que le gérant a le droit de décider du plan de production et de l’orientation des affaires, de disposer des moyens de production, de décider de la répartition des revenus de l’entreprise, d’embaucher ou de licencier des ouvriers et de rejeter les résolutions du « conseil ouvrier » ou du « comité d’administration ».

Les très nombreuses données publiées dans les journaux et périodiques yougoslaves prouvent que le « conseil ouvrier » n’est qu’une « machine à voter », existant uniquement pour la forme, et que, dans l’entreprise, « tout le pouvoir est entre les mains du gérant ».

Du fait qu’ils contrôlent les moyens de production et la répartition des revenus des entreprises, les gérants ont la possibilité d’user de privilèges de toutes sortes pour s’approprier les fruits du travail des ouvriers.

La clique Tito, elle-même, admet que dans ces entreprises, il existe un grand écart entre gérants et ouvriers quant à leurs salaires et à la répartition des dividendes. Dans certaines entreprises, le montant des dividendes que touche le groupe de dirigeants équivaut au montant global des salaires de toute la collectivité »21.

Par ailleurs, les gérants des entreprises, profitant de leurs privilèges, s’accaparent de fortes sommes par toutes sortes de subterfuges. Pots-de-vin, détournements de fonds et vols sont pour eux une plus grande source de richesse.

Les larges masses ouvrières vivent dans la pauvreté. Les ouvriers n’ont pas la sécurité de l’emploi. De nombreux ouvriers ont été jetés sur le pavé parce que leurs entreprises ont fait faillite. Suivant une statistique officielle, le nombre des chômeurs en février 1963 était de 339.000, soit environ 10 pour cent du nombre total des personnes ayant un emploi. De plus, chaque année, un grand nombre d’ouvriers émigrent à l’étranger.

Le Politika du 25 septembre 1961 admet qu’ »un profond fossé sépare certains ouvriers et employés, les premiers considérant les seconds comme des ’bureaucrates’ qui ’engloutissent’ leurs salaires ».

Ces faits montrent que dans les entreprises dites d’ »autogestion ouvrière » de Yougoslavie, il s’est formé un nouveau groupe social constitué par une minorité qui s’approprie les fruits du travail de la majorité. Il constitue une partie importante de la nouvelle bourgeoisie bureaucratique et compradore.

L’ »autogestion ouvrière » appliquée par la clique Tito a fait que les entreprises, qui à l’origine relevaient de la propriété du peuple entier, se sont totalement écartées de l’orbite de l’économie socialiste.

Les principales manifestations de ce phénomène sont :

Premièrement : La suppression du plan économique unifié de l’Etat.

Deuxièmement : Le profit est considéré comme le principal stimulant de la marche des entreprises. Pour accroître leurs revenus et bénéfices, les entreprises peuvent recourir à leur gré à toutes sortes de moyens. En d’autres termes, la production des entreprises dites d’ »autogestion ouvrière » ne vise nullement à satisfaire les besoins de la société, mais sert à réaliser des bénéfices, exactement comme les entreprises capitalistes.

Troisièmement : L’application d’une politique encourageant la libre concurrence capitaliste. Tito a déclaré aux gérants des entreprises : « La concurrence sera avantageuse pour les simples gens, pour les consommateurs ». La clique Tito a, en outre, déclaré ouvertement que si « la concurrence, la recherche du profit, la spéculation et autres phénomènes semblables » sont autorisés, c’est parce qu’ »ils stimulent l’initiative des producteurs, de leurs collectivités, des communes, etc. »22

Quatrièmement : L’utilisation du crédit et des banques en tant que leviers importants pour épauler la libre concurrence capitaliste. Le système bancaire et de crédit du régime de Tito accorde des prêts à celui qui offre les meilleures conditions : à celui qui est en mesure de rembourser dans le délai le plus bref, moyennant le taux d’intérêt le plus élevé. Pour reprendre les propres termes des titistes, c’est « utiliser la concurrence comme méthode courante pour la répartition des crédits investis »23.

Cinquièmement : Les rapports entre les entreprises ne sont pas des rapports socialistes d’entraide et de coordination établis selon un plan d’Etat unique, mais des rapports capitalistes de concurrence et d’évincement sur le marché libre.

Tout cela a ébranlé les fondements mêmes de l’économie socialiste planifiée.

Lénine a dit : « Le socialisme est impossible… sans une organisation d’Etat méthodique qui subordonne des dizaines de millions d’hommes à l’observation la plus rigoureuse d’une norme unique dans la production et la répartition des produits »24.

Lénine a dit encore : « sans un vaste recensement et contrôle exercés par l’Etat sur la production et la répartition des produits, le pouvoir des travailleurs, la liberté des travailleurs, ne pourront pas se maintenir, et le retour sous le joug du capitalisme sera inévitable. »25.

Sous l’enseigne de l’ »autogestion ouvrière », une concurrence capitaliste acharnée règne entre les différentes branches économiques et entreprises de Yougoslavie. Pour battre leurs concurrents sur le marché et réaliser le maximum de bénéfices, il est courant que les entreprises dites d’ »autogestion ouvrière » se livrent à des actions frauduleuses, spéculent, accaparent et stockent les marchandises, haussent les prix, détournent des fonds, distribuent des pots-de-vin, fassent le blocus des secrets techniques, s’arrachent les techniciens et même utilisent la presse et la radio pour faire du tort aux autres.

Cette concurrence acharnée entre les entreprises yougoslaves ne se manifeste pas seulement sur le marché intérieur, mais aussi dans le domaine du commerce extérieur. La presse yougoslave révèle qu’il arrive souvent que sur un seul et même marché extérieur surviennent 20 ou 30 représentants d’entreprises yougoslaves de commerce extérieur, qui entrent en concurrence les uns avec les autres et se disputent les clients. « Pour des raisons égoïstes », ces entreprises faisant du commerce extérieur « s’efforcent de gagner de l’argent à tout prix et par tous les moyens ».

La concurrence acharnée a entraîné une confusion extrême sur le marché yougoslave. Les prix varient considérablement, non seulement entre différentes villes ou régions, mais aussi entre différents magasins d’un même endroit, et même entre les marchandises d’une même catégorie provenant du même producteur.
Pour maintenir un prix élevé, certaines entreprises n’hésitent pas à détruire de grandes quantités de produits agricoles.

Par suite de la concurrence acharnée, un grand nombre d’entreprises yougoslaves ont fait faillite. Suivant les données publiées par le Bulletin officiel de la R.F.P.Y., durant ces dernières années, il a été enregistré annuellement la faillite de cinq à six cents entreprises.

Il ressort de tout ceci que l’économie « publique » de la Yougoslavie n’est pas une économie régie par les lois de l’économie socialiste planifiée, mais par les lois de la concurrence capitaliste et de la production anarchique, que les entreprises d »’auto-gestion ouvrière » de la clique Tito ne sont point des entreprises de caractère socialiste mais bien des entreprises de caractère capitaliste.

Nous voudrions demander à ceux qui s’emploient à réhabiliter la clique Tito : A moins que vous ne vouliez duper les gens, comment pouvez-vous présenter le capitalisme d’État se trouvant sous l’emprise de la bourgeoisie bureaucratique et compradore comme une économie socialiste ?

