Présentation du Centre MLM : Le document « Encore une fois sur les divergences entre le camarade Togliatti et nous » est un texte ayant eu un impact très important dans le Mouvement Communiste International (MCI).
Il est le fruit d’une longue étude critique effectuée par les communistes de Chine suite aux positions du Parti Communiste d’Union Soviétique dans les années 1953-1963.
Le PCUS avait commencé à attaquer les positions du Parti Communiste de Chine concernant Staline, par l’intermédiaire d’autres partis, notamment le Parti communiste italien. Souvent ces critiques s’adressaient non pas aux communistes de Chine, mais au Parti du Travail d’Albanie, qui défendait alors les mêmes conceptions que le Parti Communiste de Chine.
Le Parti Communiste de Chine a toujours tenté de préserver l’unité du MCI, néanmoins à un moment cela fut impossible et il fut nécessaire de répondre. Le document ici présenté le précisera d’ailleurs. Il fait partie d’une série d’articles publiés en Chine :
* Prolétaires de tous les pays, unissons-nous contre l’ennemi commun (15 décembre 1962) ;
* Les divergences entre le camarade Togliatti et nous (31 décembre 1962) ;
* Léninisme et révisionnisme moderne (5 janvier 1963) ;
* Unissons-nous sous la bannière des déclarations de Moscou (27 janvier 1963) ;
* D’où proviennent les divergences : réponse à Maurice Thorez (27 février 1963) ;
* Encore une fois sur les divergences entre le camarade Togliatti et nous (4 mars 1963) ;
* Commentaires sur les déclarations du PC des Etats-Unis (8 mars 1963) ;
* Le miroir des révisionnistes (9 mars 1963) ;
* La vérité sur l’alliance de la direction du PCUS avec l’Inde contre la Chine (2 novembre 1963).
Le PCUS répondra par un long texte intitulé « Propositions concernant la ligne générale du mouvement communiste internationale », que les communistes de Chine rejettent par une lettre en 25 points rejetant totalement le révisionnisme soviétique.
Le PCUS répond de manière brutale à cette critique, et le PC de Chine répond tout d’abord par un communiqué le 15 août, puis par une nouvelle série de documents :
* Les divergences entre la direction du PCUS et nous leur origine et leur évolution (6 septembre 1963) ;
* Sur la question de Staline (13 septembre 1963) ;
* La Yougoslavie est-elle un pays socialiste (26 septembre 1963) ;
* Des défenseurs du néocolonialisme (22 octobre 1963) ;
* Deux lignes différentes dans la question de la guerre et de la paix (19 novembre 1963) ;
* Deux politiques de coexistence pacifique diamétralement opposées (12 décembre 1963) ;
* Les dirigeants du PCUS sont les plus grands scissionnistes de notre temps (4 février 1964) ;
* La révolution prolétarienne et le révisionnisme de Khrouchtchev (31 mars 1964) ;
* Le pseudo-communisme de Khrouchtchev et les leçons historiques qu’il donne au monde (14 juillet 1964) ;
* Pourquoi Khrouchtchev est-il tombé ? (21 novembre 1964).
Après l’éviction de Khrouchtchev du pouvoir en URSS, le PCC continuera sa critique contre les nouveaux dirigeants révisionnistes :
* Le triomphe du léninisme (22 avril 1965) ;
* Luttons jusqu’au bout contre le révisionnisme khrouchtchévien (14 juin 1965) ;
* De l’unité d’action de la nouvelle direction du PCUS (11 novembre 1965) ;
* Les dirigeants du PCUS traîtres aux deux déclarations de Moscou (30 décembre 1965).
Les positions du Parti Communiste de Chine ont été celles de la lutte du nouveau contre l’ancien, de la lutte contre le révisionnisme moderne, conduit par le PCUS.
Car le Parti Communiste guidé par Staline et défendant de manière intransigeante le communisme s’est transformé en son contraire après la mort de celui-ci.
Comme le constatera Mao Zedong, « en URSS aujourd’hui, c’est la dictature de la bourgeoisie, la dictature de la grande bourgeoisie, c’est une dictature de type fasciste allemand, une dictature hitlérienne. »
Le document « Encore une fois sur les divergences entre le camarade Togliatti et nous » est l’une des premières critiques systématiques du révisionnisme moderne. Il dévoile les conceptions anti-léninistes des révisionnistes dans le domaine de l’économie politique. Il est un premier pas dans le développement du Marxisme-Léninisme-Maoïsme.
En Belgique, PTB développe une pratique divinisant la Constitution bourgeoise et ce que Lénine appelait le « crétinisme parlementaire ». Certains de ses militants considérant contre toute vraisemblance que cette organisation demeure révolutionnaire. Au Centre MLM, nous disons que non seulement elle ne l’est plus mais qu’elle ne l’a en fait jamais été. Même quand elle affirmait l’objectif de la révolution socialiste, sa conception était déjà celle de la « transition pacifique » défendue par Khrouchtchev et les autres au bolchevisme. Cette position droitière, néo-révisionniste, parait encore trop « gauchiste » à la direction actuelle de PTB qui, après avoir liquidé toute trace de léninisme, s’emploie à liquider le misérable héritage radical-réformiste de feu Ludo Martens, son président-fondateur.
Le texte que nous publions date du 4 mars 1963. Il y a 20 ans, PTB défendait les positions que défendait le PCB dans les années 60. Depuis 10 ans, PTB défend les positions que défendait le PS dans les années 60. Demain, PTB défendra probablement les positions que le PSC / CDH défendait alors… Il est temps pour les derniers militants conscients et sincères de quitter cette misérable boutique en faillite politique, théorique et idéologique, dont le seul rapport à la révolution a été celui de la désertion puis de la trahison.
Centre Marxiste-Léniniste-Maoïste[B]
5 avril 2013
La rédaction du Hongqi n°3 – 4 (1963)
Au Xe Congrès du Parti communiste italien, le camarade Togliatti a ouvertement attaqué le Parti communiste chinois et soulevé une controverse en public. Cela fait des années que le camarade Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien tiennent, sur une série d’importantes questions de principe du mouvement communiste international, toutes sortes de propos erronés allant à rencontre des principes fondamentaux du marxisme-léninisme. Nous n’avons jamais approuvé de tels propos. Cependant, nous n’avons pas voulu et n’entendions pas entamer de controverse publique avec ces camarades. Nous avons toujours été pour le renforcement de l’unité du mouvement communiste international. Nous avons toujours été pour le règlement des rapports entre partis frères selon les principes d’indépendance, d’égalité et d’unanimité de vues par voie de consultations, définis dans les Déclarations de Moscou. Nous avons toujours été pour l’élimination des divergences entre partis frères par voie intérieure, au moyen de consultations, d’entretiens entre deux partis ou entre plusieurs partis ou de conférences de tous les partis frères. Nous avons toujours estimé qu’aucun parti ne peut blâmer publiquement et unilatéralement un autre parti frère, quel qu’il soit, et encore moins le calomnier et l’attaquer. Telle est l’attitude que nous avons inflexiblement maintenue pour défendre l’unité. Nous ne nous attendions pas à ce que Togliatti et d’autres camarades utilisent ce congrès de leur parti pour attaquer publiquement le Parti communiste chinois. Mais ils nous ont provoqués directement à ce débat et que nous restait-il à faire ? Pouvions-nous garder le silence comme dans le passé ? Serait-il dit que « le préfet est libre de mettre le feu comme bon lui semble alors que le peuple n’a même pas le droit d’allumer un lumignon » ? Non, cela ne sera jamais, jamais toléré. Nous devions répondre, absolument. Et comme ils ne nous avaient pas laissé d’autre issue, nous ne pouvions que leur donner une réponse publique. Nous avons donc publié, dans le Renmin Ribao du 31 décembre 1962, un éditorial intitulé « Les divergences entre le camarade Togliatti et nous ».
Cet éditorial n’étant nullement à leur goût, le camarade Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien ont renouvelé leurs attaques contre nous, dans toute une suite d’articles qu’ils ont fait paraître depuis. Ils disent qu’à nos articles « manque souvent une explicite clarté », que la façon de raisonner y est « très abstraite et formelle », que « le sens des réalités » leur fait défaut (Voir P. Togliatti : « Ramenons la discussion à ses termes réels », Unità, 10 janvier 1963) ; que nous pouvons « ne pas être bien informés » sur la situation en Italie et le travail du Parti communiste italien (Voir P. Togliatti : « Ramenons la discussion à ses termes réels », Unità, 10 janvier 1963) ; que nous nous sommes livrés à une « falsification manifeste » des positions du Parti communiste italien (Voir L. Longo : « La Question du pouvoir », Unità, 16 janvier 1963) ; que nous sommes des « dogmatiques et [des] sectaires qui dissimulent leur opportunisme sous une phraséologie ultra-révolutionnaire » (Voir L. Longo : « La Question du pouvoir », Unità, 16 janvier 1963), etc. Togliatti et ces autres camarades s’obstinent à poursuivre cette controverse publique. Eh bien, poursuivons, puisqu’il en est ainsi !
Nous nous proposons, dans cet article, de faire une analyse et une critique plus approfondies des propos erronés que Togliatti et d’autres camarades tiennent depuis des années, pour répliquer à leurs attaques répétées. Nous verrons comment ces camarades réagiront après en avoir pris connaissance. Viendront-ils encore nous dire qu’il nous « manque souvent une explicite clarté » ? Que notre façon de raisonner est « très abstraite et formelle » et que « le sens des réalités » nous fait défaut ? que nous pouvons « ne pas être bien informés » sur la situation en Italie et le travail du Parti communiste italien et que nous nous livrons à une « falsification manifeste » des positions du Parti communiste italien ? que nous sommes des « dogmatiques et [des] sectaires qui dissimulent leur opportunisme sous une phraséologie ultra-révolutionnaire » ? Attendons, et nous aviserons une fois fixés !
Bref, il est inadmissible que le préfet soit libre de mettre le feu comme bon lui semble tandis que le peuple n’aurait même pas le droit d’allumer un lumignon. Jamais, d’aussi loin que l’on se souvienne, le peuple n’a admis loi si injuste. D’autant plus qu’entre communistes, il ne peut être adopté qu’une seule attitude pour régler nos divergences, celle de raisonner avec faits à l’appui, et en aucun cas en se comportant comme un maître envers ses serviteurs. L’unité des prolétaires et des communistes du monde entier doit être, mais elle ne peut reposer que sur la base des Déclarations de Moscou, sur la méthode qui consiste à raisonner, faits à l’appui, sur des consultations menées sur un pied d’égalité et dans la réciprocité, sur la base du marxisme-léninisme. Quand les maîtres se permettent d’agite leur trique au-dessus des serviteurs, tout en scandant « unité ! unité ! », ce qu’ils entendent, c’est en fait, « scission ! scission ! ». Les prolétaires du monde entier ne sauraient accepter ces agissements scissionnistes. C’est l’unité que nous voulons, et nous ne tolérerons jamais qu’une poignée d’individus machinent la scission.
Un grand débat portant sur des questions de théorie, de ligne fondamentale et de politique se déroule actuellement au sein du mouvement communiste international, par suite du défi lancé aux marxistes-léninistes par les révisionnistes modernes. Il met en jeu l’ensemble de la cause du prolétariat et des peuples travailleurs du monde entier et le sort de toute l’humanité.
Les courants d’idées qui s’y affrontent sont, en dernière analyse, d’une part, l’idéologie authentiquement prolétarienne, c’est-à-dire le marxisme-léninisme révolutionnaire et, d’autre part, l’idéologie bourgeoise qui s’est infiltrée dans les rangs ouvriers, c’est-à-dire les idées anti-marxistes-léninistes. Depuis qu’est né le mouvement ouvrier, la bourgeoisie s’est toujours efforcée de corrompre idéologiquement la classe ouvrière, afin de mettre le mouvement ouvrier au service de ses intérêts fondamentaux, d’affaiblir les luttes révolutionnaires des peuples et d’induire ceux-ci en erreur. A ces fins, l’idéologie bourgeoise revêt des formes différentes, selon les circonstances, se manifestant tour à tour sous des couleurs de droite ou « de gauche ». Les marxistes-léninistes ont donc pour tâche, ainsi que Marx, Engels, Lénine et Staline en ont donné l’exemple, de ne pas se dérober aux défis lancés par l’idéologie bourgeoise, sous quelque forme qu’elle se présente, d’être prêts à briser à tout moment ses attaques, sur le terrain de la théorie, de la ligne fondamentale, comme sur celui de la politique, et d’indiquer au prolétariat, aux peuples et aux nations opprimés la juste voie à suivre dans leur lutte pour la victoire.
Depuis que le marxisme prédomine dans le mouvement ouvrier, les marxistes ont mené de multiples combats contre les révisionnistes et les opportunistes, au cours desquels deux grands débats furent de la plus haute importance historique, et l’actuel est le troisième. Le premier fut celui qui mit Lénine aux prises avec les révisionnistes et les opportunistes de la Ile Internationale, Kautsky et Bernstein entre autres, et amena le marxisme à une nouvelle étape de développement, l’étape du léninisme, qui est le marxisme de l’époque de l’impérialisme et de la révolution prolétarienne. Le second opposa les communistes d’Union soviétique et ceux d’autres pays, qui avaient à leur tête Staline, aux aventuristes « de gauche » et aux opportunistes de droite, Trotski, Boukharine et autres ; il défendit le léninisme et mit en lumière les théories et tactiques de Lénine concernant la révolution prolétarienne, la dictature du prolétariat, la révolution des nations opprimées et l’édification du socialisme. Parallèlement, au sein du Parti communiste chinois, le camarade Mao Zedong dut mener, au cours d’une longue période, de violents débats avec les aventuristes « de gauche » et les opportunistes de droite pour unir étroitement la vérité universelle du marxisme-léninisme à la pratique concrète de la révolution chinoise.
Le grand débat actuel, le troisième, fut tout d’abord provoqué par la clique Tito de Yougoslavie qui trahit ouvertement le marxisme-léninisme.
Il y a bien longtemps que la clique Tito s’est engagée dans la voie du révisionnisme. En hiver 1956, mettant à profit la campagne antisoviétique, anticommuniste déclenchée par l’impérialisme, elle s’employa, d’une part, à faire de la propagande anti-marxiste-léniniste, et d’autre part, en coordination avec les plans dressés par l’impérialisme, entreprit des activités subversives au sein des pays socialistes. Cette propagande et cette activité de sape parvinrent à leur point culminant lors de la rébellion contre-révolutionnaire en Hongrie. Tito prononça alors le fameux discours de Pula. La clique Tito fit tout pour dépeindre le régime socialiste sous les couleurs les plus noires, soulignant la « nécessité » pour la Hongrie « de changements radicaux dans le système politique » (Voir Discours de Kardelj à l’Assemblée nationale de la République populaire fédérative de Yougoslavie, Borba, 8 décembre 1956) et affirmant que les camarades hongrois « n’ont pas à faire des tentatives stériles pour restaurer le Parti communiste. » (Voir Discours de Kardelj à l’Assemblée nationale de la République populaire fédérative de Yougoslavie, Borba, 8 décembre 1956) Les communistes de tous les pays menèrent une lutte sérieuse contre cette attaque de la clique Tito qui constituait une trahison. En avril 1956, nous avions publié l’article « De l’expérience historique de la dictature du prolétariat « . Devant cette attaque de la clique Tito, nous avons publié un autre article à la fin de décembre 1956 « Encore une fois à propos de l’expérience historique de la dictature du prolétariat « . En 1957, la Conférence des Représentants des Partis communistes et ouvriers des Pays socialistes adopta la célèbre Déclaration de Moscou. Celle-ci indiquait clairement que le révisionnisme est à l’heure actuelle le principal danger du mouvement communiste international ; elle condamnait les révisionnistes modernes parce qu’ils « s’efforcent de discréditer la grande doctrine du marxisme-léninisme, déclarent qu’elle a ’vieilli’ et prétendument perdu toute importance pour le développement social actuel ».
La clique Tito refusa de signer cette déclaration et publia en 1958 un programme de bout en bout révisionniste, qu’elle opposa à la Déclaration de Moscou. Ce programme fut unanimement condamné par les communistes de tous, les pays.
Cependant, par la suite, plus particulièrement depuis 1959, les dirigeants de certains partis communistes vinrent à enfreindre l’accord commun qu’ils avaient signé et approuvé, et tinrent un langage proche de celui de Tito. Puis, ces gens-là perdirent toujours plus leur contrôle, leur langage devint de plus en plus semblable à celui de Tito ; ils s’efforcèrent, outre, de présenter les impérialistes américains sous les plus belles couleurs. Ils dirigèrent toute l’ardeur de leur lutte contre les partis frères qui s’en tenaient fermement au marxisme-léninisme et aux principes révolutionnaires de la Déclaration de Moscou de 1957 et entreprirent des attaques virulentes contre ces partis. A la Conférence des Représentants des Partis communistes et ouvriers de 1980, à l’issue de consultations dans l’égalité, un accord fut conclu sur nombre de problèmes ayant suscité des divergences entre partis frères. La Déclaration de Moscou publiée à l’issue de cette conférence condamna sévèrement la trahison du marxisme-léninisme par les dirigeants de la Ligue des Communistes de Yougoslavie.
Nous nous réjouissions de l’accord conclu entre partis frères, à cette conférence, et dans nos actes, l’avons strictement observé et défendu. Cependant, peu après, les dirigeants de certains partis frères en sont venus, une fois encore, à enfreindre l’accord qu’ils avaient signé et approuvé, et au congrès de leur propre parti, ils ont attaqué publiquement d’autre partis frères, étalant ainsi devant l’ennemi les divergences du mouvement communiste international. Tout en attaquant des partis frères, ils se mirent à porter aux nues la clique Tito, persistant à la suivre dans son bourbier.
Or, la marche des événements montre que le courant du révisionnisme moderne est un produit de la politique impérialiste dans des conditions nouvelles. Ce courant d’idées a donc nécessairement un caractère international et le débat engagé entre les marxistes-léninistes et les révisionnistes modernes se développera nécessairement, comme les précédents, à l’échelle mondiale.
Le premier grand débat entre les marxistes-léninistes et les révisionnistes et opportunistes aboutit à la victoire de la Grande Révolution socialiste d’Octobre et à la fondation, dans le monde entier, de partis révolutionnaires prolétariens de type nouveau. Le second vit triompher l’édification du socialisme en Union soviétique et la guerre antifasciste mondiale qui eut la grande Union soviétique pour force principale, il conduisit à la victoire de la révolution socialiste dans une série de pays d’Europe et d’Asie et à celle de la grande révolution du peuple chinois. Le grand débat actuel se situe, lui, à l’époque où le camp impérialiste est en voie de désagrégation, où les forces du socialisme se développent et grandissent, où les grands mouvements révolutionnaires déferlent impétueusement en Asie, en Afrique et en Amérique latine et où la grande classe ouvrière d’Europe et d’Amérique connaît un nouvel éveil. Ayant provoqué ce débat, les révisionnistes modernes espèrent qu’ils pourront biffer le marxisme-léninisme d’un simple trait de plume, liquider les luttes que les nations et peuples opprimés mènent pour leur libération, et sauver l’impérialisme et la réaction mondiale de la fin qui les attend. Mais il est impossible de biffer le marxisme-léninisme, de liquider les luttes de libération des peuples, de sauver les impérialistes et les réactionnaires, de l’anéantissement inéluctable, et contrairement au désir des révisionnistes modernes, ces honteuses ambitions sont vouées à l’échec.
La tâche que le mouvement ouvrier mondial actuel pose devant tous les marxistes-léninistes est de riposter aux révisionnistes modernes qui procèdent à une révision générale du marxisme-léninisme. Par cette révision qui répond aux besoins présents de l’impérialisme international, des réactionnaires des différents pays et de la bourgeoisie de leur propre pays, ils cherchent à vider le marxisme-léninisme de son âme révolutionnaire et à faire table rase du principe de la lutte des classes, principe le plus élémentaire du marxisme-léninisme dont ils ne veulent conserver que l’étiquette.
En dissertant sur les problèmes internationaux et les problèmes sociaux, les révisionnistes modernes substituent la conception bourgeoise « au-dessus des classes », qui est pure hypocrisie, à la conception marxiste-léniniste de l’analyse des classes. Ils fabriquent toutes sortes de suppositions, d’’’hypothèses » dénuées de tout fondement et purement subjectives, et les substituent à l’examen scientifique, marxiste-léniniste, des conditions réelles de la société. Ils substituent le pragmatisme bourgeois au matérialisme dialectique et au matérialisme historique. En un mot, ils utilisent une foule de propos absurdes, à peine intelligibles et croyables pour eux-mêmes, dans le dessein d’abuse la classe ouvrière, les peuples et les nations opprimés.
Les événements internationaux des dernières années ont sans cesse prouvé la faillite des » théories » des révisionnistes modernes et de leur politique. Cependant, chaque fois que leur » théorie » et leur politique les couvrent d’opprobre devant les peuples du monde entier, « ils se vantent de leur déshonneur » (V. I. Lénine : « Ce qu’il ne faut pas imiter dans le mouvement ouvrier allemand », Œuvres, tome 20), comme dit Lénine, et, ne reculant devant rien, insouciants des conséquences possibles, ils prennent pour cible les marxistes-léninistes révolutionnaires, leurs frères en d’autres pays qui les avaient prévenus de ne pas s’illusionner de la sorte et de ne pas agir aussi aveuglément. Ils espèrent prouver leur « victoire » en retournant leur rancœur contre ceux de leur propre camp, cherchant ainsi à isoler les marxistes-léninistes révolutionnaires, isoler tout frère qui défend les principes révolutionnaires en d’autres pays.
Dans de telles circonstances, comment les marxistes-léninistes authentiques, révolutionnaires, pourraient-ils ne pas relever le défi des révisionnistes modernes ? En ce qui concerne les divergences et controverses sur des questions de principe, les marxistes-léninistes ont le devoir de distinguer le vrai du faux, de tirer les problèmes au clair. Dans l’intérêt commun de l’union contre l’ennemi, nous avons toujours été partisans d’une solution obtenue par consultations intérieures, nous opposant à ce que les divergences soient exposées devant l’ennemi. Mais, puisque certains ont tenu à rendre la controverse publique, que nous reste-t-il à faire, sinon relever publiquement leur défi ?
Ces derniers temps, le Parti communiste chinois a été en butte à des attaques insensées. Les attaquants ont mené grand tapage et forgé toutes sortes d’accusations, au mépris total des faits. On comprend sans peine pourquoi et comment ces attaques furent opérées. Quant à savoir sur quelles positions se placent ceux qui ont fomenté et lancé ces attaques et aux côtés de qui ils se rangent, c’est clair comme le jour.
Quiconque a pris connaissance des propos tenus ces dernières années par le camarade Togliatti et d’autres camarades du Parti communiste italien comprendra que ce n’est pas une question de hasard si, au récent Congrès du Parti communiste italien, ils ont fait écho aux attaques lancées contre les vues marxistes-léninistes du Parti communiste chinois. Les Thèses de ce Congrès, ainsi que le rapport et les conclusions que le camarade Togliatti y a présentés sont, d’un bout à l’autre, imprégnés d’idées incompatibles avec le marxisme-léninisme. Leur langage est semblable à celui des social-démocrates et des révisionnistes modernes, tant dans les problèmes internationaux que dans les problèmes intérieurs de l’Italie. Il suffit d’examiner dans leurs détails les Thèses et d’autres documents du Parti communiste italien pour découvrir que les nombreuses formulations et vues qu’ils contiennent ne sont guère des nouveautés mais reprennent, pour l’essentiel, ce que l’on trouve déjà chez les vieux révisionnistes et ce que, de leur côté, les révisionnistes titistes de Yougoslavie ont toujours propagé.
Passons maintenant à l’analyse des Thèses du Parti communiste italien et d’autres documents qui s’y rattachent pour montrer à quel point Togliatti et d’autres camarades se sont éloignés du marxisme-léninisme.
Les nouvelles conceptions du camarade Togliatti
Le camarade Togliatti et d’autres camarades du Parti communiste italien partent essentiellement de leur appréciation de la situation internationale pour poser chaque problème.
Et de là, ils ont élaboré de nouvelles conceptions, dont ils sont fiers, sur les questions aussi bien internationales qu’italiennes.
1. « Il faut, dans le cadre de la lutte mondiale pour la paix et la coexistence pacifique, combattre pour une politique de coopération économique internationale permettant de venir à bout des contradictions qui, aujourd’hui, s’opposent à un développement économique plus rapide se traduisant en progrès social. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien)
2. « En Europe, tout particulièrement, il est nécessaire de développer une initiative unitaire pour poser les bases d’une coopération économique européenne, même entre Etats à structure sociale différente, qui permette, dans le cadre des organismes économiques et politiques de l’O.N.U., d’intensifier les échanges, d’éliminer ou diminuer les obstacles douaniers, d’intervenir en commun pour favoriser le progrès des régions sous-développées. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien)
3. « Il faut exiger que . . . se développe une action systématique qui vise à surmonter la division de l’Europe et du monde en blocs, en brisant les obstacles d’ordre politique et militaire qui maintiennent cette division… pour reconstituer de cette manière un marché mondial unique. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien)
4. Avec les techniques militaires modernes, « la guerre … devient une chose qualitativement différente de ce qu’elle était autrefois. Face à ce changement de la nature de la guerre, notre doctrine elle-même exige un nouvel examen. » (P.Togliatti :
« Unité des classes laborieuses pour avancer vers le socialisme dans la démocratie et la paix « , rapport présenté le 2 décembre 1962 au Xe Congrès du Parti communiste italien.)
5. « En combattant pour la paix et la coexistence pacifique, nous voulons créer un monde nouveau, dont la première caractéristique sera d’être un monde sans guerre ». (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien)
6. « Le régime colonial s’est presque complètement écroulé. » (P. Togliatti : « Unité des classes laborieuses pour avancer vers le socialisme dans la démocratie et la paix », rapport présenté le 2 décembre 1962 au Xe Congrès du Parti communiste italien), « il n’existe plus, dans le monde, de sphères d’influence réservées à l’impérialisme ». (P. Togliatti : « Aujourd’hui, il est possible d’éviter la guerre », intervention faite le 21 juillet 1960 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien.)
7. « En fait, il existe aujourd’hui, dans le monde capitaliste, une poussée pour des transformations structurelles et des réformes de caractère socialiste, poussée qui est en rapport avec le progrès économique et avec la nouvelle expansion des forces productives. » (P. Togliatti : « Unité des classes laborieuses pour avancer vers le socialisme dans la démocratie et la paix », rapport présenté le 2 décembre 1962 au Xe Congrès du Parti communiste italien.)
8. « …le terme de dictature du prolétariat lui-même peut prendre un contenu autre que celui qu’il eut pendant les dures années de la guerre civile et de la construction socialiste entreprise pour la première fois, dans un pays encerclé par le capitalisme. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien, voir Unità, Supplément, 13 septembre 1962)
9. Dans les pays capitalistes, pour « réaliser de profondes réformes dans les structures économiques et politiques actuelles », « une fonction de premier plan peut… incomber aux institutions parlementaires. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien)
10. Dans un pays capitaliste tel que l’Italie peut se réaliser l’« avènement de tout le peuple à la direction du pays » (P. Togliatti : « Unité des classes laborieuses pour avancer vers le socialisme dans la démocratie et la paix », rapport présenté le 2 décembre 1962 au Xe Congrès du Parti communiste italien.) En Italie, les forces démocratiques sont à même « de s’opposer à la nature de classe et aux objectifs de classe de l’Eta tout en acceptant totalement et en défendant le pacte constitutionnel. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien, voir Unità, Supplément, 13 septembre 1962)
11. La « nationalisation », la « programmation » et « l’intervention de l’Etat » dans la vie économique peuvent « devenir un moyen de lutte contre le pouvoir du grand capital, pour frapper, limiter et briser la domination des grands groupes monopolistes » (P. Togliatti : « Unité des classes laborieuses pour avancer vers le socialisme dans la démocratie et la paix » , rapport présenté le 2 décembre 1962 au Xe Congrès du Parti communiste italien.)
12. Les groupes dirigeants bourgeois peuvent maintenant accepter « les concepts de planification et de programmation économiques considérés un temps comme une prérogative socialiste », « cela ne peut manquer de devenir un signe de maturité des conditions objectives pour le passage du capitalisme au socialisme » (P. Togliatti : » Unité des classes laborieuses pour avancer vers le socialisme dans la démocratie et la paix », rapport présenté le 2 décembre 1962 au Xe Congrès du Parti communiste italien.)
Bref, Togliatti et d’autres camarades nous ont brossé, avec ces nouvelles conceptions, un tableau du monde actuel tel qu’ils l’imaginentI.ls ont beau se retrancher, dans leurs Thèses et leurs écrits, derrière une terminologie marxiste-léniniste et nombre de formules trompeuses et ambiguës, il leur est impossible de voiler ce que ces nouvelles conceptions signifient dans le fond. Elles signifient qu’ils veulent substituer la collaboration de classe à la lutte de classe, les « réformes de structure » à la révolution prolétarienne, l’ »intervention commune » au mouvement de libération nationale.
Ces nouvelles conceptions de Togliatti et d’autres camarades laissent entendre que les contradictions sociales antagonistes sont en train de disparaître à l’échelle internationale et que les forces sociales antagonistes sont en train de fusionner. Par exemple, les forces antagonistes que sont régime socialiste et régime capitaliste, camp socialiste et camp impérialiste, pays impérialistes différents, pays impérialistes et nations opprimées, bourgeoisie et prolétariat, ou autres couches du peuple travailleur, des pays capitalistes, ainsi que les différents groupes monopolistes des pays impérialistes, etc., seraient en train de fusionner ou fusionneront.
Nous voyons difficilement en quoi les nouvelles conceptions de Togliatti et d’autres camarades diffèrent, en somme, des points de vue absurdes, anti-marxiste- léninistes, figurant dans le programme qui fait la triste réputation de la clique Tito.
Sans aucun doute, ces nouvelles conceptions sont un défi, de la plus grande gravité, à la doctrine marxiste-léniniste ; elles tentent de faire table rase du marxisme-léninisme. Ceci nous rappelle le titre que donna Engels à son ouvrage polémique adressé à Dühring : « M.E. Dühring bouleverse la science ». Le camarade Togliatti aurait-il l’intention d’emboîter le pas à Dühring et d’opérer à son tour un « bouleversement », celui de la doctrine marxiste-léniniste ?
Ils ont une recette pour transformer le monde, mais n’y croient pas eux-mêmes
Comment « venir à bout des contradictions qui, aujourd’hui, s’opposent à un développement économique plus rapide se traduisant en progrès social » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien) ? Ou bien, comment parvenir à fondre les forces sociales antagonistes, internationales et intérieures ? Togliatti et d’autre camarades répondent à la question en ces termes : « Les pays socialistes, et en premier lieu l’Union soviétique, lancent aux classes dirigeantes bourgeoises un défi pour une compétition pacifique dans l’instauration d’un ordre économique et social capable de satisfaire toutes les aspirations des hommes et des peuples à la liberté, au bien-être, à l’indépendance au développement complet et au respect total de la personne humaine, à la coopération pacifique entre tous les Etats » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien) Est-ce que Togliatti et d’autres camarades entendent part là qu’ il suffit de pratiquer la compétition pacifique entre pays socialistes et pays capitalistes, sans passer par la révolution populaire, pour que soit instauré dans les pays capitalistes, « un ordre économique et social » semblable à celui qui existe dans les pays socialistes ? Cela ne revient-il pas à dire que le capitalisme cesserait d’être ce qu’il est, l’impérialisme aussi, et que la bourgeoisie, au lieu de poursuivre ses luttes à mort à l’intérieur comme à l’étranger pour les profits ou les surprofits, pourrait, dans le but de satisfaire toutes les aspirations de l’humanité, « coopérer pacifiquement » avec tous les pays et tous les hommes ?
Voilà la recette imaginée par le camarade Togliatti pour transformer le monde. Toutefois, et puisque cette panacée n’a pas même prouvé son efficacité par la pratique en Italie, comment les marxistes-léninistes pourraient-ils être assez crédules pour la prendre au sérieux ?
Comme on le sait, et les marxistes-léninistes doivent l’avoir mieux en tête que les autres, au lendemain même de la Révolution d’Octobre, Lénine a avancé la politique de coexistence pacifique entre pays socialistes et pays capitalistes, et il préconisa la compétition économique entre eux. L’Union soviétique socialiste s’est trouvée, durant la majeure partie de ses quarante et quelques années d’existence en état de coexistence pacifique avec les pays capitalistes. Nous estimons que la politique de coexistence pacifique que pratiquaient Lénine et Staline est parfaitement juste et nécessaire. Elle montre que les pays socialistes ne veulent pas et n’ont nul besoin de régler les différends entre pays par le recours à la force. La supériorité du système socialiste, qui a été prouvée dans les pays qui l’appliquent, encourage énormément à l’heure actuelle les peuples et les nations opprimés. Après la Révolution d’Octobre, Lénine déclara à maintes reprises que l’édification socialiste de l’Union soviétique ferait figure d’exemple pour le monde entier. Il disait notamment qu’un système communiste pouvait être établi par le prolétariat victorieux et que « cette tâche a une portée universelle. » (V. I. Lénine : » Notre situation extérieure et intérieure et les tâches du Parti « , Œuvres, tome 31)
En 1921, lorsque la guerre civile était pour l’essentiel terminée, que le pays des Soviets commençait à s’engager dans la voie de l’édification pacifique, Lénine posa l’édification économique socialiste comme la tâche principale du pays des Soviets. « A présent, dit-il, nous exerçons notre influence sur la révolution internationale essentiellement par notre politique économique. » (V. I. Lénine : « Dixième Conférence du Parti communiste (bolchevik) de Russie », Œuvres, tome 32) Lénine avait raison. C’est précisément de cette façon que les forces du socialisme ont exercé une influence sans cesse accrue sur la situation internationale. Cependant Lénine n’a pas affirmé que l’édification du pays des Soviets pouvait remplacer la lutte menée par les peuples du monde pour leur libération. La quarantaine d’années d’histoire de l’Union soviétique prouve, par ailleurs, que la révolution et le changement de régime en un pays, quel qu’il soit, ne se réalisent que par son peuple, et que la politique de coexistence et de compétition pacifiques pratiquée par les pays socialistes ne peut en aucune façon transformer le système social des autres pays. Sur quoi Togliatti et d’autres camarades se basent-ils donc pour affirmer que, étant donné la politique de coexistence et de compétition pacifiques pratiquée par les pays socialistes, il serait possible de transformer le système social dans tout le reste du monde et d’instaurer « un ordre économique et social » répondant aux aspirations de tous ?
Il est vrai que Togliatti et d’autres camarades ne sont pas tellement sûrs de leur recette, puisque, dans leurs Thèses, ils poursuivent : « Cependant, les groupes dirigeants des pays impérialistes ne veulent pas renoncer à la domination sur le monde entier ».
Mais Togliatti et ces autres camarades n’ont pas cherché à comprendre, à partir des lois du développement social, pourquoi les groupes dirigeants des pays impérialistes « ne veulent pas renoncer à la domination sur le monde entier ». Ils estiment qu’il s’agirait simplement là d’une conception erronée ou d’une mauvaise « compréhension » de la situation mondiale chez les groupes dirigeants des pays impérialistes et que c’est précisément de cette conception erronée, de cette mauvaise « compréhension » que « découle l’incertitude de la situation internationale. » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien)
Comment peut-on, d’un point de vue marxiste-léniniste, ramener les efforts de l’impérialisme pour maintenir sa domination, l’instabilité de la situation internationale, etc., à une simple question de compréhension par les groupes dirigeants des pays impérialistes et ne pas les tenir pour des manifestations des lois du développement capitaliste-impérialiste ? Comment peut-on supposer que le système social des différents pays sera transformé radicalement, sans lutte de classe ni révolution par les peuples, le jour où les groupes dirigeants des pays impérialistes auront une « juste compréhension » des choses et où les personnalités dirigeantes de ces pays seront devenues « raisonnables » ?
Deux points de vue totalement différents sur les contradictions dans le monde
En analysant la situation mondiale actuelle, les marxistes-léninistes doivent être en possession des données politiques et économiques essentielles sur les différents pays du monde et saisir les principales contradictions que voici : les contradictions entre le camp socialiste et le camp impérialiste, entre les pays impérialistes eux-mêmes, entre les pays impérialistes et les nations opprimées, et, dans les pays capitalistes, celles entre la bourgeoisie d’une part, et le prolétariat, le peuple travailleur de l’autre, entre les différents groupes monopolistes, entre la bourgeoisie monopoliste et la petite et la moyenne bourgeoisies, etc. Il est évident que ce n’est qu’avec la connaissance de ces contradictions, par leur analyse et celle des modifications qu’elles présentent à différentes époques, et par la localisation du point de convergence des contradictions concrètes de l’heure, que les partis de la classe ouvrière de tous les pays pourront arriver à une juste estimation de la situation internationale et intérieure et baser leur politique sur des positions théoriques sûres. Malheureusement, ce sont ces mêmes contradictions que Togliatti et d’autres camarades n’ont pas voulu envisager sérieusement dans leurs Thèses, et immanquablement, leur programme s’est écarté des principes mêmes du marxisme-léninisme.
Bien sûr, Togliatti et d’autres camarades ont cité également nombre de contradictions dans leurs Thèses, mais ce qui est pour le moins étonnant, c’est que le camarade Togliatti, qui prétend être un « marxiste-léniniste », a soigneusement évité d’aborder les contradictions principales.
Voici ce que, traitant du Marché commun européen, les Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ont énuméré en fait de contradictions se manifestant dans la situation internationale :
« Les rivalités économiques accrues entre grands Etats capitalistes s’accompagnent toutefois d’une tendance prononcée on seulement aux accords internationaux entre grands monopoles, mais encore à la création d’ententes organiques commerciales et économiques entre groupes d’Etats L’extension des marchés, qui, en Europe occidentale, est la conséquence d’une de ces ententes (le Marché commun européen), a stimulé le développement économique de quelques pays (Italie, République fédérale allemande). L’intégration économique, effectuée sous la direction des grands groupes monopolistes et liée à la politique atlantique de réarmement et de guerre, a toutefois fait surgir, à l’échelle internationale et dans le cadre d’un pays pris en particulier, de nouvelles contradictions : entre le progrès de quelques régions hautement industrialisées et le retard et la décadence, permanents et même relativement croissants, d’autres régions ; entre le rythme d’accroissement de la production de l’industrie et celui de l’agriculture qui traverse partout une période de graves difficultés et de crise ; entre les zones, plus ou moins étendues, de bien-être et de grande consommation et les zones extrêmement étendues de bas salaires, de sous-consommation et de misère ; entre, d’une part, l’énorme masse de richesse qui est détruite, non seulement pour le réarmement mais encore pour des dépenses improductives, et le luxe effréné, et d’autre part, l’impossibilité de résoudre des problèmes qui sont essentiels pour la vie des masses populaires et pour le progrès (l’habitat, l’école, la sécurité sociale, etc.). »
Toute une série de prétendues contradictions ou « nouvelles contradictions » est étalée dans ce passage ; mais comme par un fait exprès, il n’y a nulle mention des contradictions de classes, des contradictions qui opposent l’impérialisme et ses laquais aux peuples de tous les pays, etc. Les contradictions existant « à l’échelle internationale et dans le cadre d’un pays pris en particulier » seraient, selon Togliatti et d’autres camarades, des contradictions entre régions industriellement développées et régions industriellement sous-développées, et celles entre zones riches et zones pauvres.
Ils admettent la concurrence économique entre pays capitalistes, l’existence de grands monopoles, de groupes d’Etats, mais la conclusion qu’ils en tirent, c’est que les contradictions sont en marge ou au-dessus des classes. Ils estiment que les contradictions entre pays impérialistes sont conciliables et peuvent être éliminées par des « accords internationaux entre grands monopoles » et » la création d’ententes organiques commerciales et économiques entre groupes d’Etats « . Ce point de vue plagie, en fait, la théorie de l’ »ultra-impérialisme « des vieux révisionnistes, qualifiée par Lénine d »’ultra-niaiserie ».
On sait que c’est à l’époque de l’impérialisme que Lénine avança l’importante thèse : « l’inégalité du développement économique et politique est une loi absolue du capitalisme » (V. I. Lénine : « A propos du mot d’ordre des Etats-Unis d’Europe », Œuvres, tome 21). Le développement inégal des pays capitalistes, à l’époque de l’impérialisme, se manifeste par des sauts et des bonds ; des pays restés en arrière passant d’un trait en tête et d’autres, d’abord en tête, se laissent distancer. Cette loi absolue du développement inégal du capitalisme n’a pas disparu après la Seconde guerre mondiale. Les impérialistes américains, les révisionnistes et les opportunistes débitent à longueur de journée que le développement du capitalisme américain est au-dessus de cette loi absolue, mais dans l’après-guerre, le rythme du développement économique au Japon, en Allemagne occidentale, en Italie, en France et dans d’autres pays capitalistes a, depuis plusieurs années, dépassé celui des Etats-Unis. La place occupée par les Etats-Unis dans l’économie capitaliste mondiale a diminué en importance. La production industrielle américaine qui, en 1948, représentait 53,4 pour cent de celle du monde capitaliste, est tombée à 44,1 pour cent en 1960 et à 43 pour cent en 1961.
Quoique le rythme du développement économique du capitalisme américain soit tombé au-dessous de celui enregistré dans nombre d’autres pays capitalistes, les Etats-Unis n’ont pas encore complètement perdu le monopole qu’ils détiennent dans le monde capitaliste. D’où d’une part, les Etats-Unis qui cherchent à conserver et à étendre leur position déterminante et de monopole dans le monde capitaliste ; et d’autre part, les autres pays impérialistes et pays capitalistes qui s’efforcent de se soustraire à l’emprise de l’impérialisme américain. C’est là une contradiction réelle du système politico-économique du capitalisme mondial, et elle est flagrante, et s’ai guise de jour en jour. En dehors d’elle, il y a encore d’autres contradictions entre certains pays impérialistes ainsi qu’entre certains pays capitalistes. Entre les pays impérialistes, elles entraîneront inéluctablement et, en fait, entraînent déjà une exacerbation de la lutte pour la conquête de marchés, de débouchés pour les capitaux et de sources de matières premières. A ceci viennent se mêler les luttes entre colonialistes et néo-colonialistes, pays impérialistes vainqueurs et pays impérialistes vaincus. Les événements du Congo, les querelles suscitées par le Marché commun européen et par les restrictions imposées par les Etats-Unis aux importations en provenance du Japon en sont des exemples typiques.
