La Correspondance internationale, 12 mai 1938

dolores_ibarruri_la_pasionaria.jpgNotre Espagne, l’Espagne des romances et des légendes, est un pays singulier, qu’il est difficile de comparer à aucun autre.

La fierté de son peuple, son courage devant la souffrance, sa vaillance devant des ennemis supérieurs, sa confiance en lui-même, son mépris de la mort, unis à un profond sentiment d’indépendance et de liberté, ont fait qu’à toutes les époques, lorsque les guerres d’invasion et de conquête, ou les guerres civiles, ensanglantèrent le sol de l’Espagne, des entrailles mêmes du peuple sont sortis des hommes qui, par leurs hauts faits, par leur courage, par leurs dons, par leur indomptable vaillance, sont passés à la postérité couvert de gloire et de popularité.

Des guérilleros, des francs-tireurs sans aucune formation militaire, deviennent, au feu des luttes quotidiennes, des généraux consommés et, avec des soldats aussi audacieux qu’eux-mêmes, défont les meilleures armées du monde.

Le peuple espagnol est une source inépuisable de courage et d’abnégation. Aux heures critiques pour la patrie, il s’est dressé pour lutter avec une vaillance admirable et offrir le sacrifice de sa vie avec une simplicité spartiate.

Ses navigateurs sillonnèrent l’océan Atlantique et découvrirent un monde nouveau. Ses soldats portèrent si haut le renom de l‘Espagne, ils la firent si grande et si puissante, que « le soleil ne se couchait jamais » dans son empire.

Ses écrivains, ses savants, ses artistes, la couvrirent de gloire. Ses fils et ses filles furent toujours un exemple magnifique d’héroïsme, de vaillance et d’abnégation.

De cette Espagne, de ce peuple admirable qui apporta au monde la science, la civilisation, l’art et la culture, les grands propriétaires féodaux, le clergé, la caste militaire aristocratique, les caciques, firent un peuple pauvre, triste et arriéré. Durant plusieurs siècles, vivant du souvenir de ses grandeurs passées, il alla en descendant l’échelle de la civilisation et du progrès.

Les héritiers, les descendants de ceux qui, ruinèrent l’Espagne, qui la disqualifièrent dans le concert des nations importantes du monde, pensèrent pouvoir continuer la politique esclavagiste de leurs ancêtres, Ils crurent que la domination et l’oppression auxquelles, durant des siècles, ils avaient soumis les masses populaires espagnoles, avaient ruiné leurs énergies, avaient fait d’elles un immense troupeau qu’il serait facile de domestiquer, de marquer au fer infamant de la domination fasciste.

Ils se trompaient. Les glorieuses traditions d’héroïsme du peuple restaient une réalité vivante sous les décombres de cette Espagne qui fut un jour reine du monde. Le soulèvement du groupe de généraux traîtres, alliés au fascisme étranger, fut comme le souffle qui dispersa les cendres sous lesquelles ardait la vaillance indomptable de l’âme populaire.

Et le monde stupéfait contempla un spectacle merveilleux. Un peuple pauvre, opprimé, arriéré, se dressa tel un géant et fit reculer ceux qui pensaient qu’il serait facile de lui imposer leur domination.

Les factieux avaient bien préparé le terrain. Deux années de gouvernements réactionnaires leur avaient permis d’occuper des positions maîtresses, de s’emparer des ressorts du pouvoir, d’avoir en main la majorité de l’armée.

Le 18 juillet 1936, tout l’appareil de l’Etat fut brisé. Le pouvoir fut dans la rue. Et c’est alors qu’on vit toute la grandeur de notre glorieux peuple, qui sut recréer l’appareil de l’Etat et donna ces légions d’hommes, ces légions de héros, qui défendent avec une si prodigieuse énergie le sol de leur patrie, leurs libertés, et le droit de la République espagnole que le fascisme tente d’étrangler…

C’était aux premiers jours de l’insurrection. Une part de l’Espagne saignait sous la sauvage emprise de la réaction triomphante. La surprise, la félonie des traîtres qui, au premier moment, se présentèrent en arborant le drapeau de la République, avaient semé le désarroi dans les masses populaires qui, indécises, avaient peine à comprendre de quoi il s’agissait. Les factieux profitèrent de cette confusion pour soumettre quelques provinces. Pourtant, ils n’y parvinrent pas sans que des groupes d’ouvriers, de paysans, d’intellectuels, de soldats, ne luttassent et ne mourussent en défendant la République, en défendant la démocratie.

