[15 juin 1924]
A l’Armée, à la Flotte et à l’Aviation rouges
Soldats de l’Armée Rouge, nous avons subi une lourde perte dans l’intervalle du IVe et du Ve Congrès. Notre maigre Vladimir Ilitch Lénine, qui enseignait aux travailleurs de tous les pays que seule une lutte organisée et incessante pouvait permettre de renverser le pouvoir du capital et d’établir la véritable fraternité entre les peuples affranchis, est mort. Présents ici, dans la capitale de l’Union des Républiques soviétiques, sous votre protection, nous trouvons une grande consolation dans le fait que Lénine vit toujours dans la grande Union soviétique, dans l’Internationale Communiste, toujours croissante, et dans l’Armée Rouge, champion des conquêtes de la Révolution.
Chers camarades, en vous saluant au nom de millions de travailleurs, nous estimons que notre devoir est de vous rappeler que la puissance du capitalisme n’est pas encore brisée et que les exploiteurs forgent de nouvelles chaines pour les opprimés et les déshérités, préparent de nouvelles boucheries. Toute la haine des seigneurs de la terre, des banquiers et des industriels de tous les pays est dirigée contre l’unique Etat ouvrier et paysan, forteresse des travailleurs. Soyez sur vos gardes, souvenez-vous que le danger de guerre subsistera tant que le pouvoir restera entre les mains des oppresseurs.
Les déshérités du monde entier, les serfs du salariat, les esclaves des colonies tournant leurs regards vers vous et voient en vous les soldats de l’unique armée qui défende les travailleurs ; ils suivent avec attention vos travaux, vos combats, vos succès.
L’Internationale Communiste sait que le gouvernement soviétiste, dans son désir de paix, réduit sans cesse les effectifs de l’Armée Rouge. Les divisions territoriales constituent maintenant la plus grande partie des forces armées de l’Union Soviétique. Moins l’Armée est nombreuse, plus le service militaire est court et plus aussi l’Armée Rouge doit être prête à repousser à n’importe quel moment les agressions, d’où qu’elles viennent.
L’Internationale Communiste, connaissant votre sublime et glorieux passé, regarde hardiment l’avenir, convaincue que, le moment venu l’Armée Rouge remplira avec honneur son devoir.
Vive l’Armée Rouge, défenseur des opprimés et des déshérités.
Vive la Révolution sociale universelle.
Contre la Terreur blanche
Le Ve Congrès mondial se réunit au moment où se déchaîne dans de nombreux pays la terreur blanche la plus cruelle.
Des milliers d’ouvriers, de paysans, de communistes et de syndiqués, gémissent dans les prisons d’Allemagne, de Pologne, de Bulgarie, d’Italie, d’Irlande, d’Espagne et du Japon.
Des centaines d’Irlandais sont arrêtés et traînés devant les tribunaux pour avoir protesté contre le militarisme anglais. 25.000 révolutionnaires hindous, luttant pour affranchir leur pays de l’esclavage colonial, sont enfouis par l’impérialisme dans les geôles britanniques.
En Pologne les condamnations, les exécutions sans jugement des tortures rappelant les pires époques du moyen-âge, les violences barbares des bourreaux acharnés contre les captifs de la guerre de classes, écrivent chaque jour de nouvelles pages dans le martyrologe sanglant du prolétariat militant.
L’Italie est le pays des assassinats en masse, des pogroms de la fureur effrénée des bandes fascistes ; au Japon on profite du tremblement de terre pour supprimer les révolutionnaires ; en Roumanie, on fusille les détenus sous prétexte de « tentative d’évasion » ; en Espagne, on assassine aux coins des rues les chefs des syndicats ; tels sont les épisodes de la longue suite des répressions exercées par la bourgeoisie contre les militants du mouvement ouvrier et’ révolutionnaire.
