Lorsque Lénine revint d’exil, il écrivit les thèses d’avril 1917 qu’il exposa aux bolcheviks : il y avait l’espace pour une prise du pouvoir par les masses. Un nouveau régime pouvait être institué :
« Non pas une république parlementaire, – y retourner après les Soviets des députés ouvriers serait un pas en arrière, – mais une république des Soviets de députés ouvriers, salariés agricoles et paysans dans le pays tout entier, de la base au sommet. »
Parmi les points exposant ce programme qui allait se concrétiser dans la révolution d’Octobre 1917, Lénine mentionne notamment celui-ci :
« Rénover l’Internationale. Prendre l’initiative de la création d’une Internationale révolutionnaire, d’une Internationale contre les sociaux-chauvins et contre le « centre ». »
Lénine exposait ainsi la nécessité de dépasser la seconde Internationale, dont les dirigeants avaient soutenu la première guerre mondiale impérialiste et par conséquent trahis. Cependant, cela impliquait aussi le rejet de ceux relativement peu critiques du nationalisme ou bien se cantonnant dans une position intermédiaire, « centriste ».
Il fallait quelque chose de franc, en rupture avec les pseudos-pacifismes petit-bourgeois. Ce point fut également souligné lors de la septième conférence de Russie du Parti Ouvrier Social-Démocrate (bolchevik) de Russie, s’étant tenue du 7 au 12 mai 1917.
Début 1919, alors que l’armée rouge organisée protégeait et développait la révolution d’Octobre 1917, Lénine considéra que la réalisation de cette nouvelle Internationale était souhaitable et nécessaire. La Pravda publia le 24 janvier 1919 une invitation internationale à ce sujet.
La fondation de l’Internationale Communiste s’appuyait avant tout sur un constat : le mouvement révolutionnaire allemand s’est mis à la hauteur du mouvement révolutionnaire russe, au sens où il est parti à l’assaut du pouvoir et ce de manière armée, avec comme mot d’ordre le pouvoir soviétique.
Ainsi, un mois même avant la tenue du premier congrès de l’Internationale Communiste, Lénine constatait qu’elle existait déjà dans les faits. Dans sa Lettre aux Ouvriers d’Europe et d’Amérique, publié le 24 janvier 1919 dans la Pravda, il affirmait de manière très claire :
« Le 20 août 1918, seul notre parti, le Parti bolchévik, avait résolument rompu avec l’ancienne Internationale, la IIe Internationale des années 1889-1914, qui avait fait honteusement faillite pendant la guerre impérialiste de 1914-1918.
Seul notre parti s’était entièrement engagé dans une voie nouvelle, abandonnant un socialisme et un social-démocratisme déshonorés par leur alliance avec la bourgeoisie exploiteuse, pour passer au communisme ; abandonnant le réformisme et l’opportunisme petit-bourgeois qui imprégnaient et imprègnent entièrement les partis officiels social- démocrates et socialistes, pour adopter une tactique véritablement prolétarienne, une tactique révolutionnaire.
Maintenant, le 12 janvier 1919, nous voyons déjà nombre de partis prolétariens communistes, non seulement dans le cadre de l’ancien empire du tsar, par exemple en Lettonie, en Finlande, en Pologne, mais aussi en Europe occidentale, en Autriche, en Hongrie, en Hollande et, enfin, en Allemagne.
Lorsque la «Ligue Spartacus» allemande, conduite par ces chefs illustres, connus du monde entier, ces fidèles partisans de la classe ouvrière que sont Liebknecht, Rosa Luxembourg, Clara Zetkin, Franz Mehring, eut rompu définitivement tout lien avec les socialistes comme Scheidemann et Südekum, avec ces social-chauvins (socialistes en paroles et chauvins en fait), qui se sont à jamais déshonorés par leur alliance avec la bourgeoisie impérialiste, spoliatrice, d’Allemagne et avec Guillaume II, lorsque la «Ligue Spartacus » se fut intitulée « Parti communiste d’Allemagne», alors la fondation de la IIIe Internationale, de l’Internationale Communiste, véritablement prolétarienne, véritablement internationaliste, véritablement révolutionnaire, devint un fait.
Formellement, cette fondation n’a pas encore été consacrée, mais, en réalité, la IIIe Internationale existe dès à présent. »