Dans le reste de l’Espagne, en particulier là où l’éducation politique des masses était plus poussée, les travailleurs, attachés à la démocratie et à l’indépendance de l’Espagne, pleins de haine pour le fascisme, unis aux classes moyennes et à la petite bourgeoisie, se dressèrent en un élan de généreuse abnégation.

Les partis et les organisations syndicales appelèrent le peuple à la lutte, et le peuple répondit de manière unanime. Un groupe de militaires de métier, loyaux à la République, restés au côté du gouvernement, se mirent à la tête de des colonnes hétérogènes d’hommes et de femmes, d’enfants même, qui, brûlant d’Indignation, s’élancèrent à l’assaut des repaires des insurgés.

La caserne de la Montagne, le Campamento, Alcalda de Henares, furent les premières forteresses ennemies abattues par le peuple. Il y trouva des centaines de fusils qui servirent à armer les premières forces partant pour la Sierra de Guadarrama afin de contenir l’avance de l’ennemi qui, par les hauteurs de Leon et de Somosierra, tentait d’approcher de Madrid.

Tout était désorganisé. Le groupe de militaires loyaux ne suffisait pas pour encadrer les milliers de volontaires qui voulaient lutter, qui partaient sans armes pour les fronts, décidés à les arracher à l’ennemi ou à attendre qu’un camarade tombe et qu’ils puissent reprendre son fusil ou son escopette.

Durant plusieurs jours, la lutte resta indécise, confuse. Mais l’apparition d’avions italiens et allemands dans le ciel de l‘Espagne, l’aide délibérée de l’Italie et de l’Allemagne aux insurgés, apportèrent l’éclatante démonstration de ce qui l ne s’agissait pas d’un simple soulèvement réactionnaire, ni d’une mutinerie de caserne.

Il s’agissait de quelque chose de plus grave, de plus sérieux, de plus dangereux. Il s’agissait des pyrites de Huelva du mercure d’Almaden, du fer d’Euzkadi, des fruits et des huiles de Valence et d’Andalousie. C’étaient les Baléares, le Maroc, c’était la domination de la Méditerranée qui étaient en jeu !

C’est tout cela que convoitaient l’Allemagne et l’Italie, et il se trouva des hommes − qui se disent Espagnols − assez misérables et assez lâches pour ne pas hésiter à livrer ces richesses en échange de l’aide étrangère dans leur tentative pour soumettre le peuple espagnol au plus sombre des esclavages, à l ‘esclavage fasciste. Les traîtres n’appartenaient pas au peuple. Ils constituaient une caste fermée. Ils étaient les descendants de ces militaires, de ces aristocrates qui, durant la guerre d’indépendance de 1808, trahirent et livrèrent l’Espagne en se soumettant à Napoléon, tandis qu’à Baylen et à Gérone, à Saragosse et à Madrid, le peuple conquérait au prix de flots de sang la liberté et l’indépendance de son pays.

Le parti communiste fut le premier à sonner l’alarme.

Ce n’est pas seulement une guerre contre les fascistes espagnols − écrivait le Mundo Obrero, 0rgane central du parti communiste, quelques jours après l’insurrection − mais une nouvelle guerre d’indépendance. Et pour faire face aux unités militaires que le fascisme international envoie contre notre peuple, il faut que nous organisions notre propre armée.

Cette nécessité impérieuse de la lutte, notre gouvernement ne la comprit pas, comme ne la comprirent pas non plus les autres organisations et partis. La C.N.T. combattit de longs mois durant notre mot d’ordre de création de l’armée régulière. « L’Espagne est le pays des francs-tireurs, déclarait-on, et nous n’avons pas besoin d’armée. »

Aussi bien les ministres républicains qui se succédèrent au gouvernement que le socialiste Largo Caballero perdirent, par leur incompréhension, un temps précieux, qui nous eût été fort nécessaire.

Mais le parti communiste ne se contenta pas de lancer le mot d’ordre de la création d’une armée régulière. Il commença à l‘organiser, dans la mesure de ses possibilités, en créant le Ve Régiment.

Aux derniers jours de juillet 1936, immédiatement après la prise de la caserne de la Montagne, le parti communiste commença à organiser les milices populaires, formations d’un type entièrement original. Ce n’était pas encore l’armée régulière, mais c’en était l’embryon, le commencement d’une organisation militaire uniformisée, disciplinée, dotée d’un commandement régulier.