Le Ve Congrès, réuni dans la Capitale de la Révolution mondiale, vous adresse son salut chaleureux à travers les murs de vos prisons, à vous tous, combattants de la Commune universelle, à vous, ouvriers allemands ; à vous, matelots allemands soldats de l’insurrection ; à vous, insurgés bulgares, paysans qui avez pris les armes pour renverser la dictature fasciste ; à vous, ouvriers de Cracovie, que la bourgeoisie polonaise se prépare à condamner ; à vous aussi, héroïques prolétaires d’Italie ; à vous, défenseurs de l’indépendance irlandaise ; à vous, révolutionnaires hindous.
Il n’est pas de sacrifices que les communards de tous pays ne soient prêts à supporter pour la grande cause de la libération des travailleurs et des opprimés. Les condamnations, les tortures, la terreur, rien ne nous arrêtera.
L’heure de la victoire est proche, le prolétariat mondial, libérant les prisonniers de la bourgeoisie, renversant le pouvoir des bourreaux capitalistes, reconstruira le monde entier en une Commune universelle.
Aux peuples frères de l’Orient
La mort de Lénine, qui a porté un dur coup au cœur de la classe ouvrière universelle, a trouvé un profond écho aussi chez vous, peuples opprimés d’Orient.
Vos démonstrations de deuil, vos réunions consacrées à la glorieuse mémoire de Lénine, mille autres signes de votre douleur ont prouvé que Lénine a été pour vous un guide et que son nom est le signe de ralliement de tous les peuples révoltés.
Les mots d’ordre de Lénine sont les vôtres.
Le testament révolutionnaire de notre cher Ilitch a été compris par chaque paysan turc, par chaque « ambal » perse, par les nomades de l’Afghanistan et les fellahs de l’Egypte, par les dockers japonais, les cheminots chinois et les coolies coréens. Il vous inspirera dans les combats inévitables que vous aurez à mener pour conquérir un avenir meilleur.
L’Internationale Communiste, avec le prolétariat mondial, suit avec attention la lutte héroïque que vous menez pour conquérir votre indépendance, pour rejeter le joug humiliant du Capital.
La bourgeoisie impérialiste, qui cherche à s’emparer de nouveaux débouchés, considère les pays de l’Orient comme un objet d’exploitation sans limite comme la source de sa puissance coloniale.
Vous tous, les millions d’habitants des vastes étendus du Proche, du Moyen et de l’Extrême-Orient, vous n’êtes pour la bourgeoisie que des esclaves, nés pour créer de vos mains la richesse de la classe dirigeante de l’Europe Occidentale et de l’Amérique.
Pendant la guerre les capitalistes de tous les pays ont multiplié les promesses d’autonomie, de home-rule et presque d’indépendance.
Ce n’était qu’une ruse de la bourgeoisie, qui cherchant au moment critique à maintenir les colonies sous sa domination et à s’assurer une source de renforts, un abondant réservoir humain pour remplir ses armées décimées.
Immédiatement après la guerre, la bourgeoisie impérialiste, violant cyniquement ses engagements, a recommencé avec acharnement à étouffer les Indes, à piller la Chine à se partager la Turquie, à asservir la Perse.
En réponse à tant d’arbitraire, vous, opprimés de l’Orient, vous vous êtes levés comme un seul homme pour défendre votre indépendance.
Sachez que vous n’êtes pas seuls à combattre.
La sympathie de l’élite prolétarienne de tous les pays est avec vous. La bourgeoisie qui vous opprime et vous exploite dans les colonies et les semi-colonies opprime de même la classe ouvrière d’Europe et d’Amérique.
Nos voies, conduisant à la destruction du bagne capitaliste et à la suppression de toute l’oppression, sont identiques.
L’affranchissement effectif et définitif des opprimés de l’Orient et des exploités de l’Occident n’est possible que par une alliance étroite, par une lutte côte à côte contre l’impérialisme.
Les paysans de tous les pays se rallient maintenant sous la bannière de l’Internationale Communiste. Votre place, paysans de l’Orient, est aux cotés de vos frères occidentaux.
Le Ve Congrès de l’Internationale Communiste vous tend une main fraternelle d’aide mutuelle dans la lutte commune.