Bien que les Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien aient souligné que « la prépondérance économique absolue du capitalisme américain commence à disparaître par suite du processus de développement inégal et par bonds, propre au capitalisme et à l’impérialisme », le camarade Togliatti et les autres camarades n’ont pas vu, dans ce phénomène nouveau, un élargissement et un approfondissement des contradictions du monde capitaliste ; ils n’ont pas vu non plus que ce phénomène nouveau peut engendrer une situation nouvelle, faite de luttes à mort entre les pays impérialistes, de luttes serrées entre les divers groupes monopolistes des pays impérialistes et de luttes serrées, dans les pays capitalistes, entre le prolétariat et le peuple travailleur d’une part et le capital monopoliste de l’autre. Et en particulier, le marché mondial, que contrôlait l’impérialisme s’est trouvé rétréci suite à la révolution socialiste victorieuse dans une série de pays ; de plus, l’accession à l’indépendance nationale de nombreux pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, ébranle le monopole économique de l’impérialisme dans ces dernières régions. Dans ces conditions, les luttes serrées qui se déroulent dans le monde capitaliste, loin de se relâcher, ont encore gagné en violence.
Deux systèmes économiques mondiaux de nature différente existent, le système socialiste et le système capitaliste, et deux camps mondiaux antagonistes, le camp socialiste et le camp impérialiste. L’évolution de la situation a vu le socialisme l’emporter en puissance sur l’impérialisme. La force des pays socialistes, à laquelle viennent s’ajouter celle des peuples révolutionnaires du monde, celle du mouvement de libération nationale et celle du mouvement de la paix — ces forces réunies dépassent sans aucun doute et considérablement celles des impérialistes et de leurs laquais. Cela signifie que, dans le rapport mondial des forces, la supériorité appartient au socialisme et aux peuples révolutionnaires et non à l’impérialisme ; la supériorité appartient aux forces qui défendent la paix mondiale et non aux forces de guerre impérialistes. Selon les communistes chinois, « le vent d’Est l’emporte sur le vent d’Ouest ». Il serait totalement faux de ne pas tenir compte de l’énorme changement intervenu dans le rapport des forces après la Seconde guerre mondiale. Toutefois, ce changement n’a pas supprimé les différentes contradictions inhérentes au monde capitaliste, il n’a pas modifié la « loi de la jungle », tuer ou être tué, de la société capitaliste ni, non plus, exclu la possibilité de voir les pays impérialistes se scinder en différents blocs et se lancer dans toutes sortes de conflits pour réaliser leurs intérêts particuliers.
Comment peut-on affirmer que, suite au changement intervenu dans le rapport mondial des forces, la distinction entre les deux systèmes sociaux que sont le capitalisme et le socialisme s’estompera d’elle-même ?
Comment peut-on affirmer que, suite au changement intervenu dans le rapport mondial des forces, les multiples contradictions internes du monde capitaliste disparaîtront d’elles-mêmes ?
Comment peut-on affirmer que, suite au changement intervenu dans le rapport mondial des forces, les forces dominantes des pays capitalistes quitteront d’elles-mêmes l’arène de l’histoire ?
Et cependant, on trouve cette façon de voir dans les Thèses de Togliatti et d’autres camarades.
Le foyer des contradictions mondiales après la Seconde guerre mondiale
Togliatti et ces autres camarades vivent dans le monde capitaliste, mais leur pensée vogue dans quelque fabuleux pays des songes.
Les communistes vivant dans le monde capitaliste ont pour devoir d’analyser, suivant la conception marxiste-léniniste de l’analyse de classes et en partant de la situation mondiale prise dans son ensemble, non seulement les contradictions entre camp socialiste et camp impérialiste, mais encore et surtout les contradictions entre les pays impérialistes eux-mêmes, entre pays impérialistes et nations opprimées, entre la bourgeoisie, d’une part, et, d’autre part, le prolétariat et le peuple travailleur des pays impérialistes, afin de montrer la juste voie au prolétariat de leur pays et à tous les peuples et nations opprimés. Et nous trouvons regrettable que Togliatti et d’autres camarades n’agissent pas de la sorte. Ils ne font que débiter sur ces contradictions des futilités sans queue ni tête, et dissimulent en fait ces contradictions pour égarer le prolétariat de leur propre pays, égarer tous les peuples et nations qui sont opprimés.
Tout comme Tito, le camarade Togliatti identifie contradictions entre camp impérialiste et camp socialiste et « l’existence et l’opposition de deux grands blocs militaires » (Voir P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien), et il prétend que le « changement de la situation » suffit à créer un monde nouveau « sans guerre » et de « coopération pacifique » (Voir P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien). Ainsi disparaîtraient les contradictions entre les deux grands systèmes sociaux du monde.
Cette façon de voir du camarade Togliatti est par trop naïve. Il espère, jour après jour, que les dirigeants des pays impérialistes deviendront « raisonnables », mais les impérialistes ne désarmeront jamais ni ne changeront eux-mêmes leur système social, comme le souhaite le camarade Togliatti. Tout ce que l’on peut en déduire, c’est que cette façon de voir équivaut, en somme, à demander aux pays socialistes d’abandonner ou de supprimer leurs forces de défense, à vouloir que dans le système socialiste se produise une « évolution pacifique » ou une « évolution spontanée » vers la soi-disant libéralisation capitaliste que les impérialistes ont toujours souhaitée.
La contradiction qui oppose camp impérialiste et camp socialiste est une contradiction entre deux systèmes sociaux, une contradiction fondamentale dans le monde, et qui, sans nul doute, est aiguë. Comment un marxiste-léniniste peut-il la considérer comme une contradiction entre deux blocs militaires et non entre deux systèmes sociaux ?
Par ailleurs, un marxiste-léniniste ne doit pas non plus, d’une manière simpliste, tenir pour seules contradictions existant dans le monde celles entre camp impérialiste et camp socialiste.
Sachons que, de par leur nature, les pays socialistes n’ont nul besoin d’expansion et il est impossible qu’lis la pratiquent ; ils ne le doivent pas, et ils ne se le permettent pas. Ils ont leurs marchés, et la Chine et l’Union soviétique plus que n’importe quel pays, ont les plus vastes marchés intérieurs du monde. Les pays socialistes font également du commerce international, ils le font suivant le principe d’égalité et de l’intérêt mutuel ; mais ils n’ont pas à disputer des débouchés et des zones d’in fluence aux pays impérialistes, ils n’ont absolument pas besoin, à ce sujet, de conflits, en particulier de conflits armés avec les pays impérialistes.
Par contre, il en va tout autrement pour les pays impérialistes.
Tant qu’il a système capitaliste-impérialiste, les lois de l’impérialisme capitaliste continuent à jouer. Les impérialistes ne cesseront jamais d’opprimer et d’exploiter le peuple de leurs pays…et d’envahir, d’opprimer et d’exploiter les autres nations.
Ils considéreront toujours les colonies, les semi-colonies et les diverses zones d’influence comme des sources de richesse qui leur reviennent. Les chacals « civilisés » impérialistes considèrent depuis toujours l’Asie l’Afrique et l’Amérique latine comme d’alléchantes proies à arracher, à dévorer. Ils ne cessent de réprimer par tous les moyens les luttes et les insurrections populaires dans les colonies et les diverses zones d’influence. Quelle que soit la politique adoptée par l’impérialisme capitaliste, politique colonialiste ou néocolonialiste, les contradictions entre l’impérialisme et les nations opprimées subsisteront. Ce sont des contradictions inconciliables, aiguisées à l’extrême, que rien ne peut escamoter.
De même, entre les pays impérialistes se poursuit en permanence la lutte pour les débouchés, les sources de matières premières, les zones d’influence et pour les profits sur les transactions d’arme est munitions. Bien qu’il ait parfois quelque relâchement dans cette rivalité, que des compromis soient réalisés et qu’il se constitue même des « ententes entre groupes d’Etats », ces relâchements, compromis et ententes couvent toujours des contradictions et luttes encore plus aiguës, plus violentes et plus vastes.
Après la Seconde guerre mondiale, les impérialistes américains ont pris la relève des fascistes allemands, italiens et japonais, et ont toujours poursuivi une politique mondiale d’expansion .Sous couvert d’antisoviétisme ,ils se sont tout d’abord mis à envahir, annexer ou contrôler les anciennes colonies ou les sphères d’influence de la Grande-Bretagne, de la France, de l’Allemagne, du Japon et de l’Italie. Toujours sous le même prétexte, ils ont profité des conditions de l’après-guerre pour mettre un bon nombre de pays capitalistes, tels que la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne occidentale, le Japon, l’Italie la Belgique, le Canada, l’Australie, sous le contrôle direct du capital monopoliste américain, contrôle qui s’étend aux domaines militaire, politique et économique.
Cela signifie que l’impérialisme américain cherche à mettre sur pied, dans le monde capitaliste, un grand empire sans précédent dans l’histoire. La création de l’empire dont il rêve implique non seulement l’asservissement direct des pays vaincus, Allemagne occidentale, Italie et Japon, et de leurs anciennes colonies et sphères d’influence, mais encore l’asservissement direct de ses alliés du temps de guerre, Grande-Bretagne, France et Belgique, ainsi que de leurs anciennes colonies et sphères d’influence.
Cela signifie que dans la réalisation pratique, les efforts de l’impérialisme américain pour créer ce vaste empire sans précédent portent en premier lieu sur l’annexion des zones intermédiaires, extrêmement vastes, situées entre les Etats-Unis et les pays socialistes. Et il use, en même temps, de tous les moyens pour entreprendre des activités subversives, de sabotage et d’agression contre les pays socialistes.
Il n’est pas inutile de rappeler ici les paroles célèbres que le camarade Mao Zedong prononça au cours d’un entretien en août 1946 et par lesquelles, dévoilant le tapage antisoviétique qui n’était qu’un écran de fumée tendu par l’impérialisme américain, il résuma la situation mondiale :
« Les Etats-Unis et l’Union soviétique sont séparés par une zone très vaste qui englobe de nombreux pays capitalistes, coloniaux et semi-coloniaux en Europe, en Asie et en Afrique. Avant que les réactionnaires américains n’aient assujetti ces pays, une attaque contre l’Union soviétique est hors de question. Dans le Pacifique, les Etats-Unis contrôlent maintenant des régions plus étendues que l’ensemble de toutes les anciennes sphères d’in fluence qu’y possédait la Grande-Bretagne ; ils contrôlent le Japon, la partie de la Chine soumise à la domination du Kuomintang, la moitié de la Corée et le Pacifique Sud. Ils contrôlent depuis longtemps l’Amérique centraient l’Amérique du Sud. Ils cherchent en outre à contrôler tout l’Empire britannique et l’Europe occidentale. Sous divers prétextes, les Etats-Unis prennent des dispositions militaires de grande envergure et établissent des bases militaires dans de nombreux pays. Les réactionnaires américains disent que les bases militaires qu’ils ont établies et celles qu’ils se préparent à établir partout dans le monde sont toutes dirigées contre l’Union soviétique. Certes, elles visent l’Union soviétique. Mais pour le moment, ce n’est pas l’Union-soviétique mais bien les pays où ces bases militaires se trouvent établies qui ont à souffrir les premiers de l’agression américaine. Je crois que ces pays ne tarderont pas à comprendre qui, de l’Union soviétique ou des Etats-Unis, les opprime vraiment. Le jour viendra où les réactionnaires américains s’apercevront qu’ils ont contre eux les peuples du monde entier.
Bien entendu, je ne veux pas dire que les réactionnaires américains n’aient pas l’intention d’attaquer l’Union soviétique. L’Union soviétique est le défenseur de la paix mondiale, elle est un puissant facteur qui fait obstacle à la conquête de l’hégémonie mondiale par les réactionnaires américains. Du fait de l’existence de l’Union soviétique, il est absolument impossible aux réactionnaires des Etats-Unis et du monde entier de réaliser leurs ambitions. C’est pourquoi les réactionnaires américains vouent une haine implacable à l’Union soviétique et rêvent effectivement de détruire cet Etat socialiste. Mais les réactionnaires américains font aujourd’hui, peu après la fin de la Seconde guerre mondiale, un tel tapage à propos d’une guerre américano-soviétique — au point d’empoisonner l’atmosphère internationale — que nous sommes obligés d’examiner de plus près leurs véritables intentions. Il apparaît alors que, sous le couvert de slogans antisoviétiques, ils se livrent à des attaques frénétiques contre les ouvriers et les milieux démocratiques de leur pays et transforment en dépendances américaines tous les pays visés par l’expansion des Etats-Unis. A mon avis, le peuple américain et les peuples de tous les pays menacés par l’agression américaine doivent s’unir et lutter contre les attaques des réactionnaires américains et de leurs laquais dans ces pays. Seule la victoire remportée dans cette lutte permettra d’éviter une troisième guerre mondiale ; sinon, celle-ci est inévitable » (Mao Zedong : Entretien avec la journaliste américaine Anna Louise Strong, Œuvres choisies tome 4)
C’est ainsi que le camarade Mao Zedong montrait il y a seize ans, en termes on ne peut plus clairs, comment les impérialistes américains s’y prennent pour mettre leur grand empire mondial sur pied. Il indiquait en même temps, en termes tout aussi explicites, comment il faut procéder pour mettre en échec ce plan insensé des impérialistes américains qui vise à asservir le monde entier et comment orienter nos efforts pour éviter une troisième guerre mondiale à l’humanité.
Ces paroles du camarade Mao Zedong montrent qu’il existe, entre l’impérialisme américain et les pays socialistes, une très vaste zone intermédiaire, englobant l’ensemble du monde capitaliste, exception faite des Etats-Unis. Les cris de guerre lancés par l’impérialisme américain contre le camp socialiste indiquent, d’une part, qu’il se prépare effectivement à une guerre d’agression contre les pays socialistes, qu’il rêve de les faire disparaître, et d’autre part, qu’ il s’agit là d’un écran de fumée derrière lequel il camoufle ses objectifs réels, l’agression et l’asservissement de la zone intermédiaire.
Cette politique ambitieuse d’agression et d’asservissement par laquelle l’impérialisme américain cherche à asseoir son hégémonie dans le monde se heurte en premier lieu à la résistance des nations et peuples opprimés de la zone intermédiaire, en particulier ceux d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. Cette politique réactionnaire de l’impérialisme américain est devenue, en fait, une sorte d’amorce révolutionnaire pour les nations et peuples opprimés d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine ; elle y a fait lever les flammes révolutionnaires qui s’y propagent depuis une dizaine d’années. Dans ces régions, le feu de la révolution ébranle encore plus fortement les fondements de la domination impérialiste. Il s’é tend et gagnera à coup sûr des régions plus vastes.
En outre, la politique d’hégémonie mondiale de l’impérialisme américain accentuera nécessairement les rivalités entre pays impérialistes et entre colonialistes et néocolonialistes, pour la possession de colonies et de sphères d’influence ; elle aiguisera la lutte entre les impérialistes américains et les autres impérialistes, ceux-là voulant imposer leur contrôle et ceux-ci s’efforçant de s’y soustraire. Cette lutte touchant à leurs intérêts vitaux, les impérialistes sont impitoyables entre eux, chacun ne cherchant qu’à étrangler le rival.
Les impérialistes américains et leurs acolytes appliquent vis-à-vis de la lutte de libération des nations et peuples opprimés d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, une politique ultra-réactionnaire, faite de répression et de duperie. Les pays socialistes pratiquent à l’égard de la lutte révolutionnaire nationale et démocratique dans ces régions — cela va de soi, et c’est d’ailleurs un devoir auquel ils ne sauraient se dérober — une politique de sympathie et de soutien. Il s’agit là de deux politiques foncièrement différentes, et les contradictions qui les opposent ne peuvent manquer de se manifester de façon flagrante dans ces régions. La politique adoptée par les révisionnistes modernes à l’égard de celles-ci sert en réalité la politique de l’impérialisme. Il s’ensuit que les contradictions entre la politique des marxistes-léninistes et celle des révisionnistes modernes ne peuvent manquer non plus de se manifester avec évidence dans ces mêmes régions.
La population de ces régions d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine représente plus des deux tiers de la population du monde capitaliste. La montée constante de la marée révolutionnaire dans ces régions, la lutte entre les pays impérialistes, et entre les colonialistes et les néocolonialistes pour la possession de ces régions font ressortir avec force que là se trouve le point de convergence de toutes les contradictions du monde capitaliste, et l’on peut dire également que le foyer des contradictions mondiales est là. Ces régions constituent le maillon le plus faible de l’impérialisme, la source principale de la révolution mondiale actuelle qui bat en tempête.
L’expérience de ces seize dernières années a confirmé toute la justesse de la thèse du camarade Mao Zedong sur la localisation du foyer des contradictions mondiales après la Seconde guerre mondiale.
Le foyer des contradictions mondiales s’est-il déplacé ?
D’énormes changements sont intervenus dans le monde au cours des seize dernières années. Voici les principaux :
Premièrement : Une série de pays socialistes sont nés en Europe et en Asie, le peuple chinois a triomphé dans sa révolution, et ils ont formé avec l’Union soviétique le camp socialiste comprenant douze pays : Albanie, Bulgarie, Hongrie, Vietnam, République démocratique allemande, Chine, Corée, Mongolie, Pologne, Roumanie, Union soviétique et Tchécoslovaquie, et comptant un milliard d’hommes. Le rapport des forces dans le monde en a été radicalement modifié.
Deuxièmement : Les forces de l’Union soviétique, ainsi que de l’ensemble du monde socialiste, se sont considérablement accrues et l’influence du monde socialiste s’est grandement élargie.
Troisièmement : Le mouvement de libération nationale et le mouvement révolutionnaire des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine ont détruit et continuent à détruire, dans de vastes régions et avec une puissance foudroyante, les positions des impérialistes américains et de leurs acolytes. L’héroïque peuple cubain a renversé le régime réactionnaire des laquais de l’impérialisme américain, sa grande révolution est victorieuse et il s’est engagé dans la voie du socialisme.
Quatrièmement : La lutte pour les droits démocratiques et le socialisme menée par la classe ouvrière et le peuple travailleur dans les pays capitalistes européens et américains a pris un nouvel essor et connu un nouveau développement.
Cinquièmement : Le développement inégal des pays capitalistes s’est accentué. Les forces capitalistes de la France ont acquis un développement nouveau, et déjà elles commencent à se sentir de taille à affronter les Etats-Unis. Les contradictions entre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis se sont encore aggravées. Les pays vaincus de la Seconde guerre mondiale, Allemagne occidentale, Italie et Japon, se sont redressés, avec le soutien des Etats-Unis, et cherchent, l’un plus, l’autre moins, à se dégager de la domination américaine. L’Allemagne occidentale et le Japon, où le militarisme renaît, deviennent une fois de plus des foyers de guerre. L’Allemagne et le Japon étaient, avant la. Seconde guerre mondiale, les principaux concurrents de l’impérialisme américain. Aujourd’hui, de nouveau en tant que principale concurrente, l’Allemagne occidentale s’est retrouvée avec les impérialistes américains sur le marché mondial capitaliste ; le sentier est étroit et aucun des deux ne tient à céder le passage à l’autre. La concurrence entre le Japon et les Etats-Unis s’intensifie également de jour en jour.
Sixièmement : L’inégalité accrue du développement économique et politique entre les pays capitalistes s’est accompagnée d’une concurrence encore plus vive entre les différents groupes monopolistes.
Ces changements nous apprennent que si les peuples prennent conscience et s’unissent, ils pourront vaincre les impérialistes américains et leurs laquais et gagner la liberté et leur émancipation.
Ils nous apprennent aussi que plus les forces des pays socialistes se développent, plus l’unité du camp socialiste se renforce, plus le mouvement de libération des nations opprimées gagne en ampleur, plus la lutte du prolétariat et d’autres couches populaires opprimées des pays capitalistes s’étend, plus grande devient alors la possibilité de lier pieds et mains aux impérialistes, de les obliger à ne plus dédaigner l’opinion mondiale, d’empêcher une nouvelle guerre mondiale et de sauvegarder la paix mondiale.
Ils nous apprennent encore que les contradictions entre l’impérialisme américain et les autres puissances impérialistes s’aggravent de plus en plus et deviennent toujours plus aiguës, et que de nouveaux conflits se développent entre eux.
La révolution victorieuse du peuple chinois, les victoires des pays socialistes dans leur édification, la révolution nationale et démocratique victorieuse dans de nombreux pays et la révolution victorieuse du peuple cubain ont porté un coup extrêmement sévère au plan insensé, d’asservissement mondial, de l’impérialisme américain. En vue de poursuivre leur politique d’agression, les impérialistes américains mènent ces dernières années, en dehors de leur propagande antisoviétique, une propagande particulièrement nourrie contre la Chine. L’objectif de leur propagande antichinoise est naturellement de perpétuer leur mainmise sur le territoire chinois du Taïwan, et de poursuivre toutes sortes d’activités criminelles de sabotage et d’intimidation contre notre pays. Par ailleurs, il est évident pour tout le monde qu’à la faveur de leur propagande antichinoise, les impérialistes américains tentent en même temps d’atteindre un important but pratique : le contrôle et l’asservissement du Japon, de la Corée du Sud et de l’ensemble du Sud-est asiatique. Les soi-disant « Pacte de sécurité nippo-américain », « Organisation du Traité de défense collective de l’Asie du Sud-est », etc., sont des instruments aux Etats-Unis
à contrôler et asservir un bon nombre de pays des régions intéressées.
Depuis des années, les impérialistes américains soutiennent, publiquement ou secrètement, les réactionnaires indiens, soutiennent le gouvernement Nehru. Quel est leur but réel ? Ils voudraient, par un tour de passepasse, placer l’Inde, ancienne colonie britannique et toujours membre du Commonwealth, dans la sphère d’in fluence des Etats-Unis, et escamoter le joyau qui orna la couronne de l’Empire britannique pour le sertir dans la couronne de l’Empire du Dollar. Pour y parvenir, il leur faut tout d’abord trouver un prétexte et tendre un rideau de fumée, devant le peuple indien et les peuples du monde entier, d’où la « campagne antichinoise » et l’opposition à la prétendue « agression chinoise », bien qu’ils ne croient nullement à cette agression-ci. Les impérialistes américains considèrent l’action militaire antichinoise du gouvernement Nehru comme une occasion magnifique pour placer l’Inde sous leur contrôle. Après que Nehru eut déclenché le conflit frontalier sino-indien, ils se sont introduits en Inde avec un sans-gêne superbe, en invoquant la « campagne antichinoise », y étendant ainsi leur influence dans les domaines militaire, politique et économique.
Cette intrusion d’envergure constitue un pas important du plan néo-colonialiste appliqué par les réactionnaires américains en Inde, et un événement important dans le cadre de la lutte actuelle, ouverte ou sournoise, entre les pays impérialistes pour l’accaparement de marchés, de sphères d’influence et pour un nouveau partage du monde. Ces agissements des impérialistes américains contribueront immanquablement à une nouvelle prise de conscience du peuple indien et aggraveront nécessairement les contradictions qui opposent impérialisme américain et impérialisme britannique .en Inde.
Par suite de la perte des colonies, du développement du mouvement de révolution nationale et du rétrécissement du marché mondial capitaliste, les disputes entre pays impérialistes, non seulement continuent à se manifester dans de nombreuses régions d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine et d’Australie, mais apparaissent encore en Europe occidentale, berceau du capitalisme. Jamais encore dans l’histoire. La rivalité entre pays impérialistes n’a pris une telle ampleur en temps de paix, gagnant tous les coins de l’Europe occidentale, jamais non plus, ces pays ne se sont disputés à tel point des régions industriellement développées comme l’Europe occidentale. Le Marché commun européen, formé par six pays, dont l’Allemagne occidentale, la France et l’Italie, et l’Association européenne de Libre-échange, constituée par sept pays et ayant à sa tête la Grande-Bretagne, ainsi que la Communauté atlantique dont la mise sur pied est vivement encouragée par les Etats-Unis sont autant de preuves que la dispute des marchés de l’Europe occidentale entre les pays impérialistes s’aggrave de plus en plus. Le « développement du commerce italien dans toutes les directions » (Thèses du Xème congrès du Parti communiste italien), dont parlent Togliatti et d’autres camarades, reflète en fait l’aspiration de la bourgeoisie monopoliste italienne à l’accaparement des marchés.
En dehors de l’Europe occidentale, la querelle ouverte suscitée par les restrictions imposées dernièrement par les Etats-Unis aux importations de cotonnades japonaises, montre qu’entre les Etats-Unis et le Japon, la dispute des marchés s’extériorise de plus en plus.
Togliatti et certains camarades disent : « Le régime colonial s’est presque complètement écroulé » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien), « il n’existe plus, dans le monde, de sphères d’influence réservées à l’impérialisme ». (P. Togliatti : Intervention faite le 21 juillet 1960 à la session Plénière du Comité central du Parti communiste italien) D’autre disent que « dans le monde, il n’y a plus que 50 millions d’homme gémissant sous le joug colonialiste », que du système colonial il ne reste plus que des séquelles. A leurs yeux, la lutte contre l’impérialisme n’est déjà plus une tâche importante pour les peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. Cette façon de présenter les choses ne repose sur aucun fait. En Asie, en Afrique et en Amérique latine, la plupart des pays sont toujours en butte à l’agression et à l’oppression impérialistes, ils sont toujours sous l’asservissement colonialiste et néocolonialiste. Ces dernières années, de nombreux pays sont devenus indépendants, mais leur économie se trouve toujours sous l’emprise du capital monopoliste étranger. Les vieux colonialistes ont été chassés de certains pays, mais les néocolonialistes, plus puissants et dangereux, ont fait irruption, menaçant gravement l’existence de nombreuses nations. La lutte que les peuples de ces régions ont à mener contre l’impérialisme est bien loin d’être accomplie. Même notre pays, la Chine, qui a achevé sa révolution nationale et démocratique et fait triompher la révolution socialiste, a encore pour tâche de lutter contre l’agression des impérialistes américains qui occupent toujours notre territoire sacré du Taïwan. Nombre de Pays impérialistes ne reconnaissent toujours pas l’existence de la grande République populaire de Chine, notre pays se voit jusqu’ici injustifiablement privé de son siège légitime à l’O.N.U. La lutte contre l’impérialisme, le colonialisme et le néocolonialisme reste pour les nations et les peuples opprimés des vastes régions d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine la tâche primordiale, la plus urgente.
Les changements intervenus dans le monde durant les seize dernières années confirment sans cesse que les contradictions entre, d’une part, la politique d’asservissement poursuivie par les impérialistes américains et les peuples du monde d’autre part, les contradictions qui opposent la politique d’expansion mondiale, pratiquée par l’impérialisme américain, aux autres puissances impérialistes, constituent le point de convergence des contradictions dans le monde après la Seconde guerre mondiale. Celles-ci sont illustrées, plus particulièrement, par les contradictions entre les impérialistes américains et leurs laquais d’une part, et les nations et peuples opprimés d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine d’autre part, ainsi que par celles entre les colonialistes et les néocolonialistes qui se disputent ces régions.
Prolétaires de tous les pays et peuples opprimés, unissez-vous !
L’Asie, l’Afrique et l’Amérique latine ont été de longue date l’objet des rapines et de l’oppression des colonialistes européens et américains. Ces derniers se sont emparés d’immenses richesses dans ces vastes régions et s’en sont engraissés. Le sang et la sueur des peuples de ces régions leur servant d’ « engrais pour la culture et la civilisation capitalistes » (V. I. Lénine : Rapport au Ile Congrès de Russie des Organisations communistes des Peuples d’Orient Œuvres, tome 30), il en est résulté chez ces peuples une misère extrême et un immense retard sur le plan économique et culturel. Mais l’excès appelle la révolte. La politique d’asservissement pratiquée de longue date par ces oppresseurs étrangers, ces colonialistes et impérialistes a eu pour conséquence inévitable de leur valoir la haine des peuples de ces régions, de faire prendre conscience à ceux-ci et de les obliger à se dresser dans des luttes continuelles allant jusqu’à la résistance ou l’insurrection armées afin d’assurer leur propre existence et celle de leur nation. Ceux qui n’acceptent pas l’asservissement comprennent les couches sociales les plus larges : non seulement les ouvriers, paysans, artisans, petits bourgeois, intellectuels, mais aussi les éléments de la bourgeoisie nationale patriote et même certains éléments patriotes de la noblesse.
La résistance que les peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine opposent au colonialisme et à l’impérialisme a été sans cesse en butte à des répressions atroces et a essuyé maints échecs. Mais après chaque échec, ils se sont dressés de nouveau et ont repris le combat. Le camarade Mao Zedong a mis en lumière, de façon concise, l’agression de la Chine par les impérialistes, et il a montré comment cette agression a évolué vers son contraire. Lorsqu’en 1949 la grande révolution du peuple chinois remporta sa victoire fondamentale, le camarade Mao Zedong écrivit dans « Rejetez vos illusions et préparez-vous à la lutte » : « Toutes ces guerres d’agression plus l’agression et l’oppression politiques, économiques et culturelles, ont fait naître chez les Chinois la haine contre l’impérialisme, les ont amenés à se demander ce que cela pouvait bien signifier, et les ont obligés à déployer leur esprit révolutionnaire et à s’unir dans la lutte. Lutte, échec, nouvelle lutte, nouvel échec, nouvelle lutte encore ; et ce n’est qu’au bout d’une expérience de 109 ans, faite de centaines de luttes, grandes et petites, militaires et politiques, économiques et culturelles, avec ou sans effusion de sang, que le peuple chinois a remporté la victoire fondamentale d’aujourd’hui ». (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome IV)
L’expérience de la lutte du peuple chinois revêt une signification actuelle pour la lutte de libération populaire de nombreux pays et territoires d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. La Grande Révolution d’Octobre a uni la lutte révolutionnaire du prolétariat au mouvement de libération des nations opprimées et a ainsi frayé un chemin nouveau à la lutte de ces dernières pour leur libération. La réussite de la révolution du peuple chinois est, pour les nations opprimées, un magnifique exemple de victoire.
Suite à la Révolution russe d’Octobre et à la révolution chinoise, la lutte révolutionnaire du peuple a pris une ampleur sans précédent dans de vastes régions d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. Et les faits n’ont cessé de montrer que si les luttes dans ces régions connaissent parfois des revers, les impérialistes et leurs valets sont, de toute façon, dans l’impossibilité de résister à ce torrent.
A l’heure actuelle, les pays impérialistes d’Europe et d’Amérique se trouvent encerclés par les peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine en lutte pour leur libération. Cette lutte est un appui de la plus grande portée pour la lutte de la classe ouvrière d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord.
Marx, Engels et Lénine ont toujours considéré la lutte des paysans des pays capitalistes et la lutte des peuples des colonies et des pays dépendants comme deux grandes alliées directes de la révolution prolétarienne des pays capitalistes.
Comme chacun le sait, Marx a formulé l’espoir suivant en 1856 : « Tout dépendra en Allemagne de la possibilité de faire appuyer la révolution prolétarienne par une réédition de la guerre des paysans. » (V. I. Lénine : « Karl Marx (Brève notice biographique comportant un exposé du marxisme), Préface », Œuvres, tome 21) Et Lénine a dénoncé sévèrement les « héros » de la Ile Internationale qui avaient éludé cette indication expresse de Marx énoncée « dans sa correspondance se rapportant … à 1856, où il formulait l’espoir de voir se réaliser, en Allemagne, l’union de la guerre paysanne, capable de créer une situation révolutionnaire, au mouvement ouvrier. Même cette indication expresse, ils l’éludent, ils tournent autour et à côté, comme ferait un chat autour d’une bouillie chaude. » (V. I. Lénine : « Sur notre révolution », Œuvres, tome 33) Parlant de l’importance que l’alliance avec la paysannerie représente pour l’émancipation du prolétariat, Lénine disait : « Ce n’est que dans le renforcement de l’alliance des ouvriers et des paysans que gît la libération générale de toute l’humanité de choses telles que le récent carnage impérialiste, de ces sauvages contradictions que nous apercevons maintenant dans le monde capitaliste. » (V. I. Lénine : « IXe Congrès des Soviets de Russie », Œuvres, tome 33). De son côté, Staline a dit : « …l’indifférence pour une question aussi importante que la question paysanne, à la veille de la révolution prolétarienne, est l’autre face de la négation de la dictature du prolétariat, un indice certain de trahison directe envers le marxisme. » (J. Staline : « Des principes du léninisme », Œuvres, tome 6.)
On se rappelle aussi la phrase célèbre de Marx et d’Engels : « Un peuple qui en opprime d’autres ne saurait être libre ». En 1870, se basant sur la situation de l’époque, Marx prédisait : « Après m’être penché pendant bien des années sur la question de l’Irlande, j’en suis arrivé à la conclusion que le coup fatal aux classes dominantes anglaises … ne saurait être porté en Angleterre, mais seulement en Irlande » (K. Marx : « Lettre à S. Meyer et à A. Vogt ».) Lors de la Révolution des Taiping en Chine, Marx écrivit, en 1853, son célèbre article « La révolution en Chine et en Europe ». Il y disait notamment : « On peut augurer sans crainte de se tromper que la révolution chinoise jettera des étincelles dans la mine bourrée d’explosifs du système industriel d’aujourd’hui et provoquera l’explosion de la crise générale, longtemps mûrie, qui, s’étendant au-delà de l’Angleterre, entraînera directement des révolutions politiques dans le continent européen » (K. Marx & F. Engels : Œuvres complètes, tome 9).
Reprenant et développant la thèse de Marx et d’Engels, Lénine a souligné la grande importance que revêt l’union du prolétariat des pays capitalistes avec les nations opprimées pour la victoire de la révolution prolétarienne. Il estime juste, à notre époque, le mot d’ordre « Prolétaires de tous les pays et peuples opprimés, unissez-vous ! » (Voir V. I. Lénine : « Discours à l’Assemblée des militants actifs de l’organisation de Moscou du Parti communiste (bolchévik) de Russie », Œuvres, tome 31) Et il indiqua : « Le mouvement révolutionnaire des pays avancés ne serait, en fait, qu’une simple duperie sans l’union complète et la plus étroite dans la lutte des ouvriers en Europe et en Amérique contre le capital et des centaines et centaines de millions d’esclaves ’coloniaux ’opprimés par ce capital. » (V.I. Lénine : « Le Ile Congrès de l’Internationale communiste », Œuvres, tome 31)
Staline a repris et développé les théories de Marx, Engels et de Lénine à propos de la question nationale, et a en outre développé la thèse de Lénine selon laquelle la question nationale s’inscrit dans la question générale de la révolution socialiste mondiale. Il a souligné, dans « Des principes du léninisme » :
Le léninisme « … a détruit le mur qui séparait Blancs et Noirs, Européens et Asiatiques, esclaves ’civilisés’ et ’non-civilisés’ de l’impérialisme, et il a rattaché ainsi la question nationale à la question des colonies. Par là même, la question nationale, de question particulière, de question intérieure d’Eta t, est devenue une question générale et internationale, la question universelle de la libération des peuples opprimés des pays dépendants et des colonies, du joug de l’impérialisme » (J. Staline : Œuvres, tome 6)
Dans « La Révolution d’Octobre et la question nationale », Staline dit, en parlant de la portée mondiale de la Révolution d’Octobre, que celle-ci a « jeté . . . un pont entre l’Occident socialiste et l’Orient asservi, en créant contre l’impérialisme mondial un nouveau front de révolutions, qui s’étend des prolétaires d’Occident aux peuples opprimés de l’Orient, en passant par la Révolution russe » ((J. Staline : Œuvres, tome 4)
C’est ainsi que Marx, Engels, Lénine et Staline ont montré avec clarté les deux conditions fondamentales nécessaires au prolétariat européen et américain pour son émancipation et sa victoire. Ils considèrent qu’en tant que condition extérieure, le développement de la I lutte pour la libération nationale assènera un coup décisif aux classes dominantes des métropoles capitalistes.
Ainsi qu’on le sait, le camarade Mao Zedong puissamment contribué à mettre en lumière les thèses de Marx, Engels, Lénine et Staline sur la question des deux grands alliés du prolétariat dans la lutte pour son émancipation. Et dans la pratique de la révolution chinoise dont il assuma la direction, il a résolu concrètement et I avec succès la question paysanne et celle de la libération nationale, assurant ainsi la victoire de la grande révolution chinoise.
Toutes les luttes pour l’existence menées par les nations opprimées ont eu la chaleureuse sympathie et fait I l’objet des éloges de Marx, Engels et Lénine.
Bien que Marx, Engels, et même Lénine n’aient pu voir les impétueuses luttes de libération nationale et de révolution populaire qui se déroulent aujourd’hui en Asie, en Afrique et en Amérique latine, bien qu’ils n’aient pu en voir les victoires successives, les lois qu’ils ont dégagées de l’expérience de la lutte pour la libération nationale de leur époque sont confirmées de plus en plus par les faits. Les grands changements survenus après la Seconde guerre mondiale en Asie, en Afrique et en Amérique latine ne prouvent nullement que le principe marxiste-léniniste de la liaison entre le mouvement de libération nationale et le mouvement révolutionnaire du prolétariat soit périmé, comme certains le prétendent ; bien au contraire, ils ne font qu’apporter des preuves nouvelles de la grande vitalité de ce principe que la pratique des luttes révolutionnaires des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine a encore enrichi.
De là découle une tâche fondamentale, à notre époque, pour le mouvement communiste international : appuyer les luttes révolutionnaires des nations et peuples opprimés d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine ; car elles jouent un rôle décisif pour l’ensemble de la cause du prolétariat mondial. En un certain sens, la cause révolutionnaire du prolétariat mondial dépend, en définitive, de l’issue de la lutte des peuples de ces régions qui constituent l’écrasante majorité de la population mondiale, ainsi que de l’appui qu’elle pourra trouver dans les luttes révolutionnaires de ces mêmes régions.
Ces luttes ne peuvent être étouffées. Elles éclateront, et rien ne peut les en empêcher. Et à moins d’en assumer la direction, les partis prolétariens de ces régions se couperont inévitablement du peuple et ne pourront gagner sa confiance.
Dans la lutte antiimpérialiste de ces régions, les alliés du prolétariat englobent les couches les plus larges. Par conséquent, il faut qu’avec son détachement d’avant-garde, le prolétariat soit aux premiers rangs de la lutte, brandisse le drapeau antiimpérialiste et de l’indépendance nationale et qu’ il sache au mieux organiser ses alliés, former un vaste front uni antiimpérialiste et antiféodal, démasquer les multiples duperies des impérialistes, des réactionnaires et des révisionnistes modernes, orienter la lutte dans la bonne voie, afin de l’acheminer vers la victoire et d’asseoir la victoire de chaque combat sur une base solide. Sans quoi, la lutte révolutionnaire ne saurait être victorieuse, et même si la victoire était remportée, elle ne pourrait être consolidée, les réactionnaires pourraient encore s’emparer de ses fruits, et le pays et la nation se retrouveraient sous le joug impérialiste. Nombreux sont les exemples, de nos jours comme dans le passé, du peuple trahi au cours de la lutte révolutionnaire, et l’échec de la révolution chinoise en 1927 est un de ces exemples, et de poids.
De son côté, le prolétariat des pays capitalistes d’Europe et d’Amérique doit être au premier rang pour appuyer la lutte révolutionnaire des nations et peuples opprimés des pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. En l’appuyant il concourt, en fait, à sa propre émancipation. Car, sans le soutien de la lutte révolutionnaire des nations et peuples opprimés d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, le prolétariat et les masses populaires des pays capitalistes d’Europe et d’Amérique ne parviendront pas à se débarrasser des souffrances qu’ils ont à endurer sous l’oppression du capital et de la menace de guerre que l’impérialisme fait peser sur eux. En conséquence, le parti politique du prolétariat des métropoles impérialistes doit considérer comme de son devoir d’écouter la voix des peuples révolutionnaires de ces régions, d’étudier leurs expériences de lutte, de respecter leurs sentiments révolutionnaires, d’agir en coordination avec leur lutte révolutionnaire. Il n’a pas le moindre droit d’a buser de sa qualité d’aîné, de son ancienneté, de jouer au grand seigneur, de se pavaner, ou d’afficher envers ces peuples un arrogant et superbe mépris, comme le camarade Thorez qui déplore leur « jeunesse et inexpérience » (M. Thorez : Rapport présenté le 15 décembre 1960 au Comité central du Parti communiste français) A plus forte raison, ils ont encore moins le droit d’adopter une attitude social-chauvine pour calomnier, maudire, menacer et entraver la lutte révolutionnaire des peuples de ces régions. Il faut bien savoir, comme l’enseigne le marxisme-léninisme, que si un parti ouvrier d’une métropole impérialiste n’a pas une position juste, une ligne et une politique justes à l’égard des mouvements de libération nationale et des mouvements révolutionnaires des peuples des pays d’Asie , d’Afrique et d’Amérique latine, il lui est impossible d’avoir une position, une ligne et une politique justes pour la lutte de la classe ouvrière et des masses populaires dans son propre pays.