UN APPENDICE DE L’IMPÉRIALISME AMÉRICAIN

Le processus de restauration du capitalisme en Yougoslavie se confond avec le processus d’alignement de la clique Tito sur l’impérialisme américain, le processus de dégénérescence de la Yougoslavie, devenue un appendice de l’impérialisme américain.

En répudiant le marxisme-léninisme, la clique Tito s’est engagée dans une voie honteuse, mettant à l’encan la souveraineté nationale et vivant des aumônes de l’impérialisme américain.

Selon des statistiques, d’ailleurs incomplètes, il apparaît que de la fin de la Seconde guerre mondiale à janvier 1963, les États-Unis et d’autres puissances impérialistes ont accordé à la clique Tito différentes sortes d’ »aides » s’élevant au total à environ 5.460 millions de dollars américains, sur lesquels l’ »aide » américaine représente plus de 60 pour cent, soit 3.500 millions de dollars. La majeure partie de l’aide américaine a été octroyée après 1050.

L’aide américaine constitue la pierre angulaire des finances et de l’économie yougoslaves. Selon des statistiques officielles, les crédits que la clique Tito a obtenus en 1961 des États-Unis ou d’organisations financières internationales contrôlées par ceux-ci se montaient au total à un peu plus de 346 millions de dollars américains, soit 47,4 pour cent des recettes budgétaires fédérales de cette même année. Si l’on y ajoute le montant de l’aide d’autres pays occidentaux, l’aide que la clique Tito a reçue en 1961 des pays occidentaux représentait un total d’environ 493 millions de dollars américains, soit 67,6 pour cent des recettes budgétaires fédérales de la même année.

Pour obtenir l’aide américaine, la clique Tito a conclu avec les États-Unis une série de traités et accords par lesquels elle a vendu le pays.

Les notes échangées en 1951 entre la Yougoslavie et les États-Unis au sujet de l’ »Accord sur l’assistance en matière de défense commune » prévoient que les hauts fonctionnaires du gouvernement américain peuvent « en toute liberté et sans restriction aucune » inspecter et surveiller à travers la Yougoslavie la réception et la répartition du matériel fourni sous forme d’aide militaire américaine et qu’ils ont le droit de jouir de « toutes les facilités de communications et de renseignements ». Il y est encore stipulé que la Yougoslavie doit fournir aux États-Unis des matières premières stratégiques.

L’ »Accord sur l’aide militaire » conclu en 1951 entre la Yougoslavie et les États-Unis stipule que la Yougoslavie doit « apporter la plus grande contribution … à la puissance défensive du monde libre » et être prête à mettre des forces armées à la disposition de l’O.N.U. La mission militaire envoyée par les États-Unis aux termes de cet accord contrôle et entraîne directement les troupes yougoslaves.

L’ »Accord sur la coopération économique » conclu en 1952 entre la Yougoslavie et les Etats-Unis prévoit que l’aide américaine doit être utilisée par la Yougoslavie pour « la promotion des droits fondamentaux de l’individu, de la liberté et des institutions démocratiques », en d’autres termes, pour la promotion du système capitaliste.

En 1954, la Yougoslavie conclut un Traité d’Alliance, de Coopération politique et d’Assistance mutuelle avec la Grèce et la Turquie, États membres de l’O.T.A.N.
Ce traité stipule que les trois pays agissent en coordination sur le plan militaire et diplomatique, faisant ainsi en fait de la Yougoslavie un membre des blocs militaires placés sous le contrôle des États-Unis.

Après 1954, la Yougoslavie a signé avec les États-Unis une série d’accords par lesquels elle a vendu sa souveraineté ; rien qu’entre 1957 et 1962, plus de 50 accords ont été ainsi conclus.

Par suite de la signature de ces traités et accords, et du fait que la clique Tito a transformé la Yougoslavie en un appendice de l’impérialisme américain, les Etats-Unis ont obtenu de ce pays :

1) le droit de contrôler ses affaires militaires ;

2) le droit de contrôler ses affaires extérieures ;

3) le droit d’intervenir dans ses affaires intérieures ;

4) le droit de contrôler les finances et la monnaie ;

5) le droit de contrôler son commerce extérieur ;

6) le droit d’accaparer ses matériaux stratégiques ;

7) le droit de recueillir en Yougoslavie des renseignements militaires et économiques.

C’est ainsi que l’indépendance et la souveraineté de la Yougoslavie ont été mises à l’encan par la clique Tito.

Outre la conclusion d’une série de traités inégaux avec les États-Unis, traités par lesquels elle a vendu la souveraineté du pays, la clique Tito, en vue d’obtenir l’aide américaine, a pris diverses autres mesures sur le plan de la politique intérieure et extérieure, afin de pourvoir aux besoins du capital monopoliste occidental dans sa pénétration en Yougoslavie.

Dès 1950, elle a mis fin au monopole du commerce extérieur jusque-là détenu par l’État.

Le « Décret sur le commerce extérieur », promulgué en 1953, autorise les entreprises à faire du commerce extérieur en toute indépendance, à commercer directement avec les entreprises du capital monopoliste de l’Occident.

En 1961, le régime de Tito procéda à une nouvelle « réforme » du système concernant les devises étrangères et le commerce extérieur. Le contenu essentiel de cette réforme résidait en un nouveau relâchement des restrictions sur l’importation et l’exportation. L’importation d’importants produits semi-finis et de certains articles de consommation bénéficia d’une « libéralisation totale » et les limitations imposées à l’importation d’autres marchandises furent réduites à des degrés divers. Toutes les restrictions furent levées à l’octroi des devises destinées à l’acquisition de marchandises dites d’importation libre.

Nul n’ignore que le monopole du commerce extérieur par l’État est un principe fondamental du socialisme.

A propos du prolétariat industriel, Lénine a dit : qu’il « n’est absolument pas en état de relever notre industrie et de faire de la Russie un pays industriel sans la protection de l’industrie, laquelle ne signifie nullement la protection par la politique douanière, mais seulement et exclusivement par le monopole du commerce extérieur »26.

Staline a dit que « le monopole du commerce extérieur est l’une des assises de la plateforme du gouvernement soviétique » et que la suppression de ce monopole, c’est « l’abandon de l’industrialisation » du pays, c’est « l’envahissement du marché soviétique par les marchandises des pays capitalistes », c’est « la transformation de notre pays, de pays indépendant en pays semi colonial »27.

En abolissant le monopole du commerce extérieur par l’Etat, le régime de Tito ouvre toutes grandes ses portes au capital monopoliste de l’impérialisme.

Quelles ont été les conséquences sur le plan économique du fait que la clique Tito a reçu une aide américaine massive et ouvert toutes grandes ses portes à l’impérialisme ?

Primo : La Yougoslavie est devenue un marché sur lequel l’impérialisme pratique le dumping.

De grandes quantités de produits industriels et agricoles des pays impérialistes ont envahi le marché yougoslave. En quête de profits égoïstes, les capitalistes compradores de Yougoslavie, qui ont fait des fortunes colossales en servant le capital monopoliste étranger, ont importé d’énormes quantités de marchandises que le pays est capable de produire ou dont il possède même d’importants stocks. Comme l’a admis le Politika du 25 juillet 1961, l’industrie yougoslave « est en butte aux coups de la constante et très complexe concurrence des industries étrangères, cela se voit partout ».