Il adresse son salut aux jeunes partis communistes d’Orient, qui luttent vaillamment dans des conditions particulièrement dures, dans des pays arriérés où subsistent les vestiges du féodalisme, où les tortures et les condamnations atteignent les meilleurs camarades.
Luttant infatigablement contre les impérialistes et les féodaux indigènes, les Partis communistes d’Orient continueront à soutenir tout mouvement sincère d’affranchissement national, tendant à, renverser le joug oppresseur du capital étranger et opposant par là même un front unique anti-impérialiste à la bourgeoisie exploitatrice universelle.
Le Ve Congrès de l’Internationale Communiste vous salue aussi, peuples de la Turquie et de l’Afghanistan, qui avez rejeté le fardeau de la dépendance nationale et repoussé les attaques des bandits impérialistes.
En même temps, il envoie son salut cordial au Parti Homindan de Chine et au Parti Populaire Révolutionnaire de Mongolie qui forgent l’avenir sublime de ces deux peuples.
L’heure du châtiment approche pour le capitalisme. Les ouvriers de tous les pays, unis aux opprimés d’Orient sous la bannière déployée de l’Internationale Communiste, se préparent au combat décisif, au grand tourbillon qui renversera la forteresse du capitalisme, à la lutte pour la conquête du pouvoir et l’instauration de l’Union Universelle des Républiques Socialistes Soviétiques, à l’édification du communisme dans le monde entier.
Salut fraternel aux « recrues de Lénine »
A l’heure fatale pour les travailleurs de tous les pays où notre maître a cessé de vivre, la classe ouvrière de l’Union soviétique a montré de nouvelles voies aux opprimés et aux déshérités en envoyant dans le Parti Communiste les meilleurs de ses fils continuer, d’un commun effort, à défendre la grande cause de la libération du travail, conformément au testament de Lénine. Les « recrues de Lénine » ne sont pas seulement le témoignage de la confiance dont jouit le Parti Communiste russe ; ils sont une source nouvelle d’énergie et de courage dans la dure lutte contre les spoliateurs de tous les pays.
Chers camarades, ce ne sont pas seulement les travailleurs de l’Union soviétique qui suivent avec enthousiasme vos efforts pour renforcer le Parti Communiste après la mort de son fondateur et de son guide. Les travailleurs de tous les pays, avec une attention soutenue, suivent tous les événements qui se produisent dans la République du Travail en ces jours difficiles où l’humanité laborieuse a perdu son meilleur guide. Notre consolation est que l’esprit de Lénine est resté dans le cœur de la classe ouvrière qui a accompli la Révolution d’Octobre. Nous sommes fermement convaincus que votre exemple sera suivi par les prolétaires de tous les pays, qui considèrent Lénine non seulement comme le chef de la Révolution russe, mais comme le maître des opprimés de tous les pays. L’Internationale Communiste, en la personne de son Ve Congrès, vous rappelle qu’en vous ralliant sous le drapeau de Lénine, vous avez pris de sublimes, mais lourds engagements.
Le Parti Communiste russe a été et reste encore le modèle d’une discipline de fer et d’une énergie infatigable. Vous êtes entrés dans ce parti au moment où il a perdu son meilleur chef. Vous avez ainsi montré que vous comprenez clairement les tâches qui s’imposent à la classe ouvrière de l’Union soviétique. Ces tâches sont immenses. Les exploiteurs de tous les pays préfèrent noyer l’humanité dans le sang plutôt que de se rendre. C’est pourquoi nous devons nous attendre à de durs combats, qui exigeront la concentration de toutes les forces des travailleurs, à travers des difficultés inouïes. En y adhérant, vous êtes devenus les frères d’armes des combattants du prolétariat mondial.
L’Internationale Communiste, en vous saluant, est fermement convaincue que vous justifierez la confiance de la classe ouvrière qui vous a désignés pour défendre le drapeau du léninisme.
Vive le Parti Communiste Russe ! Vive la classe de Lénine !