Avec La Prédication de saint Jean-Baptiste, on est dans une démarche résolument protestante chez Bruegel. Il y a déjà une allusion : on est dans la forêt, la ville est au loin. Autrement dit, on est en-dehors de la juridiction du pouvoir, et justement aux Pays-Bas, les protestants se réunissaient dans la forêt.

On a ensuite surtout Jean-Baptiste, qui annonce le Christ (ce qui est conté par Matthieu et Luc), et cette insistance sur le Christ de la part d’un peintre ne représentant jamais Marie est claire quant à son contenu.

Jean-Baptiste n’est d’ailleurs lui-même qu’un parmi d’autres, dans l’esprit protestant de la communauté religieuse organisée où chacun en vaut un autre.

Jésus est d’ailleurs présent, et autour de lui on a de nombreuses personnes regroupées.

C’est bien sûr une allusion aux protestants, qui s’unissent autour de Jésus, ayant compris son message.

Le reste de la foule est plus dispersée, plus désorganisée, elle observe mais elle n’exprime pas la même crainte, le même esprit de rassemblement.

Cela montre ce qui reste à effectuer niveau prêche, niveau éducation.

Et on a dans la foule des surprises justement. On trouve un pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, des asiatiques dont un diseur de bonne aventure lisant dans une main…

On a également un Turc, des Juifs… Des valides, des infirmes, des nobles et des paysans, des villageois et des soldats… On devine facilement que pour ceux en hauteur, leurs privilèges les éloignent du message du Christ.

Le propos suivant est raconté par Matthieu :

21 Jésus lui dit: Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi.

22 Après avoir entendu ces paroles, le jeune homme s’en alla tout triste; car il avait de grands biens.

23 Jésus dit à ses disciples: Je vous le dis en vérité, un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux.

24 Je vous le dis encore, il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu.

On notera que le tableau date de 1556, année où Philippe II d’Espagne tenta particulièrement de réprimer le protestantisme aux Pays-Bas. Il s’ensuivit une transformation des sermons dans les forêts en opérations visant des centaines d’églises, avec la destruction de leur iconographie considérée comme un culte idolâtre et irrationnel.

C’est le début du processus qui va amener une vaste révolte nationale néerlandaise, qui échouera cependant dans une partie du pays. À la suite de la guerre de quatre-vingts ans, les sept provinces du Nord donneront les Pays-Bas, le reste formera la Belgique, mais également le Luxembourg, et ce qui est le Nord-Pas-de-Calais en France.

Enfin comme on le sait, Jésus s’est également fait baptiser dans l’eau par Jean. On lit dans Luc :

16 Il répondit à tous : Moi je vous baptise dans l’eau. Mais quelqu’un va venir, qui est plus puissant que moi. Je ne suis même pas digne de dénouer la lanière de ses sandales. Lui, il vous baptisera dans le Saint-Esprit et le feu.

17 Il tient en main sa pelle à vanner, pour nettoyer son aire de battage, et il amassera le blé dans son grenier. Quant à la bale, il la brûlera dans un feu qui ne s’éteindra pas.

18 Jean adressait encore beaucoup d’autres recommandations au peuple et lui annonçait la Bonne Nouvelle de évangile.

19 Mais il reprocha au gouverneur Hérode d’avoir épousé Hérodiade, la femme de son demi-frère, et d’avoir commis beaucoup d’autres méfaits. 20 Hérode ajouta encore à tous ses crimes celui de faire emprisonner Jean.

21 Tout le peuple venait se faire baptiser, et Jésus fut aussi baptisé. Or, pendant qu’il priait, le ciel s’ouvrit

22 et le Saint-Esprit descendit sur lui, sous une forme corporelle, comme une colombe.

Une voix retentit alors du ciel : Tu es mon Fils bien-aimé, tu fais toute ma joie.

Or, si on regarde bien, dans le tableau, on a un baptême. La boucle est bouclée.


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