Les mouvements de libération nationale et les mouvements révolutionnaires des peuples des pays d’Asie d, ’Afrique et d’Amérique latine constituent un appui puissant et une force très importante qui assure les pays socialistes contre l’agression de l’impérialisme .Il ne fait pas de doute que les pays socialistes doivent témoigner une chaleureuse sympathie et donner un soutien actif à ces mouvements, et ne jamais afficher de complaisance gratuite, par manière d’acquit, agir en nationalistes égoïstes ou faire montre de chauvinisme de grande nation ; il est encore moins admissible de chercher à les empêcher de se dérouler, à les entraver ou à les trahir ou les torpiller. Les pays où le socialisme a triomphé doivent considérer comme un devoir internationaliste sacré le soutien aux luttes de libération nationale de tous les pays et aux luttes révolutionnaires des peuples. Certains estiment que pour les pays socialistes, ce soutien n’est qu’un « fardeau », un devoir unilatéral. C’est là un point de vue tout à fait erroné, anti-marxiste-léniniste. On doit savoir que ce soutien est bilatéral, réciproque. Les pays socialist.es apportent leur soutien aux luttes révolutionnaires des peuples de tous les pays et, en retour, les luttes révolutionnaires de ces peuples contribuent à soutenir et à défendre les pays socialistes. Sur ce point, Staline a dit très justement : « La particularité caractéristique de cette aide du pays victorieux, ce n’est pas seulement qu’elle accélère la victoire des prolétaires des autres pays, mais aussi que, facilitant cette victoire, elle assure par là même la victoire définitive du socialisme dans le premier pays victorieux. » (J. Staline : « La Révolution d’Octobre et la tactique des communistes russes », Œuvres, tome 6)
Il y a des gens qui estiment qu’à l’heure actuelle, le principal moyen pratique par lequel les pays socialistes devraient faire face à l’impérialisme est d’engager avec lui une compétition économique pacifique. La lutte de libération nationale, la lutte révolutionnaire des peuples, la dénonciation de l’impérialisme, etc., etc., ne seraient qu’un « moyen, sans doute le meilleur marché, de lutter », « des procédés de sorciers et de rebouteurs ». Tels de riches seigneurs pleins de miséricorde, ils disent aux peuples de ces régions : N’affichez pas un « courage factice », ne provoquez pas d’ »étincelles », ne cherchez pas à « mourir noblement ». Vous ne devez pas « manquer de foi dans la possibilité de vaincre le régime capitaliste dans la compétition économique pacifique », attendez jusqu’au moment où le socialisme aura complètement battu le capitalisme dans le domaine du développement des forces productives et, alors, naturellement, vous aurez tout ce qu’il faut ; quant à l’impérialisme il s’écroulera alors de lui-même. Chose étrange, ces gens-là craignent comme la peste les luttes révolutionnaires des peuples de ces régions. Pareille attitude n’a rien de marxiste-léniniste, elle est entièrement contraire aux intérêts des nations et des peuples opprimés et à ceux du prolétariat et du peuple travailleur du pays intéressé ; elle est également entièrement contraire aux intérêts des pays socialistes eux-mêmes.
Bref, à l’heure actuelle, la situation est excellente pour les peuples du monde. Cette situation est des plus favorables aussi bien pour les nations et peuples opprimés des pays d’Asie, d’Afrique t d’Amérique latine que pour le prolétariat et le peuple travailleur des pays capitalistes, les pays socialistes et la cause de la paix mondiale.
Cette situation n’est mauvaise que pour l’impérialisme, les réactionnaires de tous les pays et les forces d’agression et de guerre. Dans une telle situation, l’attitude adoptée à l’égard de la lutte révolutionnaire des nations et des peuples opprimés des pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine est un critère important qui permet de distinguer entre révolution et non-révolution, entre internationalisme et social-chauvinisme, entre marxisme-léninisme et révisionnisme moderne, et aussi de distinguer ceux qui défendent réellement la paix mondiale de ceux qui encouragent les forces d’agression et de guerre.
Brèves conclusions
Nous récapitulons ici les vues exposées plus haut sur la situation internationale :
Premièrement : L’impérialisme américain est l’ennemi commun de tous les peuples du monde, le gendarme international réprimant les justes luttes des peuples, le principal bastion du colonialisme contemporain. Il a fait des efforts insensés, après la guerre, pour s’approprier les vastes zones intermédiaires situées entre les Etats-Unis et les pays socialistes, pour asservir non seulement les vaincus et leurs anciennes colonies et sphères d’influence, mais aussi contrôler ses alliés du temps de guerre, usant de tous les moyens pour réaliser sa mainmise sur leurs anciennes colonies et sphères d’influence. Mais il est encerclé par les peuples du monde ; ses folles ambitions l’ont voué à un isolement de plus en plus complet parmi les pays impérialistes, et, en réalité, ses forces ne cessent de décliner alors que s’élargit continuellement le front uni des peuples du monde contre l’impérialisme ayant à sa tête les Etats-Unis. Le peuple américain, les nations et peuples opprimés du monde pourront vaincre l’impérialisme américain par leurs luttes. La situation n’est rien moins que brillante chez les impérialistes et les réactionnaires de tous les pays, ayant les Etats-Unis à leur tête ; par contre la puissance des peuples ne cesse de croître.
Deuxièmement : Les luttes entre les puissances impérialistes qui se disputent débouchés et zones d’influence, en Asie, Afrique, Amérique latine et même en Europe occidentale les ont amenées à de nouvelles divisions et de nouveaux regroupements. Les contradictions et les conflits entre pays impérialistes sont un fait objectif déterminé par la nature du système impérialiste. Vus sous l’angle des intérêts pratiques des pays impérialistes, ils sont, bien plus alarmants, directs et réels que les contradictions entre ces pays et les pays socialistes. Ne pas en avoir conscience revient à nier l’exacerbation des contradictions provoquées par le développement inégal du capitalisme au stade de l’impérialisme, il devient alors impossible de comprendre la politique, réelle de l’impérialisme et, dans ces conditions, impossible pour les communistes d’élaborer une ligne et une politique justes pour le combattre.
Troisièmement : Le camp socialiste est le plus solide bastion de la défense de la paix mondiale, de la cause de la justice. La consolidation et le renforcement continuels de ce bastion empêcheront d’autan pt lus les impérialistes de l’attaquer à la légère. Car ils savent que l’attaquer est une entreprise par trop risquée, une entreprise dont ils ne retireraient que les plus grands déboires, et qui mettrait jusqu’à leur existence en jeu.
Quatrièmement : D’aucuns tiennent, d’une manière simpliste, pour seules contradictions du monde actuel celles entre camp socialiste et camp impérialiste, ils ne voient pas, ou veulent en fait voiler les contradictions qui opposent les impérialistes, les colonialistes et néocolonialistes, et les valets de tout ce monde, aux nations et peuples opprimés d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine ; ils ne voient pas, ou veulent en fait voiler les contradictions entre les pays impérialistes ; ils ne voient pas, ou veulent en fait voiler le point de convergence des contradictions du monde actuel. Nous ne pouvons être d’accord avec ce point de vue.
Cinquièmement : D’aucuns, tout en reconnaissant qu’il existe des contradictions entre le camp socialiste et le camp impérialiste, estiment qu’il suffit de supprimer ce qu’ils appellent « l’existence et l’opposition des deux grands blocs militaires » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien) ou qu’ il suffit aux pays socialistes de lancer « aux classes dirigeantes bourgeoises un défi pour une compétition pacifique » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien) pour que, pratiquement, ces contradictions disparaissent, et que système socialiste et système capitaliste se fondent en un seul. N ne pouvons être d’accord avec ce point de vue.
Sixièmement : le développement du capitalisme monopoliste d’Etat dans les pays impérialistes provient de ce que la bourgeoisie monopoliste veut renforcer par tous les moyens, et non pas laisser s’affaiblir les positions dominantes qu’elle détient dans le pays et sa position dans la concurrence à l’étranger. De même, si les impérialistes de tous les pays s’emploient fiévreusement à renforcer leur machine de guerre, ce n’est pas seulement pour piller les autres nations et éliminer leurs concurrents à l’étranger, c’est aussi pour opprimer encore davantage le peuple de leur propre pays.
Dans les pays impérialistes, la soi-disant démocratie bourgeoise s’est avérée encore plus ouvertement comme une dictature de la tyrannie exercée par une poignée d’oligarques monopolistes sur les esclaves salariés et les grandes masses.
N’est-ce pas du subjectivisme le plus fantaisiste que d’affirmer que, dans ces pays, le capitalisme monopoliste d’Etat est en voie de passer graduellement au socialisme, que le peuple travailleur peut accéder ou participer déjà à la direction de l’Etat, et d’en déduire qu’ « en fait, il existe aujourd’hui, dans le monde capitaliste, une poussée pour des transformations structurelles et des réformes de caractère socialiste ? » (P. Togliatti : Rapport au Xème Congrès du Parti communiste italien)
L’histoire n’appartient pas aux impérialistes et aux réactionnaires, qui ont les Etats-Unis à leur tête, elle est aux peuples du monde. Sentant la faillite approcher, ils cherchent désespérément une issue. Et dans leur imagination délirante, ils ont musé sur un prétendu « conflit sino-soviétique. » Il y a longtemps que les impérialistes et leurs porte-parole ont répandu cette idée. Les inqualifiables attaques et calomnies lancées ces derniers temps contre le Parti Communiste chinois par les révisionnistes modernes et leurs partisans les ont encore encouragés dans la poursuite de cette chimère. Ils exultent et s’en donnent à cœur joie pour semer la discorde. Mais ces rêveurs réactionnaires ont par trop sous-estimé la grande force de l’amitié des peuples chinois et soviétique et celle de la solidarité internationale prolétarienne, et par trop surestimé le rôle que jouent les révisionnistes modernes et leurs partisans. L’histoire balayera un jour toutes leurs illusions, et ce seront ces réactionnaires hallucinés qui connaîtront l’échec.
L’erreur de Togliatti et d’autres camarades consiste en ce que leurs Thèses, rapports et conclusions touchant à la situation internationale sont foncièrement en divorce avec l’analyse scientifique marxiste-léniniste, avec l’analyse de classe.
Lénine a raillé les populistes : « Toute leur philosophie se résout en lamentations sur ce thème : il y a la lutte et l’exploitation, mais elle ‘pourrait bien’ ne pas exister si…s’il n’y avait pas d’exploiteurs. » Il disait qu’ils « s’accommodaient toute leur vie de ‘si’ et de ‘car’ » (V.I. Lénine : « Ce que sont les ‘amis du peuple’ et comment ils luttent contre les social-démocrates », Œuvres tome I)
Un marxiste-léniniste n’a pas à se comporter comme un populiste !
Cependant, le fondement et l’argumentation des Thèses et rapport de Togliatti et d’autres camarades reposent justement sur une utilisation recherchée des « si » et des « car « . Et c’est pour cela que les conceptions nouvelles qu’ils ont élaborées ne peuvent être autre chose qu’un amas de notions fort confuses.
Le problème a ses racines dans les lois mêmes du développement social, il n’a rien d’une supposition toute subjective
Ces dernières années, de soi-disant « marxistes-léninistes » ont discouru sans fin, écrit des quantités d’articles sur la guerre et la paix, et noyé le marché sous une masse de livres et de brochures. Mais ils n’ont pas manifesté le moindre désir d’étudier sérieusement où gît l’origine même de la guerre, la nature différente des guerres et où est la voie qui permettra d’en finir avec la guerre.
Les anarchistes exigeaient que l’Etat soit supprimé du jour au lendemain. Aujourd’hui, alors que le système capitaliste et le système d’exploitation existent encore, des gens qui se prétendent « marxistes-léninistes » voudraient qu’apparaisse un beau matin « un monde sans armes, sans armées et sans guerres ». Ils proclament fièrement que c’est là « une grande découverte faisant époque », « un changement révolutionnaire de la conscience humaine », une « contribution créatrice » au marxisme-léninisme. Et un des crimes qu’ils reprochent aux « dogmatiques », c’est que ceux-ci se refusent à accepter le cadeau scientifique qui leur est fait.
Il semble que le camarade Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien colportent ce cadeau avec zèle. Ils prétendent que la seule stratégie à adopter pour créer un nouveau monde « sans guerres » est la « stratégie pour la coexistence pacifique », telle qu’ils l’interprètent .Mais celle-ci diffère totalement par le contenu de la politique de coexistence pacifique avancée par Lénine après la Révolution d’Octobre et approuvée par tous les marxistes-léninistes.
Dominée par la bourgeoisie monopoliste, l’Italie possède actuellement, en temps de paix, une armée permanente de plus de 400.000 hommes destinée à écraser le peuple, quelque 100.000 hommes en armes dans la police et près de 80.000 dans la gendarmerie, sans parler des bases militaires américaines équipées de fusées balistiques. Alors, dans un pays comme celui-ci, quel sens cela a-t-il, quand vous, camarade Togliatti et d’autres camarades, demandez « la paix et la coexistence pacifique » ? Si vous demandez au gouvernement italien de suivre une politique de paix et de neutralité et de pratiquer la coexistence pacifique avec les pays socialistes, évidemment, c’est juste. Mais à part cela, demandez-vous encore à la classe ouvrière et aux autres masses opprimées d’Italie d’adopter cette politique « de paix et de coexistence pacifique » avec la bourgeoisie monopoliste ? Cette sorte de « paix et coexistence pacifique » implique-t-elle que les impérialistes américains enlèveront d’eux-mêmes leurs bases militaires d’Italie et, que les capitalistes monopolistes italiens déposeront d’eux-mêmes les armes et dissoudront leurs armées ? Et si ceci est une impossibilité, comment pourrait-il y avoir, en Italie, « paix et coexistence pacifique » entre classe des oppresseurs et classe opprimée ? Et, d’une manière plus large, comment « un monde sans guerres » pourrait-il être créé ?
Evidemment, ne serait-ce pas admirable si, en fait, « un monde sans armes, sans armées et sans guerres » pouvait surgir ? Pourquoi n’approuverions-nous pas de tout cœur ?
Pour les marxistes-léninistes cependant, le problème a de toute évidence, ses racines dans les lois mêmes du développement social, il n’a rien d’une supposition toute subjective.
Dans Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine qu’il écrivit en 1936, le camarade Mao Zedong dit : « La guerre, ce monstre qui sème le massacre entre les hommes, sera en définitive éliminée au cours du développement de la société humaine » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome I)
Cet idéal, le camarade Mao Zedong l’affirma une fois de plus, en 1938, pendant la Guerre de Résistance contre le Japon, dans son ouvrage De la guerre prolongée. Il y dit à ce sujet : « Les fascistes et les impérialistes veulent que les guerres se poursuivent indéfiniment. Quant à nous, nous voulons mettre un terme aux guerres dans un avenir pas très lointain » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome II)
Dans ce même ouvrage, le camarade Mao Zedong déclara que la guerre par laquelle la nation chinoise cherchait à se libérer visait à une paix perpétuelle ; que « notre Guerre de Résistance a le caractère d’une guerre pour la paix perpétuelle » (Mao
Zedong : Œuvres choisies, tome II)
Le camarade Mao Zedong y dit aussi que la guerre est née « par suite de l’apparition des classes » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome II) Et il ajouta : « Dès que l’humanité aura liquidé le capitalisme, elle entrera dans l’ère de la paix perpétuelle et elle n’aura plus besoin de guerres. Il n’y aura plus besoin d’armées, de vaisseaux de guerre, d’avions militaires ni de gaz toxiques. Dans tous les siècles des siècles, l’humanité ne connaîtra plus jamais de guerres » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome II)
Ce point de vue du camarade Mao Zedong correspond entièrement à celui sans cesse exposé par Lénine au sujet de la guerre et de la paix.
En 1905, lors de la première révolution russe, Lénine écrivait :
« Les social-démocrates n’ont jamais considéré et ne considèrent pas la guerre d’un point de vue sentimental. Tout en condamnant résolument les guerres en tant que méthode brutale pour résoudre les différends de l’humanité, les social-démocrates savent que les guerres sont inévitables aussi longtemps que la société est divisée en classes, aussi longtemps que l’exploitation de l’homme par l’homme existe. Et nous ne réussirons pas à en finir avec cette exploitation sans des guerres que commencent toujours et partout les classes exploiteuses, dominantes et oppresseuses elles-mêmes » (V. I. Lénine : « L’Armée révolutionnaire et le gouvernement révolutionnaire », Œuvres, tome 8)
En 1915, lors de la Première guerre mondiale impérialiste, il disait :
Les marxistes « ont toujours condamné les guerres entre les peuples comme une entreprise barbare et bestiale. Mais notre attitude à l’égard de la guerre est foncièrement différente de celle des pacifistes (partisans et propagandistes de la paix) bourgeois et des anarchistes. Nous nous distinguons des premiers en ce sens que nous comprenons le lien inévitable qui rattache les guerres à la lutte des classes à l’intérieur du pays, que nous comprenons qu’il est impossible de supprimer les guerres sans supprimer les classes et sans instaurer le socialisme ; et aussi en ce sens que nous reconnaissons parfaitement la légitimité, le caractère progressiste et la nécessité des guerres civiles, c’est-à-dire des guerres de la classe opprimée contre celle qui l’opprime, des esclaves contre les propriétaires d’esclaves ,des paysans serfs contre les seigneurs terriens, des ouvriers salariés contre la bourgeoisie. Nous autres, marxistes, différons des pacifistes aussi bien que des anarchistes en ce sens que nous reconnaissons la nécessité d’analyser historiquement (du point de vue du matérialisme dialectique de Marx) chaque guerre prise à part » (V. I. Lénine : « Le Socialisme et la guerre », Œuvres, tome 21)
Durant la Première guerre mondiale, Lénine, en marxiste éminemment consciencieux, consacra le plus gros de ses efforts à l’étude du problème de la guerre, l’analysant scientifiquement et dans les moindres détails. Il réfuta énergiquement les stupides arguments sur la guerre et la paix des opportunistes et des révisionnistes à la Kautsky et montra à l’humanité la juste voie menant à la suppression de la guerre.
Aujourd’hui, il se trouve cependant des gens se prétendant « léninistes » qui parlent à tort et à travers de la guerre et de la paix sans vouloir tenir aucun compte ni des méthodes dont Lénine s’est servi pour examiner la guerre ni des conclusions scientifiques auxquelles il est arrivé dans l’étude de la question de la guerre et de la paix. Et malgré cela, ils accusent bruyamment les autres de trahir Lénine et prétendent qu’ils sont les seuls à « personnifier Lénine ».
La thèse : « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens » est-elle périmée ?
Certains diront peut-être : Inutile de dépenser tant de salive. Nous connaissons aussi bien que vous les points de vue de Lénine sur la guerre et la paix, mais les circonstances ayant changé depuis, ces points de vue sont maintenant périmés.
La clique Tito fut la première à traiter ouvertement la théorie fondamentale de Lénine sur la guerre et la paix de périmée. Elle estime que la thèse : « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens », sur laquelle Lénine insistait comme étant la base théorique pour l’étude des guerres et la détermination de leur caractère n’est plus valable depuis l’apparition de l’arme atomique. D’après elle, les guerres ne sont plus, désormais, le prolongement de la politique d’une classe ou d’une autre, elles n’ont plus un contenu de classe, et on ne peut plus les différencier en guerres justes et injustes. En avançant que le caractère des guerres a changé avec les techniques militaires modernes, Togliatti et d’autres camarades ne font, en fait, que répéter ce que la clique Tito dit depuis longtemps.
Il est évident que les impérialistes et les réactionnaires des différents pays ne se débarrasseront pas de leurs armes, ne cesseront pas de réprimer les peuples et les nations sous leur joug, ne renonceront pas aux activités d’agression et de subversion contre les pays socialistes, parce que les révisionnistes modernes répudient la thèse : « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens », ni ne mettront-ils fin pour cela aux conflits qui les opposent et qui ont pour origine la lutte pour les surprofits. En fait, les révisionnistes modernes s’efforcent, par de tels arguments, d’influencer les peuples et les nations opprimés, de les désorienter, en leur donnant l’impression que les actes de guerre des impérialistes contre les peuples et les nations opprimés, l’accroissement de leurs armements et leurs préparatifs de guerre, ainsi que leurs conflits armés directs ou indirects pour des débouchés et sphères d’influences ne seraient pas le prolongement de la politique impérialiste. C’est ainsi que la guerre menée par les impérialistes américains pour réprimer le peuple sud-vietnamien et celle qui a éclaté au Congo, à l’instigation des colonialistes et des néocolonialistes, ne seraient pas le prolongement de la politique impérialiste.
Les opérations militaires poursuivies par les impérialistes américains au Sud-Vietnam et les conflits armés au Congo entre colonialistes et néo-colonialistes peuvent-ils être considérés comme des guerres ? S’ils ne peuvent l’être, alors que sont-ils ? Et si ce sont effectivement des guerres, y a-t-il un rapport entre elles et le régime et la politique de l’impérialisme américain ? Si oui, quel est ce rapport ?
Le camarade Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien estiment qu’ « il est possible d’éviter de petites guerres locales » (Voir Interventions de la délégation du Parti communiste italien à la Conférence des 81 Partis communistes et ouvriers, publié en janvier 1962 par la Section de Presse et de Propagande du Comité central du Parti communiste italien) ; ils soutiennent également que « la guerre deviendra impossible dans la société humaine, même si le socialisme n’a pas encore vaincu partout » (Voir Interventions de la délégation du Parti communiste italien à la Conférence des 81 Partis communistes et ouvriers, publié en janvier 1962 par la Section de Presse et de Propagande du Comité central du Parti communiste italien) Ce sont là probablement les conclusions qu’ils ont tirées après « nouvelles réflexions » sur « notre doctrine elle-même ». C’est en novembre 1960 que Togliatti et d’autres camarades ont tenu ces propos. Or, même en laissant de côté les événements ayant eu lieu avant 1960, nous voyons qu’en cette même année 1960, il s’est produit dans diverses parties du monde différents conflits et interventions armés appartenant pour la plupart à la catégorie qualifiée par Togliatti et d’autres camarades de « petites guerres locales » :
1960 était la sixième année de la guerre de répression entreprise par l’armée coloniale française contre le mouvement de libération nationale de l’Algérie.
Cette année-là, la brutale oppression que continuent à exercer les impérialistes américains et leur valet Ngo dinh Diem suscite un redoublement de la résistance armée du peuple sud-vietnamien.
En janvier et février, il y a des chocs armés entre la Syrie et Israël soutenu par les Etats-Unis.
Le 5 février, 4.000 marines américains débarquent en République dominicaine et interviennent par les armes dans les affaires intérieures de ce pays.
Le 1er mai, un U2 américain s’introduit dans l’espace aérien soviétique et est abattu par des unités soviétiques armées de fusées.
Le 10 juillet, la Belgique intervient par les armes au Congo ; et le 13, le Conseil de Sécurité de l’O.N.U adopte une résolution prévoyant l’envoi des « troupes de l’O.N.U. » au Congo pour y réprimer le mouvement de libération nationale.
En août, au Laos, grâce au soutien des Etats-Unis, la clique de Savannakhet déclenche la guerre civile.
Les événements de 1960 ne sont peut-être pas du domaine auquel Togliatti et d’autres camarades faisaient allusion ; serait-ce alors les événements mondiaux des années 1961 et 1962 qui confirmeraient leur prédiction ?
Voyons les faits :
Les forces coloniales françaises poursuivirent leur guerre criminelle contre le mouvement de libération nationale de l’Algérie jusqu’au jour où elles furent contraintes d’y mettre fin, en mars 1962. Cette guerre avait duré plus de sept ans. La « guerre spéciale » contre le peuple menée par les impérialistes américains au Sud-Vietnam se poursuit à ce jour.
Les « troupes de l’O.N.U. »(en majeure partie des soldats indiens), au service des néo-colonialistes américains, continuent à réprimer le peuple congolais. Au début de 1961, le héros national congolais Lumumba est assassiné par les valets des impérialistes américano-belges, à l’instigation de ces derniers. De septembre 1961 à fin 1962, les « troupes de l’O.N.U. », contrôlées par les Etats-Unis, ont déjà lancé trois attaques armées contre la province du Katanga, contrôlée par les colonialistes britanniques, français et belges.
En mars 1961, soutenus par l’impérialisme américain, les colonialistes portugais concentrent des troupes et entreprennent des opérations d’envergure, réprimant et massacrant le peuple angolais qui exige l’indépendance nationale. Cette criminelle et sanglante opération se poursuit toujours.
Le 17 avril 1961, des mercenaires américains passent à l’agression armée contre Cuba ; ils sont complètement anéantis en 72 heures sur la plage Giron par l’armée et le peuple héroïques de Cuba.
Le 1er juillet 1961, des troupes britanniques débarquent à Koweït. Le 19, des troupes françaises attaquent le port tunisien de Bizerte.
Les 19 et 20 novembre 1961, les Etats-Unis interviennent de nouveau en République dominicaine, avec des bâtiments de guerre et des avions militaires.
Le 15 janvier 1962, les forces navales des colonialistes néerlandais attaquent des unités navales indonésiennes au large des côtes de l’Irian occidental.
En avril 1962, le peuple indonésien déclenche une guerre de partisans contre les colonialistes néerlandais en Irian occidental.
En mai 1962, les Etats-Unis fomentent au Laos une guerre civile élargie et cherchent à intervenir directement par les armes. Le 17, des troupes américaines entrent en Thaïlande ; le 24, la Grande-Bretagne y envoie aussi une escadrille aérienne. Ces actions militaires des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne menacent directement la paix dans le Sud-Est asiatique. Grâce à la lutte résolue du peuple du Laos et aux efforts conjugués des pays socialistes et des Etats neutres, la Conférence élargie de Genève pour un règlement pacifique de la question laotienne aboutit à la signature, le 23 juillet 1962, de la « Déclaration sur la neutralité du Laos », ainsi que d’un « Protocole » s’y rapportant.
Le 24 août 1962, des navires américains bombardent les quartiers résidentiels de la plage de La Havane.
Le 26 septembre 1962, un coup d’Etat militaire éclate au Yémen, et les Etats-Unis poussent l’Arabie saoudite à intervenir par les armes.
En 1962, avec le soutien de l’impérialisme américain, le gouvernement Nehru effectue de fréquentes incursions armées en territoire chinois ; le 20 octobre, ce gouvernement déclenche une offensive militaire de grand style sur la frontière sino-indienne.
Le 22 octobre 1962, les Etats-Unis, agissant en véritables pirates, font le blocus militaire de Cuba et se livrent à des provocations de guerre contre ce pays. L’événement bouleverse le monde. La lutte du peuple cubain pour la défense de sa souveraineté nationale, lutte soutenue par les pays socialistes et tous les peuples du monde ; aboutit à une grande victoire.
Au cours des deux dernières années, la cruelle exploitation, la sauvage répression et l’intervention armée entreprises par les impérialistes et leurs laquais ont continué à susciter la résistance armée des peuples dans de nombreux pays et celle des nations opprimées, notamment le soulèvement armé antibritannique du peuple du Brunei, le 8 décembre 1962.
Les faits ont confirmé maintes et maintes fois les vérités énoncées par Lénine sur ce que « toujours et partout » les guerres sont commencées par « les classes exploiteuses, dominantes et oppresseuses elles-mêmes », et « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Les réalités d’aujourd’hui et de demain confirmeront encore ces vérités mises en lumière par Lénine.
Que nous apprennent l’histoire et la réalité présente ?
Etant donné que les impérialistes et les réactionnaires suscitent sans cesse des guerres dans différentes Parties du monde, pour les besoins de leur politique, il est impossible d’empêcher les peuples et nations opprimés de mener des guerres de résistance à l’oppression.
Ceux qui se prétendent « marxistes-léninistes » peuvent ne pas considérer comme des guerres celles que nous venons de citer. Pour eux, les seules guerres sont celles qui se produisent « dans les régions civilisées hautement développées ». En fait, il n’y a rien de neuf dans cette manière de voir.
Lénine a critiqué, il y a longtemps, l’absurdité de l’assertion : les « guerres en dehors de l’Europe ne sont pas des guerres ». Dans un discours fait en 1917, il disait ironiquement qu’il y a des « guerres que nous, Européens, ne considérons pas comme telles, car trop souvent elles ressemblent moins à des guerres qu’à un sauvage massacre, à une extermination de peuples désarmés. » (V.I. Lénine : « La guerre et la révolution », Œuvres, tome 24)
Il existe effectivement aujourd’hui des gens pareils à ceux critiqués par Lénine. Tant qu’il n’y a pas de guerre dans leur pays, ou leurs environs, ils estiment le monde en paix. Ils ne se soucient pas du tout de ce que les impérialistes et leurs laquais se livrent à des atrocités, massacrent le peuple, entreprennent des interventions et conflits armés ou fomentent des guerres. Ce qui les préoccupe, c’est que les « étincelles » jaillissant de la résistance des nations et des peuples opprimés de ces régions ne provoquent une grande catastrophe et viennent troubler leur tranquillité. Ils n’éprouvent nullement le besoin d’étudier comment les guerres se sont produites dans ces régions, quelles classes sociales les mènent, et quelle est la nature de ces guerres. Ils les rejettent sans autre forme de procès. Peut-on dire de ce point de vue qu’il est léniniste ?
Parlant de la guerre, d’autre soi-disant « marxistes-léninistes » ne songent qu’à la guerre entre le camp socialiste et le camp impérialiste, comme si toute guerre autre que celle entre les deux camps était inconcevable. La clique Tito fut également la première à inventer cela, et sur ce point, il s’en est trouvé qui ont joint leur voix à celle de la clique Tito. Ceux-là ne veulent tout bonnement pas voir la réalité, ni prêter attention à l’histoire.
S’ils n’avaient pas la mémoire si courte, ils sauraient que la Première guerre mondiale a commencé alors qu’il n’y avait pas encore de pays socialiste et moins encore de camp socialiste. Et il y eut cependant guerre mondiale.
Bien entendu, s’sil n’étaient pas frappés d’amnésie, ils se rappelleraient aussi que la Seconde guerre mondiale s’est déroulée entre pays impérialistes, dans le monde capitaliste, et cela pendant près de deux ans, de septembre 1939 à juin 1941, date où éclata la guerre germano-soviétique. Pendant ces deux années, la guerre mondiale ne fut nullement une guerre entre pays socialiste et pays impérialistes.
Si après l’attaque de Hitler contre l’Union soviétique, celle-ci devint la force principale dans cette guerre contre les hordes fascistes, il ne convient cependant pas de considérer la Seconde guerre mondiale, après juin 1941, uniquement comme une guerre entre pays socialiste et pays impérialistes. Dans les rangs de ce front antifasciste, il y avait en effet, en plus de l’Union soviétique, pays socialiste, toute une série de pays capitalistes, dont la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, la France et de nombreux pays coloniaux et semi-coloniaux, victimes de l’oppression et de l’agression.
D’où l’on peut conclure que les deux guerres mondiales ont été, l’une comme l’autre, engendrées par les contradictions inhérentes au monde capitaliste, par les conflits d’intérêt entre pays impérialistes, et déclenchées par les pays impérialistes.
La guerre mondiale ne naît pas du système socialiste, car au sein des pays socialistes, il n’existe pas de contradictions sociales antagonistes, qui sont le propre des pays capitalistes. La guerre d’expansion n’est nullement nécessaire, ni admissible, pour un pays socialiste. Jamais la guerre mondiale ne sera déclenchée par un pays socialiste.
De nouveaux et importants changements continuent à se produire dans le monde grâce aux victoires des pays socialistes et à celles du mouvement révolutionnaire national et démocratique* de nombreux pays. Togliatti et d’autres camarades n’ont pas tort de dire que, par les changements intervenus dans le rapport des forces mondiales, l’impérialisme n’a plus les mains libres. En fait, Lénine l’avait déjà remarqué, peu après la Révolution d’Octobre. A la lumière des changements survenus dans le rapport des forces des classes de l’époque, il affirmait :
« Aujourd’hui la bourgeoisie internationale n’a plus les mains libres. » (V. I. Lénine : « Le VIIème Congrès du Parti communiste (bolchevik)) Cependant, qu’il s’agisse du passé, du présent ou de l’avenir a, lors que le rapport des forces mondiales est de plus en plus favorable au socialisme et aux peuples de tous les pays, que nous constatons que les impérialistes ne sont plus libres de faire ce qu’sil veulent, faut-il en déduire la disparition spontanée de toute possibilité de conflit engendré par les contradictions de toutes sortes inhérentes au monde capitaliste ? Faut-il en déduire que les pays impérialistes ne rêvent plus, ni ne se préparent à une attaque contre les pays socialistes ? Faut-il en déduire que les pays impérialistes ne rêvent plus, ni ne se préparent à une attaque contre les pays socialistes ? Faut-il en déduire que les pays impérialistes renoncent à leur agression et leur oppression dans les pays coloniaux et semi-coloniaux ? Faut-il en déduire que les pays impérialistes ne se battront plus à mort pour des débouchés ou des sphères d’influence ? Faut-il en déduire que la bourgeoisie monopoliste s’abstiendra de martyriser et de persécuter son peuple ? Evidemment non.
Le problème de la guerre et de la paix ne sera jamais compris s’il n’est pas envisagé sous l’angle des rapports sociaux, des systèmes sociaux et des lois sociales.
Selon Kautsky, ce vieil opportuniste : « la guerre est le produit de la course aux armements », « si l’on aboutit de plein gré à des accords sur le désarmement », « on tarira une source essentielle de la guerre » (Voir K. Kautsky : « L’Etat national, l’Etat impérialiste et l’Union des Etats ») Lénine a vertement condamné cette façon antimarxiste de Kautsky et d’autres vieux opportunistes d’envisage l’origine de la guerre sans se baser sur le système social, sur le système d’exploitation.
Dans « Le Programme militaire de la révolution prolétarienne », Lénine disait : « C’est seulement après que le prolétariat aura désarmé la bourgeoisie qu’il pourra, sans trahir sa mission historique universelle, jeter à la ferraille toutes les armes en général, et il ne manquera pas de le faire mais alors seulement, et en aucune façon avant. » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 23) Telle est la loi du développement social.
Incapables d’expliquer la guerre et la paix sous l’optique de l’histoire et par la position de classe, les révisionnistes modernes abordent immanquablement ce problème d’une manière simpliste. Ils ne distinguent pas la guerre juste de la guerre injuste. Certains cherchent à nous faire croire qu’une fois réalisé le désarmement général et complet, les oppresseurs n’auront plus d’armes dans les mains et que par conséquent, il sera « plus que jamais facile » aux peuples d’obtenir leur émancipation.
Nous estimons que c’est là parler à tort et à travers, se détacher entièrement de la réalité, invertir l’ordre des choses. Selon le mot de Lénine, ils procèdent ainsi « en vue de réconcilier deux classes ennemies et deux politiques ennemies au moyen d’un vocable ’unissant’ les choses les plus différentes » (V.I. Lénine : La question de la paix, Œuvres tome 21)
La « paix » et la « stratégie pour la coexistence pacifique » des révisionnistes modernes reviennent en fait à fonder l’espoir de gagner la paix mondiale sur la « sagesse » des personnalités dirigeantes de l’impérialisme, au lieu de s’appuyer sur l’union et la lutte des peuples du monde. Tout leur est bon pour entraver le mouvement des peuples en lutte, pour paralyser leur volonté révolutionnaire, pour les faire renoncer à l’action révolutionnaire, afin d’affaiblir les forces qui combattent l’impérialisme et qui défendent la paix mondiale. Cette façon d’agir ne peut avoir pour effet que d’encourager l’insolence réactionnaire des forces impérialistes d’agression et de guerre, et d’accroître le danger d’une guerre mondiale.
Matérialisme historique ou la théorie : « les armes décident de tout » ?
Aux dires des révisionnistes modernes, depuis l’apparition de l’arme atomique, les lois du développement social ne jouent plus et la théorie fondamentale du marxisme-léninisme sur la guerre et la paix est dépassée. Le camarade Togliatti partage cette manière de voir. Nous avons déjà traité, dans l’article du Renmin Rïbao du 31 décembre 1962, des principales divergences entre le camarade Togliatti et nous sur la question de l’arme et de la guerre nucléaires. Nous nous proposons d’étudier ici cette question d’une façon plus approfondie.
Les marxistes-léninistes estiment, correctement et à sa juste valeur, le rôle des armes nouvelles et des techniques militaires nouvelles dans l’organisation des forces armées et dans la guerre. Dans Travail salarié et capital, Marx a écrit ces lignes célèbres : « Par la découverte d’un nouvel engin de guerre, l’arme à feu, toute l’organisation interne de l’armée a été nécessairement modifiée ; les conditions dans lesquelles les individus constituent une armée et peuvent agir en tant qu’armée se sont trouvées transformées, et les rapports des diverses armées entre elles en ont été changés également. » (K. Marx & F. Engels : Œuvres complètes, tome 6)
Toutefois, les marxistes-léninistes n’ont jamais été partisans de la théorie selon laquelle « les armes décident de tout ».
Après la Révolution d’Octobre, Lénine disait : « Celui qui gagne, dans une guerre, est celui qui possède les plus grandes réserves, les plus grandes sources de force, le plus grand soutien de la masse de son peuple. » Et il ajoutait : « De tout cela, nous en avons plus que n’ont les Blancs, et plus que n’en a le ’mondialement puissant’ impérialisme anglo-français, ce, colosse aux pieds d’argile. » (V.I. Lénine : « Le Bilan de la Semaine du Parti à Moscou et nos tâches », Œuvres, tome 30)
Un autre passage de Lénine nous aidera à mieux saisir le problème. Il y est dit : « Dans toute guerre, la victoire dépend, en fin de compte, de l’état d’esprit des masses qui versent leur sang sur le champ de bataille… Le fait que les masses ont pris conscience des buts et des causes de la guerre a une importance considérable : c’est le gage de la victoire. » (V. I. Lénine : « Discours à la Conférence élargie des ouvriers et soldats rouges du quartier Rogojsko-Simonovski », Œuvres, tome 31)
Evaluer à sa juste valeur le rôle de l’homme dans la guerre, voilà un des principes fondamentaux des marxistes-léninistes quant à la guerre, principe trop souvent perdu de vue cependant par certains qui se prétendent « marxistes-léninistes ». Dès l’apparition de l’arme atomique, vers la fin de la Seconde guerre mondiale, certains commencèrent à ne plus voir clair, ils se figurèrent que la bombe atomique serait à même de décider de la guerre. A l’époque, le camarade Mao Zedong disait à ce sujet : « Ces camarades montrent même moins de jugement qu’un pair d’Angleterre… Ces camarades retardent plus que Mountbatten. » (Mao Zedong : « La Situation et notre politique après la victoire dans la Guerre de Résistance contre le Japon », Œuvres choisies, tome IV.) En effet, Lord Mountbatten, alors chef suprême des forces alliées du Sud-Est asiatique, venait de déclarer que « la pire des erreurs serait de croire la bombe atomique capable de mettre fin à la guerre en Extrême-Orient » (Voir Mao Zedong : « La Situation et notre politique après la victoire dans la Guerre de Résistance contre le Japon », note 27, Œuvres choisies tome 4)
Il va sans dire que le camarade Mao Zedong juge à sa juste valeur la puissance de destruction des armes atomiques. « La bombe atomique, dit-il, est une arme qui peut faire d’immenses massacres. » (Mao Zedong : Entretien avec la journaliste américaine Anna Louise Strong, Œuvres choisies tome 4) Le Parti communiste chinois a toujours estimé que l’arme nucléaire est d’une puissance de destruction sans précédent, et que si une guerre nucléaire éclatait, l’humanité connaîtrait une catastrophe sans précédent. C’est précisément pour cette raison que nous avons toujours été pour l’interdiction générale des armes nucléaires, c’est-à dire, l’interdiction complète de leur essai, fabrication, stockage et utilisation. Nous avons toujours été pour la destruction de ces armes. En même temps, nous avons toujours maintenu que, quoi qu’il en soit, l’arme atomique ne peut, en fin de compte, ni modifier les lois du développement historique de la société, ni décider de l’issue de la guerre, ni sauver l’impérialisme de sa ruine, ni empêcher le prolétariat, les peuples de tous les pays et les nations opprimées de triompher dans la révolution.
En septembre 1946, Staline déclarait : « Je ne considère pas la bombe atomique comme une force aussi sérieuse que certains hommes politiques inclinent à le croire. Les bombes atomiques sont destinées à intimider ceux qui ont les nerfs faibles, mais elles ne peuvent décider de l’issue d’une guerre, parce qu’elles sont absolument insuffisantes pour atteindre ce but. Certes, la possession monopolisée du secret de la bombe atomique représente une menace, mais il existe au moins deux remèdes à cet égard : a) la possession monopolisée de la bombe atomique ne peut durer longtemps ; b) l’usage de la bombe atomique sera interdit. » (. Staline : « Entrevue avec M. A. Werth, correspondant du Sunday Times à Moscou », Après la victoire pour une paix durable.) Ces paroles de Staline entrevoyaient bien l’avenir.
Après la Première guerre mondiale, quelques pays impérialistes ont mené grand bruit autour d’une prétendue théorie militaire suivant laquelle la suprématie aérienne, l’attaque par surprise permettrait d’obtenir rapidement la victoire dans une guerre. La Seconde guerre mondiale a démontré l’inanité de cette théorie. Après l’apparition de l’arme nucléaire, des impérialistes ont relancé cette théorie à cor et à cri, fait du chantage nucléaire, estimant que l’arme nucléaire pouvait décider rapidement de l’issue de la guerre. Il est certain qu’une telle théorie est vouée à la faillite. Toutefois, les révisionnistes, tels ceux de la clique Tito, ont entrepris de servir les impérialistes américains et autres, de vanter bruyamment cette théorie afin d’intimider les peuples du monde.
La politique de chantage nucléaire des impérialistes américains révèle leur projet perfide d’asservir le monde, et en même temps leur effroi.
N’oublions pas que si les impérialistes prenaient l’initiative de recourir à l’arme nucléaire, les conséquences en seraient fatales pour eux.
1. Si les impérialistes utilisaient les premiers l’arme nucléaire pour attaquer d’autres pays, ils se retrouveraient inéluctablement dans l’isolement le plus complet sur le plan mondial. Car pareille attaque serait le plus grand crime allant à rencontre de la conception humaine de la justice, ce serait se déclarer l’ennemi de toute l’humanité.
2. En menaçant d’autres pays de l’arme nucléaire, les impérialistes font avant tout planer une menace sur le peuple de leur propre pays, le maintenant sous la terreur de l’arme nucléaire. En s’obstinant dans leur politique de chantage nucléaire, les impérialistes éveilleront progressivement leurs propres peuples, de façon telle que ceux-ci se dresseront contre eux. Après la guerre, les bombardements atomiques ayant été condamnés par toute l’humanité, un aviateur américain qui avait pris part au premier bombardement atomique effectué par les Etats-Unis contre le Japon, tenta de se suicider, et il fut, en conséquence, envoyé à plusieurs reprises dans un « asile d’aliénés « . Ce fait même prouve à quel point est impopulaire la politique de guerre nucléaire de l’impérialisme américain.