Tous les partis et toutes les organisations constituèrent leurs propres milices. La C.N.T., l’U.G.T., le parti socialiste, les partis républicains. Tous rivalisèrent d’ardeur pour donner des soldats, des hommes et des femmes pour les fronts.

En différents points de Madrid, des casernes furent organisées. Cet exemple fut suivi dans le reste de L’Espagne. On y vît accourir des hommes et des femmes de toutes les tendances, de tous les âges. Ils voulaient se battre…

Ils voulaient apprendre le maniement des armes, ils désiraient ardemment recevoir une instruction militaire, ils demandaient avec ferveur qu’ont les envoyât sur les fronts. Les militaires de métier se rendirent dans ces casernes pour y éduquer et préparer militairement les travailleurs. Les premiers bataillons de milices s’organisèrent. Certains d’entre eux furent bientôt populaires pour leur héroïsme, pour leur vaillance dans les combats, vaillance et héroïsme que le peuple exalta en de belles chansons. Ils se rendirent célèbres par leur mépris de la mort. Dans les fabriques comme au champs, dans les rues et sur les places, les ouvriers et les paysans, les enfants et les jeunes gens, entonnaient l’hymne des miliciens…

Les bataillons d’acier
En chantant vont à la mort…

En quelques jours, les milices populaires croissent rapidement. Le Ve Régiment forme les bataillons suivants :

« Loyal », « Jeunesses ouvrières et paysannes », « Octobre », Thaelmann », « Fer », « Lions rouges », « Balles rouges », « Boulangers », « La Plume », « Fédération des étudiants », « Asturies », « Condes », « Benito », « Leningrad », « Commune de Paris », « Commune de Madrid » « Marins de Cronstadt », « Jaen », « Lister », « P. U. A. » − toutes les glorieuses « compagnies de fer », numéros 1 à 33.

En plus de ces bataillons, le parti communiste constitue la « Colonne Mangada », la « Colonne Galan », où combat le « Campesino », qui est aujourd’hui l’un des chefs militaires les plus populaires, et la « Colonne Perea ». Certains des bataillons cités plus haut sont créés par les Jeunesses.

Aux côtés de ces forces constituées au sein du Ve Régiment et des Jeunesses, luttaient les colonnes de la C.N.T., de la F.A.I. et les milices du parti socialiste.

Les organisateurs des milices populaires ne se bornèrent pas à les former en unités de caractère militaire. Ils organisèrent en même temps un travail d’éducation politique, publiant des journaux dont certains, comme la Milicia Popular, atteignit bientôt un tirage quotidien de 75.000 exemplaires.

Chaque bataillon eut son journal. Dans les casernes et dans les tranchées, des journaux muraux furent créés. Les milices populaires les plus importantes et les plus remarquables étaient celles du Ve Régiment, et elles servirent d’exemple à celles créées par tous les partis et organisations. Ces milices organisèrent un Service militaire de santé et une Intendance qui servirent plus tard de modèles pour Les services de l‘armée. Elles organisèrent les premières bases d’une industrie de guerre, qui se mit à fabriquer des bombes, des munitions diverses, des autos blindées. On créa des ateliers fixes et volants pour la réparation des armes.

Des hôpitaux modèles, des maisons de repos, des sanatoria, des homes pour les orphelins de miliciens, des ateliers de couture, des écoles de préparation militaire technique, des centres de lutte contre l’analphabétisme, furent également créés. Des groupes d’admirables artilleurs furent formés. On organisa les premiers bataillons de cavalerie. On prépara les ouvriers et les paysans à entrer dans les écoles techniques supérieures.

C’est des milices du Ve Régiment que sortirent les premiers aviateurs. Ces hommes, qui jusque-là ne connaissaient que le maniement de leur antique charrue, tiennent aujourd’hui les commandes des avions républicains avec une adresse consommée et une maîtrise qui ne le cède en rien à celle des aviateurs sortis des écoles de préparation aéronautique des pays capitalistes.

Les premiers tankistes, les groupes d’« antitankistes », les « dinamiteros » (création originale de la guerre du peuple espagnol), le premier bataillon de femmes, les premières Centuries internationales, les groupes de francs-tireurs qui, dans le camp ennemi , ont mené et continuent à mener un admirable travail, luttant les armes à la main et sabotant les mines, les centrales électriques, les ponts, les chemins de fer, les fabriques, etc. − toutes ces formations furent préparées, organisées, éduquées dans les casernes du Ve Régiment.

