Nous allons parler de ce que nous avons appris ces dernières années, et de ce que nous voulons faire à partir de là. Cela restera forcément limité à des considérations générales.

Nous disons qu’il est maintenant possible et nécessaire de développer une nouvelle phase de la stratégie révolutionnaire dans le centre impérialiste.

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Comme préalable à ceci, nous allons délimiter ici un bout de terrain sur lequel cela peut marcher. Nous partons pour cela des discussions, tentatives et pas réels qui se sont ajoutés les uns aux autres pendant les deux, trois dernières années. L’idée, la conception, a fait son chemin : on peut partir de ce principe.

Les débuts concrets montrent la possibilité et la portée réelle de ceci : Guérilla et Résistance. Un seul front.

Maintenant il s’agit de ceci : amener tout ce qui vit à l’état de virtualité sur la scène politique des différentes régions, souvent de façon diffuse et selon une conception imprécise, à un autre niveau de la lutte, c’est-à-dire l’amener à l’efficacité et à la stratégie.

Maintenant, sinon tout ce qui s’est développé de nouveau, de productif et d’ouvert, fer de lance de tout cela, la possibilité de tels développements inconnus jusqu’à présent, risque de se diluer et de se désagréger.

Nous avons déterminé 1977 comme la transition de la première étape de la guérilla à la suivante. Le choc entre la guérilla et l’Etat en 1977 a été le catalyseur du renversement de la situation politique ici. Les conditions de lutte se sont transformées dans la dialectique de l’attaque et de la réaction.

Car avec des conditions différentes, les formes de lutte peuvent et doivent changer. Après 1977 rien n’a été plus comme avant. Ni l’Etat, ni la gauche, ni le rôle de la RFA dans la politique internationale, ni la position de la lutte armée dans le centre, dans le cadre de la lutte internationale des classes.

Nous avons commis des erreurs en 1977, et l’offensive s’est transformée en notre échec le plus cuisant. Nous y reviendrons après en détail.

La situation aujourd’hui – le fait que par l’effet de la confrontation nous en ressortons plus forts qu’avant – montre que les erreurs et l’échec n’ont pas eu une portée décisive. Au fond, l’offensive de 1977 a résumé notre lutte depuis 1970 et l’a introduite dans une phase de décision.

Toute la période des luttes pour la naissance et le développement de la raf s’est concentrée sur l’unique question du pouvoir : ces prisonniers seront-ils libérés, eux qui symbolisaient la raf et auxquels l’État liait sa raison d’état.

De la même façon, la lutte pour imposer le concept de guérilla urbaine posait la première question du pouvoir fondamentale : une politique armée pouvait-elle réellement s’implanter en RFA et ouvrir ainsi des perspectives révolutionnaires, question qui était le noyau de toutes les actions et batailles, de toutes les recherches policières et campagnes des médias pendant toutes ces années.

Voilà pourquoi cent fois le gouvernement a fait annoncer notre « échec ».

Voilà pourquoi mille fois la majeure partie de la gauche a proclamé haut et fort « l’absence de perspective » de la lutte armée. L’isolement, les quartiers de haute sécurité, le procès spectacle de Stammheim, visaient à éteindre ce qui s’était fait jour. Et finalement il y a eu 1977.

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Aujourd’hui il ne fait pas de doute qu’ils s’étaient prononcé pour la mort de Schleyer, pour l’éventualité de faire sauter une centaine de personnes à Mogadiscio, et qu’ils avaient décidé de liquider les prisonniers de Stammheim, parce qu’ils croyaient et espéraient vraiment en finir une fois pour toutes, ou au moins pour les prochaines années.

La dialectique du développement qui fait que tout est différent à présent, montre exactement ce qu’est la guérilla et ce qu’est l’état, et comment la lutte se déroule.