Secundo : La Yougoslavie est devenue une sphère d’investissements de l’impérialisme.

Nombre d’entreprises industrielles yougoslaves ont été mises sur pied grâce à l’ »aide » des Etats-Unis et d’autres pays impérialistes. Le capital monopoliste étranger a pénétré massivement et directement en Yougoslavie. Selon Papic, directeur général de la Banque nationale d’Investissements de Yougoslavie, dans la période allant de 1952 à 1956, « la participation des capitaux étrangers atteignait 32,5 pour cent de la valeur totale des investissements économiques ». Le secrétaire d’Etat américain Dean Rusk a dit le 5 février 1962 que les capitaux de la Yougoslavie « proviennent en majeure partie de l’Occident ».

Tertio : La Yougoslavie est devenue une source de matières premières pour l’impérialisme.

Depuis 1951, aux termes de l’ »Accord sur l’aide militaire » conclu entre les États-Unis et la Yougoslavie, la clique Tito a fourni à flot continu des matières premières stratégiques aux États-Unis. L’Annuaire de statistiques de la République fédérale populaire de Yougoslavie, de 1961, montre que depuis 1957, environ la moitié des exportations yougoslaves de magnésium, de plomb, de zinc, d’antimoine et d’autres métaux importants est allée aux États-Unis.

Quarto : Les entreprises industrielles yougoslaves sont devenues des ateliers de montage pour les entreprises monopolistes de l’Occident.

Nombre d’industries essentielles de la Yougoslavie produisent sous licence des pays occidentaux et avec des produits semi-finis, des pièces détachées, des pièces de rechange et des articles semi-manufactures importés. Leur production est placée sous la coupe des entreprises monopolistes de l’Occident.

En fait, un grand nombre de produits industriels vendus en Yougoslavie comme marchandises du pays sont des assemblages de pièces détachées importées de l’étranger, sur lesquels figurent des marques de fabrique yougoslaves. Le Vesnik u sredu du 25 avril 1962 écrivait : « Certaines de nos entreprises industrielles commencent à se transformer en organisations commerciales d’un genre particulier. Au lieu de produire, elles s’occupent du montage, et ne font que coller leurs marques sur les produits d’autrui. »

Dans ces circonstances, la Yougoslavie est devenue une partie intégrante du marché mondial du capital monopoliste occidental. Que ce soit dans le domaine des finances ou dans celui de l’économie, la Yougoslavie est indissolublement liée au marché mondial capitaliste, elle est devenue un appendice de l’impérialisme, plus particulièrement de l’impérialisme américain.

Quand un pays socialiste aliène son indépendance et « sa souveraineté et devient un appendice de l’impérialisme, cela mène inévitablement à la restauration du régime capitaliste.

La soi-disant voie spécifique d’édification du « socialisme » avec l’aide américaine, voie exaltée par la clique Tito, n’est rien d’autre que la voie de la transformation du système socialiste en système capitaliste en fonction des besoins de l’impérialisme, la voie qui conduit un pays indépendant à dégénérer en semi-colonie.

Or, Khrouchtchev persiste à dire que cet appendice de l’impérialisme américain « édifie le socialisme ». N’est-ce pas absolument fantastique ! Une variété nouvelle de « socialisme » portant l’estampille « aide américaine » est venue s’ajouter à ces faux socialismes de toutes nuances qui furent critiqués par Marx, Engels et Lénine. Il s’agit probablement de la « grande contribution » apportée par Tito et Khrouchtchev au « développement créateur du marxisme-léninisme » !

UN DÉTACHEMENT CONTRE-RÉVOLUTIONNAIRE DE L’IMPÉRIALISME AMÉRICAIN

A en juger par le rôle contrerévolutionnaire joué par la clique Tito dans les relations internationales, de même que par la politique étrangère réactionnaire appliquée par elle, on peut affirmer que la Yougoslavie est loin d’être un pays socialiste.

Dans l’arène internationale, la clique Tito est un détachement spécial de l’impérialisme américain pour le sabotage de la révolution mondiale.

Par son exemple de restauration du capitalisme en Yougoslavie, la clique Tito aide l’impérialisme américain à appliquer sa politique consistant à promouvoir dans les pays, socialistes l’ »évolution pacifique ».

Sous l’enseigne de pays socialiste, la clique Tito s’oppose avec frénésie au camp socialiste, s’emploie à le saper et est devenue un groupe de choc dans la campagne antichinoise.

Sous le couvert du « non-engagement » et de la « coexistence active », elle cherche à saper le mouvement de libération nationale d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, et s’est mise au service du néocolonialisme américain.

La clique Tito ne ménage aucun effort pour enjoliver l’impérialisme américain et paralyser la volonté de lutte des peuples du monde contre la politique d’agression et de guerre de l’impérialisme.

Sous l’enseigne de la lutte contre le « stalinisme », elle répand partout son venin révisionniste et s’oppose aux révolutions des peuples.

Lors des nombreux événements internationaux importants survenus dans le monde durant ces dix et quelques dernières années, la clique Tito a invariablement joué le rôle de laquais de l’impérialisme américain.

1. Révolution grecque. Le 10 juillet 1949, Tito annonça que la frontière entre la Yougoslavie et la Grèce était fermée aux partisans grecs. Mais dans le même temps il permettait aux troupes royalistes fascistes de Grèce de traverser le territoire yougoslave pour les prendre à revers. C’est de cette façon que la clique Tito aida les impérialistes américains et britanniques à étouffer la révolution du peuple grec.

2. Guerre de Corée. Le 6 septembre 1950, Kardelj, alors ministre des Affaires étrangères de Yougoslavie, fit une déclaration dans laquelle il calomnia ouvertement la juste guerre de résistance du peuple coréen contre l’agression, et prit la défense de l’impérialisme américain. Le 1er décembre, dans son intervention au Conseil de Sécurité de l’O.N.U., le délégué de la clique Tito accusa la Chine de s’immiscer activement dans la guerre de Corée ». En outre, la clique Tito vota à l’O.N.U. pour l’application de l’ »embargo » contre la Chine et la Corée.

3. Guerre de libération du peuple vietnamien. En avril 1954, à la veille de la Conférence de Genève sur la question de l’Indochine, la clique Tito s’évertua à calomnier la juste lutte du peuple vietnamien, prétendant que Moscou et Pékin se servaient du peuple vietnamien comme d’un « pion dans leur politique de guerre froide d’après-guerre »28. Elle insinua que la glorieuse bataille du peuple vietnamien pour la libération de Bien Bien Phu « n’était pas un acte de bonne volonté »29.

4. Activités subversives contre l’Albanie. La clique Tito se livre depuis longtemps à des activités subversives et à des provocations armées contre l’Albanie socialiste. Elle a manigancé en 1944,1948, 1956 et 1960 quatre affaires de haute trahison. Entre 1948 et 1958, elle a entrepris, à plus de 470 reprises, des provocations armées à la frontière albano-yougoslave. En 1960, la clique Tito et les réactionnaires grecs, en coordination avec la VIe Flotte américaine en Méditerranée, complotèrent une attaque armée contre l’Albanie.