3. Le but poursuivi par les impérialistes en faisant la guerre, c’est la conquête de territoires, l’élargissement des débouchés, le pillage des richesses et l’asservissement des travailleurs d’autres pays. Mais la puissance de destruction de l’arme nucléaire les oblige à y réfléchir à deux fois, parce que l’utilisation de cette arme aurait des conséquences contraires, incompatibles avec les intérêts réels qu’ils recherchent.
4. Depuis longtemps, le secret de l’arme nucléaire a cessé d’être un monopole. Tu as l’arme nucléaire, mais tu ne peux empêcher les autres pays de l’avoir ! Tu as le missile, mais tu ne peux empêcher les autres pays de l’avoir ! Les impérialistes qui rêvent de détruire leurs adversaires avec l’arme nucléaire s’exposent eux-mêmes à la destruction.
Ce qui précède a trait aux conséquences qu’entraînerait inévitablement le déclenchement d’une guerre nucléaire par les impérialistes. Et c’est aussi une des raisons importantes pour lesquelles nous avons toujours estimé qu’il est possible de conclure un accord sur l’interdiction générale des armes nucléaires.
Remarquons aussi que la politique d’expansion effrénée des armes nucléaires poursuivie par les impérialistes, en particulier les impérialistes américains, accentue la crise même du système capitaliste-impérialiste. Ce qui se traduit par les faits suivants :
1. Les peuples des pays impérialistes sont obligés de supporter des dépenses militaires d’un poids sans précédent, et l’économie nationale y prend un développement de plus en plus difforme à mesure qu’elle se militarise, accroissant l’opposition du peuple au gouvernement et à sa politique d’expansion des armements et de préparation à la guerre.
2. La course aux armements entreprise par les impérialistes, en particulier la course aux armements nucléaires, accentue la lutte entre les pays impérialistes et celle entre les divers groupes monopolistes de ces pays.
Dans Anti-Dühring écrit pendant les années 70 du XIXe siècle, Engels dit : « Le militarisme domine et dévore l’Europe .Mais ce militarisme porte aussi en lui le germe de sa propre ruine. »
Il est bien plus fondé, aujourd’hui, de dire que la politique d’expansion des armes nucléaires, poursuivie par les impérialistes américains et autres, domine et dévore l’Amérique du Nord et l’Europe occidentale. Mais cette politique, ce nouveau militarisme, porte aussi en elle le germe de la ruine du système impérialiste lui-même.
Aussi est-il évident que la politique d’expansion des armements nucléaires poursuivie par l’impérialisme américain et ses partenaires se révélera comme dirigée contre eux-mêmes. Et s’ils osaient déclencher une guerre nucléaire, il en résulterait leur propre destruction.
Que doit-on en conclure ? Contrairement à « la destruction totale de l’humanité » dont parlent Togliatti et d’autres camarades, la seule conclusion possible est :
Premièrement, l’humanité détruira les armes nucléaires, celles-ci ne détruiront pas l’humanité ;
Deuxièmement, l’humanité fera disparaître le système impérialiste, ce dévoreur d’hommes, le système impérialiste ne fera pas disparaître l’humanité.
Togliatti et d’autres camarades estiment qu’avec l’apparition de l’arme nucléaire, « le destin de l’humanité est aujourd’hui incertain » (Résolution politique du Xe Congrès du Parti communiste italien). Ils estiment que, en présence de l’arme nucléaire et sous la menace de la guerre nucléaire, il ne sert à rien de continuer à discuter du choix de systèmes sociaux. Si l’on adopte ce point de vue, qu’advient-il de la loi du développement social selon laquelle le système capitaliste sera inéluctablement remplacé par le système socialiste et communiste ? Et de la vérité énoncée par Lénine, que l’impérialisme est du capitalisme parasitaire, décadent et moribond ? Le point de vue en question ne relève-t-il pas du « fatalisme », du « scepticisme » et du « pessimisme » les plus purs ?
Dans « Vive le léninisme », nous avons dit :
« Mais pourvu que les peuples de tous les pays élèvent leur conscience et soient complètement prêts, et dans les conditions où le camp socialiste dispose également d’armes modernes, nous pouvons affirmer que si les impérialistes américains ou autres impérialistes se refusent à consentir à un accord sur l’interdiction des armes atomiques et nucléaires et osent un jour « faire fi de la volonté de l’humanité tout entière » en déclenchant une guerre menée au moyen d’armes atomiques et nucléaires, le résultat ne pourra en être que la destruction très rapide de ces monstres eux-mêmes qui seront encerclés par les peuples du monde entier et il en résultera, en aucune façon, l’anéantissement de l’humanité. Nous nous sommes toujours opposés aux guerres criminelles lancées par les impérialistes, car les guerres impérialistes imposent d’énormes sacrifices aux peuples des différents pays (y compris les peuples des Etats-Unis et des autres pays impérialistes). Mais si les impérialistes veulent obstinément imposer ces sacrifices aux peuples des différents pays, nous sommes persuadés que, justement comme l’a démontré l’expérience de la révolution russe et de la révolution chinoise, ces sacrifices trouveront leur récompense. Sur les ruines d’un impérialisme défunt, les peuples victorieux créeront avec une extrême rapidité une civilisation mille fois supérieure au système capitaliste et, pour eux-mêmes, un avenir véritablement radieux. » (Hongqui, n°8, 1960)
N’est-ce pas exact ?
Or, ces dernières années, des gens qui se disent « marxistes-léninistes » ont déformé et condamné à plaisir ces points de vue marxistes-léninistes, s’obstinant à affirmer que les ruines de l’impérialisme défunt seraient les « ruines de l’humanité » ,et mettant ainsi destin du système impérialiste et destin de l’humanité sur un même pied. Pareille assertion équivaut, en fait, à défendre le système impérialiste. Si ceux-ci se donnaient la peine de lire quelques classiques du marxisme-léninisme, ils sauraient qu’ériger un système nouveau sur les ruines de l’ancien est une formulation dont usèrent Marx, Engels, Lénine.
Dans Anti-Dühring, Engels dit : « La bourgeoisie a mis en pièces le régime féodal et édifié sur ses ruines la constitution bourgeoise de la société. » Faudrait-il entendre par les ruines du régime féodal dont parle Engels « les ruines de l’humanité » ?
Dans « Les Elections de l’Assemblée constituante et la dictature du prolétariat » écrit en décembre 1919, Lénine disait également que le prolétariat devait « organiser le socialisme sur les ruines du capitalisme » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 30) Les ruines du capitalisme, dont parle Lénine, signifieraient-elles « les ruines de l’humanité » ?
Décrire les ruines du système ancien, dont parlent les marxistes-léninistes, comme étant « les ruines de l’humanité », c’est introduire une parodie de raisonnement dans une discussion sérieuse. Est-ce là « le ton harmonieux » dont parlent Togliatti et d’autres camarades ? Est-ce là « la polémique menée sur un ton » qui ne soit pas « inadmissible », que demandent Togliatti et d’autres camarades ? D’ailleurs, au moment de la chute du fascisme italien, le camarade Togliatti disait lui-même :
« Une grande tâche nous incombe : nous devons bâtir une Italie nouvelle sur les ruines du fascisme, sur les ruines de la tyrannie réactionnaire. » (Le Parti communiste italien, édité en mai 1950 par le Parti communiste italien)
Un marxiste-léniniste sérieux doit tenir compte de la possibilité d’un recours par les impérialistes aux moyens les plus criminels pour infliger aux peuples de lourds sacrifices et de grandes souffrances. Il doit en tenir compte, en vue de pouvoir éveiller les peuples, les mobiliser et les organiser mieux, trouver la juste voie de la lutte pour la libération, trouver une voie pour libérer l’humanité de ses souffrances, pour gagner la paix, face à la menace impérialiste, et trouver la voie pour conjurer efficacement la guerre nucléaire.
Tout le monde sait, et même les impérialistes américains, les impérialistes et les réactionnaires de tous les pays savent, qu’aucun pays socialiste ne déclenchera jamais de guerre d’agression La défense nationale de chaque pays socialiste est là pour le protéger contre l’agression, et certainement pas pour attaquer d’autres pays. Si l’agresseur impose la guerre aux pays socialistes, alors ceux-ci mèneront une guerre qui sera, avant tout, défensive, une guerre d’autodéfense.
C’est également et entièrement dans un but défensif et pour empêcher les impérialistes de déclencher la guerre nucléaire que les pays socialistes disposent de l’arme nucléaire. Aussi, la supériorité nucléaire entre leurs mains, ils n’attaqueront jamais d’autres pays avec cette arme ; ils ne se permettront jamais et ils n’ont nul besoin de déclencher de telles attaques. Les pays socialistes s’opposent résolument à la politique de chantage nucléaire, ils préconisent l’interdiction et la destruction totales des armes nucléaires. C’est là l’attitude, la ligne de conduite et la politique de la République populaire de Chine et du Parti communiste chinois en ce qui concerne les armes nucléaires. C’est là l’attitude, la ligne de conduite, la politique adoptée par les marxistes-léninistes. Les révisionnistes modernes déforment délibérément les nôtres et usent de calomnies et de mensonges, infâmes et ineptes ; ils visent en fait à couvrir le chantage nucléaire des impérialistes, et à camoufler l’aventurisme et le capitulationnisme dont ils font preuve dans la question de l’arme nucléaire. Il doit être souligné que l’aventurisme et le capitulationnisme dans le domaine de l’arme nucléaire sont extrêmement dangereux et sont l’expression de la pire irresponsabilité.
Une étrange formulation
De par la nature de leur système social, les pays socialistes accordent sympathie et soutien aux luttes libératrices de tous les peuples et de toutes les nations opprimés du monde. Mais ils ne déclencheront jamais de guerre extérieure pour remplacer la lutte révolutionnaire menée par les peuples des autres pays. L’émancipation d’un peuple est l’affaire même de ce peuple — ; c’est là un point de vue auquel, depuis l’époque de Marx, s’en tiennent invariablement tous les vrais communistes, y compris les communistes au pouvoir. Le point de vue selon lequel « la révolution ne peut être ni exportée ni importée » a également toujours eu l’adhésion de tous les marxistes-léninistes.
Si le peuple d’un pays ne veut pas de la révolution, nul ne peut la lui imposer de l’extérieur ; là où il n’y a pas crise révolutionnaire et où les conditions pour la révolution ne sont pas mûres, il n’est personne qui puisse en créer une. Evidemment, si le peuple d’un pays veut la révolution et se lève pour la faire, personne ne pourra l’en empêcher, tout comme personne n’a pu empêcher la révolution à Cuba, en Algérie et au Sud-Vietnam.
Togliatti et d’autres camarades ont dit que la coexistence pacifique implique l’exclusion de « la possibilité d’interventions étrangères visant à ’exporter’ soit la contrerévolution soit la révolution » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») Nous voudrions demander : Quand vous parlez d’ »interventions étrangères visant à exporter…la révolution », entendez-vous que les pays socialistes veulent l’exporter ? C’est précisément ce que les impérialistes et les réactionnaires n’ont cessé de prétendre. Un communiste devrait-il parler de la sorte ? Pour ce qui est des pays impérialistes, ils ont toujours exporté la contre-révolution. Qui peut citer un pays impérialiste ne l’ayant pas fait ? Et peut-on oublier l’intervention directe des impérialistes contre la Grande Révolution d’Octobre ? oublier l’intervention directe des impérialistes contre la révolution chinoise ? Qui peut nier que les impérialistes américains occupent toujours, par la force, notre territoire du Taïwan ? Qui peut nier que les impérialistes américains n’ont cessé d’intervenir contre la révolution cubaine ? L’impérialisme américain, ce gendarme international, ne s’efforce-t-il pas d’exporter la contrerévolution dans toutes les parties du monde et d’intervenir dans les affaires intérieures des autres pays du monde capitaliste ?
Togliatti et d’autres camarades ne font pas de distinction entre pays à systèmes sociaux de nature différente, ils ne comprennent pas la thèse marxiste-léniniste : « la révolution ne peut être ni exportée ni importée », ils ne veulent pas voir que les impérialistes n’ont cessé d’exporter la contrerévolution, et, en parlant de coexistence pacifique, ils prennent en bloc, sans distinction aucune, les termes « exporter la contre-révolution » et « exporter la révolution ». Comment ne pas dire que cette formulation étrange est une erreur de principe !
Le point de vue fondamental des communistes chinois sur la question de la guerre et de la paix
Sur la question de la guerre et de la paix, les communistes chinois s’en sont toujours tenus au point de vue de Lénine.
Nous avons cité plus haut les paroles de Lénine sur le parti du prolétariat qui « condamne résolument les guerres », qui « a toujours condamné les guerres entre les peuples ». Mais Lénine a toujours estimé que si l’on doit s’opposer aux guerres injustes, il faut par contre soutenir les guerres justes, il ne s’opposait pas en bloc à toutes les guerres. A présent, il se trouve des gens qui, s’identifiant sans rougir à Lénine, disent que ce dernier, et même Liebknecht et Luxemburg étaient, tout comme eux, contre la guerre. Ces gens-là ont émasculé la théorie et la politique de Lénine sur la guerre et la paix. Tout le monde sait que lors de la Première guerre mondiale, Lénine mena une lutte résolue contre la guerre impérialiste, tout en préconisant, au cas où une guerre éclaterait entre pays impérialistes, que le prolétariat et les autres couches laborieuses transforment la guerre impérialiste en une guerre révolutionnaire, juste, au sein des pays impérialistes, à savoir une guerre révolutionnaire, juste, menée par le prolétariat et les autres couches travailleuses contre les impérialistes de leur propre pays. Dès le lendemain de la Révolution d’Octobre, sous la présidence de Lénine, le IIe Congrès des Soviets des Députés ouvriers et soldats de Russie adopta le célèbre « Décret sur la Paix ». En s’adressant au prolétariat mondial, en particulier aux ouvriers conscients d’Angleterre, de France et d’’Allemagne, ce décret dit qu’ils « accompliront les tâches qui « leur incombent aujourd’hui, qu’ils libéreront l’humanité des horreurs de la guerre et de ses conséquences que ces ouvriers, par leur activité multiple, décisive, par leur énergie sans réserve, nous aideront à mener avec succès jusqu’au bout la lutte pour la paix et, en même temps, la lutte pour l’affranchissement des masses laborieuses et exploitées de tout esclavage et de toute exploitation ». Le décret dit que le gouvernement soviétique estime que « poursuivre cette guerre pour savoir comment partager entre les nations fortes et riches les peuples faibles qu’elle sont conquis, c’est… le plus grand des crimes contre l’humanité ; et il se déclare solennellement résolu à signer immédiatement des conditions de paix qui mettront fin à cette guerre, conditions déjà indiquées d’égalité et de justice pour tous les peuples sans exception » (V. I. Lénine : « Ile Congrès des Soviets des Députés ouvriers et soldats de Russie », Œuvres, tome 26) Ce décret établi par Lénine est un grand document de l’histoire révolutionnaire du prolétariat.
Or, aujourd’hui, des gens poussent l’audace jusqu’ à le déformer et le tronquer, et, en corrigeant ce que dit Lénine de la guerre entre pays impérialistes, pour le partage du monde et l’oppression des nations faibles, affirment avec intention que « la guerre est ’le plus grand des crimes contre l’humanité’ « . Ils montrent le grand révolutionnaire prolétarien, le grand marxiste que fut Lénine sous le jour d’un pacifiste bourgeois.
Tout en déformant cyniquement Lénine, en déformant le léninisme, en déformant l’histoire ils font force effets oratoires disant que les autres ne « comprennent pas le sens de la doctrine marxiste sur la lutte révolutionnaire » ; n’est-ce pas là un raisonnement singulier et paradoxal ?
Si, nous, communistes chinois, sommes en butte aux invectives des révisionnistes modernes, c’est parce que nous nous opposons au charabia et aux paradoxes qui déforment le léninisme, et que nous persistons à rétablir, sous son vrai jour, la théorie de Lénine sur la question de la guerre et de la paix.
Les marxistes-léninistes soutiennent que, pour défendre la paix mondiale, pour prévenir une nouvelle guerre mondiale, il faut compter sur l’unité et le développement des forces des pays socialistes, sur la lutte des nations et peuples opprimés, sur la lutte du prolétariat international, sur la lutte des pays et peuples épris de paix du monde entier. C’est là la ligne juste des peuples de tous les pays du monde pour défendre la paix mondiale, ligne entièrement conforme à la théorie léniniste sur la guerre et la paix. Certains calomnient cette ligne, la traitant de » ’théorie’ selon laquelle la voie qui mène à la victoire du socialisme passe par la guerre entre les Etats, par les ruines, le sang et la mort de millions d’individus ». Ils opposent la défense de la paix mondiale à la lutte révolutionnaire des peuples et, de plus, estiment que, pour avoir la paix, il faut que les peuples se soumettent à l’impérialisme, que les nations et peuples opprimés en finissent avec leur lutte de libération. Au lieu de s’appuyer sur la lutte unie des forces éprises de paix du monde pour gagner la paix mondiale, ils ne font que quémander la paix mondiale auprès de l’impérialisme ayant pour chef de file les Etats-Unis, en espérant que celui-ci leur en « fasse don ». Cette « théorie » et cette ligne à eux sont entièrement erronées, elles sont anti-léninistes.
Dans l’éditorial du Renmin Ribao du 31 décembre 1962, nous avons mis en lumière le point de vue fondamental des communistes chinois sur la question de la guerre et de la paix et exposé en quoi résident les divergences qui existent sur ce problème entre Togliatti et d’autres camarades, d’une part, et nous, d’autre part. Voici un passage de cet éditorial :
« sur la question de savoir comment empêcher la guerre mondiale et défendre la paix mondiale, le Parti communiste chinois a toujours maintenu qu’il fallait dénoncer énergiquement l’impérialisme renforcer le camp socialiste, soutenir fermement le mouvement de libération nationale et les luttes révolutionnaires des peuples, unir sur la base la plus large tous les pays et tous ceux attachés à la paix, et en même temps, tirer le profit maximum des contradictions entre nos ennemis et recourir aux pourparlers, de même qu’aux autres formes de lutte. Tout cela a précisément pour but de prévenir efficacement la guerre mondiale et de sauvegarder la paix mondiale. Cette position est tout à fait conforme au marxisme-léninisme et aux deux Déclarations de Moscou. C’est là la juste orientation permettant d’empêcher la guerre mondiale et de défendre la paix mondiale. .Et nous persistons précisément dans celle-ci parce que nous sommes profondément convaincus qu’il est possible d’empêcher la guerre mondiale en s’appuyant sur la lutte commune de toutes les forces dont il a été question plus haut. Comment pareille position peut-elle donc être décrite comme un manque de confiance dans la possibilité d’éviter la guerre mondiale ? Comment peut-on l’appeler ’belliqueuse’ ? En agissant comme le préconisent ceux qui attaquent le Parti communiste chinois, c’est-à-dire en enjolivant l’impérialisme en plaçant ses espoirs de paix en lui, en adoptant une attitude négative et hostile envers le mouvement de libération nationale et la lutte révolutionnaire du peuple, en s’inclinant devant l’impérialisme et en capitulant devant lui, on n’apportera aux peuples du monde qu’une paix factice ou une vraie guerre. Cette politique est fausse et tous les marxistes-léninistes, tous les révolutionnaires, tous ceux attachés à la paix doivent la combattre résolument. »
Récapitulons ici notre point de vue fondamental sur la question de la guerre et de la paix.
1. Nous avons toujours estimé que les forces d’agression et de guerre, avec l’impérialisme américain à leur tête, préparent effectivement une troisième guerre mondiale ; et le danger de guerre existe. Mais, en cette dernière dizaine d’années, le rapport des forces mondiales s’est modifié de plus en plus en faveur du socialisme et de la lutte pour la libération nationale, la démocratie populaire et la défense de la paix mondiale. Le peuple est le facteur décisif. L’impérialisme et la réaction se trouvent isolés. En nous appuyant sur l’unité et la lutte des peuples, sur la juste politique des pays socialistes et des partis prolétariens des différents pays, nous pouvons éviter une nouvelle guerre mondiale, éviter une guerre nucléaire, et conclure un accord sur l’interdiction générale des armes nucléaires.
2. Si les peuples du monde veulent sauvegarder la paix mondiale, empêcher une nouvelle guerre mondiale, empêcher une guerre nucléaire, il faut qu’ils se soutiennent, qu’ils forment le front uni le plus large, qu’ils unissent toutes les forces pouvant être unies, y compris le peuple américain, pour s’opposer à la politique de guerre et d’agression du bloc impérialiste, qui a la réaction américaine à sa tête.
3. Les pays socialistes sont pour la politique de coexistence pacifique entre pays à systèmes sociaux différents et s’en tiennent fermement à cette politique ; et ils développent des relations amicales et commercent avec ces pays sur un pied d’égalité. Par la poursuite de la politique de coexistence pacifique, les pays socialistes s’opposent à l’usage de la force pour résoudre les différends entre Etats, et ils n’interviennent pas dans les affaires intérieures des autres pays. D’aucuns prétendent que la coexistence pacifique entraînera la transformation du système social de tous les pays capitalistes et qu’elle est « la voie menant au socialisme à l’échelle mondiale » (T. Jivkov : « La Paix, question décisive de l’heure », Problèmes de la paix et du socialisme, n°8, 1960) ; d’autres pensent que la politique de coexistence pacifique est « la forme la plus évoluée de la lutte contre l’impérialisme et pour la libération nationale » (Voir « Polémiques non fondées des communistes chinois », Unita, 31 décembre 1962) de tous les peuples et de toutes les nations opprimés. Ils mêlent coexistence pacifique entre pays à systèmes sociaux différents et lutte de classes dans les pays capitalistes, lutte des nations opprimées pour leur libération, déformant totalement la politique de coexistence pacifique de Lénine.
4. Nous avons toujours cru à la nécessité de maintenir constamment une haute vigilance au sujet du danger d’agression des pays socialistes par les impérialistes. En même temps, nous avons toujours cru à la possibilité pour les pays socialistes de parvenir à des accords avec les pays impérialistes par voie de négociations pacifiques, et à la possibilité de réaliser les compromis nécessaires dans certaines questions, y compris des questions de haute importance. Toutefois, comme l’a dit le camarade Mao Zedong, « de tels compromis n’exigent pas des peuples des différents pays du monde capitaliste qu’ils fassent en conséquence des compromis dans leur propre pays. Les peuples de ces pays continueront à engager des luttes différentes selon les conditions différentes » (Mao Zedong : « Quelques appréciations sur la situation internationale actuelle », Œuvres choisies, tome IV)
5. Les contradictions aiguës entre pays impérialistes existent objectivement et sont inconciliables. Des conflits, grands ou petits, directs ou indirects, sous une forme ou sous une autre, se produisent nécessairement entre pays impérialistes et entre groupes de pays impérialistes, car leurs intérêts réels sont en jeu, et telle est leur nature. Prétendre que la possibilité de conflit entre pays impérialistes, du fait de leurs intérêts réels, a disparu avec les conditions historiques nouvelles revient à dire que l’impérialisme a changé de nature ; et en réalité ce serait enjoliver l’impérialisme.
6. Etant donné que la guerre a sa source dans l’existence même du système capitaliste-impérialiste et du système d’exploitation, personne ne peut garantir que les impérialistes et la réaction n’entreprendront pas de guerres d’agression contre les nations et peuples opprimés, ni de guerres contre le peuple. Et d’autre part, nul ne peut empêcher les nations et les peuples opprimés qui ont pris conscience de se dresser et d’entreprendre la guerre révolutionnaire.
7. La thèse : « la guerre est la continuation de la politique », affirmée et soulignée par Lénine, est toujours valable. De même que le système social des pays capitalistes-impérialistes diffère foncièrement de celui des pays socialistes, la politique intérieure et extérieure des pays capitalistes-impérialistes diffère foncièrement de celle des pays socialistes. D’où les positions foncièrement différentes des pays capitalistes-impérialistes et des pays socialistes sur la question de la guerre et de la paix.
Pour ce qui est des pays capitalistes-impérialistes, qu’ils mènent la guerre ou se déclarent pour la paix, leur but est la poursuite ou le maintien de leurs intérêts impérialistes. Les pacifistes bourgeois et les opportunistes ont toujours nié que la guerre impérialiste est la continuation de la politique de paix de l’impérialisme, et que la paix impérialiste est la continuation de la politique de guerre de l’impérialisme ; tout comme l’a dit Lénine, « l’idée : ’la guerre est la continuation de la politique de paix, la paix est la continuation de la politique de guerre’ n’a jamais été comprise par les pacifistes des deux nuances » (V. I. Lénine : « Pacifisme bourgeois et pacifisme socialiste », Œuvres, tome 23)
8. L’humanité connaîtra une ère de paix perpétuelle ; l’ère d’où toutes les guerres auront été extirpées viendra. C’est pour cela que nous luttons. Mais cette ère magnifique ne sera là qu’après l’extirpation par l’humanité du système capitaliste-impérialiste, et non avant. Comme l’indique la Déclaration de Moscou de 1960 : « Le triomphe du socialisme dans le monde entier éliminera définitivement toutes les causes sociales et nationales du déclenchement de toute guerre. » (Déclaration de la Conférence des Représentants des Partis communistes et ouvriers, 1960)
C’est là notre point de vue fondamental sur la question de la guerre et de la paix.
Il découle de l’analyse d’une multitude de phénomènes existant objectivement dans le monde, de l’analyse des rapports politico-économiques extrêmement complexes entre les différents pays du monde, et de l’analyse des conditions concrètes de cette époque nouvelle du monde, époque de la transition du capitalisme au socialisme et inaugurée par la Grande Révolution d’Octobre ,analyses qui sont toutes basées sur la conception matérialiste marxiste de l’histoire. Ce point de vue est non seulement juste sur le plan théorique, il a maintes fois fait ses preuves dans la pratique. Incapables de le réfuter, les révisionnistes modernes et leur suite l’ont déformé et ont menti à plaisir pour essayer de détruire la vérité. Mais comment la vérité pourrait-elle être détruite ? Ceux qui s’y essaient seront, tôt ou tard, vaincus par elle. Et cette manière-ci de présenter les choses n’est-elle pas plus juste ?
Aujourd’hui, des gens qui se prétendent des « marxistes-léninistes créateurs » s’imaginent que l’histoire du monde se déroule au gré de leur baguette, et non selon les lois objectives de la société. Cela nous rappelle une phrase de Diderot, le célèbre philosophe français, citée par Lénine dans Matérialisme et empiriocriticisme :
« II y a un moment de délire où le clavecin sensible a pensé qu’il était le seul clavecin qu’il y eût au monde, et que toute l’harmonie de l’univers se passait en lui. » (V.I. Lénine : Œuvres, tome 14)
Que ces idéalistes historiques qui s’imaginent être tout, et s’imaginent que tout est dans leur propre subjectivisme, ruminent soigneusement ces lignes !
En quoi la théorie des « réformes de structure » du camarade Togliatti est-elle une « contribution positive » ?
Togliatti et d’autres camarades présentent leur « ligne fondamentale » des « réformes de structure » comme une « ligne commune à tout le mouvement communiste international » (P. Togliatti : Conclusions prononcées au Xe Congrès du Parti communiste italien), et leur théorie des « réformes de structure » comme un « principe de stratégie mondiale du mouvement ouvrier et communiste dans la situation actuelle » (P. Togliatti : Intervention faite en avril 1962 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien)
Il semble en découler que Togliatti et d’autres camarades veulent imposer la « voie italienne » non seulement à la classe ouvrière et au peuple travailleur italiens, mais encore aux peuples du monde capitaliste tout entier. Car ils considèrent la « voie italienne », proposée par eux, comme la « voie vers le socialisme » pour l’ensemble du monde capitaliste actuel et, apparemment, comme la seule et unique voie. Vraiment, le camarade Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien ont une bien haute opinion d’eux-mêmes.
Et il nous paraît bon de présenter au lecteur les traits principaux de leur « voie italienne » et de leurs « réformes de structure », afin de mettre les choses au point.
1. Le point de vue le plus fondamental du marxisme-léninisme, c’est-à-dire celui sur la destruction de la machine d’Etat de la dictature bourgeoise et sur l’installation de la machine d’Etat de la dictature prolétarienne, est-il, aujourd’hui encore, entièrement valable ? De l’avis de ces camarades, c’est là « un sujet à discuter » (P. Togliatti : « La Voie italienne vers le socialisme », rapport présenté en juin 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien) « … il est évident, disent-ils, que nous rectifions quelque peu ce point de vue, compte tenu des transformations qui sont intervenues et qui sont en train d’intervenir dans le monde. » (P. Togliatti : « La Voie italienne vers le socialisme », rapport présenté en juin 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien)
2. « Aujourd’hui la question de faire ce qui a été fait en Russie ne se pose pas aux ouvriers italiens. » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien) Ceci a été exprimé dès avril 1944 par le camarade Togliatti, et dans son rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien, il a réaffirmé que cette vue a « un caractère de programme ».
3. La classe ouvrière italienne peut « s’organiser, dans le cadre du régime constitutionnel, en une classe dirigeante » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien », adoptés en décembre 1956 par le Ville Congrès du Parti communiste italien)
4. La Constitution italienne « accorde aux forces ouvrières une place nouvelle, prééminente », elle « permet et prévoit » des « réformes de structure » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») « La lutte pour donner à la démocratie italienne un contenu nouveau, socialiste, trouve donc dans notre Constitution un large champ de développement. » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
5. « … nous pouvons parler de la possibilité d’utiliser largement la voie légale et même le Parlement pour réaliser d’importantes transformations sociales. » (P. Togliatti : Rapport présenté en mars 1956 à la session Plénière du Comité central du Parti communiste italien) « Le Parlement doit être investi des pleins pouvoirs qui lui permettent non seulement de remplir les tâches législatives, mais aussi de diriger et de contrôler l’activité de l’Exécutif. » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »), et il faut un « …élargissement effectif des pouvoirs du Parlement sur le plan économique » (« Thèses politiques adoptées par le IXe Congrès du Parti communiste italien »)
6. « …l’édification d’un régime démocratique nouveau qui progresse vers le socialisme est étroitement liée à la formation d’un nouveau bloc historique qui, sous la direction de la classe ouvrière, combat pour un changement de la structure sociale et serait le porteur d’une révolution politique aussi bien qu’intellectuelle et morale. » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
7. « On ne peut ni ne doit différer la liquidation des structures les plus arriérées et les plus paralysantes de la société italienne, ainsi que leur transformation dans le sens démocratique et socialiste, à l’heure de la conquête du pouvoir par la classe ouvrière et par ses alliés. » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien », adoptés en décembre 1956 par le Ville Congrès du Parti communiste italien)
8. En Italie, l’économie nationalisée, c’est-à-dire le capital monopoliste d’Etat ,peut être « en opposition avec les monopoles » (A. Pesenti : « Formes directes et indirectes de l’intervention de l’Etat » ,Rinascita, 9 juin 1962), elle peut être une « expression des masses populaires » (A. Pesenti : « S’agit-il de la structure ou de la superstructure ? », Rinascita, 19 mai 1962) et devenir un « instrument plus efficace pour combattre le développement des monopoles » (A. Pesenti : « Formes directes et indirectes de l’intervention de l’Etat » , Rinascita, 9 juin 1962). Au moyen de nationalisation, il est possible « de briser et d’abolir la propriété monopoliste des grandes forces productives, de la transformer en propriété collective » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien », adoptés en décembre 1956 par le VllIe Congrès du Parti communiste italien)
9. L’intervention de l’Etat dans la vie économique peut « garantir un développement économique démocratique » (P. Togliatti : Intervention faite en avril 1962 à la session
Plénière du Comité central du Parti communiste italien) et « devenir un moyen de lutte contre le pouvoir du grand capital, pour frapper, limiter et briser la domination des grands groupes monopolistes » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien).
10. En régime capitaliste et sous la dictature bourgeoise, « les concepts de planification et de programmation économiques considérés un temps comme une prérogative socialiste » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien) peuvent être acceptés. La classe ouvrière, « en participant à l’élaboration et à l’application de la politique de planification, réalisant pleinement ses propres idéaux et son autonomie, avec la force de son unité » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »), peut transformer cette politique de planification en « un instrument pour satisfaire les besoins des hommes et de la collectivité nationale » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
En un mot, « la voie italienne » et « les réformes de structure » des camarades Togliatti et autres reviennent à ceci : dans le domaine politique, « modifier progressivement l’équilibre intérieur et la structure (de l’Etat] » pour « imposer l’avènement de classes nouvelles à la direction de l’Etat » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »), tout en maintenant la dictature bourgeoise et en empruntant la « voie légale » de la démocratie bourgeoise, de la Constitution et du Parlement bourgeois. Quant à savoir ce que l’on entend par « classes nouvelles », l’interprétation donnée a toujours été ambiguë ; et dans le domaine économique, cela revient, tout en maintenant le régime capitaliste, à « limiter » et « briser » progressivement le capital monopoliste par « la nationalisation », « la programmation » et « l’intervention de l’Etat ». En d’autres termes, il est possible de parvenir au socialisme en Italie par la dictature de la bourgeoisie, sans passer par la dictature du prolétariat.
Togliatti et les autres camarades estiment que leurs points de vue sont une « contribution positive à l’approfondissement et au développement du marxisme-léninisme, doctrine révolutionnaire de la classe ouvrière » (P. Togliatti : « Ramenons la discussion à ses termes réels’) Malheureusement, il n’y a rien de nouveau dans leurs idées ; elles sont fort vieilles et fort désuètes ; c’est du socialisme bourgeois, que Marx et Engels ont rejeté impitoyablement, il y a longtemps.
Le socialisme bourgeois que Marx et Engels critiquèrent appartient à la période d’avant l’apparition du capitalisme monopoliste. Si Togliatti et d’autres camarades ont fait quelque « contribution positive », c’est au développement non pas du marxisme mais du socialisme bourgeois. Ils ont développé le socialisme de la bourgeoisie libérale en socialisme de la bourgeoisie monopoliste. Mais, en fait, c’est le « développement » proposé il y a beau temps par la clique Tito. Togliatti et les autres camarades l’ont adopté après « étude et profonde compréhension » de ce que la clique Tito a fait et de ce qu’elle fait.
Comparons avec le léninisme
La possibilité de passer au socialisme, et de le réaliser, avant le renversement de la dictature bourgeoise et l’instauration de la dictature du prolétariat, a toujours été la question la plus fondamentale, la plus controversée entre les marxistes-léninistes et les opportunistes et révisionnistes de toutes les nuances. Dans L’Etat et la révolution et La Révolution prolétarienne et le renégat Kautsky, les grandes œuvres que connaissent tous les marxistes-léninistes, Lénine a exposé cette question la plus fondamentale de manière exhaustive et pénétrante, défendu et développé le marxisme révolutionnaire, et dénoncé et condamné complètement les déformations infligées au marxisme par les opportunistes et les révisionnistes.
En réalité, les « réformes de structure » et le « changement de l’équilibre intérieur [de l’Etat] » et autres idées de Togliatti et des autres camarades sont toutes des vues de Kautsky, condamnées par Lénine dans L’Etat et la révolution. Le camarade Togliatti dit : « Les camarades chinois cherchent à nous effrayer en rappelant Kautsky, avec les vues duquel notre politique n’a rien de commun. » (P. Togliatti : « Ramenons la discussion à ses termes réels ») Cherchons-nous à effrayer Togliatti et les autres camarades ? Leur politique n’a-t-elle vraiment « rien de commun » avec les vues de Kautsky ? Nous aimerions, à notre tour, « leur demander de nous permettre de leur rappeler » qu’il serait bon de relire attentivement L’Etat et la révolution et les autres œuvres de Lénine !
Togliatti et les autres camarades ne veulent pas comprendre la différence fondamentale qu’il y a entre révolution socialiste prolétarienne et révolution bourgeoise.
Lénine dit :
« Ce qui distingue précisément une révolution socialiste d’une révolution bourgeoise, c’est que celle-ci a des formes toutes prêtes de rapports capitalistes, tandis que le pouvoir soviétique — prolétarien — ne trouve pas de rapports tout prêts… » (V.I. Lénine : VIIème congrès du Parti Communiste (bolchévik) de Russie, Œuvres, tome 27)
Dans la société de classes, tout pouvoir d’Etat est destiné à défendre un régime socio-économique donné, c’est-à-dire des rapports de production donnés. Comme l’a dit Lénine, « la politique est l’expression concentrée de l’économie » (« Encore une fois sur les syndicats, la situation actuelle et les fautes de Trotski et Boukharine », Œuvres tome 32) A chaque régime socio-économique correspond un régime politique qui est à son service, et qui lui permet d’écarter ce qui fait obstacle à son développement.
Dans l’histoire, les maîtres d’esclaves, les seigneurs féodaux et la bourgeoisie ont tous dû s’ériger politiquement en classe dirigeante, prendre le pouvoir d’Etat en main en vue de faire prévaloir leurs rapports de production sur tous les autres, de les consolider et développer.
Le point fondamental qui différencie les révolutions des classes exploiteuses de la révolution prolétarienne, c’est que, avant l’accession au pouvoir des trois grandes classes exploiteuses—maîtres d’esclaves, propriétaires fonciers et « bourgeoisie — les rapports de production esclavagistes, féodaux et capitalistes existaient déjà dans la société et, dans certains cas, étaient même parvenus à une maturité remarquable.
Mais il n’existe pas de rapports de production socialistes dans la société avant la prise du pouvoir par le prolétariat. La raison en est claire. Une nouvelle forme de propriété privée peut naître spontanément sur la base de l’ancienne, tandis qu’ il sera toujours impossible à la propriété publique socialiste des moyens de production de naître spontanément sur la base de la propriété privée, capitaliste.
Comparons les idées et le programme du camarade Togliatti et des autres camarades avec le léninisme.
Contrairement au léninisme, Togliatti et les autres camarades soutiennent que les rapports de production socialistes peuvent naître graduellement, sans révolution socialiste et sans pouvoir d’Etat du prolétariat, et que les intérêts économiques fondamentaux du prolétariat peuvent être satisfaits sans le recours à une révolution politique remplaçant la dictature de la bourgeoisie par la dictature du prolétariat. C’est là le point de départ de la « voie italienne » et de la théorie des « réformes de structure » de Togliatti et des autres camarades.
Qui a raison ? Marx, Engels et Lénine, ou Togliatti et les autres camarades ? Où y a-t-il « manqué du sens des réalités » ? Chez les marxistes-léninistes ou dans les idées et programme de Togliatti et des autres camarades ?
Voyons la réalité italienne.
L’Italie est un pays de 50 millions d’habitants .Selon les statistiques, elle a maintenant, en temps de paix, quelques centaines de milliers de fonctionnaires, plus de 400.000 hommes dans l’armée permanente, près de 80.000 gendarmes, environ 100.000 policiers, plus de 1.200 tribunaux de toutes instances et près de 1.000 prisons ; ceci ne comprend pas l’appareil secret de répression et son personnel armé. En outre, il y a des bases militaires américaines et des troupes américaines en Italie.
Dans leurs Thèses, Togliatti et les autres camarades prennent plaisir à parler de la démocratie, de la Constitution et du Parlement de l’Italie, etc., mais ils ne soumettent les militaires, les gendarmes, la police, les tribunaux, les prisons et autres instruments de violence aucune analyse de classe. Qui, ces instruments de violence, protègent-ils et qui répriment-ils ? Protègent-ils le prolétariat et le peuple travailleur et répriment-ils les capitalistes monopolistes ou est-ce l’inverse ? Un marxiste-léniniste, quel qu’il soit, ne doit pas éluder cette question en parlant du régime d’Etat, mais doit y répondre.
Poursuivons et voyons à quoi ces instruments de violence sont utilisés en Italie. Voici quelques exemples :
De 1948 à 1950, soit en trois ans, plus de 3.000 personnes ont été tuées ou blessées, et plus de 90.000 arrêtées, au cours de la répression des masses populaires, par le gouvernement italien.
En juillet 1960, lors de la répression par le gouvernement Tambroni du mouvement antifasciste du peuple travailleur italien, onze personnes furent tuées, plus de mille blessées et plus de mille arrêtées.
En 1962, après la formation du gouvernement « centre-gauche » de Fanfani, il y eut une suite d’incidents au cours desquels le gouvernement réprima les grèves et manifestations des masses populaires à Ceccano en mai, à Turin en juillet, à Bari en août, à Milan en octobre, et à Rome en novembre. Rien qu’à Rome, des dizaines de personnes furent blessées, et environ 600 arrêtées.
Ce ne sont que quelques exemples, mais ne suffisent-ils pas à montrer de quel genre est la « démocratie italienne » ? Est-il possible que, dans une Italie dotée d’un puissant appareil d’Etat, tant public que secret, et destiné à réprimer le peuple, la « démocratie italienne » ne soit pas une « démocratie » de la bourgeoisie monopoliste italienne, c’est-à-dire la dictature de la bourgeoisie monopoliste italienne ?
Est-il possible que la classe ouvrière et le peuple travailleur d’Italie participent à l’élaboration de la politique intérieure et extérieure du gouvernement, dans la « démocratie italienne » vantée par Togliatti et les autres camarades ? Si vous, camarade Togliatti et les autres, l’imagine z possible, êtes-vous prêts à prendre la responsabilité des nombreux crimes commis dans la répression du peuple par le gouvernement italien et de l’acceptation par ce dernier de bases militaires américaines en Italie, de la participation de celle-ci à l’O.T.A.N., etc.? Bien entendu, vous direz que vous ne pouvez être responsables de la politique réactionnaire poursuivie par le gouvernement italien, tant sur le plan intérieur qu’extérieur. Mais puisque vous vous attribuez une part dans l’élaboration des politiques, pourquoi n’avez-vous pas réalisé le moindre changement dans ces mesures politiques les plus fondamentales de l’actuel gouvernement italien ?
Ne pas opérer de distinction quant à la nature de classe de la démocratie, mais vanter « la démocratie » d’une façon générale, c’est en fait, entonner la vieille rengaine que les héros de la Ile Internationale et les leaders social-démocrate de droite ont usée jusqu’ à la corde. N’est-il pas étrange que des gens qui se disent « marxistes-léninistes » présentent ces rengaines éculées comme des « créations nouvelles » de leur cru ?
Le camarade Togliatti désire peut-être tracer une ligne, de l’épaisseur d’un cheveu, entre lui-même et les social-démocrates. Il prétend que, en fait de « raisonnement abstrait », on peut convenir du caractère de classe de l’Etat et du caractère bourgeois de l’actuel Etat italien, mais que « l’exprimer en termes concrets » est une autre affaire.