Ils y seraient presque arrivés – mais l’ironie c’est qu’en agissant de la sorte ils ont justement crée une situation dans laquelle nous pouvions poursuivre la lutte dans des conditions modifiées, donc meilleures.

Dans cet effort extrême et sans frein pour en finir avec nous, par l’écrasement de l’offensive de 1977 qui les tenait à la gorge comme aucune action auparavant, ils ont été contraint à devenir un état fort, d’aller jusqu’à écraser toute velléité de critique, et de s’opposer à la société jusque dans ses plus fines ramifications, comme appareil auquel on ne peut pas échapper.

Ce faisant ils on apporté en automne 1977 à toute opposition fondamentale une nouvelle situation et des conditions de vie existentielles – sous forme d’expérience actuelle et de perspective de luttes futures – qui ont obligé chacun à redéfinir fondamentalement ses rapports avec le pouvoir, ou alors de renoncer à son identité.

A ce propos, la situation objective qui se réduit simplement à la question de la survie de la guérilla, est devenue subjectivement pour tous ceux qui n’ont plus de perspective ici, le moment de l’expérience existentielle : à savoir que la disparition de la guérilla entraînerait celle de leurs espoirs et conceptions d’une autre vie.

Que l’espoir n’existe que tant que dure la lutte.

Qu’ils veulent la guérilla et en ont besoin, que notre échec est le leur.

Cette nouvelle expérience de la nécessité de la guérilla facilite le saut vers une nouvelle conscience : lorsque la lutte de la guérilla est conçue par chacun comme sa propre lutte, la réaliser ne peut signifier que se placer – peu importe à quel niveau – politiquement et pratiquement dans le contexte de la stratégie de la guérilla.

Le saut qualitatif est le moment intérieur, vivant, incarné dans des personnes concrètes, de la modification des conditions de la lutte ici : pour le développement du front révolutionnaire dans la métropole.

Il s’est agi pendant sept années d’apporter dans ce désert politique où tout n’est que façade, marchandise, conditionnement, mensonge et tromperie, l’esprit et la morale, la pratique et l’orientation politique de la rupture sans retour et de la destruction du système.

La guérilla. Il s’est agi, à partir du lien avec les luttes en Asie du sud-est, Afrique et Amérique latine et de notre identité avec elles, de faire irruption ici violemment et de s’implanter.

Ce que le Che a appelé la phase de survie et de l’implantation, a été ici la phase pendant laquelle il s’agissait d’imposer le concept de guérilla urbaine, qui fait son chemin et est repris, même si à un moment donné les groupes armés existant étaient laminés.

Concept qui s’est imposé par la force, cependant. A tout point de vue et en étant isolés. Pas seulement contre un appareil répressif sans équivalent dans notre histoire, mais aussi contre les conceptions des gens que nous aurions préféré rencontré autrement.

Dans ce paysage aplani et nivelé depuis des générations, l’idée de la libération avait du mal à atteindre les cœurs et les cerveaux à travers les couches de plusieurs mètres d’épaisseur de corruption, d’aliénation, de déformation.

A présent, la question de savoir si l’on doit lutter et si on luttera avec les armes en RFA et en Europe de l’ouest est résolue. C’est évident.

Cela ne signifie pas que la guérilla ait un avenir assuré, cela n’est jamais le cas, mais l’existence de la politique de la guérilla constitue maintenant la base sur laquelle la lutte se développe.

Dans la guerre internationale des classes, le développement de la stratégie révolutionnaire authentique dans le centre est d’actualité.

Du fait du contexte international, la lutte pour la libération, partie du projet isolé de guérilla, est devenue réalité concrète et a fait irruption dans les discussions quotidiennes. Il s’agit donc maintenant de sauter à pieds joints sur le terrain de la situation ici pour, partant d’ici et dans un mouvement inverse, amener la résistance des métropoles au front de la guerre internationale des classes.