5. Rébellion contrerévolutionnaire en Hongrie. La clique Tito joua le rôle honteux d’interventionniste et de provocateur dans la rébellion contre-révolutionnaire qui éclata en Hongrie, en octobre 1956. Après le déclenchement de la rébellion contrerévolutionnaire, Tito publia une lettre dans laquelle il exprimait son soutien aux mesures contre-révolutionnaires prises par le renégat Nagy. Le 3 novembre, la clique Tito informa Nagy qu’il trouverait asile à l’ambassade de Yougoslavie en Hongrie. Le 11 novembre, Tito déclara que la rébellion contre-révolutionnaire était une résistance des « éléments progressistes » et formula avec insolence la question de savoir qui l’emporterait, « la ligne yougoslave » ou « la ligne stalinienne ».

6. Événements du Moyen-Orient. En 1958, l’impérialisme américain envoya des troupes occuper le Liban, et l’impérialisme britannique fit de même pour occuper la Jordanie. Cela suscita dans le monde une gigantesque vague de protestations, l’opinion exigea le retrait immédiat des troupes américaines et britanniques. A la session extraordinaire de l’Assemblée générale de l’O.N.U. réunie pour discuter de la situation au Moyen-Orient, Koca Popovic, secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères de Yougoslavie, déclara : « la question n’est pas de savoir si nous devons insister sur la condamnation ou l’approbation de l’action entreprise par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ». Il préconisa en outre une intervention de l’O.N.U., organisation placée sous le contrôle de l’impérialisme américain.

7. Événements du détroit de Taïwan. En automne 1958, l’Armée populaire de Libération de Chine effectua des bombardements d’artillerie sur l’île de Kinmen pour porter un coup aux activités provocatrices de l’impérialisme américain dans le détroit de Taïwan et châtier la bande de Tchiang Kaï-chek, laquais de l’impérialisme américain. La clique Tito calomnia la juste lutte menée par la Chine, en prétendant que c’était un « danger pour le monde entier »30, « préjudiciable à la paix »31.

8. Incident de l’U-2. En I960, les Etats-Unis envoyèrent un avion espion U2 dans l’espace aérien de l’U.R.S.S. et, de ce fait, torpillèrent la conférence au sommet des quatre puissances qui allait se tenir à Paris. Le 17 mai, Tito fit une déclaration attaquant la juste position prise alors par le gouvernement soviétique, prétendant que ce dernier avait créé un « différend d’envergure ».

9. Lutte patriotique du peuple japonais contre l’impérialisme américain. En juin 1960, le peuple japonais engagea une juste lutte patriotique contré l’impérialisme américain, d’une envergure sans précédent. Or, la clique Tito défendit l’impérialisme américain, alléguant que l’occupation du Japon32 par les États-Unis avait « concouru à la démocratisation de la vie politique au Japon ». Par la suite, elle s’en prit à Asanuma Yinejiro, alors président du Parti socialiste japonais, qui avait déclaré que « l’impérialisme américain est l’ennemi commun des peuples japonais et chinois », l’accusant de « préconiser une ligne extrémiste »33.

10. Lutte du peuple indonésien. La clique Tito s’est employée à saper la lutte du peuple indonésien contre l’impérialisme. Elle s’est livrée à des activités odieuses, cherchant à empêcher la constitution du cabinet « Nasakum » en Indonésie, c’est-à-dire d’un gouvernement d’union nationale, avec la participation des nationalistes, des milieux religieux et des communistes.

11. Événements du Congo. En été 1960, lorsque l’impérialisme américain entreprit, sous le drapeau de l’O.N.U., une agression armée contre le Congo, la clique Tito non seulement vota à l’O.N.U. en faveur de l’impérialisme américain, mais encore, conformément à la volonté de ce dernier, envoya du personnel de l’aviation militaire participer directement à la sanglante répression du peuple congolais.

12. Question laotienne. Lorsque l’impérialisme américain élargit son intervention au Laos en janvier 1961, la clique Tito répandit l’idée que les États-Unis « se souciaient réellement de la paix au Laos et de sa neutralisation »34. Lorsque l’impérialisme américain organisa en mai 1963 des assassinats politiques et des conflits armés au Laos, la clique Tito s’en prit aux forces patriotiques du Laos, les accusant de « tout imputer aux États-Unis »35.

13. Programme américain d’ »Alliance pour le Progrès ». En août 1961, les Etats-Unis contraignirent des pays d’Amérique latine à établir avec eux un programme dit d’ »Alliance pour le Progrès », nouvel instrument aux mains de l’impérialisme américain pour asservir les peuples d’Amérique latine. Ce programme d’agression se heurta à l’opposition véhémente des peuples de l’Amérique latine, mais la clique Tito en fit l’éloge, disant qu’il « répond dans une grande mesure aux exigences des pays de l’Amérique latine »36.

14. Conflit frontalier sino-indien. Depuis que les réactionnaires indiens ont créé en 1959 une tension à la frontière sino-indienne, la clique Tito n’a cessé de soutenir leur politique d’expansion et d’agression et leurs activités provocatrices contre la Chine. Elle a fait courir le bruit que « la démarcation de la frontière avait été achevée au début de ce siècle sous la forme de la fameuse ligne McMahon »37, et, faisant l’impossible pour présenter les faits à l’envers, elle a accusé calomnieusement la Chine, en disant qu’ »elle s’est permise de réviser à son gré et par la force sa frontière avec l’Inde »38, de se livrer à l’ »agression » contre l’Inde39.

15. Révolution cubaine et crise des Caraïbes. La clique Tito a fait un grand nombre de commentaires accusant Cuba de « ne croire qu’à la révolution »40 et prétendant que la révolution cubaine « n’est pas un modèle mais plutôt une exception dans la voie révolutionnaire »41. Lors de la crise des Caraïbes en automne 1962, la clique Tito défendit l’agression de l’impérialisme américain, disant que « les difficultés ont commencé lorsque la révolution cubaine s’attaqua au point sensible des compagnies américaines »42 et qu’ »il est compréhensible que les États-Unis soient irrités par l’établissement de bases de fusées à Cuba, leur voisin immédiat »43.

De tout ce qui précède, on peut constater sans peine que durant ces dix et quelques dernières années, la clique Tito s’est opposée avec frénésie aux pays socialistes, qu’elle s’est employée à saper le mouvement de libération nationale et à diffamer la lutte révolutionnaire antiimpérialiste des peuples, qu’elle sert avec zèle l’impérialisme, plus particulièrement l’impérialisme américain.

Khrouchtchev ne cesse de répéter que dans les problèmes internationaux, la position de la direction du P.C.U.S. « coïncide » et est en « accord » avec celle de la clique Tito44. Bon, très bien ! mais alors, nous voudrions vous demander si vos agissements coïncident et sont en accord avec toutes les criminelles machinations contre-révolutionnaires de la clique Tito. Vous êtes priés de répondre, si toutefois vous en avez le courage !

LA DICTATURE PROLÉTARIENNE DÉGÉNÈRE EN DICTATURE BOURGEOISE

Le fait que le capitalisme ait envahi la Yougoslavie, dans les villes comme à la campagne, que le secteur économique de la propriété du peuple entier ait dégénéré en économie du capitalisme d’Etat et que la Yougoslavie se soit transformée en un appendice de l’impérialisme américain, est dû, en dernière analyse, à la dégénérescence du Parti et du pouvoir politique.

