J. Staline
Sur l’interdiction d’exclure les kolkhoziens des kolkhozes
Décret du Conseil des Commissaires du peuple de l’URSS et du Comité Central du PC(b)US
19 avril 1938
Paru dans la Pravda, 20 avril 1938
Le Conseil des Commissaires du Peuple de l’URSS et le Comité Central du PC(b)US ont prévenu à maintes reprises les organisations locales du Parti et des Soviets sur le préjudice qu’il y a à exclure des kolkhoziens des kolkhozes sans aucun fondement. Le Conseil des Commissaire du Peuple de l’URSS et le Comité Central du PC(b)US ont montré plus d’une fois qu’une telle pratique est anti-parti et antigouvernementale. Pourtant, dans beaucoup de régions et de républiques des exclusions non fondées de kolkhoziens ont lieu. Les exagérations et les déformations lors des exclusions de kolkhoziens des kolkhozes ont pris des proportions particulièrement grandes dans les régions administratives de Sverdlovsk, Novossibirsk, Smolensk, Kalinine, Kaménéts-Podolsk, Jitomir, dans les régions de l’Altaï, de Krasnodar, d’Ordjonikidze et dans la RSS du Kazakhstan. Le Conseil des Commissaires du Peuple de l’URSS et le Comité Central du PC(b)US soulignent que la pratique nuisible de l’exclusion des kolkhoziens existe également dans d’autres régions.
La pratique montre que la direction et les présidents des kolkhozes, au lieu de respecter les statuts de l’artel agricole et ne pas tolérer l’arbitraire à rencontre des kolkhoziens, commettent eux-mêmes des actions illégales. Le contrôle a établi que la majorité écrasante des exclusions des kolkhozes ne se base sur absolument aucun fondement, s’opère sans qu’aucun prétexte sérieux n’ait été fourni, sous des motifs les plus insignifiants. La forme d’exclusion illégale des kolkhozes la plus répandue est l’exclusion des membres des familles dont les pères sont partis pour travailler momentanément ou définitivement dans les entreprises d’Etat. Cette forme d’exclusion due aux liens de parenté contredit fondamentalement les statuts de l’artel agricole.
Avant de permettre l’exclusion du kolkhoze, les statuts de l’artel agricole prévoient une série de mesures intermédiaires à titre préventif et à caractère éducatif pour chaque kolkhozien qui viole le règlement intérieur du kolkhoze, comme par exemple : obliger le violateur à refaire un travail de mauvaise qualité sans comptabiliser les journées-travail, avertissement, blâme, blâme à la réunion générale, inscription sur la liste noire, amende à concurrence de 5 journées-travail, déplacement à un travail inférieur, éloignement provisoire du travail. Mais les directions des kolkhozes, pour une raison inconnue, n’ont pas recours à ces mesures et bien souvent excluent les kolkhoziens des kolkhozes pour une simple violation des règlements intérieurs.
Si, d’après les statuts de l’artel agricole, l’exclusion de l’artel ne peut être effectuée que par décision de l’assemblée générale des membres de l’artel, et de plus avec participation de pas moins des 2/3 de tous les membres, en fait cette règle statutaire est bien souvent violée ; les cas ne sont pas rares où les exclusions sont prononcées par la direction du kolkhoze et même par son seul président.
Au lieu de réprimer et de corriger cette pratique nuisible de l’exclusion des kolkhozes, les travailleurs dirigeants du Parti et des Soviets de districts ne prennent pas de mesures décisives pour la répression de l’arbitraire à rencontre des kolkhoziens, ont une attitude bureaucratique et insensible face au sort qui est fait aux kolkhoziens et aux appels dont ceux-ci se pourvoient contre les exclusions illégales du sein des kolkhozes, laissent impunies les personnes qui ont recouru à l’arbitraire à rencontre des kolkhoziens et réduisent souvent leur propre rôle au simple enregistrement des faits d’exclusion de kolkhoziens, à l’envoi de rapports statistiques sur ces questions aux organes soviétiques supérieurs. Mieux encore, ces travailleurs poussent souvent eux-mêmes les présidents et les directions des kolkhozes sur la voie des exclusions illégales de kolkhoziens, sous prétexte d’épuration des kolkhozes des éléments socialement étrangers et hostiles du point de vue de classe.
Le Conseil des Commissaires du Peuple de l’URSS et le Comité Central du PC(b)US estiment qu’à la base d’une telle pratique se trouve une attitude formelle, bureaucratique et insensible d’un grand nombre de travailleurs dirigeants des kolkhozes pour le sort fait à des hommes vivants, à des kolkhoziens. Ces dirigeants ne comprennent pas qu’exclure un kolkhozien du kolkhoze signifie lui enlever son moyen d’existence, cela signifie non seulement le déshonorer face à l’opinion publique mais aussi le condamner à la famine.
Ils ne comprennent pas que l’exclusion du kolkhoze crée artificiellement un mécontentement et une irritation chez les exclus, donne naissance, chez beaucoup de kolkhoziens, à une incertitude quant à leur attitude pour le kolkhoze, ce qui fait l’affaire des ennemis du peuple.
Le Conseil des Commissaires du Peuple de l’URSS et le Comité Central du PC(b)US décrètent :
1. Interdire de mener l’épuration des kolkhozes sous quelque prétexte que se soit.
2. Interdire l’exclusion du sein des kolkhozes des membres des familles de kolkhoziens motivée par le départ d’un membre de la famille en vue de travailler momentanément ou définitivement dans une entreprise d’Etat.
3. Interdire l’exclusion du sein des kolkhozes pour la violation des règles du règlement intérieur.
4. Fixer pour l’avenir que l’exclusion de kolkhoziens du sein des kolkhozes ne peut être appliquée que comme mesure extrême, contre des membres du kolkhoze qui sont déclarés incorrigibles, qui sabotent et désorganisent le kolkhoze, seulement après que les mesures préventives à caractère éducatif, prévues par l’artel agricole, aient été épuisées, et seulement en respectant strictement la forme de l’exclusion définie par les statuts de l’artel agricole, c’est-à- dire en se conformant à la décision de l’assemblée générale des membres de l’artel à laquelle pas moins des 2/3 doivent être présents. Toutefois dans ces cas-là également, les appels faits par les exclus du kolkhoze doivent être traités avec la plus grande attention.
5. Prévenir les directeurs et les membres des directions des kolkhozes ainsi que les travailleurs du Parti et des Soviets de district que les coupables de violation du présent décret seront déférés en justice, en tant que criminels de droit commun.
V. Molotov, Président du Conseil des Commissaires du Peuple de l’URSS.
J. Staline, Secrétaire du Comité Central du PC(b)US.