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C’est donc une stratégie qui a ses racines ici. Dans la soif existentielle d’une autre vie, dans l’expérience de la totalité du centre impérialiste, dans la nécessité de la résistance ici.

Stratégie qui, à partir de là, conquiert le front révolutionnaire dans le centre, comme secteur de plus à côté des luttes en Asie, Afrique, Amérique latine.

Cela signifie, là où il y a un point de rencontre avec la guérilla et la lutte pour la libération, se faire radicalement point de départ du développement de la lutte anti-impérialiste.

Cela signifie lutter à l’intérieur d’une conception stratégique ouverte, où chacun, de par le sérieux de sa propre situation, de par son histoire et du processus subjectif, et du fait du but commun de la destruction du système impérialiste et du bouleversement révolutionnaire de la société, entre dans la lutte concrète, se met dans le contexte de la politique de la guérilla et devient partie du front révolutionnaire ici.

Cela signifie que dès le premier instant leur objectif comme le nôtre est de faire que le front se développe, et de déterminer sa direction.

Voilà ce que nous entendons par : Lutter ensemble. Un seul front.

Si l’on veut, notre ligne d’action jusqu’en 1977 se distingue de celle que nous adoptons actuellement par le fait que jusqu’en 1977, ce qui importait c’était tout ce qui aboutissait directement à la lutte armée ou qui préparait ce pas, alors que maintenant, ce qui importe c’est de faire se joindre la guérilla, les luttes militantes et politiques, comme parties intégrantes d’un ensemble, dans le point de perspective d’une stratégie à développer dans les métropoles.

Nous disons : même si l’organisation armée illégale est le noyau de cette stratégie, elle ne reçoit toute sa force nécessaire qu’au moment où la politique armée, les attaques militantes, les luttes qui résultent de l’ensemble du champ de l’oppression et de l’aliénation et la lutte politique se rejoignent, pour déterminer ensemble leur processus et l’amener à une seule attaque consciente, dirigée contre les points névralgiques du centre impérialiste.

Pour nous, le côté subjectif du développement, à partir de la dialectique de 1977 – la possibilité du front dans le centre – est essentiel. iI l’est toujours ici. il est décisif pour la lutte dans les centres impérialistes, qui ne produisent naturellement – à partir des seules contradictions objectives et des conditions existant sous cette forme de domination qui consiste à gérer la crise et à transformer tout développement social en moyen de domination – aucune condition révolutionnaire, mais seulement destruction et pourriture.

Mais évidemment, personne ne se hisse tout seul à un échelon supérieur. La situation qualitativement différente maintenant est née du développement objectif de la lutte internationale des classes et ne se comprend que par elle.

La longue histoire des guerres de libération dans les continents colonisés s’est comme cristallisée dans la lutte du front de libération au Vietnam, et sa victoire a déterminé toute la phase historique de la libération nationale anticoloniale des peuples soumis à l’impérialisme.

Les effets de cette percée historique : la force nouvelle des jeunes états nationaux sur le plan de la politique internationale – la crise économique, politique et sociale globale des pays du centre impérialiste – et la montée, parallèle aux luttes de libération, de l’union soviétique comme grande puissance égale aux usa – ont amené le rapport de forces global entre les lignes nord-sud, est-ouest et état-société à l’intérieur des centres impérialistes à un équilibre exacerbé, instable entre impérialisme et libération.

En d’autres termes : l’instabilité du système impérialiste a produit depuis, partout dans le monde, une situation dans laquelle l’impérialisme, à partir du moment où il subirait une défaite en n’importe quel point du système mondial, et perdrait une quelconque position de force en quelque domaine que ce soit – qu’il s’agisse d’une composante économique (telle que le pétrole, les matières premières stratégiques, son avance technologique) ou de la domination politique sur un région géographique (comme l’Amérique centrale ou le golfe) – peut basculer dans la crise finale du système.

