J. Staline
Réponse à la lettre ouverte de M. Wallace
17 mai 1948
[Publiée dans la Pravda, 18 mai 1948]
M. Wallace, candidat du Tiers parti à la présidence des Etats-Unis ((Henry Wallace, choisi par F. Roosevelt comme vice-président aux élections présidentielles de 1940. En 1944 quand F. Roosevelt se représente, il désigne H. Truman comme nouveau vice-président. Sommé par les partisans de la tension avec l’URSS de prendre Byrnes et de désavouer Wallace, il choisit H. Truman comme « neutre ». H. Wallacc allait fonder le Parti progressiste, pour lutter contre la politique agressive des Etats-Unis. La nouvelle élection présidentielle de 1948 verra le triomphe de H. Truman.)), dans une lettre ouverte à J. Staline, exposait ses vues quant aux « mesures indispensables pour aboutir au siècle de la paix ». H y affirmait, dans sa conclusion, qu’ « il n’y a pas de divergence qui ne puisse être aplanie par la voie de pourparlers pacifiques et féconds ». Après avoir reproduit cette lettre intégralement, les journaux soviétiques publiaient, le 18 mai 1948, la réponse suivante de J. Staline à la lettre ouverte de M. Wallace :
Je pense que, parmi les documents politiques de ces derniers temps, qui ont pour but de consolider la paix, d’organiser la collaboration internationale et d’assurer la démocratie, la lettre ouverte de M. Wallace, candidat du Tiers parti à la présidence de la République des Etats-Unis, est le document le plus important.
La lettre ouverte de M. Wallace ne saurait être considérée comme une simple déclaration selon laquelle il serait souhaitable d’améliorer la situation internationale, de régler pacifiquement les différends entre l’URSS et les Etats-Unis et de chercher des voies pour arriver à ce règlement. L’insuffisance de la déclaration du gouvernement des Etats-Unis du 4 mai et de la réponse de l’URSS du 9 mai consiste en ce qu’elles se bornent à déclarer qu’il est souhaitable de régler les différends soviéto-américains.
La haute importance de la lettre ouverte vient de ce qu’elle ne se borne pas à une déclaration, mais va plus loin, fait un sérieux pas en avant et trace un programme concret de règlement des différends entre l’URSS et les Etats-Unis. On ne saurait dire que la lettre ouverte de M. Wallace embrasse sans exception toutes les questions qui font l’objet de différends. On ne saurait dire non plus que certaines formules et certains commentaires de la lettre ouverte n’aient pas besoin d’améliorations. Mais ce n’est pas là aujourd’hui l’essentiel. L’essentiel est que M. Wallace, dans sa lettre, fait une tentative ouverte et loyale pour donner un programme concret du règlement de paix, des propositions concrètes pour toutes les questions essentielles qui font l’objet de différends entre l’URSS et les Etats-Unis.
Ces propositions sont connues de tous : réduction générale des armements et interdiction de l’arme atomique, conclusion des traités de paix avec l’Allemagne et le Japon et retrait des troupes de ces pays ; retrait des troupes de Chine et de Corée ; respect de la souveraineté des divers pays et non immixtion dans leurs affaires intérieures. Interdiction des bases militaires dans les pays membres de l’Organisation des Nations Unies ; développement par tous les moyens du commerce international excluant toute discrimination ; assistance aux pays qui ont souffert de la guerre et leur rétablissement économique dans le cadre de l’ONU ; défense de la démocratie et garantie des droits civiques dans tous les pays, etc.
On peut être ou non d’accord avec le programme de M. Wallace. Cependant, une chose est incontestable : aucun homme d’Etat ayant le souci de la paix et de la collaboration des peuples ne peut passer outre à ce programme, car il reflète les espoirs des peuples qui aspirent à la consolidation de la paix, et il jouira sans aucun doute de l’appui de beaucoup de millions de « simples gens ».
Je ne sais si le gouvernement des Etats-Unis approuve le programme de M. Wallace comme une base d’accord entre l’URSS et les Etats-Unis. En ce qui concerne le gouvernement de l’URSS, il estime que le programme de M. Wallace pourrait servir de base bonne et féconde pour cet accord et pour le développement de la collaboration internationale, car le gouvernement de l’URSS estime que, malgré la différence des systèmes économiques et des idéologies, la coexistence de ces systèmes et le règlement pacifique des différends entre l’URSS et les Etats-Unis sont non seulement possibles, mais absolument nécessaires dans l’intérêt de la paix universelle.