Au cours de la Seconde guerre mondiale, le Parti communiste de Yougoslavie et le peuple yougoslave menèrent une lutte héroïque contre les agresseurs fascistes allemands et italiens, renversèrent la domination réactionnaire de l’impérialisme et de ses laquais et instaurèrent un régime démocratique populaire de dictature du prolétariat.

Peu après, le groupe dirigeant du Parti communiste de Yougoslavie, trahissant le marxisme-léninisme, s’engagea dans la voie du révisionnisme, c’est ainsi qu’en Yougoslavie le Parti et le pouvoir ont dégénéré et changé graduellement de nature.

Le Parti communiste de Yougoslavie possédait une glorieuse tradition révolutionnaire. La trahison de la clique Tito se heurta d’abord à une vive opposition au sein du Parti. Pour réprimer cette opposition, la clique Tito usa du pouvoir détenu par elle pour évincer et exclure du Parti un grand nombre de communistes fidèles au marxisme-léninisme. Rien qu’entre 1948 et 1952, plus de 200.000 membres du Parti furent ainsi exclus, soit la moitié de l’effectif original du Parti communiste de Yougoslavie. Des marxistes-léninistes, des cadres révolutionnaires et de simples citoyens aux convictions révolutionnaires, accusés d’être des « éléments du Kominform », furent arrêtés en masse et exécutés. Le nombre des communistes et des éléments révolutionnaires actifs, arrêtés et emprisonnés, dépassa à lui seul 30.000. Dans le même temps, la clique Tito ouvrit les portes toutes grandes aux contrerévolutionnaires, aux éléments bourgeois, aux éléments antisocialistes de toutes nuances, et aux arrivistes qui cherchaient à monter en grade et à faire fortune au moyen de la carte du Parti. En novembre 1952, la clique Tito proclama que « le nom de Parti n’était plus approprié ». Elle changea le nom du Parti communiste de Yougoslavie, qui devint la Ligue des Communistes de Yougoslavie. Allant à l’encontre de la volonté de tous les communistes honnêtes du pays, la clique Tito altéra le caractère du Parti, celui de détachement d’avant-garde du prolétariat, et c’est de cette façon que la Ligue des Communistes de Yougoslavie est devenue, en fait, un instrument servant à maintenir le pouvoir dictatorial de la clique Tito.

Dans les pays socialistes, le pouvoir se trouve sous la direction du Parti communiste. Que le Parti communiste dégénère en parti bourgeois, et le pouvoir change inévitablement de nature, la dictature du prolétariat dégénère en dictature bourgeoise.

Le régime de dictature du prolétariat en Yougoslavie était le fruit d’une longue et héroïque lutte du peuple yougoslave. Mais après la trahison de la clique Tito, ce pouvoir changea de nature.

La clique Tito proclame : « La dictature révolutionnaire du prolétariat, c’est-à-dire un moyen utilisé par le régime d’Etat socialiste, devient de moins en moins nécessaire. » 45.

N’existerait-il donc plus de dictature en Yougoslavie ? Si, il y a dictature. La dictature du prolétariat a certes disparu, mais elle a été remplacée par la dictature bourgeoise, et c’est, une dictature fasciste des plus sauvages.

Le régime de Tito a instauré un grand nombre de prisons et de camps de concentration de type fasciste ou des dizaines de milliers de révolutionnaires sont morts sous les tortures les plus inhumaines. En même temps, il a gracié de nombreux contre-révolutionnaires et éléments ayant trahi le pays lors de la guerre antifasciste. Dans une interview accordée le 7 janvier 1951 à un correspondant de l’United Press, Tito dit que 11.000 détenus politiques avaient été amnistiés en Yougoslavie. Le 13 mars 1962, 150.000 contre-révolutionnaires qui vivaient en exil à l’étranger furent, à leur tour, l’objet d’une amnistie. La dictature n’existe effectivement plus à l’égard de ces ennemis du peuple, et ceux-ci ont pu jouir de la « démocratie ». Quelles que soient les belles phrases dont use la clique Tito, sa soi-disant « démocratie » est une démocratie s’exerçant uniquement à l’égard d’un petit nombre d’éléments bourgeois, anciens et nouveaux ; pour la grande masse des travailleurs, c’est la plus pure dictature. La clique Tito a transformé la machine d’Etat révolutionnaire, qui avait été instaurée en Yougoslavie pour réprimer une minorité de gens formant la classe exploiteuse, en une machine d’Etat ayant pour objectif la répression du prolétariat et de la grande masse des travailleurs.

La dégénérescence du pouvoir d’Etat en Yougoslavie s’est produite non au moyen du renversement de l’ancien pouvoir par la violence et de l’établissement d’un nouveau pouvoir, mais par une « évolution pacifique ». Les mêmes individus — la clique Tito — détiennent le pouvoir. Mais en fait, ces gens ne représentent plus les intérêts des ouvriers, des paysans, les intérêts de tous les travailleurs, mais ceux de l’impérialisme et de la bourgeoisie, ancienne et nouvelle, de Yougoslavie.

Utilisant le pouvoir, la clique Tito contrôle toutes les artères de l’économie nationale, exploite à outrance le peuple travailleur ; c’est ainsi que s’est formée en Yougoslavie une bourgeoisie bureaucratique. Par ailleurs, du fait que celle-ci dépend « de l’impérialisme américain et possède un caractère comprador très accentué, elle est en même temps une bourgeoisie compradore. Le pouvoir détenu par la clique Tito est une dictature exercée par cette bourgeoisie bureaucratique et compradore.

Les faits précités montrent, sous différents aspects, que la politique poursuivie par le régime de Tito est une politique de restauration et de développement du capitalisme, qui ramène la Yougoslavie à l’état de pays semi-colonial ou dépendant.

La dégénérescence du pouvoir d’Etat en Yougoslavie a abouti à la destruction du système économique socialiste et à la restauration du système économique capitaliste. Quand le système économique capitaliste est rétabli sous une nouvelle forme et qu’une bourgeoisie bureaucratique et compradore de type nouveau s’est formée graduellement, celle-ci exige le renforcement de la dictature bourgeoise et le développement d’un système politique correspondant au système économique capitaliste afin de consolider sa position dominante.

C’est précisément de cette manière que s’est réalisée pas à pas, en Yougoslavie, la dégénérescence du Parti et du pouvoir qui a abouti à la restauration du capitalisme dans l’ensemble du système socioéconomique. Le processus de dégénérescence de la Yougoslavie se poursuit depuis quinze années. Il constitue une véritable histoire de l’ »évolution pacifique » par laquelle un pays socialiste devient un pays capitaliste.

C’est en s’appuyant sur l’impérialisme américain, sur la machine d’Etat de la dictature de la bourgeoisie bureaucratique et compradore, sur l’aristocratie ouvrière à sa solde et sur les paysans riches à la campagne que la clique Tito maintient sa domination en Yougoslavie ; en même temps, elle recourt à toutes sortes de moyens trompeurs pour masquer sa physionomie réactionnaire et mystifier les masses populaires.

Cependant, sa politique réactionnaire est des plus impopulaires. Que la Yougoslavie, de pays socialiste, ait dégénéré en pays capitaliste, de pays indépendant, soit tombée au rang de semi-colonie ou de dépendance de l’impérialisme, ce sont là des phénomènes nuisibles aux intérêts fondamentaux du peuple yougoslave, qui ne peuvent que se heurter à l’opposition de tous les communistes honnêtes et des masses populaires yougoslaves, dans leur écrasante majorité.