En « raisonnement concret », il soutient qu’ »en partant de l’actuelle structure de l’Etat » et « en réalisant s profondes réformes prévues par la Constitution », « il serait possible… de changer l’actuel bloc au pouvoir et créer les conditions d’un autre bloc auquel les classes travailleuses participeront et dans lequel elles assumeront les fonctions qui leur incombent » ; et permettre ainsi à l’Italie de « marcher vers le socialisme dans la démocratie et la paix » (Voir P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien) Traduites en langage clair, ces paroles ambiguës du camarade Togliatti signifient que la nature de la machine d’Etat de la bourgeoisie monopoliste italienne peut être transformée graduellement, sans révolution populaire en Italie.
Le « raisonnement concret » du camarade Togliatti fait mauvais ménage avec son « raisonnement abstrait ». Dans son « raisonnement abstrait », il se rapproche quelque peu du marxisme-léninisme ; mais dès qu’il aborde le « raisonnement concret », il s’en éloigne et de beaucoup. Peut-être estime-t-il que c’est là le seul moyen de ne pas être « dogmatique » !
Si nous regardons Togliatti et les autres camarades à la lumière de leur « raisonnement concret », nous découvrons que le cheveu les séparant des social-démocrates disparaît.
Et en ce moment où certains s’efforcent de prostituer la théorie marxiste-léniniste sur l’Etat et la révolution et où les révisionnistes modernes se servent du nom de Lénine pour attaquer follement le léninisme, nous voudrions attirer l’attention des uns et des autres, par les deux paragraphes suivants, sur ce que Lénine a dit au 1er Congrès de l’Internationale communiste en 1919 :
« Le point essentiel que les socialistes ne comprennent pas, et qui explique leur myopie théorique, qui fait qu’ils demeurent prisonniers des préjugés bourgeois, qui constitue leur trahison politique à l’égard du prolétariat, c’est que dans la société capitaliste, dès que la lutte de classe qui en est le fondement s’accentue d’une manière tant soit peu sérieuse, il ne peut y avoir aucun terme moyen entre la dictature de la bourgeoisie et la dictature du prolétariat. Tout rêve d’on ne sait quelle troisième voie est une lamentation réactionnaire de petits bourgeois. Témoin en est l’expérience d’un développement de plus d’un siècle de la démocratie bourgeoise et du mouvement ouvrier dans tous les pays évolués, notamment l’expérience des dernières cinq années. C’est ce qu’établissent également la science de l’économie politique, le contenu du marxisme qui explique la nécessité dans toute économie marchande de la dictature de la bourgeoisie qui ne peut être remplacée que par la classe développée, multipliée, cimentée, renforcée par l’évolution même du capitalisme, c’est-à-dire la classe des prolétaires. »
« Une autre erreur politique et théorique des socialistes est due à ce fait qu’ils ne comprennent pas que les formes de démocratie ont changé nécessairement au cours des siècles, à partir de ses germes dans l’antiquité au fur et à mesure que les classes dominantes se succédaient. Dans les républiques de la Grèce antique, dans les villes du moyen âge, dans les pays capitalistes évolués, la démocratie revêt des formes différentes et elle est appliquée à des degrés divers. Il serait parfaitement absurde de penser que la révolution la plus profonde que l’histoire de l’humanité ait jamais connue, le passage, pour la première fois dans le monde, du pouvoir de la minorité des exploiteurs à la majorité des exploités, puisse s’effectuer dans l’ancien cadre de l’ancienne démocratie, de la démocratie bourgeoise, parlementaire, puisse s’effectuer sans les tournants les plus profonds, sans la création de nouvelles formes de démocratie, de nouvelles institutions qui matérialisent les conditions nouvelles de son application, etc. » (V. I. Lénine : « 1er Congrès de l’Internationale communiste », Œuvres, tome 28)
Nous voyons que Lénine a tiré ces conclusions catégoriques et définitives de toute la doctrine marxiste, de l’ensemble de l’expérience de la lutte de classe dans la société capitaliste et de l’ensemble de l’expérience de la Révolution d’Octobre Il estimait impossible de transférer le pouvoir d’Etat de la bourgeoisie au prolétariat, impossible d’accomplir la révolution la plus profonde de l’histoire de l’humanité — la révolution socialiste, dans le vieux cadre de la démocratie bourgeoise, parlementaire.
Ces vérités concrètes, formulées par Lénine en 1919, n’ont-elles pas trouvé ample confirmation dans l’expérience de chaque pays où la révolution socialiste a eu lieu ? L’expérience n’a-t-elle pas démontré abondamment que la voie de la Révolution d’Octobre, que Lénine dirigea, est la voie commune pour l’émancipation de l’humanité ?
Les Déclarations de Moscou de 1957 et de 1960 n’ont-elles pas réaffirmé qu’elle st la voie au socialisme, commune à la classe ouvrière de tous les pays ? Evidemment, l’utilisation de moyens pacifiques ou non pacifiques par la classe ouvrière « dépendra…du degré de résistance des milieux réactionnaires à la volonté de la très grande majorité du peuple, du recours à la violence de ces milieux à telle ou telle étape de la lutte pour le socialisme » (Déclaration de la Conférence des Représentants des Partis communistes et ouvriers des Pays socialistes, 1957). Mais, d’une façon ou d’une autre il est nécessaire de briser le vieil appareil d’Etat bourgeois et d’instaurer la dictature du prolétariat.
En prétendant que le socialisme peut être réalisé en Italie dans le cadre de la démocratie parlementaire bourgeoise, sans briser la vieille machine d’Etat, Togliatti et les autres camarades se basent non pas sur l’expérience de la lutte révolutionnaire du prolétariat ou sur la réalité vivante de la société italienne, mais sur la Constitution italienne actuelle. Leur « régime démocratique nouveau » n’est autre qu’un « élargissement » de la démocratie bourgeoise. Il n’est donc pas étonnant que leur « raisonnement concret » se différencie à tel point de la vérité concrète du marxisme-léninisme.
Une Constitution merveilleuse
Les Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien affirment : « La voie italienne vers le socialisme passe par l’édification d’un nouvel Etat décrit dans la Constitution (il diffère profondément du régime actuel) et par l’accès à sa direction de nouvelles classes dirigeantes. » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
Selon Togliatti et les autres camarades, la Constitution italienne est vraiment une merveille.
1. La Constitution républicaine est « un pacte unitaire, librement conclu par la grande majorité du peuple italien » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien »)
2. Elle prévoit « des réformes fondamentales qui. . . Portent la marque du socialisme » (P. Togliatti : Rapport présenté en mars 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien)
3. Elle « affirme le principe de la souveraineté du peuple » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
4. Elle « proclame qu’il [l’Etat] est ’fondé sur le travail’ » (P. Togliatti : « Pour une voie italienne vers le socialisme. Pour un gouvernement démocratique des classes travailleuses », rapport présenté en décembre 1956 au Ville Congrès du Parti communiste italien) et « accorde aux forces ouvrières une place nouvelle, prééminente » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
5. Elle reconnaît « aux travailleurs le droit d’accéder à la direction de l’Etat » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien »)
6. Elle « affirme qu’il faut procéder à des transformations politiques et économiques indispensables afin de rénover la société nationale et de l’amener dans la voie du socialisme » (P. Togliatti : « Pour une voie italienne vers le socialisme. Pour un gouvernement démocratique des classes travailleuses », rapport présenté en décembre 1956 au VIlle Congrès du Parti communiste italien)
7. Elle a résolu » le problème de principe de la marche vers le socialisme dans le cadre de la légalité démocratique » (P. Togliatti : « Pour une voie italienne vers le socialisme. Pour un gouvernement démocratique des classes travailleuses », rapport présenté en décembre 1956 au Ville Congrès du Parti communiste italien)
8. Elle permet au peuple de « s’opposer à la nature de classe et aux objectifs de classe de l’Eta tout en acceptant totalement et en défendant le pacte constitutionnel » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien », voir Unità, Supplément, 13 septembre 1962)
9. Elle permet à la classe ouvrière de « s’organiser, dans le cadre du régime constitutionnel, en une classe dirigeante » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien »)
10. « Le respect, la défense, l’application intégrale de la Constitution républicaine constituent le pivot de tout le programme politique du Parti » (Points essentiels de la
Déclaration-programme du Parti communiste italien)
Nous ne nions pas, évidemment, qu’il y ait de belles phrases sonores dans la Constitution italienne actuelle. Mais comment un marxiste-léniniste peut-il prendre les belles phrases sonores d’une constitution bourgeoise pour a réalité ?
La Constitution italienne actuelle a 139 articles. Mais, en définitive, sa nature de classe y est donnée le plus clairement par l’article 42 qui stipule que « la propriété privée est reconnue et garantie par la loi ». Dans la réalité italienne, cet article protège la propriété privée du capital monopoliste. Par lui, la Constitution satisfait aux exigences de la bourgeoisie monopoliste, dont la propriété privée est rendue sacrée et inviolable. Essayer de cacher la vraie nature de la Constitution italienne et parler de celle-ci au superlatif ne sert qu’à se duper soi-même et à duper les autres.
Togliatti et les autres camarades disent que la Constitution italienne « porte la marque de la présence de la classe ouvrière », « affirme le principe de la souveraineté du peuple » et « reconnaît des droits nouveaux aux travailleurs » (Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien). Lorsqu’ils parlent de ce « principe » et de ces « droits nouveaux », pourquoi ne comparent-ils pas la Constitution italienne aux autres constitutions bourgeoises avant de conclure ?
Il est à remarquer que la disposition, « le peuple est souverain », a été insérée dans presque toutes les constitutions bourgeoises depuis la publication de la « Déclaration des droits de l’homme » de la révolution bourgeoise française de 1789, et qu’elle n’est pas particulière à la Constitution italienne. « Le peuple est souverain » était un mot d’ordre révolutionnaire servant à la bourgeoisie pour s’opposer à « l’Etat, c’est Moi » des seigneurs féodaux. Mais depuis l’instauration de la domination bourgeoise, une telle disposition est devenue une phrase creuse camouflant la nature de la dictature de la bourgeoisie.
Il est à remarquer que la Constitution italienne n’est pas la seule où l’on trouve des dispositions sur « les libertés du citoyen ». Il s’en trouve dans les constitutions de presque tous les pays capitalistes. Mais après avoir affirmé ces libertés du citoyen, certaines de celles-ci ont aussitôt pris des dispositions les limitant ou les supprimant.
Et comme Marx le dit en parlant de la Constitution française de 1848, « chaque article comprend un aspect contraire qui élimine totalement l’article lui-même » (K. Marx & F. Engels : « Constitution de la République française adoptée le 4 novembre 1848 », Œuvres complètes, tome 7). Il existe des constitutions où de tels articles ne sont pas suivis de dispositions les limitant ou les annulant, mais les gouvernements bourgeois intéressés peuvent parvenir au même but par d’autres moyens. La Constitution italienne fait partie de la première catégorie ; en d’autres mots, elle est une constitution purement bourgeoise et ne peut en rien être décrite comme étant « d’inspiration essentiellement socialiste » (P. Togliatti : « La Lutte des communistes pour la liberté, la paix et le socialisme », rapport à la Quatrième Conférence nationale du Parti communiste italien)
Lénine disait : « Lorsque les lois s’écartent de la réalité, la Constitution est fallacieuse ; lorsqu’elles sont conformes à la réalité, la Constitution n’est pas fallacieuse. » (V. I. Lénine : « Comment les socialistes-révolutionnaires font le bilan de la révolution », Œuvres, tome 15) La Constitution italienne actuelle offre ces deux aspects ; elle est à la fois « fallacieuse » et « pas fallacieuse ». « Pas fallacieuse » dans les sujets essentiels, telle la protection des intérêts de la bourgeoisie, et « fallacieuse » dans les belles phrases sonores destinées à duper le peuple.
Au VIe Congrès du Parti communiste italien, tenu en janvier 1948, le camarade Togliatti disait :
« L’avenir de notre politique et même de notre Constitution est incertain, car il est à prévoir que de sérieux conflits se produiront entre les forces progressistes qui s’appuieront sur une partie de notre charte constitutionnelle et les forces conservatrices et réactionnaires qui chercheront des moyens de résistance dans l’autre partie de la Constitution. Il s’ensuit qu’on commettrait une grave erreur politique, et on décevrait le peuple, si l’on ’ ne fait que dire : ’Tout est maintenant écrit dans la Constitution ; appliquons ce qui y est prévu et toutes les aspirations populaires seront réalisées. C’est erroné. Jamais aucune Constitution ne sert à sauver la liberté, si pour la défense de cette dernière il n’y a pas la conscience des citoyens, leur force et leur capacité d’écraser chaque tentative réactionnaire. Aucune disposition constitutionnelle ne nous assure d’elle-même le progrès démocratique et social, si les forces organisées et conscientes des masses laborieuses ne sont pas capables de conduire tout le pays dans la voie de ce progrès et de briser la résistance de la réaction. »
Il semble que ces paroles prononcées par le camarade Togliatti en 1948 contiennent encore certaines vues marxistes-léninistes, car il admettait que l’avenir de la politique et de la Constitution italiennes était incertain, que la Constitution italienne avait un caractère double et pouvait être utilisée aussi bien par les forces conservatrices et réactionnaires que par les forces progressistes. Le camarade Togliatti estimait à l’époque que la foi aveugle dans la Constitution italienne était « une grave erreur politique » et que c’était « décevoir le peuple ».
En janvier 1955, le camarade Togliatti disait dans un discours : « II est clair que nous avons dans notre Constitution les traits d’un programme non seulement politique, mais aussi économique et social, programme qui est d’inspiration essentiellement socialiste ». Ainsi, à cette époque, le camarade Togliatti considérait déjà la Constitution italienne comme étant « d’inspiration essentiellement socialiste »(P. Togliatti : Rapport à la Quatrième Conférence nationale du Parti communiste italien)
Le Togliatti de 1955 prenait donc le contre-pied du Togliatti de 1948.
Depuis lors, le camarade Togliatti a amorcé un virage serré et littéralement divinisé la Constitution italienne.
Il disait en 1960, dans son rapport au IXe Congrès du Parti communiste italien : « Nous agissons dans le cadre de la Constitution, et à tous ceux qui nous demandent ce que nous ferions si nous étions au pouvoir, nous leur rappelons la Constitution. Nous avons dit dans notre ’Déclaration-programme’ et nous répétons qu’il est possible de réaliser ’dans la pleine légalité constitutionnelle les réformes de structure nécessaires pour saper le pouvoir des groupes monopolistes, défendre les intérêts de tous les travailleurs contre les oligarchies économiques et financières, exclure du pouvoir ces oligarchies et y faire accéder les classes laborieuses. » C’est-à-dire que le camarade Togliatti demandait que la classe ouvrière et les autres couches travailleuses d’Italie agissent en toute légalité, dans le respect de la constitution bourgeoise et prennent appui sur celle-ci pour « saper le pouvoir des groupes monopolistes ».
Au Xe Congrès du Parti communiste italien, en 1962, le camarade Togliatti et certains autres camarades ont réaffirmé leur « fermeté » à ce sujet. Ils disaient que « la voie italienne vers le socialisme passe par l’édification d’un nouvel Etat décrit dans la Constitution … et par l’accès à sa direction de nouvelles classes dirigeantes » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») ; que cette voie signifie « réclamer et imposer la transformation de l’Etat à la lumière de la Constitution, conquérir dans le pays de nouvelles positions de force et promouvoir la transformation socialiste de la société » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») ; et qu’elle signifie « former un bloc socio-politique capable de réaliser, dans la légalité constitutionnelle, la transformation socialiste de l’Italie » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »). Ils affirment encore qu’on peut « s’opposer à la nature de classe et aux objectifs de classe de l’Etat tout en acceptant totalement et en défendant le pacte constitutionnel et au moyen d’une action étendue et concertée dont le but est d’amener l’Etat dans la voie du progrès et de la démocratie, voie de développement vers le socialisme » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien », voir Unita, Supplément, 13 septembre 1962)
En un mot, ils veulent « réaliser le socialisme » dans le cadre de la constitution bourgeoise de l’Italie, et ils oublient complètement que, quoiqu’il y ait quelques articles joliment libellés dans la Constitution italienne, la bourgeoisie monopoliste peut, selon ses besoins et lorsque l’occasion se présente, frapper la Constitution de nullité, tant qu’elle détient la machine d’Etat et toutes les forces armées.
Les marxistes-léninistes doivent dénoncer l’hypocrisie des constitutions bourgeoises, mais ils devraient, en même temps, se servir de certains articles de ces constitutions comme d’une arme contre la bourgeoisie. Refuser, dans des circonstances ordinaires, d’utiliser la constitution bourgeoise pour mener les luttes légales possibles est une erreur, qualifiée par Lénine de maladie infantile « gauchiste ». Mais demander aux membres du Parti et au peuple d’avoir une foi aveugle dans la constitution bourgeoise, propager l’idée que pareille constitution peut apporter le socialisme au peuple, et parler du respect qu’on lui accorde, de sa défense et de son application totale comme du « pivot de tout le programme politique du Parti » (« Points essentiels de la Déclaration-programme du Parti communiste italien »), ce n’est plus simplement de « la maladie infantile », mais, et toujours selon les paroles de Lénine, être moralement prisonnier des préjugés bourgeois.
Le « crétinisme parlementaire » contemporain
Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien admettent que la réalisation du socialisme implique la lutte, qu’il doit être réalisé par la lutte. Mais ils limitent la lutte du peuple au cadre autorisé par la constitution bourgeoise et attribuent le rôle principal au Parlement.
Décrivant comment naquit la Constitution italienne actuelle, le camarade Togliatti disait : « Cela est dû au fait que les communistes, en 1946, ont rejeté la voie de la rupture de la légalité qui aurait été de tenter désespérément de s’emparer du pouvoir et ont choisi, au contraire, la voie de la participation aux travaux de la Constituante » (P. Togliatti : Rapport présenté en mars 1956 à la session Plénière du Comité central du Parti communiste italien)
C’est ainsi qu’il en est venu à considérer la « voie parlementaire » comme celle par laquelle la classe ouvrière et les autres couches travailleuses d’Italie « avanceront vers le socialisme ».
Pendant des années, le camarade Togliatti et d’autres camarades ne se lassent d’affirmer :
« Aujourd’hui, on a formulé, d’une manière générale, la thèse selon laquelle est possible une avance vers le socialisme selon les règles de la légalité démocratique et même parlementaire » (P. Togliatti : Rapport au VIIIème Congrès du Parti communiste italien). « Cette thèse est celle de 1944-46 » (Voir P. Togliatti : « Le Parlement et la lutte pour le socialisme », Pravda, 7 mars 1956)
« Il est possible de passer au socialisme…par la voie parlementaire. » (Voir P. Togliatti : « Le Parlement et la lutte pour le socialisme », Pravda, 7 mars 1956)
Nous aimerions discuter, ici, avec le camarade Togliatti et les autres camarades la question de savoir si le passage au socialisme peut être effectué par la voie parlementaire.
La question doit être claire. Nous avons toujours soutenu que la participation à la lutte parlementaire est une forme de combat légale que la classe ouvrière doit utiliser, dans des conditions données. Refuser d’utiliser la lutte parlementaire quand c’est nécessaire, et jouer à la révolution et user de phraséologie révolutionnaire, cela, tous les marxistes-léninistes le combattent résolument. Pour cette question, nous nous en sommes toujours tenus entièrement à la théorie exposée par Lénine dans La Maladie infantile du communisme (« le gauchisme »). Certains déforment délibérément notre point de vue. Ils affirment que ’’nous nions catégoriquement la nécessité de la lutte parlementaire, que nous nions qu’il y ait tours et détours dans le développement de la révolution, que nous croyons que la révolution des peuples de tous les pays peut être réalisée en une seule et belle matinée, ou encore, comme le camarade Togliatti le dit le 10 janvier de cette année dans sa réponse à notre article, que nous demandons aux camarades du Parti communiste italien « de se borner à prêcher et à attendre le grand jour de la révolution ». Ces derniers temps, la dénaturation de l’argumentation adverse est pratiquement devenue la manière d’agir favorite des gens qui se disent « marxistes-léninistes », quand ils s’en prennent aux communistes chinois.
Posons la question : Quelles divergences y a-t-il entre nous et Togliatti et d’autres camarades quant à l’attitude à adopter envers les parlements bourgeois ?
Tout d’abord, nous estimons que les parlements bourgeois, y compris le parlement italien actuel, ont un caractère de classe et sont un ornement de la dictature bourgeoise. Comme le dit Lénine, dans « n’importe quel pays parlementaire, depuis l’Amérique jusqu’à la Suisse, depuis la France jusqu’à l’Angleterre, la Norvège, etc., la véritable besogne d’Etat « se fait dans la coulisse ; elle est exécutée par les départements, les chancelleries, les états-majors » (V. I, Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25). Et « plus la démocratie [bourgeoise] est puissamment développée, et plus la Bourse et les banquiers se soumettent les parlements bourgeois » (V. I. Lénine : « La Révolution prolétarienne et le renégat Kautsky », Œuvres, tome 28)
En second lieu, nous sommes pour la lutte parlementaire, mais contre la propagation d’illusions à son sujet, contre le « crétinisme parlementaire ». Comme l’a dit aussi Lénine, le parti de la classe ouvrière « est pour l’utilisation de la lutte parlementaire et la participation à cette lutte, mais dénonce impitoyablement le ’crétinisme parlementaire’, c’est-à-dire la conviction que la lutte parlementaire constitue la seule ou, dans tous les cas, la principale forme de la lutte politique » (V. I. Lénine : « Rapport sur le Congrès d’Unification du Parti Ouvrier social-démocrate de Russie », Œuvres, tome 10)
En troisième lieu, nous sommes pour l’utilisation de la plate-forme parlementaire de la bourgeoisie dans le but de dénoncer les tares de la société bourgeoise et la duperie des parlements bourgeois. Dans des conditions déterminées, et pour son propre intérêt, la bourgeoisie peut admettre des représentants du parti de la classe ouvrière au Parlement, et c’est précisément par cette méthode qu’elle cherche à duper, à corrompre et même à acheter certains représentants ou dirigeants ouvriers. Le parti de la classe ouvrière qui s’engage dans la lutte parlementaire doit donc avoir une haute vigilance et maintenir constamment son indépendance politique.
Togliatti et d’autres camarades ont littéralement rejeté la conception léniniste en ce qui concerne ces trois questions. Ils considèrent le Parlement comme une chose au-dessus des classes, ils exagèrent, sans raison aucune, le rôle du parlement bourgeois et considèrent celui-ci comme la seule voie par laquelle le socialisme pourrait être réalisé en Italie.
Togliatti et d’autres camarades sont complètement obsédés par le parlement italien.
Ils estiment qu’avec une « loi [électorale] honnête » et que « tant que dans le Parlement se constitue une majorité conforme à la volonté du peuple » (P. Togliatti : « Le Parlement et la lutte pour le socialisme »), on pourra réaliser « de profondes réformes sociales » (P. Togliatti : « Le Parlement et la lutte pour le socialisme »), « modifier les rapports actuels de production, et, partant, modifier le régime de la grande propriété » (« Thèses politiques adoptées par le IXe Congrès du Parti communiste italien »)
Les choses peuvent-elles vraiment se dérouler ainsi ?
Non. Elles ne peuvent être que ceci : Dans les conditions où la bourgeoisie maintient son contrôle sur la machine d’Etat bureaucratique et militaire, il est impossible, pour le prolétariat et ses proches alliés, dans une situation normale et en se conformant aux lois électorales de la bourgeoisie, d’obtenir une majorité au Parlement, et l’auraient-ils, qu’elle ne serait nullement assurée. Après la Seconde guerre mondiale, les partis communistes et ouvriers de nombre de pays capitalistes ont eu des sièges au Parlement et certains d’entre eux en ont eu un bon nombre. Cependant, la bourgeoisie recourt invariablement à toutes sortes de moyens pour empêcher les députés communistes de devenir majorité, soit par l’annulation des élections, la dissolution du Parlement, la révision des lois électorales et de la Constitution, soit en interdisant le Parti communiste. Pendant longtemps, après la Seconde guerre mondiale, le Parti communiste français recueillit le plus grand nombre de voix et il fut le premier parti au Parlement, mais la bourgeoisie monopoliste amenda les lois électorales, révisa même la Constitution, et il se vit arracher un grand nombre de sièges.
La classe ouvrière peut-elle devenir la classe dirigeante en s’en tenant simplement aux votes électoraux ? L’histoire n’a vu aucune classe opprimée devenir classe dirigeante par les élections. La bourgeoisie fait l’éloge de la démocratie parlementaire et du système électoral, mais il n’est pas un pays où la bourgeoisie ait pris la place des seigneurs féodaux par des voix gagnées aux scrutins. Et à plus forte raison, il est impossible pour le prolétariat de devenir la classe dirigeante par les élections. Comme Lénine le dit dans Salut aux communistes italiens, français et allemands : « Seuls des misérables ou des imbéciles peuvent croire que le prolétariat doit d’abord conquérir la majorité en participant aux votes effectués sous le joug de la bourgeoisie, sous le joug de l’esclavage salarié, et après seulement conquérir le pouvoir. C’est le comble de la stupidité ou de l’hypocrisie ; c’est remplacer la lutte de classes et la révolution par des votes sous l’ancien régime, sous l’ancien pouvoir. » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 30)
L’histoire nous enseigne que lorsqu’un « parti ouvrier » renonce à son programme révolutionnaire prolétarien, et dégénère, devient un appendice de la bourgeoisie, donc un parti politique servile, il se peut que la bourgeoisie lui permette de détenir pour un temps la majorité au Parlement et de former le gouvernement. Tel fut le cas avec le Parti travailliste en Grande-Bretagne, et tel fut également le cas avec quelques partis social-démocrates qui ont trahi leur programme révolutionnaire socialiste. Mais ceci ne peut que maintenir et consolider la dictature de la bourgeoisie, et ne change absolument en rien l’é tat d’oppression et d’exploitation dans lequel se trouve le prolétariat. Le Parti travailliste anglais a été trois fois au pouvoir depuis 1924, mais la Grande-Bretagne impérialiste est restée impérialiste, et la classe ouvrière britannique qui n’avait pas le pouvoir n’est pas plus avancée. Le camarade Togliatti songe-t-il à marcher sur les traces du Parti travailliste anglais et des partis social-démocrates ?
Les Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien disent que le Parlement doit être investi de tous les pouvoirs nécessaires pour légiférer, diriger et contrôler l’Exécutif. Nous ignorons qui, au bout du compte, doit investir le Parlement des pouvoirs auxquels aspirent certains dirigeants du Parti communiste italien. Appartient-il à la bourgeoisie ou au camarade Togliatti et d’autres camarades de le faire ? Les faits montrent que les pouvoirs du parlement bourgeois lui sont investis par la classe bourgeoise. Etendus ou non, ils sont déterminés par les intérêts de la bourgeoisie. Peu importe la somme des pouvoirs qu’elle délègue à son Parlement, il ne sera jamais l’organe du véritable pouvoir de l’Etat bourgeois. Les organes du véritable pouvoir dont la bourgeoisie se sert pour dominer le peuple, ce sont l’appareil bureaucratique et l’appareil militaire de la bourgeoisie, et non le parlement bourgeois.
Si des communistes renoncent à la voie de la révolution prolétarienne et de la dictature du prolétariat, s’ils n’espèrent qu’obtenir par voie d’élections la majorité au parlement bourgeois et attendent que leur soient « investis » des pouvoirs pour diriger l’Etat quelle différence y a-t-il donc entre cette voie et la voie parlementaire prônée par Kautsky ? Celui-ci disait : « …le but de notre lutte politique reste donc, comme par le passé, la conquête du pouvoir d’Etat par l’acquisition de la majorité au Parlement et la transformation de ce dernier en maître du gouvernement » (Voir K. Kautsky : « Tactique nouvelle ». Neve Zeit, No 46, 1912.) Critiquant la voie kautskiste, Lénine disait que ce n’était que de « l’opportunisme le plus pur et le plus plat » (V.I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25)
Parlant, en mars 1956, de l’utilisation de la voie légale et de la voie parlementaire, le camarade Togliatti disait : « Ce que nous faisons aujourd’hui n’aurait été ni possible ni juste il y a trente ans, c’aurait été du pur opportunisme comme nous l’avions affirmé alors. » (P. Togliatti : Rapport présenté en mars 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien)
Qu’est-ce qui permet d’affirmer que ce qui était ni juste ni possible il y a trente ans est, aujourd’hui, juste et possible ? Qu’est-ce qui permet d’affirmer que ce qui était pur opportunisme dans le passé est brusquement devenu du marxisme-léninisme pur ? Les propos du camarade Togliatti reviennent en fait à reconnaître que la voie adoptée est identique à celle des opportunistes de jadis.
Cependant, lorsque d’autres faisaient remarquer qu’il avait emprunté la voie parlementaire, le camarade Togliatti changeait de ton et affirmait en juin 1956 : « Je voudrais reprendre ces camarades qui ont dit — comme si c’était une chose indiscutable — que la voie italienne de développement vers le socialisme signifie la voie parlementaire et rien de plus. Ce n’est pas vrai. » (P. Togliatti : Rapport présenté en juin 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien) Et il ajoutait : « Réduire cette lutte aux campagnes pour le Parlement et attendre la conquête des 51 pour cent serait non seulement naïf, mais illusoire. » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien) Le camarade Togliatti prétend que ce qu’il préconise, ce n’est pas seulement « un parlement qui fonctionne » (P. Togliatti : Rapport présenté en juin 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien), mais aussi « un grand mouvement populaire » (P. Togliatti : Rapport présenté en juin 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien)
Réclamer « un grand mouvement populaire », c’est fort bien. Et les marxistes-léninistes ne peuvent que s’en réjouir. D’autre part, il faut reconnaître qu’il y a actuellement en Italie un mouvement de masse très vaste, et que le Parti communiste italien a fait beaucoup de travail dans ce domaine. Mais il est regrettable que le camarade Togliatti limite le mouvement de masse au cadre établi par le Parlement. Il estime que le mouvement de masse « fait surgir du pays des exigences qui, ensuite, pourront être satisfaites par le Parlement dans lequel les forces populaires ont obtenu une représentation suffisamment forte. » (P. Togliatti : Rapport présenté en juin 1956 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien)
Les exigences montent des masses, le Parlement les satisfait, telle est la formule du mouvement de masse du camarade Togliatti.
Le principe même du marxisme-léninisme en matière de tactique est comme suit : Dans tout mouvement de masse, comme dans la lutte parlementaire, conserver l’indépendance politique du prolétariat, opérer une nette distinction entre ce dernier et la bourgeoisie, fondre intérêts immédiats et intérêts à long terme du mouvement, et lier le mouvement du moment à l’ensemble de la lutte de la classe ouvrière et à son but final. Celui qui oublie et enfreint ce principe tombera dans le bourbier du bernsteinisme et acceptera en fait la formule célèbre : « Le but final n’est rien, le mouvement est tout ». Au fond, quelle différence y a-t-il entre la formule du camarade Togliatti sur le mouvement de masse et celle de Bernstein ?
Le capital monopoliste d’Etat peut-il devenir un « instrument plus efficace pour combattre le développement des monopoles » ?
En réponse à un éditorial du quotidien chinois Renmin Ribao, un des principaux dirigeants du Parti communiste italien, le camarade Luigi Longo, écrivait le 4 janvier 1963 : « Notre Xe Congrès a aussi réaffirmé avec force que le point sur lequel nous sommes fermes et que nous appelons la voie italienne vers le socialisme est de reconnaître, aujourd’hui, dans les actuelles conditions internationales et nationales, alors que le régime capitaliste existe toujours, qu’ il est possible et nécessaire de parvenir à la liquidation des monopoles et de leur pouvoir économique et politique ». Ces camarades estiment possible, par l’adoption des méthodes établies par eux, de changer les rapports de production capitalistes distant actuellement en Italie, de changer « le système de grande propriété » de la bourgeoisie monopoliste italienne.
Les mesures économiques de « réformes de structure », élaborées par Togliatti et d’autres camarades, consistent, selon eux, en ceci : « Exiger des nationalisations déterminées, exiger une programmation, exiger une intervention de l’Etat en vue d’assurer un développement économique démocratique, et ainsi de suite » (P. Togliatti : Intervention faite en avril 1962 à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien) ; et « élargir l’intervention directe de l’Etat dans la vie économique, par la programmation, la nationalisation de secteurs productifs entiers, etc. » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »)
Togliatti et d’autres camarades imagineront peut-être encore d’autres « mesures ».
Le camarade Togliatti et les autres ont évidemment le droit de penser et de dire ce qu’ils veulent, nul n’a à s’en mêler, et nous non plus ne désirons nous en mêler. Mais puisqu’ils veulent que les autres pensent et parlent comme eux, nous ne pouvons que continuer à discuter les questions soulevées par eux.
Prenons d’abord la question de l’intervention de l’Etat dans la vie économique.
Depuis que l’Etat est l’Etat, et quel qu’il soit, Etat des maîtres d’esclaves, des seigneurs féodaux ou des capitalistes, n’est-il pas intervenu dans la vie économique ? Quand ces classes se trouvent en période ascendante, leur Etat peut intervenir dans la vie économique sous une forme donnée ; quand ces classes se trouvent en période descendante, cette intervention peut revêtir une autre forme.
Dans les Etats de même nature, l’intervention dans la vie économique peut revêtir des formes différentes, selon les pays. Pour le moment, nous ne parlerons pas de la façon dont l’Etat esclavagiste ou l’Etat féodal intervenait dans la vie économique, mais seulement de l’intervention de l’Etat bourgeois.
Quelle que soit la politique adoptée par l’Etat bourgeois, politique de conquête coloniale, politique visant à l’hégémonie mondiale, politique libre-échangiste ou protectionniste, ce sont là autant d’interventions de l’Etat dans la vie économique et les Etats bourgeois les pratiquent depuis bien longtemps pour défendre les intérêts de la bourgeoisie. Ce genre d’intervention a joué un grand rôle dans le développement du capitalisme. L’intervention de l’Etat ans la vie économique n’est donc nullement une nouveauté venant de faire son apparition en Italie.
Par « intervention de l’Etat dans la vie économique », Togliatti et d’autres camarades n’entendent peut-être pas les politiques citées plus haut et pratiquées depuis longtemps par la bourgeoisie, mais peut-être et surtout la « nationalisation », comme ils disent.
Parlons donc de « nationalisation ».
En fait, les différentes sortes d’Etats qui ont fait suite à la société esclavagiste ont eu chacun une « économie nationalisée » différente. L’Etat dirigé par les maîtres d’esclaves avait une économie nationalisée, et l’Etat des seigneurs féodaux aussi. L’Etat bourgeois a une économie nationalisée depuis le jour de sa naissance. Aussi s’agit-il de connaître la nature de cette « nationalisation » et au service de quelle classe elle est.
Le vieux militant communiste qu’est le camarade Togliatti n’ignore certainement pas ce que Engels dit dans Socialisme utopique et socialisme scientifique :
« Quoi qu’il en soit, avec trusts ou sans trusts, il faut finalement que le représentant officiel de la société capitaliste, l’Etat en [la production] prenne la direction. La nécessité de la transformation en propriété d’Etat apparaît d’abord dans les grands organismes de communication : postes, télégraphes, chemins de fer. »
Engels a consacré une très importante note à cet énoncé :
« Je dis : il faut. Car ce n’est que dans le cas où les moyens de production et de communication sont réellement trop grands pour être dirigés par les sociétés par actions, où donc l’étatisation est devenue une nécessité économique, c’est seulement en ce cas qu’elle signifie un progrès économique, même si c’est l’Etat actuel qui l’accompli t qu’elle signifie qu’on atteint à un nouveau stade, préalable à la prise de possession de toutes les forces productives par la société elle-même. Mais on a vu récemment, depuis que Bismarck s’est lancé dans les étatisations, apparaître certain faux socialisme qui même, çà et là, a dégénéré en quelque servilité, et qui proclame socialiste sans autre forme de procès, toute étatisation, même celle de Bismarck. Evidemment, si l’étatisation du tabac était socialiste, Napoléon et Metternich compteraient parmi les fondateurs du socialisme. Si l’Etat belge, pour des raisons politiques et financières très terre à terre, a construit lui-même ses chemins de fer principaux ; si Bismarck, sans aucune nécessité économique, a étatisé les principales lignes de chemins de fer de la Prusse, simplement pour pouvoir mieux les organiser et les utiliser en temps de guerre, pour faire des employés de chemins de fer un bétail électoral au service du gouvernement et surtout pour se donner une nouvelle source de revenus indépendante des décisions du Parlement, — ce n’était nullement là des mesures socialistes, directes ou indirectes, conscientes ou inconscientes. Autrement ce seraient des institutions socialistes que la Société royale de commerce maritime, la Manufacture royale de porcelaine et même, dans la troupe, le tailleur de compagnie, voire l’étatisation proposée avec le plus grand sérieux, vers les années 30, sous Frédéric-Guillaume III, par un gros malin, — celle des bordels. »
Ensuite, Engels met l’accent sur la nature de ce qui est appelé « propriété d’Etat » dans les pays capitalistes. Il dit :
« Mais ni la transformation en sociétés par actions et en trusts, ni la transformation en propriété d’Etat ne supprime la qualité de capital des forces productives. Pour les sociétés par actions et les trusts, cela est évident. Et l’Etat moderne n’est à son tour que l’organisation que la société bourgeoise se donne pour maintenir les conditions extérieures générales du mode de production capitaliste contre des empiétements venant, des ouvriers comme des capitalistes isolés. L’Etat moderne, quelle qu’en soit la forme, est une machine essentiellement capitaliste : l’Etat des capitalistes, le capitaliste collectif en idée. Plus il fait passer de forces productives dans sa propriété, et plus il devient capitaliste collectif en fait, plus il exploite de citoyens. Les ouvriers restent des salariés, des prolétaires. Le rapport capitaliste n’est pas supprimé, il est au contraire poussé à son comble. Mais, arrivé à ce comble, il se renverse. La propriété d’Etat sur les forces productives n’est pas la solution du conflit, mais elle renferme en elle le moyen formel, la façon d’approcher de la solution. »
Ces passages ont été écrits par Engels à l’époque où le capital monopoliste commençait à apparaître et où le capitalisme commençait à passer de la libre concurrence au monopole. Ses arguments ont-ils perdu leur valeur alors que le capital monopoliste en vient à dominer complètement ? Peut-on dire qu’à l’heure actuelle, la nationalisation dans les pays capitalistes a transformé et même supprimé la « qualité de capital des forces productives » ? Peut-on dire qu’à l’heure actuelle, le capitalisme monopoliste d’Etat, constitué par le canal de la nationalisation capitaliste ou d’autres moyens, a cessé d’être le capitalisme ? A tout ceci, on ne peut répondre par l’affirmative pour d’autres pays, et le pourrait-on pour l’Italie ?
Il nous faut parler ici de capitalisme monopoliste d’Etat et de capitalisme monopoliste d’Etat italien.
La concentration des capitaux engendre le monopole. Depuis la Première guerre mondiale, le capitalisme mondial fit un pas en avant non seulement en direction du monopole en général, mais encore, de ce dernier en direction du monopole d’Etat .Après la Première guerre mondiale, et en particulier après la crise économique du monde capitaliste en 1929, le capitalisme monopoliste d’Etat a pris un nouvel essor, dans tous les pays impérialistes. Durant la Seconde guerre mondiale, la bourgeoisie monopoliste des pays impérialistes belligérants a utilisé au maximum le capital monopoliste d’Etat pour tirer des bénéfices exorbitants de la guerre. Depuis la guerre, le capital monopoliste d’Etat est même devenu, à des degrés différents, le facteur économique déterminant dans quelques pays impérialistes.
Des principaux pays impérialistes du monde, l’Italie est celui où les fondements du capitalisme sont relativement faibles. Elle s’est engagée il y a longtemps dans la voie du capitalisme d’Etat, afin de concentrer les forces du capital, et de pouvoir accaparer des profits maximums, concurrencer le capital monopoliste international, élargir ses débouchés et parvenir à un nouveau partage des colonies. Le gouvernement italien fonda, en 1914, le Consortium pour la Subvention de l’Industrie (Consorzio per Sovvenzione su Valore Industria) pour fournir crédits et subventions aux grandes banques et entreprises industrielles. Le règne fasciste de Mussolini a vu une fusion plus poussée des organes d’Etat et des organisations du capital monopoliste. Lors de la grande crise de 1929-1933 en particulier, le gouvernement italien acheta massivement, aux cotes d’avant la crise, des actions de banques et autres entreprises en voie de faillite, et, en soumettant de nombreuses banques et entreprises au contrôle de l’Etat créa la Société de Reconstruction industrielle (Istituto per la Ricostruzione Industriale) et constitua ainsi une gigantesque organisation du capital monopoliste d’Etat. Après la Seconde guerre mondiale, le capital monopoliste italien, y compris le capital monopoliste d’Etat, qui avait servi de fondement au régime fasciste, fut laissé intact et se développa même à un rythme plus rapide. Aujourd’hui, les entreprises du capital monopoliste d’Etat et les entreprises mixtes, à capitaux monopolistes et d’Etat et privés, représentent environ 30 pour cent de l’ensemble de l’économie italienne.
Quelles conclusions les marxistes-léninistes doivent-ils tirer du développement du capitalisme monopoliste d’Etat ? Peut-on dire qu’en Italie, comme l’on affirmé le camarade Togliatti et certains autres camarades du Parti communiste italien, les entreprises nationalisées, c’est-à-dire le capital monopoliste d’Etat, peuvent être « en opposition avec les monopoles » (A. Pesenti : « S’agit-il de la structure ou de la superstructure ? »), être l’ « expression des masses populaires » (A. Pesenti : « S’agit-il de la structure ou de la superstructure ? »), un « instrument plus efficace pour combattre le développement des monopoles » (A. Pesenti : « Formes directes et indirectes de l’intervention de l’Etat ») ?
Il n’est pas possible qu’un marxiste-léniniste tirer pareilles conclusions.