L’affrontement, après le Vietnam, s’est déplacé d’une position de confrontation : centre de la guerre de libération, front et arrière-pays, vers une ligne qui, à travers le monde entier, traverse chaque secteur, chaque continent, chaque pays. Parce que tout secteur, du fait de son imbrication et de son importance dans le système global, peut devenir le détonateur de l’effondrement du rapport de forces – et peut ainsi devenir tendanciellement un front de la guerre de libération.

La réaction impérialiste était obligée – pour dire de manière imagée – de se réduire en un concentré de sa puissance : l’état, les appareils unifiés de la chaîne des états dépendants des usa, la reconstruction de sa capacité d’action militaire, économique et politique et de ses instruments de domination. en essayant de reprendre le contrôle de l’évolution globale, ils veulent attaquer partout : dans les luttes actuelles en Asie, Afrique, Amérique latine, dans les jeunes états nationaux, dans l’opposition est-ouest, en Europe occidentale, avec comme objectif de retrouver par cette offensive générale sa position hégémonique.

Pour la lutte anti-impérialiste cela signifie qu’il est nécessaire actuellement, face à cette unité de la réaction impérialiste, de mener les luttes parallèlement sur toutes les lignes.

Ce sont des secteurs différents d’un front unique.

Et en tant que luttes qui sont menées côte à côte, tout secteur – donc également le secteur européen – ne deviendra un front capable d’ébranler l’impérialisme qu’à partir de sa propre force, de son développement spécifique, et de ses conditions actuelles et historiques spécifiques.

Ainsi le saut qualitatif de la dialectique de la confrontation de 1977 à des conditions de luttes subjectives qualitativement nouvelles ici, et notre rapprochement de la base du processus de la contradiction à l’intérieur de ce centre, sont complètement intégrés dans les nécessités et les possibilités de la guerre internationale des classes.

Ils venaient pour ainsi dire juste à temps.

Il est vrai qu’en 1977 l’état a agi dans ce contexte. vers la fin de la première phase de formation de la chaîne des états dépendant des usa, notre défaite lui a permis de se poser en superpuissance apparemment sans limites, non pas en tant qu’état national, mais dans la dimension du projet contre-révolutionnaire global.

En tant que première puissance européenne qui, conformément à sa fonction pour le système des états dépendants des usa, veut imposer contre toute forme de résistance la force politique à l’intérieur et sur le plan européen, pour pouvoir mener l’attaque sur le plan international.

Mais en agissant de la sorte, ils ont fait progresser l’affrontement dans deux sens, et c’est effectivement à ces niveaux qu’auront lieu les luttes décisives : dans le sens de la largeur pour lutter contre la guérilla dans une politique unifiée des états d’Europe de l’ouest – et contre laquelle la perspective du front ouest-européen de la guérilla est devenue une réalité – et dans le sens de la profondeur, dans la société, ce qui a provoqué la polarisation la plus accentuée et le rejet le plus large de l’intégration à l’état, sa logique et ses lois de l’histoire de la RFA – et ce qui offre la possibilité d’un front révolutionnaire ici.

Il est sans intérêt à présent d’analyser en détail les changements internes ici.

Car le comportement et le mode de vie de ceux qui luttent depuis lors, montrent qu’ils ont déjà intériorisé la situation nouvelle et la prennent tout simplement comme point de départ.

Nous constatons simplement : l’opposition fondamentale, comme jamais auparavant, a rompu fondamentalement avec ce système.

Froide, sans illusions, désormais inaccessible pour l’état. Il ne s’agit plus de « changer le système », de « modèles alternatifs » à l’intérieur de l’Etat. Tout cela est devenu complètement grotesque. C’en est fini, définitivement fini – et ce n’est qu’après la fin du système qu’une perspective de vie est concevable.

L’impérialisme ne dispose plus d’aucune perspective productive, positive ; il n’est plus que destruction. C’est là l’essentiel de l’expérience où s’enracine la nouvelle militance dans tous les domaines de la vie.