Les milices réalisèrent un intense travail d’agitation et de propagande. Elles publièrent des centaines de milliers de manifestes, d’affiches. Elles organisèrent le travail de propagande dans le camp ennemi.

Elles assurèrent leur union avec les populations de l’arrière en organisant d’innombrables manifestations de propagande, des représentations théâtrales, cinématographiques, des émissions radiophoniques. Elles formèrent des brigades de choc pour aider les paysans lors des semailles et des moissons. Elles établirent d’étroites relations avec les ouvriers des fabriques. Elles devinrent l’âme même du peuple, ses animatrices, prêtes à tout pour le défendre.

Quatre bataillons des milices, « Leningrad », « Cronstadt », « Commune de Paris » et « Madrid », arrêtèrent l’avance de l’ennemi aux portes mêmes de la capitale de la République.

La création des commissaires politiques (délégués, comme ils s’appelaient dans les milices) fut la conséquence logique des caractères politiques particuliers des milices.

Le parti communiste, défenseur enthousiaste et dévoué du Front populaire, donna aux milices qu’il organisait un caractère d’unité bien marqué. Cependant, chaque jour qui passait faisait apparaitre plus clairement la nécessité de la création d’une armée régulière, d’autant plus que l’absence d’un commandement centralisé et les différentes tendances idéologiques qui dirigeaient et inspiraient tout le travail et la vie des milices, provoquaient parfois des heurts et des frictions bien propres à diminuer l’efficacité combative de nos forces.

Nos hommes luttaient sans plan organisé, contre des années puissantes, des chefs militaires sachant organiser et diriger la guerre. C’est ainsi que nous subîmes les défaites du Nord, les déroutes de Malaga et de Tolède. Chez nos soldats, tout était enthousiasme, courage, esprit de sacrifice, abnégation, mais aussi absence de moyens techniques. Chez l’ennemi, il y avait la science militaire, une discipline de fer, une organisation, un abondant matériel de guerre.

Instruites par les dures leçons des luttes de chaque jour, grâce aussi au dévouement des militaires professionnels et à l’aide de tous les partis et organisations, particulièrement du parti communiste, nos milices se transformèrent, au feu même des combats, en organisations militaires de plus en jour plus disciplinées, plus conscientes.

En même temps que les milices populaires, les unités militaires qui avaient subsisté après l’insurrection, se développaient puissamment, grâce aux renforts et à l’incorporation de nombreux volontaires, venus des villes et des champs combattre pour la défense des libertés populaires, L’existence parallèle des milices et de des restes de l’armée constituait un obstacle à la réalisation systématique de grandes opérations.

Le 21 octobre 1936, répondant à l’ardent désir de la majorité des milices, qui voulaient être considérées comme des unités régulières de l’armée, Largo Caballero publiait un décret incorporant à l’armée régulière toutes les milices qui existaient alors. Leurs chefs furent, mis sur un pied d’égalité avec les officiers de métier de l’armée.

L’incorporation des milices aux formations régulières eut pour effet de créer une armée d’une nature foncièrement différente de celle de l’armée espagnole d’avant l’insurrection fasciste. Les milices apportèrent à l’armée toute la sève, la vigueur et l’enthousiasme du peuple.

Le corps des commissaires politiques qui avait été l’âme et l’esprit des milices populaires, fut également incorporé à l’armée régulière, où, comme au sein des milices, les commissaires, par leur travail dévoué, héroïque, inlassable, font de chaque soldait, de chaque chef, un ferme combattant de la liberté et de la démocratie.

Tous les chefs et les officiers de l’Armée populaire régulière de l’Espagne savent qu’ils luttent non seulement pour l’indépendance de leur pays, pour libérer notre patrie de l’Invasion fasciste, mais aussi pour jeter les bases d’une Espagne nouvelle.

Tous savent qu’ils luttent pour qu’en Espagne il n’y ait plus de paysans sans terre, pour qu’on ne voie pas ressusciter les caciques, pour que les ouvriers jouissent d’une vie de dignité et de culture, pour que les femmes ne soient pas les éternelles esclaves, pour que soient abolis les castes et les privilèges d’une minorité.

L’armée est en marche. Et l’armée de l’Espagne républicaine n’est plus la vieille armée où les hommes étaient, tout juste bons à servir de chair à canon, une armée avec laquelle personne ne comptait en cas de guerre. Aucune armée du monde capitaliste n’offre le merveilleux spectacle que donne la nôtre. Sur la ligne même du feu, les milices de la culture se dépensent, sans compter pour lutter contre l’analphabétisme, et les hommes qui ont appris à lire et à écrire au front se comptent par milliers.