Le capitalisme monopoliste d’Etat est le capitalisme monopoliste où capital monopoleur et pouvoir d’Eta t sont fondus ensemble. Utilisant à plein les pouvoirs de l’Etat, il accélère la concentration et l’accumulation des capitaux, intensifie l’exploitation des travailleurs, accélère l’absorption des entreprises moyennes et petites et l’absorption des différents groupes monopolistes entre eux. De plus, il aide à renforcer le capital monopoliste sur le plan international, pour la concurrence et l’expansion. Sous couvert d »’intervention de l’Etat dans la vie économique » et d’ »opposition aux monopoles », et au nom de l’ »E tat », il use de duperies et, par des méthodes cachées et habiles, fait passer des bénéfices énormes dans les mains des groupes monopolistes.
Les formes principales sous lesquelles le capital monopoliste d’Etat rend service à la bourgeoisie monopoliste sont :
1. Utilisation des fonds du Trésor et des impôts payés par la population pour prendre sur lui les risques auxquels s’exposent les capitalistes en investissant et assurer ainsi de grands bénéfices aux monopoles.
Exemple : L’Etat garantit le principal et paye l’intérêt des bons d’emprunt émis par la Société de Reconstruction industrielle, la plus grande organisation monopoliste d’Etat italienne. Les porteurs reçoivent en général un intérêt annuel, qui va de 4,5 à 8%, et en plus touchent des dividendes si l’entreprise fait des bénéfices.
2. Redistribution au profit des organisations du capital monopoliste d’une grande partie du revenu national, par la législation et le budget d’Etat, afin d’assurer d’importants bénéfices aux groupes monopolistes.
Exemple : En 1955, les sommes consacrées par le gouvernement italien aux achats, commandes, etc., passés aux groupes monopolistes privés représentaient environ un tiers du budget d’Etat.
3. Achat et revente des entreprises par l’Etat, forme utilisée tour à tour et qui permet, à un moment donné, de passer à l’Etat les entreprises déficitaires, les entreprises en voie de faillite ou celles qui, après leur nationalisation, seront profitables à certains monopoles ; cession, à un moment donné, d’entreprises rentables aux groupes monopolistes privés.
Exemple : Selon des chiffres établis par l’économiste italien Gino Longo, de 1920 à 1955, pour acheter les actions des banques et autres entreprises en voie de faillite, les différents gouvernements italiens ont dépensé au total 1.647 milliards de lires (valeur 1953), soit un montant qui représente plus de la moitié du capital nominal de 1955 de toutes les sociétés italiennes par actions ayant un capital atteignant ou dépassant 50 millions de lires. Par ailleurs, selon des données incomplètes, la seule Société de Reconstruction industrielle a revendu, depuis sa fondation et jusqu’en 1958, 491 milliards de lires (valeur 1953) d’actions d’entreprises rentables aux organisations monopolistes privées.
4. Utilisation du pouvoir d’Etat pour renforcer la concentration et l’accumulation des capitaux, et intensifier l’absorption des entreprises moyennes et petites par le capita monopoliste.
Exemple : De 1948 à 1958, le capital nominal, pris en bloc, des dix plus grands monopoles qui contrôlent les artères vitales de l’économie nationale italienne s’est vu multiplié par 15. Celui de la Fiat (Fabbrica Italiana Automobili Torino) s’est notamment accru de 24 fois, celui de la Compagnie italienne du Ciment (Italcemento) de 39 fois. Les dix plus grandes sociétés italiennes représentent moins de 0,04 pour cent du nombre total des sociétés italiennes par actions ; cependant, les actions privées qu’elles détiennent ou contrôlent directement se chiffrent par 64 pour cent du montant global du capital privé par actions de l’Italie .Le nombre des entreprises moyennes et petites faisant faillite ne cessa de s’élever au cours de cette époque.
5. Luttes acharnées du capital monopoliste d’Etat pour la conquête de débouchés extérieurs au nom de l’ »Etat « et par les moyens diplomatiques et utilisation du capital monopoliste d’Etat par la bourgeoisie monopoliste italienne, en qualité d’instrument de propagation du néocolonialisme.
Exemple : La Société nationale italienne des Hydrocarbures (Ente Nazionale Idrocarburi) a obtenu, rien qu’entre 1956 et 1961, le droit de prospecter, d’exploiter ou de vendre du pétrole, ou de construire des pipelines et des raffineries de pétrole dans les pays suivants : République arabe unie, Iran, Libye, Maroc, Tunisie, Ethiopie, Soudan, Jordanie, Inde, Yougoslavie, Autriche, Suisse. Par-là, elle a installé les capitalistes, monopolistes italiens sur le marché mondial du pétrole.
Les faits mentionnés montrent clairement que les monopoles d’Etat et privés sont bien deux formes qui se complètent et qui permettent à la bourgeoisie monopoliste d’arracher des profits énormes. Le développement du capital monopoliste d’Etat aggrave les contradictions inhérentes au régime impérialiste. Il ne peut, en aucun cas, « limiter et briser le pouvoir des grands groupes dirigeants monopolistes » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »), ou transformer les contradictions inhérentes au régime impérialiste, comme le prétendent les camarades Togliatti et autres.
Certains, en Italie, sont d’avis que le capitalisme n’y est plus, aujourd’hui, ce qu’ il était il y a 50 ans, qu’ il est dans une « phase nouvelle ». Ils le qualifient de « néocapitalisme ». Et ils prétendent avec obstination que sous ce « néocapitalisme » ou dans cette « phase nouvelle » du capitalisme, les principes fondamentaux du marxisme-léninisme sur la lutte des classes, la révolution socialiste, la conquête du pouvoir par le prolétariat et la dictature du « ’prolétariat, etc., ont perdu toute utilité. A leurs yeux, ce « néocapitalisme » aurait pour rôle de régler, au sein même du régime capitaliste, les contradictions fondamentales du capitalisme, par la « programmation », le « progrès technique », le « plein emploi », l’ »Etat du bien-être » et d’autres moyens, ainsi que par le truchement des « alliances internationales ». Cette « théorie », le mouvement catholique et les social-réformistes sont les premiers à la soutenir et la propager. Et c’est là que Togliatti et d’autres camarades ont, en fait, puisé l’argumentation pour leur théorie des « réformes de structure ». Togliatti et d’autres camarades estiment que « les concepts de planification et de programmation économiques considérés un temps comme une prérogative socialiste sont aujourd’hui toujours plus largement discutés et acceptés » (Rapport au Xe Congrès du Parti communiste)
Selon le camarade Togliatti, premièrement, l’économie nationale peut se développer suivant un plan non seulement dans les pays socialistes, mais aussi en régime capitaliste, et, deuxièmement, la planification et la programmation économiques propres au socialisme peuvent être acceptées en Italie capitaliste.
Les marxistes-léninistes ont toujours estimé qu’il est à la fois nécessaire et possible, pour un pays capitaliste, d’adopter des mesures politiques qui régularisent d’une certaine manière l’économie nationale, dans l’intérêt de la bourgeoisie prise dans son ensemble. Cette idée se trouve dans les citations que nous avons faites d’Engels. A l’époque du capital monopoliste, cette fonction régulatrice de l’Etat capitaliste s’exerce essentiellement dans l’intérêt de la bourgeoisie monopoliste. Cette régularisation peut même s’exercer parfois aux dépens de certains groupes monopoles, mais jamais elle ne nuira aux intérêts généraux de la bourgeoisie monopoliste, au contraire, elle représentera ses intérêts généraux.
Lénine a exposé magistralement le sujet. Il disait : « …l’erreur la plus répandue est l’affirmation réformiste bourgeoise prétendant que le capitalisme monopoliste ou le capitalisme monopoliste d’Etat n’est déjà plus du capitalisme, qu’il peut dès lors être qualifié de ’socialisme d’Etat’, etc. Naturellement, les trusts n’ont jamais donné, ne donnent pas jusqu’à présent, ni ne peuvent donner une planification intégrale. Ils introduisent pourtant une planification ; les magnats du Capital escomptent par avance le volume de la production à l’échelle nationale ou même internationale et règlent cette production d’après un plan, mais nous restons cependant en régime capitaliste, dans une nouvelle phase, certes, mais indéniablement en régime capitaliste. » (V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25)
Cependant, certains camarades du Parti communiste italien soutiennent qu’en réalisant une « planification » dans l’Italie dominée par la bourgeoisie monopoliste, il est possible de résoudre les grands problèmes suscités par l’histoire de l’Italie y, compris « les problèmes concernant la liberté et l’émancipation de la classe ouvrière » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») Comment pareil miracle serait-il possible ?
Le camarade Togliatti dit : « Le capitalisme monopoliste d’Etat, qui est l’aspect moderne revêtu par le régime capitaliste dans presque tous les grands pays, est, comme l’a affirmé Lénine, l’étape au-delà de laquelle, pour aller de l’avant, il ne reste que le socialisme. Cependant, de cette nécessité objective, il faut faire surgir un mouvement conscient. » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien)
Nous savons tous que Lénine a dit : « …le capitalisme… est allé de l’avant, du capitalisme à l’impérialisme, des monopoles à l’étatisation .Tout cela a rapproché la révolution socialiste et lui a créé des conditions objectives favorables » (V. I. Lénine : « La Septième Conférence de Russie du P.O.S.D.R. (b), (Conférence d’Avril) », Œuvres, tome 24). Il a aussi exprimé cette même idée à d’autres moments. Il est clair que le point sur lequel Lénine met l’accent, c’est que le développement du capitalisme monopoliste d’Etat « doit constituer…un argument en faveur de la proximité…de la révolution socialiste, et non point un argument pour tolérer la négation de cette révolution et les tentatives de farder le capitalisme, à quoi s’emploient tous les réformistes » (V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25) En parlant de « réformes de structure » et de « mouvement conscient », le camarade Togliatti use, exactement comme les réformistes, d’un langage ambigu pour se dérober au problème de la révolution socialiste posé par le marxisme-léninisme et il s’efforce de farder le capitalisme italien.
Souvenons-nous des enseignements du grand Lénine
De la série de questions exposées plus haut, on peut voir que la théorie des « réformes de structure » de Togliatti et des autres camarades est, de pied en cap, une révision générale du marxisme-léninisme dans le domaine fondamental de l’Etat et de la révolution.
A ce sujet, le camarade Togliatti hissait en 1956 déjà, le drapeau de la révision générale du marxisme-léninisme. En juin de cette année-là, il déclarait à la session plénière du Comité central du Parti communiste italien :
« D’abord Marx et Engels, puis Lénine ont affirmé, en exposant cette théorie [la théorie de la dictature du prolétariat — note de la Rédaction], qu’on ne peut se servir de l’appareil d’Etat bourgeois pour édifier une société socialiste. Cet appareil doit être brisé et détruit par la classe ouvrière, il doit être remplacé par l’appareil d’Etat prolétarien — c’est-à-dire l’appareil d’Etat dirigé par la classe ouvrière elle-même. Ce n’est pas là le point de vue que Marx et Engels adoptèrent dès le début mais celui qu’ils ont soutenu après l’expérience de la Commune de Paris et qui a été en particulier développé par Lénine. Ce point de vue conserve-t-il aujourd’hui encore toute sa valeur ? C’est là un sujet à discuter. En fait, lorsque nous affirmons qu’ il est possible d’avancer vers le socialisme non seulement sur une base démocratique mais encore en utilisant les formes parlementaires, il « est évident que nous rectifions quelque peu ce point de vue, compte tenu des transformations qui sont intervenues et qui sont en train d’intervenir dans le monde. »
Là, le camarade Togliatti pose à l’historien marxiste », tout en déformant fondamentalement l’histoire du marxisme.
Voyons donc les faits suivants :
Dans le Manifeste du Parti communiste, écrit en 1847, Marx et Engels déclarent en termes fort clairs que « la première étape dans la révolution ouvrière est la constitution du prolétariat en classe dominante, la conquête de la démocratie » (K. Marx & F. Engels : Œuvres complètes, tome 4) Et Lénine dit à ce sujet que « l’on trouve formulée ici l’une des idées les plus remarquables et les plus importantes du marxisme au sujet de l’Etat ,celle de la ’dictature du prolétariat’ (comme devaient s’exprimer Marx et Engels après la Commune de Paris) » (V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution » , Œuvres, tome 25)
Après avoir fait le bilan de l’expérience tirée de la période 18481851, Marx posa la question de la destruction de la vieille machine d’Etat. Comme le dit Lénine, « ici, la question est posée de façon concrète et la déduction est éminemment précise, définie, pratiquement tangible : toutes les révolutions antérieures ont perfectionné la machine de l’Etat ; or il faut la briser, la démolir ». Lénine ajoute : « Cette déduction est le principal, l’essentiel, dans la doctrine marxiste de l’Etat ». (V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25)
En se basant sur l’expérience de 1848-1851, Marx en vint à la conclusion que, à la différence des révolutions antérieures, la révolution prolétarienne ne se contenterait pas de transférer la machine bureaucratique et militaire de l’Etat d’un groupe de personnes à un autre. Il ne donna pas de réponse concrète, à l’époque à, la question de savoir ce qui remplacerait la machine d’Etat dé truite. Comme le fit remarquer Lénine, la raison en est que Marx posait les tâches en s’en tenant strictement à l’expérience historique et non en partant simplement de déductions logiques (Voir V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25) Sur cette question concrète, rien ne pouvait être tiré des données d’avant 1852, mais plus tard, en 1871, la Commune de Paris inscrivit la question à l’ordre du jour. « La Commune est la première tentative faite par la révolution prolétarienne pour briser la machine d’Etat bourgeoise ; elle est la forme politique ’enfin trouvée’ par quoi l’on peut et l’on doit remplacer ce qui a été brisé. » (V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25)
Par-là, nous voyons que la destruction de la machine d’Etat bourgeoise et ce qui doit en prendre la place sont deux questions distinctes, et Marx donna d’abord réponse à l’une, puis l’autre, sur la base de l’expérience historique de périodes différentes. Le camarade Togliatti dit que Marx et Engels n’ont soutenu la nécessité pour le prolétariat de briser la machine d’Etat bourgeoise qu’après l’expérience de la Commune de Paris en 1871. C’est déformer les faits.
Tout comme Kautsky, le camarade Togliatti « admet la conquête du pouvoir sans la destruction de la machine d’Etat » (V. I. Lénine : « L’Etat et la révolution », Œuvres, tome 25) Il estime que la machine d’Etat bourgeoise peut être conservée et que les objectifs que s’assigne le prolétariat peuvent être atteints si l’on utilise cette machine d’Etat toute prête. Il serait bon que le camarade Togliatti voie comment Lénine a réfuté Kautsky à de multiples reprises sur ce sujet. Lénine dit : « Ou bien Kautsky renonce complètement au passage du pouvoir politique aux mains de la classe ouvrière, ou bien il admet que la classe ouvrière prenne en main la vieille machine d’Etat bourgeoise ; mais il n’admet d’aucun manière qu’elle la brise, la démolisse et la remplace par une machine nouvelle, prolétarienne. Qu’on ’interprète’ et qu’on ’explique’ comme on voudra le raisonnement de Kautsky, dans les deux cas sa rupture avec le marxisme et son ralliement à la bourgeoisie sont évidents. » (V. I. Lénine : « La Révolution prolétarienne et le renégat Kautsky », Œuvres, tome 28)
Alors que le camarade Togliatti vante son programme comme étant « un approfondissement et un développement du marxisme-léninisme », il doit être noté que la théorie des « réformes de structure » fut, en fait, imaginée par Kautsky. Dans Révolution sociale, Kautsky disait : « II va de soi que nous n’arriverons pas au pouvoir dans les conditions du régime actuel. La révolution elle-même suppose des luttes de longue haleine, d’une grande profondeur, qui auront eu le temps de modifier notre structure politique et sociale actuelle. » Il en ressort que, Kautsky essaya, voici longtemps, de substituer la théorie des « réformes de structure » à la doctrine de la révolution prolétarienne et que la camarade Togliatti a hérité de ses oripeaux. Néanmoins, si nous examinons soigneusement leurs vues respectives, nous constaterons que le camarade Togliatti va plus loin que Kautsky, car celui-ci admettait que « nous n’arriverons pas au pouvoir dans les conditions du régime actuel », tandis que le camarade Togliatti, lui, soutient précisément qu’il est possible d’arriver au pouvoir « dans les conditions du régime actuel ».
Togliatti et les autres camarades estiment que pour progresser vers le socialisme, l’Italie a besoin d’un « régime démocratique nouveau » qui serait établi conformément à la merveilleuse Constitution italienne, et que soit formé, en même temps, un « bloc historique nouveau » ou un « nouveau bloc des forces dirigeantes sociales et politiques » (Voir « Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »). Ils prétendent que c’est ce « bloc historique nouveau », plutôt que le prolétariat italien, qui est « le porteur d’une révolution politique aussi bien qu’intellectuelle et morale » (Voir « Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») de l’Italie. Nul ne sait ce qu’est vraiment ce « bloc historique nouveau » ni comment il sera formé. Parfois, Togliatti et les autres camarades disent que ce « bloc historique nouveau » se trouve « sous la direction de la classe ouvrière » (Voir « Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien »), et d’autres fois qu’il est lui-même le « bloc des forces dirigeantes ». Ce genre de bloc, est-ce une organisation de classe du prolétariat ou est-ce une alliance de différentes classes ? Est-il placé sous la direction de la classe ouvrière, ou de la bourgeoisie, ou d’une autre classe ? Seul Dieu le sait ! En définitive, ils se servent de cette formulation fantaisiste et vague simplement pour se soustraire à l’idée fondamentale du marxisme-léninisme sur la révolution prolétarienne et la dictature du prolétariat.
L’idée du camarade Togliatti est, premièrement, qu’il n’est pas nécessaire de briser la machine d’Etat bourgeoise, et, deuxièmement, qu’il n’est pas nécessaire de mettre une machine d’Etat prolétarienne sur pied. Il rejette donc l’expérience de la Commune de Paris.
A la suite de Marx et d’Engels, Lénine n’a cessé d’expliquer l’expérience de la Commune de Paris, et il a insisté invariablement sur son caractère d’universalité pour le prolétariat de tous les pays du monde. Il n’a pas dissocié l’expérience de la Révolution russe de celle de la Commune de Paris, mais tenait la première pour un prolongement et un développement de la seconde. Il considérait les Soviets comme « reproduisant le type d’Etat élaboré par la Commune de Paris » (V. I. Lénine : « Les Tâches du prolétariat dans notre révolution », Œuvres, tome 24), et estimait que la Commune de Paris a « fait le premier pas sur cette voie, le premier pas d’une portée historique et universelle, et le pouvoir des Soviets a fait le second » (V. I. Lénine : « 1er Congrès de l’Internationale communiste », Œuvres, tome 28) dans la voie de la destruction de la vieille machine d’Etat.
Ayant rejeté l’expérience de la Commune de Paris, il est immanquable que le camarade Togliatti oppose carrément ses idées au marxisme-léninisme, rejette carrément l’expérience de la Révolution d’Octobre, et rejette l’expérience des révolutions populaires qui ont eu lieu dans différents pays depuis la Révolution d’Octobre ; il oppose donc sa « voie italienne » à la voie commune à J’ensemble du prolétariat international.
Le camarade Togliatti a affirmé : « Aujourd’hui, la question de faire ce qui a été fait en Russie ne se pose pas aux ouvriers italiens. » (Voir P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste) Voilà la substance du problème.
Dans les Points essentiels de la Déclaration-programme adoptés par le VIIIème Congrès du Parti communiste italien en 1956, il est dit : « Dans les premières années après la Première guerre mondiale, la conquête révolutionnaire du pouvoir par les méthodes qui avaient conduit à la victoire en Union soviétique s’est révélée impossible ». Voilà encore la substance du problème.
Parlant de l’expérience de la révolution chinoise, le camarade Togliatti a déclaré que dans la période de la conquête du pouvoir par le peuple chinois, la ligne politique du Parti communiste chinois « ne correspondait en aucune façon à la ligne stratégique et tactique suivie, par exemple, par les bolcheviks au cours de la révolution de mars à octobre [1917] » (P. Togliatti : Conclusions prononcées au Xe Congrès du Parti communiste italien). C’est là une déformation de l’histoire de la révolution chinoise. La révolution chinoise a ses particularités propres, dans les conditions concrètes de la Chine. Cependant, comme le camarade Mao Zedong l’a souligné à plusieurs reprises, la ligne politique de notre Parti a été élaborée en fonction du principe de l’union de la vérité universelle du marxisme-léninisme avec la pratique concrète de la révolution chinoise. Nous avons toujours considéré la révolution chinoise comme un prolongement de la Grande Révolution d’Octobre, et il va sans dire qu’elle est aussi un prolongement de l’œuvre de la Commune de Paris. Quant à la question la plus fondamentale de la doctrine de l’Etat et de la révolution, c’est-à-dire la destruction de la vieille machine d’Etat militaire et bureaucratique et la mise sur pied de la machine d’Etat de la dictature du prolétariat, l’expérience essentielle de la révolution chinoise correspond entièrement à celle de la Révolution d’Octobre et de la Commune de Paris. Comme le camarade Mao Zedong le disait en 1949, dans son célèbre De la dictature démocratique populaire : « S’engager dans la voie des Russes, telle a été la conclusion. » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome IV) Pour défendre ses révisions des principes fondamentaux du marxisme-léninisme, ou les « rectifications », comme il les appelle avec ses camarades, le camarade Togliatti affirme que l’expérience de la révolution chinoise « ne correspondait en aucune façon » à celle de la Révolution d’Octobre, que ce sont deux choses différentes. Mais comment cette déformation formation peut-elle aider en quoi que ce soit la théorie des « réformes de structure » de Togliatti et des autres camarades ?
Leur théorie des « réformes de structure », c’est celle du « passage pacifique » ou, selon leurs propres paroles, « la marche vers le socialisme dans la démocratie et la paix » (« Thèses du Xe Congrès du Parti communiste italien ») Toute leur théorie et leur programme tout entier débordent de louanges pour « la paix entre les classes » en société capitaliste et ne contiennent absolument rien sur la « marche vers le socialisme » ; il n’y a que « paix » entre les classes et pas du tout de « passage » d’une société à une autre.
Le marxisme-léninisme est la science de la révolution prolétarienne, et il se développe sans cesse dans la pratique révolutionnaire. Ici et là, un principe ou une conclusion doit inévitablement faire place à un nouveau principe ou une nouvelle, conclusion convenant aux nouvelles conditions historiques. Mais cela ne signifie pas que les principes fondamentaux du marxisme-léninisme peuvent être rejetés ou révisés. La théorie marxiste-léniniste sur l’Etat et la révolution n’est nullement un principe ou une conclusion quelconque, mais un principe fondamental né du bilan marxiste-léniniste de l’expérience tirée des luttes du prolétariat international. Rejeter ou réviser ce principe fondamental, c’est se détourner entièrement du marxisme-léninisme.
Nous voudrions, à notre tour, donner « respectueusement » et en toute franchise, un conseil au camarade Togliatti : Ne soyez pas orgueilleux au point de déclarer que vous ne ferez pas ce qu’a fait la Révolution russe d’Octobre. Un peu plus de modestie et rappelez-vous ce que le grand Lénine nous enseignait en 1920 : « …dans certaines questions très essentielles de la révolution prolétarienne, tous les pays passeront inévitablement par où a passé la Russie » (V. I. Lénine : « La Maladie infantile du communisme, le ’gauchisme’) », Œuvres, tome 31)
Soutenir ou combattre les principes de la stratégie prolétarienne avancés par Lénine et confirmés par la victoire de la Grande Révolution d’Octobre, voilà en quoi réside la différence fondamentale entre, d’une part, les léninistes et, d’autre part, les révisionnistes modernes et ceux qui marchent sur leurs traces.
Une analyse de l’histoire
Soudain, tout dernièrement, des gens qui se disent « marxistes-léninistes » se sont remis à manifester bruyamment leur opposition à la thèse des communistes chinois selon laquelle l’impérialisme et tous les réactionnaires sont des tigres en papier. Tantôt, ils disent que c’est là « mésestimer l’impérialisme « et « démobiliser les masses », puis, que c’est « méconnaître la puissance du socialisme » ; un moment, ils la traitent de « pseudo-révolution », puis de thèse « due à la crainte ». Ils essaient de crier plus fort que le voisin et ils rivalisent d’efforts, chacun tentant de « surpasser le précédent » et voulant montrer qu’il ne « retarde » pas. Leurs propos sont bourrés de contradictions et tiennent presque de l’aberration délirante, et tout cela dans le but de démolir cette thèse. Dans tous leurs propos perce cependant une faiblesse fatale ; ils n’ont jamais osé aborder, ne serait-ce qu’avec un minimum de sérieux, la thèse scientifique de Lénine selon laquelle l’impérialisme est du capitalisme parasitaire, décadent et moribond.
Au Xe Congrès du Parti communiste italien, le camarade Togliatti fut le premier à déclencher l’attaque Il dit : « II est…faux…d’affirmer que l’impérialisme est un simple tigre en papier qu’un coup d’épaule pourrait renverser » (P. Togliatti : Rapport au Xe Congrès du Parti communiste italien) Et aussi : « S’ils [les impérialistes] sont des tigres en papier, pourquoi tant d’énergie et tant de luttes pour les combattre ? » (Voir « Ramenons la discussion à ses termes réels ») Si le camarade Togliatti était un élève d’école primaire qui, au cours d’une leçon sur le sens des mots, répondrait que le tigre en papier est du papier encollé sous forme de tigre, il obtiendrait facilement la mention « satisfaisant ». Mais les vues simplistes ne sont pas de mise lorsqu’il s’agit d’étudier des questions théoriques. Le camarade Togliatti prétend avoir apporté « une contribution positive à l’approfondissement au développement du marxisme-léninisme, doctrine révolutionnaire de la classe ouvrière » (Voir « Ramenons la discussion à ses termes réels »), et cependant, c’est une réponse d’écolier qu’il donne à une question théorique sérieuse. Quoi de plus stupide et de plus ridicule ?
La thèse « L’impérialisme et tous les réactionnaires sont des tigres en papier » du camarade Mao Zedong a toujours été limpide. Voici ce qu’il dit à ce sujet :
« Pour lutter contre l’ennemi, nous avons formé, au cours d’une longue période, le concept que voici : Du point de vue stratégique, nous devons mépriser tous les ennemis, et du point de vue tactique, tenir sérieusement compte de tous les ennemis. Ce qui veut dire aussi que nous devons mépriser l’ennemi dans son ensemble mais en tenir sérieusement compte en ce qui concerne chacune de toutes les questions concrètes. Si nous ne méprisons pas l’ennemi dans son ensemble, nous commettrons une erreur d’opportunisme. A eux deux, Marx et Engels, déjà à leur époque, ont déclaré que le capitalisme serait renversé dans le monde entier. Mais sur les questions concrètes et sur les questions se rapportant à chaque ennemi en particulier, si nous ne tenons pas sérieusement compte de l’ennemi, nous commettrons une erreur d’aventurisme ». (Mao Zedong : Intervention faite en 1957 à la Conférence des Représentants des Partis communistes et ouvriers, Moscou)
Ceux qui refusent d’entendre la vérité sont plus sourds que les sourds. Qui a jamais dit qu’un coup d’épaule suffirait à renverser l’impérialisme ? Qui a jamais dit qu’ il ne faut ni énergie ni lutte pour renverser l’impérialisme ?
Nous voulons citer encore le camarade Mao Zedong :
« De même qu’il n’y a aucune chose au monde dont la nature ne soit double (c’est la loi de l’unité des contraires), de même l’impérialisme et tous les réactionnaires ont une double nature — ils sont de vrais tigres et en même temps des tigres en papier. Dans le passé, la classe des propriétaires d’esclaves, la classe féodale des propriétaires fonciers et la bourgeoisie furent, avant leur conquête du pouvoir et quelque temps après, pleines de vitalité, révolutionnaires et progressistes ; c’étaient de vrais tigres. Mais, dans la période postérieure, comme leurs antagonistes — la classe des esclaves, la classe paysanne et le prolétariat — grandissaient et engageaient la lutte contre elles, une lutte de plus en plus violente, ces classes régnantes se sont transformées peu à peu en leur contraire, sont devenues réactionnaires, rétrogrades, des tigres en papier. Et, en fin de compte, elles ont été renversées par le peuple ou le seront un jour. Même dans la lutte à outrance que leur livrait le peuple, ces classes réactionnaires, rétrogrades, décadentes avaient encore cette double nature. En un sens, elles étaient de vrais tigres ; elles dévoraient les gens, les dévoraient par millions et par dizaines de millions. La lutte populaire traversait une période de difficultés et d’épreuves, et son chemin faisait bien des tours et détours. Le peuple chinois a dû consacrer plus de cent ans à la lutte pour liquider la domination en Chine de l’impérialisme, du féodalisme et du capitalisme bureaucratique, et donner des dizaines de millions de vies humaines, avant de parvenir à la victoire en 1949. Voyez, n’étaient-ce pas des tigres vivants, des tigres de fer, de vrais tigres ? Mais, en fin de compte, ils sont devenus des tigres en papier, des tigres morts, des tigres en fromage de soya. Ce sont là des faits historiques. Est-ce qu’on ne les a pas vus, est-ce qu’on n’en a pas entendu parler ? En vérité, il y en a eu des milliers et des dizaines de milliers ! Des milliers et des dizaines de milliers ! Ainsi, considérés dans leur essence, du point de vue de l’avenir et sous l’angle stratégique, l’impérialisme et tous les réactionnaires doivent être tenus pour ce qu’sil sont : des tigres en papier. C’est là-dessus que se fonde notre pensée stratégique. D’autre part, ils sont aussi des tigres vivants, des tigres de fer, de vrais ils mangent les hommes. C’est là-dessus que se fonde notre pensée tactique. » (Voir Mao Zedong : « Entretien avec la journaliste américaine Anna Louise Strong », note introductive, Œuvres choisies, tome IV)
Cette citation montre le double caractère des trois grandes classes exploiteuses non seulement dans les différentes phases de leur développement historique, mais aussi, dans leur ultime combat à mort avec les peuples. C’est, de toute évidence, une analyse marxiste-léniniste de l’histoire.
La ligne de partage entre révolutionnaires et réformistes
L’histoire nous enseigne que tous les révolutionnaires, y compris, bien entendu, les révolutionnaires bourgeois, en arrivent à être des révolutionnaires, lorsqu’ils ont pardessus tout l’audace de mépriser l’ennemi, de mener la lutte et d’arracher la victoire. Ceux qui craignent l’ennemi et n’ont pas le courage de combattre et d’arracher la victoire sont des lâches, des réformistes ou des capitulationniste ; ils ne seront jamais des révolutionnaires.
Tous les vrais révolutionnaires de l’histoire ont eu l’audace de mépriser les réactionnaires, de mépriser les classes dominantes réactionnaires, de mépriser l’ennemi, parce que, dans les conditions historiques de l’époque, le peuple commençait à ressentir la nécessité de remplacer le vieux système par un système nouveau, et était confronté avec de nouvelles tâches historiques. Lorsque le besoin de changer existe, le changement devient irrésistible et il s’affirme tôt ou tard, qu’on le veuille ou non. Marx a dit : « Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience. » (K. Marx & F. Engels : « ’Contribution à la critique de l’économie politique’, Préface », Œuvres complètes, tome 13) Le besoin de changement social suscite la conscience révolutionnaire des hommes. Nul ne pourrait poser de tâches révolutionnaires ou faire la révolution avant que les conditions historiques n’aient engendré le besoin d’un changement, malgré tous les efforts. Mais, lorsque les conditions historiques ont engendré le besoin de changement, alors apparaissent les révolutionnaires et les combattants populaires d’avant-garde qui ont l’audace de défier et de dénoncer les classes dominantes réactionnaires, et les traitent comme des tigres en papier. Et par tout ce qu’ils entreprennent, ils affermissent toujours la volonté de combat du peuple et rabattent la morgue de l’ennemi. C’est l’histoire qui en décide ainsi, et c’est ainsi qu’il doit en être dans la révolution sociale. Quant à savoir à quel moment une révolution éclate et, ayant éclaté, si elle triomphera rapidement ou s’il se passera du temps avant qu’elle ne triomphe, ou si elle connaîtra des difficultés et des revers nombreux et sérieux, voire même de graves échecs : avant la victoire finale, et ainsi de suite, tout dépend de différents facteurs historiques concrets. Néanmoins, même s’il y a de graves difficultés, de gros revers, voire des échecs sérieux, les vrais révolutionnaires continueront à avoir l’audace de mépriser l’ennemi et à croire au triomphe de la révolution.
Après la défaite de la révolution de 1927, le peuple et le Parti communiste chinois furent plongés dans une situation extrêmement difficile. Révolutionnaire prolétarien, le camarade Mao Zedong nous fit entrevoir alors les perspectives de développement et de victoire de la révolution chinoise. Il estimait, d’une part, que grossir, sans raison, les forces subjectives de la révolution, et de ce fait minimiser les forces contre-révolutionnaires, est un point de vue unilatéral, erroné ; et d’autre part, il soulignait que grossir les forces contre-révolutionnaires, et de ce fait sous-estimer le potentiel des forces révolutionnaires, est également un point de vue unilatéral, erroné. Le développement et la victoire de la révolution chinoise ont confirmé les appréciations faites à l’époque par le camarade Mao Zedong. La situation mondiale actuelle prise dans son ensemble est des plus favorables pour tous les peuples. Mais, face à cette situation, il se trouve des gens dont les efforts convergent pour attaquer à plaisir la thèse selon laquelle il faut mépriser l’ennemi sur le plan stratégique ; ils grossissent les forces de l’impérialisme, contribuent à accroître l’arrogance des impérialistes et de toute la réaction et aident les impérialistes à intimider les peuples révolutionnaires. Par-là, ils n’affermissent pas la volonté de combat des peuples ni ne rabattent la morgue de l’ennemi, ils accroissent la morgue de l’ennemi et tentent d’abattre la volonté de combat des peuples.
Lénine a dit : « Si vous voulez la révolution…vous devez être forts. » (V. I. Lénine : « Pas de mensonges ! notre force réside dans l’affirmation de la vérité ! », Œuvres, tome 9) Mais pourquoi les révolutionnaires doivent-ils l’être ; et pourquoi le sont-ils nécessairement ? Parce que les révolutionnaires représentent les forces neuves et montantes de la société, ils croient à la force du peuple, et ils ont l’immense puissance du peuple comme appui. Alors que les réactionnaires sont faibles, et le sont immanquablement, parce qu’ils sont coupés du peuple ; aussi forts qu’ils puissent paraître sur le moment, ils sont voués à la défaite. « Pour la méthode dialectique, ce qui importe avant tout, ce n’est pas ce qui à un moment donné paraît stable, mais commence déjà à dépérir ; ce qui importe avant tout, c’est ce qui naît et se développe si même, à un moment donné, la chose semble instable, car selon la méthode dialectique, il n’y a d’invincible que ce qui naît et se développe. » (J. Staline : « Le Matérialisme dialectique et le matérialisme historique », Les Questions du léninisme)
Pourquoi Lénine a-t-il maintes et maintes fois parlé de l’impérialisme en termes de « colosse aux pieds d’argile ». d’ »épouvantail » ? En dernière analyse, c’est parce qu’il se basait sur les lois objectives du développement de la société, qu’il croyait que les forces naissantes de la société vaincraient finalement les forces décadentes et que les forces populaires triompheraient finalement des forces antipopulaires. Et cela n’est-il pas vrai ?
A tous ceux qui cherchent à démolir la thèse des communistes chinois sur les tigres en papier que sont l’impérialisme et tous les réactionnaires, nous aimerions dire : vous devriez d’abord démolir la thèse de Lénine. Pourquoi ne réfutez-vous pas directement la thèse de Lénine qui présente l’impérialisme comme un « colosse aux pieds d’argile « , un « épouvantail », etc.? Qu’est-ce donc que tout cela, sinon une preuve de votre couardise face à la vérité ?
Tant la formulation de Lénine sur l’impérialisme « colosse aux pieds d’argile », « épouvantail », etc., que celle des communistes chinois, « l’impérialisme et tous les réactionnaires sont des tigres en papier », sont des métaphores très justes pour tout marxiste-léniniste sensé. Elles sont basées sur les lois du développement social ; leur but est de montrer le problème dans son essence, en une langue claire et compréhensible. Les grands marxistes-léninistes, et de nombreux savants et philosophes recourent fréquemment aux métaphores dans leurs explications, et ils y ont souvent réussi, leurs métaphores ayant grande précision et beaucoup de profondeur.
Obligés de se montrer d’accord avec l’image de Lénine sur la nature de l’impérialisme, certains s’attachent à combattre la métaphore utilisée par les communistes chinois. Pour quelle raison ? Pourquoi s’obstinent-ils ? Pourquoi tout ce tintamarre à ce sujet, en ce moment ? Ceci ne fait que montrer la pauvreté de leur formation idéologique, et bien entendu ils ont un but.
Quel est donc ce but ?
Après la Seconde guerre mondiale, le camp socialiste a beaucoup grandi en force. Dans les vastes régions d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, les révolutions dirigées contre les impérialistes et leurs laquais gagnent sans cesse du terrain. Au sein des pays impérialistes, les contradictions, multiples et inconciliables, tant intérieures qu’extérieures, sont comme des volcans, menaçant constamment la domination de la bourgeoisie monopoliste. Les pays impérialistes intensifient la course aux armements et tentent par tous les moyens d’engager leur économie nationale dans l’orbite de la militarisation. Tout ceci pousse l’impérialisme dans l’impasse .Pour remédier au sort présent et à venir de leurs patrons, les brain-trusts de l’impérialisme ont dressé des plans et encore des plans, mais ne sont pas parvenus à trouver d’issue à la situation sans espoir dans laquelle se trouvent leurs patrons. Et cependant, dans cette conjoncture internationale, certains, qui se disent « marxistes-léninistes », ont l’esprit brouillé ; une sorte de mélancolie « fin de siècle » a supplanté, chez eux, la raison froide. Ils ne songent nullement à guider les peuples pour qu’ils se débarrassent des malheurs dus à l’impérialisme et ne croient pas les peuples capables de rejeter le malheur et de se créer une vie nouvelle. Il serait plus exact de dire qu’ils se préoccupent davantage du sort de l’impérialisme et de toute la réaction que de celui du socialisme et des peuples. Si, en ce moment, ils font beaucoup de bruit autour de la puissance de l’ennemi, s’sil exagèrent cette puissance et battent la grosse caisse pour l’impérialisme ce n’est pas pour combattre l’aventurisme, mais bien pour empêcher les peuples et nations opprimés de se dresser, de faire la révolution ; ils utilisent tout simplement l’ »opposition à l’aventurisme » pour parvenir à leur vrai but qui est de s’opposer à la révolution.
Parlant en 1906 des partis libéraux de la Douma russe, Lénine disait que « les partis libéraux au sein de la Douma ne soutenaient la volonté du peuple que d’une manière fort insuffisante et timide ; ils se souciaient bien plus de modérer et d’affaiblir la lutte révolutionnaire en cours que de liquider l’ennemi du peuple. » (V. I. Lénine : « Résolution (II) du Comité de Saint-Pétersbourg du P.O.S.D.R. sur l’attitude envers la Douma d’Etat », Œuvres, tome 10)
Actuellement, dans les rangs du mouvement ouvrier, on trouve des libéraux du genre de ceux dont parlait Lénine, c’est-à-dire des libéraux bourgeois. Ceux-ci se soucient, non pas de battre les impérialistes et les autres ennemis du peuple, mais de tempérer et d’affaiblir les luttes révolutionnaires, qui prennent tant d’ampleur, des peuples et nations opprimés. Evidemment, on peut difficilement attendre de pareilles gens qu’ils saisissent la thèse selon laquelle les marxistes-léninistes doivent mépriser l’ennemi sur le plan stratégique.
De grands exemples
Après s’en être pris à ce que les communistes chinois disent au sujet de « mépriser l’ennemi sur le plan stratégique », des « héros » ont ensuite tourné leur colère contre « en tenir sérieusement compte sur le plan tactique ». Ils prétendent que mépriser l’ennemi sur le plan stratégique et en tenir sérieusement compte sur le plan tactique tient de la « double comptabilité » et est « contraire au marxisme-léninisme ». En apparence, ces « héros » admettent toujours que la stratégie n’est pas la tactique et que la tactique est au service des buts stratégiques. Mais en fait, ils nient toute différence entre stratégie et tactique et confondent entièrement la notion de stratégie avec celle de tactique. Ce n’est pas la tactique qu’ils font dépendre de la stratégie, mais celle-ci qu’ils font dépendre de la tactique. Ils s’enlisent dans les luttes quotidiennes, et dans les luttes concrètes ils s’accommodent de tout, versant ainsi dans le capitulationnisme, ou agissent à la légère, versant alors dans l’aventurisme .Et tout cela, en fin de compte, dans le but de rejeter les principes stratégiques des marxistes-léninistes révolutionnaires et les buts stratégiques de tous les communistes.
Comme dit plus haut, si les révolutionnaires de l’histoire ont été des révolutionnaires, c’est qu’ils eurent, avant tout, l’audace de mépriser l’ennemi, de combattre et de vaincre. Nous voulons ajouter ici que, similairement, le révolutionnaire qui a su faire triompher la révolution est celui qui non seulement a osé mépriser l’ennemi, mais aussi a su en tenir sérieusement compte et agir avec prudence dans chaque question particulière et dans chaque lutte concrète. D’une façon générale, si un révolutionnaire, en particulier un révolutionnaire prolétarien, ne parvient pas à agir de la sorte, il ne pourra diriger la révolution dans la bonne voie, et il risque de verser dans l’aventurisme, portant ainsi préjudice à la révolution et la faisant même échouer.
Durant toute leur vie de combat au service de la cause du prolétariat, Marx, Engels et Lénine ont toujours méprisé l’ennemi sur le plan stratégique, tout en en tenant sérieusement compte sur le plan tactique. Ils ont toujours mené la lutte sur deux fronts, selon la situation concrète, tant contre l’opportunisme de droite et le capitulationnisme que contre l’aventurisme « de gauche ». Et ils nous ont fourni de grands exemples.