Cette expérience est vécue de façon matérielle dans la base économique de la vie, dans l’armement et la préparation de la guerre nucléaire, dans celle des conditions de vie naturelles et sociales, et à l’intérieur de l’individu lui-même, où l’aliénation et l’oppression s’expriment par une déformation massive et la destruction de toute la richesse individuelle de la pensée, de la sensibilité, de la structure de la personnalité.

La plupart en perdent tout espoir.

L’impérialisme dans les centres a perfectionné et systématisé sa domination au point qu’ils ne trouvent plus la force de résister. Taux de suicides en forte augmentation, fuite dans la maladie, l’alcool, les tranquillisants, les drogues, voilà la réaction à la réalité d’une longue histoire d’échecs, d’épreuves et de souffrances, de dépolitisation, alors que la violence extérieure n’est plus perçue comme la cause de tout cela.

Mais de cette dimension de la misère vient aussi la profondeur existentielles des luttes et la haine. Ce n’est plus l’explosion de colère, brève, spontanée.

Celle-ci s’est consumée au cours de ces années. Voilà le terrain sur lequel se développe maintenant le front révolutionnaire dans le centre. Car si le développement du système est vécu en dernière analyse comme aboutissant à la destruction et à l’extermination, la résistance, elle, porte en elle-même – consciemment ou non – l’élément qui fait qu’elle joue maintenant le tout pour le tout, et contre tout. à l’intérieur de luttes concrètes isolées, mais en les dépassant.

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L’unité de la lutte révolutionnaire devient possible et nécessaire.

Voilà pour tous ceux qui veulent mener cette lutte, une ligne d’action sur laquelle la rupture avec l’état, la révolte et les combats militants peuvent converger partout en une politique – une stratégie de l’attaque contre le centre impérialiste. Ligne d’action qui, du fait de sa pratique, aboutira forcément à cette convergence.

Front anti-impérialiste

Pendant ces deux dernières années, il y a eu une foule de tracts et d’actions ayant comme mot d’ordre « un seul front avec la raf » et nous savons que le besoin et la volonté de le réaliser traverse tous les domaines politisés.

Mais entre ce qui existe potentiellement du front dans ce besoin, cette volonté, ces débuts, et sa réalisation dans un processus de développement, une organisation, un mouvement, il y a une énorme distance.

Le front ne naît pas automatiquement par la juxtaposition de luttes et par sa proclamation. Il dépérit dans la proclamation, et la mobilisation pour son existence retombera si ce concept n’est pas, davantage que maintenant, abordé comme une question pratique, celle de savoir comment cela peut se faire et si effectivement cela marche.

Et pas seulement pour nous.

Le front ne sera réalité que si chacun, peu importe où, fait sienne la recherche pratique des éléments et des formes de l’unité de la lutte armée à partir du terrain de l’illégalité, et de la résistance politique militante à partir du terrain légal, c’est-à-dire des moyens, des tactiques et de la structure, donc de son champ d’action et de développement qui lui est illégal, et s’attache à le faire progresser consciemment dans le processus stratégique.

Le front est développement du lien pratique et politique dans l’attaque contre le pouvoir impérialiste – ou bien il n’est rien.

Au cours de ces deux dernières années pendant lesquelles nous avons réalisé un premier noyau de cette nouvelle structure de guérilla, nous avons expérimenté à quel point ce lien se réalise spontanément, à quel point il est fort – subjectivement et objectivement, matériellement comme possibilité de l’attaque – à quel point il est d’autre part difficile de mettre en route un processus stratégique continu dépassant les initiatives et actions politiques isolées et les contextes pratiques limités.

Voilà le nœud qu’il faut trancher à présent.

Il ne s’agit pas de morale, de zèle, de performance. Il s’agit, à partir de la décision de mener cette lutte, de concevoir en toute connaissance de cause comment briser effectivement le système ici, et de se déterminer soi-même en fonction cela.

