Ernesto « Che » Guevara est mort le 9 octobre 1967, exécuté quelques jours après avoir été capturé par l’Armée bolivienne. C’était là l’aboutissement de tout un parcours et de toute une série de choix idéologiques.

Ernesto « Che » Guevara est, en effet, argentin ; ayant rejoint Cuba pour y participer avec Fidel Castro à la guérilla, il a par la suite fait de cette « révolution » – en fait un changement de régime seulement – un modèle idéologique.

Il s’agit d’une ligne subjective visant à lancer de l’extérieur un processus révolutionnaire, sans Parti mais avec simplement avec un noyau d’avant-garde ; c’est le principe du « foyer révolutionnaire », le « foco ».

Ernesto « Che » Guevara partira pour cette raison ensuite au Congo, où l’entreprise échouera, puis en Bolivie où il trouvera la mort. C’est le Français Régis Debray, également présent aux côtés du « Che » en Bolivie, qui théorisa le « foco » dans son ouvrage Révolution dans la révolution, en 1967.

La mort du « Che » fournit à cette stratégie son martyr ; Ernesto « Che » Guevara fut, à ce titre, considéré par certains comme l’exemple de l’esprit offensif et de la volonté de se confronter à l’impérialisme américain.

Le colonel Joaquin Zenteno, qui posera aux côtés de son cadavre, sera tué à Paris par un commando des « Brigades Internationales », en 1976 ; de nombreuses forces politiques le prirent comme symbole.

Mais toutes avaient le même point commun : elles niaient l’importance de l’idéologie et du Parti politique d’avant-garde, se focalisant sur « l’anti-impérialisme » seulement, niant l’existence du cadre national.

Les uniques forces décidant d’assumer le positionnement d’Ernesto « Che » Guevara ont été des forces latino-américaines, toutes d’optique panaméricaine et philo-soviétique.

Les seules exceptions sont le THKP/C en Turquie, qui deviendra Devrimci Sol puis le DHKP/C, sur la même ligne nationaliste de gauche / philo-soviétisme / tiers-mondisme (ainsi que « pan-anatolisme »), ainsi que la Fraction Armée Rouge, avec la seule différence que le nationalisme était rejeté, avec par contre l’affirmation d’une unification politique de tous les pays de la chaîne impérialiste.

On doit cependant noter qu’en Belgique toute une partie du trotskysme – celles autour de Pablo et de Frank – soutiendront la ligne d’Ernesto « Che » Guevara.

C’est que Ernesto « Che » Guevara n’a pas pris position lors de la polémique sino-soviétique, ce qui le met aux côtés de Hô Chi Minh dans le camp des « centristes » du mouvement communiste international.

Les personnes honnêtes dépassées par les débats et le contenu de la polémique sino-soviétique ont pu voir en Ernesto « Che » Guevara (et Hô Chi Minh) des gens cherchant « sincèrement » à faire avancer les choses, au-delà des débats semblant stérile.

Mais en réalité, la figure du « Che » a été une simple construction du social-impérialisme soviétique pour empêcher l’affirmation du maoïsme et s’approprier une image de soutien au tiers-monde.

C’est Cuba qui a servi de base centrale dans cette opération idéologique. C’est bien avant la mort du « Che » que celui-ci est présenté comme une sorte de chevalier désintéressé, d’être au cœur noble. Jean-Paul Sartre, suite à sa rencontre, le définit comme « l’être humain le plus complet de son époque » et la fameuse chanson cubaine « Hasta siempre » (« Avec toi pour toujours ») date aussi de deux ans avant sa mort.

Nous avons appris à t’aimer
Depuis les hauteurs historiques
Où le soleil de ta bravoure
A couronné la mort

Ici, il reste la claire,
La tendre transparence
De ta présence bien aimée
Commandant Che Guevera

Ta main glorieuse et forte
Fait feu sur l’Histoire
Quand tout Santa Clara
Se réveille pour te voir

Tu arrives en embrassant la brise
Avec des soleils printaniers
Pour planter la bannière
Avec la lumière de ton sourire

Ton amour révolutionnaire
Te conduit vers de nouvelles conquêtes
Où l’on attend la fermeté
De ton bras libérateur

Nous continuerons toujours
Comme nous continuons près de toi aujourd’hui
Et avec Fidel, nous te disons
« Avec toi pour toujours, Commandant »

Ernesto « Che » Guevara est entièrement rentré dans ce jeu au service du social-impérialisme soviétique, deux interventions étant ici d’importance historique.

Tout d’abord, en tant que délégué cubain, il a développé une rhétorique purement tiers-mondiste, sans considération idéologique, dans le discours fait Alger en 1965, capitale d’une Algérie passée sous la coupe d’une bourgeoisie bureaucratique alors aux mains du social-impérialisme soviétique.

L’Algérie était pareillement employée par le social-impérialisme soviétique comme État « intermédiaire » à revendications prétendument anti-impérialistes, tiers-mondistes, soi-disant indépendants de l’URSS, etc.

À cela s’ajoute, en 1967, son message pour la « Tricontinentale ». Il s’agit ici en fait de la Conférence de Solidarité avec les Peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine, née en 1966 avec Cuba au centre d’un appel d’air aux nations du tiers-monde.

Il y met dos à dos l’URSS et la Chine populaire, accusés d’avoir abandonné le Vietnam, présenté comme la source du processus révolutionnaire mondial.

Cette fausse accusation permettait de dépolitiser et de servir le social-impérialisme soviétique, qui contrôla le Vietnam indépendant immédiatement, ce dernier envahissant dans la foulée le Cambodge et affrontant même pendant un mois la Chine elle-même, en 1979.

Ernesto « Che » Guevara a ainsi clairement servi la stratégie du social-impérialisme soviétique, visant à prétendre être la base d’un « tiers-mondisme » qui serait indépendant, alors que les forces le composant étaient des vecteurs, des jouets de la superpuissance soviétique.


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