Marx et Engels ont achevé le Manifeste du Parti communiste par ces mots célèbres :
« Les communistes ne s’abaissent pas à dissimuler leurs opinions et leurs projets. Ils proclament ouvertement que leurs buts ne peuvent être atteints que par le renversement violent de tout l’ordre social passé. Que les classes dirigeantes tremblent à l’idée d’une révolution communiste ! Les prolétaires n’y ont rien à perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à y gagner. » (K. Marx & F. Engels : Œuvres complètes, tome 4)
Ceci a toujours été le principe et le but de la stratégie générale de l’ensemble du mouvement communiste international. Toutefois, même dans le Manifeste du Parti communiste, Marx et Engels ont tenu soigneusement compte des conditions différentes dans lesquelles se trouvaient les communistes des divers pays. Ils n’ont jamais fixé de formules types rigides et ne les ont jamais imposées aux communistes ; car, de tous temps, les marxistes ont considéré qu’il appartient aux communistes de chaque pays de fixer, en se basant sur les conditions propres à leur pays, les tâches stratégiques et tactiques concrètes dans les différentes phases historiques.
Marx et Engels ont eu une part directe dans les luttes révolutionnaires de masse de 18481849. Ils considéraient la révolution démocratique bourgeoise de l’époque comme le prélude de la révolution socialiste prolétarienne, mais ils s’opposèrent au mot d’ordre de lutte immédiate « Pour une République des ouvriers ». C’était là leur stratégie concrète de l’époque. D’ autre part, ils s’opposèrent aussi à des tentatives pour déclencher la révolution en Allemagne par les armes à partir de l’extérieur, considérant que ce serait là « jouer à la révolution ». Ils proposèrent le retour au pays, « l’un après l’autre, « des ouvriers allemands résidant à l’étranger, pour qu’ils s’y lancent dans la lutte révolutionnaire des masses. Autrement dit, dans les cas concrets, la conception et la façon d’agir de Marx et d’Engels sur le plan tactique différaient foncièrement de celles des aventuristes « de gauche ». Dans les questions de lutte concrète, ils s’efforçaient toujours de partir d’une base solide.
Au printemps de 1850, peu après l’échec des révolutions de 1848-1849, Marx et Engels exprimèrent l’opinion, dans une analyse de la situation de l’époque, qu’une nouvelle révolution était proche. Mais en été, ils s’aperçurent qu’une reprise immédiate de la révolution n’était plus possible. Certains dédaignèrent les possibilités objectives et essayèrent de créer une « révolution artificielle » en usant de phraséologie révolutionnaire au lieu de tenir compte de la réalité du développement révolutionnaire. Ils dirent aux ouvriers qu’ils devaient s’emparer immédiatement du pouvoir ou bien aller se coucher. Marx et Engels combattirent résolument cet aventurisme. Comme Lénine l’a dit : « Lorsque l’époque des révolutions de 1848-1849 fut close, Marx se dressa contre toute tentative de jouer à la révolution (lutte contre Shapper-Willich), exigeant que l’on sût travailler dans la nouvelle époque qui préparait, sous une ’paix’ apparente, de nouvelles révolutions. » (V. I. Lénine : « Karl Marx », Œuvres, tome 21)
En septembre 1870, quelques mois avant la Commune de Paris, Marx mit le prolétariat français en garde contre une insurrection en temps inopportun. Cependant, lorsque les ouvriers se virent forcés de se soulever en mars 1871, il salua avec enthousiasme l’héroïsme sans borne des ouvriers de la Commune de Paris. Dans une lettre à L. Kugelmann, il écrivait :
« De quelle souplesse, de quelle initiative historique, de quelle faculté de sacrifice sont doués ces Parisiens ! Affamés et ruinés pendant six mois, par la trahison intérieure plus encore que par l’ennemi, ils se soulevèrent sous les baïonnettes prussiennes comme s’il n’y avait jamais eu de guerre entre la France et l’Allemagne, comme si l’étranger n’était pas aux portes de Paris ! L’histoire ne connaît pas encore d’exemple d’une pareille grandeur ! S’ils succombent, seul leur, caractère ’bon garçon’ en sera cause. » (« Lettres de Karl Marx à L. Kugelmann »)
Voyez comment Marx louait les ouvriers de la Commune de Paris pour leur héroïque dédain de l’ennemi. C’est en partant du but stratégique général de tout le Mouvement communiste international qu’il fit cette estimation de la Commune de Paris, en disant : « L’histoire ne connaît pas encore d’exemple d’une pareille grandeur ! » »
Il est vrai que la Commune de Paris commit des erreurs ; elle ne marcha pas aussitôt sur Versailles, centre de la contrerévolution, et le Comité central résilia trop tôt ses fonctions ; il est vrai aussi qu’elle échoua ; cependant, l’étendard de la révolution prolétarienne déployé par la Commune de Paris restera à jamais glorieux.
Dans La Guerre civile en France, Marx dit : « Le Paris ouvrier, avec sa Commune, sera célébré à jamais comme le glorieux fourrier d’une société nouvelle. Le souvenir de ses martyrs est conservé pieusement dans le grand cœur de la classe ouvrière. Ses exterminateurs, l’histoire les a déjà cloués à un pilori éternel, et toutes les prières de leurs prêtres n’arriveront pas à les racheter. »
Lors du XXIe anniversaire de la Commune de Paris, Engels écrivait : « Ce qui fait la grandeur historique de la Commune, c’est son caractère sincèrement international, c’est le défi qu’elle jeta hardiment à tout sentiment de chauvinisme bourgeois. Le prolétariat de tous les pays l’a bien compris. » (K. Marx & F. Engels : « Projet d’appel pour le 21e anniversaire de la Commune de Paris », Œuvres complètes, tome 22)
Mais, aujourd’hui, il semble que notre camarade Togliatti estime que la haute appréciation de Marx et Engels sur la Commune de Paris, qui est de portée universelle pour la cause révolutionnaire du prolétariat international, ne vaut pas la peine qu’on en parle encore.
Comme l’a montré Engels, après la défaite de la Commune, les ouvriers de Paris eurent besoin d’un long répit pour refaire leurs forces. Mais sans tenir compte des conditions existantes, les blanquistes préconisèrent une nouvelle insurrection. Engels critiqua sévèrement cet aventurisme.
Le capitalisme connaissait une période de développement pacifique en Europe et en Amérique ; Marx et Engels continuèrent à lutter sur les deux fronts dans k mouvement ouvrier. D’une part, ils blâmèrent sévèrement les phrases creuses sur la révolution, préconisèrent l’utilisation de la « légalité bourgeoise » pour lutter contre la bourgeoisie ; et d’autre part, ils critiquèrent sévèrement, en fait beaucoup plus sévèrement, les idées opportunistes qui dominaient alors au sein de la social-démocratie, car les opportunistes avaient perdu toute fermeté révolutionnaire prolétarienne, se cantonnaient dans la lutte légale et n’étaient pas décidés à recourir aussi aux moyens illégaux dans leur lutte contre la bourgeoisie.
Cela montre qu’à tout moment, y compris la période du développement pacifique, Marx et Engels s’en sont tenus inébranlablement aux principes stratégiques de la révolution prolétarienne, tout en adoptant prudemment des tactiques souples répondant aux conditions concrètes de chaque période.
Entré dans l’arène de l’histoire de la lutte révolutionnaire du prolétariat, Lénine, en grand marxiste qu’il était, formula de la façon la plus précise la question de la stratégie révolutionnaire du prolétariat russe. Dans la conclusion de son premier ouvrage célèbre, Ce que sont les « amis du peuple » et comment ils luttent contre les social-démocrates, il dit :
« Lorsque les représentants avancés de cette classe [la classe ouvrière] se seront assimilé les idées du socialisme scientifique, l’idée du rôle historique de l’ouvrier russe ; lorsque ces idées seront largement diffusées et que, parmi les ouvriers, les organisations solides seront fondées, susceptibles de transformer l’actuelle guerre économique, menée en ordre dispersé par les ouvriers, en une lutte de classe consciente, alors l’OUVRIER russe, prenant la tête de tous les éléments démocratiques, abattra l’absolutisme et conduira le PROLETARIAT RUSSE (aux côtés du prolétariat de TOUS LES PAYS), par la voie directe d’une lutte politique déclarée, vers la VICTOIRE DE LA REVOLUTION COMMUNISTE. » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 1)
Cette stratégie établie par Lénine a toujours servi d’orientation générale à l’avant-garde du prolétariat russe et au peuple russe dans leur lutte pour la libération.
Lénine s’y est toujours tenu strictement. C’est pour cela qu’il a mené des luttes intransigeantes contre les populistes, les « marxistes légaux », les « économistes », les menchéviks, les opportunistes et révisionnistes de la Ile Internationale, et contre Trotski et Boukharine.
En 1902, lors de l’élaboration du Programme du Parti ouvrier social-démocrate de Russie, de graves divergences surgirent entre Lénine et Plékhanov au sujet des principes stratégiques prolétariens. Lénine insista pour que la dictature du prolétariat fût inscrite dans le Programme et que le rôle dirigeant de la classe ouvrière dans la révolution y fût nettement défini.
Deux tactiques de la social-démocratie dans la révolution démocratique, que Lénine écrivit au cours de la Révolution de 1905, exprime l’héroïsme du prolétariat russe qui osa assumer la direction du combat et combattre pour la victoire. Lénine y donne une théorie complète du rôle dirigeant du prolétariat dans la révolution démocratique et de l’alliance ouvrière et paysanne, sous la direction de la classe ouvrière, développant ainsi la théorie marxiste sur la transformation de la révolution démocratique bourgeoise en révolution socialiste.
Pendant la Première guerre mondiale, Lénine porta la conception stratégique du prolétariat à un niveau plus élevé avec La Faillite de la Ile Internationale, L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme et autres grands classiques du marxisme. Ces ouvrages disent que l’impérialisme est la veille de la révolution sociale du prolétariat et montrent que la révolution prolétarienne pouvait triompher tout d’abord dans un seul ou quelques pays. Ces conceptions stratégiques ont préparé la victoire de la Grande Révolution d’Octobre.
Et il y a d’autres exemples.
Dans les questions tactiques concrètes, Lénine a toujours déterminé l’action à entreprendre par le prolétariat ; suivant les différentes conditions existantes. Par exemple, il a déterminé dans quelles circonstances le parti du prolétariat doit participer au Parlement et dans lesquelles il doit boycotter le Parlement ; dans quelles circonstances il doit créer une alliance donnée et dans lesquelles une autre alliance ; dans quelles circonstances il doit faire des-compromis nécessaires et dans lesquelles il doit rejeter les compromis ; dans quelles circonstances ! Il doit mener la lutte légalement, et dans lesquelles il doit la mener illégalement, et comment combiner avec souplesse les deux formes de lutte ; à quel moment il doit attaquer, à quel Moment reculer ou avancer par un chemin détourné, etc. Lénine a exposé ces questions de manière systématique et profonde dans La Maladie infantile du communisme (« le gauchisme »).
Il y dit à juste titre :
« …la première [conclusion], c’est que la classe révolutionnaire, pour remplir sa tâche, doit savoir prendre possession de toutes les formes et de tous les côtés, sans la moindre exception, de l’activité sociale…la seconde, c’est que la classe révolutionnaire doit se tenir prête à remplacer vite et brusquement une forme par une autre. » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 31)
A propos des différentes formes de la lutte, Lénine dit encore que, les communistes de tous les pays doivent rechercher, étudier, découvrir, deviner, saisir ce qu’il y a de particulièrement nationale, de spécifiquement national dans la manière concrète dont chaque pays aborde la solution du problème international, le même pour tous : vaincre l’opportunisme et le dogmatisme de gauche au sein du mouvement ouvrier, renverser la bourgeoisie et instaurer la dictature du prolétariat. On aurait tout à fait tort de ne pas tenir compte, dans la lutte, des particularités propres à sa nation.
Selon la conception de Lénine, chaque tactique concrète du parti prolétarien vise à organiser les masses innombrables, à mobiliser largement les alliés, à isoler au maximum les ennemis du peuple, les impérialistes et leurs laquais, afin de parvenir au but stratégique général, qui est l’émancipation du prolétariat et du peuple. Lénine dit : « …les formes de la lutte peuvent changer et changent constamment pour des raisons diverses, relativement temporaires et particulières, alors que l’essence de la lutte, son contenu de classe, ne saurait vraiment changer tant que les classes existent. » (V. I. Lénine : « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme », Œuvres, tome 22)
La conception stratégique et tactique des communistes chinois
C’est à partir de la pensée de Marx, Engels et Lénine que les communistes chinois ont défini la stratégie et la tactique de la révolution chinoise au cours de la pratique concrète révolutionnaire.
Le camarade Mao Zedong a résumé la conception stratégique et tactique des communistes chinois comme suit :
« L’impérialisme dans le monde entier et le règne de la clique réactionnaire de Tchiang Kaï-chek en Chine sont pourris, ils n’ont pas d’avenir. Nous avons lieu de les mépriser, et nous sommes sûrs et certains de vaincre tous les ennemis, intérieurs et extérieurs, du peuple chinois. Mais dans chaque situation particulière, dans chaque lutte concrète (qu’il s’agisse d’une lutte militaire, politique, économique ou idéologique), nous ne devons absolument pas mépriser l’ennemi, mais au contraire, en tenir sérieusement compte et concentrer toutes nos forces dans la lutte pour remporter la victoire. Du point de vue de l’ensemble de la stratégie, nous relevons avec raison que nous devons mépriser l’ennemi, mais dans aucune situation particulière, dans aucune question concrète, nous ne devons le mépriser. Si, du point de vue de l’ensemble, nous surestimons la force de l’ennemi et n’osons par conséquent le renverser ni le vaincre, nous commettrons une erreur d’opportunisme de droite. Si, dans chaque situation particulière, dans chaque question concrète, nous n’agissons pas avec prudence, ne prenons pas soin d’étudier et de perfectionner l’art de la lutte, ne concentrons pas toutes nos forces dans le combat et ne nous attachons pas à gagner à notre cause tous les alliés qui devraient l’être (paysans moyens, artisans et commerçants indépendants, moyenne bourgeoisie, étudiants, instituteurs, professeurs et intellectuels en général, fonctionnaires en général, membres des professions libérales et hobereaux éclairés), nous commettrons une erreur d’opportunisme ’de gauche’ » (Mao Zedong : « Sur quelques questions importantes de la politique actuelle du Parti », Œuvres choisies, tome IV)
Par-là, le camarade Mao Zedong expose avec grande netteté et sans équivoque possible la lutte du prolétariat dans son ensemble, c’est-à-dire le problème de la stratégie, et, avec la même grande netteté et sans équivoque possible, chaque situation particulière, chaque question concrète de la lutte du prolétariat, c’est-à-dire le problème de la tactique.
Pourquoi pouvons-nous mépriser l’ennemi à partir de la situation prise dans son ensemble, c’est-à-dire sur le plan stratégique ? Parce que les impérialistes et tous les réactionnaires sont pourris jusqu’ à la moelle, qu’ils sont sans avenir et peuvent être renversés. L’incapacité de voir ceci amène à craindre la lutte révolutionnaire, à perdre confiance dans la révolution et à fourvoyer le peuple. Et pourquoi, dans les luttes concrètes, c’est-à-dire sur le plan tactique, ne devons-nous jamais faire peu de cas de l’ennemi, mais au contraire, le prendre au sérieux ? Parce que les impérialistes et les réactionnaires contrôlent toujours la machine à gouverner, ils sont toujours fortement armés et peuvent encore duper le peuple. Pour renverser le règne de l’impérialisme t de la réaction, le prolétariat et les masses populaires doivent passer par des luttes âpres et pleines de vicissitudes. Les impérialistes et les réactionnaires ne basculeront pas tout seul de leur trône.
Un parti révolutionnaire n’entamera jamais la lutte révolutionnaire s’il renonce au but stratégique qui est de renverser le vieux système, et s’il ne croit plus ’ que l’ennemi peut être renversé et que lui-même peut triompher ; un parti révolutionnaire ne remportera jamais la victoire escomptée s’il se borne à formuler l’objectif de la révolution sans s’attaquer à l’ennemi avec sérieux et prudence au cours de la lutte révolutionnaire, sans accumuler et accroître graduellement les forces .révolutionnaires et s’il considère la révolution comme une question de paroles en l’air ou agit à l’aveuglette. Ceci est d’autant plus vrai pour les partis prolétariens. Si un parti prolétarien, tout en observant fermement les principes stratégiques du prolétariat, tient sérieusement compte de l’ennemi dans chaque problème concret de la lutte révolutionnaire et est habile à le combattre, alors, comme le dit le camarade Mao Zedong, « avec le temps, nous obtiendrons la supériorité dans l’ensemble » (Mao Zedong : « La Situation actuelle et nos tâches », Œuvres choisies, tome IV), quoique le prolétariat puisse se trouver en état d’infériorité au départ. En d’autres termes, si l’ennemi est pris au sérieux dans les questions de tactique, de lutte concrète, et si tous les efforts sont engagés pour gagner chaque combat, la victoire révolutionnaire sera hâtée et non retardée ou ajournée.
Le parti du prolétariat tient sérieusement compte de l’ennemi sur le plan tactique, il œuvre pour faire triompher les luttes concrètes, de façon à ce que des masses toujours plus larges puissent se convaincre, par leur propre expérience, qu’il est possible d’abattre l’ennemi, que notre mépris de l’ennemi est justifié et fondé. L’antiquité chinoise s’exprimait ainsi : Les grandes entreprises de ce monde sont réalisées à partir de petites ; l’arbre que deux bras seulement permettent de ceinturer vient d’un plant minuscule ; les édifices à neuf étages commencent par le tassement de minces couches de terre ; les marches de mille lieues commencent toutes par un premier pas. Pour les peuples révolutionnaires qui ont à renverser la réaction, le principe est le même, c’est-à-dire en menant d’innombrables luttes concrètes les unes après les autres, en s’efforçant de les faire triompher, et ainsi seulement sera-t-il possible de parvenir finalement au but qui est d’abattre la réaction.
Le camarade Mao Zedong dit dans Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine : « Notre stratégie, c’est de nous battre ’un contre dix’, mais notre tactique, c’est de nous battre ’dix contre un’ ; voilà l’une des lois fondamentales qui garantissent notre victoire sur l’ennemi. » Il dit aussi : « Nous vainquons des effectifs supérieurs avec des effectifs inférieurs — voilà ce que nous déclarons à l’ensemble des forces qui règnent sur la Chine. Mais dans le même temps, nous vainquons des effectifs inférieurs avec des effectifs supérieurs — voilà ce que nous déclarons à cette partie des forces ennemies avec laquelle nous nous mesurons sur le champ de bataille. » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome I) Il s’agit ici des principes se rapportant à la lutte sur le plan militaire, mais ces principes s’appliquent aussi à la lutte politique. L’histoire nous apprend qu’au début, tous les révolutionnaires, y compris les révolutionnaires bourgeois, sont toujours en minorité, les forces qu’ils dirigent sont toujours relativement faibles. Si, en stratégie, il leur manque la volonté de « vaincre des effectifs supérieurs avec des effectifs inférieurs » et de se battre « un contre dix » dans la lutte contre l’ennemi, ils resteront faibles et impuissants, ils ne pourront jamais rien entreprendre et ils ne deviendront jamais majorité. Par ailleurs, si sur le plan tactique, c’est-à-dire dans la lutte concrète, ils ne comprennent pas le besoin d’organiser les masses, de rallier tous les alliés possibles, et de tirer parti des contradictions existant objectivement au sein de l’ennemi, s’ils ne savent pas appliquer, dans la lutte, la méthode de « vaincre des effectifs inférieurs avec des effectifs supérieurs » et de se battre « dix contre un », et s’ils ne savent pas prendre toutes les dispositions nécessaires aux luttes concrètes, ils ne pourront jamais remporter la victoire dans chaque lutte concrète et transformer leurs petites victoires en de grandes, ils courront le risque de voir leurs propres forces écrasées l’une après l’autre par l’ennemi et de dissiper la puissance révolutionnaire.
Un miroir
Pour résumer, dans les rapports entre stratégie et tactique, le parti du prolétariat doit veiller tout particulièrement au but final qui est l’émancipation du peuple travailleur, avoir le courage d’écraser l’ennemi et la conviction de pouvoir le faire. Il ne doit pas se laisser absorber par les gains et les succès mineurs et immédiats au point de perdre le but final de vue, et la puissance apparente et momentanée de l’ennemi ne doit pas lui enlever la foi dans le triomphe de la révolution populaire. Il doit, en même temps, prêter sérieusement attention aux luttes quotidiennes, peu importantes à première vue. Et pour chaque lutte concrète, il doit effectuer les préparatifs qui s’imposent, bien mener le travail pour unir les masses, étudier et perfectionner l’art de la lutte et tout faire pour remporter la victoire dans chaque lutte concrète, pour que les masses puissent en tirer des leçons et des encouragements. Il doit arriver à la pleine compréhension du fait que les innombrables luttes concrètes, y compris les toutes petites, peuvent se fondre et se développer en une force qui ébranlera le vieux régime.
Il apparaît donc clairement que la stratégie et la tactique sont à la fois différentes l’une de l’autre et, en même temps, unies l’une à l’autre. Telle est précisément la dialectique dont les marxistes-léninistes se servent pour examiner chaque problème. Certains décrivent « mépriser l’ennemi sur le plan stratégique et en tenir sérieusement compte sur le plan tactique » comme étant de la « philosophie scolastique » ou une « double comptabilité ». On pourrait se demander quelle est au juste leur propre « philosophie » ? En quoi peut bien consister leur « comptabilité simple » ?
Dans « Sur notre révolution », Lénine dit ceci au sujet des héros de l’opportunisme :
« Tous ils se disent marxistes, mais ils entendent le marxisme de façon pédantesque au possible. Ils n’ont pas du tout compris ce qu’il y a d’essentiel dans le marxisme, à savoir : sa dialectique révolutionnaire. » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 33)
Dans le même texte, Lénine dit encore :
« Par toute leur conduite ils se révèlent des réformistes poltrons, qui craignent de s’écarter de la bourgeoisie et, à plus forte raison, de rompre avec elle ; en même temps ils couvrent leur poltronnerie d’une phraséologie et d’une vantardise effrénées. » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 33)
Que ceux qui attaquent le Parti communiste chinois veuillent bien lire attentivement ces deux passages de Lénine ! Ils sont comme un miroir politique où certains se reconnaîtront.
Le révisionnisme moderne est le principal danger pour le mouvement ouvrier international
Le Parti communiste italien est dans le monde capitaliste actuel, un grand parti. Il a combattu vaillamment durant les noires années de la domination fasciste. Il a de glorieuses traditions de lutte. Pendant la Seconde guerre mondiale, il dirigea le peuple italien dans les héroïques insurrections armées et la guerre de partisans contre le fascisme. Les forces armées du peuple capturèrent Mussolini et le monstre fasciste fut mis à mort.
Il est naturel que ces hauts faits du Parti communiste italien lui aient valu la sympathie et le soutien du peuple italien.
Après la guerre, le capitalisme italien a connu une période de développement pacifique. Et au cours de celle-ci le Parti communiste italien a entrepris1 un travail substantiel en recourant aux formes de lutte légales. La lutte légale a son rôle positif dans les activités du parti de la classe ouvrière, mais faute de vigilance et de fermeté révolutionnaires, elle peut aussi jouer en sens contraire et avoir un rôle négatif. Marx, Engels et Lénine ont constamment mis le prolétariat en garde contre une telle éventualité.
Pourquoi, depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, le révisionnisme a-t-il été unanimement reconnu comme le principal danger pour le mouvement ouvrier international ? Premièrement, parce que l’histoire est là, qui nous apporte les leçons de l’expérience acquise par nombre de pays dans les divers domaines de la lutte légale ; deuxièmement, parce que dans la réalité du monde actuel existent des conditions qui alimentent l’opportunisme et le révisionnisme ; troisièmement, parce qu’on l’a vu effectivement apparaître avec le révisionnisme moderne représenté par la clique Tito.
A examiner les points de vue de Togliatti et d’autres camarades, on peut dire en toute franchise que ce danger existe également dans le Parti communiste italien. Ces derniers temps, certains camarades du Parti communiste français ont, dans une série d’articles, attaqué les marxistes-léninistes révolutionnaires, attaqué les communistes chinois. Les points de vue qu’ils défendent sur nombre de questions fondamentales du mouvement communiste international sont de la même marque que ceux de Togliatti et d’autres camarades italiens, ou à peu de chose près. De plus, dans les rangs du mouvement communiste international sont apparus récemment des gens qui, comme le dit Lénine, « forment tous une seule famille, tous s’adressent des louanges réciproques, s’instruisent les uns auprès des autres et mènent campagne en commun contre le marxisme ’dogmatique’ » (V. I. Lénine : « Que faire ? », Œuvres, tome 5.) C’est là un phénomène étrange, mais il suffit d’avoir quelque connaissance de marxisme-léninisme et d’analyser ce phénomène pour comprendre qu’il n’est nullement le fait du hasard.
Le révisionnisme moderne s’est manifesté dans certains pays capitalistes, et il peut, de même, se manifester dans les pays socialistes. La clique Tito a été la première à lever le drapeau du révisionnisme, elle a fait dégénérer pas à pas la Yougoslavie, qui était un pays socialiste. Sur le plan politique, la clique Tito est depuis longtemps devenue une complice des impérialistes, américains et autres, et sur le plan économique, elle a fait de la Yougoslavie une annexe de l’impérialisme américain, transformant graduellement l’économie yougoslave en cette « économie libéralisée » dont parlent les impérialistes.
En mai 1921, Lénine déclarait à la Dixième Conférence du Parti communiste de Russie :
« Milyukov avait raison. Il a tenu compte en toute lucidité des degrés de développement politique, et dit que pour le retour du capitalisme, il est nécessaire de passer par des degrés semblables à ceux des socialistes-révolutionnaires et du menchévisme. La bourgeoisie a besoin de tels degrés, celui qui ne le comprend pas est un sot. » (V.I. Lénine : Dixième conférence du Parti communiste (bolchévik) de Russie, Œuvres, tome 32)
Ces paroles de Lénine sont à tel point pertinentes qu’elles semblent être une prédiction du comportement de la clique Tito plusieurs dizaines d’années plus tard.
Pourquoi, en pays socialiste, le révisionnisme peut-il également se manifester ? Tout comme le fait remarquer la Déclaration de Moscou de 1957 : « L’influence bourgeoise est la source intérieure du révisionnisme, et la capitulation devant la pression de l’impérialisme en est la source extérieure. »
La Déclaration de Moscou de 1960 réaffirme cette importante thèse de la Déclaration de 1957 selon laquelle le révisionnisme constitue le principal danger du mouvement ouvrier international, et, en même temps, condamne la variante yougoslave de l’opportunisme international. La Déclaration de 1960 souligne à juste titre : « Ayant trahi le marxisme-léninisme, proclamé par eux périmé, les dirigeants de la Ligue des Communistes de Yougoslavie ont opposé à la Déclaration de 1957 leur propre programme révisionniste et antiléniniste. Ils ont opposé la L.C.Y. à tout le mouvement communiste international, ont détaché leur pays du camp socialiste, l’ont fait dépendre de la soi-disant ’aide’ des impérialistes, américains et autres, et ont mis ainsi le peuple yougoslave en danger de perdre les conquêtes révolutionnaires qu’il avait acquises au prix d’une lutte héroïque. Les révisionnistes yougoslaves se livrent à des agissements subversifs contre le camp socialiste et le mouvement communiste mondial. Sous prétexte de mener une politique en marge des blocs, ils déploient une activité qui porte préjudice à l’unité de toutes les forces et de tous les Etats pacifiques. »
« Les partis marxistes-léninistes, poursuit la Déclaration, ont toujours pour tâche impérieuse de dénoncer les dirigeants des révisionnistes yougoslaves et de lutter énergiquement pour préserver le mouvement communiste et le mouvement ouvrier des idées antiléninistes des révisionnistes yougoslaves. »
Les représentants de 81 partis ont apposé leur signature au bas de cette solennelle Déclaration, y compris ceux des partis italiens, français et de tous les pays socialistes. Or, l’encre en est à peine séchée que déjà, des responsables de certains partis sont à tu et à toi avec la clique Tito.
Le camarade Togliatti va jusqu’à déclarer « erronée » la position prise à l’égard de la clique Tito par la Déclaration de Moscou de 1960, prétendant que « lancer des invectives contre ’la clique Tito’ ne nous fait faire aucun pas en avant, mais nous fait au contraire reculer beaucoup » (Voir P. Togliatti ; « A propos de la ’clique Tito’ », Rinascita, 13 octobre 1962) Certains ont même dit que « les communistes yougoslaves ont fait des pas vers le rapprochement et l’unité avec tout le mouvement communiste mondial », que « sur une série de problèmes internationaux de première importance », la position prise par la clique Tito et la leur « coïncident et se rapprochent ». Leurs actes sont en divorce avec leurs engagements, et les deux Déclarations de Moscou ne sont pour eux que des documents vides et de pure forme. En vue de se justifier, ils n’ont aucun scrupule à fouler aux pieds la Déclaration de Moscou de 1960 et, au lieu de reconnaître que le révisionnisme constitue aujourd’hui le principale danger dans le mouvement communiste et ouvrier international, ils estiment que « le danger du dogmatisme et du sectarisme est devenu dans la dernière période le danger essentiel pour le mouvement communiste et ouvrier international » (Résolution adoptée le 14 décembre 1962 par le Comité central du Parti communiste français) Au VIème Congrès du Parti socialiste unifié d’Allemagne, qui a eu lieu récemment, le délégué du Parti communiste chinois a été traité au mépris de toute civilité lorsque, dans son discours de salutations, il maintint la Déclaration de Moscou de 1960 et condamna le révisionnisme de la clique Tito. Cependant, les délégués de la clique Tito étaient acclamés frénétiquement. Est-ce là ce qu’on appelle : « toujours être fermement attaché à la ligne commune concertée du mouvement communiste mondial » ? Tout le monde sait que ce fut un acte soigneusement prémédité qui ne peut qu’affliger les nôtres et réjouir l’ennemi.
Tout cela a eu pour effet de décupler soudain la cote de la clique Tito. Et en agissant ainsi, certains cherchent à élever celle-ci jusqu’à en faire leur « centre idéologique », à substituer le révisionnisme moderne, représenté par la clique Tito, au marxisme-léninisme, et le programme révisionniste moderne de la clique Tito ou quelque autre chose aux Déclarations de Moscou. Certains ne disent-ils pas à tout bout de champ qu’il faut « régler l’heure sur nos montres » ? Or, il y a deux montres : celle du marxisme-léninisme, des Déclarations de Moscou ; et celle du révisionnisme moderne dont le représentant est la clique Tito. Sur laquelle faut-il, en fin de compte, prendre l’heure ? La montre du marxisme-léninisme et des Déclarations de Moscou ou celle du révisionnisme moderne ?
Il y en a qui, non seulement ne permettent pas que nous nous opposions au révisionnisme moderne, mais encore ne veulent pas nous entendre parler du vieux révisionnisme de l’époque de la Ile Internationale, tandis qu’eux-mêmes n’en finissent pas de chanter à nouveau, avec délectation, l’antienne des vieux révisionnistes. Dans la préface de la deuxième édition de La Question du logement, Engels a dit à propos du proudhonisme : « Celui qui veut approfondir tant soit peu le socialisme moderne doit apprendre à connaître également les ’points de vue dépassés’ du mouvement. » Il estimait que tant qu’existent dans la société les conditions qui engendrent pareils points de vue, ces points de vue ou les différentes tendances qu’ils traduisent réapparaîtront. « Et si plus tard », poursuit Engels, cette tendance « venait à se cristalliser, en prenant des contours plus précis, il lui faudra pour formuler son programme remonter à ses prédécesseurs. » A l’heure actuelle, pour nous opposer au révisionnisme moderne, il faut naturellement étudier ses aînés, étudier les leçons de l’histoire, étudier comment les révisionnistes modernes ont rejoint leurs prédécesseurs. Ne devrions-nous pas agir ainsi ? Pourquoi serait-ce là « une comparaison historique absolument inadmissible » ? Toucherait-on à quelque chose de tabou ?
Puisque ces gens-là reprennent la vieille rengaine de Bernstein, Kautsky et autres vieux révisionnistes, et qu’ils empruntent les points de vue, les procédés et le langage des vieux révisionnistes pour attaquer et calomnier les communistes chinois et tous les marxistes-léninistes, ils n’ont aucune raison de nous défendre de leur répondre par les critiques que Lénine adressait aux vieux révisionnistes.
Voici ce qu’a dit Lénine :
« Les bernsteiniens ont eux aussi affirmé et affirment encore qu’ils sont les seuls à comprendre les besoins véritables du prolétariat, la nécessité d’accroitre ses forces, d’approfondir son activité, de préparer les éléments de la société nouvelle, la nécessité de la propagande et de l’agitation. Nous exigeons que l’on reconnaisse hautement ce qui est ! déclare Bernstein, qui, ce disant, consacre le ’mouvement’ sans ’but final’ consacre la seule tactique défensive et prêche la tactique de cette appréhension : ’Pourvu que la bourgeoisie ne se détourne pas’. Les bernsteiniens, eux aussi, ont crié au ’jacobinisme ’des social démocrates révolutionnaires, à propos des ’publicistes’ qui ne comprennent pas l »initiative ouvrière’, etc., etc. En réalité, comme chacun sait, les social-démocrates révolutionnaires n’ont jamais pensé à négliger le minutieux travail quotidien, la préparation des forces, etc., etc. Ils exigeaient simplement que l’on prît nettement conscience du but final, que l’on déterminât avec précision les tâches révolutionnaires ; ils entendaient élever les couches semi-prolétariennes et semi-petites-bourgeoises au niveau révolutionnaire du prolétariat, au lieu d’abaisser ce niveau à des considérations opportunistes : ’Pourvu que la bourgeoisie ne se détourne pas’ .La question : Dûrfen wir siegen ? ’Oserons-nous vaincre ?’ Nous est-il permis de vaincre ? N’est-il-pas dangereux pour nous de vaincre ? Devons-nous vaincre ? — exprimait peut-être avec le plus de relief ce dissentiment entre l’aile opportuniste intellectuelle et l’aile révolutionnaire prolétarienne du Parti. Etrange à première vue, cette question a pourtant été posée et devait l’être, car les opportunistes redoutaient la victoire, cherchaient à en détourner le prolétariat, prophétisaient ses conséquences funestes, raillaient les mots d’ordre appelant ouvertement à la victoire. » (V. I. Lénine : « Deux tactiques de la social-démocratie dans la révolution démocratique », Œuvres, tome 9)
Cette citation se prête effectivement à expliquer la résurrection du bernsteinisme, dans des conditions historiques nouvelles, et à mettre en lumière le fond des divergences entre les marxistes-léninistes et les révisionnistes modernes.
« Notre doctrine n’est pas un dogme mais un guide pour l’action »
Certains qui se prétendent des « marxistes-léninistes créateurs » disent qu’il n’est plus nécessaire de répéter les principes fondamentaux établis par Marx et Lénine, l’époque ayant changé et les conditions étant différentes. Ils s’opposent à ce que nous nous référions aux classiques marxistes-léninistes, qualifiant cela de « dogmatisme ».
Rejeter le marxisme-léninisme sous prétexte de se défaire de la contrainte des « dogmes » est un procédé fort commode. Il y a longtemps que Lénine a démasqué cette tactique propre aux opportunistes en disant : « Voilà un mot bien commode que celui de ’dogme’ ! Vous n’avez qu’à déformer un peu une théorie adverse et dissimuler cette déformation derrière l’épouvantail du ’dogme’ et vous y êtes ! » (V. I. Lénine : « L’Aventurisme révolutionnaire », Œuvres, tome 6)
On sait que l’époque où vécut et lutta Lénine, était bien différente de celle de Marx et d’Engels. Lénine a développé sur tous les plans le marxisme et le fit accéder à une étape nouvelle, celle du léninisme. Se basant sur la situation et les caractéristiques nouvelles de son temps, Lénine écrivit de nombreux et prestigieux ouvrages qui ont considérablement enrichi la théorie marxiste et la stratégie et la tactique de la révolution prolétarienne, et il avança des lignes de conduite et des tâches nouvelles pour le mouvement ouvrier international. Pour défendre les principes fondamentaux et la pureté du marxisme et combattre les opportunistes et les révisionnistes qui déformaient et altéraient le marxisme, Lénine a maintes et maintes fois cité de nombreux passages de Marx et d’Engels. Dans L’Etat et la révolution, par exemple, cette grande œuvre d’importance capitale pour la théorie marxiste, Lénine n’a pas épargné les citations. Et il le dit dans le premier chapitre :
« Devant cette diffusion inouïe des déformations du marxisme, notre tâche est tout d’abord de rétablir la doctrine de Marx sur l’Etat. Pour cela, il est nécessaire d’emprunter toute une série de longues citations aux œuvres mêmes de Marx et d’Engels. Sans doute ces longues citations alourdiront-elles l’exposé et ne contribueront-elles nullement à le rendre plus populaire. Mais il est absolument impossible de s’en dispenser. Tous les passages ou, du moins, tous les passages décisifs des œuvres de Marx et d’Engels sur l’Etat doivent absolument être reproduits aussi complètement que possible afin que le lecteur puisse lui-même se représenter l’ensemble des conceptions des fondateurs du socialisme scientifique et le développement de ces conceptions, et aussi pour que leur déformation par le ’kautskisme’ aujourd’hui prédominant soit démontrée, documents à l’appui, et mise en évidence » ( V. I. Lénine : Œuvres, tome 25)
Lénine a donc cité abondamment Marx et Engels à une époque où le marxisme était altéré de façon absurde. Et maintenant que le léninisme subit le même sort, tous les marxistes-léninistes révolutionnaires se voient obligés de citer Lénine. Car, ce faisant, nous pouvons mettre en lumière le contraste frappant existant entre la vérité marxiste-léniniste et les absurdités des révisionnistes et des opportunistes.
Il en ressort que le fait de citer la littérature marxiste-léniniste n’est point un crime, comme certains le prétendent. La question est de savoir s’il y a ou non nécessité de la citer, comment la citer et si on la cite correctement.
Certains éludent délibérément le sujet que nous voulons étayer en nous référant à la littérature marxiste-léniniste, ils n’osent même pas publier nos citations et savent seulement nous faire grief de procéder « à coup de citations » (Voir « A quelle époque vivons-nous ? », France Nouvelle, 16 janvier 1963) L’organe du Parti communiste français l’Humanité est allé jusqu’à accuser le Parti communiste chinois d’être de ceux qui, « dénaturant le marxisme-léninisme au point de n’en retenir que des formules figées, s’arrogent le droit d’en être les grands prêtres chargés d’en énoncer les dogmes » (Voir « Notre unité et notre discipline », L’Humanité, 16 janvier 1963) Que dénote ce langage acerbe, dont ils se servent contre nous avec délectation ? Tout simplement un état d’esprit et un sentiment : la grande répugnance qui les saisit à la vue d’un mot de Marx, d’Engels ou de Lénine. Ces gens qui reprochent aux autres de se faire les « grands prêtres » du marxisme-léninisme, sont devenus en réalité les « grands prêtres » de l’anti-marxisme-léninisme, les « grands prêtres » de l’idéologie bourgeoise.
Certains nous attaquent violemment quand nous nous référons à la littérature marxiste-léniniste pour mettre en lumière les principes fondamentaux du marxisme-léninisme, alors qu’eux-mêmes ne se lassent pas de ressasser, en fait, le langage de
Bernstein, de Kautsky et, de Tito, et bon nombre de leurs points de vue essentiels ont été puisés chez ces derniers.
Il y en a même qui attaquent frénétiquement ce qu’ils appellent le « dogmatisme » et raffolent cependant des dogmes de la Bible. Ils ont le crâne bourré de formules bibliques ou de choses du même genre, mais l’on n’y décèle pas la moindre trace de marxisme-léninisme.
Lénine aimait à rappeler constamment cette phrase de Marx et d’Engels : »Notre doctrine n’est pas un dogme mais un guide pour l’action » .Et maintenant que certains veulent faire croire que nous sommes des « dogmatiques », nous devons franchement leur dire : Le Parti communiste chinois a une riche expérience de la lutte contre le dogmatisme. Il y a plus de vingt ans, sous la direction du camarade Mao Zedong, nous avons mené une lutte prestigieuse contre le dogmatisme, et, aujourd’hui encore, nous ne perdons pas cette lutte de vue.
Les vrais marxistes-léninistes ne sont pas de ceux qui se reposent sur des piles de livres, ils doivent savoir se servir de la méthode marxiste-léniniste pour analyser, tant sur le plan international que national, le milieu, ainsi que la situation et les conditions concrètes de l’heure, étudier les diverses expériences de la lutte pratique et fixer leur plan d’action. Le camarade Mao Zedong nous rappelle constamment que nous devons prêter attention à cette parole célèbre et éminemment pertinente de Lénine : « Ce qui est la substance même, l’âme vivante du marxisme : l’analyse concrète d’une situation concrète » (V.I. Lénine : Le communisme, Œuvres, tome 31) Critiquant les dogmatiques dans nos rangs, le camarade Mao Zedong les appela « des paresseux qui se refusent à toute étude ardue des choses concrètes » (Mao Zedong : « De la contradiction », Œuvres choisies, tome 1)
En 1942, dans son rapport sur la « Rectification du style de travail du Parti », le camarade Mao Zedong a fait une critique incisive du dogmatisme en ces termes :
« II existe encore nombre de gens qui considèrent des formules isolées, empruntées à la littérature marxiste-léniniste, comme une panacée toute prête, miraculeuse, qu’il suffit d’acquérir pour guérir sans effort toutes les maladies. Cela relève d’une ignorance puérile de leur part, et nous devons mener une campagne pour ouvrir les yeux à ces gens. Tous ceux qui considèrent le marxisme-léninisme comme un dogme religieux s’inscrivent au nombre de ces ignorants. Il faut leur dire sans détours que leur dogme ne sert à rien. Marx, Engels, Lénine, Staline ont répété plus d’une fois que leur doctrine n’est pas un dogme, mais un guide pour l’action .Or, comme par un fait exprès, ces gens-là oublient cette thèse qui est de la plus haute importance. Les communistes chinois pourront considérer qu’ils unissent la théorie à la pratique uniquement lorsqu’ils sauront, en partant des positions marxistes-léninistes, appliquer comme il faut la méthode du marxisme-léninisme et sa manière d’envisager les problèmes et utiliser avec sagacité la doctrine de Lénine et de Staline sur la révolution chinoise et quand, poussant encore plus avant, ils seront à même, sur la base d’une étude sérieuse des réalités de l’histoire de Chine et de la révolution chinoise, d’effectuer un travail théorique créateur répondant aux besoins de la Chine dans tous les domaines. Parler en l’air d’union de la théorie et de la pratique ne sert à rien, dût-on en parler cent années, si on ne les unit pas dans les actes. En luttant contre la manière subjective, unilatérale, d’aborder les problèmes, nous devons battre en brèche le dogmatisme avec tout ce qu’il comporte de subjectif et d’unilatéral ». (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome III)
Ceux qui maintenant s’époumonent pour crier au dogmatisme n’ont aucune idée de ce que c’est, et ils savent encore moins comment le combattre. Ils répètent sans cesse que les temps ont changé, que la situation a évolué et qu’il faut « développer le marxisme-léninisme avec un esprit créateur » ; mais en fait, ils révisent le marxisme-léninisme au moyen du pragmatisme bourgeois. Ils sont incapables de saisir l’essence dans les changements de l’époque et de la situation, ils ne comprennent rien aux contradictions dans le monde actuel et ignorent complètement où se trouve le point de convergence de ces contradictions. Ils sont incapables de saisir les lois du développement des phénomènes objectifs et oscillent de-ci de-là, versant tantôt dans le capitulationnisme, tantôt dans l’aventurisme. Ils se plient au cours des événements et oublient les intérêts fondamentaux du prolétariat, et c’est ce qui caractérise leur pensée et leurs actes. Ils n’ont donc pas de politique de principe et il leur arrive souvent de ne pas distinguer entre l’ennemi, l’ami, et ceux qui sont de leur propre camp, et même de les confondre,’ prenant l’ennemi pour un être cher et les leurs pour des ennemis.