Nous en avons fait l’expérience nous-mêmes et nous le constatons maintenant pour ceux que nous connaissons directement :

le moment décisif pour la percée dont dépend maintenant quel chemin pourra être fait, est la lutte de ceux qui ont commencé de lutter dans ce concept ou qui veulent le faire, afin de se concevoir comme des sujets du front anti-impérialiste.

Qui ont commencé à l’anticiper en eux-mêmes et par eux-mêmes et à déterminer toute initiative politique, toute action à partir de lui et pour lui : de se penser dans tout ce qu’on entreprend, dans la perspective du front de l’attaque.

Depuis les premières discussions en 1979 sur l’unité de la lutte anti-impérialiste, ce sont toujours les mêmes blocages dans et entre les groupes anti-impérialistes qui empêchent ce qui pourrait exister depuis longtemps : le front dans l’action.

Nous n’avons que faire des batailles fictives autour du mythe « action militante » ou autour de l’invocation du « lien avec les masses ».

De même tous les efforts faits pour que l’on se réclame de nous ou au contraire pour dépister dans les discussions le moindre lien avec nous, sont superflus.

On constate que le résultat en est que rien n’est fait pour que les prochains pas nécessaires se fassent.

Front signifie plus que des actions.

Le front, donc des luttes, qui de par leurs objectifs communs deviendront un seul combat et qui peuvent à partir de là se réunir pratiquement et politiquement, vivra dans le centre européen sous des formes multiples. actuellement, le front anti-impérialiste en RFA – ce sont des attaques militaires, des projets militants coordonnés de façon unifiée, qui visent à contrecarrer la stratégie impérialiste, des initiatives politiques pour faire comprendre la politique, qui interviennent dans la résistance actuelle, c’est une lutte structurelle et organisationnelle pour être capable d’agir, c’est à chaque instant de son développement une lutte pour la possibilité et le but pratique de la discussion et de la communication autour de ce processus de la stratégie.

Front signifie autre chose que d’entourer la guérilla d’une structure venant du terrain de la légalité. nous avons dit qu’il n’y a pas de « bras légal de la raf » et qu’il ne peut pas y en avoir. bien sûr, nous avons des contacts avec des gens un peu partout, et c’est aussi cela la politique concrète de la guérilla – mais ce n’est qu’en tant que développement autonome et spécifique sur ce terrain et en vue de l’objectif commun, que la résistance anti-impérialiste pourra devenir une partie du front anti-impérialiste. et ce n’est que par là que la séparation sera dépassée.

Ce n’est que comme cela que la lutte sur ce terrain peut s’embraser politiquement, atteindre continuité et force – et de façon générale, autodétermination et responsabilité pleine et entière en chaque lieu du combat de la politique révolutionnaire dans le centre ouest-européen, en sont des éléments essentiels.

Les discussions qui piétinent, dans lesquelles des points de vue isolés s’opposent aux professions de foi, l’étroitesse d’esprit des groupes isolés, l’incapacité à prendre des initiatives, tout cela disparaît à partir du moment où l’on a compris et intériorisé le concept de la situation : que le front anti-impérialiste est aussi urgent et nécessaire que faiblement développé, et pourtant potentiellement fort du fait de sa position dans le centre de l’Europe de l’ouest, et du fait de sa possibilité énorme au sein de la guerre de la libération internationale.

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Le front combattant significatif contre la stratégie impérialiste doit être le but prochain immédiat.

Sans une quantité de choses sur l’impérialisme et ses plans comme en témoignent les innombrables papiers à ce sujet, et la détermination et le feu des actions militantes sont vains, si de ces deux éléments ne résultent pas la décision d’établir le lien qui permettra de parcourir ensemble toute une évolution dans la lutte.