Nous éprouvons une profonde sympathie pour le peuple et les communistes yougoslaves actuellement dans une situation difficile. La clique Tito peut dicter sa loi pendant un certain temps, mais nous sommes persuadés que quelles que soient les pressions et les manœuvres trompeuses auxquelles il a recours, aucun groupe au pouvoir, s’il est hostile au peuple, ne peut avoir de fin heureuse. Il est évident que la clique Tito ne fera pas exception. Les hommes qui sont victimes d’une mystification finissent toujours par en prendre conscience. Le peuple et les communistes yougoslaves, qui possèdent une glorieuse histoire, ne laisseront pas cette clique de renégats disposer indéfiniment de leur sort. Le peuple yougoslave a devant lui un avenir radieux.

LA POSITION DE PRINCIPE DU PARTI COMMUNISTE CHINOIS SUR LA QUESTION DE LA YOUGOSLAVIE

Dans sa lettre ouverte, le Comité central du P.C.U.S. prétend qu’il fut un temps où « les dirigeants du P.C.C. n’avaient aucun doute quant au caractère du régime socialiste en Yougoslavie » et qu’à présent, les dirigeants chinois « ont changé radicalement leur position dans la question yougoslave ».

Certes, la Yougoslavie a été un pays socialiste et pendant un certain temps ce pays progressait dans la voie du socialisme.

Mais avec la trahison de la clique Tito, le système social de la Yougoslavie ne tarda pas à dégénérer.

En 1954, lorsque Khrouchtchev proposa l’amélioration des relations avec la Yougoslavie, nous consentîmes à la considérer comme un pays socialiste frère en vue d’œuvrer à son retour dans la voie du socialisme et de continuer à observer l’évolution de la clique Tito.

Mais déjà à ce moment-là, nous ne mettions pas de trop grands espoirs en la clique Tito. Dans sa lettre du 10 juin 1954 adressée au Comité central du P.C.U.S., le Comité central du P.C.C. a souligné : On doit tenir compte du fait que les dirigeants yougoslaves étant déjà allés bien loin dans leurs rapports avec l’impérialisme, il se pourrait qu’ils repoussent les efforts tendant à les rallier, qu’ils refusent de revenir dans la voie socialiste, mais que « même si une telle situation apparaissait, le camp de la paix, de la démocratie et du socialisme n’en souffrirait pas sur le plan politique, tout au contraire, l’hypocrisie des dirigeants yougoslaves n’en apparaîtrait que mieux aux yeux du peuple yougoslave et des peuples du monde entier ».

Hélas, nous avions vu juste ! Comme on pouvait s’y attendre, la clique Tito a repoussé tous les efforts que nous avions déployés pour la rallier, elle est allée toujours plus loin dans la voie du révisionnisme.

Après avoir refusé d’apposer sa signature au bas de la Déclaration de 1957, la clique Tito a avancé en 1958 un programme à cent pour cent révisionniste, elle a levé cette grande bannière du révisionnisme moderne et l’a opposée à la Déclaration de 1957, programme commun reconnu par tous les partis communistes et ouvriers. En Yougoslavie, le processus de restauration du capitalisme s’est accompli graduellement. Sur le plan international, la clique Tito se montre de plus en plus zélée en tant que détachement contrerévolutionnaire de l’impérialisme américain.

Dans ces circonstances, l’attitude de chaque parti marxiste-léniniste vis-à-vis de la clique Tito n’est plus celle qui se doit envers un parti frère, un pays frère, ni celle consistant à la rallier, il s’agit de démasquer et de combattre résolument et de façon conséquente cette clique de renégats. La Déclaration de 1960 a clairement précisé ce point.

La lettre ouverte, le Comité central du P.C.U.S. élude à dessein toute une série de faits importants survenus après la Conférence des partis frères de novembre 1957, ainsi que les conclusions unanimes de la Conférence des partis frères de 1960, et c’est bien en vain qu’elle a cité, pour défendre la position erronée de la direction du P.C.U.S., une phrase de l’éditorial du Renmin Ribao du 12 septembre 1957 concernant la Yougoslavie.

Les faits prouvent que notre position vis-à-vis de la clique Tito correspond à la réalité, qu’elle est une position de principe, qu’elle est conforme à l’accord commun de la Conférence de 1960 des partis frères. Et en s’efforçant par tous les moyens de réhabiliter la clique Tito, la direction du P.C.U.S. a montré par là même qu’elle a trahi le marxisme-léninisme, rejeté la Déclaration de 1960, qu’elle apporte son aide à l’impérialisme américain et à ses valets et cherche à tromper le peuple yougoslave et les autres peuples du monde.

EST-CE TITO QUI « A ÉLIMINÉ SES ERREURS » OU BIEN KHROUCHTCHEV QUI A PRIS TITO POUR MAÎTRE ?

Khrouchtchev a dit que les dirigeants yougoslaves avaient éliminé beaucoup de ce qui était considéré comme erroné. Mais la clique Tito n’ayant pas reconnu qu’elle avait commis des erreurs, encore moins pourrait-il être question pour elle de les corriger. Elle a dit qu’elle « n’a nul besoin » 46 de se corriger, et que vouloir qu’elle le fasse, « ce serait tout simplement perdre son temps » 47, ce serait « tout bonnement superflu et ridicule » 46.

Quels sont les faits ? La clique Tito a-t-elle modifié son programme révisionniste ? Non. A-t-elle accepté les Déclarations de 1957 et de 1960 ? Non plus. A-t-elle modifié sa politique révisionniste, tant intérieure qu’extérieure ? Pas le moins du monde.

La nouvelle Constitution adoptée en avril 1963 par l’Assemblée nationale fédérale de Yougoslavie a montré on ne peut plus clairement, que la clique Tito n’a modifié en rien sa position révisionniste. Cette Constitution a consacré sous forme juridique son programme à cent pour cent révisionniste. Dans son rapport sur le projet de la nouvelle Constitution, Kardelj a déclaré que cette Constitution est la « concrétisation sur les plans juridico-politique et d’organisation » des conceptions du programme de la L.C.Y.

Si Khrouchtchev se met à fraterniser avec la clique Tito, si la plus grande intimité s’est établie entre eux, ce n’est pas parce que celle-ci a corrigé certaines de ses erreurs, mais bien parce que Khrouchtchev lui a emboîté le pas.

Ici encore voyons les faits !

1. En s’opposant à Staline, Tito s’oppose au marxisme-léninisme jusque dans ses fondements. C’est dans le même but que Khrouchtchev répudie totalement Staline.

2. Tito et Khrouchtchev répudient les principes fondamentaux du marxisme-léninisme et attaquent les communistes chinois et les autres communistes qui s’en tiennent fermement au marxisme-léninisme, les qualifiant de « dogmatiques » ; en même temps, ils dépeignent leur propre altération du marxisme-léninisme comme étant un « développement créateur » du marxisme-léninisme.