Lénine a dit du philistin qu’il « n’est jamais guidé par une conception définie du monde, par les principes d’une tactique intégrale de parti. Il se laisse toujours porter par le courant, obéissant aveuglément à son humeur du moment. » (V. I. Lénine : « La Situation politique et les tâches de la classe ouvrière », Œuvres, tome 11) N’est-ce pas précisément ainsi que certains, agissent aujourd’hui ?
L’union de la vérité universelle du marxisme-léninisme avec la pratique concrète de la révolution dans chaque pays
Voici une vingtaine d’années que le camarade Mao Zedong a avancé, au sein du Parti, la célèbre thèse de l’union de la vérité universelle du marxisme-léninisme avec la pratique concrète de la révolution chinoise. C’est là le bilan de l’expérience acquise par le Parti communiste chinois au cours de sa longue lutte menée sur deux fronts, et contre l’opportunisme de droite et contre l’opportunisme « de gauche ».
La thèse de l’union de la vérité universelle du marxisme-léninisme avec la pratique concrète de la révolution dans le pays a deux aspects : d’une part, la nécessité de s’en tenir à chaque instant à la vérité universelle du marxisme-léninisme, sous peine de verser dans l’opportunisme de droite ou dans le révisionnisme ; d’autre part, la nécessité de partir toujours de la réalité, de maintenir des contacts étroits avec les masses, de faire constamment le bilan des expériences de leurs luttes, et d’examiner son propre travail à la lumière de l’expérience acquise dans la pratique, car, en agissant autrement, on verserait dans le dogmatisme.
Pourquoi faut-il s’en tenir à la vérité universelle du marxisme-léninisme, aux principes fondamentaux du marxisme-léninisme ? Lénine disait : « La doctrine de Marx est toute-puissante, parce qu’elle est juste. Elle est harmonieuse et complète ; elle donne aux hommes une conception cohérente du monde, inconciliable avec toute superstition, avec toute réaction, avec toute défense de l’oppression bourgeoise. » (V. I. Lénine : « Les Trois sources et les trois parties constitutives du marxisme », Œuvres, tome 19) La vérité universelle du marxisme-léninisme ou, autrement dit, les principes fondamentaux du marxisme-léninisme, ne sont pas des fictions ou des créations subjectives, mais des conclusions scientifiques qui généralisent l’expérience des luttes dans l’histoire de l’humanité tout entière et de la lutte du prolétariat international.
Depuis Bernstein, les révisionnistes et opportunistes de tous genres ont toujours estimé, en prétextant de nouveaux changements et de nouvelles circonstances, que la vérité universelle du marxisme a fait son temps. Toutefois, les événements survenus dans le monde depuis plus de cent années, ont sans cesse prouvé que la vérité universelle du marxisme-léninisme est partout applicable. Elle est applicable aussi bien en Occident qu’en Orient ; elle a été confirmée non seulement par la Grande Révolution d’Octobre, mais aussi par la révolution chinoise et les révolutions victorieuses de nombre de pays ; non seulement par les mouvements ouvriers qui ont eu lieu dans les pays capitalistes d’Europe et d’Amérique, mais aussi par les grandes luttes révolutionnaires qui se déroulent actuellement dans de nombreux pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine.
En 1913, Lénine écrivait déjà, dans « Les Destinées historiques de la doctrine de Karl Marx », que depuis l’apparition du marxisme, chacune des grandes époques de l’histoire universelle « lui a apporté de nouvelles confirmations et de nouveaux triomphes. Mais l’époque historique qui vient apportera au marxisme, doctrine du prolétariat, un triomphe plus éclatant encore » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 18)
Dans « Du rôle du matérialisme militant », Lénine écrivait en 1922 que Marx a appliqué la dialectique « avec un tel succès que, maintenant, chaque jour, l’éveil de nouvelles classes à la vie et à la lutte en Orient (Japon, Indes, Chine), — c’est-à-dire l’éveil de centaines de millions d’humains qui forment la plus grande partie de la population du globe et qui, par leur inaction historique et leur sommeil historique, ont été cause, jusqu’à présent, du marasme et de la décomposition frappant de nombreux Etats avancés d’Europe —, chaque jour, l’éveil à la vie de nouveaux peuples et de nouvelles classes confirme de plus en plus le marxisme » (V. I. Lénine : Œuvres, tome 33)
Et les événements historiques de ces dernières décennies sont encore venus confirmer ces jugements de Lénine.
La Déclaration de Moscou de 1957 qui fit le bilan des expériences de l’histoire, formula des lois essentielles, valables pour tous les pays qui s’engagent dans la voie du socialisme. La première de ces lois générales est : « La direction des masses travailleuses par la classe ouvrière, dont le noyau est constitué par le parti marxiste-léniniste, pour accomplir la révolution prolétarienne sous telle ou telle forme et instaurer la dictature du prolétariat sous telle ou telle forme ». Or, ce que Togliatti et d’autres camarades appellent « la voie italienne » « vers le socialisme », c’est justement l’abandon du principe le plus fondamental de tous, celui de la révolution prolétarienne et de la dictature du prolétariat, une négation de la loi la plus fondamentale, consacrée par la Déclaration de Moscou de 1957.
Ceux qui s’opposent à la vérité universelle et aux principes fondamentaux du marxisme-léninisme, s’opposent forcément à la conception marxiste-léniniste intégrale du monde et « sapent ses bases théoriques fondamentales — la dialectique, la doctrine de l’évolution historique, multiforme et pleine de contradictions » (V. I. Lénine : « De certaines particularités du développement historique du marxisme », Œuvres, tome 17)
Voici ce que dit la Déclaration de Moscou de 1957 au sujet de la conception marxiste-léniniste du monde :
« La base théorique du marxisme-léninisme est le matérialisme dialectique. Cette conception du monde reflète la loi générale du développement de la nature, de la société et de la pensée. Cette conception est valable pour le passé, le présent et l’avenir. Au matérialisme dialectique s’opposent la métaphysique et l’idéalisme. Si, en considérant les problèmes qui se posent, un parti politique marxiste ne partait pas de la dialectique et du matérialisme, il aboutirait à l’étroitesse et au subjectivisme, à la fossilisation de la pensée, au détachement de la pratique et à la perte de la faculté d’analyser comme il faut les phénomènes et les choses, il aboutirait à des fautes révisionnistes ou dogmatiques ainsi qu’à des fautes en politique. L’application du matérialisme dialectique au travail pratique et l’éducation des militants, ainsi que des larges masses, dans l’esprit du marxisme-léninisme constituent une des tâches actuelles des partis communistes et ouvriers. »
Il se trouve aujourd’hui des gens qui méprisent complètement cette thèse d’une importance extrême inscrite dans la Déclaration de Moscou de 1957 et se placent en opposition avec la conception marxiste-léniniste du monde. Ils ont beaucoup de répugnance pour la dialectique matérialiste et qualifient la dialectique de « double comptabilité » et de « philosophie scolastique ». Ils agissent de la même façon que les vieux révisionnistes qui « traitaient Hegel en ’chien crevé’ et, prêchant eux-mêmes l’idéalisme, un idéalisme mille fois plus mesquin et plus plat que celui de Hegel, haussaient les épaules d’un air de mépris à propos de la dialectique » (V.I. Lénine : Marxisme et révisionnisme, Œuvres, tome 15) Il est clair que le but de ceux qui s’attaquent à la dialectique matérialiste est de colporter le révisionnisme moderne.
Naturellement, la conception marxiste-léniniste du monde est non seulement en opposition avec le révisionnisme, elle l’est aussi avec le dogmatisme.
Si, en nous en tenant à la vérité universelle du marxisme-léninisme, nous devons combattre en même temps le dogmatisme, c’est que le dogmatisme s’écarte de la pratique concrète de la révolution et qu’il considère le marxisme-léninisme comme une formule figée.
Le marxisme-léninisme est plein de vitalité et invincible pour la simple raison qu’il est né et s’est développé dans la pratique révolutionnaire et qu’il s’enrichit constamment des nouvelles expériences acquises dans la pratique de nouvelles luttes révolutionnaires.
Lénine a dit souvent que le marxisme unit le plus rigoureux esprit scientifique à l’esprit révolutionnaire le plus élevé. Il a dit notamment : « Le marxisme diffère de toutes les autres théories socialistes en ce qu’il allie de façon remarquable la pleine lucidité scientifique dans l’analyse de la situation objective et de l’évolution objective à la reconnaissance on ne peut plus catégorique du rôle de l’énergie, de la création et de l’initiative révolutionnaires des masses, et aussi, naturellement, des individus, groupes, organisations, partis qui savent découvrir et réaliser la liaison avec telles ou telles classes. » (V. I. Lénine : « Contre le boycott ». Œuvres, tome 13)
Ces paroles de Lénine expliquent en termes précis la nécessité de nous en tenir à la vérité universelle du marxisme et de combattre en même temps le dogmatisme qui s’écarte de la pratique de la révolution et des masses populaires.
L’explication que donne le camarade Mao Zedong des rapports entre la nécessité de s’en tenir à la vérité universelle du marxisme-léninisme et celle de combattre le dogmatisme est entièrement en accord avec le point de vue de Lénine. En traitant de la question de la connaissance, le camarade Mao Zedong s’est exprimé en ces termes :
« Si l’on considère la progression du mouvement de la connaissance humaine, on voit qu’elle s’élargit graduellement de la connaissance de l’individuel et du spécifique à celle du général. Les hommes commencent toujours par connaître d’abord l’essence spécifique de nombreux phénomènes différents ; c’est seulement ensuite qu’i ls peuvent passer à la généralisation, qu’ils peuvent connaître l’essence commune des phénomènes. C’est seulement après avoir pris connaissance de cette essence commune et en se guidant sur cette connaissance commune, en étudiant par la suite les différentes choses concrètes qui n’ont pas encore été étudiées ou qui l’ont été insuffisamment, et en trouvant leur essence spécifique, qu’on peut compléter, enrichir et développer la connaissance de cette essence commune et veiller à ce qu’elle ne devienne pas quelque chose de pétrifié, de mort. » (Mao Zedong : « De la contradiction », Œuvres choisies, tome 1)
L’erreur des dogmatiques réside en ce qu’ils font de la vérité universelle du marxisme-léninisme ou, autrement dit, des principes fondamentaux du marxisme-léninisme, quelque chose de pétrifié, de mort.
Les dogmatiques déforment aussi, mais d’une autre manière, le marxisme-léninisme.
S’écartant de la réalité, ils imaginent des formules abstraites, vides de sens, ou imposent aux masses des expériences de l’étranger qu’ils reprennent telles quelles, ce qui a pour effet de restreindre la lutte des masses et de l’empêcher d’obtenir les résultats qu’on serait en droit d’escompter. Ne tenant pas compte du temps, du lieu et des conditions, ils s’accrochent à une seule forme de lutte sans comprendre que, dans quelque pays que ce soit, le mouvement révolutionnaire des masses populaires revêt des formes infiniment complexes, qu’il faut adopter en même temps les diverses formes nécessaires de lutte pour qu’elles se complètent les unes les autres, qu’ il faut remplacer les anciennes par de nouvelles lorsque des changements surviennent dans la situation, ou continuer d’utiliser les formes anciennes mais en leur donnant un contenu nouveau. Il s’ensuit donc que, souvent, ils s’écartent des masses et des alliés qu’ils pourraient se faire, et s’enfoncent dans le sectarisme ; il leur arrive, tout aussi souvent, d’agir avec témérité et de verser dans l’aventurisme.
Il est impossible à un parti dont l’organisme dirigeant a versé dans le dogmatisme, de saisir les lois du mouvement pratique de la révolution ; il restera forcément inerte sur le plan théorique et commettra erreur sur erreur sur le plan tactique. Un tel parti est incapable de conduire le mouvement révolutionnaire du peuple à la victoire.
En combattant le dogmatisme au sein du Parti et en mettant l’accent sur l’union de la vérité universelle du marxisme-léninisme avec la pratique concrète de la révolution chinoise, le camarade Mao Zedong a souligné que l’attitude marxiste-léniniste consiste à se servir de la théorie et des méthodes marxistes-léninistes pour procéder à des enquêtes et études systématiques et minutieuses de la situation environnante. Il a dit :
« Celui qui adopte cette attitude étudie la théorie marxiste-léniniste dans un but défini, celui d’allier la théorie marxiste-léniniste à la réalité du mouvement de la révolution chinoise, afin de trouver dans le marxisme-léninisme la position, les points de vue et les méthodes nécessaires pour résoudre les problèmes théoriques et tactiques de la révolution chinoise. Une telle attitude consiste à décocher sa flèche en visant un objectif bien déterminé. Cet ’objectif, c’est la révolution chinoise ; la ’flèche’, c’est le marxisme-léninisme. Et c’est pour atteindre cet ’objectif’ : la révolution en Chine et la révolution en Orient, que nous, communistes chinois, avons été chercher cette ’flèche’. Une telle attitude consiste à rechercher la vérité dans les faits. Les ’faits’, ce sont les choses et les phénomènes existant objectivement ; la ’vérité, ’c’est le lien interne, c’est-à-dire les lois qui les régissent ; la ’rechercher’, c’est étudier. Nous devons partir des conditions réelles dans le pays et au dehors, dans la province et au dehors, dans le district et au dehors, dans l’arrondissement et au dehors, en déduire les lois qui leur sont inhérentes et non imaginées par nous, c’est-à-dire trouver dans les événements qui se déroulent autour de nous le lien interne pour nous servir de guide dans l’action. Pour cela, nous devons compter, non sur notre imagination, sur l’élan d’un instant, sur la connaissance livresque, mais sur les faits existant objectivement, sur les matériaux minutieusement recueillis et, nous guidant sur les principes généraux du marxisme-léninisme, en tirer des conclusions justes. » (Mao Zedong : « Réformons notre étude », Œuvres choisies, tome III)
L’histoire du Parti communiste chinois, l’histoire de la révolution chinoise victorieuse, c’est l’histoire de l’union chaque jour plus étroite de la vérité universelle du marxisme-léninisme avec la pratique concrète de la révolution chinoise. Sans cette union, la victoire de la révolution chinoise aurait été inconcevable.
Esprit de principe et souplesse
« Une politique fidèle aux principes est la seule juste », c’est là une parole célèbre de Lénine. Si le marxisme a pu vaincre des courants opportunistes de toutes nuances et de tous genres et occuper une position dominante dans le mouvement ouvrier international, c’est parce que Marx et Engels s’ne sont tenus à une politique fidèle aux principes. Si le léninisme a pu continuer à vaincre des courants révisionnistes et opportunistes de toutes nuances et de tous genres, conduire la Révolution d’Octobre à la victoire et occuper, en une ère nouvelle, une position dominante dans le mouvement ouvrier international, c’est parce que Lénine, puis Staline, ont continué l’œuvre de Marx et d’Engels, parce qu’ils s’en sont tenus à une politique fidèle aux principes.
En quoi consiste une politique de principe ? En ce que tous les principes et mesures politiques que nous formulons et élaborons doivent être basés sur la position du prolétariat, sur ses intérêts fondamentaux, sur la théorie et les points de vue fondamentaux du marxisme-léninisme. Le parti du prolétariat ne doit pas borner son horizon à l’intérêt immédiat, il ne doit pas se laisser aller là où le pousse le vent et rejeter les intérêts fondamentaux ; il ne doit pas avoir pour seul souci de se plier aux événements du jour, approuvant tantôt ceci, tantôt cela, préconisant tantôt ceci, tantôt cela, prenant les principes pour un objet de troc. Ceci revient à dire que le parti du prolétariat doit maintenir son indépendance politique, se distinguer, sur les plans idéologique et politique, de toutes les autres classes ainsi que de leurs partis respectifs, se distinguer non seulement de la classe des propriétaires fonciers et de la bourgeoisie mais aussi de la petite bourgeoisie. Au sein du Parti, les marxistes-léninistes doivent se distinguer des opportunistes de droite ou « de gauche » qui reflètent toutes sortes d’idéologies non prolétariennes.
Certains qui, hier, signaient les Déclarations de Moscou, approuvaient les principes révolutionnaires fondamentaux qui y sont énoncés, en sont aujourd’hui à bafouer ces mêmes principes révolutionnaires. Ils n’ont pas plutôt signé la Déclaration de Moscou de 1960 et approuvé la conclusion portant que « les dirigeants de la Ligue des Communistes de Yougoslavie [ont] trahi le marxisme-léninisme » qu’ils commencent à traiter les renégats que sont Tito et consorts comme des frères, et des plus chers. Ils viennent d’approuver la conclusion disant que « l’impérialisme américain est le rempart principal de la réaction mondiale, le gendarme international, l’ennemi des peuples du monde entier », et déjà ils estiment que la destinée de l’humanité dépend de la « coopération », de la « confiance » et de l’ »accord » entre les chefs des deux Etats, Etats-Unis et Union soviétique. Ils ont approuvé les principes des Déclarations de Moscou régissant les rapports entre partis frères et entre pays frères, mais ont vite fait de les jeter par-dessus bord, dressant selon leur bon plaisir, au congrès de leur parti, un réquisitoire public contre un parti et un pays frères.
Ces gens-là répètent à tout bout de champ qu’il est inadmissible d’étendre les divergences idéologiques entre partis frères au domaine des relations économiques et des rapports entre Etats, alors qu’eux-mêmes déchirent à leur gré un grand nombre de contrats, économiques et techniques, passés entre pays frères, et vont même, en fait, jusqu’à rompre les relations diplomatiques avec un autre pays frère. Ils ont approuvé la conclusion des Déclarations de Moscou selon laquelle le révisionnisme est le principal danger dans le mouvement ouvrier international, et voilà qu’i les sont mis à propager sans retenue l’idée que « le dogmatisme est le principal danger ». Et les voilà lancés. Mais quel esprit de principe ont-ils, ceux qui agissent de la sorte ? De quels principes relève donc leur politique ?
Tout en s’en tenant à une politique de principe, le parti du prolétariat doit encore faire preuve de souplesse. Dans la lutte révolutionnaire, il serait erroné de nier la nécessité d’agir selon les circonstances et d’emprunter des détours pour mieux progresser. Les marxistes-léninistes se distinguent des opportunistes et des révisionnistes en ce que la souplesse qu’ils préconisent s’exerce dans le cadre de l’application de leur politique de principe, tandis que la souplesse selon les opportunistes et les révisionnistes consiste, en fait, à jeter la politique de principe par-dessus bord.
La souplesse basée sur l’esprit de principe n’est pas de l’opportunisme. Par contre, on risquera de verser dans l’opportunisme si on ne sait, sur la base du maintien des principes, user de la souplesse nécessaire et agir selon le moment, suivant les conditions concrètes, et de faire subir ainsi un préjudice injustifiable à la lutte révolutionnaire.
Le compromis est un point important de l’exercice de la souplesse.
Les marxistes-léninistes l’envisagent ainsi : Ils ne rejettent jamais les compromis qui s’avèrent nécessaires et sont favorables à la révolution, c’est-à-dire les compromis reposant sur les principes, mais ils n’admettront, à aucun moment, des compromis qui équivalent à des trahisons, c’est-à-dire des compromis qui sacrifient les principes.
Lénine l’a fort bien dit :
« Ce n’est pas sans raison que Marx et Engels sont considérés comme les fondateurs du socialisme scientifique. Ils étaient d’impitoyables ennemis de tous les phraseurs. Ils enseignaient que les problèmes du socialisme (y compris les problèmes de la tactique socialiste) doivent être posés de manière scientifique. Dans les années 70 du siècle dernier, alors qu’Engels analysait le manifeste révolutionnaire des blanquistes français, déserteurs de la Commune, il leur dit carrément que leur déclaration qui fanfaronne sur le ’pas de compromis’ était une phrase creuse. Il est impossible de jurer être contre tous les compromis. Ce qui importe, c’est de savoir, à travers tous les compromis, — dont parfois la nécessité s’impose par la force des circonstances, même au parti le plus révolutionnaire de la classe même la plus révolutionnaire, — maintenir, renforcer, aguerrir, développer les tactiques, l’organisation et la conscience révolutionnaires, la fermeté et la préparation de la classe ouvrière et de son avant-garde organisée, le Parti communiste. » (V. I. Lénine : « A propos des compromis », Œuvres, tome 30)
Comment un parti marxiste-léniniste qui réellement recherche la vérité en partant des faits, pourrait-il s’opposer en bloc à tout compromis ? L’éditorial « Léninisme et révisionnisme moderne » publié dans le premier numéro du Hongqi de cette année dit notamment : « Au cours de notre longue lutte révolutionnaire, nous, communistes chinois, nous avons maintes fois passé des compromis avec l’ennemi de l’intérieur comme de l’extérieur. Par exemple, nous avons fait des compromis avec la clique réactionnaire de Tchiang Kaï-chek, et également des compromis avec les impérialistes américains dans la lutte contre l’agression américaine et pour l’aide à la Corée, et bien d’autres encore. » Et plus loin : « C’est précisément d’après les enseignements de Lénine que nous, communistes chinois, distinguons entre les différents compromis, nous déclarant en faveur des compromis qui profitent à la cause du peuple et à la paix mondiale, et contre ceux ayant un caractère de trahison. Les faits sont clairs : ont précisément une idéologie réellement trotskiste ou relevant d’une variante du trotskisme ceux qui tombent tantôt dans l’aventurisme, tantôt dans le capitulationnisme. »
Comme on le sait, Trotski a joué un rôle des plus honteux au cours des négociations pour le traité de paix à Brest-Litovsk et dans toute l’histoire de la révolution russe et de l’édification de l’Union soviétique. Il était contre Lénine et contre le léninisme sur tous les problèmes essentiels. Il niait la possibilité de remporter la victoire de la révolution et de l’édification socialistes d’abord dans un seul pays. Dans les problèmes de la stratégie et de la tactique révolutionnaires, son absence totale d’esprit de principe se traduisait tantôt par un aventurisme « de gauche », tantôt par un capitulationnisme de droite. Dans l’affaire du Traité de Brest-Litovsk, il commença par préconiser aveuglément une politique aventuriste ; par la suite, il contrevint aux directives de Lénine en refusant de signer le traité de paix aux pourparlers de Brest-Litovsk, et, dans le même temps, informa traîtreusement la partie allemande que la République des Soviets s’apprêtait à cesser la guerre et à démobiliser. Ceci accrut l’arrogance de l’agresseur, et l’Allemagne posa des conditions encore plus draconiennes. Voilà ce que fut le trotskisme dans l’affaire du Traité de paix de Brest-Litovsk.
A présent, il en est qui s’obstinent à mettre dans le même sac les événements de Cuba et le Traité de paix de Brest-Litovsk, deux questions de nature totalement différente, pour établir une analogie historique dans laquelle ils se comparent à Lénine et qualifient de « Trotski » ceux qui se sont opposés à ce que la souveraineté d’un autre pays soit sacrifiée. C’est tout simplement absurde et ridicule.
Lénine avait entièrement raison à l’époque, de se prononcer pour la conclusion du Traité de paix de Brest-Litovsk. Son but était de gagner du temps, pour consolider la victoire de la Révolution d’Octobre .En 1936, le camarade Mao Zedong a énergiquement critiqué, dans « Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine », l’erreur de l’opportunisme « de gauche ». Parlant du Traité de Brest-Litovsk, il a dit : « Si, après la Révolution d’Octobre, les bolcheviks russes, se ralliant au point de vue des ’communistes de gauche’, avaient repoussé le traité de paix avec l’Allemagne, le pouvoir des Soviets qui venait de naître aurait risqué de périr. » (Mao Zedong : Œuvres choisies, tome I) Le cours des événements a confirmé toute la justesse des vues de Lénine et montré que la signature du Traité de paix de Brest-Litovsk était un compromis révolutionnaire.
Et les événements de Cuba ? C’est une tout autre histoire. Au cours des événements, le peuple cubain et ses dirigeants, décidés à défendre jusqu’à la mort la souveraineté de leur patrie, ont fait preuve d’un héroïsme magnifique et d’un esprit de principe élevé, ils n’ont versé ni dans l’aventurisme, ni dans le capitulationnisme. Lors des événements de Cuba, il en est qui, d’abord, ont versé dans l’aventurisme, pour tomber ensuite dans le capitulationnisme, voulant même faire accepter au peuple cubain des conditions humiliantes qui auraient signifié le sacrifice de sa souveraineté, nationale. Ils pensaient se servir du Traité de paix de Brest-Litovsk, signé par Lénine, pour se couvrir ; mais en usant de ce piètre artifice, ils n’ont réussi qu’à se dévoiler avec plus de netteté encore.
A propos des rapports entre l’esprit de principe et la souplesse, le camarade Liou Chao-chi, se basant sur l’expérience de la révolution chinoise, a exposé le problème de la façon suivante lors du VIIe Congrès du Parti communiste chinois :
« Notre souplesse est établie sur des principes déterminés. Sont erronés la pseudo-souplesse ne relevant d’aucun principe, la concession et le compromis outrepassant les principes, l’ambiguïté et la confusion sur les questions de principe. Les principes du Parti sont le critère et l’étalon auxquels se mesure tout changement dans la politique et la tactique. L’esprit de principe du Parti est le critère et l’étalon auxquels se mesure la souplesse. Ainsi, lutter pour le plus grand bien du plus grand nombre est pour nous, un principe immuable ; ce principe est le critère et l’étalon qui permettent de déterminer à l’occasion de chaque changement dans notre politique et dans notre tactique si celui-ci est juste. Tout changement conforme à ce principe est juste, et ne l’est pas tout changement qui n’y est pas conforme. » (Liou Chao-chi : Du Parti)
C’est ainsi que nous concevons le rapport entre l’esprit de principe et la souplesse, et nous estimons qu’une telle conception est marxiste-léniniste.
« Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » — Ce grand appel lancé il y a plus d’un siècle par Marx et Engels reste le principe que le prolétariat international se doit d’observer à jamais.
Le Parti communiste chinois, qui s’en est toujours tenu à l’unité du mouvement communiste international, considère qu’il est de son devoir sacré de la sauvegarder. Notre position sur cette question de l’unité du mouvement communiste international a été réaffirmée par le quotidien Renmin Ribao dans son éditorial du 27 janvier dernier. Il y est dit :
« Veut-on oui ou non l’unité du mouvement communiste international ? Recherche-t-on l’unité réelle ou la veut-on fictive ? Cette unité doit-elle être établie sur la base des deux Déclarations de Moscou ou sur celle du programme révisionniste yougoslave, ou est-ce ’l’unité’ sur autre chose encore ? En d’autres mots, veut-on en fin de compte aplanir les divergences et renforcer l’unité, ou élargir les divergences et créer la scission ? »
« Les communistes chinois, tous les marxistes-léninistes et l’humanité progressiste tout entière ont en commun le désir de sauvegarder l’unité et de s’opposer à la scission ; d’assurer une unité authentique et de s’opposer à l’unité fictive ; de défendre la base commune de l’unité du mouvement communiste international et de s’opposer à toute activité de sape contre elle ; de sauvegarder et de renforcer l’unité du camp socialiste et l’unité du mouvement communiste international sur la base des deux Déclarations de Moscou. »
Voilà l’attitude ferme, inébranlable du Parti communiste chinois à l’égard de l’unité du mouvement communiste international.
Maintenant, après avoir déclenché et organisé toute une suite d’attaques absurdes contre le Parti communiste chinois et d’autres partis frères, certains se mettent subitement à entonner l’air de l »’unité ». Mais leur « unité » est telle qu’elle leur réserve le droit d’injurier les autres, sans permettre à ces derniers ne fût-ce que de raisonner avec eux. En appelant à la « cessation de la polémique ouverte », ils entendent qu’il leur est permis d’attaquer les autres comme bon leur semble, tout en interdisant aux autres de leur répondre comme il se doit. Ils parlent d’unité mais continuent à la saper ; ils parlent de cesser la polémique ouverte mais poursuivent leurs attaques ouvertes. De plus, ils déclarent sur un ton menaçant que si ceux qui sont victimes de leurs attaques ne se taisent pas, « il faut continuer et même intensifier la lutte décisive contre eux ».
Cependant, ces gens recherchent effectivement l’unité avec la clique Tito. L’unité qu’ils veulent n’est pas celle du mouvement communiste international, mais l’unité avec la clique Tito ; l’unité qu’ils veulent, c’est l’unité sur la base du révisionnisme moderne représenté par la clique Tito ou l’unité sous le bâton de commandement de certains, et non pas sur la base du marxisme-léninisme et des Déclarations de Moscou. Ainsi, l’unité qu’ils ont à la bouche est en fait synonyme de scission. Sous l’enseigne de l’unité, ils cherchent à camoufler leurs véritables activités scissionnistes.
Le révisionnisme représente les intérêts de l’aristocratie ouvrière, et donc aussi les intérêts de la bourgeoisie réactionnaire. Les courants révisionnistes vont à l’encontre des intérêts du prolétariat, des masses populaires et de tous les peuples et nations opprimés. Depuis Bernstein, le marxisme-léninisme s’est trouvé à plus d’une reprise assailli par les courants révisionnistes et opportunistes qui, en leur temps, ont fait grand bruit. Mais l’histoire a prouvé que le marxisme-léninisme, qui représente les intérêts les plus fondamentaux du plus grand nombre, est invincible. Tous les révisionnistes et opportunistes qui ont défié le marxisme-léninisme révolutionnaire se sont effondrés, l’un après l’autre, devant la vérité et ont été rejetés par les masses. Bernstein a échoué, Kautsky aussi, puis Plékhanov, Trotski, Boukharine, Tchen Tou-sieou, Browder et les autres. Tout aussi arrogants et pleins de morgue insolente sont ceux qui lancent aujourd’hui de nouvelles attaques contre le marxisme-léninisme révolutionnaire, et, cependant, il est sûr qu’ils ne finiront pas mieux que les vieux révisionnistes et opportunistes s’sil demeurent imperméables aux conseils, s’ils s’obstinent à ne pas entendre raison.
D’aucuns ont recours à des pratiques indignes, diffamation et calomnie, provocation et diversion, et s’acharnent à provoquer une scission, mais l’écrasante majorité du peuple dans le monde est pour l’unité du mouvement communiste international et contre toute scission. Leurs activités scissionnistes, leurs attaques contre le Parti communiste chinois et d’autres partis frères, leurs activités visant à saper l’unité du camp socialiste et celle du mouvement communiste international sont contraires aux aspirations de l’écrasante majorité du peuple dans le monde et sont absolument impopulaires. Leur tactique de scission réelle et d’unité fictive est claire pour tous. Dans l’histoire, les scissionnistes, traîtres au marxisme-léninisme, ont tous fini dans l’ignominie. Nous avons conseillé à ceux qui machinent la scission de « retenir le cheval au bord du précipice », mais il s’en trouve encore parmi eux qui ne daignent pas nous écouter. Ils croient qu’ils ne sont pas encore « au bord du précipice » et ils ne sont pas prêts à « retenir le cheval ». Apparemment, ils brûlent encore d’envie de poursuivre leurs activités scissionnistes. Qu’ils continuent donc, puisqu’ils le veulent. Ils seront jugés par les masses, et par l’histoire.
Il y a actuellement dans le mouvement communiste international un phénomène fort amusant et généralisé. Qu’est-ce que c’est ? Eh bien, les héros qui prétendent avoir le monopole de la vérité marxiste-léniniste craignent comme le feu les articles écrits en réponse à leurs attaques par ces « dogmatistes », « sectaristes », « scissionnistes », « nationalistes » et « trotskistes » qu’ils flagellent impitoyablement. Ils n’osent pas publier ces articles dans leurs journaux et revues. Peureux comme la souris, et éperdus d’épouvanté, ils n’ont pas le courage de les laisser venir à la connaissance de leur propre peuple, et ils ont imposé un blocus aussi hermétique qu’une cloison étanche.
Ils ont même recours au brouillage, par de puissantes stations, pour empêcher leur peuple d’écoute nos émissions. Très chers amis et camarades qui ’détenez le monopole de la vérité, puisque vous pensez que nos articles sont totalement faux, pourquoi ne pas les publier tous et les réfuter ensuite, point par point, de façon à soulever l’indignation parmi votre peuple, indignation pour « l’hérésie » que vous appelez « dogmatisme », « sectarisme », « anti-marxisme-léninisme » ? Pourquoi n’osez-vous pas le faire ? Pourquoi ce blocus hermétique ? Vous craignez la vérité. Le spectre du « dogmatisme », le spectre du marxisme-léninisme authentique, hante le monde et vous menace. Vous n’avez pas confiance dans le peuple, et le peuple n’a pas confiance en vous ; vous vous détachez des masses ; c’est pourquoi vous craignez la vérité, et votre peur est telle qu’elle en devient ridicule.
Amis et camarades, si vous avez vraiment de la dignité, montrez-le, publions de part et d’autre tous les articles de critique du côté adverse, pour que le peuple de nos pays et du monde entier puisse les étudier et juger. D’ailleurs, c’est ce que nous faisons, et nous espérons que vous suivrez notre exemple. Nous ne craignons pas de publier votre littérature, dans sa totalité et in extenso. Nous publions tous les « chefs-d’œuvre » où vous déversez sur nous vos invectives, puis, en guise de réponse, nous les réfutons point par point ou brièvement. Des fois, nous nous bornons à publier vos articles sans les faire suivre de réponse, les laissant à la réflexion de nos lecteurs. N’est-ce pas encore assez en fait de justice et d’équité ? Vous, messieurs les révisionnistes modernes, oserez-vous ou non en faire autant ? Si vous avez vraiment de la dignité, vous oserez ; mais si vous avez mauvaise conscience et disposez de faibles arguments, si sous votre apparence terrible, vous êtes faibles en dedans, si, en affichant la force du taureau, vous êtes peureux comme la souris, alors vous n’oserez pas. Nous sommes sûrs que vous n’oserez pas. N’en est-il pas ainsi ? Donnez-nous donc une réponse. Le Parti communiste chinois estime qu’il existe une voie pour régler les divergences. C’est celle indiquée par les deux Déclarations de Moscou. Avant de terminer, nous tenons à citer un important passage des conclusions de la Déclaration de Moscou de 1957 :
« Après avoir échangé leurs opinions, les participants à la Conférence ont conclu que dans les conditions actuelles, parallèlement aux rencontres des dirigeants et à l’échange d’informations entre deux partis, il est utile d’organiser, en cas de besoin, des conférences plus larges des partis communistes et ouvriers pour examiner les problèmes actuels, pour échanger les résultats de leur expérience, pour prendre mutuellement connaissance de leurs opinions et de leurs positions, pour coordonner la lutte en vue des objectifs communs : paix, démocratie et socialisme. » (Déclaration de la Conférence des représentants des Partis communistes et ouvriers des Pays socialistes. 1957)
Et nous tenons également à citer quelques passages de la Déclaration de Moscou de 1960, où se trouvent définis les principes fondamentaux régissant les rapports entre partis frères :
« Alors que la réaction impérialiste rassemble ses forces pour la lutte contre le communisme, il importe particulièrement de raffermir par tous les moyens la cohésion du mouvement communiste mondial. L’unité et la cohésion décuplent la force de notre mouvement ; elles sont une sûre garantie que la grande cause du communisme progressera victorieusement et que toutes les attaques de l’ennemi seront repoussées.
« Les communistes du monde entier sont unis par la grande doctrine du marxisme-léninisme et par la lutte commune qu’ils mènent pour sa mise en œuvre. Les intérêts du mouvement communiste réclament l’observation solidaire par chaque parti communiste des appréciations et des conclusions élaborées en commun par les partis frères lors de leurs conférences quant aux tâches générales de la lutte contre l’impérialisme, pour la paix, la démocratie et le socialisme.
« Les intérêts de la lutte pour la cause de la classe ouvrière réclament une cohésion toujours plus étroite des rangs de chaque parti communiste et de la grande armée des communistes de tous les pays, leur unité de volonté et d’action A. voir pour souci de renforcer constamment l’unité du mouvement communiste international est le devoir international suprême de chaque parti marxiste-léniniste.
« Défendre résolument l’unité du mouvement communiste international sur la base des principes du marxisme-léninisme et de l’internationalisme prolétarien, n’admettre aucune action susceptible de saper cette unité — ce sont là des conditions obligatoires de la victoire dans la lutte pour l’indépendance nationale, la démocratie et la paix, pour le succès des objectifs de la révolution socialiste, de l’édification du socialisme et du communisme. Transgresser ces principes aurait pour effet d’affaiblir les forces du communisme.
« Les partis marxistes-léninistes sont tous indépendants et égaux en droits ; ils élaborent leur politique en partant des conditions concrètes de leur pays et en s’inspirant des principes du marxisme-léninisme ; ils se prêtent un soutien mutuel. Le succès de la cause de la classe ouvrière dans chaque pays exige la solidarité internationale de tous les partis marxistes-léninistes. Chaque parti est responsable devant la classe ouvrière, devant les travailleurs de son pays, devant l’ensemble du mouvement communiste et ouvrier international.
« En cas de nécessité, les partis communistes et ouvriers tiennent des conférences pour y examiner les problèmes de l’actualité, pour échanger leurs expériences et prendre connaissance de leurs opinions et positions respectives, pour parvenir à un point de vue unanime en procédant à des consultations et concerter les actions conjointes dans la lutte pour les buts communs.
« Lorsque, dans tel ou tel parti, des questions surgissent touchant à l’activité d’un autre parti frère, sa direction s’adresse à celle du parti correspondant ; en cas de nécessité, on procède à des rencontres et à des consultations.
« L’expérience et les résultats des rencontres entre représentants des partis communistes, qui ont eu lieu ces dernières années, notamment le bilan des deux plus grandes Conférences, celle de novembre 1957 et la présente réunion, montrent que, dans les conditions actuelles, de telles Conférences sont une forme efficace d’é change d’opinions et d’expériences, d’enrichissement collectif de la théorie marxiste-léniniste et d’élaboration de positions unanimes dans la lutte pour les objectifs communs. » (Déclaration de la Conférence des Représentants des Partis communistes et ouvriers, 1960)
Après qu’un parti eut, à son propre Congrès, attaqué ouvertement un autre parti frère, il y a plus d’un an, nous avons appelé à plusieurs reprises à régler les divergences entre partis frères conformément aux principes et méthodes susmentionnés, définis par les deux Déclarations de Moscou. Nous avons fait remarquer plus d’une fois qu’attaquer ouvertement et unilatéralement un parti frère, quel qu’il soit, ne contribue pas à la solution des problèmes ni à l’unité. Nous avons toujours proposé que les partis frères ayant des controverses et divergences entre eux cessent la polémique ouverte et reviennent aux consultations par voie intérieure, et que c’est plus particulièrement le Parti ayant déclenché les attaques qui devrait prendre l’initiative dans, ce sens. Telle reste notre position.
Dès avril 1962, le Comité central du Parti communiste chinois a informé le parti frère intéressé que nous appuyions sincèrement la proposition, formulée par certains partis frères, de convoquer une conférence des partis frères, estimant qu’il convenait d’envisager la convocation d’une conférence des représentants des partis communistes et ouvriers pour discuter des problèmes qui nous intéressent tous.
A ce moment déjà, nous avons souligné que pour convoquer une conférence des partis frères et pour qu’elle fût fructueuse, il était nécessaire en tout premier lieu de surmonter de nombreux obstacles et difficultés et d’effectuer un important travail préparatoire.
Nous espérions que les partis et pays frères ayant des controverses entre eux prendraient des mesures, fussent-elles minimes, pour aider à relâcher la tension et à restaurer l’unité, de manière à améliorer le climat et préparer les conditions nécessaires pour la tenue et le succès de la conférence.
Nous avons proposé à l’époque que les partis frères cessent leurs attaques ouvertes.
Nous estimions que des entretiens bilatéraux ou multilatéraux, selon les nécessités, entre partis frères, pour un échange de vues, contribueraient également au succès de la conférence.
Ces propositions, faites par nous en avril 1962 au parti frère intéressé, sont parfaitement raisonnables et conformes aux stipulations des Déclarations de Moscou concernant le règlement des divergences entre partis frères. Nous les avons déjà exposées à plusieurs reprises, et nous le faisons une fois de plus.
Dernièrement, des dirigeants de certains partis frères ont accepté nos propositions dans une certaine mesure. S’il y a là de la bonne volonté, si les paroles sont suivies par des actes, ce sera évidemment excellent, et c’est ce que nous avons toujours souhaité.
Nous maintenons que le mouvement communiste international doit s’unir. Il s’unira, sans aucun doute !
Lançons ensemble et haut :
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !
Nations et peuples opprimés, unissez-vous !
Marxistes-léninistes, unissez-vous !