Et, à partir de ce qui existe maintenant :

à partir de ce qui est contenu dans la résistance actuelle, et à partir des conditions de lutte dans la métropole, d’extraire les éléments pratiques, structurels, politiques, et les lignes de l’attaque contre le noyau du pouvoir impérialiste ici : l’État RFA et l’OTAN, pour continuer à les développer de façon offensive.

La situation, c’est que – la lutte anti-impérialiste est en retrait par rapport à l’offensive de la machinerie impérialiste, certes contradictoire, mais unifiée.

Les débuts de la nouvelle mobilisation anti-impérialiste ne se sont pas constitués contre la reconstruction impérialiste après le Vietnam et le début de la crise, contre la préparation et la mise en marche de son offensive – dans cette phase la résistance était paralysée par la faillite et finalement l’effondrement de la gauche issue de 68 – mais ne se sont formés que maintenant, alors que les attaques réactionnaires se déroulent à tous les niveaux depuis longtemps.

Leur offensive se développe, spontanément la résistance est grande, mais la politique anti-impérialiste n’en constitue pas l’orientation décisive.

Pour le devenir, elle doit être présente comme facteur significatif et producteur d’initiatives dans les discussions autour et contre les projets impérialistes, qui déterminent maintenant le cours de l’histoire réelle.

La stratégie américaine de guerre en Europe –

l’offensive réactionnaire de l’état à l’intérieur –

la stratégie réactionnaire de l’état à l’intérieur –

la stratégie réactionnaire de roll-back de la chaîne des états impérialistes contre les mouvements de libération et les jeunes états nationaux et contre les états socialistes.

La situation, c’est que – la façon dont l’histoire va maintenant se dérouler n’est absolument pas déterminée.

L’impérialisme américain, dans sa crise historique – où pour la première fois depuis 40 ans il y va de son existence – peut avoir recours aux moyens les plus extrêmes, et il le fera si le système glisse dans la crise incontrôlable, et si personne ne l’en empêche.

Vu son potentiel de destruction nucléaire, cela prend certes une perspective catastrophique – mais que nous qui sommes dans le monde entier les opprimés et exploités n’avons aucune raison de craindre.

Car elle signifie dans tous les cas la fin de l’impérialisme, celui-ci signifie dans tous les cas notre propre fin. notre attitude face à la perspective de destruction nucléaire est donc premièrement que nous ne la craignons pas et deuxièmement que nous ne pourrons l’empêcher et ne l’empêcherons que par la guerre révolutionnaire.

L’acuité de la situation réside moins dans la vraisemblance d’une guerre nucléaire que dans le fait que l’impérialisme américain se trouve engagée dans une offensive généralisée qui comprend toutes les dimensions et dont le but est la restauration de son hégémonie, ce qui ne sera possible qu’à une échelle plus large de l’ensemble de sa domination.

Mais il est possible d’intervenir dans cette offensive, et il dépend, de façon décisive, de la lutte anti-impérialiste en Europe occidentale, que leur tentative se termine en leur faveur, ou qu’elle aboutisse à un saut qualitatif sur le plan mondial de la lutte pour la libération, et contre eux.

Une échelle plus large de sa domination, cela signifie – sans forcément impliquer la grande guerre – production de destruction dans la vie quotidienne, dans les conditions de vie, dans la manipulation et la répression – la mort et la destruction de la substance humaine pour des millions de gens et pour longtemps.

Pour nous, du fait de notre relative faiblesse face à un pouvoir qui dispose de presque tout ici, la situation, c’est aussi – qu’ils sont certes en mesure – et cela pour un certain temps encore – d’empêcher la constitution d’un front menaçant ici leur pouvoir, mais que, pour résoudre la crise généralisée aux niveaux social, socio-politique et politico-militaire, ils sont obligés de s’approprier du pouvoir de façon agressive et de dépasser ainsi les limites politiques dans la métropole, les « limites tolérables » – démocratie, bien-être, paix intérieure – et qu’ils ne pourront le faire éternellement s’ils sont confrontés constamment à la lutte anti-impérialiste et constamment démasqués dans la confrontation ouverte, et si se trouve ainsi rompu le mince fil idéologique entre l’état et la société.