Nos soldats ne sont plus les miliciens des premières semaines, déguenillés, mal armés, indisciplinés, pleins d’héroïsme et dénués de préparation militaire. Ce sont des soldats redoutables qui unissent à leur vaillance et à leur héroïsme une préparation militaire poussée, une connaissance technique de la guerre qui leur a permis d’anéantir les divisions allemandes à Jarama, d’écraser les unités italiennes à Guadalajara, de conquérir Brunete, Villanueva del Pardillo, Villanueva de la Canada et tant d’autres localités.

Ce sont les soldats de l’armée régulière qui ont conquis Belchite, Quinto et Codo ; ce sont eux, les braves qui remportèrent la victoire de Teruel et qui résistent aujourd’hui avec sérénité à la furieuse offensive des forces fascistes.

Nous avons une armée, et nous pouvons dire avec un légitime orgueil que c’est une armée sortie du peuple et au service du peuple. Une armée qui est l’expression même du Front populaire. Une armée résolue à poursuivre les glorieux exploits de ses premières grandes victoires, une armée qui a une âme, une armée qui vit, une armée qui se bat aujourd’hui avec un héroïsme exemplaire pour l’Espagne, pour la démocratie, pour la paix du monde.

Nous avons créé cette armée en luttant non seulement contre les fascistes espagnols et leurs alliés allemands et italiens, mais aussi, chose plus douloureuse, contre l’indifférence et la trahison des pays qui se disent démocratiques.

Nous avons plus d’un demi-million d’hommes sous les armes. Nous avons la possibilité d’atteindre le million, Nous disposons de réserves inépuisables. En même temps que nous nous défendons, que nous défendons notre sol, nous avons créé une industrie de guerre aujourd’hui en plein développement.

Nous n’avions pas de tanks ; aujourd’hui nous avons des régiments de tanks et de chars d’assaut. Nous n’avions pas d’aviation ; nous en avons une aujourd’hui, et des pilotes capables de rivaliser avec les meilleurs du monde. Nous n’avions pas de moyens de transport ; nous avons aujourd’hui des milliers de camions qui circulent sur tous les fronts et toutes les routes d’Espagne. Nous n’avions pas d’artillerie ; nos artilleurs et nos batteries jouent aujourd’hui un rôle décisif dans les combats.

Nous avons réorganisé notre cavalerie, et nous avons aujourd’hui d’importantes unités de cette arme. Nous n’avions pas assez d’officiers, et en une année et demie de guerre de nouveaux cadres ont été formés, qui n’ont rien à envier aux hommes sortis des anciennes académies militaires.

La tradition n’a pas été rompue. L’Espagne continue à être une source inépuisable de héros. Nous ressentons une profonde fierté à l’idée que nous avons des hommes tels que le général Miaja, défenseur de la capitale de la République ; tels que le général Rojo, artisan de la victoire de Teruel ; tels qu’Hernandez Sarabia, Pozas, Cordon, Estrada, Burillo, Marquez, les frères Galan, Vivancos, chefs et officiers loyaux de notre armée : tels que Lister, Modesto, El Campesino, Carton, Toral, Durutti, Mera, et tant d’autres, dont les noms formeraient une liste interminable. Nous sommes fiers de l’héroïsme obscur et silencieux de nos commissaires qui sont « les premiers à avancer, les derniers à reculer ».

Nous avons aujourd’hui plus confiance que jamais dans le triomphe de notre cause. Notre confiance s’appuie nom seulement sur le sentiment de la justice de la cause que noms défendons, mais aussi sur la force de notre armée, sur notre potentiel militaire. Nous combattons à l’avant-garde de la lutte de la démocratie mondiale contre le fascisme. Les sacrifices ne nous importent pas. Nous souhaitons seulement que les pays qui se sont contentés jusqu’ici de nous témoigner une admiration platonique, comprennent la responsabilité historique qui pèse sur eux et se décident une fois pour toutes à mettre un terme à leur politique de concessions et de tergiversations face aux fanfaronnades du fascisme. Le fascisme n’est fort que pour autant que ses adversaires se montrent faibles.

L’Espagne donné l’exemple. Notre peuple montre aux démocraties le chemin qui conduit à la victoire.


Revenir en haut de la page.