3. Tito et Khrouchtchev s’attachent à faire l’éloge des chefs de file de l’impérialisme américain. Tito dit qu’Eisenhower « est un homme qui cherche à sauvegarder la paix » 48 et que les efforts de Kennedy « contribuent à l’amélioration des relations internationales et au règlement pacifique des problèmes brûlants du monde » 49. Khrouchtchev affirme, de son côté, qu’Eisenhower « aspire sincèrement à la paix » 50 et que Kennedy « se soucie du maintien de la paix » 51.

4. Tito et Khrouchtchev s’efforcent d’aviver la terreur de la guerre nucléaire, afin d’intimider les peuples du monde pour qu’ils renoncent à la lutte révolutionnaire. Tito dit que la guerre nucléaire signifie l’ »anéantissement de l’humanité » 52. Khrouchtchev affirme, lui aussi, à propos de l’éclatement d’une guerre nucléaire : « Nous détruirons notre Arche de Noé — la terre » 53.

5. Tito et Khrouchtchev prêchent qu’ »un monde sans armes, sans armées et sans guerres » peut être réalisé alors même que l’impérialisme existe encore.

6. Tito proclame que la « coexistence pacifique active » est la « pierre angulaire » 54 de la politique extérieure de la Yougoslavie. Khrouchtchev affirmé que la « coexistence pacifique » est la « ligne générale de la politique extérieure » de l’Union soviétique 55.

7. Tito et Khrouchtchev prétendent que la possibilité du « passage pacifique du capitalisme au socialisme » est devenue plus grande. La clique Tito dit que « l’humanité pénètre irrésistiblement dans l’ère du socialisme par des voies variées » 56, Khrouchtchev dit que l’on peut remplacer la voie de la Révolution d’Octobre par la « voie parlementaire ».

8. Tito prêche « l’intégration politique et l’intégration économique » dans le monde par la « compétition pacifique » 57. Khrouchtchev, lui aussi, préconise la « coopération générale » avec l’impérialisme par la « compétition économique pacifique ».

9. La clique Tito s’emploie à saper dans tous les domaines le mouvement de libération nationale et les guerres de libération nationale. Khrouchtchev s’oppose au mouvement de libération nationale et aux guerres de libération nationale sous prétexte que « n’importe quelle petite ’guerre locale’ renferme des étincelles susceptibles d’allumer un incendie mondial » 58.

10. La clique Tito a supprimé la dictature du prolétariat. Sous le mot d’ordre : « l’Etat du peuple tout entier » Khrouchtchev a, lui aussi, supprimé la dictature du prolétariat.

11. La clique Tito nie que le Parti communiste doive être le détachement d’avant-garde de la classe ouvrière. Khrouchtchev, de son côté, dit que le P.C.U.S. « est devenu le Parti du peuple tout entier » 59.

12. Tito se déclare « en marge des blocs » et s’oppose au camp socialiste. Khrouchtchev dit que « les mots bloc et autres ne sont que choses temporaires » 60, ce qu’ils veulent, tous deux, c’est la suppression du camp socialiste.

Et ainsi de suite.

De tous ces faits, on ne peut que tirer la conclusion suivante : Sur le plan de la politique, tant extérieure qu’intérieure, Khrouchtchev a pris en fait Tito pour maître et, en suivant celui-ci pas à pas, il est tombé dans le révisionnisme.

Jamais le grand peuple soviétique, riche de glorieuses traditions révolutionnaires, et l’écrasante majorité des communistes soviétiques et des cadres de tous les échelons, ne toléreront que Khrouchtchev trahisse le marxisme-léninisme, déchire la
Déclaration de 1960 et fasse cause commune avec la clique du renégat Tito, cela étant tout à fait contraire aux intérêts de l’Union soviétique, aux intérêts du peuple soviétique et des peuples du monde entier.

Jamais le grand peuple soviétique et les membres du P.C.U.S. ne consentiront à ce que Khrouchtchev pactise avec la clique Tito pour s’opposer aux partis frères qui s’en tiennent fermement au Marxisme-léninisme.

Jamais le grand peuple soviétique et les membres du P.C.U.S. n’admettront que Khrouchtchev pactise avec la clique Tito et s’allie avec l’impérialisme pour combattre la Chine, l’Albanie socialistes et d’autres pays frères, pour saper le camp socialiste.

Jamais le grand peuple soviétique et les membres du P.C.U.S. ne consentiront à ce que Khrouchtchev pactise avec la clique Tito et s’associe à la réaction pour combattre les peuples et s’opposer à la révolution.

Jamais le grand peuple soviétique et les membres du P.C.U.S. ne consentiront à ce que Khrouchtchev entreprenne, à l’instar du révisionnisme yougoslave, de changer la nature du Parti et de l’Etat, de frayer la voie à la restauration du capitalisme.

Khrouchtchev a assombri le ciel de l’Union soviétique, premier Etat socialiste du monde. Mais tant dans l’histoire du P.C.U.S. que dans celle de l’Union soviétique, ce ne sera qu’un intermède. Les hommes qui ont été induits en erreur et mystifiés pendant un certain temps finissent toujours par prendre conscience. L’histoire a prouvé et elle continuera à prouver que quiconque cherche à détourner le peuple soviétique de sa marche en avant, fait comme la mante qui veut barrer la route au char, jamais il ne parviendra à son but.

BRÈVE CONCLUSION

La restauration du capitalisme en Yougoslavie constitue pour le mouvement communiste international un nouvel enseignement historique.

Elle nous apprend qu’après la prise du pouvoir par la classe ouvrière, il existe encore une lutte de classes entre la bourgeoisie et le prolétariat, une lutte entre les deux voies — capitalisme et socialisme, et que le danger de la restauration du capitalisme subsiste. La Yougoslavie fournit un exemple bien caractéristique de restauration du capitalisme.

La restauration du capitalisme en Yougoslavie nous apprend qu’un parti de .la classe ouvrière peut, avant son accession au pouvoir, tomber sous la coupe de l’aristocratie ouvrière, dégénérer en un parti bourgeois et devenir un valet de l’impérialisme et même après son accession au pouvoir, tomber sous la coupe des nouveaux éléments bourgeois, dégénérer en un parti bourgeois et devenir un valet de l’impérialisme. La Ligue des Communistes de Yougoslavie fournit un parfait exemple de pareille dégénérescence.

La restauration du capitalisme en Yougoslavie nous apprend que dans un pays socialiste, la restauration du capitalisme ne s’opère pas nécessairement par un coup d’Etat contrerévolutionnaire ni par une invasion armée de l’impérialisme, qu’elle peut se faire aussi par la dégénérescence du groupe dirigeant du pays. Il est toujours plus facile de prendre une forteresse de l’intérieur. La Yougoslavie en fournit un excellent exemple.

La restauration du capitalisme en Yougoslavie nous apprend que le révisionnisme est le produit de la politique impérialiste. Le vieux révisionnisme fut le produit de la politique impérialiste de corruption et d’entretien de l’aristocratie ouvrière. Le révisionnisme moderne, lui aussi, a été engendré de cette façon. A présent, ces tentatives de corruption entreprises par l’impérialisme ont atteint une envergure telle que celui-ci est prêt à acheter à n’importe quel prix les groupes dirigeants des pays socialistes, pour réaliser par leur intermédiaire la politique d’ »évolution pacifique » prônée par lui. Si l’impérialisme américain considère la Yougoslavie comme le « bélier meneur du troupeau », c’est parce que celle-ci fournit un excellent exemple à cet égard. La restauration du capitalisme en Yougoslavie dessillera les yeux de tous les marxistes-léninistes du monde, ils se rendront compte, plus clairement encore, de la nécessité impérieuse qu’il y a de s’opposer au révisionnisme moderne.

