En 1938, Eugen Varga publia Deux systèmes : économie socialiste et économie capitaliste. Il s’agit d’une étude relativement longue fournissant les traits généraux du capitalisme et ceux de l’URSS. Les explications sont tout à fait dans l’esprit soviétique.

Et à ce titre, on y trouve une sorte de rectification, d’autocritique par rapport aux critiques faites lors du VIe Congrès et au XIe plénum de l’Internationale Communiste.

Voici comment Eugen Varga raconte de manière juste le point de vue soviétique, qui n’était pas le sien auparavant :

« C’est le capital fixe (c’est-à-dire les moyens de production au sens propre du mot : machines, appareils, outils, installations, etc.) qui joue le rôle décisif dans le développement des forces productives matérielles (qu’il faut distinguer de la force de travail humaine comme force productive).

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C’est aussi pourquoi, quand nous nous demandons comment les forces matérielles productives du capitalisme se sont développées pendant la période de crise générale qui a duré vingt ans, il nous faudra avant tout analyser le développement du capital fixe.

Certains trotskistes, devenus plus tard traîtres au socialisme et à leur pays, et falsifiant la thèse de Lénine sur les entraves mises au développement des forces productives par les monopoles, avaient opposé à sa doctrine révolutionnaire du capitalisme en putréfaction, leur propre théorie contre-révolutionnaire de la « stagnation », de la « mutilation » du capitalisme.

Dans son ouvrage L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, Lénine dit :

« Mais ce serait une erreur de croire que cette tendance à la putréfaction est incompatible avec une croissance rapide du capitalisme.

Telles branches de l’industrie, telles couches de la bourgeoisie, tels pays manifestent à l’époque impérialiste avec une force plus ou moins grande l’une ou l’autre de ces tendances.

Dans l’ensemble, le capitalisme croît avec infiniment plus de rapidité que naguère, mais cette croissance devient d’une façon générale non seulement plus inégale, mais cette inégalité se traduit aussi en particulier dans la putréfaction des pays les plus riches en capital (Angleterre). »

Ce que dit ici Lénine se rattache étroitement à sa doctrine fondamentale selon laquelle l’impérialisme n’est qu’une « superstructure » du capitalisme ; qu’il n’y a pas d’ « impérialisme pur », que la concurrence subsiste, malgré les monopoles.

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Il considérait comme anti-marxiste et rejetait aussi bien le « cartel général » de Hilferding que le « capitalisme organisé » de Boukharine.

Or, tant qu’il y aura concurrence, il y aura aussi tendance à baisser les prix de production en introduisant des améliorations d’ordre technique.

Et, en effet, pendant la période d’après-guerre, particulièrement entre la première et la seconde crise économique, l’on put constater un progrès considérable dans la technique et un très grand développement des forces de production.

Voici ce que disent à ce propos les thèses du VIe congrès de l’Internationale Communiste :

« Il est incontestable que l’essor considérable de la technique des pays capitalistes prend dans certains d’entre eux (États-Unis, Allemagne) le caractère d’une révolution technique.

D’une part, l’accroissement gigantesque du nombre des moteurs à combustion interne, l’électrification, le développement des procédés chimiques dans l’industrie, les nouvelles méthodes pour obtenir des combustibles et des matières premières synthétiques (benzine, soie artificielle, etc.), l’emploi des métaux légers, l’extension considérable des transports automobiles ; d’autre part, les nouvelles formes de l’organisation du travail, combinées avec le développement excessivement rapide du travail à la chaîne, ont relevé de nouveau les forces productives du capitalisme. »

Depuis le déclenchement de la crise de 1929, depuis que les préparatifs pour une nouvelle guerre mondiale se précipitent, le progrès technique s’est modifié sous certains rapports.

Le point de vue militaire prime sur tout. »

On a ici une excellente remise en cause de la thèse mise en avant par Eugen Varga auparavant.


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