Quelle est la conception dénoncée par la seconde position des Brigades Rouges, qui se fait exclure ? En quoi consiste le caractère « mouvementiste » des guérillas urbaines d’Europe occidentale ?

Voici comment Simonetta Giorgeri, lors de son procès à Gênes en 1990, résume cela dans le cadre d’une déclaration typique des brigadistes lors de leurs procès, consistant à récuser ceux-ci et à réaffirmer la ligne de l’organisation.

« Cette activité de formation/organisation des forces se meut parallèlement au processus de reconstruction.

Dans le milieu ouvrier et prolétarien, des conditions politiques et matérielles endommagées et dispersées par la contre-révolution, pour un équilibre politique et de forces favorable au camp prolétarien, va avoir lieu un processus qui mûrit en référence à l’initiative de la guérilla destinée à rompre les équilibres politiques généraux se formant, entre classe et État, au sein duquel se met en évidence et s’affirme la contradiction dominante en antagonisme entre la classe et l’État.

L’intervention sur ce plan, avec l’attaque au point le plus élevé de l’affrontement, pèse sur les équilibres de l’affrontement lui-même et se répercute, en conséquence, sur l’ensemble du panorama des rapports entre les classes, jusqu’au plan capital/travail, mettant en mouvement des dynamiques dans le tissu prolétarien et dans les composantes les plus matures de l’autonomie de classe en particulier, d’où il est possible de « libérer » l’énergie prolétarienne qui doit être formée, organisée et disposée de manière adéquate pour être en mesure de soutenir le niveau d’affrontement et se rendre fonctionnelle à l’approfondissement de la guerre de classe.

Reconstruction et formation/organisation constituent le rail sur lequel se concrétise la nécessaire dialectique guérilla/autonomie de classe. »

Il est évident que toute cette conception est « informatique ». Il suffit déjà de remplacer le terme « activité » et celui de « processus » par celui de programme. On a alors deux programmes :

– le programme de formation/organisation des forces ;

– le programme de reconstruction.

Il est d’ailleurs dit que ces deux « programmes » fonctionnent en parallèle.

Ils fonctionnent donc en même temps. Donc ils ont besoin d’un système d’exploitation pour les exécuter, les faire tourner.

Ce système d’exploitation, c’est le capitalisme, composé :

– du « milieu ouvrier et prolétarien » ;

– des « conditions politiques et matérielles endommagées et dispersées par la contre-révolution » ;

– l’ensemble formant la contradiction entre « la classe et l’État ».

Mais ce n’est pas tout, on a un troisième « programme » fonctionnant en même temps que les deux premiers :

– « l’initiative de la guérilla destinée à rompre les équilibres politiques généraux se formant, entre classe et État ».

Ce programme consiste en l’intervention ciblée de l’avant-garde, intervention qui permet la formation de forces, la recomposition de la classe.

Deux choses découlent ainsi de cette intervention. Déjà, on a un paquet d’informations envoyés, au sens où l’intervention « pèse » et se « répercute ».

Ce paquet d’informations est envoyé :

– « dans le tissu prolétarien et dans les composantes les plus matures de l’autonomie de classe en particulier ».

Et ce paquet d’informations met en branle ce tissu prolétarien, telles des informations qui, envoyées à un programme, le font fonctionner :

– « mettant en mouvement des dynamiques dans le tissu prolétarien et dans les composantes les plus matures de l’autonomie de classe en particulier ».

Ce programme, une fois exécuté, amène un résultat :

– « d’où il est possible de « libérer » l’énergie prolétarienne qui doit être formée, organisée et disposée de manière adéquate »

De là vient l’idée de l’attaque au cœur de l’État, l’idée de taper au point le plus élevé. C’est ce qui amène le plus de répercussions. C’est là une non-généralisation du principe de programme mis en mouvement. Il n’en reste pas moins que la conception répond absolument à une lecture informatique de la réalité.

On a d’ailleurs ici un « Parti pour le Parti », comme les Brigades Rouges pour le Parti Communiste Combattant se sont toujours définies.


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