Ces limites politiques sont devenues historiquement constitutives pour le centre impérialiste d’Europe de l’ouest. elles ont été érigées en piliers du système contre le mouvement ouvrier et les guerres de libération, et elles ne pourront plus être abattues sans que s’effondre l’ensemble de la société.

C’est ici que la faiblesse relative de la lutte anti-impérialiste dans le centre de l’Europe de l’ouest peut être transformée en force dans la lutte internationale.

Car à l’échelle de l’ensemble du système impérialiste leur projet global de restructuration ne fonctionne que si la mise au pas à l’intérieur des centres impérialistes se déroule de façon relativement facile et rapide, sans frictions sérieuses et profondes.

Ce projet ne pourra résister à la rupture causée par la lutte anti-impérialiste ici, vu les contradictions internationales – ou alors ils imposeront des solutions à l’intérieur comme à l’extérieur par leur surpuissance, au risque d’une guerre internationale des classes unifiée à une échelle plus élevée, plus intense et plus large, c’est-à-dire au risque d’actualiser la lutte visant à démanteler le système impérialiste.

C’est à partir d’ici que nous combattons.

Et c’est seulement cela, la conscience de notre possibilité, de notre propre force, de la chance que nous avons tout spécialement ici – et donc aussi celle de notre responsabilité – qui peut être l’élément mobilisateur qui fera se lever et se développer ici le front anti-impérialiste.

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L’évolution en Europe de l’ouest est devenue la pierre angulaire de l’affrontement mondial.

Du fait du mouvement de la guerre internationale des classes, l’offensive à l’intérieur et à partir de l’Europe de l’ouest, s’appuyant sur l’état central qu’est la rfa, est essentielle pour la stratégie impérialiste, pour s’assurer, dans un nouveau round, sa domination en tant que système fonctionnant au niveau mondial, et la reproduction du capital.

De notre côté et face à cette offensive, le développement du front dans le centre s’impose comme simple nécessité vitale, comme condition nécessaire pour briser la tendance actuelle du processus global de libération à stagner dans l’opposition est-ouest et, pour les pays où a eu lieu une libération nationale, du fait des obligations de leur développement étatique.

Les centres eux-mêmes et l’Europe de l’ouest, point d’intersection des lignes est-ouest, nord-sud et plus particulièrement état-société, sont le point de départ et le noyau de leur projet de restructuration.

C’est d’ici qu’ils doivent essayer de tirer le pouvoir militaire dont ils ont besoin pour faire pression sur les états socialistes et pour contrer les luttes de libération nationale, c’est d’ici qu’ils doivent tenter de maîtriser le potentiel économique, la crise intérieure sociale et économique incontrôlable, de dominer et d’intégrer dans leur système les jeunes états en voie de développement, et – comme condition de tout cela – d’imposer par la force une homogénéité politique intérieure, sinon en tant que consensus, du moins comme une sorte de paix intérieure.

C’est dans ce sens qu’ils sont ramenés vers les centres.

Ils essaieront obligatoirement d’imposer, de façon offensive, et agressive, le concept global réactionnaire dans le centre, à tous les niveaux et de toutes leurs forces.

Missiles à moyenne portée, bombe à neutrons, surarmement conventionnel, concentration et centralisation du capital, rationalisation, chômage massif planifié, instrumentalisation de l’homme comme simple appendice de la machine –

développement à outrance de la politique énergétique indispensable pour eux à cause de son importance comme moyen de guerre sur le marché mondial.

Destruction des structures sociales selon l’intérêt des flics et du fric –

exploitation dans la course pour les moyens d’existence, formation professionnelle conçue comme une usine –

flics, justice, taule –

etc.


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