Il apparaît qu’aussi longtemps que l’impérialisme subsistera dans le monde, il n’y aura, pas lieu de dire que le danger d’une restauration du capitalisme dans les pays socialistes a disparu.

La direction du P.C.U.S. proclame à cor et à cri qu’elle a déjà éliminé dans son pays le danger d’une restauration du capitalisme et qu’elle a entrepris l’édification du communisme. Bien entendu, s’il en était vraiment ainsi, nous nous en réjouirions. Mais force nous est de constater qu’elle imite la Yougoslavie en tous points et qu’elle s’est engagée dans une voie extrêmement dangereuse. Cet état de choses nous préoccupe beaucoup et nous affligé profondément.

Avec tout l’attachement que nous éprouvons pour la grande Union soviétique et pour le grand P.C.U.S., nous voudrions lancer cet appel sincère aux dirigeants du P.C.U.S. : Camarades et amis, la voie yougoslave n’est absolument pas une voie à suivre ! Revenez vite sur vos pas avant qu’il ne soit trop tard !

  1. Discours de N.S. Khrouchtchev prononcé le 30 août 1963 au Meeting de Velenje, en Yougoslavie.
  2. Discours de N.S. Khrouchtchev prononcé le 21 août 1963 dans une usine à Rakovica, en Yougoslavie.
  3. Interview accordée par N.S. Khrouchtchev le 28 août 1963 dans l’île yougoslave de Brioni. D’après les informations de Tanjug.
  4. « Pour le triomphe du marxisme-léninisme créateur, contre la politique de révision du mouvement communiste mondial », par la Rédaction du Kommunist, N°112, 1963
  5. P. Togliatti : « Ramenons la discussion à ses termes réels », Unità, 10 janvier 1963.
  6. Rapport de N.S. Khrouchtchev présenté en décembre 1962 à la session du Soviet suprême.
  7. Lettre ouverte au Comité central du P.C.U.S. aux organisations du Parti et à tous les communistes de l’Union soviétique.
  8. Ibidem.
  9. M. Todorovic : La Lutte sur deux fronts. Nasha Stvarnost, numéro de mars 1954.
  10. Vesnik u sredu, 27 décembre 1961.
  11. Vesnik u sredu, 6 décembre 1961.
  12. J. Staline : « Le prélèvement des excédents et l’avenir du développement de l’agriculture », Œuvres, tome 11
  13. Allocution d’ouverture de E. Kardelj prononcée le 5 mai 1959 au neuvième plénum du Quatrième Comité fédéral de l’Union socialiste des Travailleurs de Yougoslavie
  14. Intervention de V. Bakaric au Vie Congrès de la L.C.Y.
  15. E. Kardelj : « Sur quelques problèmes de notre politique dans les villages ». Komunist, N° 4, 1954.
  16. S. Komar : Quelques problèmes concernant la campagne et les familles paysannes. Socializam, N° 5, 1962.
  17. Indeks, N° 2, 1962
  18. S. Komar : Quelques problèmes concernant la campagne et les familles paysannes.
  19. J. Staline : Discours prononcé devant le Ier Congrès national des brigades de choc de fermes collectives, Œuvres, tome 13.
  20. V.I. Lénine : Sur la démocratie et le caractère socialiste du pouvoir des Soviets.
  21. Lettre ouverte adressée le 17 février 1958 par le Comité central de la L.C.Y. aux organisations et aux dirigeants de tous les échelons.
  22. Rapport de V. Bakaric présenté le 7 avril 1959 au IVe Congrès de la Ligue des Communistes de Croatie.
  23. A. Papic : « Financement des investissements en Yougoslavie ». Voir Annals of Collective Economy, avril-novembre 1959, imprimé à Belgrade.
  24. V.I. Lénine : « Sur l’infantilisme ‘de gauche’ et les idées petites-bourgeoises » Œuvres, tome 27.
  25. V.I. Lénine : Les tâches immédiates du pouvoir des soviets », Œuvres, tome 27.
  26. V.I. Lénine : « Le monopole du commerce extérieur », Œuvres, tome 33
  27. J. Staline : « Entretien avec la première délégation ouvrière américaine », Œuvres complètes, tome 10
  28. Borda, 23 avril 1954.
  29. Borda, 8 mai 1954
  30. Slobodni Dom, 4 septembre 1958
  31. Slovenski Porocevalec, 9septembre 1958.
  32. Kommunist, 2 juin 1960.
  33. Bulletin de politique étrangère, Ier février 1962.
  34. Borda, 13 janvier 1961.
  35. Politika, 5 mai 1963.
  36. Kommunist, 17 août 1961.
  37. Rad, 12 septembre 1959.
  38. Borda, 26 décembre 1960.
  39. Politika, 3 septembre 1959.
  40. La Rébellion de Cuba, édité à Belgrade en novembre 1962.
  41. Politika, 1er janvier 1963.
  42. Kommunist, 13 septembre 1962.
  43. Politika, 13 novembre 1962.
  44. Allocution de N.S. Khrouchtchev prononcée le 24 août 1963 au Meeting de Split, en Yougoslavie.
  45. E. Kardelj : « La nouvelle constitution de la Yougoslavie socialiste », Borda, 29 septembre 1962.
  46. Allocution de J. Tito prononcée le 20 décembre 1962 à la gare de Belgrade.
  47. Intervention de J. Tito prononcée en avril 1958 au VIIe Congrès de la L.C.Y.

  48. Entretien de J. Tito avec le commentateur du New York Times le 20 février 1958
  49. Message de J. Tito à J.F. Kennedy, Borda, 21 janvier 1961
  50. Rapport de N.S. Khrouchtchev présenté en mai 1960 à la session de Soviet suprême.
  51. Lettre de N.S. Khrouchtchev à J.F. Kennedy du 27 septembre 1962.
  52. Rapport présenté le 19 avril 1958 par J. Tito à l’Assemblée nationale fédérale de Yougoslavie.
  53. Allocution de N.S. Khrouchtchev prononcée le 2 juillet 1960 à l’Association Autriche-U.R.S.S.

  54. Rapport de K. Popovic sur la politique extérieure présenté à l’Assemblée nationale fédérale de Yougoslavie, Borda, 27 février 1957.
  55. N.S. Khrouchtchev : rapport d’activité du Comité central du P.C.U.S. au XXe Congrès du Parti, février 1956.
  56. Programme de la L.C.Y.
  57. Interview accordée par J. Tito à D. Pearson, envoyé spécial du Washington Post, Borda, le 12 août 1962.
  58. Déclaration de N.S. Khrouchtchev du 8 juillet 1960 à une conférence de presse à Vienne.
  59. Rapport de N.S. Khrouchtchev sur le programme du P.C.U.S. présenté en octobre 1961 au XXIe Congrès du P.C.U.S.
  60. Interview accordée par N.S. Khrouchtchev le 28 août 1963 dans l’île yougoslave de Brioni.

Revenir en haut de la page.